La trachéotomie est l’ouverture de la trachée cervicale suivie de la
mise en place d’une canule.
Elle est destinée à réaliser un courtcircuit
des voies aériennes supérieures.
Jadis intervention
chirurgicale d’urgence codifiée par Chevallier-Jackson, elle est
maintenant une intervention réglée, pratiquée dans la majorité des
cas sur un patient bénéficiant d’une intubation trachéale.
Les complications de la technique, la multiplication des indications en
milieu de réanimation ont permis le développement de techniques
moins invasives, ne nécessitant pas d’ouverture chirurgicale.
Ces
techniques, dites de trachéotomie percutanée, ont connu un
développement important en milieu de réanimation.
Elles sont
actuellement encore peu pratiquées par les spécialistes oto-rhinolaryngologistes
(ORL).
Les deux techniques sont étudiées avant
d’envisager leurs indications et les complications respectives.
Trachéotomie chirurgicale
:
A - TRACHÉOTOMIE DE L’ADULTE
:
1- Trachéotomie réglée
:
Le type en est la trachéotomie réalisée chez un patient dont l’état
clinique nécessite une assistance respiratoire pendant une durée telle
qu’une intubation nasotrachéale ne peut être maintenue.
* Position de la tête du malade
:
La déflexion de la tête et l’hyperextension cervicale sont nécessaires
pour bien dégager la trachée. Un billot ou une alèse roulée est glissé
sous les épaules, après s’être assuré de l’absence de traumatisme du
rachis.
Il faut toujours vérifier que l’occiput repose sur la table.
* Champ opératoire
:
Le cou et la région présternale sont désinfectés.
Quatre champs sont
nécessaires. Ils doivent laisser libre la région médiane du cou depuis
le cartilage thyroïde jusqu’au sternum.
Après avoir disposé le
matériel chirurgical sur la table, l’opérateur effectue le choix de la
canule et vérifie son fonctionnement.
* Technique opératoire
:
+ Incision cutanée
:
Deux types peuvent être réalisés.
– L’incision horizontale arciforme est pratiquée dans un pli du
cou.
Elle est longue d’environ 4 à 5 cm à 3cm au-dessus de la
fourchette sternale.
Elle est actuellement la plus utilisée car elle laisse
une cicatrice peu visible.
Elle permet un abord cervical aisé et peut
être prolongée en cas de geste chirurgical et viscéral associé (cancer pharyngolaryngé).
– L’incision verticale strictement médiane du cricoïde à la région
sternale demeure utilisée surtout en cas de trachéotomie d’urgence
ou en cas de traumatisme laryngotrachéal ouvert.
Elle laisse une
cicatrice inesthétique, adhérant très souvent à la trachée.
+ Dissection chirurgicale
:
– Section des muscles peauciers.
Les veines jugulaires antérieures sont repérées et les muscles soushyoïdiens
dégagés sur plusieurs centimètres.
L’hémostase est
vérifiée.
– Dissection musculoaponévrotique.
La dissection qui jusqu’à ce temps est horizontale devient verticale.
La loge viscérale est ouverte au niveau de la ligne blanche en restant
strictement médiane. Les muscles sous-hyoïdiens, sterno-cléidohyoïdiens
et sternothyroïdiens sont refoulés latéralement à l’aide des
écarteurs.
– Découverte et dissection de l’isthme.
Le bord supérieur de l’isthme est repéré dans la région souscricoïdienne.
On décolle l’isthme de la face antérieure de la trachée.
Après avoir passé un dissecteur, l’isthme est sectionné de
haut en bas entre les deux pinces.
L’hémostase est assurée par une
ligature appuyée à l’aide d’un fil serti résorbable.
– Ouverture trachéale.
La trachée est exposée, le corps thyroïde est refoulé, l’hémostase est
complétée.
L’ouverture doit être réalisée entre le deuxième et le
quatrième anneau trachéal après s’être assuré du bon
fonctionnement de l’aspiration.
Une ouverture trop haute expose à
la sténose sous-glottique et une ouverture trop basse à des
complications vasculaires.
