Cancers épidermoïdes et adénocarcinomes bronchiques Cours
de pneumologie
Le cancer bronchopulmonaire primitif est la première
cause de décès par cancer chez l’homme et ce dans tous
les pays développés.
Chez la femme, il est en passe,
outre-Atlantique, de supplanter en fréquence le cancer
du sein et de passer ainsi au premier rang.
On estime le
nombre de nouveaux cas par an à 25 000 en France et à
170 000 aux États-Unis.
L’incidence et la prévalence
sont proches, ce qui témoigne du pronostic désastreux
de cette maladie.
Le cancer bronchopulmonaire, problème
majeur de santé publique, est accessible à la prévention
puisque son principal facteur de risque, le tabagisme est
identifié.
Épidémiologie :
A - Âge
:
L’âge médian de survenue d’un cancer bronchopulmonaire
est de 62 à 65 ans, et 75 % des patients ont entre
50 et 70 ans au moment du diagnostic.
B - Sexe
:
En France, la répartition entre les sexes est encore de
6 à 9 hommes pour 1 femme, alors qu’il est de 2 à
3 hommes pour 1 femme aux États-Unis.
En effet, en
Amérique du Nord, suite aux campagnes antitabac, on
assiste depuis quelques années à un net affaissement de
la pente de l’augmentation de l’incidence des cancers bronchopulmonaires chez l’homme.
En revanche, chez
la femme, le tabagisme ayant débuté juste après la
Seconde Guerre mondiale aux États-Unis, l’augmentation
de l’incidence féminine des cancers bronchiques y a été
bien plus précoce qu’en France où le tabagisme féminin
n’est devenu important que vers la fin des années 1960.
En Europe, le rapport hommes/femmes varie également
selon les pays.
Il est le plus faible en Europe du Nord et
le plus important dans les pays « latins ».
C - Type histologique
:
Les cancers bronchiques non à petites cellules représentent
75 % de l’ensemble des cancers bronchiques primitifs.
Ils comportent les carcinomes épidermoïdes (les plus
fréquents des cancers non à petites cellules dans notre
pays), les adénocarcinomes, et les indifférenciés à
grandes cellules (dont les caractéristiques en microscopie
optique ne permettent pas le classement dans l’une ou
l’autre des précédentes catégories).
Anatomie pathologique :
La classification de l’Organisation mondiale de la santé
(OMS) de 1998 définit 9 catégories de tumeurs épithéliales
malignes avec 4 types histologiques principaux :
les épithéliomas épidermoïdes (60 % des cas) ; les épithéliomas
bronchiques à petites cellules (20 % des cas),
les adénocarcinomes (15 % des cas) ; les cancers indifférenciés
à grandes cellules (5 % des cas).
Il est défini,
par ailleurs, des carcinomes adénosquameux, des carcinomes avec des éléments sarcomatoïdes, des tumeurs
carcinoïdes, des tumeurs de type glande salivaire et des
carcinomes non classifiés.
A - Cancer bronchique épidermoïde :
Il se localise préférentiellement dans une bronche lobaire
ou segmentaire, et se présente souvent sous la forme
d’une tumeur végétante (en chou-fleur) obstruant plus
ou moins la lumière bronchique.
En même temps que la
tumeur progresse dans la lumière bronchique, elle envahit
la sous-muqueuse et le tissu péribronchique.
Lorsque la
tumeur est périphérique, une nécrose centrale est habituelle
; lorsque la tumeur est proximale, il s’y associe
une pneumonie obstructive.
Histologiquement, cette tumeur se caractérise par l’existence
de ponts intercellulaires, de kératinisation, et par
la formation de « perles » cornées.
L’ultrastructure des formes bien différenciées comporte
des cellules à cytoplasme abondant avec un réticulum
endoplasmique, un appareil de Golgi et des mitochondries
peu importantes, mais des ribosomes et des filaments
intermédiaires abondants.
Ces derniers s’agrègent pour
former des desmosomes.
En immunohistochimie, le marquage pour les cytokératines
de haut poids moléculaire, et pour l’epidermal growth
factor (EGF) est fréquemment positif.
