Urgence médicale et thérapeutique, l’asthme aigu grave
représente la complication redoutée de la maladie
asthmatique.
Il est dû à une obstruction majeure des
voies aériennes, responsable d’une insuffisance
respiratoire aiguë menaçant le pronostic vital.
L’asthme aigu grave reste responsable de 1 500 à
2 000 décès par an en France, malgré les progrès réalisés
dans le domaine thérapeutique au cours des dernières
années.
Les décès surviennent quasi exclusivement au
domicile ou au cours du transport à l’hôpital, justifiant
donc une prise en charge préhospitalière optimale et le
développement des transports médicalisés.
La grande majorité de ces décès est évitable, soulignant
l’importance des mesures de prévention.
Un
traitement de fond anti-inflammatoire insuffisant et (ou)
inadapté est le plus souvent en cause, notamment par
la sous-utilisation des corticoïdes inhalés.
Cependant,
l’asthme aigu grave peut survenir à tous les stades de
sévérité de la maladie y compris lorsque l’asthme est
contrôlé.
Par ailleurs, les corticoïdes oraux restent également
sous-utilisés dans le traitement des exacerbations de
l’asthme, y compris dans les formes sévères.
Définition
:
Il n’existe pas de définition univoque de l’asthme aigu
grave.
Il s’agit dans tous les cas d’une crise inhabituelle,
menaçant à court terme le pronostic vital. On peut
cependant distinguer plusieurs aspects :
– clinique : crise intense avec signes de détresse respiratoire,
résistant au traitement bronchodilatateur inhalé
usuel ;
– gazométrique : crise sévère s’accompagnant d’une
hypoventilation alvéolaire relative (normocapnie) ou
absolue (hypercapnie) ;
– fonctionnel : une valeur de débit expiratoire de pointe
inférieure ou égale à 30 % de la théorique témoigne d’une
obstruction majeure des voies aériennes.
D’un point de vue pratique, l’existence de signes
cliniques de gravité et (ou) d’une valeur de débit expiratoire
de pointe inférieure à 30 % de la théorique signe
l’asthme aigu grave.
Ces critères sont admis de manière
internationale et conditionnent la prise en charge immédiate,
sans attendre la documentation d’une hypercapnie.
Facteurs concourant à la survenue
de l’asthme aigu grave
:
Certains facteurs sont identifiés comme favorisant la
survenue de l’asthme aigu grave.
A - Profil de l’asthmatique à risque
d’asthme mortel :
Certains facteurs, directement liés à l’histoire de l’asthme
du patient et aux conditions psychosociales, caractérisent
l’asthmatique à risque.
Ces critères doivent être
systématiquement recherchés par l’interrogatoire, car ils
déterminent les mesures de prévention.
La non-observance du
traitement est un facteur de risque majeur.
B - Sous-évaluation de la gravité de la crise par certains patients
:
La plupart des patients
sont capables d’estimer correctement la gravité de leur obstruction
bronchique, et ressentent une amélioration de leurs symptômes en
relation étroite avec l’augmentation de leur débit expiratoire de
pointe.
Profil de l’asthmatique à risque d’asthme mortel
:
- Hospitalisations ou consultations répétées aux urgences dans l’année précédente
- Hospitalisation ou consultation aux urgences le mois
précédent
- Pneumothorax ou pneumomédiastin au cours
d’un asthme aigu grave
- Maladie cardiaque ou respiratoire sévère associée
- Corticothérapie orale au long cours
- Intolérance à l’aspirine et aux anti-inflammatoires
non stéroïdiens
* Facteurs socio-psychologiques
- Non-observance du traitement ou des rendez-vous
de consultation
- Déni de la maladie, poursuite du tabagisme,
« corticophobie »
- Maladie psychiatrique ou problèmes psychologiques
graves
Cependant, certains
patients ont une mauvaise appréciation de la gravité de la crise.
