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Ophtalmologie
Chirurgie filtrante non perforante du glaucome
Cours d'Ophtalmologie
 
 
 

Introduction :

Le traitement chirurgical du glaucome a vu se développer et évoluer ces dernières années le concept de chirurgie non perforante destinée à augmenter le profil de sécurité de la chirurgie filtrante, dans la mesure où la chambre antérieure n’est pas ouverte, ce qui limite les risques de complications liées à une décompression soudaine du globe oculaire en peropératoire.

Les deux techniques actuellement les plus répandues sont la viscocanalostomie et la sclérectomie profonde non perforante avec trabéculectomie externe.

Elles ont pour but d’abaisser la pression intraoculaire (PIO) en diminuant la résistance à l’écoulement de l’humeur aqueuse, qui se situe pour 75 % au niveau du mur interne du canal de Schlemm et des couches trabéculaires adjacentes, et pour 25 % au niveau du mur externe du canal et des tissus qui l’entourent.

Le point commun de ces deux techniques est l’ablation d’un volet scléral profond préciliaire et préchoroïdien (sclérectomie profonde), l’ouverture et l’ablation du mur externe du canal de Schlemm, ainsi que l’ablation du stroma cornéen situé en arrière du trabéculum antérieur et de la membrane de Descemet, la résection des ces tissus aboutissant à la création d’une chambre de décompression.

L’humeur aqueuse quitte la chambre antérieure en traversant la membrane trabéculodescémétique et atteint la chambre de décompression, où elle est collectée avant d’être résorbée de différentes façons.

Dans la viscocanalostomie, l’injection d’un produit visqueux dans les deux extrémités ouvertes du canal de Schlemm a pour but d’ouvrir la lumière du canal et de ses canaux efférents, afin que l’humeur aqueuse les rejoigne plus facilement.

Dans la sclérectomie avec trabéculectomie externe, le point essentiel de l’intervention est l’ablation de la partie du trabéculum la plus impliquée dans la résistance à l’écoulement de l’humeur aqueuse chez les glaucomateux, c’est-à-dire le mur interne du canal de Schlemm et les couches trabéculaires adjacentes au canal (trabéculum externe).

Les couches trabéculaires internes sont laissées intactes, garantissant l’absence d’ouverture peropératoire de la chambre antérieure.

Les variations autour de ces techniques chirurgicales sont nombreuses, avec notamment l’utilisation d’implants placés dans la chambre de décompression et destinés à en maintenir l’ouverture.

Les études rétrospectives et prospectives, qui comparent la trabéculectomie à la chirurgie non perforante, rapportent des taux de succcès tensionnels similaires avec les deux techniques, mais l’incidence des complications postopératoires est moindre après chirurgie non perforante, et la récupération visuelle est plus rapide.

Cet article se propose d’exposer les différentes techniques de chirurgie non perforante, d’envisager leur mécanisme d’action et leurs résultats, au travers de l’analyse de la littérature publiée à ce sujet.

Objectifs :

La chirurgie filtrante du glaucome a pour objectif d’abaisser la PIO, afin de préserver au mieux le nerf optique.

Jusqu’à ces dernières années, la trabéculectomie, popularisée par Cairns dans les années 1960, était considérée comme la chirurgie filtrante de référence, permettant des contrôles pressionnels équivalents à ceux obtenus avec les chirurgies filtrantes de pleine épaisseur, tout en entraînant moins de complications du fait qu’il s’agissait d’une filtrante protégée par un volet scléral.

La trabéculectomie consiste à créer une communication directe entre la chambre antérieure et les espaces sous-conjonctivaux, en court-circuitant le trabéculum, qui est réséqué dans toute son épaisseur sur une petite surface.

Le site de trabéculectomie est recouvert d’un volet scléral préalablement disséqué, qui module l’écoulement de l’humeur aqueuse vers les espaces sous-conjonctivaux pour former une bulle de filtration.

Les complications postopératoires potentielles, comme la filtration excessive et l’hypotonie qui peuvent mettre en jeu le pronostic visuel, sont essentiellement liées à l’ouverture de la chambre antérieure qui entraîne une décompression oculaire brutale.

