Cancers de la voie biliaire principale
(Suite) Cours de Chirurgie
* Hépatectomie centrale
:
On appelle hépatectomie centrale l’exérèse de segments hépatiques
appartenant au foie gauche (segment IV) et au foie droit (segments
V et VIII).
Cette hépatectomie centrale laisse en place les segments II et III à gauche et le secteur latéral droit (segments VI et VII).
Elle doit être associée à l’exérèse du segment I.
Les anastomoses biliaires
se font à droite sur le canal latéral droit passant en arrière du
pédicule paramédian droit et à gauche au niveau de la scissure
ombilicale, le plus souvent sur les canaux des segments II et III.
En effet, l’envahissement du pédicule principal droit ne requiert
pas toujours une hépatectomie droite si le canal latéral droit et le
canal gauche proximal apparaissent indemnes d’invasion
tumorale, soit à la cholangiographie, soit à la palpation.
Dans de
tels cas, l’hépatectomie centrale a l’avantage d’obtenir une
excellente marge de sécurité à droite et à gauche de la
convergence biliaire.
Les premiers gestes consistent à s’assurer de la possibilité de cette
intervention.
On ouvre donc la scissure dorsale par approche
postérieure pour s’assurer que le canal latéral droit et le canal biliaire
gauche sont indemnes d’extension néoplasique.
À gauche, si
l’extension néoplasique paraît se poursuivre en périphérie,
l’ouverture du pont parenchymateux entre IV et III, l’ouverture de
la scissure ombilicale à droite du ligament falciforme permettent
d’aborder les canaux biliaires des segments II et III.
Les branches
artérielles et portales paramédianes droites sont liées et sectionnées
en intraglissonien de la même manière que dans l’hépatectomie
gauche élargie.
L’ouverture de la scissure dorsale permet de repérer
sur lacs la voie biliaire paramédiane droite et latérale droite.
La
ligature des vaisseaux paramédians droits a dessiné la scissure
latérale droite tandis que l’on suit de bas en haut et d’avant en
arrière, retrouvant le flanc de la veine sus-hépatique droite.
Le canal
biliaire droit est situé sur la pièce opératoire.
Le canal latéral droit dilaté est alors sectionné à distance de la
tumeur.
En règle générale, la vésicule n’a pas été disséquée et est
laissée en place sur la pièce opératoire.
On poursuit l’ouverture
de la scissure ombilicale à droite du ligament falciforme et les
pédicules du segment IV sont liés un par un.
La veine sushépatique
moyenne est liée à sa terminaison à la fin de l’ouverture
de la scissure ombilicale.
Celle-ci rejoint l’ouverture de la scissure
dorsale.
Après ouverture et section du petit épiploon, l’incision
du péritoine pariétal postérieur à gauche de la veine cave
inférieure libère le lobe caudé que l’on dissèque de manière
habituelle.
L’ouverture du parenchyme hépatique le long du canal
d’Arantius va permettre son exérèse en même temps que
l’hépatectomie centrale.
Cette exérèse a lieu après section du canal
biliaire gauche ou des canaux des segments II et III à distance de
la tumeur.
* Exérèses hépatiques avec exérèses vasculaires
:
+ Exérèses hépatiques avec exérèse porte
:
L’une des causes majeures d’irrésécabilité des cancers du tiers
supérieur a été l’extension à la bifurcation du tronc porte.
C’est
en 1966 que Kajitani, cité par Tsuzuki, a rapporté un cas de
cancer du tiers supérieur avec hépatectomie et anastomose
portocave.
Tsuzuki a rapporté deux cas avec reconstruction de
la veine porte à l’occasion d’une hépatectomie gauche.
En 1984, Blumgart rapporte neuf cas d’atteinte de la bifurcation du tronc
porte, nécessitant soit une suture, soit dans deux cas, une résection
de la bifurcation avec anastomose du tronc porte à la branche
gauche.
Il a, par la suite, parfaitement codifié la technique.
Le taux
de résécabilité est fonction du taux d’hépatectomie.
Le
taux d’hépatectomie est fonction du taux de résection du tronc
porte ou de ses branches.