B - Adénocarcinome bronchique :
Il est divisé en 4 sous-groupes histologiques : acinaire,
papillaire, bronchiolo-alvéolaire, et carcinome solide
avec formation de mucus.
La signification clinique de
cette subdivision est très discutée, avec l’exception de la
forme diffuse de l’épithélioma bronchiolo-alvéolaire.
L’adénocarcinome se localise volontiers en périphérie
dans les régions sous-pleurales.
Il est habituellement
bien limité bien qu’il puisse exister des aspects spiculés,
irréguliers.
Lorsqu’il s’agit d’un cancer bronchioloalvéolaire,
il n’y a pas de destruction de l’architecture
alvéolaire et les alvéoles sont littéralement tapissés par
les cellules cancéreuses (radiologiquement l’image est
alors celle d’une pneumonie).
L’adénocarcinome montre une différenciation glandulaire
de degré variable, pouvant ou non former des papilles.
En microscopie électronique l’aspect varie selon le
degré et le type de différenciation.
Les cellules sont columnaires ou cuboïdales avec des microvillosités de
surface, un réticulum endoplasmique et un appareil de
Golgi relativement abondant, et des granules sécrétoires.
En immunohistochimie le marquage pour l’antigène
carcino-embryonnaire (ACE) est très fréquent de même
que pour les cytokératines de bas poids moléculaire.
C - Cancer à grandes cellules :
Pour mémoire et dans la mesure où il appartient à la
même catégorie de cancers bronchiques non à petites
cellules, l’épithélioma bronchique à grandes cellules est
essentiellement un diagnostic d’exclusion et s’applique
aux tumeurs qui n’ont pas l’aspect d’un cancer bronchique
à petites cellules et qui n’ont ni différenciation épidermoïde ni différenciation glandulaire.
La proportion
de cancers à grandes cellules varie donc largement
selon le degré de sophistication des colorations et des
techniques anatomo-pathologiques et aussi selon la quantité
de tissu disponible pour le diagnostic.
Il s’agit en général
de tumeurs périphériques volumineuses.
Histologiquement,
les tumeurs consistent en des nappes de cellules contenant
un cytoplasme éosinophile abondant.
Étiologie
:
A - Tabac :
Le poumon est, de par sa fonction, exposé aux multiples
polluants éventuellement contenus dans l’atmosphère,
et notamment la fumée de tabac.
Plusieurs carcinogènes
sont présents dans la fumée de cigarettes : les benzopyrènes
et autres hydrocarbures aromatiques polycycliques,
les nitrosamines, les phénols, le polonium 210 et l’arsenic.
Quatre-vingt-cinq pour cent des cancers bronchopulmonaires
chez l’homme peuvent être attribués à la consommation
de cigarettes.
Le parallélisme entre la consommation de cigarettes et
l’incidence du cancer bronchopulmonaire est reconnu
depuis le début des années 1950. Le risque relatif d’un
fumeur est de 4 à 30 fois celui du non-fumeur selon la
quantité fumée.
Cette quantité est exprimée en paquetsannées
(20 paquets-années correspondent à un paquet de
cigarettes fumées par jour pendant 20 ans [ou 2 paquets
par jour pendant 10 ans]).
Ainsi, un fumeur ayant
consommé 10 paquets-années a environ 6 fois plus de
risques de développer un cancer bronchique qu’un nonfumeur,
un fumeur de 20 paquets-années 11 fois plus de
risque, un fumeur à 30 paquets-années 16 fois plus de
risque, un fumeur à 40 paquets-années 21 fois plus de
risque, un fumeur à 60 paquets-années 36 fois plus de
risque.
Cette expression du tabagisme, pour pratique
qu’elle soit, ne correspond cependant pas à la réalité car
la durée du tabagisme a une importance beaucoup plus
grande que la quantité.
Cela explique le risque augmenté
en fonction de l’âge de début du tabagisme (plus cet âge
est jeune, plus le risque est élevé).
Ainsi, le fait de fumer
des cigarettes sans filtre comportant du tabac brun est
davantage associé au carcinome épidermoïde, alors que
les cigarettes de tabac blond, avec filtre et dites
« légères » sont davantage associées au développement
de l’adénocarcinome.
