Chirurgie du fibrome nasopharyngé Cours de Chirurgie
Introduction
:
Le traitement du fibrome nasopharyngien (FNP) repose
essentiellement sur l’exérèse chirurgicale.
Cette chirurgie est
longtemps demeurée de sinistre réputation.
Avant l’avènement de
l’endoscope, du fibroscope et du scanner, le diagnostic était porté à
un stade très tardif.
L’extension tumorale était majeure et
l’embolisation n’avait pas cours.
Par une voie d’abord transfaciale à
os perdu, le chirurgien tentait le plus rapidement possible
d’arracher, ou de disséquer par digitoclasie, le point d’implantation
choanal du fibrome, cependant que l’aide tamponnait fébrilement
l’espace anatomique dégagé.
La manoeuvre se révélait terriblement
hémorragique sur les formes racémeuses dont l’inévitable
fragmentation laissait béants les lacs sanguins si caractéristiques de
cet angiofibrome.
Un flot de sang inondait en quelques secondes le
champ opératoire, allant parfois jusqu’à désamorcer la pompe
cardiaque par brutale hypovolémie, imposant en tout cas un
méchage serré et un arrêt momentané des manipulations.
Après une
période de repos, la reprise prudente du geste chirurgical entraînait
la reprise d’un saignement profus, gênant l’exposition des restes
tumoraux encastrés dans les fentes et recoins de la base du crâne.
C’est dire que fréquentes étaient les récidives, même entre les mains
de chirurgiens experts en ce type d’assaut. Un aperçu savoureux de
ces scènes de l’histoire de la médecine peut être retrouvé dans
l’article de Cohen.
De nos jours, le tableau clinique s’est transformé : le diagnostic est,
dans nos pays développés, porté à un stade précoce. Les progrès de
l’imagerie ont permis de systématiser les modes de progression et
une cartographie extrêmement précise de la tumeur peut être établie.
Le temps d’exérèse se déroule désormais dans des conditions de
sécurité optimales grâce à l’embolisation préopératoire, aux progrès
du monitorage anesthésiste et même à la réalisation
d’autotransfusions prévenant tout risque de contamination virale.
Enfin, le suivi postopératoire a désormais recours systématiquement
à l’imagerie, ce qui permet d’évaluer la qualité de l’exérèse, de
dépister les éventuelles récidives à un stade précoce, et dans certains
cas d’apprécier leur évolutivité.
Dans ce contexte de progrès technique, l’équipe thérapeutique doit
désormais non seulement assurer la guérison, mais aussi éviter toute
séquelle aussi minime soit-elle : cicatrice inesthétique, ankylose
mandibulaire, sténose des voies lacrymales, déformation faciale,
hypoesthésie sous-orbitaire, trouble de l’articulé dentaire, voire
séquelle neurologique.
La voie d’abord chirurgicale d’un FNP doit
répondre à certaines nécessités :
– fournir une exposition aussi large que possible de la base du crâne
et particulièrement de la fosse infratemporale ;
– permettre un contrôle efficace des pédicules nourriciers,
principalement l’artère maxillaire interne et ses branches ;
– pouvoir le cas échéant être combinée à une voie complémentaire,
neurochirurgicale ou cervicale ; laisser un minimum de séquelles
esthétiques et fonctionnelles sur un visage en pleine croissance
osseuse.
En fonction de l’extension tumorale, c’est essentiellement la voie transnasale sous guidage endoscopique et la voie transfaciale antérieure
qui nous paraissent adaptées à la plupart des situations. C’est donc
celles-ci que nous décrirons en détail.
Mais le lecteur ne saurait méconnaître les très nombreuses variantes ou alternatives proposées
dans la littérature, essentiellement les voies latérales transzygomatiques.
Exceptionnellement, l’extension intracrânienne
majeure nécessite une voie neurochirurgicale : ce sont alors
essentiellement la voie infratemporale et encore la voie sous-frontale
qui peuvent être proposées.
Bilan préopératoire
:
Néanmoins, dans la mesure où ce bilan conditionne le geste
opératoire, un bref rappel est nécessaire.
A - BILAN RADIOLOGIQUE
:
Le bilan d’extension est essentiellement basé sur l’examen
tomodensitométrique (au mieux réalisé par un scanner
hélicoïdal avec une injection rapide de produit de contraste).
Les
fenêtres osseuses permettent d’apprécier les remaniements osseux,
voire l’envahissement osseux.
Les fenêtres parenchymateuses avec
injection de produit de contraste permettent sur les machines les
plus récentes de parfaitement différencier la rétention sinusienne des
prolongements tumoraux.
Quant à l’imagerie par résonance
magnétique, elle apporte des renseignements similaires mais
présente l’inconvénient de ne pas dessiner les contours osseux.
Son
intérêt est néanmoins certain dans le bilan des tumeurs ayant une
extension véritablement endocrânienne, en particulier dans le cas
des extensions antérocaverneuses.
L’interprétation des clichés radiologiques nécessite une parfaite
connaissance des modalités d’extension de ces tumeurs.
À partir du trou sphénopalatin, la tumeur
comble le plus souvent la fosse nasale et bloque la choane.
Elle peut
progresser latéralement en avant de l’apophyse ptérygoïde.
L’extension
se fait alors vers la fosse ptérygopalatine (fissura pterygopalatina) au
prix d’un élargissement tumoral de celle-ci, la fosse sous-temporale
(fossa infratemporalis), en particulier la région rétro-maxillozygomatique,
puis la fosse temporale (fossa temporalis) vers le haut
ou la région vestibulaire vers le bas.
Au cours de ce processus, elle
peut également, à la partie haute de la fosse ptérygopalatine, envahir
la fissure orbitaire inférieure ou fente sphénomaxillaire puis de là, l’apex orbitaire, la fissure orbitaire supérieure ou fente sphénoïdale
et enfin le sinus caverneux (extension antérieure).