Dans la série de Nagoya, 80,5 % des
cancers biliaires ont été réséqués.
L’hépatectomie a été réalisée
dans 62,9 % des cas et 27,7 % ont eu une résection du tronc
porte.
Sur ces 29 malades, 16 avaient un cancer biliaire et 13 un
cancer de la vésicule.
Souvent, une hépatectomie droite élargie au segment IV s’avère
nécessaire.
La technique opératoire se simplifie par
rapport à la technique habituelle.
On se porte d’emblée sur la
branche gauche de 1’artère hépatique et l’on découvre, derrière
elle, la branche gauche du tronc porte contre le ligament rond.
S’il n’existe aucune extension néoplasique, le cancer biliaire peut
être réséqué, à condition que l’on soit aussi en territoire sain sur
le canal biliaire gauche au même niveau.
Le tronc porte est
clampé au pied du pédicule hépatique, ainsi que sa branche
gauche contre le récessus de Rex.
L’on procède à la résection
portale attenante à la tumeur et la continuité veineuse est
rétablie.
La scissure ombilicale est ouverte, à droite du ligament
rond et du ligament falciforme.
Les pédicules du segment IV
sont liés et sectionnés.
La section parenchymateuse est alors
entreprise pour pratiquer l’hépatectomie en même temps que le
curage du pédicule hépatique et l’ablation du cancer biliaire.
Le
rétablissement de la continuité veineuse s’effectue en général
sans interposition veineuse.
La congruence peut être facilitée par
une incision sur le bord inférieur de la branche gauche du tronc
porte.
Une anastomose à expansion telle qu’elle a été décrite
en transplantation hépatique évite toute sténose.
Sagaguchi
a par ailleurs parfaitement décrit les conditions d’un parfait
rétablissement de continuité.
Il estime que la section de la branche du tronc porte du côté hépatique doit être effectuée à
2 cm de la tumeur.
Aussi doit-on la libérer du parenchyme
hépatique avoisinant, en ligaturant et sectionnant quelques
branches.
Si le champ opératoire est trop étroit ou
trop profond, ou s’il existe une traction lors de l’anastomose, il
est préférable d’utiliser une greffe veineuse.
Ces exérèses vasculaires permettent l’exérèse de cancer biliaire proximal,
même en cas d’atteinte vasculaire bilatérale.
Dans notre expérience, l’utilisation de la veine iliaque primitive
constitue un excellent matériel.
Sa paroi est solide. Son diamètre est
identique à celui du tronc porte.
Son prélèvement peut être effectué
par médiane sous-ombilicale.
La circulation veineuse de retour du
membre inférieur n’est pas interrompue si elle est prélevée en aval
de la veine hypogastrique.
La veine jugulaire interne est également
un excellent matériel.
Une greffe veineuse conservée peut être
utilisée. Des reconstructions artérielles et veineuses complexes ont
été utilisées par Lygidakis.
+ Exérèses hépatiques avec reconstruction artérielle
:
La résection hépatique de l’artère hépatique controlatérale d’une
hépatectomie a des résultats aléatoires.
Si l’artère hépatique est
comprimée ou obturée par la tumeur avec un flux artériel réduit, sa
ligature est alors sans conséquence.
Ailleurs, la continuité artérielle
doit être impérativement rétablie pour éviter le risque de voir
survenir une nécrose hépatique souvent disséminée à travers le foie
au-dessus de toute ressource thérapeutique.
* Exérèses hépatiques avec duodénopancréatectomie céphalique :
hépato-duodéno-pancréatectomie :
Lorsqu’il existe un envahissement microscopique sur l’extrémité
inférieure du cholédoque intrapancréatique, une duodénopancréatectomie
céphalique est associée.
Mais Nimura a proposé
l’hépatoduodénectomie pour des cancers avancés des voies biliaires.
Une hépatectomie droite ou droite étendue, ou une hépatectomie
gauche étendue ont pu être associées à une duodénopancréatectomie
céphalique.
Une résection du tronc porte et de la veine cave
inférieure a pu être associée.