Avec le changement des habitudes
tabagiques, on assiste actuellement à une augmentation
de la fréquence des adénocarcinomes aux dépens des
carcinomes épidermoïdes.
Ce fait, observé en Amérique
du Nord depuis les années 1970, n’a débuté que récemment
en France.
Après arrêt du tabac, le risque relatif
diminue exponentiellement pendant les premières
années pour revenir pratiquement à celui du non-fumeur
en 13 à 15 ans.
Le rôle du tabagisme passif dans le développement du
cancer bronchique primitif a fait l’objet de controverses.
Le risque relatif serait, d’après les méta-analyses réalisées,
de 1,1 à 1,3 (soit une augmentation du risque de 10 à
30 % par rapport à un non-fumeur non exposé).
B - Pollution atmosphérique :
Son rôle est difficile à apprécier, très différent d’un pays
à un autre et plus important dans les pays en voie de
développement.
Ainsi, en Chine, l’usage de fours à
charbon pour faire la cuisine dans certaines provinces
explique une incidence anormalement élevée du cancer
bronchique chez la femme non fumeuse.
Dans les pays développés, on estime que la pollution
serait responsable d’environ 5% des cancers bronchiques.
Les particules diesel, les benzopyrènes, les émissions de
SO2 sont autant de carcinogènes pouvant être incriminés.
C - Expositions professionnelles :
Leur rôle est souvent sous-estimé en raison du facteur
confondant que représente le tabagisme qui agit
d’ailleurs souvent comme un facteur multiplicatif du
risque relatif lié à ces expositions professionnelles.
1- Amiante :
Le risque relatif associé à l’exposition à l’amiante est de
4 à 5 par rapport à un non-fumeur non exposé.
Chez un
fumeur exposé à l’amiante, le risque relaté est de 53 fois
celui du non-fumeur.
Les métiers exposant à l’amiante
sont nombreux : le textile (surtout autrefois), l’extraction
de l’amiante, l’isolation, le bâtiment, les chantiers
navals, les ateliers de la SNCF, les garages.
La distribution
des types histologiques est la même que chez les
sujets non exposés mais le cancer siège plus volontiers
dans les lobes inférieurs.
Il peut exister par ailleurs
d’autres signes d’asbestose (plaques pleurales, fibrose
interstitielle).
2- Autres facteurs de risque :
• Nickel : les cancers des bronches (et de la muqueuse
nasale) sont plus fréquents chez les ouvriers travaillant
aux opérations de grillage de mattes de nickel.
• Acide chromique, chromates et bichromates, chromate
de zinc : seul le chrome hexavalent est cancérigène.
Les ouvriers travaillant au chromage, au tannage, à la
production de pigments ou les soudeurs à l’arc utilisant
une électrode enrobée sont exposés au risque de cancer
bronchique.
• Arsenic : l’exposition professionnelle concerne les
mineurs, les fondeurs de minerai et les ouvriers travaillant
dans la production et l’utilisation de pesticides.
L’excès de cancers bronchiques porte essentiellement
sur le type adénocarcinome et le risque relatif serait
proche de 7.
• Chlorométhyl éthers : ces substances sont largement
employées comme intermédiaires dans les synthèses
organiques et dans la préparation de résines échangeuses
d’ions.
L’augmentation du risque porte sur la variété à
petites cellules.
• Poussières ou fumées d’oxyde de fer : les mineurs de
fer ont un risque accru de cancer bronchique possiblement
par l’émission de radicaux libres par les oxydes de fer
mais aussi par exposition au radon, aux émissions des
moteurs diesel, et peut-être aussi à la silice.
• Gaz moutarde : la production des gaz toxiques pendant
la 1ere guerre mondiale et l’exposition des soldats à ce gaz
ont été responsables d’une incidence élevée de cancers
bronchiques.
• Hydrocarbures provenant du charbon et du pétrole :
ils ont été impliqués dans le développement du cancer
bronchique chez les couvreurs, les travailleurs du goudron,
les ouvriers des fours à coke.
La liste des travaux reconnus
est limitative.