Il ne s’agit pas de
patients qui négligent leurs symptômes ou « qui ne s’écoutent pas »,
mais, au contraire, de patients qui présentent un authentique
trouble de la perception de l’obstruction bronchique.
Il n’existe pas de lien
étroit entre les signes cliniques de gravité et le degré
d’obstruction.
En l’absence d’un examen
clinique minutieux et de la mesure du débit expiratoire de pointe,
la gravité peut être également sous-estimée par les médecins et
conduire à un traitement insuffisant.
C - Traitement insuffisant :
Le traitement de fond
est très souvent insuffisant en regard des recommandations en
vigueur qui préconisent l’adaptation du traitement de fond à la
sévérité de l’asthme.
En particulier, les
corticoïdes inhalés restent sous-utilisés.
Les corticoïdes oraux
restent également sous-utilisés lors du traitement des exacerbations
et de l’asthme instable.
Rapidité de survenue et facteurs déclenchants :
L’asthme aigu grave peut
survenir après une aggravation progressive ou de manière explosive.
Les facteurs
déclenchants ne sont pas nécessairement les mêmes.
A - Asthme instable ou exacerbation de l’asthme pendant plusieurs
jours :
L’asthme instable doit être connu des patients et des
médecins, car il précède le plus souvent la survenue de
l’asthme aigu grave.
Il s’agit essentiellement de la
répétition de crises devenant pluriquotidiennes et moins
sensibles aux bronchodilatateurs.
Cette entité tend
actuellement à être définie comme une « exacerbation
de l’asthme ».
L’inflammation bronchique est constante
dans ce contexte.
D’une manière pragmatique, l’exacerbation de l’asthme
se traduit par l’aggravation des symptômes et l’augmentation
de la consommation quotidienne de bêta2 agonistes
d’action rapide.
Les exacerbations sont favorisées par un traitement de
fond insuffisant, et peuvent être déclenchées par les
infections des voies aériennes supérieures (sinusite), la
grippe, les bronchites aiguës et l’exposition persistante
aux allergènes ou à des vapeurs toxiques (notamment
lors d’expositions professionnelles ou à des produits
d’entretien domestiques).
Critères d’asthme instable ou « exacerbation de l’asthme »
:
* Augmentation de la fréquence des crises, devenant
* luriquotidiennes
* Gêne respiratoire retentissant sur les activités
quotidiennes
* Moindre sensibilité des crises aux bêta agonistes
* Augmentation de la consommation de
bêta2 agonistes
de courte action
* Aggravation progressive de l’obstruction bronchique
évaluée par le débit expiratoire de pointe
* Grandes variations diurnes du débit expiratoire de pointe
> 30 %, chute au petit matin (morning dip)
B - Crise d’asthme d’aggravation rapide (en moins de 24 heures) :
L’asthme aigu grave peut survenir après l’aggravation
rapide d’une crise, en moins de 24 heures.
Les facteurs
favorisants peuvent être ceux de l’asthme instable ou de
l’asthme suraigu.
C - Asthme suraigu (en moins de 3 heures) :
L’asthme suraigu est une forme particulière d’asthme
aigu grave marquée par une asphyxie survenant de
manière explosive, pouvant conduire au décès en moins
d’une heure, parfois en quelques minutes.
Il est perçu
d’emblée comme une crise inhabituelle et surprend le
plus souvent le patient alors incapable de réagir.
Il est
responsable d’un grand nombre de décès au domicile ou
au cours du transport à l’hôpital.
Il touche volontiers des
sujets jeunes de moins de 30 ans avec une fonction respiratoire
de base sensiblement normale.
L’inflammation
peut être minime ou absente, le bronchospasme est alors
le mécanisme prédominant.
Le facteur déclenchant est souvent un conflit ou stress
psychologique, une prise médicamenteuse contreindiquée, ou une exposition
allergénique massive.
Les surinfections
bronchiques sont rarement en cause.