* Hépatectomie totale avec transplantation hépatique
:
L’hépatectomie totale avec transplantation hépatique est une
intervention facile dans les cancers du tiers supérieur de la voie
biliaire principale.
Naturellement, l’on procède à un curage du pédicule hépatique
jusqu’au bord supérieur du duodénum.
L’hépatectomie totale ne pose aucune difficulté.
Certes, il existe un foie de cholestase, mais il
n’y a en règle pas d’hypertension portale et la fonction hépatique
est normale, sans trouble de coagulation.
Le rétablissement de la
continuité biliaire est obligatoirement réalisé par anastomose cholédocojéjunale sur anse en « Y », soit sur un drain perdu, soit
avec un drain de Kehr transanastomotique, soit avec un drain
transcystique et transanastomotique.
* Hépatectomie totale et pancréatectomie totale avec transplantations
hépatique et pancréatique totale (« abdominal organ cluster
transplantation »)
:
L’équipe de Pittsburgh a proposé d’associer hépatectomie totale,
pancréatectomie totale et ablation du pédicule hépatique avec
transplantations hépatique et pancréatique simultanées.
Il s’agit en
fait d’une ablation complète et en bloc de l’étage sus-mésocolique
comprenant en outre le côlon droit et la partie droite du transverse
(organ cluster transplantation). Une transplantation pancréatique
associée évite la réalisation d’une anastomose biliaire.
Mais les problèmes postopératoires posés par la transplantation
pancréatique ont justifié lors de la reconstruction de ne réaliser que
la transplantation hépatique.
Dans le but d’éviter la dénutrition majeure accompagnant cette
chirurgie d’exception, il a été proposé par notre groupe de conserver
l’estomac en totalité.
Cette intervention est néanmoins tombée en
désuétude avec la diminution des indications de transplantations
pour cancer.
* Hépatectomie totale, duodénopancréatectomie céphalique
et transplantation hépatique
:
Dans les cancers proximaux des voies biliaires irrésécables, on a
proposé d’associer à l’hépatectomie totale une lymphadénectomie
étendue, une duodénopancréatectomie céphalique et transplantation
hépatique.
C - TECHNIQUES DE DÉRIVATION
:
1- Intubation transtumorale
:
Ce sont les mêmes techniques que celles décrites pour les
volumineux cancers inextirpables de la vésicule biliaire propagés
aux canaux biliaires sous-hépatiques.
2- Anastomoses biliodigestives
:
Classiquement, lorsque la convergence des deux canaux hépatiques
est respectée, l’anastomose intrahépatique gauche utilisant l’abord
du ligament rond a été adoptée pour son élégance par de nombreux
auteurs.
C’est la plus réglée des anastomoses intrahépatiques et elle
est à distance du cancer.
Lorsque la convergence est envahie et la communication entre les
voies biliaires des hémifoies interrompue, il y a trois possibilités :
l’anastomose intrahépatique gauche, l’anastomose intrahépatique
droite ou l’anastomose intrahépatique bilatérale.
* Anastomose intrahépatique gauche
:
Elle reste théoriquement indiquée si le foie gauche est hypertrophié.
Le canal biliaire du segment III peut être abordé par ouverture
première de la scissure ombilicale.
La dissection du ligament rond
mène sur le récessus de Rex.
À ce niveau, le pédicule paramédian
gauche se divise en deux bouquets terminaux, formés chacun d’une
ou plusieurs arborisations : la corne gauche est destinée à la partie
antérieure du lobe gauche, c’est le pédicule du segment III ; la corne
droite forme le pédicule principal du segment IV, auquel appartient
le lobe carré.
Si l’on ouvre la scissure à partir du bord antérieur de
la face supérieure du foie (à 5 mm à gauche du ligament falciforme),
on prend contact avec la face supérieure de la plaque ombilicale :
aucun élément vasculaire ou biliaire important n’est ainsi
interrompu, la solution de continuité intéresse les seuls sinusoïdes.
Cette incision parenchymateuse est facilitée par l’utilisation d’un
dissecteur à ultrasons.
Le canal biliaire du segment III se situe au-dessus et en avant du
bord supérieur de la veine porte du segment III.