L’exposition aux huiles minérales (utilisées pour lubrifier
les tours et les axes) et aux suies est aussi à l’origine de
cancers bronchiques.
• Professions à risque accru mais non encore reconnues
par le législateur : ouvriers exposés à la silice ;
soudeurs ; peintres en bâtiment ; ouvriers travaillant
dans les manufactures de chaussures et l’industrie du
caoutchouc ; imprimeurs.
D - Radiations :
Chez les survivants des bombes atomiques, le risque de
cancer bronchique a été légèrement augmenté.
De
même, il est connu que l’irradiation en mantelet réalisée
dans les maladies de Hodgkin a été suivie du développement
d’un nombre non négligeable de cancers bronchiques.
L’inhalation de matériaux radioactifs chez les mineurs
d’uranium augmente considérablement le risque de cancer
bronchique (surtout du type histologique à petites cellules).
Diagnostic :
A - Circonstances du diagnostic :
1- Signes cliniques
:
• Signes en rapport avec la tumeur bronchique
La toux est le plus fréquent des symptômes inauguraux.
Elle n’amène cependant que rarement le patient à
consulter car il la considère comme banale et due au
tabagisme.
L’hémoptysie n’est pas un symptôme très fréquent mais
elle alerte davantage le patient.
La dyspnée, en cas de tumeur à développement central,
est liée à l’obstruction par un bourgeon néoplasique ou à
la compression extrinsèque d’une grosse bronche.
En
cas d’obstruction d’une grosse bronche, on peut entendre
un ronchus fixe, un sifflement voire un cornage si la
tumeur est située dans la trachée.
Classiquement, le carcinome bronchiolo-alvéolaire
serait responsable d’une sécrétion muqueuse abondante.
Ce phénomène est en fait rare et tardif.
L’apparition
d’une expectoration purulente avec ou sans fièvre peut
être due à une infection en amont d’une sténose ou à une
nécrose tumorale.
Celle-ci est surtout le fait des carcinomes épidermoïdes.
• Signes en rapport avec l’extension locorégionale
Le syndrome cave supérieur associant des céphalées,
une cyanose de la face, un oedème en pèlerine, une
turgescence des jugulaires, une circulation collatérale
thoracique antérieure est relativement fréquent et en rapport
avec l’engainement ou la compression de la veine
cave supérieure par la tumeur ou par une adénopathie
latéro-trachéale droite.
Une compression oesophagienne par la tumeur ou par
une adénopathie est à l’origine d’une dysphagie.
Les épanchements pleuraux sont généralement secondaires à
l’envahissement de la plèvre viscérale et donc néoplasiques,
mais parfois il sont simplement liés à une atélectasie (dans
ce dernier cas, ils sont peu abondants et de type transsudatif).
Une tamponnade, une arythmie récente signent l’envahissement
péricardique par la tumeur ou ses extensions
lymphatiques.
Un hoquet ou une paralysie phrénique sont en rapport
avec une compression du nerf phrénique.
Des douleurs pariétales thoraciques, lorsqu’elles sont
fixées, insomniantes, évoquent l’envahissement de la
paroi par la tumeur.
Une dysphonie témoigne généralement d’une compression
du nerf récurrent gauche sous la crosse de l’aorte, par
une adénopathie ou par la tumeur.
La compression du nerf
récurrent droit par une adénopathie latéro-trachéale droite
haute est beaucoup plus rare.
Une adénopathie sus-claviculaire peut révéler un cancer
bronchique.
Le syndrome de Pancoast-Tobias, qui traduit le plus
souvent une origine cancéreuse, associe des douleurs
scapulaires puis des douleurs de type radiculaire C8-D1
irradiant sur la face interne du bras, de l’avant-bras et de
la main jusqu’au 5e doigt, un syndrome de Claude-
Bernard-Horner homolatéral avec myosis, énophtalmie,
et rétrécissement de la fente palpébrale.
Il s’y associe
des troubles de la sudation de l’hémiface.
Ces signes
sont liés au développement d’un cancer de l’apex envahissant
le plexus brachial, le ganglion stellaire sympathique.
Le diagnostic est souvent retardé, la tumeur étant
mal visible sur un cliché radiologique simple de face.