L’incision peut être de plusieurs types :
– incision verticale, simple, médiane qui favorise les risques de
fracture des anneaux trachéaux lors des changements de canule ;
– taille d’une pastille trachéale, médiane, à proscrire chez
l’enfant ;
– taille de volets, soit en « H », soit à charnière inférieure.
Les
volets, surtout s’ils sont repérés par un fil transfixiant, facilitent
les changements de canule.
Pendant l’ouverture, on protège
les voies aériennes de tout passage sanguin grâce à l’aspiration.
Les incisions verticales sont toujours réalisées de bas en haut et
non de haut en bas pour éviter toute blessure vasculaire au niveau médiastinal supérieur.
* Mise en place de la canule
:
Dans ce type de trachéotomie, l’anesthésiste-réanimateur enlève la
sonde d’intubation et la canule de trachéotomie est mise en place.
Le ballonnet en est gonflé.
En l’absence de complication
hémorragique, il doit être dégonflé 6 à 8 heures après l’intervention.
* Fermeture
:
Après révision de l’hémostase, elle est réalisée en un seul plan.
En
aucun cas elle ne doit être hermétique, afin d’éviter un emphysème
sous-cutané.
Ce type de trachéotomie, chez un patient longiligne, intubé, est un
geste simple.
Il n’en est malheureusement pas toujours ainsi.
2- Trachéotomie difficile
:
Les conditions anatomiques : sujet obèse, cou court, affections
rhumatismales limitant les mouvements du rachis, obstruction
tumorale laryngée en cas de cancer des voies aériennes supérieures,
rendent parfois l’intervention difficile, tant dans le temps
anesthésique que dans le geste chirurgical.
* Anesthésie
:
+ Artifices d’intubation
:
L’intubation est presque toujours réalisable si l’équipe anesthésique
est entraînée et si l’on dispose d’un fibroscope bronchique, ou dans
certains cas, d’un bronchoscope rigide (tumeur laryngée ou
trachéale).
En l’absence de ces deux éléments favorables, la
trachéotomie peut être réalisée sous anesthésie locale.
+ Anesthésie locale
:
L’anesthésie locale a pour but d’éviter toute réaction liée à la
douleur.
Deux zones sont douloureuses : la peau et le corps thyroïde.
Plusieurs boutons cutanés sont pratiqués : deux médians (cricoïde,
région sus-sternale), deux latéraux (à mi-chemin de la ligne cricoïdemanubrium
sternal et au niveau des bords antérieurs des muscles
sterno-cléido-mastoïdiens).
Lorsque la dissection atteint l’isthme du
corps thyroïde, une nouvelle injection est pratiquée.
Enfin, avant
l’ouverture de la trachée, et afin d’éviter un violent accès de toux,
une injection intratrachéale de 1 à 2 cm3 est nécessaire.
Dans tous
les cas, la présence de l’anesthésiste est indispensable : il surveille le
malade (monitorage) et il peut l’oxygéner.
* Temps chirurgical
:
+ Règles
:
L’intervention obéit aux même règles que pour la trachéotomie
classique.
Cependant, le caractère de l’urgence (asphyxie), les
anomalies acquises (antécédents d’irradiation) ou congénitales
(anomalie vasculaire, tronc brachiocéphalique barrant la trachée)
peuvent conduire à pratiquer une ouverture très haute, souscricoïdienne.
Dans ces cas, si la trachéotomie doit être laissée en
place pendant une période assez longue, il faut reprendre
l’intervention pour placer la canule dans une position correcte qui
évite les complications.
Cette nécessaire reprise est discutée par
certains.
B - TRACHÉOTOMIE DE L’ENFANT
:
Le faible diamètre de la trachée, sa mollesse et sa mobilité latérale
rendent l’intervention délicate.
1- Anesthésie
:
Le geste chirurgical est presque toujours réalisé chez un enfant
intubé, soit par une sonde d’intubation, soit par un tube bronchoscopique qui rigidifie la trachée et l’immobilise.