L’échographie peropératoire initiale peut aider à reconnaître le canal
biliaire.
Il est utile pour le repérer d’utiliser une aiguille fine montée sur
seringue où l’on maintient le vide.
Une fois repéré, il est incisé
longitudinalement au travers de la gaine fibreuse glissonienne qui
renforce sa paroi. Une incision de 1 à 2 cm peut ainsi être effectuée.
Une anse en « Y » de 80 cm est réalisée.
L’anastomose biliodigestive
hépaticojéjunale est faite en un plan total du côté biliaire,
extramuqueux du côté jéjunal, aux points séparés de fils résorbables
à résorption lente PDSt 5/0.
L’anastomose est habituellement latérolatérale.
Il est rare qu’il soit nécessaire de mettre en place un
drain transanastomotique, habituellement un drain de Redon.
Chez un de nos malades, une anastomose identique a été pratiquée
sur le canal du segment IV, lui aussi superficiel, et dont finalement
la voie d’abord est très parallèle mais à droite du ligament rond.
La
paroi en est cependant fine et le drainage anastomotique nécessaire.
* Anastomoses intrahépatiques droites
:
Contrairement au foie gauche, il n’existe pas de repère anatomique
précis au niveau du foie droit pour réaliser une anastomose hépaticojéjunale droite.
De même, les rapports vasculobiliaires
diffèrent d’un malade à 1’autre, notamment dans la constitution du
pédicule droit.
Il est donc indispensable d’avoir une bonne cholangiographie des voies biliaires droites pour choisir le type
d’anastomoses et leur lieu d’implantation.
De nouveau, l’échographie peropératoire aide à reconnaître la
dilatation des canaux sectoriels et segmentaires du foie droit.
Elle
peut suppléer la cholangiographie peropératoire.
L’emploi d’un
dissecteur ultrasonique est particulièrement utile dans ce type de
chirurgie.
Les anastomoses intrahépatiques droites sont théoriquement choisies
en cas d’atrophie du lobe gauche, mais en fait elles rentrent souvent
dans le cadre des anastomoses bilatérales dans les types II et III où
il n’existe pas de communication entre les deux foies.
La cholangiographie rétrograde est particulièrement nuisible si l’un des
deux foies n’est pas drainé avec un risque d’angiocholite et de mort
septique, surtout s’il y a eu opacification des voies biliaires
intrahépatiques.
Trois types d’anastomoses droites ont été développés.
+ Anastomoses intrahépatiques droites avec exérèse
:
Les techniques d’anastomoses intrahépatiques droites ont été
décrites dès 1960 par Hepp.
Le coin antéro-inférieur droit du foie
est sectionné horizontalement au bistouri électrique.
Lors de cette
section, l’on doit reconnaître un à deux pédicules vasculobiliaires
du segment Vl.
Il ne peut être question de faire une hémostase
préalable de peur de manquer les canaux biliaires.
Aussi doit-on
faire l’hémostase dès le moindre saignement.
Il s’agit le plus souvent
d’un saignement veineux aisé à contrôler par clip.
Néanmoins, la
tâche est grandement facilitée par le clampage du pédicule
hépatique (manoeuvre de Pringle).
En règle générale, les canaux
rencontrés ont un calibre inférieur à 5 mm ; ils ne peuvent donc être
anastomosés directement sur une anse en « Y ».
C’est donc la tranche
hépatique qui est suturée dans son ensemble à l’anse en « Y », les
canaux biliaires étant intubés par un drainage biliaire ressortant à la Voelker à travers l’anse en « Y ».
Si les canaux biliaires ont un diamètre supérieur à 5 mm, ils peuvent
être directement anastomosés.
Il est cependant exceptionnel que l’on
puisse se passer de drains anastomotiques, qui doivent rester en
place durant 1 à 2 mois.
+ Anastomoses intrahépatiques droites sans exérèse
:
– Hépatectomie du bord antérieur du foie droit.
Cet abord du canal du segment V a été décrit par Bismuth et Lechaux.
Le bord antérieur du foie, à 3 ou 4 cm à droite de la vésicule, est
progressivement incisé en direction du hile jusqu’à ce qu’un canal
suffisamment large soit isolé.