C’est pour minimiser l’incidence de ce type de complications que les nouvelles chirurgies filtrantes non perforantes se sont développées ces dernières années.

L’objectif de la chirurgie non perforante est d’abaisser la PIO en diminuant la résistance à l’écoulement de l’humeur aqueuse, qui est anormalement augmentée chez les patients glaucomateux.

Dans la mesure où la chambre antérieure n’est pas ouverte, cette chirurgie n’expose pas théoriquement aux complications relatives à la réalisation d’une sclérostomie de pleine épaisseur.

Le lieu de la résistance à l’écoulement de l’humeur aqueuse chez les glaucomateux fait encore l’objet de controverses.

Il est généralement admis que cette résistance à l’écoulement se situe pour 75 % dans le trabéculum, particulièrement au niveau du mur interne du canal de Schlemm et dans les couches trabéculaires adjacentes au canal, et pour 25 % au niveau du mur externe du canal de Schlemm et de la sclère qui l’entoure, le collapsus du canal pouvant également être impliqué dans l’hypertonie oculaire.

Évolution du concept :

C’est dans les années 1960 que Krasnov décrivit la première chirurgie non perforante sous le nom de sinusotomie.

La sinusotomie consistait à réséquer une lamelle sclérale sus-jacente au canal de Schlemm, et à externaliser le canal sur 120°.

Cette intervention était basée sur le postulat que la résistance à l’écoulement de l’humeur aqueuse se situait au niveau des veines aqueuses cheminant dans la sclère.

L’absence de publication de résultats convaincants à long terme fit abandonner cette technique.

De Laage de Meux en 1976, Zimmerman en 1984, Arenas en 1991 et Tanihara en 1993 modifièrent la technique de Krasnov, en complétant la sinusotomie par l’ablation du mur interne du canal de Schlemm et du trabéculum juxtacanaliculaire.

Ils baptisèrent cette intervention « trabéculectomie ab externo ».

De récentes publications montrent que l’ablation du mur interne du canal de Schlemm et du trabéculum juxtacanaliculaire permet d’améliorer l’écoulement de l’humeur aqueuse au niveau du trabéculum postérieur (de 0,2 ± 0,6 à 2,03 ± 1,43 μL/min/mmHg). Fyodorov et Koslov décrivirent ultérieurement l’intervention dénommée « sclérectomie profonde ».

Cette intervention consistait, sous couvert d’un volet scléral superficiel de protection, à réséquer un volet scléral profond, ainsi que le mur externe du canal de Schlemm et une partie du stroma cornéen situé derrière le trabéculum antérieur et la membrane de Descemet, de sorte que l’humeur aqueuse puisse s’évacuer au niveau du trabéculum antérieur, à la jonction trabéculodescémétique.

Vaudaux et al montrèrent que la sclérectomie profonde permettait d’augmenter considérablement la facilité à l’écoulement de l’humeur aqueuse (de 0,19 ± 0,03 à 24,5 ± 12,6 μL/min/mmHg).

Il est ainsi apparu que le meilleur compromis pour diminuer la résistance à l’écoulement de l’humeur aqueuse était la réalisation simultanée d’une sclérectomie profonde et d’une trabéculectomie externe, technique actuellement la plus répandue.

La viscocanalostomie décrite par Stegman est une autre technique de chirurgie non perforante.

Elle consiste à réaliser une sclérectomie profonde, puis à injecter un produit viscoélastique dans les deux orifices ouverts du canal de Schlemm, afin de permettre à l’humeur aqueuse de gagner le canal réouvert puis ses canaux efférents.

Description des techniques chirurgicales actuelles :

La viscocanalostomie et la sclérectomie profonde avec trabéculectomie externe (SPTE) étant les deux types de chirurgie filtrante non perforante les plus communément réalisés, nous les détaillons ci-après.

