Depuis leur première utilisation thérapeutique en 1948,
les glucocorticoïdes demeurent une arme thérapeutique
anti-inflammatoire de premier ordre.
Leurs dérivés thérapeutiques
(corticoïdes), plus anti-inflammatoires que
le cortisol, soulèvent essentiellement un problème de
tolérance lié au mode d’administration et à la susceptibilité
individuelle.
La compréhension de leurs actions permet,
aujourd’hui, une meilleure maîtrise du rapport bénéfice-risque et explique leur utilisation pratiquement
quotidienne.
Principes d’utilisation
:
A -
Bases pharmacologiques
:
1- Produits
:
Les corticoïdes sont des dérivés synthétiques du cortisol,
principale hormone glucocorticoïde sécrétée par la
surrénale.
Ils partagent, avec elle, le noyau de base stérane (stéroïdien)
auquel des manipulations moléculaires ont été
apportées pour accroître le pouvoir anti-inflammatoire
et diminuer le pouvoir minéralocorticoïde.
Une action voisine peut être obtenue par l’utilisation des propriétés
de stimulation surrénale de l’ACTH (adreno-cortico
trophic hormone).
Cette action est utilisable en thérapeutique
grâce aux ACTH de synthèse dépourvues de la
partie C terminale du peptide pour en améliorer la tolérance.
Ces peptides provoquent la libération de cortisol
de façon immédiate (30 à 60 minutes pour le Synacthène immédiat), ou 24 à 36 heures (pour la forme
retard).
En pratique, ces produits sont moins utilisés que
les corticoïdes car ils ne sont pas administrables par voie
buccale, leur effet est difficile à contrôler, et ils conservent
des effets secondaires obligatoires (effet minéralocorticoïde
et mélanostimulant).
Les corticoïdes disponibles se différencient par le niveau
de leur action anti-inflammatoire, leur pouvoir minélacorticoïde et, surtout,
leur durée d’action.
2- Pharmacocinétique
:
Bien absorbés par voie digestive, les corticoïdes ont une
biodisponibilité voisine de 90 %.
Ils sont bien absorbés aussi par la conjonctive, la peau,
la synoviale et peuvent être administrés par voie intramusculaire
ou intraveineuse à l’état d’esters hydrosolubles.
Ils sont liés dans l’organisme à une protéine spécifique
de façon réversible, la transcortine, glycoprotéine de
forte affinité mais de faible capacité.
À forte posologie,
lorsque cette protéine spécifique est saturée, ils se lient
alors aux albumines de faible affinité mais de forte capacité.
La forme libre, active, est une résultante de l’équilibre
de liaison et donc dose-dépendante.
Les circonstances
qui modifient le taux d’albumine plasmatique peuvent
influencer, de ce fait, leur action.
Leur métabolisme, essentiellement hépatique, aboutit à
la formation d’hydrodérivés et de produits conjugués
inactifs, excrétés par la bile et surtout les urines. Comme
pour le cortisol, seules les formes 11-hydroxylées sont
actives.
Enfin, les perturbations métaboliques hépatiques
peuvent intervenir sur leur cinétique (grossesse,
insuffisance hépatique par exemple).
Cette cinétique confère aux corticoïdes une demi-vie
plasmatique courte, variant d’une demi-heure à 5 heures,
non corrélée avec la durée de leur action qui met en jeu
des récepteurs intracellulaires largement répandus.
Des interactions médicamenteuses peuvent être déduites
de ces considérations : diminution d’efficacité des corticoïdes
associés aux inducteurs enzymatiques hépatiques (barbituriques, phénytoïne, rifampicine), augmentation
de la demi-vie d’élimination liée à l’augmentation du
taux de transcortine par certains stéroïdes (oestroprogestatifs,
oestrogènes au cours de la grossesse), induction de
leur propre métabolisme au long cours, perturbation du
métabolisme de la ciclosporine. Les autres interactions
sont liées à leurs propriétés stéroïdiennes et à leurs
actions (interactions avec la vitamine D, les hypoglycémiants,
la digitaline, les salicylés).