Tableau clinique :
La recherche de signes de gravité doit être systématique
devant toute crise d’asthme inhabituelle motivant une
consultation en urgence.
Elle repose sur un examen clinique
minutieux et la mesure du débit expiratoire de
pointe.
La présence d’un des signes impose une prise en
charge immédiate optimale et le transfert en milieu
spécialisé.
Signes de gravité de l’asthme aigu
:
* Signes d’alarme faisant craindre la mort imminente
- Troubles de la conscience, somnolence, coma
- Pauses ou arrêt respiratoire
- Respiration abdominale paradoxale
- Hypercapnie > 50 mmHg
* Signes de gravité définissant l’asthme aigu grave
-> Signes respiratoires
- Difficulté à parler ou tousser
- Fréquence respiratoire > 30/min, orthopnée (nécessité
de maintenir la position assise)
- Sueurs, contraction des muscles sterno-cléido-mastoïdiens
- Cyanose, silence auscultatoire
-> Signes hémodynamiques
- Fréquence cardiaque > 120/min
- Pouls paradoxal > 20 mmHg
-> Signes neuro-psychiques
- Anxiété, agitation
-> Données paracliniques
- Débit expiratoire de pointe < 150 L/min ou < 30 %
théorique
- PaCO2 O 40 mmHg
A - Signes d’alarme de mort imminente :
La constatation d’un de ces signes impose une intervention
thérapeutique optimale en extrême urgence car ils
précèdent l’arrêt respiratoire.
Les troubles de conscience
imposent l’intubation s’ils ne sont pas immédiatement
réversibles sous traitement bronchodilatateur.
B - Signes cliniques :
1- Signes respiratoires
:
Certains signes témoignent à l’évidence de la gravité dès
l’inspection : sueurs profuses, position assise, penché en
avant, cyanose ou pâleur.
La plupart des signes témoignent
de l’incapacité des muscles respiratoires à assurer
une expiration prolongée contre la charge qui leur est
imposée (le patient expire d’une manière très active
grâce à la contraction des muscles abdominaux pour
« lutter » contre l’obstruction bronchique majeure).
La cyanose est d’apparition très tardive, souvent absente,
à la différence des décompensations sévères de bronchopneumopathies
chroniques obstructives (BPCO).
2- Signes hémodynamiques
:
Un pouls paradoxal supérieur à 20 mmHg témoigne
d’une obstruction bronchique majeure.
En pratique, il
est rarement recherché car il ne modifie pas la conduite
à tenir et est souvent difficile à mesurer.
Comme au cours de toute insuffisance respiratoire
aiguë, une tachycardie sinusale rapide témoigne d’un
mauvais retentissement hémodynamique.
3- Signes neuropsychiques
:
L’anxiété ou l’agitation sont des manifestations caractéristiques
mais trompeuses.
Comme au cours de toute
insuffisance respiratoire aiguë, elles reflètent la gravité
du retentissement neuropsychique et non un « caractère
difficile » du patient.
Les troubles de conscience, pouvant aller jusqu’au
coma, imposent l’intubation.
C - Mesure du débit expiratoire de pointe :
Aucun des signes cliniques pris isolément n’est étroitement
corrélé à la sévérité de l’obstruction.
La mesure
du débit expiratoire de pointe doit être systématique.
Une valeur inférieure à 150 L/min, ou plus précisément
inférieure à 30 % de la valeur théorique témoigne de la
sévérité de l’obstruction.
En cas de gravité extrême,
certains patients ne parviennent pas à exécuter la
manoeuvre ; les autres signes de gravité sont alors
indiscutables.
La mesure du débit expiratoire de pointe
doit toujours être contrôlée après traitement.
Examens complémentaires
:
Certains examens complémentaires sont réalisés à l’hôpital
car tout asthme aigu grave impose l’hospitalisation,
même après une bonne réponse au traitement initial.
A - Saturation transcutanée en oxygène
et gaz du sang :
La saturation peut être facilement mesurée au domicile
du patient.