A - VISCOCANALOSTOMIE ET SCLÉRECTOMIE PROFONDE AVEC TRABÉCULECTOMIE EXTERNE : POINTS COMMUNS

Ces deux interventions sont des filtrantes protégées par un volet conjonctivoténonien et par un volet scléral superficiel d’un tiers d’épaisseur sclérale, disséqué en avant jusqu’en cornée claire sur 1,5 mm.

Un second volet scléral de forme triangulaire est disséqué profondément, en préchoroïdien et préciliaire, permettant d’arriver en avant dans le plan de l’éperon scléral et du canal de Schlemm.

Le canal de Schlemm est ouvert, et la dissection est poursuivie en avant dans les lames cornéennes prédescémétiques sur 1,5 mm.

La résection du volet scléral profond, du mur externe du canal et du stroma cornéen prédescémétique, aboutit à la constitution d’un espace vide appelé « espace de décompression », « lac scléral » ou encore « chambre de décompression », cet espace étant destiné à recueillir l’humeur aqueuse issue de la chambre antérieure, au travers de la fine membrane trabéculodescémétique.

B - VISCOCANALOSTOMIE ET SCLÉRECTOMIE PROFONDE AVEC TRABÉCULECTOMIE EXTERNE : DIFFÉRENCES

1- Viscocanalostomie :

Dans la viscocanalostomie, une fois la sclérectomie profonde réalisée, un produit de haute viscoélasticité est injecté dans les deux extrémités ouvertes du canal de Schlemm pour le dilater, tandis qu’une paracentèse assure l’évacuation de l’humeur aqueuse des chambres antérieure et postérieure.

Le volet scléral superficiel est resuturé de façon étanche, et le produit visqueux est injecté dans la chambre de décompression sous le volet scléral à la fin de l’intervention, avant la fermeture du plan conjonctivoténonien.

2- Sclérectomie profonde avec trabéculectomie externe :

Une fois la sclérectomie profonde réalisée, on procède à la trabéculectomie externe, c’est-à-dire à l’ablation sélective de la partie du trabéculum impliquée pour grande partie dans la résistance à l’écoulement de l’humeur aqueuse (le mur interne du canal de Schlemm et les couches trabéculaires adjacentes), tandis que les couches trabéculaires internes sont laissées intactes, garantissant ainsi l’absence d’ouverture de la chambre antérieure.

L’ablation de cette partie du trabéculum se réalise en pelant avec précaution le fond de la gouttière du canal de Schlemm à l’aide d’une pince à bout mousse, ce qui permet de retirer une membrane, appelée membrane trabéculaire externe, qui se clive aisément des plans trabéculaires sous-jacents.

Le retrait de la membrane permet à l’humeur aqueuse de filtrer largement au travers des couches trabéculaires internes résiduelles.

Le trabéculum externe peut également être ôté par aspiration à l’aide d’une canule à bout mousse, c’est la trabéculoaspiration décrite par Béchetoille.

Le volet scléral superficiel est ensuite suturé de façon lâche et la conjonctive suturée.

Les perforations malencontreuses de la membrane trabéculaire interne en peropératoire restent la principale complication de cette technique, survenant principalement au décours de la période d’apprentissage.

La chirurgie ne doit être transformée en trabéculectomie avec iridectomie périphérique que si la perforation malencontreuse de la membrane trabéculaire interne se complique d’une hernie de l’iris en peropératoire.

3- Trabéculectomie externe seule :

L’ablation du volet scléral profond préciliaire et préchoroïdien n’est pas systématique.

Certains chirurgiens réalisent directement, sous couvert d’un volet scléral superficiel, l’ouverture et l’ablation du mur externe du canal de Schlemm, réséquant ainsi le fin ruban de sclère qui recouvre le canal.

Une fois le canal ouvert, le temps essentiel de l’intervention est le pelage du lit du canal, qui permet d’ôter la membrane trabéculaire externe comprenant le mur interne du canal et les couches trabéculaires adjacentes, le fond de la rivière trabéculaire étant constitué des couches trabéculaires internes résiduelles laissées intactes.