La posologie des corticoïdes n’influence que peu leur
cinétique.
À très fortes doses (assaut cortisonique), la
fraction libre directement disponible est cependant nettement
majorée.
La voie d’administration, enfin, peut également modifier
cette cinétique en augmentant la durée de diffusion
(voies intramusculaire, intra-articulaire, percutanée).
Dans tous les cas, la diffusion systémique existe et peut
parfois être importante.
B -
Effets thérapeutiques
:
Les corticoïdes sont utilisés en thérapeutique, pour leurs
propriétés anti-inflammatoires essentiellement, mais
aussi immunosuppressives et antiallergiques, et éventuellement,
aussi, antalgiques et antipyrétiques lorsqu’elles
sont liées à un processus inflammatoire.
1- Récepteur cellulaire
:
Les corticoïdes agissent sous forme libre, 11-hydroxylée,
au niveau de récepteurs spécifiques intracytosoliques.
Après pénétration cellulaire, le corticoïde forme
avec ce récepteur un complexe qui, activé, migre au
niveau du noyau cellulaire où il est fixé à l’ADN
(séquence spécifique) et induit la transcription d’ARN.
En fonction du contexte chromosomique et de facteurs
de régulation, l’action sera une inhibition ou une stimulation
génétique avec synthèse de protéines biologiquement actives, responsables des effets.
L’action ainsi
décrite nécessite un temps de latence de plusieurs
heures, voire plusieurs jours.
Enfin, certaines actions rapides à apparaître (lors d’assauts
cortisoniques par exemple) pourraient faire appel à
des modifications de structure et de perméabilité membranaire.
2- Effets métaboliques
:
Les effets métaboliques des corticoïdes sont, à l’exception
d’un pouvoir minéralocorticoïde moindre, proches
de ceux du cortisol.
Résultant de leur action cellulaire,
ils ont des effets hyperglycémiant avec stimulation de la néoglycogenèse et action antagoniste périphérique vis-à-vis de l’insuline, catabolique protéique, de rétention
sodée, de fuite potassique, et interfèrent avec la vitamine
D dans le métabolisme phosphocalcique.
La résultante
de ces effets métaboliques s’exprime au niveau tissulaire
sous la forme d’effets obligatoires pouvant être néfastes,
intéressant l’ensemble de l’organisme.
Au niveau de l’hypophyse, ils interviennent dans la
régulation de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien
(HHS) en freinant les centres hypothalamo-hypophysaires
comme le fait le cortisol.
C’est la durée de ce freinage
qui est généralement prise comme durée d’action, et
qui est différente de la demi-vie plasmatique.
L’organisation nycthémérale de cet axe, liée aux variations
de sensibilité au freinage des centres hypathalamohypophysaires,
mérite d’être respectée.
3- Effets anti-inflammatoires, antiallergiques,
et immunosuppresseurs
:
Ces effets, exploités en thérapeutique, sont liés à
l’action des corticoïdes au niveau de cibles cellulaires et
de chaînes métaboliques complexes et multiples.
Classiquement, on admet que l’effet anti-inflammatoire
est lié, en partie, à l’effet d’inhibition de la phospholipase
A2 par la lipocortine, protéine induite par eux. Ainsi, ils
interfèrent avec le métabolisme des prostaglandines et
leucotriènes impliqués dans l’inflammation.
Ils ont
aussi une action inhibitrice sur la cyclo-oxygénase
2-
L’effet antiallergique passe, en partie, par l’inhibition de
la dégranulation des basophiles et mastocytes, même
lorsqu’ils ont été activés.
L’effet immunosuppresseur,
lié aux conséquences de modifications de la réponse
immunitaire, est complexe (intervention dans la reconnaissance
antigénique, modification des réponses lymphocytaires,
inhibition des cytokines, modification des
fonctions phagocytaires et chimiotactiques).