Le foie est habituellement cholestatique
et volumineux et il est souvent utile de réaliser une résection
hépatique cunéiforme pour réaliser une anastomose terminolatérale
hépaticojéjunale.
– Abord trans-scissural antérieur du segment V.
Il a été proposé dès 1968 par Prioton.
Pour retrouver le canal du
segment V, il a suggéré d’ouvrir la grande scissure dans sa partie
antérieure et, par une incision transversale vers la droite à hauteur
du hile, de le mettre en évidence.
« Le canal étant atteint, deux
possibilités sont offertes : soit une anastomose latérale (facilitée
éventuellement en abattant l’arête hépatique, comprise entre les
deux incisions), soit une anastomose terminale après segmentectomie partielle. »
Décrite en 1990, cette voie d’abord évite d’ouvrir une large quantité
de parenchyme sur une grande hauteur comme dans l’ouverture de
la scissure médiane antérieure avec un risque constant de fuite
biliaire périphérique sur un foie cholestatique.
Cet abord ne peut
être pratiqué que s’il n’y a pas d’envahissement parenchymateux du
foie droit.
La technique a été décrite avec la dissection de la
convergence glissonienne.
La traction sur la convergence et les canaux biliaires droits facilite
considérablement l’exposition des différents canaux et permet de
choisir le plus dilaté et celui qui se prête le plus à une anastomose biliodigestive de qualité.
De préférence à un canal segmentaire, un
canal sectoriel peut être choisi.
* Anastomose intrahépatique bilatérale
:
Les anastomoses bilatérales peuvent apparaître inutiles puisqu’il
suffit du drainage de 30 à 40 % de parenchyme pour obtenir le déjaunissement et la disparition du prurit.
S’il en est ainsi, les seules contre-indications d’une anastomose unilatérale (en général sur le
canal du segment III) sont la constatation d’une atrophie du lobe
drainé ou d’un envahissement de convergences secondaires.
Mais le choix de la technique palliative est fondé non seulement sur
la mortalité opératoire, la survie, mais aussi la qualité de vie.
Or, les
anastomoses unilatérales sont souvent compliquées d’angiocholite
dans les types II et III, souvent responsable du décès à plus ou moins
long terme.
Les interventions palliatives attentent si fréquemment
au confort du malade que l’on a proposé pour les comparer des
critères de qualité de vie, de survie, ou un index de confort.
L’angiocholite apparaît quand la bile infectée n’est plus drainée par
le foie gauche ou droit et quand la convergence est secondairement
envahie.
Elle est d’autant plus fréquente qu’il y a eu par voie
rétrograde une opacification des voies biliaires intrahépatiques audessus
de la sténose tumorale.
Dès que la convergence est atteinte,
une double anastomose biliodigestive, drainant foie gauche et foie
droit, doit être pratiquée.
Elle pourrait être systématique dans tous
les cancers du tiers supérieur, de même que l’on peut discuter la
double intubation transtumorale chirurgicale ou endoscopique.
Dans
tous les cas, le médecin traitant et le malade doivent être avertis du
risque d’angiocholite entraînant l’hospitalisation immédiate.
Il peut
s’agir : soit d’une obstruction secondaire d’une anastomose sur le
canal du segment III ou d’une intubation transtumorale ; soit d’un
traitement incomplet d’une lésion de la convergence (type II ou III),
justifiant un drainage du lobe exclu controlatéral.
* Anastomose palliative et radiothérapie intraluminale
:
L’existence d’une anastomose palliative permet de compléter le
traitement palliatif par une radiothérapie intraluminale utilisant
l’iridium 192.
Deux techniques peuvent être utilisées :
– l’hépaticojéjunostomie avec drain transtumoral et transjéjunal
sortant en percutané ;
– l’hépaticojéjunostomie avec extériorisation de l’anse en « Y » en
sous-cutané.
Dans ce cas, l’anse en « Y » permet un accès aux canaux
biliaires pour des cholangiographies, des dilatations, la mise en place
de prothèses internes, ou l’utilisation de radiations intraluminales à
distance de l’anastomose biliodigestive.