2- Incision et dissection
:
L’enfant doit avoir la tête parfaitement immobile en position
médiane et en hyperextension légère.
L’incision est verticale le plus
souvent.
Après dissection des plans superficiels, plus épais que chez
l’adulte, commence la dissection des plans musculaires.
Il faut dans
tous les cas rester strictement médian et pour ce faire éviter le
recours aux écarteurs qui entraînent une latéralisation.
Ils sont
remplacés par une paire de pinces de type Kocher, qui soulève et
écarte chaque plan une fois qu’il a été repéré.
Le repérage au doigt
de la trachée est indispensable tout au long de la dissection afin de
ne pas prendre un axe carotidien pour la trachée.
Chez l’enfant, l’isthme thyroïdien de petite taille peut être facilement
refoulé vers le haut ou vers le bas.
3- Ouverture trachéale
:
Comme chez l’adulte, elle se fait entre le deuxième et le quatrième
anneau.
La résection trachéale est contre-indiquée. Une incision en « I » avec repérage des berges par un fil est la plus courante.
La
mise en place de la canule obéit aux même règles que chez l’adulte.
On place une canule souple, moins traumatisante que les classiques
canules en argent.
Ces canules ne comportent pas de ballonnet et
exigent une hémostase parfaite.
Un examen fibroscopique permet
de vérifier que le tube de trachéotomie ne dépasse pas la carène.
C - CANULES DE TRACHÉOTOMIE
:
Le choix de la canule de trachéotomie est un facteur essentiel dans
la prévention des sténoses.
L’utilisation de nouveaux matériaux et
la réalisation de ballonnets basse pression ont permis une
diminution importante des complications sténosantes.
1- Types
de canules :
Selon qu’il s’agit de réaliser un court-circuit des voies aériennes, de
permettre une ventilation assistée ou d’éviter des fausses routes en
cas de déglutition, le choix du modèle est différent.
* Canules à ballonnet
:
Le gonflement intratrachéal du ballonnet assure l’étanchéité pour
une ventilation assistée.
Le risque majeur est que la pression exercée
par le ballonnet sur la paroi trachéale soit trop élevée, entraînant
une ischémie, ou que le gonflement soit asymétrique, ce qui désaxe
la canule et peut provoquer une ulcération ou un granulome de la
paroi.
La réalisation de canules en polychlorure de vinyle (PVC), en
silicone, la mise sur le marché de ballonnets basse pression ont
permis de diminuer les accidents traumatiques.
* Canules sans ballonnet
:
Ces canules sont utilisées lorsque la ventilation assistée n’est pas
indispensable et qu’il n’y a aucun risque de fausse route.
Chez
l’adulte, on utilise le plus souvent une canule avec une chemise
interne.
Celle-ci rétrécit un peu le diamètre de la lumière
respiratoire.
L’ablation en est aisée, sans aucun risque, et permet le
nettoyage des sécrétions qui viennent souiller la canule sans être
obligé de pratiquer une décanulation complète.
Les matériaux utilisés sont multiples ; les plus anciens sont en argent
ou en acrylique rigide.
Actuellement, on leur préfère le PVC et la
silicone souple, mieux tolérés par la muqueuse trachéale.
* Canules fenêtrées
:
Elles sont destinées à permettre à l’air de passer par les voies
aériennes supérieures.
Lorsqu’elles sont munies d’une soupape, l’air
pénètre dans la trachée à l’inspiration par la canule et passe au
niveau des voies aériennes supérieures lors de l’expiration, ce qui
autorise la phonation.
La soupape peut être obturée afin de vérifier
la bonne perméabilité des voies aériennes supérieures.
Le risque majeur de ce type de canule est la formation de
granulomes inflammatoires au niveau de la fenêtre, et tout
particulièrement si celle-ci n’est pas bien en regard de la lumière
trachéale.
Ce tissu de granulation peut d’ailleurs obturer la fenêtre
et gêner la mise en place de la chemise interne.
Les matériaux utilisés sont de même type que pour les canules non
fenêtrées.