L’action anti-inflammatoire et antiallergique s’exerce
dès les faibles posologies.
L’action immunosuppressive
est plus liée à la dose et à la durée du traitement.
C -
Effets indésirables
:
À côté des effets exploités en thérapeutique, les effets
indésirables apparaissent, pour la majorité d’entre eux,
comme des effets obligatoires non désirés et liés à l’action
hormonale.
Ils peuvent être nettement atténués ou prévenus par des règles strictes d’utilisation prenant en
compte les propriétés pharmacologiques des corticoïdes.
Schématiquement, ces effets néfastes sont liés soit à un
surdosage, soit au freinage de l’axe et donc à une insuffisance
hormonale.
1- Effets de surdosage
:
Ces effets apparaissent obligatoirement dès que la posologie
dépasse l’équivalent du taux de sécrétion journalier
du cortisol, soit au-dessus de 7,5 mg/j en équivalent prednisone. Dose-dépendants, ils surviennent avec d’autant
plus d’intensité que la posologie est forte, que la
durée du traitement est longue, et que le sujet est prédisposé
par une fragilité constitutionnelle ou pathologique.
Ils réalisent, à l’extrême, un syndrome de Cushing à surrénale
atrophique associant à des degrés variables les
manifestations classiques de ce syndrome.
• Troubles digestifs : à côté de rares cas de pancréatites
induites ou de perforations coliques, les corticoïdes ont
été longtemps accusés d’être ulcérogènes.
Les essais
contrôlés et publiés, ainsi que les méta-analyses effectuées,
poussent à rediscuter la relation de causalité.
L’incidence des ulcères gastriques ou duodénaux ne
paraît pas plus élevée sous corticothérapie ; en revanche,
par leur action, ils sont susceptibles d’atténuer les signes
de perforations digestives et d’en retarder le diagnostic,
et de même, d’ajouter à un choc hémorragique une participation
surrénale.
Dans ces conditions, la prescription
systématique d’un traitement anti-ulcéreux n’est pas
justifiée, mais la prudence est de mise.
• Troubles neuropsychiques : liés à l’action neuronale
des corticoïdes, ces troubles peuvent être représentés par
de l’euphorie, de la boulimie, un état maniaque, une
bouffée délirante, un réveil de comitialité.
On peut en
rapprocher certains états dépressifs, voire certains syndromes
confusionnels.
Survenant souvent sur terrain
prédisposé, ils incitent à la prudence.
Il faut rechercher
minutieusement les antécédents de cet ordre.
• Troubles infectieux : liés à l’action des corticoïdes sur
la fonction immunitaire, ils sont représentés par le réveil
d’une infection latente ou par l’évolution rapide d’une
infection intercurrente, qu’il s’agisse de risque pyogène,
tuberculeux, viral ou mycosique, voire parasitaire.
À noter la gravité possible de varicelle, herpès, rougeole
sous corticothérapie, et la fréquence des candidoses
digestives.
Généralement, la corticothérapie ne doit pas
être arrêtée brutalement dans ces cas et l’infection doit
être traitée énergiquement pour son propre compte.
Le
risque infectieux doit être minutieusement évalué avant
toute corticothérapie au long cours.
• Troubles cutanés : liés aux perturbations métaboliques,
ils associent une adiposité par surcharge faciotronculaire
avec souvent faciès typique (bouffissure,
érythrose, acné, hirsutisme) à une atrophie cutanée avec
vergetures, pseudo-cicatrices stellaires, purpura de type
sénile, ecchymoses, fragilité cutanée, lenteur de cicatrisation,
hypertrichose.
Ces troubles, liés au temps de traitement,
sont plus difficiles à prévenir, d’autant qu’ils
sont souvent liés aussi à l’affection traitée au long cours.
• Troubles locomoteurs : ils résultent des actions métaboliques
au niveau musculaire et osseux.