Quant à
l’extension médiale, elle se fait vers la fosse nasale, les sinus
ethmoïdaux et rarement vers le toit de la fosse nasale, de l’ethmoïde
ou du sphénoïde (jugum ou planum sphenoidale en avant de la selle
turcique et du chiasma).
Elle peut alors s’étendre à la fosse cérébrale
antérieure.
Cette modalité d’extension est très rare.
Les extensions en arrière de l’apophyse ptérygoïde sont très
polymorphes.
Vers l’arrière, la tumeur érode le plus souvent l’aile interne de
l’apophyse ptérygoïde, puis de là le plancher du sinus sphénoïdal
dans lequel elle peut se développer.
Fait capital, cette tumeur a un
pouvoir d’érosion et d’envahissement osseux longtemps méconnu
avant l’avènement de l’imagerie moderne.
La tumeur peut infiltrer
le massif osseux qui forme la racine des ptérygoïdes : de là, elle
infiltre le corps du sphénoïde vers le clivus et la portion médiale du
sinus caverneux (invasion médiale), ou encore se propage, soit vers
le bas entre les deux ailes de la ptérygoïde (fosse ptérygoïde) parfois
jusqu’en parapharyngé, soit en dehors le long des muscles
ptérygoïdiens (région ptérygoïdienne).
Elle est également susceptible
d’envahir l’espace paratonsillo-sous-tubaire, et d’atteindre ainsi les
foramens rond et ovale.
De là, une extension à la face inféroexterne
du sinus caverneux est possible (invasion latérale).
Il existe alors un
élargissement majeur du foramen ovale que l’on ne retrouve bien
entendu pas dans les autres modalités d’extension au sinus
caverneux.
L’extension postéro-inférieure de la tumeur peut atteindre le
foramen déchiré (foramen lacerum) via le toit du rhinopharynx.
Là,
la tumeur infiltre les insertions tendinoligamentaires de la base du
crâne et vient au contact de l’artère carotide interne qu’elle peut
englober voire infiltrer, s’étendant même au sinus caverneux après
avoir emprunté le canal carotidien (invasion inférieure).
De cette analyse, il ressort que la lecture, tant des clichés de
tomodensitométrie que de résonance magnétique doit recourir à une
analyse systématisée relevant l’atteinte éventuelle des différentes
régions suivantes : arche choanale, fosse ptérygopalatine, fissure
orbitaire inférieure, apex orbitaire, sinus caverneux (antérieur), fosse
infratemporale : région ptérygoïdienne et région rétro-maxillozygomatique,
fosse temporale, fosse ptérygoïdienne, région paratonsillo-
sous-tubaire, foramen ovale et foramen rond, sinus
caverneux (latéral), espace parapharyngé, sinus sphénoïdal, base des
ptérygoïdes et clivus, sinus caverneux (médial), foramen déchiré,
canal optique, étage antérieur.
Compte tenu du potentiel de croissance du FNP et des délais
nécessaires pour organiser l’intervention, il peut être utile de répéter
l’examen tomodensitométrique en préopératoire immédiat.
Ceci est
particulièrement intéressant lorsqu’une navigation guidée par
ordinateur est envisagée.
B - BILAN ANGIOGRAPHIQUE ET EMBOLISATION
PRÉOPÉRATOIRE
:
L’embolisation est systématiquement pratiquée car elle permet de
diminuer le saignement peropératoire et d’améliorer l’exposition
tumorale dans le champ opératoire.
L’embolisation est au
mieux pratiquée 24 à 48 heures avant le geste chirurgical, sous
neuroleptanalgésie et prémédication anesthésique.
Il est rare qu’une
anesthésie générale soit nécessaire.
Par une voie d’abord le plus
souvent fémorale, le geste de dévascularisation commence par le
territoire de l’artère faciale (branche palatine ascendante) et de
l’artère pharyngienne ascendante (branche antérieure) au moyen de
particules de polyvinyle alcool (300 à 500 µm de diamètre).
Puis
l’artère maxillaire interne est embolisée distalement pour
dévasculariser la tumeur par les branches nourricières
sphénopalatines, sous-orbitaire, palatine descendante,
alvéoloantrale.
Une embolisation complémentaire des branches de
la carotide externe controlatérale est souvent nécessaire.
Quant à l’apport vasculaire issu des branches de l’artère carotide
interne en cas d’extensions intrasphénoïdales ou intracrâniennes,
elles ne sont le plus souvent plus contrôlées en préopératoire du fait
des risques faibles mais inacceptables liés au clampage temporaire
de la carotide interne ou encore à la technique de ponction directe
in situ.
Anesthésie
:
Schématiquement, l’anesthésie d’un FNP pose deux problèmes
essentiels : celui de la stratégie transfusionnelle pour une intervention
potentiellement très hémorragique, et celui d’éventuelles anesthésies
itératives chez un adolescent.
Afin de limiter le nombre de ces
dernières, l’artériographie est pratiquée sous simple sédation avec embolisation dans le même temps, et le déméchage n’a plus cours
en utilisant des mèches résorbables en fin d’intervention.
Le geste anesthésique proprement dit ne soulève pas de problèmes
particuliers.
L’intubation est effectuée à l’aide d’une sonde
préformée orale dont la courbure permet la fixation au menton.
Un packing est placé dans l’oropharynx de façon à prévenir l’inondation
des voies aériennes tout en laissant le cavum accessible au doigt du
chirurgien.
Les voies d’abord veineuses doivent être de bon calibre
et la pression artérielle est surveillée par voie sanglante.