Tous les signes en rapport avec une extension locorégionale
éliminent d’emblée toute possibilité chirurgicale (à
l’exception toutefois de l’envahissement de la paroi et
du nerf phrénique).
• Signes en rapport avec l’extension métastatique : les
sites métastatiques les plus fréquents sont le foie, l’os, et
le système nerveux central.
C’est ainsi qu’une hépatomégalie
douloureuse avec ou sans perturbation des fonctions
hépatiques, des douleurs osseuses, des manifestations
neurologiques (déficitaires ou épileptiques), des
nodules sous-cutanés violacés peuvent révéler un cancer
bronchique primitif.
Les métastases surrénales et gastrointestinales
sont fréquentes, mais ne s’accompagnent généralement
pas de symptômes cliniques.
• Les signes généraux ne sont pas spécifiques, mais
lorsqu’ils sont présents, sont de mauvais pronostic : altération
de l’état général à apprécier par l’échelle de Karnofsky, amaigrissement que l’on chiffrera.
• Les signes en rapport avec des syndromes paranéoplasiques
sont fréquents.
Certains ne sont rencontrés
que dans le cancer bronchique non à petites cellules :
syndrome de Pierre-Marie (ostéoarthropathie hypertrophiante
pneumique), hypercalcémie, alors que d’autres
se voient indifféremment dans tous les types histologiques
: syndromes hématologiques, cutanés, etc.
• Certains cancers bronchiques asymptomatiques,
notamment ceux se présentant comme un nodule solitaire
en plein parenchyme, sont parfois détectés lors d’un
examen radiographique pulmonaire de rencontre.
2- Signes radiologiques :
Très variables, mais souvent évocateurs, ils permettent
de différencier les cancers centraux (développés dans le
tiers interne des champs pulmonaires) des cancers périphériques.
Les premiers se présentent souvent sous la
forme d’une opacité polycyclique hilaire, ganglio-tumorale
accompagnée ou non d’une atélectasie ou d’un trouble
de ventilation d’un ou 2 lobes voire de tout un poumon.
Parfois, l’opacité hilaire se poursuit vers le médiastin
supérieur par une opacité latéro-trachéale, voire une
ombre en cheminée signant l’envahissement ganglionnaire
médiastinal.
Ces images sont souvent le fait des
cancers bronchiques à petites cellules, mais aussi de
certains cancers épidermoïdes ou des indifférenciés à
grandes cellules, plus rarement des adénocarcinomes.
Les seconds se présentent parfois sous forme d’un nodule
solitaire, à contours spiculés, grossièrement arrondi, et
correspondent souvent à des adénocarcinomes.
Lorsque
ces nodules comportent un bronchogramme aérique il
s’agit alors souvent d’un cancer bronchiolo-alvéolaire.
Lorsque la masse tumorale est importante, elle est fréquemment
le siège d’une nécrose centrale donnant une
image de pseudo-abcès dont les parois sont épaisses et
les limites internes irrégulières.
Cette image est quasi
pathognomonique d’un cancer épidermoïde.
Les cancers périphériques proches de la paroi peuvent
s’accompagner d’une lyse costale, d’un épanchement pleural.
Les cancers bronchiolo-alvéolaires diffus sont à l’origine
d’une image de comblement alvéolaire non systématisée
comportant un bronchogramme aérique, et pouvant
s’étendre dans les 2 champs pulmonaires.
Le syndrome de Pancoast-Tobias se traduit volontiers
par une coiffe apicale accompagnée de la lyse des premiers
arcs costaux.
B - Éléments du diagnostic positif :
La bronchofibroscopie est l’élément majeur du diagnostic.
Si elle est souvent normale dans les formes périphériques
on effectue cependant un lavage et un brossage dans la
bronche du territoire concerné permettant une analyse
cytologique.
Dans les formes centrales on visualise
tantôt un bourgeon obstruant une bronche, tantôt une
infiltration de la muqueuse, tantôt enfin une compression
extrinsèque.
Des biopsies de la formation bourgeonnante
mais aussi des éperons en aval de la lésion, sont effectués
permettant d’une part le diagnostic positif, mais
participant d’autre part au bilan d’extension en donnant
des renseignements pour l’indication opératoire.