3- Anastomoses palliatives ou traitement palliatif non
chirurgical :
Dans les cancers du tiers supérieur de la voie biliaire principale,
le traitement palliatif non chirurgical est extrêmement difficile.
Il
s’adresse à un drainage externe-interne en milieu radiologique
avec la nécessité absolue de drainer les deux foies dans les types
II et III si l’on veut éviter les angiocholites et la mort septique.
Le seul drainage endoscopique est inefficace dans ce type de
lésion.
Il est loin d’être prouvé que les prothèses
métalliques placées en percutané supplantent les anastomoses
palliatives.
Mais il n’existe pas de comparaison prospective
entre chirurgie et prothèses pour les obstructions biliaires
proximales.
La morbidité et la mortalité des prothèses dans les cancers hilaires
s’élèvent de 7 à 31% et de 12 à 14% respectivement.
Ces taux sont
considérablement plus élevés que pour les cancers distaux et
comparables à ceux de beaucoup de séries chirurgicales.
Des
complications tardives peuvent survenir avec un taux d’obstructions
secondaires de 24 à 38 %.
Cancers du tiers moyen
:
A - TECHNIQUES D’EXÉRÈSE
:
L’exérèse est en général toujours possible avec un curage en bloc du
pédicule hépatique et cholécystectomie.
La difficulté est de s’assurer
que la section est pratiquée en territoire sain, certes du côté duodénopancréatique mais aussi hépatique.
La biopsie extemporanée est souvent difficile à interpréter.
Plutôt
qu’une exérèse palliative, il serait préférable de réaliser une duodénopancréatectomie céphalique ou une résection de la
convergence biliaire en fonction de l’extension.
Habituellement,
l’anastomose biliodigestive est terminolatérale et siège au niveau de
la convergence.
B - TECHNIQUES DE DÉRIVATION
:
En cas d’irrésécabilité, une anastomose palliative sus-tumorale, y
compris sur la convergence sus-tumorale, est possible et n’entraîne
pas la morbidité des anastomoses intrahépatiques.
Une intubation transtumorale est souvent impossible.
Cancers du tiers inférieur
:
Les cancers du tiers inférieur sont le plus souvent confondus avec
les autres cancers périampullaires et ne sont révélés qu’à l’examen
de la pièce opératoire.
A - TECHNIQUES D’EXÉRÈSE
:
1- Duodénopancréatectomie céphalique
:
La duodénopancréatectomie céphalique pour cancer du tiers
inférieur de la voie biliaire principale est particulière, car il n’existe
pas de pancréatite d’amont comme dans les ampullomes et les
cancers du pancréas.
Le pancréas est particulièrement souple et se
prête mal à la suture, d’autant que le canal de Wirsung est petit.
* Étendue de l’exérèse et reconstruction
:
L’exérèse de la voie biliaire principale et du duodénopancréas est
une exérèse en bloc avec squelettisation du pédicule hépatique et
cholécystectomie, la section de la voie biliaire s’effectuant au-dessus
de l’implantation du cystique.
Une biopsie extemporanée doit
s’assurer de l’absence d’envahissement de la recoupe biliaire.
Dans
les cancers des voies biliaires, il est logique de conserver l’intégrité
de l’estomac et de sectionner le premier duodénum pour préserver
le pylore.
L’isthme pancréatique est ensuite sectionné.
L’exérèse du duodénopancréas s’effectue après la manoeuvre du décroisement et
la section de la lame rétropancréatique.
Le rétablissement de la
continuité est effectué selon la technique de Child, réalisant dans
l’ordre l’anastomose pancréatique, biliaire, puis, à 80 cm des
précédentes, l’anastomose duodénojéjunale.
* Anastomose pancréatique
:
Compte tenu de la friabilité du pancréas, les risques opératoires
peuvent être :
– la fistule pancréaticobiliaire due à un lâchage massif de
l’anastomose pancréatique ;
– la fistule pancréatique pure non exceptionnelle provenant autant
du tissu pancréatique que de l’anastomose pancréaticojéjunale
elle-même ;
– la pancréatite aiguë sur moignon restant.