Installation du patient
:
Le patient est placé en décubitus dorsal avec une antéflexion
cervicale de 30° lorsque le geste est pratiqué par voie transnasale.
Cette flexion cervicale est en revanche gênante pour les voies transfaciales car il faut pouvoir suivre le plancher d’orbite par en
dessous et une déflexion cervicale est alors utile.
Après désinfection
du visage, les champs opératoires sont disposés de façon à exposer
la face et à donner accès à la cavité buccale, voire éventuellement à
la région sous-digastrique.
En cas d’abord neurochirurgical associé,
l’abord coronal doit être préparé par un rasage du cuir chevelu
réalisé en préopératoire immédiat.
Un soin particulier doit être porté à la protection oculaire avec
instillation de collyre et occlusion palpébrale.
Le chirurgien se place sur la droite de l’opéré, face à la console de vidéochirurgie.
Voies d’abord
:
Il n’existe guère de consensus sur les voies d’abord chirurgicales, et
leur nombre est un reflet du polymorphisme de ces tumeurs et de la
difficulté de réaliser un traitement radical.
Nul doute que
l’expérience de l’opérateur joue ici un rôle décisif, tout autant que le
choix de la voie d’abord.
Nous exposons ici notre conception du
geste chirurgical.
Schématiquement, les fibromes sans extension intracrânienne
peuvent être aujourd’hui retirés par voie endonasale sous guidage
endoscopique en l’absence d’extension à la fosse infratemporale.
Les
bourgeons tumoraux situés dans le sinus sphénoïdal, dans le corps
du sphénoïde, médiocaverneux, ou encore dans le toit du cavum
peuvent être parfaitement visualisés et retirés par cet abord.
L’usage
d’optique à vision latérale permet également le contrôle des
extensions paratubaires.
En revanche, lorsqu’il existe une extension
latérale en avant de la ptérygoïde au-delà de la fosse ptérygopalatine
(fosse infratemporale, région rétro-maxillo-zygomatique, région
vestibulaire), la voie transnasale exclusive n’est pas adaptée.
Un
abord transfacial est ici indiqué, que nous pratiquons par voie de
degloving.
En cas d’exceptionnelle extension à la fosse temporale vers
le haut et le dehors, la voie d’abord antérieure trouve ici ses limites
et ce peut être alors l’indication d’une voie latérale.
Les extensions à l’apex orbitaire peuvent être désenclavées par voie
antérieure, autrement dit par un abord transfacial et un éventuel
bourgeon antérocaverneux peut, dans certains cas, être extirpé par
cette même voie.
Les extensions latérocaverneuses peuvent nécessiter le recours à une
voie sous-temporale.
Enfin, les exceptionnelles atteintes de l’étage antérieur justifient,
lorsqu’elles sont importantes, une voie transbasale ou sous-faciale,
en sachant que le FNP a un développement essentiellement
extradural, ce qui permet dans les formes modérées de le
désenclaver et le décoller de la méninge sans avoir recours à une
craniotomie.
Enfin, il existe des formes intracrâniennes que l’on peut à certains
égards considérer comme inextirpables sauf à réaliser une
intervention extrêmement mutilante : l’envahissement massif antérocaverneux ou inférocaverneux avec engainement de la
carotide interne, l’extension au canal optique.
Certains préconisent
alors une radiothérapie externe, qui permet un contrôle local
mais expose à des troubles de croissance, une insuffisance
hypophysaire, voire une transformation maligne.
Nous décrivons successivement la voie transnasale, la voie
transfaciale, puis plus succinctement les autres voies d’abord.
A - VOIE TRANSNASALE SOUS GUIDAGE ENDOSCOPIQUE
:
Le matériel de base de la chirurgie des sinus sous guidage
endoscopique est requis : optique rigide de 4 mm à vision droite ou
oblique (30°), caméra vidéo ayant une sensibilité particulièrement
élevée, gaine lavante (modèle Microfrance ou Storz), source de
lumière froide au xénon, jeu de pinces Blakesley, ciseaux
d’endoscopie, curettes droites et courbes.
Un ciseau frappé droit,
voire courbe, est également utile, de même qu’une pince de Kérisson.
Une coagulation est indispensable : pince bipolaire de coelioscopie
modifiée et électrode monopolaire gainée.
L’utilisation d’un moteur est souvent nécessaire : pièce à main avec
canal irrigateur adaptée aux fraises de 11 cm de long.
Les
instruments de type shaver ne sont pour l’instant pas adaptés à ce
type de résection car ils dérapent sur cette tumeur particulièrement
fibreuse.
Le saignement peropératoire est limité par l’embolisation
préopératoire, la rétraction de la muqueuse, les tamponnements
répétés avec des mèches imbibées d’adrénaline au 1/1 000 et enfin
l’hypotension contrôlée, comme au cours de toute intervention
sinusienne sous guidage endoscopique.
Du fait de l’étroitesse de la fosse nasale et du volume du fibrome, il
est impératif d’éviter de morceler la tumeur et de déclencher un
saignement.
Dès lors que le volume tumoral est un tant soit peu
important, l’exérèse débute par une turbinectomie inférieure, voire
moyenne, qui permet d’avoir un large jour sur la choane, le foramen
sphénopalatin et le récessus sphénoethmoïdal.
La dissection
tumorale est alors débutée en refoulant la tumeur d’avant en arrière,
en réalisant si nécessaire une méatotomie moyenne, et en coagulant
le pédicule sphénopalatin.
Celui-ci n’est souvent pas clairement
individualisable du fait des remaniements tumoraux et de
l’embolisation qui assèche véritablement l’artère sphénopalatine.
S’il
existe un prolongement tumoral dans la fosse ptérygopalatine, son
exérèse sera recontrôlée après ablation de l’essentiel de la tumeur.
L’abord de cette fosse est en effet malaisé à ce stade.