L’hypoxémie est rarement majeure au cours
de l’asthme aigu grave.
Une saturation oxyhémoglobinée
(SaO2) inférieure à 90 % témoigne de la sévérité
de l’obstruction.
Les gaz du sang doivent toujours être réalisés en présence
de signes cliniques de gravité.
Ils ne sont donc pas
nécessaires en cas de débit expiratoire de pointe supérieur
à 200 L/min ou 40 % de la théorique.
Une normocapnie témoigne de la gravité car elle est liée
à une hypoventilation relative (le patient ne parvient
plus à réaliser une expiration suffisamment active).
L’hypercapnie avec acidose respiratoire témoigne
de l’impossibilité à maintenir la ventilation alvéolaire.
Elle signe une obstruction extrême des voies aériennes
et annonce un épuisement des muscles respiratoires.
À ce stade, la PaO2 est souvent inférieure ou égale à
50 mmHg.
Une PaCO2 supérieure ou égale à 50 mmHg
fait craindre l’arrêt respiratoire.
Une acidose métabolique lactique est souvent associée à
l’hypercapnie.
B - Radiographie de thorax :
Elle est systématique à la recherche des complications
(pneumothorax, pneumomédiastin) ou d’un facteur
déclenchant comme un foyer infectieux parenchymateux.
Elle montre habituellement une distension thoracique
avec hyperclarté et horizontalisation des côtes, parfois des
épaississements des parois bronchiques, ou des
atélectasies en bandes dues à des bouchons muqueux.
C - Électrocardiogramme :
Il montre habituellement une tachycardie sinusale. Des
signes électriques de coeur pulmonaire aigu peuvent rarement
être observés (rotation axiale droite, aspect S1Q3,
troubles de la repolarisation en antérieur, onde P pulmonaire),
associés à une tachycardie sinusale, y compris chez
les sujets jeunes indemnes de maladie cardiovasculaire.
D - Autres examens :
D’autres examens sont parfois nécessaires de manière
plus différée en fonction du contexte, à la recherche
d’un facteur déclenchant : numération formule sanguine
(une hyperéosinophilie est souvent observée), hémocultures,
radiographie des sinus, sérologie aspergillaire,
scanner, pH-métrie oesophagienne…
Traitement en urgence
:
L’asthme aigu grave est une urgence médicale imposant
l’hospitalisation en réanimation ou milieu spécialisé.
Cependant, le traitement doit être débuté immédiatement,
au domicile du patient par le médecin traitant, une
équipe préhospitalière (SAMU, SMUR ou pompiers) ou
aux urgences de l’hôpital.
A - Médicaments :
1- Oxygène nasal
:
Il est toujours indiqué, quel que soit le niveau de la capnie (car il ne s’agit pas ici d’une hypercapnie chronique),
et un débit de 3-4 L/min est habituellement
suffisant.
La SaO2 doit être maintenue au-dessus de 90 %
sous oxygène nasal au cours du traitement.
L’oxygène
est le gaz vecteur habituel des nébulisations de bronchodilatateurs.
2- bêta2 agonistes
:
Ce sont les plus puissants bronchodilatateurs, leur effet
est immédiat (net après 5 min, maximal après 15-20 min).
Ils constituent la priorité du traitement dans tous les cas.
Ils agissent directement sur le muscle lisse bronchique.
La voie inhalée est toujours prioritaire en raison de son
efficacité, de sa tolérance et de sa simplicité d’administration.
La nébulisation est le traitement de référence,
cependant la prise répétée de bêta2 agonistes d’action rapide
doit faire partie de l’ordonnance type d’autogestion de la
crise par le patient (bouffées d’aérosol doseur à travers
une chambre d’inhalation ou de poudres).
La voie intraveineuse
peut cependant lui être associée dans les cas les
plus graves (en réanimation).
La voie sous-cutanée
(d’action aussi rapide) est utile au domicile.