2- Choix de canules
:
* Chez l’adulte
:
En l’absence de nécessité de rendre les voies aériennes étanches, il
faut privilégier les canules avec une chemise interne.
Le calibre doit être le plus grand possible afin d’éviter les
mouvements du bec de la canule à l’intérieur de la trachée.
La longueur doit être adaptée à l’anatomie du sujet.
Un contrôle fibroscopique est parfois utile afin de vérifier qu’une canule longue
ne traumatise pas la carène ou ne vient pas intuber la bronche
souche droite.
Les variations anatomiques individuelles incitent à privilégier les
canules souples dont la courbure s’adapte à l’anatomie des sujets, et
ce d’autant que les canules souples ont souvent des collerettes
réglables.
* Chez l’enfant
:
Les canules souples en silicone ou en PVC sont utilisées de
préférence aux canules en argent.
Du fait du faible diamètre de la
trachée, elles ne possèdent pas de chemise interne, ce qui implique
une surveillance et des soins de canule très réguliers.
Trachéotomie percutanée
:
Shelden, en 1957, fut le premier à décrire une technique de
dilatation progressive de la trachée à partir d’une puncture cutanée
et trachéale.
Ciaglia en 1985, Griggs en 1990, Fantoni en 1985, reprenant le
principe de la technique de Schelden, apportèrent des modifications
que les fabricants de dispositifs médicaux commercialisèrent sous la
forme de kits.
Toutes ces techniques ont en commun un repérage
cutané des anneaux trachéaux, une puncture ou une incision
cutanée, une puncture trachéale à l’aide d’une aiguille montée sur
un cathéter, une vérification à l’aide d’une seringue de la pénétration
trachéale, la mise en place d’un fil dans la trachée et
l’agrandissement de l’ouverture trachéale selon plusieurs
techniques.
A - TECHNIQUE DE CIAGLIA :
DILATATION PROGRESSIVE
Ciaglia réalise une incision cutanée verticale et un repérage trachéal.
Après passage du fil guide, les tubes dilatateurs sont utilisés jusqu’à
ce que le diamètre de l’ouverture trachéale permette la mise en place
de la canule qui est alors insérée.
Un kit prêt à l’emploi est
commercialisé par Cook France.
B - TECHNIQUE DE GRIGGS :
DILATATION PAR FORCEPS
Une pince de Kelly, spécialement usinée, coulisse le long du fil
guide.
L’ouverture de la pince permet de dilater les tissus souscutanés
et l’orifice trachéal.
Une canule montée sur un obturateur
est passée dans la trachée.
Le fil guide et l’obturateur sont retirés
lorsque la canule est en place.
Un kit est commercialisé par Portex
France.
Pour ces deux techniques, l’utilisation d’un contrôle fibroscopique
au cours de l’intervention est devenue la règle.
Il permet de
vérifier le caractère médian de la puncture trachéale, sa position par
rapport au cricoïde, l’absence de traumatisme de la paroi postérieure
de la trachée.
C - TECHNIQUE DE FANCONI :
TRACHÉOTOMIE TRANSLARYNGÉE
Comme pour les autres techniques, un fil guide est inséré dans la
trachée.
Celui-ci, après avoir été repéré par le fibroscope ou un
bronchoscope, est extériorisé par la cavité buccale.
Une canule de
trachéotomie avec dilatateur intégré conique est nouée au fil guide.
Une traction est exercée sur le fil au niveau cervical, un contreappui
permet d’extérioriser le dilatateur conique, un mandrin
obturateur permet de positionner la canule de trachéotomie qui est
alors fixée.
Incidents et accidents
postopératoires :
A - PÉRIODE PÉRIOPÉRATOIRE
:
Au décours de la trachéotomie et dans les 24 premières heures, une
surveillance rapprochée est indispensable afin de dépister des
complications qui, pour certaines, peuvent mettre en jeu le pronostic
vital.
1- Hémorragie
:
L’hémorragie postopératoire est le plus souvent veineuse, le
saignement étant favorisé par la toux.