Il faut alors évaluer si la tumeur a une large implantation sur l’arche choanale, voire sur le vomer.
Si tel est le cas, la résection de la partie
postérieure de la cloison et du vomer, sans conséquence
fonctionnelle, permet de basculer la tumeur sur son insertion
postérieure (toit du cavum et plancher du sinus sphénoïdal) et sur
son insertion latérale (aile interne de la ptérygoïde).
Vis-à-vis de
l’envahissement dans le sinus sphénoïdal, celui-ci se fait non pas
par l’ostium mais par le canal ptérygoïdien, autrement dit par le
plancher du sinus sphénoïdal.
Le désenclavement de la tumeur
nécessite donc de réaliser une sphénotomie abaissée jusqu’au
plancher du sinus.
Cette sphénotomie a de plus l’intérêt, en cas de
sinus très pneumatisé, de préciser la situation de l’artère carotide
interne dans le sinus, et même parfois la hauteur de sa portion
horizontale intrapétreuse, ce qui présente un intérêt majeur en cas
d’extension au foramen déchiré ou à la région para-tonsillo-soustubaire.
En fonction de la largeur de l’ethmoïde postérieur et du récessus sphénoethmoïdal, il peut être utile de réaliser à ce stade
une ethmoïdectomie postérieure.
Elle présente l’intérêt d’exposer et
donc de repérer la paroi interne d’orbite qui est en arrière dans le
même plan parasagittal que la paroi interne du sinus caverneux. De
plus, en cas de récessus sphénoethmoïdal étroit, ce geste permet
d’avoir un jour satisfaisant sur la paroi antérieure du sphénoïde.
Dès lors, la tumeur est abaissée, puis clivée de la ptérygoïde. Un
éventuel prolongement dans la racine des ptérygoïdes, rétroptérygoïdien ou dans le corps du sphénoïde, sera désenclavé
dans le même temps.
La tumeur est alors basculée de haut en bas
dans le cavum et l’exérèse se termine par la section de la muqueuse
rhinopharyngée adhérente à la tumeur.
Dans le cas des tumeurs de
volume important, ce temps sera plus aisément réalisé par voie endobuccale en rétractant le voile.
La tumeur est alors extraite par
la cavité buccale.
Vient ensuite le temps du contrôle de l’exérèse.
Il est alors impératif
de contrôler chacune des régions anatomiques précédemment
repérées sur l’imagerie lors de l’élaboration de la planification
opératoire, qu’il s’agisse des extensions intraosseuses, ou encore des
extensions dans les parties molles.
Ce temps est particulièrement
fructueux en arrière des ptérygoïdes, pour déceler d’éventuels
reliquats souvent intraosseux, en particulier dans le corps du
sphénoïde ou dans la racine des ptérygoïdes.
L’extension à la fosse ptérygopalatine pose un problème particulier
lorsque la tumeur n’a que peu modifié le squelette.
Le prolongement
tumoral est en effet masqué par l’apophyse verticale du palatin.
L’exérèse nécessite alors la réalisation d’une large méatotomie
moyenne, puis l’exérèse de l’apophyse verticale du palatin et de la
paroi postérieure du sinus maxillaire.
Ce geste est réalisé au ciseau
frappé, en utilisant un ostéotome courbe introduit par la fosse nasale
homo- ou controlatérale.
Le fragment osseux est alors soulevé à
l’aide d’une curette.
On peut alors visualiser le prolongement
tumoral qui doit être soigneusement séparé du nerf sous-orbitaire à
sa sortie du foramen rond et juste avant qu’il ne pénètre dans son
canal.
Cette manoeuvre peut s’avérer particulièrement délicate si
survient un saignement intempestif de la terminaison de l’artère
maxillaire interne insuffisamment bloquée par l’embolisation, ou
encore lorsqu’il existe également un envahissement de l’apex
orbitaire par la fissure orbitaire inférieure car le nerf est alors
véritablement engainé par la tumeur.
C’est alors l’intérêt d’une voie transfaciale de permettre un volet postérieur plus externe permettant
d’extraire la tumeur de haut en bas et de dehors en dedans.
L’extension dans la fosse ptérygoïdienne survient après que la
tumeur a lysé la partie haute de l’aile interne de la ptérygoïde.
Elle
s’engouffre alors entre les deux ailes parfois sur toute leur hauteur.
L’exérèse de ce prolongement impose un fraisage du massif
ptérygoïdien ou au moins de l’aile interne qui forme la paroi latérale
de la choane.
L’extension dans les parties molles du cavum est difficile à visualiser
en peropératoire et il faut donc se résoudre à pratiquer l’exérèse des
zones de prise de contraste au scanner.
Ceci amène parfois à squelettiser le toit du cavum en dessous du sinus sphénoïdal parfois
jusqu’au clivus.
Latéralement, l’exérèse peut mener au foramen
déchiré dont l’orifice inférieur ne répond qu’à des insertions
fibreuses.
L’exérèse de la totalité de la tumeur est marquée par l’arrêt du
saignement dans la cavité opératoire.
Même les branches artérielles
de la carotide interne se spasment aisément, et il n’y a guère que les
vaisseaux tumoraux qui demeurent béants et entretiennent le
saignement, voire déclenchent une épistaxis parfois cataclysmique
dans les suites opératoires.
Afin d’éviter une nouvelle anesthésie pour déméchage, la cavité
opératoire est tapissée de mèches résorbables type Surgicel.
Le patient subit ensuite un scanner de contrôle avec injection à j1 ou
j2.
Si ce dernier est normal, il quitte alors le service vers le cinquième
jour et est suivi durant quelques semaines pour des soins de cavité.
En revanche, s’il existe la moindre prise de contraste suspecte, une
révision de la cavité opératoire est planifiée dans les 48 heures sous
anesthésie générale.