Des doses
élevées sont parfois nécessaires en cas de mauvaise
réponse au traitement initial.
Les produits utilisés sont le salbutamol (Ventoline) et la
terbutaline (Bricanyl).
L’adrénaline est utilisée en réanimation
par certains dans les formes les plus graves, mais
sa supériorité par rapport aux bêta2 agonistes sélectifs
n’est pas démontrée.
3- Corticoïdes
:
Leur effet est différé (plus de 3 à 4 h) aussi bien après
administration en intraveineux qu’orale.
Leur emploi précoce est néanmoins systématique car ils
potentialisent l’effet des bêta2 agonistes et permettent
d’éviter les réaggravations secondaires.
Ils agissent sur
l’inflammation bronchique, mais également sur le
muscle lisse bronchique en induisant la synthèse de
récepteurs aux bêta2 agonistes.
Les voies orale et intraveineuse
ont une efficacité comparable.
La méthylprednisolone (Solu-Médrol) est plus utilisée
par voie intraveineuse que l’hémisuccinate d’hydrocortisone
car elle ne contient pas de sulfites.
Les corticoïdes
oraux, la prednisone (Cortancyl) et la prednisolone
(Solupred) peuvent être utilisés au domicile par le patient.
4- Anticholinergiques :
Les anticholinergiques ont un effet plus différé (net
après 20 min, maximal après 40 min) et moins puissant
que celui des bêta2 agonistes, mais qui peut être additif.
Ils agissent sur le muscle lisse bronchique en diminuant
le tonus vagal.
Ils sont recommandés en nébulisation,
toujours associés aux bêta2 agonistes, dans les formes
résistant aux nébulisations initiales ou menaçant d’emblée
le pronostic vital. Le produit utilisé est le bromure
d’ipratropium (Atrovent).
5- Théophylline
:
La théophylline intraveineuse a un faible pouvoir bronchodilatateur.
Elle potentialise surtout les effets secondaires
et non l’effet bronchodilatateur des bêta2 agonistes.
Il s’agit d’un traitement de 2e ligne controversé, utilisé
par certains dans les formes sévères résistant au traitement
initial.
Elle a un faible index thérapeutique, des
interactions médicamenteuses multiples, et n’est pas
aisée à manier chez le sujet âgé, insuffisant cardiaque,
ou présentant une insuffisance hépatocellulaire.
6- Traitements non conventionnels
:
Certains médicaments sont utilisés de manière non standardisée
par certains auteurs : mélange hélium-oxygène
(Héliox), anesthésiques halogénés, kétamine, sulfate de
magnésium. Ils ne font pas l’objet de recommandations
précises.
Les corticoïdes inhalés représentent la base du
traitement de fond mais n’ont pas leur place dans le traitement
de l’asthme aigu grave à l’heure actuelle.
B - Autres mesures thérapeutiques :
1- Traitement ou éviction du facteur déclenchant
:
Le facteur déclenchant doit être systématiquement
recherché au prix d’un interrogatoire minutieux.
Il peut
s’agir d’une exposition à des allergènes ou à des vapeurs
toxiques, de la prise de médicaments contre-indiqués ou
d’une infection à traiter.
2- Apports potassiques
:
L’hypokaliémie constitue un risque important.
Elle est
favorisée par les corticoïdes et les bêta2 agonistes.
Elle doit
être prévenue par l’administration de 4 à 6 g de chlorure
de potassium pendant les 24 premières heures.
3- Hydratation :
Une hypovolémie doit être corrigée, ce qui permet une
fluidification des sécrétions bronchiques.
L’hyperhydratation
n’a pas d’intérêt.
4- Antibiotiques
:
Leur emploi n’est pas systématique, en raison de la
diversité des facteurs déclenchants.
Ils sont indiqués en
cas d’infection bactérienne ORL (sinusite), de foyer
radiologique ou de surinfection bronchique évidente
(expectoration muco-purulente).