C - SCLÉRECTOMIE PROFONDE ET TRABÉCULECTOMIE EXTERNE : ADJUVANTS DE LA CHIRURGIE

Différents types d’implants peuvent être utilisés au décours de cette chirurgie.

Ils ont pour but de maintenir ouverte la chambre de décompression.

Le premier à avoir été utilisé est l’implant de collagène Aquaflowt (Staar, Collagen Glaucoma Drainage Device).

Cet implant, de forme cylindrique (2,5 ´ 1 ´ 0,5 mm) est fabriqué à partir du collagène scléral de porc, hautement purifié et déshydraté.

Il est placé de façon radiaire, au centre de la sclérectomie profonde, le plus antérieurement possible, pour venir au contact de la membrane trabéculodescémétique.

Il est suturé dans le lit de la sclérectomie par un point au Nylon 10/0.

Le volet scléral superficiel qui recouvre l’implant est suturé par deux points lâches au Nylon 10/0.

Au contact de l’humeur aqueuse, l’implant se réhydrate et augmente rapidement de volume.

Il se résorbe en 6 à 9 mois.

Certains auteurs ont rapporté un taux moindre de fibrose au niveau du site opératoire avec cet implant.

L’implant en acide hyaluronique réticulé (SKGELt, Cornéal, triangulaire 3,5 ´ 3,5 mm ou 3,5 ´ 4,5 mm, d’épaisseur : 450 μm) est un matériau biocompatible en hyaluronate de sodium obtenu par procédé biosynthétique (fermentation bactérienne d’une souche naturelle sauvage de Streptococcus equi).

Il est hydraté dans une solution de tampon phosphate.

L’implant est placé dans la chambre de décompression, puis il est recouvert par le volet scléral superficiel suturé de façon non étanche.

Une étude in vivo chez le lapin a démontré sa résorption lente avec maintien de la chambre de décompression pendant 2 mois.

Chez l’homme, son temps de résorption est mal connu, mais la chambre de décompression est toujours visible à 4 mois sur les images obtenues en ultrabiomicroscopie à haute résolution (UBM).

Le T-Flux est un autre type d’implant développé par les laboratoires Ioltech.

C’est un implant en acrylique hydrophile en forme de « T » (4 mm de large, 2,75 mm de long).

Ses deux bras latéraux sont introduits dans les extrémités coupées du canal de Schlemm, afin de permettre à l’humeur aqueuse de s’évacuer par osmose et capillarité le long du corps de l’implant qui est suturé aux fibres sclérales résiduelles.

Pour limiter la prolifération fibroblastique épisclérale au niveau du volet scléral superficiel, et pour éviter la fermeture de la chambre de décompression, certains auteurs appliquent dans le lit de la sclérectomie une éponge imbibée de 5-fluorouracile (5-FU) (50 mg/mL pendant 5 minutes).

D - PLACE DE LA GONIOPUNCTURE :

Lorsque la pression intraoculaire-cible n’est pas atteinte dans les semaines ou les mois qui suivent l’intervention, il est possible d’ouvrir la membrane trabéculaire interne résiduelle au laser : c’est la goniopuncture.

Celle-ci s’effectue au laser Nd-YAG, en mode Q-switched, au travers d’un verre focalisateur angulaire (type CGA1 de Lasag).

Quatre à 15 impacts d’une puissance de 4 à 8 mJ sont généralement suffisants pour entraîner une ouverture localisée de la membrane.

Le succès de la goniopuncture dépend bien entendu de l’épaisseur de la membrane résiduelle, d’où l’importance d’effectuer en peropératoire une dissection tissulaire suffisante, qui permet de réduire l’incidence de la goniopuncture.

La goniopuncture permet le plus souvent un abaissement tensionnel satisfaisant et durable.

La complication potentielle de la goniopuncture est l’incarcération irienne dans l’orifice créé, notamment si la racine de l’iris est convexe.

Si l’incarcération irienne est limitée et récente, elle peut être levée par la réalisation d’une iridoplastie au laser argon.