Une véritable myopathie cortisonique peut apparaître, à
prédominance rhizomélique, souvent prononcée et
confinant à l’impotence fonctionnelle.
Plutôt apanage
des produits fluorés, elle doit être surveillée chez les
personnes âgées et atténuée par la diminution des doses
dès que possible, et par une kinésithérapie.
Les troubles osseux sont représentés par l’ostéoporose,
le retard de croissance et l’ostéonécrose aseptique.
L’ostéoporose, liée à la dépression ostéoblastique, à la
diminution de l’absorption calcique et à l’hyperparathyroïdisme
réactionnel, doit être traitée pour son propre
compte, si elle apparaît, car elle est volontiers sévère et
évolutive [bisphosphonates : étidronate (Didronel),
alendronate (Fosamax)].
Elle peut être prévenue par le dépistage des sujets à
risque (antécédents de fracture, ménopause précoce,
masse osseuse abaissée, sédentarité) et l’association
d’un traitement ostéotrope dans ces cas (bisphosphonates),
l’association au calcium et à la vitamine D seuls
n’ayant pas démontré son intérêt préventif.
Le retard de croissance apparaît chez l’enfant rapidement
dès l’utilisation de doses supérieures à 7 à 8 mg/j
en équivalent prednisone.
Réversible tant que les cartilages
de croissance ne sont pas soudés, il peut être atténué
par les prescriptions 1 jour sur 2 mais, pour préserver
l’efficacité, des posologies journalières les plus
faibles possibles sont préférables.
L’ostéonécrose aseptique est l’un des rares effets néfastes
qui peuvent survenir même pour des doses faibles et des
durées de traitement limitées.
Atteignant volontiers la
tête fémorale à la hanche, et souvent bilatérale, voire
multiple, elle doit être redoutée chez les sujets obèses,
diabétiques, hypertriglycéridémiques particulièrement.
• Troubles oculaires : ils sont essentiellement représentés
par une cataracte postérieure sous-capsulaire qui n’a
pas tendance à régresser à l’arrêt des corticoïdes, et le
glaucome à angle ouvert, rare mais souvent sévère
(peut-être plus fréquent en cas de diabète et de myopie).
Enfin, du fait de l’incidence immunodépressive,
l’atteinte infectieuse locale doit être surveillée.
• Troubles endocriniens : à côté du pouvoir freinateur hypothalamo-hypophysaire qui conditionne les phénomènes
de sevrage, des perturbations du cycle menstruel
et de la fonction sexuelle sont possibles.
• Troubles biologiques représentés par :
– une rétention sodée responsable d’oedème et d’hypertension
artérielle qui est possible aux fortes posologies ;
– une hypokaliémie qui doit être corrigée ;
– une hyperglycémie qui peut démasquer un état diabétique
latent ou représenter la décompensation d’un diabète
connu ;
– une augmentation de la créatininémie et de l’azotémie
qui peut apparaître chez l’insuffisant rénal ;
– une polynucléose par démargination cellulaire, fréquente,
en dehors de tout contexte infectieux ou inflammatoire
; de même une éosinopénie et une tendance à
l’hypercoagulabilité peuvent s’observer.
2- Effet de sevrage
:
Liés au freinage hypothalamo-hypophysaire, ils apparaissent
à la diminution ou à l’arrêt du traitement si
celui-ci a été longtemps prolongé à une posologie supérieure
à 7 ou 8 mg/j en équivalent prednisone, ou si l’organisation
nycthémérale de l’axe n’a pas été respectée
(administration en fin de journée au long cours).
Ces
effets peuvent s’exprimer sous la forme de l’insuffisance
surrénale, du rebond ou du syndrome dit de sevrage.
• Insuffisance surrénale : souvent masquée pendant le
traitement, elle peut apparaître soit lors de son arrêt brutal,
soit à l’occasion d’un stress traumatique ou chirurgical
ou d’une affection intercurrente en évolution (infection
par exemple).