Deux techniques d’anastomose pancréatique ont été proposées.
+ Anastomose pancréaticojéjunale
:
Deux procédés essentiels sont utilisés :
– invagination de la tranche pancréatique dans le jéjunum.
Par l’orifice,
qui ultérieurement permettra l’anastomose biliojéjunale, les fils du
plan postérieur de l’anastomose pancréaticojéjunale terminolatérale
sont attirés et permettent ainsi d’enfouir le pancréas dans la lumière
du jéjunum, facilitant d’autant une suture de la capsule pancréatique
et de la séreuse ;
– anastomose mucomuqueuse pancréaticojéjunale.
Cette anastomose est
aisée lorsque le canal de Wirsung est dilaté, en raison d’un obstacle
sur son trajet (pancréatite chronique, cancer excrétopancréatique,
ampullome).
Malheureusement, dans le cancer du tiers inférieur de
la voie biliaire principale, il n’est pas dilaté et le pancréas est friable.
Aussi l’anastomose pancréaticojéjunale doit-elle être terminolatérale
et sur drain tuteur, soit perdu, soit à la Voelker.
Dans notre technique personnelle, la capsule pancréatique
de la face postérieure est adossée à la séreuse du jéjunum, puis la séromusculeuse jéjunale est incisée longitudinalement en respectant
la muqueuse.
La berge postérieure du pancréas est alors suturée à la
berge postérieure du jéjunum.
La muqueuse jéjunale est incisée sur
1 à 2 mm pour permettre le passage d’un cathéter perdu.
La
muqueuse jéjunale est suturée à la muqueuse du canal de Wirsung
par quatre points de fil fin.
Du Tissucolt est alors mis en place entre
tranche de section pancréatique et muqueuse jéjunale.
Les deux
derniers plans antérieurs comprennent un plan unissant la séromusculeuse jéjunale et le bord antérieur de la section
pancréatique et un plan d’adossement entre la séreuse jéjunale et la
capsule pancréatique.
Toutes ces sutures doivent être réalisées avec
des fils très fins, habituellement de Prolènet 5/0.
Une étude prospective récente a montré que l’élément essentiel de
la technique opératoire est le drain transanastomotique du canal de
Wirsung.
L’adjonction d’octréotide est illusoire.
+ Anastomose pancréaticogastrique
:
De nombreux auteurs ont récemment proposé de manière
systématique l’anastomose pancréaticogastrique, arguant de la
moindre fréquence des fistules pancréatiques.
Le procédé le plus
utilisé consiste à invaginer le moignon pancréatique par une incision
de la face postérieure gastrique et suturer la capsule à la séromusculeuse gastrique.
On sait néanmoins que la sécrétion
pancréatique est inefficace en milieu acide.
Une étude prospective
et randomisée ne montre aucune différence dans le taux de mortalité
opératoire et le taux de fistule entre les deux types d’anastomose.
+ Autres procédés thérapeutiques
:
L’oblitération du canal de Wirsung proposée par Dubernard dans
la transplantation pancréatique a été utilisée avec différents produits
(Néoprène, Ethibloc).
Le pancréas peut être abandonné ou
anastomosé au jéjunum.
Ses résultats ont déçu.
La ligature du canal de Wirsung avec enfouissement de la suture
pancréatique est très proche, mais le risque de fistule n’est pas
négligeable et celle-ci peut être mortelle.
2- Pancréatectomie totale
:
Elle n’est pas justifiée sur le plan carcinologique.
Dans certains cas
difficiles de pancréas friable, elle a été proposée pour éviter une
fistule pancréatique ultérieure, et plus récemment pour le traitement
de sauvetage de fistules pancréatiques sévères.
3- Un point particulier
:
La prévention des ulcères peptiques : Scott et Grant ont insisté sur
la fréquence des ulcères anastomotiques (sans préservation du pylore) dont la fréquence pourrait atteindre 50 %.
La prévention
de ces ulcères repose sur les antiacides, les traitements anti-H2 ou
les inhibiteurs de la pompe à protons.