La goniopuncture se réalise à la lampe à fente, et n’est pas à considérer comme une complication chirurgicale mais plutôt comme un adjuvant de la chirurgie, au même titre que l’est la lyse des sutures au laser après trabéculectomie.

Certains accusent la goniopuncture de transformer la chirurgie non perforante en chirurgie perforante, mais contrairement à cette dernière, la goniopuncture réalisée à distance de l’acte opératoire n’entraîne pas de décompression brutale du globe oculaire, ni ses complications potentielles.

Mécanismes d’action :

A - SCLÉRECTOMIE PROFONDE :

Dans la sclérectomie profonde, l’ablation du volet scléral profond et du stroma cornéen situés en arrière du trabéculum antérieur et de la membrane de Descemet permet à l’humeur aqueuse de passer de la chambre antérieure à la chambre de décompression, en passant au travers de la membrane trabéculodescémétique.

Compte tenu du fait que la membrane de Descemet n’est pas suffisamment perméable pour permettre un abaissement tensionnel suffisant en cas de glaucome, il est possible que l’amélioration de l’écoulement de l’humeur aqueuse obtenu après sclérectomie profonde soit aussi en partie liée à l’altération du mur interne du canal et du trabéculum sous-jacent qui survient lors de l’ouverture du canal.

B - TRABÉCULECTOMIE EXTERNE :

Dans la trabéculectomie externe, le point essentiel est l’ablation du mur interne du canal de Schlemm et du trabéculum externe, qui sont les sites les plus impliqués dans la résistance à l’écoulement de l’humeur aqueuse.

Une étude ex vivo en microscopie confocale de cette membrane trabéculaire externe a montré qu’elle était constituée non seulement du mur interne du canal de Schlemm et du trabéculum cribriforme, mais également d’une partie du trabéculum cornéoscléral.

L’évacuation de l’humeur aqueuse de la chambre antérieure vers la chambre de décompression a lieu au niveau du trabéculum postérieur, au travers des couches trabéculaires internes résiduelles.

Dans la plupart des sclérectomies profondes avec trabéculectomie externe, on constate la formation d’une bulle de filtration, témoin du passage de l’humeur aqueuse de la chambre de décompression vers les espaces sous-conjonctivaux.

Cette bulle de filtration est toutefois plus modeste et plus diffuse qu’après trabéculectomie.

Depuis la chambre de décompression, l’humeur aqueuse paraît également emprunter la voie uvéosclérale au travers du lit de la sclérectomie.

Cette hypothèse est étayée par la visualisation en UBM dans 60 % des cas d’une zone supraciliaire hypoéchogène suggérant un passage de l’humeur aqueuse dans l’espace suprachoroïdien.

L’hyporéflectivité de la sclère autour de la chambre de décompression, visualisée dans 50 % des cas, évoque également un écoulement transscléral de l’humeur aqueuse.

C - VISCOCANALOSTOMIE :

Dans la viscocanalostomie, l’injection d’une substance viscoélastique dans le canal de Schlemm a pour but de dilater le canal et ses efférents pour en faciliter l’accès à l’humeur aqueuse.

Le volet scléral est suturé de façon étanche, de sorte que l’humeur aqueuse arrivant dans la chambre de décompression n’ait la possibilité de gagner que le canal de Schlemm, et non pas les espaces sous-conjonctivaux comme en témoigne l’absence de formation de bulle de filtration.

En théorie, la voie physiologique de l’écoulement serait restaurée, et éviterait le problème d’une filtration sous-conjonctivale exposée à une fibrose en compromettant la fonctionnalité.

Cependant, une étude menée chez le singe a montré qu’en plus de la dilatation canaliculaire et de ses efférents, l’injection de visqueux entraînerait également une rupture des parois du canal et du trabéculum adjacent, de sorte que l’intervention fonctionnerait finalement comme une trabéculotomie.

Résultats cliniques :

A - SCLÉRECTOMIE PROFONDE PLUS OU MOINS TRABÉCULECTOMIE EXTERNE :

1- Études rétrospectives :

Ces résultats sont difficiles à comparer car les techniques chirurgicales, les critères de succès, les types de glaucomes opérés et les temps de suivis sont très variables d’une étude à l’autre.