B - VOIE TRANSFACIALE PAR « DEGLOVING »
:
La voie d’abord doit fournir une exposition large et adaptée avec un
préjudice esthétique minimal.
Deux types d’incision sont possibles :
l’incision paralatéronasale et le degloving.
Cette dernière a l’avantage
d’éviter toute cicatrice cutanée tout en procurant une exposition
largement suffisante pour la plupart des tumeurs. Elle associe
un abord vestibulaire bilatéral et un décollement de la pyramide
nasale de type rhinoplastie.
Après infiltration du sillon vestibulaire et des tissus sous-cutanés de
la pyramide nasale, l’incision muqueuse bivestibulaire permet de
dégager les orifices piriformes, l’épine nasale et la face antérieure
des sinus maxillaires, et vient rejoindre les deux incisions
vestibulaires ellipsoïdes, interseptocolumellaires en dedans et
intercartilagineuses en dehors, rejoignant en bas l’orifice piriforme
et l’épine nasale dégagés par la voie sous-labiale.
Afin d’éviter toute
sténose secondaire, l’incision vestibulaire a un aspect en « virole »,
l’incision intercartilagineuse se poursuivant en arrière vers le
plancher de la fosse nasale, puis revenant vers l’avant dans un plan
parasagittal vers l’épine nasale.
Le lambeau musculocutané jugal est ensuite décollé en sous-périosté
de façon à exposer la face antérieure du sinus maxillaire et les os
propres du nez du côté à opérer.
En dehors, le cintre malaire est
dégagé ainsi que la partie toute externe de la paroi postéroexterne
du sinus, en réclinant soigneusement les parties molles de façon à
éviter que la boule graisseuse de Bichat ne vienne saillir dans le
champ opératoire et gêner la vision chirurgicale.
En haut, le rebord
orbitaire inférieur est exposé de part et d’autre du nerf sousorbitaire,
dont l’émergence est prudemment dégagée afin d’éviter
toute traction à son niveau.
À la partie interne du plancher orbitaire,
le décollement s’arrête à la gouttière lacrymale. En bas et en dedans,
le bord externe de l’orifice piriforme est dégagé de haut en bas
jusqu’au plancher des fosses nasales.
La lame mucopériostée intersinusonasale
est désinsérée avec l’attache du cornet inférieur et
réclinée en dedans vers la fosse nasale.
Depuis l’utilisation de l’endoscope pour compléter l’exérèse et afin
de réduire l’incidence des séquelles, les dimensions du volet osseux
ont été réduites.
Auparavant, la nécessité d’une exposition
aussi large que possible contraignait à déposer un volet fronto-nasoorbito-
maxillaire avec section de la voie lacrymale et neurolyse du
nerf sous-orbitaire.
Ceci exposait à une sténose secondaire des voies
lacrymales, à des dysesthésies prolongées dans le territoire du nerf
sous-orbitaire et enfin à des troubles de croissance du massif facial.
Ce volet osseux transfacial doit permettre une exposition de la partie
la plus externe de la fosse infratemporale et permettre un contrôle
efficace de l’artère maxillaire interne.
Il doit de plus être remis en
place en fin d’intervention afin de prévenir une asymétrie de
croissance verticale du maxillaire, voire la rétraction des parties
molles.
C’est pourquoi les classiques voies d’abord à os perdu, type Rouge-Denker, sont déconseillées, d’autant qu’elles ne fournissent
qu’une exposition très insuffisante.
Le tracé du volet passe en avant de la gouttière lacrymale.
La voie
lacrymale est donc laissée en place sans mobilisation, alors que son
canal osseux est sectionné franchement au-dessus du cornet
inférieur.
À la fraise de Lindemann, on réalise une ostéotomie
horizontale sous le rebord orbitaire qui contourne l’orifice du nerf
sous-orbitaire et passe nettement au-dessous du niveau du canthus
interne, immédiatement en avant du canal lacrymal, et se poursuit
en dedans vers l’os propre du nez.
En dehors, elle se dirige vers le
corps du malaire.
Elle devient alors oblique en bas et en dehors
réalisant une ostéotomie oblique du corps du malaire.
Enfin, en bas,
l’ostéotomie redevient horizontale sur la face antérieure du sinus maxillaire et rejoint la portion inféroexterne de l’orifice piriforme.
On prend soin chez l’enfant d’éviter les germes dentaires de même
que l’apex de la canine.
Avant de déposer le volet ainsi tracé, des trous pairs et transfixiants
sont réalisés de part et d’autre du tracé, afin de permettre en fin
d’intervention sa contention par fils.
Le volet facial est mobilisé
après avoir réalisé deux ostéotomies horizontales de la cloison intersinusonasale
au ciseau droit frappé, respectivement à hauteur du
plancher de la fosse nasale et au-dessus du cornet inférieur.
La
cloison intersinusonasale se fracture et l’on dépose le volet facial.
Une fois le volet déposé, la lame mucopériostée intersinusonasale,
préalablement décollée de la paroi externe de la fosse nasale, est
incisée verticalement le long de l’orifice piriforme et le lambeau
antérieur est refoulé contre la cloison.
Il permet une couverture
rapide du volet osseux remis en place.
La cloison intersinusonasale est alors réséquée jusqu’à la fissure
ptérygopalatine, avec le cornet inférieur, en respectant en haut et en
avant la muqueuse du canal lacrymal.
Ceci donne un jour large sur
la tumeur.
En fonction de l’extension à la fosse infratemporale, il est
alors le plus souvent nécessaire de réséquer la paroi postérieure du
sinus, voire la paroi postéroexterne du maxillaire supérieur et la
partie inférieure du contrefort malaire afin d’avoir un jour suffisant
sur la fosse infratemporale.