Elle peut s’exprimer sous la forme de l’insuffisance surrénale
aiguë, redoutable, dont le diagnostic et le traitement
doivent être mis en oeuvre sans retard, ou sous la forme
d’une insuffisance surrénale lente chronique liée à la nonrécupération
de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénal.
La prévention de cette affection passe par l’augmentation
des doses ou la supplémentation en hydrocortisone en cas
de stress (2 à 4 fois le taux de sécrétion pendant quelques
jours), par la diminution lente de la corticothérapie en cas
d’arrêt et par le respect des règles de prescription préservant
l’axe au long cours.
La relance surrénale par les
dérivés de l’ACTH n’a pas d’intérêt.
• Phénomène de rebond : il est caractérisé par la reprise
évolutive de l’affection en cause lors de l’arrêt brutal ou
de la diminution trop rapide de la corticothérapie et cède
à la reprise thérapeutique.
• Syndrome de sevrage : il est dominé par une asthénie
à l’arrêt de la corticothérapie, il correspond à un état de
dépendance psychique à l’action des corticoïdes sur le
système nerveux central.
Il s’atténue à la reprise du traitement.
Il doit être différencié d’une insuffisance surrénale
chronique, et peut être prévenu par une diminution
très progressive des posologies (même lorsqu’elles sont
faibles).
Règles d’utilisation et posologie
de la corticothérapie
:
Le rapport bénéfice sur risque de cette thérapeutique
peut valablement augmenter au profit du bénéfice si l’on
respecte les règles élémentaires de prescription et les
modalités d’administration définies.
Selon le but recherché, et donc l’indication, 3 modalités
d’administration sont classiquement possibles.
A -
Assaut cortisonique
:
Cette modalité consiste à administrer en une perfusion
lente (3 h) sous surveillance électrocardiographique et
après vérification du bon équilibre ionique et glycémique,
250 mg à 1 g de méthylprednisolone injectable
(Solu-Médrol) par jour, 1 à 3 jours de suite.
Elle est indiquée dans les poussées graves de maladies
systémiques (maladie lupique, périartérite noueuse,
maladie de Wegener, maladie de Behçet, polychondrite
atrophiante) ; la polyarthrite rhumatoïde ; la sclérose en plaques ; certaines
glomérulonéphrites ; les rejets de greffes d’organe.
De façon comparable, une corticothérapie intraveineuse
à forte dose (> 1 g/j) peut être indiquée dans certains
états d’urgence (accidents allergiques graves, état de
mal asthmatique, oedèmes cérébraux, épiglottites et
laryngites sous-glottiques).
On utilise alors volontiers
un produit nettement anti-inflammatoire.
L’hydrocortisone et la cortisone par voie parentérale
sont essentiellement réservées au traitement de l’insuffisance
surrénale aiguë.
Ainsi conçu, l’assaut cortisonique est bien toléré habituellement
s’il n’est pas répété plus de 3 à 4 fois par an à
plusieurs mois d’intervalle.
B -
Corticothérapie en cure courte
:
Corticothérapie de brève durée, inférieure à 15 jours, elle
utilise des doses matinales rapidement dégressives, commençant
à 1 mg/kg/j, en diminution par paliers tous les 2
à 3 jours, pour aboutir à l’arrêt rapide.
Si elle respecte les
règles de dépistage des sujets à risque et de surveillance,
cette modalité est habituellement bien tolérée.
Elle s’avère efficace dans le domaine des névralgies
communes hyperalgiques et pour permettre de maîtriser
des poussées inflammatoires aiguës ou allergiques.
En
matière de pathologie infectieuse, son utilisation n’est
pas souhaitable et peut être dangereuse si l’infection
n’est pas maîtrisée.
C -
Corticothérapie au long cours
:
Cette modalité d’administration prolongée est celle qui
expose le plus aux risques d’effets néfastes.