Les bêtalactamines
(amoxicilline), en l’absence d’allergie, ou les macrolides
sont généralement utilisés.
5- Les sédatifs sont contre-indiqués
:
Leur effet dépresseur respiratoire peut précipiter l’arrêt
respiratoire chez un patient épuisé.
C - Modalités pratiques du traitement :
1- Prise en charge au domicile du patient
:
L’objectif du traitement est de soulager le patient en
attendant l’arrivée d’une équipe préhospitalière médicalisée
(SAMU, SMUR, pompiers).
• Les bêta2 agonistes inhalés et (ou) sous-cutanés :
– Ventoline ou Bricanyl, 2 bouffées toutes les 3 à 5 min
(jusqu’à 20 bouffées si nécessaire) au moyen d’une
chambre d’inhalation ;
– et (ou) Ventoline ou Bricanyl, une ampoule de 0,5 mg
en injection sous-cutanée.
• La corticothérapie systémique utilise :
– Cortancyl ou Solupred 60 mg par voie orale en 1 prise ;
– ou Solu-Médrol 60 à 80 mg en intraveineux direct.
• Une équipe préhospitalière médicalisée doit être
appelée dès que possible, par le 15 ou le 13, afin d’assurer
le transport du patient vers l’hôpital.
2- Traitement hospitalier ou préhospitalier
médicalisé
:
La prise en charge au domicile par des équipes de réanimation préhospitalière a permis de réduire la mortalité
avant l’arrivée à l’hôpital.
Excepté les conditions de
ventilation mécanique, elles disposent des mêmes
moyens que les unités de réanimation hospitalière.
• Oxygène nasal à 3-4 L/min : ce débit suffit le plus
souvent à assurer une SaO2 supérieure à 90 %.
• bêta2 agonistes nébulisés : on utilise Bricanyl (1 ou 2
dosettes de 5 mg/2 mL) ou Ventoline (1 mL de solution
pour aéroliseur soit 5 mg, dilué dans 4 mL de sérum
physiologique), à nébuliser à travers un masque avec
6-8 L/min d’O2 (durée environ 15 min), et à répéter 1 ou
2 fois au cours de la première heure puis toutes les
4 heures pendant les 24 premières heures.
• Corticoïdes systémiques : on injecte Solu-Médrol 60 mg
en intraveineux à renouveler toutes les 8 heures pendant
les 24 premières heures.
• Anticholinergiques : Atrovent (une dosette de 0,5 mg/
2 mL) est associé aux bêta2 agonistes nébulisés.
3- Surveillance et réponse au traitement initial
:
• La surveillance de l’efficacité du traitement repose sur
la fréquence respiratoire, la fréquence cardiaque, la tolérance neuro-psychique, et la valeur du débit expiratoire
de pointe.
La réponse au traitement initial doit être nette
au cours de la première heure.
D’autres paramètres sont
également surveillés selon le contexte : tremblements,
kaliémie (tolérance du traitement), température.
• L’amélioration clinique est objectivée par la diminution
de la dyspnée, des fréquences respiratoire et cardiaque, et
par une augmentation du débit expiratoire de pointe supérieur
ou égal à 50 L/min au cours de la 1re heure. Un débit
expiratoire de pointe supérieur ou égal à 50 % de la théorique
dans les heures qui suivent, chez un patient plus
calme, témoigne d’une bonne réponse au traitement.
• En cas de non-réponse au traitement initial, le
traitement fait appel aux modalités suivantes, éventuellement
associées entre elles, les nébulisations de bêta2
agonistes étant poursuivies :
– bêta2 agonistes par voie intraveineuse (salbutamol 0,5 mg/h
en doublant les doses toutes les 15 min si nécessaire) ;
– l’adrénaline par voie intraveineuse est utilisée par certains ;
– la théophylline, avec dose de charge de 6 mg/kg en
20 min (en l’absence de traitement préalable par la théophylline
orale) suivi de 0,6 mg/kg/h est plus rarement
utilisée ; la détermination des taux plasmatiques est
nécessaire dans les 24 heures ;
– les traitements non conventionnels sont utilisés par
certains.