Les éléments vasculaires, nerveux et
graisseux de la fosse infratemporale peuvent alors être exposés.
La
portion la plus externe de la tumeur est refoulée de dehors en
dedans à l’aide d’un décolleur.
L’artère maxillaire interne se tend
alors et peut être clipée et sectionnée.
En prenant garde à ne pas le
morceler, tout le prolongement tumoral situé dans la fosse infratemporale est alors basculé de dehors en dedans jusque dans la
fosse nasale, ce qui expose la face antérieure des ptérygoïdes.
C’est au cours de ce temps opératoire qu’un éventuel prolongement
orbitaire par la fissure orbitaire inférieure doit être extrait d’arrière
en avant, en prenant garde à l’abaisser par rapport au nerf sousorbitaire
autour duquel il s’enroule.
S’il existe un envahissement de la fosse ptérygoïdienne, le fraisage
des ailes de la ptérygoïde est nécessaire, poursuivi jusqu’à leur
racine.
Au cours de ce temps de fraisage, deux repères sont utiles :
dans un premier temps le toit de l’arche choanale, puisque le
fraisage peut être poursuivi jusqu’à cette hauteur sans risque, et
dans un second temps le nerf sous-orbitaire à sa sortie du foramen
rond, dont la hauteur est un repère du plancher de l’étage moyen.
En arrière des ptérygoïdes, le foramen ovale se trouve dans l’axe de
la racine de l’aile externe.
La proximité du nerf maxillaire inférieur
est annoncée par les contractions des muscles masticateurs
déclenchées par la coagulation.
La réclinaison, voire la résection, du
muscle ptérygoïdien latéral permet de découvrir le IIIe ventricule et
l’artère méningée moyenne située juste en arrière du nerf.
Juste en dedans et en bas, un éventuel prolongement paratubaire est
habituellement aisément mobilisé et abaissé vers le cavum.
La fin de
l’exérèse a été rapportée précédemment à propos de la technique
endoscopique.
En fonction des données du scanner, l’exérèse doit
être poursuivie vers le toit du cavum, voire latéralement vers le
foramen déchiré, emporter le cas échéant la partie postérieure du
vomer et la face antérieure du sphénoïde.
Le temps ultime de
l’exérèse est représenté par la section des dernières attaches
muqueuses dans le cavum.
En présence d’une masse tumorale
importante, ce temps est au mieux réalisé en glissant par voie endobuccale un doigt dans le cavum, ou en accouchant la tumeur
par l’oropharynx en rétractant le voile.
Une fois ce temps « macroscopique » d’exérèse réalisé, il est utile
d’inspecter la cavité opératoire à l’optique, en passant en revue
méthodiquement chacune des régions anatomiques initialement
concernées par le processus tumoral.
L’examen de la pièce permet théoriquement de s’assurer que le FNP
ne présente pas de zones cruentées témoignant de l’arrachement
d’une digitation tumorale.
Cependant, c’est l’expérience du
chirurgien qui, en dernier ressort, constitue le meilleur garant d’une
exérèse complète.
La navigation assistée par ordinateur telle qu’elle
se développe aujourd’hui ne permet pas encore de s’assurer de la
totalité de l’exérèse puisqu’elle fait référence à une imagerie
préopératoire.
On imagine l’aide que pourrait représenter avant la
fermeture la réalisation d’un nouveau bilan d’imagerie.
Cette
limitation est heureusement partiellement contournée par la
possibilité de réaliser précocement un scanner postopératoire suivi
le cas échéant d’une reprise par voie endoscopique dans une cavité
opératoire peu remaniée par les processus cicatriciels.
Tout saignement se prolongeant doit faire suspecter la persistance
d’un reliquat tumoral et conduire à une nouvelle exploration.
On
tapisse ensuite les parois de la cavité opératoire avec des pansements
résorbables afin d’éviter au maximum le traumatisme du
déméchage, douloureux et susceptible de déplacer le volet osseux.
Le volet osseux est alors méticuleusement ostéosynthésé en utilisant
de préférence des sutures lentement résorbables afin de ne pas gêner
la surveillance radiologique ultérieure.
On réamarre alors la sangle
musculaire péribuccale à l’épine nasale avant de suturer les incisions
vestibulaires nasales et buccales.
* Soins postopératoires
:
Des lavages des fosses nasales sont nécessaires durant plusieurs
semaines afin de limiter la formation de croûtes.
C - AUTRES VOIES D’ABORD
:
1- Voies antérieures transmaxillaires
:
*
Voie de Rouge-Denker :
Cette voie vestibulaire transantronasale comporte une incision type
Caldwell-Luc dépassant de 2 cm la ligne médiane, permettant après
rugination du périoste la trépanation de la paroi antérieure du sinus
maxillaire et la résection de la cloison intersinusonasale, ainsi que la
mobilisation de la cloison nasale, donnant ainsi accès après
trépanation de la paroi postérieure du sinus à la partie interne de la
fosse infratemporale.
En pratique, l’exposition procurée par cette
voie d’abord est exiguë par rapport à celle que procure le degloving.
* Voie transmaxillonasale bilatérale par ostéotomie de Le Fort I
:
Après incision vestibulaire bilatérale, rugination de la muqueuse du
plancher des fosses nasales et désinsertion du septum, l’ostéotomie
bilatérale permet l’abaissement du plateau maxillopalatin.
Cette
voie, quoique séduisante par l’absence de séquelles esthétiques, ne
donne pas accès à la partie supérieure, postérieure et surtout externe
de la fosse infratemporale.
De plus, l’accès postérieur est malaisé
puisque le plateau a tendance à basculer vers le bas autour d’une
charnière postérieure.