Parfois le diagnostic est établi par ponction et (ou) biopsie
pleurale en cas d’épanchement, par ponction-biopsie
d’une éventuelle adénopathie sus-claviculaire, par ponction
sous contrôle tomodensitométrique d’un nodule
pulmonaire, par ponction échoguidée d’un nodule d’aspect
métastatique du foie, etc.
Les marqueurs tumoraux ne sont d’aucun apport au diagnostic
positif.
L’antigène carcino-embryonnaire (ACE)
est surtout élevé dans les adénocarcinomes et en présence
de métastases hépatiques.
Le Cyfra 21-1 est surtout
élevé dans les épithéliomas épidermoïdes.
Il a une
valeur pronostique indépendante dans le cancer bronchique
non à petites cellules.
Le dosage des marqueurs,
même si leur évolution est le plus souvent parallèle à
celle de la maladie, n’est pas recommandé, compte tenu
de leur coût et de données insuffisantes pour établir leur
réel intérêt dans la décision thérapeutique.
C - Diagnostic d’extension :
Il est indispensable car les indications thérapeutiques en
dépendent.
L’examen clinique permet lui-même parfois de mettre
en évidence une extension locorégionale ou à distance
contre-indiquant d’emblée toute tentative chirurgicale.
La tomodensitométrie thoracique permet de mieux préciser
la topographie de la tumeur, ses rapports avec la
paroi ou le médiastin, d’apprécier l’existence et la taille
des adénopathies médiastinales.
Celles-ci ne sont prises
en compte que lorsqu’elles mesurent plus d’un centimètre
de diamètre.
Cependant, même au-dessus de 1 cm la
spécificité n’est pas excellente.
Lorsque l’indication
opératoire est en jeu, une médiastinoscopie ou une
médiastinotomie (pour le côté gauche) permet de trancher.
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) thoracique
a un intérêt majeur dans les syndromes de Pancoast-Tobias car elle permet, mieux que le scanner, de préciser
l’envahissement des parties molles, l’extension de la
tumeur vers le canal médullaire.
Elle prend aussi son
intérêt pour mieux étudier les rapports d’une tumeur
avec les gros vaisseaux.
Elle n’est pas supérieure à la
tomodensitométrie pour apprécier l’extension ganglionnaire médiastinale.
L’échographie abdominale réalisée de principe est un
examen sensible pour la détection des métastases hépatiques.
Au moindre doute, surtout devant une anomalie
isolée, il ne faut pas hésiter à recourir à la ponction échoguidée pour ne pas récuser abusivement la chirurgie.
La tomodensitométrie surrénale est plus sensible que
l’échographie pour la détection des métastases surrénales.
Là encore, il ne faut pas conclure abusivement à une
métastase, les adénomes étant fréquents.
La tomodensitométrie cérébrale, réalisée de principe par
certains, ne l’est pour d’autres qu’en cas de signes neurologiques
d’appel.
La fréquence des métastases cérébrales
dans les adénocarcinomes fait recommander sa pratique
systématique.
La scintigraphie osseuse est un examen sensible mais
non spécifique.
En cas d’hyperfixation on fait un cliché
centré sur le foyer et même une biopsie dirigée si la
décision thérapeutique notamment d’opérer est en jeu.
Au terme de ce bilan, la maladie peut être classée selon
la codification TNM en stades IA, IB, IIA,
IIB, IIIA, IIIB, IV.
Traitement :
A - Formes résécables et opérables
:
Chaque fois que possible une intervention est réalisée.
Celle-ci n’est possible que dans moins de 25 % des cas.
L’intervention n’est envisageable que dans les stades I, II et certains stades IIIA.
Dans ces cas, un bilan d’opérabilité
générale est réalisé comportant des explorations
respiratoires et une scintigraphie pulmonaire de perfusion
(dont les résultats couplés permettront de prédire la
capacité vitale et le volume expiratoire maximal par
seconde [VEMS] postopératoire), un examen cardiovasculaire
approfondi notamment au-delà de 60 ans avec,
entre autres, la réalisation d’un examen doppler carotidien.