Globalement, il ressort de ces études que la sclérectomie non perforante permet d’abaisser la PIO aux alentours de 15 mmHg, et que l’utilisation d’un implant de drainage, voire l’utilisation de 5-FU, facilitent le contrôle tensionnel.

L’incidence de la goniopuncture est variable selon les études.

Elle augmente avec le suivi et permet d’améliorer le pronostic fonctionnel de la chirurgie à long terme. Lachkar (communication personnelle, European Glaucoma Society, Paris 2001) rapporte 50 % de goniopunctures à 6 ans. Mermoud publie 41 % de goniopunctures dans un délai postopératoire moyen de 9,9 ± 1,2 mois, permettant dans 83 % des cas un contrôle de la PIO sur 2 ans (PIO moyenne avant le laser de 22,2 ± 7,0 mmHg et après le laser de 12,5 ± 5,8 mmHg).

Il est également difficile de comparer les résultats des études rétrospectives de la chirurgie non perforante à ceux de la trabéculectomie, dans la mesure où les taux de succès de la trabéculectomie varient selon les critères choisis.

À titre d’exemple après trabéculectomie, Nouri-Mahdavi et al rapportent 40 % de succès tensionnels à 5 ans en choisissant comme critère de succès une PIO de moins de 21 mmHg associée à un abaissement tensionnel de 20 %. Ce taux de succès atteint 81 % si le critère de succès se limite à une PIO de moins de 21 mmHg avec un traitement médical d’appoint.

Les taux de succès très encourageants rapportés par Migdal après trabéculectomie peuvent en partie s’expliquer par la sélection des patients.

En effet, dans cette étude, les patients sont opérés avant d’avoir été soumis au long cours à un traitement médical dont on sait qu’il peut entraîner des remaniements de la surface oculaire, et donc influer sur la cicatrisation et le pronostic de la filtration.

2- Études prospectives :

Les études prospectives qui comparent la chirurgie filtrante non perforante à la trabéculectomie sont peu nombreuses.

Deux d’entre elles ont été réalisées de façon randomisée chez des patients bénéficiant d’une SPTE sur un oeil, et d’une trabéculectomie sur l’autre.

Elles objectivent des résultats comparables entre les deux techniques :

– dans une série de 78 yeux de 39 patients, El Sayyad rapporte à 12 mois une PIO moyenne de 12,3 ± 4,2 mmHg dans le groupe des SPTE, et une PIO moyenne de 14,1 ± 6,4 mmHg dans le groupe des trabéculectomies. La PIO est de moins de 21 mmHg dans 93 % des yeux opérés de SPTE et dans 94,9 % des yeux opérés de trabéculectomie ;

– Lachkar rapporte, sur une série de 36 yeux (18 patients) suivis pendant 18 mois, des taux de succès similaires (PIO de moins de 21 mmHg sans traitement) après SPTE (80 %) et trabéculectomie (88 %). À 2 ans, la PIO moyenne est équivalente dans les deux groupes (16,2 mmHg pour les SPTE et 15,5 mmHg pour les trabéculectomies).

La goniopuncture a été réalisée dans 27 % des cas de SPTE.

La troisième étude prospective, qui compare la trabéculectomie et la sclérectomie profonde, est celle pubiée récemment par Chiselita à propos de 34 yeux de 17 patients porteurs d’un glaucome chronique à angle ouvert non équilibré sous traitement médical.

Contrairement aux deux précédentes études, le contrôle pressionnel à 18 mois est meilleur dans le groupe des trabéculectomies (17,3 ± 1,2 mmHg après trabéculectomie, 20,9 ± 4,0 mmHg après sclérectomie, p < 0,05).

Il faut souligner que dans cette étude, la chirurgie non perforante ne comprend qu’une sclérectomie profonde sans trabéculectomie externe associée, et qu’aucune goniopuncture n’a été réalisée en postopératoire.

Ces modalités chirurgicales peuvent expliquer cette différence de résultats avec les deux études précédemment citées.