Pour être
bien tolérée, elle doit obligatoirement utiliser les produits
d’action courte (Cortancyl, Médrol, Solupred), à
faible posologie (au maximum 0,1 mg/kg/j), en administration
orale le matin.
Cette modalité doit être expliquée
avec soin aux patients pour obtenir une observance de
qualité, indispensable à la bonne tolérance des corticoïdes
au long cours.
Dans les cas où la symptomatologie oblige à une phase
d’attaque à posologie plus forte et en administration pluriquotidienne,
dès la disparition des signes de gravité il
faut diminuer les doses en commençant par celles du
soir pour aboutir, le plus rapidement possible, au schéma chronothérapeutique précédent.
Si ce schéma est respecté, la tolérance de cette modalité
est bonne et permet d’utiliser la corticothérapie dans de
nombreux domaines de la médecine dont les rhumatismes
inflammatoires chroniques, la maladie lupique, la pseudopolyarthrite rhizomélique et l’artérite de Horton,
la sarcoïdose, certains purpuras thrombopéniques et
anémies hémolytiques, les pemphigus malins et pemphigoïdes
bulleuses, certaines uvéites, l’exophtalmie oedémateuse, certains asthmes, certaines rectocolites
hémorragiques et maladies de Crohn, certaines néphropathies
chroniques, certaines greffes d’organes.
Dans cette modalité d’administration prolongée, une
étude préthérapeutique et un suivi minutieux doivent
être institués.
Avant traitement doivent être évalués :
poids, taille, pression artérielle, antécédents à risque,
numération formule plaquettes sanguines, kaliémie, créatininémie, glycémie, calcémie, intradermoréaction
tuberculinique, radiographie pulmonaire, électrocardiogramme
et au moindre doute densitométrie osseuse et
état lipidique.
Le diabète et l’hypertension artérielle ne sont pas une
contre-indication à condition d’en assurer le contrôle
par un traitement adapté.
Pendant toute la durée du traitement, une adaptation posologique est effectuée en cherchant toujours à administrer
la dose la plus faible compatible avec une bonne
évolution.
La surveillance de la tolérance doit être clinique
sur le poids, la pression artérielle et la vue, et biologique
en contrôlant l’évolution de la kaliémie, de la
glycémie et de la créatininémie les premiers mois au
moins.
À ces doses, s’il faut traiter les affections intercurrentes
pour leur propre compte, les mesures hygiénodiététiques
souvent proposées n’ont pas démontré leur nécessité.
Les interactions médicamenteuses avec les corticoïdes
sont nombreuses compte tenu de la multiplicité
des effets métaboliques des corticoïdes, mais elles
n’ont pas toutes des conséquences cliniques.
Les associations
nécessitant des précautions d’emploi sont, avec
les anti-inflammatoires non stéroïdiens, les antihypertenseurs,
les diurétiques hypokaliémiants et les anticoagulants.
Une corticothérapie longtemps poursuivie ne doit pas
être arrêtée brutalement, sous risque d’apparition d’une
insuffisance surrénale.
Si le traitement corticoïde peut être arrêté, une évaluation
de la fonction surrénale est indispensable pour
dépister les insuffisances surrénales latentes et les traiter.
Dans tous les cas, la diminution des doses doit être
très progressive et la surveillance renforcée pendant les
6 mois suivant l’arrêt définitif du traitement.
Conclusion
:
Du fait des progrès effectués dans la compréhension du
mécanisme d’action des corticoïdes, de la nature et des
conditions d’apparition de leurs effets néfastes, une
amélioration considérable du rapport bénéfice sur risque
peut être obtenue.
En choisissant convenablement la
modalité d’administration, on peut dire que, lorsqu’une
corticothérapie est indispensable, elle est pratiquement
toujours réalisable, en assurant la surveillance nécessaire
aux adaptations souhaitables et en s’entourant d’avis
spécialisés.
À ces conditions, les corticoïdes demeurent une arme
thérapeutique d’un intérêt considérable dans le vaste
domaine de l’inflammation.