Enfin, les fonctions rénale et hépatique seront
vérifiées.
L’âge limite pour une intervention est généralement
fixé à 75 ans pour une pneumonectomie et à
80 ans pour une lobectomie, mais cette limite n’a rien
d’absolu, l’âge physiologique étant plus important.
Selon les cas, une lobectomie, une bilobectomie ou une
pneumonectomie est réalisée.
En cas de nécessité, l’exérèse
peut être élargie dans une certaine mesure à la paroi
(T3 pariétaux) ou au péricarde.
B - Formes localement avancées :
Les stades IIIA inopérables et les stades IIIB font généralement
l’objet d’une radiothérapie médiastino-tumorale.
Pour être efficace, la dose totale de radiothérapie doit
être de 60 à 65 grays (Gy) délivrés avec des faisceaux
antéro-postérieurs par fraction de 2 Gy, 5 jours par semaine.
À partir de 40 Gy, on protège la moelle osseuse et la
radiothérapie est délivrée par des champs obliques.
On associe à la radiothérapie une chimiothérapie qui
comporte du cisplatine associé à un alcaloïde de la pervenche
(vinorelbine) ou à la gemcitabine ou à la mitomycine,
à l’ifosfamide.
La chimiothérapie est administrée
soit avant la radiothérapie (2 ou 3 cycles espacés de
28 j), soit concomitamment à la radiothérapie.
Dans ce
dernier cas, la toxicité aiguë (notamment oesophagienne)
est majorée.
Certains médicaments ne peuvent être
alors utilisés telle la gemcitabine.
Certains stades IIIA jugés inopérables dans un premier
temps sont traités par chimiothérapie première suivie
d’une réévaluation.
Un certain nombre de patients sont
ainsi « rendus opérables » mais des études randomisées
doivent être réalisées pour confirmer le bien-fondé de
cette attitude dont la faisabilité est maintenant prouvée.
C - Traitement des stades IV :
Les stades IV de même que les stades IIIB non irradiables
[pleurésie et (ou) péricardite néoplasique] font
l’objet d’une chimiothérapie lorsque l’index d’activité le
permet (index de Karnofsky O 60).
Les taux de réponse
s’établissent autour de 30 à 35 % seulement mais il
existe un bénéfice indéniable bien que modeste sur la
survie.
Là aussi, les associations utilisées comportent
du cisplatine en combinaison avec un alcaloïde de la
pervenche tel que la vinorelbine ou de la gemcitabine
ou de façon plus classique de la mitomycine et de
l’ifosfamide ou du 5-FU.
D - Résultats du traitement
:
Dans le cancer bronchique non à petites cellules, ils sont
très conditionnés par la résécabilité donc par l’extension
de la maladie.
La probabilité de survie dans
les formes localement avancées inopérables est de 20 à
25 % à 2 ans, et dans les formes métastatiques de 25 à
30 % à 1 an.
E - Traitement symptomatique
:
Il doit être pris en compte quel que soit le stade de la
maladie.
Les douleurs sont bien entendu un élément fréquent et
important des symptômes.
Lorsqu’elles sont très localisées,
on privilégie un traitement local (infiltration,
alcoolisation ou irradiation d’une métastase osseuse).
Lorsqu’elles sont plus diffuses, un traitement par voie
générale est nécessaire (on s’adressera assez vite aux
morphiniques).
La dyspnée liée à une lymphangite carcinomateuse est
de traitement très difficile, la corticothérapie ne soulageant
que très partiellement les patients.
Les aérosols de morphiniques
répétés à la demande peuvent être efficaces.
Lorsqu’ils ne sont plus supportés, la morphine par voie
orale ou intraveineuse peut être l’alternative.
Lorsque la
dyspnée est liée à une obstruction bronchique la destruction
d’un bourgeon par laser ou cryothérapie, la mise en place
d’une prothèse endobronchique doivent être discutées au
cas par cas.
Les hémoptysies sont généralement peu abondantes et
sont alors traitées par des médications coagulantes
(acide tranexamique, etamsylate).
Plus abondantes, elles
justifient parfois une embolisation après traitement
d’urgence par la Glypressine.