Une compression en cas de
trachéotomie percutanée ou un méchage en cas de trachéotomie chirurgicale est le plus souvent suffisant.
En cas d’échec, une reprise
chirurgicale pour hémostase est indispensable.
2- Emphysème sous-cutané cervical
:
En cas de trachéotomie chirurgicale, il est provoqué par une
dissection trop large des tissus cervicaux, associée à une fermeture
hermétique.
En cas de trachéotomie percutanée, il peut être
révélateur d’un faux trajet.
3- Reprise rapide de la dyspnée
:
* Problème mécanique
:
La canule ne remplit pas sa fonction car elle n’est plus en place.
Ce
fait n’est pas rare chez le sujet obèse au cou épais.
La canule un peu
courte s’est déplacée lors des mouvements cervicaux.
Le diagnostic
repose sur des signes simples : le patient retrouve sa voix,
l’aspiration est impossible, l’emphysème cutané se développe, la
dyspnée se majore.
Il faut enlever la canule et la remettre en place
en prenant soin d’utiliser une canule plus longue.
Cette remise en
place doit se faire dans d’excellentes conditions d’éclairage afin de
visualiser l’orifice trachéal.
On peut s’aider d’un fibroscope qui
permet de voir la lumière trachéale et sert de mandrin à la canule.
* Obturation de la canule
:
La canule est en place mais elle est obturée. Un bouchon est
vraisemblablement responsable de la dyspnée.
Il peut siéger à
l’intérieur de la canule.
L’ablation de la canule interne permet de
lever l’obstacle.
Il peut être trachéal et le diagnostic se fait lors d’une
endoscopie à travers la canule.
L’aspiration et la toilette trachéale
sont nécessaires.
* Pneumothorax
:
Lorsque tout facteur mécanique a été éliminé, il faut évoquer un
pneumothorax.
Celui-ci est plus fréquent chez l’enfant que chez
l’adulte.
Son incidence a beaucoup diminué depuis que le geste
chirurgical a été pratiqué sous intubation.
Deux facteurs essentiels sont responsables : une ventilation à haute
pression, source de rupture alvéolaire, et la dépression médiastinale importante liée à la dyspnée qui favorise la pénétration de l’air dans
le médiastin lors de la dissection des plans trachéaux.
Le diagnostic
repose sur l’auscultation pulmonaire et la radiographie ; une
exsufflation est nécessaire.
* Dysphagie
:
Une dysphagie est fréquente dans les premières heures.
Elle régresse
rapidement.
En l’absence de complication, si le patient est porteur d’une canule
à ballonnet, celui-ci doit être rapidement dégonflé afin d’éviter des
phénomènes ischémiques de la muqueuse trachéale, sources de
sténose ultérieure, mais aussi afin d’éviter une compression
oesophagienne qui aggrave la dysphagie.
B - PÉRIODE POSTOPÉRATOIRE
:
Pendant toute la période où le patient demeure trachéotomisé, des
complications peuvent se manifester.
1- Hémorragie
:
Un saignement artériel rouge doit impérativement faire évoquer une
ulcération du tronc artériel brachiocéphalique par la canule.
Le
diagnostic est évoqué sur une expectoration sanglante par la canule
et la constatation de mouvements pulsatiles de cette canule.
L’association de ces deux signes est un facteur prémonitoire de
rupture.
Il faut éviter l’inondation bronchique par la mise en place
d’une sonde à ballonnet, et discuter avec le chirurgien vasculaire
d’un geste chirurgical précédé d’une exploration radiologique.
2- Reprise de la dyspnée
:
La constatation de troubles respiratoires caractérisés par une
dyspnée aux deux temps traduit un obstacle trachéal. Un bouchon
est souvent responsable de ce phénomène.
Plus rarement, la
formation de tissus de granulation vient obstruer le bec de la canule,
ce qui justifie une ablation de ces granulations et le changement de
la canule.
3- Fistule oesotrachéale
:
Une toux lors de la déglutition, des épisodes infectieux bronchiques
à répétition, font évoquer une fistule.