2- Voies d’abord transmandibulaires
:
*
Voie de Dingman et Conley :
Par une incision arciforme menée de la pointe de la mastoïde à la
symphyse mentonnière, on réalise une ostéotomie horizontale basse
de la branche montante de la mandibule.
L’accès à la région rétromaxillomalaire
et à la région ptérygoïdienne est satisfaisant, en
revanche l’accès à la région ptérygopalatine est malaisé. De plus,
elle entraîne la section du nerf alvéolaire inférieur.
* Voie décrite par Legent et al
:
On réalise, grâce à une incision préauriculaire poursuivie dans la
région cervicale, une ostéotomie mandibulaire haute, au-dessus de
l’épine de Spix, permettant la conservation du nerf dentaire inférieur
et du nerf lingual.
Là encore, le principal inconvénient de cette voie
réside dans la difficulté d’accès à la partie haute de la fosse ptérygomaxillaire et de la région rétromaxillomalaire.
* Voie de Biller ou voie cervicotransorale avec mandibulotomie
médiane
:
Elle réalise un abord antéro-inférieur de la fosse infratemporale, la
progression chirurgicale se faisant le long du ptérygoïdien médial.
L’incision cervicale est tracée de la pointe de la mastoïde jusqu’au bord latéral du corps de l’os hyoïde et remonte en avant de la
symphyse mentonnière, avec section labiale inférieure.
Les gros
vaisseaux du cou sont disséqués et repérés.
Après la réalisation de
l’ostéotomie mandibulaire et incision de la muqueuse du plancher
buccal jusqu’au pilier antérieur du voile, l’hémimandibule est
réclinée en haut et en dehors en même temps que la glande sousmaxillaire
et le mylohyoïdien libéré de ce dernier.
On obtient un
jour large sur la région ptérygoïdienne jusqu’au foramen ovale, voire
sur la trompe d’Eustache et la paroi latérale du cavum.
En revanche,
l’exposition de l’aile interne de la ptérygoïde ou de la fissure ptérygopalatine est barrée par la tubérosité maxillaire, dont le
sacrifice paraît excessif s’agissant d’une pathologie bénigne ; de
même l’abord d’un éventuel prolongement dans la fosse temporale
est impossible.
Cette voie par ailleurs très anatomique entraîne
souvent un trismus sévère lié à la dissection des muscles
ptérygoïdiens, voire au traumatisme de l’articulation temporomandibulaire.
3- Voies latérales transzygomatiques
:
Ces voies comprennent une incision temporofrontale, prolongée en
préauriculaire, qui permet la section de l’apophyse zygomatique.
Celle-ci est réclinée vers le bas avec le masséter. Le temporal peut
alors être décollé de haut en bas et pédiculisé sur le coroné, ou à
l’inverse récliné vers le haut après section du coroné.
Décrite par Stricker, l’intérêt de cette voie pour les tumeurs bénignes de la
fosse infratemporale a été souligné par Bordure et al.
Cette voie peut être poursuivie en incision de parotidectomie,
l’exposition est alors améliorée en réclinant le condyle mandibulaire
vers le bas, et en fraisant le plancher de la fosse cérébrale moyenne.
Cette voie préauriculaire sous-temporale dérivée de l’intervention de
Sekhar, est largement détaillée dans le Rapport sur la fosse
infratemporale.
Il s’agit d’une voie complexe, qui permet un
contrôle de la base du crâne au prix de séquelles modérées, puisque,
si le rameau frontal du facial peut être traumatisé, la cicatrice est
peu visible et la surdité de transmission temporaire.
La séquelle la
plus importante concerne l’articulé : un trismus prolongé est
possible, de même qu’une latérodéviation de la mandibule en cas
de résection du condyle.
Brièvement, l’incision frontotemporale en « faucille » est prolongée
vers la région cervicale selon le tracé de la parotidectomie.
Le tronc
du facial est disséqué et le rameau frontal est rabattu vers le bas.
Notons que cette même voie d’abord peut être réalisée sans
dissection du facial, ce qui raccourcit le temps opératoire, sous
réserve que la dissection soit menée sous le plan de l’aponévrose
temporale, avec une rugination de la face profonde de l’apophyse
zygomatique.
L’arcade zygomatique est déposée en la sectionnant le
plus en avant possible et en la réclinant vers le bas avec le masséter.
Le coroné est sectionné à sa base et le muscle temporal est alors
basculé vers le haut. Enfin, le condyle mandibulaire est luxé après
ouverture de l’articulation.
En fait, il est souvent nécessaire de le
réséquer.
Le toit de la région infratemporale est fraisé après avoir
été ruginé jusqu’à exposer la dure-mère : ceci revient à fraiser la
racine du zygoma, puis la grande aile du sphénoïde jusqu’à la racine
des ptérygoïdes.
Après identification de l’artère méningée moyenne
et du IIIe ventricule, le fraisage de la racine des ptérygoïdes conduit
au foramen rond, à la fissure ptérygopalatine et à la paroi latérale
du cavum.
La fermeture comprend le comblement de la cavité
opératoire par un lambeau de temporal ou de la graisse, la reposition du temporal avec ostéosynthèse du coroné et
l’ostéosynthèse du zygoma.
Notons que du fait de son obliquité, cette voie d’abord permet un
contrôle satisfaisant du cavum et de la fosse infratemporale.
En
revanche, l’exposition de la majeure partie du sinus sphénoïdal est
ici impossible.
Certains réalisent cet abord latéral au prix d’une pétrectomie
antérieure : c’est la voie infratemporale de type C de Fisch.
L’inconvénient principal de cette voie d’abord réside dans la surdité
de transmission de 60 à 80 dB qu’elle engendre du fait de l’ablation
du système tympano-ossiculaire et du comblement des cavités de
l’oreille moyenne.