Le traitement facilite en outre
l’activité des enzymes pancréatiques en cas d’anastomose pancréaticojéjunale et plus encore dans les anastomoses
pancréaticogastriques.
B - TECHNIQUES DE DÉRIVATION
:
Les techniques de dérivation sont très controversées dans les cancers périampullaires.
Certains estiment que le bilan préopératoire est
susceptible d’affirmer le caractère résécable ou non de la tumeur et
qu’il est possible d’utiliser un traitement palliatif non chirurgical.
À
l’opposé, d’autres considèrent que seule l’intervention est capable
d’apprécier la résécabilité et que les interventions palliatives ont
moins de morbidité tout en assurant une palliation définitive sans
risque d’angiocholite.
Les techniques opératoires sont variées et doivent être étudiées selon
qu’il s’agit d’une dérivation biliaire ou gastrojéjunale.
1- Dérivations biliaires
:
Les dérivations biliaires peuvent être effectuées au moyen de la
vésicule ou de la voie biliaire principale.
* Anastomoses cholécystodigestives
:
Ces anastomoses biliodigestives, utilisant la vésicule, peuvent être
effectuées, soit avec l’estomac, soit avec le duodénum, soit avec le
jéjunum sur une anse en « Y ».
Les anastomoses avec l’estomac
peuvent entraîner une gastrite alcaline.
Mais toutes ces anastomoses
biliaires utilisant la vésicule dérivent souvent mal et
temporairement.
Le cystique peut s’aboucher bas dans le cholédoque
ou être rapidement envahi.
Hepp a proposé une rocade entre le
cystique et le cholédoque par une anastomose latérolatérale.
Le mauvais fonctionnement des anastomoses cholécystoduodénales
dans les transplantations hépatiques, alors qu’il n’existe pas de
risque d’envahissement secondaire, plaide pour l’abandon de ce
type d’anastomose.
* Anastomoses cholédocodigestives
:
Elles paraissent beaucoup plus sûres et dérivent le flux biliaire
d’emblée et complètement.
Ces anastomoses peuvent se faire entre
le cholédoque et le duodénum ou une anse en « Y », ce qui paraît
préférable chez le sujet jeune.
L’anastomose latérolatérale qui laisse
un cul-de-sac inférieur doit être abandonnée au profit de
l’anastomose terminolatérale, la plus haute possible pour éviter un
envahissement secondaire.
2- Dérivations gastriques
:
Une gastroentérostomie doit toujours être associée à la dérivation
biliaire.
Cette gastroentérostomie est de préférence précolique.
Elle est
réalisée sur la première anse jéjunale, soit en amont d’une anastomose
au pied de l’anse s’il s’agit d’une anastomose biliojéjunale sur anse en
« Y », soit avec une anastomose jéjunojéjunale d’aval en dessous de la
gastroentérostomie (anastomose de Braun) s’il s’agit d’une
anastomose bilioduodénale.
En effet, en l’absence d’un tel montage,
la survenue d’une gastrite alcaline risque d’entraîner un
dysfonctionnement de la gastroentérostomie, avec une aspiration
gastrique longtemps prolongée.
On peut remplacer avantageusement cette gastro-entéro-anastomose
par une section duodénale, suivie de réimplantation du duodénum
dans le jéjunum après bascule de 1’estomac en entier.
Conclusion
:
La chirurgie à visée curative des cancers de la voie biliaire principale a
acquis droit de cité.
De nouvelles orientations apparaissent, notamment
en matière de cancers du tiers supérieur ou proximal de la voie biliaire
principale.
L’association d’une hépatectomie augmente le taux de résécabilité.
La chirurgie curatrice doit être opposée aux traitements palliatifs
chirurgicaux et non chirurgicaux dont la mortalité à 30 jours élevée, la
faible survie, le risque constant d’angiocholite, la qualité de vie
médiocre en restreignent les indications.
Le large éventail de procédés thérapeutiques justifie le choix des
indications au sein d’une équipe multidisciplinaire comprenant
chirurgien, anesthésiste-réanimateur, gastroentérologue et radiologue
en collaboration avec le médecin généraliste pour le suivi ultérieur.