Cette complication est devenue
rare.
Liée à une nécrose ischémique de la paroi trachéale, elle
apparaît chez des sujets qui ont été pendant une longue période
porteurs d’une sonde à ballonnet gonflé.
Le diagnostic est confirmé
par la trachéoscopie et l’oesophagoscopie.
Les fistules de petite taille
sont difficiles à mettre en évidence.
L’utilisation de colorants peut
être d’un appoint certain.
4- Infection
:
Pendant toute la durée de la période où le patient est trachéotomisé,
des infections bronchiques peuvent apparaître, avec fièvre et opacité
pulmonaire à la radiographie.
Des soins réguliers dispensés avec
une asepsie rigoureuse permettent de diminuer la fréquence des
infections qui relèvent d’un traitement antibiotique adapté.
C - INCIDENCE DES COMPLICATIONS SELON LES
TECHNIQUES UTILISÉES :
P Dulguerov et al ont réalisé en 1999 une méta-analyse comparant
les complications des trachéotomies chirurgicales et des
trachéotomies percutanées.
Dans la mesure où les groupes étaient
hétérogènes, les conclusions sont très nuancées : les techniques
percutanées n’entraînent pas moins de complications opératoires et
postopératoires que la technique chirurgicale.
Cette méta-analyse a
été complétée par les mêmes auteurs, par une étude en double
aveugle, comparant à nouveau la technique percutanée à la
trachéotomie chirurgicale : que ce soit en période périopératoire ou
en période postopératoire, le taux de complications était plus
important pour les techniques percutanées.
Il s’agissait
essentiellement de complications minimes.
Dans tous les cas, la
morbidité est très faible dans les deux techniques.
PL MacCallum a réalisé une comparaison des techniques
percutanées, chirurgicales et translaryngées.
Il conclut à une plus
grande sécurité et un coût moins élevé en faveur des techniques
percutanées ou translaryngées, ce qui est confirmé par M Heikkinen.
Soins postinterventionnels
:
Des soins infirmiers précis, tout particulièrement chez l’enfant, sont
le meilleur garant de l’absence de complication.
L’ouverture de la
trachée entraîne une modification de la muqueuse trachéale
(destruction des cils vibratiles, métaplasie malpighienne) et une
infection de la trachée.
Ces deux phénomènes favorisent la
suppuration locale et la stagnation des sécrétions, sources de
bouchons trachéaux.
Les soins locaux visent à minimiser les effets
de ces modifications.
A - HUMIDIFICATION
:
Elle est indispensable.
Elle est assurée par des aérosols réguliers, le
recours éventuel à un nez artificiel, fourni avec certaines canules,
voire l’instillation de sérum physiologique.
B - ORIFICE CUTANÉ DE LA TRACHÉOTOMIE
:
Il est nettoyé tous les jours, voire deux fois par jour, afin d’éviter la
macération et la stagnation périorificielle des sécrétions.
C - ASPIRATION TRACHÉALE
:
Elle est indispensable.
Elle est pratiquée avec le maximum d’asepsie,
en ayant recours à des sondes souples, non traumatiques.
La
pression d’aspiration ne doit pas être trop élevée pour éviter de
traumatiser la muqueuse.
D - CHANGEMENT DE CANULE
:
Il est effectué à un rythme variable selon la technique utilisée : à la
48e heure pour la technique chirurgicale, à une date plus tardive
pour les autres techniques, environ 7 jours pour la technique
percutanée.
Le rythme ultérieur de changement est fonction de
l’importance des sécrétions et des épisodes infectieux.
Ce
changement doit être effectué la première fois par le chirurgien, dans
de bonnes conditions de visibilité.
En cas de difficulté, il peut avoir
recours aux artifices précédemment décrits.
Décanulation
:
Celle-ci intervient lorsque tout obstacle sur les voies respiratoires a
été levé et lorsque la ventilation peut être assurée par le patient.