4- Ventilation mécanique
:
Elle est instituée en dernier recours, après échec du traitement
médical maximal, devant des troubles de
conscience ou un arrêt respiratoire.
Il s’agit d’une ventilation
à haut risque de complication barotraumatique
(pneumothorax, pneumomédiastin) conduite sous sédation
et curarisation après une intubation très difficile.
Complications
:
La crainte reste le décès par bronchospasme irréductible.
Le risque de mortalité persiste sous ventilation
mécanique malgré les techniques adaptées.
Pneumomédiastin et (ou) emphysème sous-cutané sont
des complications habituellement bénignes lorsqu’elles
surviennent en respiration spontanée.
Elles nécessitent
néanmoins une surveillance étroite.
Un pneumothorax peut être responsable d’une aggravation
dramatique de l’état respiratoire.
Le diagnostic est
souvent difficile à l’examen et repose sur la radiographie.
Il est particulièrement redoutable au cours de la
ventilation artificielle.
Le drainage est urgent.
Outre les complications classiques de la réanimation :
ulcère de stress, infections nosocomiales (cathéters veineux,
urinaire…), thrombose veineuse, la ventilation
artificielle est parfois responsable de pneumothorax dramatique
et favorise la survenue de pneumonies nosocomiales.
Les complications neuromusculaires (neuromyopathies
favorisées par la curarisation et les
corticoïdes) sont probablement sous-estimées.
Prévention
:
La prévention de l’asthme aigu grave repose sur l’adaptation
du traitement de fond à la sévérité de l’asthme,
l’éviction des facteurs aggravants ou favorisants, le traitement
des exacerbations (ou asthme instable) ainsi que
la reconnaissance des signes cliniques de gravité.
Ces
éléments doivent faire l’objet d’un enseignement adapté
ou « éducation » du patient asthmatique, en cours d’une
hospitalisation puis d’un suivi spécialisé.
A - Nécessité d’un suivi adapté et spécialisé :
Tout asthme aigu grave doit faire l’objet d’un suivi spécialisé
en relation étroite avec le médecin traitant, afin
de vérifier le contrôle de l’asthme, l’éviction des facteurs
aggravants et déclenchants, et la mesure de la fonction
pulmonaire à distance de l’épisode.
B - Adaptation du traitement de fond
:
Le traitement de fond doit être adapté à la sévérité de
l’asthme (fréquence des symptômes, et degré d’obstruction
de base mesuré par le débit expiratoire de pointe).
Les corticoïdes inhalés sont prioritaires.
La distinction
entre bronchodilatateurs et anti-inflammatoires (mécanismes
et délai d’action) doit être clairement expliquée
aux patients afin d’obtenir une bonne observance du
traitement.
En effet, de nombreux patients considèrent
les bronchodilatateurs comme les seuls médicaments
efficaces (car ayant un effet bénéfique rapide).
C - Traitement des exacerbations (épisodes
d’asthme instable)
:
L’inflammation des voies aériennes est constante au cours
des exacerbations, notamment de l’asthme instable.
La
corticothérapie orale de courte durée (Cortancyl ou
Solupred ; 40 mg/j pendant 8 à 10 j) constitue le traitement
de base, systématiquement associé au traitement
inhalé et à l’éviction du facteur favorisant ou déclenchant.
D - Reconnaissance de la crise
potentiellement grave :
Toute crise inhabituelle doit être immédiatement traitée
au domicile par le patient selon un plan d’autogestion
détaillé sur une ordonnance (prises répétées de bêta2
agonistes et corticothérapie orale) et doit motiver l’appel
téléphonique d’une équipe préhospitalière médicalisée.
Tout patient à risque, notamment récemment hospitalisé,
doit posséder un débitmètre de pointe au domicile.