Brièvement, l’abord du rhinopharynx se fait par une grande incision
en « C » rétroauriculaire, tracée 3 à 4 cm derrière le sillon
rétroauriculaire, démarrant en bas au niveau de l’angle mandibulaire
et poursuivie en « faucille » vers l’avant à l’aplomb du sourcil.
La
bifurcation carotidienne et la veine jugulaire interne sont exposées
et repérées sur lacs. Le conduit auditif externe est suturé.
Le facial
est repéré à son émergence du trou stylomastoïdien et le rameau
frontal est suivi jusqu’à son croisement avec le zygoma.
La peau du
conduit auditif externe, le tympan, l’enclume et le marteau sont
retirés et une pétrectomie subtotale est réalisée, respectant le
labyrinthe et squelettisant le facial depuis son genou jusqu’à sa
portion extracrânienne.
Le muscle temporal est décroché de son
insertion dans la fosse temporale et récliné vers l’avant et le bas.
L’arcade zygomatique est sectionnée après avoir réalisé les trous
nécessaires à son ostéosynthèse, et refoulée vers le bas. Le segment
vertical de l’artère carotide interne est squelettisé à la fraise
diamantée en prenant garde à ne pas léser la cochlée.
La paroi
antérieure du conduit auditif externe est fraisée, puis la capsule de
l’articulation temporomandibulaire est libérée aux ciseaux et à la
bipolaire.
Le ménisque est retiré et le condyle exposé.
L’écarteur de Fisch est alors mis en place, permettant de maintenir le condyle vers
le bas.
La cavité glénoïde est alors fraisée, ce qui expose la duremère
de l’étage cérébral moyen, qui est alors suivie en avant et en
dedans.
L’artère méningée moyenne est coagulée et sectionnée, de
même que le nerf mandibulaire.
La portion osseuse de la trompe
d’Eustache est fraisée pour exposer la portion horizontale de l’artère
carotide interne, qui est suivie jusqu’au foramen déchiré.
Le périoste
de la racine de la ptérygoïde, de la grande aile du sphénoïde et de
l’aile externe de la ptérygoïde est ruginé, ce qui décroche le muscle
ptérygoïdien latéral.
La racine de la ptérygoïde est alors fraisée.
Le
nerf vidien, qui résulte de la réunion du grand nerf pétreux
superficiel et du nerf pétreux profond, est exposé, de même que la
muqueuse sphénoïdale.
En fonction des extensions tumorales, on
procède :
– en cas d’atteinte péritubaire, à une résection de la paroi latérale
du cavum après section des muscles ptérygoïdiens et fraisage de
l’aile interne de la ptérygoïde ;
– en cas d’atteinte du sinus sphénoïdal et de la fissure ptérygopalatine, au fraisage de la grande aile du sphénoïde,
exposant la dure-mère de la fosse cérébrale moyenne, puis au
fraisage de la racine de la ptérygoïde ;
– en cas d’atteinte parasellaire, la section du IIe ventricule permet
d’exposer la paroi latérale du sinus caverneux en réclinant le lobe
temporal.
La fermeture est assurée en basculant un lambeau de muscle
temporal dans la cavité opératoire, puis en effectuant l’ostéosynthèse
de l’arcade zygomatique et en comblant les cavités mastoïdiennes
par un lambeau occipital ou de la graisse abdominale.
Indépendamment de la complexité de cette voie et des séquelles
qu’elle entraîne, l’abord sphénoïdal est là encore très limité.
4- Voie transbasale ou sous-faciale
:
Nous renvoyons le lecteur aux autres chapitres de ce traité décrivant
cette voie d’abord.
Ces voies d’abord ne sont justifiées que dans les
rares extensions massives à l’étage antérieur.
Elles présentent
l’inconvénient de sacrifier l’olfaction.
Cas particulier de l’extension
intracrânienne :
Grâce aux progrès de l’imagerie, l’extension intracrânienne concerne
aujourd’hui peu de FNP.
Pendant longtemps, ces tumeurs étaient
considérées comme au-delà de toute ressource thérapeutique.
Si une
exérèse partielle était tentée, celle-ci laissait en place un reliquat
tumoral qui, s’il était parfois susceptible d’involuer, pouvait tout autant être à l’origine d’une récidive.
Les progrès de l’imagerie, de
l’embolisation et des techniques chirurgicales ont permis que
certaines extensions intracrâniennes puissent bénéficier d’un
traitement radical.
En pratique, les extensions latérocaverneuses sont en général
extradurales, externes au sinus caverneux, et leur exérèse peut être
réalisée par voie latérale, voire par voie antérieure, sans qu’un
double abord antérieur et latéral doive être envisagé.
Les
extensions antérocaverneuses peuvent dans certains cas être
désenclavées par voie antérieure.
Les extensions médiocaverneuses
sont contrôlées par abord antérieur du sphénoïde au mieux sous
guidage endoscopique.
Le vrai problème est celui des atteintes
massives du sinus caverneux, habituellement par voie antéro- ou
inférocaverneuse, avec parfois engainement du nerf optique.
Dans
ces situations actuellement exceptionnelles, la plupart des opérateurs
refusent de pratiquer une chirurgie mutilante.
En effet, les
dissections des éléments du sinus caverneux sont théoriquement
possibles puisque celui-ci n’est pas constitué, comme on l’a souvent
décrit, d’un lac sanguin baignant les nerfs oculomoteurs et la
carotide interne, mais plutôt d’un réseau plexiforme de veines
entourant la carotide interne et les nerfs oculomoteurs.
Cependant
dans le cadre des FNP, l’adhérence tumorale est telle que le risque
d’ophtalmoplégie voire de cécité peut être considéré comme majeur.
Ces patients sont pour la plupart pris en charge par radiothérapie.