B - VISCOCANALOSTOMIE :

1- Études rétrospectives :

Dans une étude portant sur 214 yeux de 157 patients africains porteurs d’un glaucome à angle ouvert avec une PIO moyenne de 47,4 ± 13,0 mmHg, Stegman rapporte à 35 mois une PIO moyenne de 16,9 ± 8,0 mmHg après viscocanalostomie, 83 % des yeux ayant une PIO de moins de 22 mmHg sans traitement d’appoint.

Carassa et al publient les résultats de la viscocanalostomie réalisée sur 33 yeux de 33 patients. Dans quatre cas, la procédure a dû être convertie en trabéculectomie du fait de perforation peropératoire.

À 3 mois (± 2,6) de suivi, 86,2 % des yeux ont une PIO de moins de 21 mmHg sans traitement, et 79,3 % ont une PIO de moins de 16 mmHg sans traitement, la moyenne tensionnelle passant de 27,7 ± 9,5 mmHg en préopératoire à 12,0 ± 3,0 mmHg en postopératoire.

Dans une population de 41 patients (56 yeux) opérés de viscocanalostomie et suivis pendant 12 mois, Drusedau rapporte un taux de succès absolu de 36 % (PIO < 21 mmHg sans traitement) et un taux de succès relatif de 79 % (PIO < 21 mmHg avec traitement d’appoint), la PIO moyenne passant de 28,1 ± 7,4 mmHg en préopératoire, à 17,8 ± 3,8 mmHg en postopératoire. Les complications postopératoires sont limitées à 2 % d’hypotonie, 17 % de Seidel et 2 % de cataracte.

2- Études prospectives :

Sunarevic-Mégevand et al, dans une série de 67 yeux de 67 patients porteurs de glaucome à angle ouvert, rapportent 88 % de succès global de la viscocanalostomie à 3 ans (PIO de moins de 21 mmHg avec ou sans traitement d’appoint, et réduction de la PIO de plus de 30 %).

Si l’on considère les succès tensionnels sans traitement d’appoint, ils sont de 68% à 1 an et de 59% à 3 ans.

Aucune complication notable n’est observée dans cette série. Une étude publiée par Carassa et al compare de façon prospective la viscocanalostomie et la trabéculectomie.

Les PIO moyennes initiale et finale sont comparables dans les deux groupes, respectivement 24,6 ± 10,6 mmHg et 14,0 ± 2,6 mmHg dans le groupe trabéculectomie (suivi moyen de 11,0 ± 1,5 mois), et 22,3 ± 7,4 mmHg et 13,3 ± 3,8 mmHg dans le groupe viscocanalostomie (suivi moyen de 10,9 ± 1,8 mois).

Jonescu-Cuypers est moins optimiste en ce qui concerne la viscocanalostomie, puisque dans une étude prospective randomisée comparant à 6 mois les résultats de la trabéculectomie (10 yeux) à ceux de la viscocanalostomie (10 yeux), il constate que 50 % des yeux opérés de trabéculectomie ont une tension oculaire comprise entre 7 et 20 mmHg sans traitement, tandis qu’aucun des yeux opérés de viscocanalostomie ne répond à ce critère de succès à 6 mois, la période de baisse tensionnelle postopératoire étant plus courte après viscocanalostomie qu’après trabéculectomie.

Conclusion :

La chirurgie filtrante non perforante permet de contrôler la PIO des patients porteurs d’un glaucome à angle ouvert en minimisant les risques d’hypotonie.

Les résultats obtenus sont comparables à ceux de la trabéculectomie, avec une moindre incidence de complications postopératoires précoces.

Le contrôle tensionnel paraît meilleur lorsqu’à la sclérectomie s’associe une trabéculectomie externe.

La possibilité de réaliser une ouverture de la membrane trabéculaire résiduelle au laser dans les suites de la chirurgie, même au long cours, augmente les taux de succès de la chirurgie.

D’autres études prospectives seraient utiles pour conforter ces résultats et évaluer l’intérêt des différents types d’implants au décours de la chirurgie.

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