Une canule fenêtrée avec clapet mise en place pendant 24 heures,
permet de s’assurer que la canule peut être enlevée.
L’ablation est
réalisée en début de journée, ce qui permet une meilleure
surveillance.
Un simple pansement sec est placé sur l’orifice.
La
fermeture intervient en quelques jours.
Dans les rares cas où il
persiste une fistule cutanéotrachéale, un geste chirurgical ultérieur
permet de fermer cette fistule.
Chez l’enfant qui a été porteur d’une canule pendant de longs mois,
l’ablation de celle-ci est parfois responsable de syndrome
asphyxique, dit de panique.
Il faut préparer l’enfant à la décanulation, grâce à une canule fenêtrée, et ne parler de panique
que lorsque l’on s’est assuré qu’il n’y a aucun obstacle
laryngotrachéal.
Sténose post-trachéotomie
:
Cette complication redoutable est devenue moins fréquente du fait
des améliorations du matériel, des conditions de soins et du geste
chirurgical mieux maîtrisé.
Les facteurs responsables sont multiples.
Les principaux sont :
– un geste chirurgical mal conduit (ouverture trop haute, source de
nécrose et de sténose cricoïdienne ; ouverture trop large ou
latéralisée, source d’effondrement des anneaux trachéaux) ;
– des soins non adaptés (aspirations trop fréquentes, brutales, avec
des sondes rigides) ;
– une canule à courbure mal adaptée ou à ballonnet trop gonflé.
A - CIRCONSTANCES D’APPARITION
:
La sténose peut se révéler dans deux circonstances :
– elle est découverte lors d’un examen systématique laryngotrachéo-bronchique après décanulation, chez un sujet qui a été
trachéotomisé pendant une longue période ;
– elle est suspectée lorsque, à distance de l’ablation de la canule, le
sujet présente une dyspnée constante qui s’aggrave.
B - ASPECTS ENDOSCOPIQUES
:
Ils sont variés selon le siège de la sténose.
Des associations sténotiques sont possibles.
Une sténose sous-glottique est secondaire à une trachéotomie trop
haute qui a entraîné une nécrose infectieuse du cricoïde avec
réaction inflammatoire.
Au niveau trachéal, la lésion peut être sus-canulaire, réalisant un
éperon orificiel avec effondrement de l’anneau trachéal, sous-orificiel
au niveau du bec de la canule entraînant souvent une sténose en
virole.
Dans tous ces cas, le siège exact de la sténose et son étendue sont
précisés par l’examen endoscopique, avant tout traitement.
Une
nouvelle trachéotomie doit être évitée à moins d’asphyxie, et un
geste chirurgical approprié tel qu’une résection-anastomose doit être
pratiqué rapidement.
Indications : trachéotomie
chirurgicale versus trachéotomie
percutanée
Les progrès de la réanimation, l’amélioration de la qualité des
matériels sont à l’origine de la diminution importante des
complications de la trachéotomie chirurgicale.
Ces mêmes progrès
ont permis le développement de méthodes de trachéotomie non
invasives.
Ces deux techniques n’entraînent actuellement que peu
de complications.
L’augmentation de la demande de trachéotomie en milieu de
réanimation, la faible disponibilité des équipes chirurgicales, la
nécessité du transport des patients, la facilité d’apprentissage font
préférer la trachéotomie percutanée qui aurait un coût moins élevé
que la trachéotomie chirurgicale dans les services de soins intensifs.
La trachéotomie chirurgicale garde cependant sa place dans des
indications précises.
En particulier, la trachéotomie percutanée ne doit pas être pratiquée
en l’absence d’intubation et sur un patient vigile.
La sécurité ventilatoire est la condition essentielle pour pratiquer cette
technique.
Conclusion
:
La trachéotomie chirurgicale est une intervention réglée dont les
complications sont devenues rares.
Dans les milieux de réanimation, de
nouvelles techniques (trachéotomie percutanée) se sont développées.
Les
indications de ces deux techniques se sont progressivement précisées.
Elles dépendent cependant de l’expérience des équipes et des opérateurs.