Affections génétiques et congénitales des paupières
Cours d'Ophtalmologie
Introduction
:
La pathologie palpébrale chez le nouveau-né est souvent source
d’une grande angoisse de la part des parents, car elle remet en cause
le bébé idéal impatiemment attendu.
Si les affections les plus
fréquentes sont souvent les plus simples (ptôsis, colobome),
l’angoisse et la question de la normalité sont toujours sous-jacentes.
De façon beaucoup plus rare, lorsque l’atteinte est plus sévère et la
dysmorphie plus marquée (cryptophtalmie, blépharophimosis,
syndrome de Franceschetti), il faut organiser une prise en charge
pluridisciplinaire à la recherche d’atteintes générales pour lesquelles
les anomalies palpébrales n’ont été qu’un signe d’appel.
C’est une dysmorphie intéressant en partie les paupières, le
mongolisme ou trisomie 21, qui fut la première maladie
chromosomique décrite par Lejeune et Turpin à l’hôpital Necker-Enfants Malades en 1959.
Depuis, la réalisation de caryotypes en
haute résolution et les progrès de la génétique ont permis de
localiser et de découvrir des gènes responsables de nombreuses
affections palpébrales ouvrant ainsi la possibilité d’un conseil
génétique.
Les malformations et malpositions palpébrales congénitales ou
génétiques du nouveau-né constituent un vaste groupe de
pathologies qui vont du plus bénin, l’épiblépharon, au plus grave,
la cryptophtalmie bilatérale cécitante.
Les atteintes palpébrales peuvent être isolées ou constituer des
syndromes complexes avec d’importants remaniements locaux
pouvant intéresser à la fois la face, l’orbite et le globe oculaire.
Enfin,
les anomalies peuvent s’intégrer dans le cadre de pathologies plus
générales nécessitant une prise en charge globale et
multidisciplinaire de l’enfant.
La conduite à tenir comprend un examen ophtalmologique complet
avec évaluation de la statique et de la cinétique palpébrale, un
examen des voies lacrymales.
Un arbre généalogique et la recherche d’antécédents familiaux sont
essentiels pour affirmer certains diagnostics et pour autoriser un
conseil génétique.
La recherche de manifestations systémiques doit compléter le bilan
ophtalmologique en collaboration avec les pédiatres.
Un bilan radiologique comprenant une tomodensitométrie (TDM)
avec reconstructions osseuses, une échographie orbitaire et une
imagerie par résonance magnétique (IRM) peuvent être nécessaires
dans les syndromes les plus complexes.
Enfin, la prise en charge thérapeutique dépend du degré d’urgence.
Elle doit restaurer une protection du globe ou éviter le
développement d’une amblyopie de déprivation.
Les facio-cranio-sténoses telles que les syndromes de Crouzon et
d’Apert ne sont pas traitées car la dysmorphie est liée à une
anomalie des orbites osseuses.
Les microphtalmies, bien que
responsables d’une dysmorphie par micro-orbitisme, ne rentrent pas
non plus dans ce cadre.
Anomalies de formation des paupières
:
A - CRYPTOPHTALMIES :
1- Cryptophtalmie isolée
:
Il s’agit d’une affection rare dans laquelle le globe oculaire est
recouvert par un voile cutané qui s’étend du sourcil jusqu’à la joue.
La première description remonte à 1872 par Zehender. Mais la
classification en trois formes a été décrite par François en 1969 :
– la cryptophtalmie complète est la forme la plus commune.
Il n’y a
pas d’ébauche de sourcil et le voile cutané est complet donnant
l’impression qu’il n’y a pas d’oeil ;
– la cryptophtalmie partielle se traduit par une couverture de la
partie médiale des paupières, tandis que la portion latérale présente
un ébauche de paupières et de sac conjonctival ;
– le symblépharon congénital s’accompagne d’un voile cutané
adhérent à la partie supérieure du globe.
La paupière inférieure est
épargnée et normale, le tiers inférieur de l’oeil est visible mais
souvent opaque et kératinisé.
Quelle que soit la forme, un globe oculaire est toujours présent.
Le
segment antérieur est très remanié, tandis que le segment postérieur
reste bien différencié.
Le globe est le plus souvent microphtalme,
plus rarement buphtalme, en particulier dans le cas d’anomalies de
clivage de la chambre antérieure responsable d’un glaucome.
Si le
globe n’est pas fonctionnel, sa présence permet un développement
normal de l’orbite osseuse et une croissance harmonieuse de
l’hémiface.
Des anomalies de l’oeil controlatéral (dermoïdes,
colobomes palpébraux, microphtalmie, colobome du sourcil)
peuvent être observées.
2- Syndrome de Fraser :
La cryptophtalmie peut être associée à d’autres malformations.
On
parle alors de syndrome cryptophtalmique, ou syndrome de Fraser.
Il est possible de parler de syndrome cryptophtalmique même en
l’absence de cryptophtalmie, à condition d’observer l’association de
deux critères majeurs et un critère mineur ou d’un critère majeur et
quatre critères mineurs.
3- Génétique et physiopathogénie :
Le mode de transmission est autosomique récessif dans 15 % des
cas et aucune anomalie chromosomique n’a été retrouvée.
Les
cas sporadiques ne sont pas rares.
Une hypothèse physiopathogénique repose sur une carence en
vitamine A et en rétinoïdes pendant la gestation.
Depuis les travaux
de Warkany et Schraffenberger, on sait que des taux adéquats de
vitamine A et de rétinoïdes sont nécessaires à la différenciation
cellulaire.
En effet, ceux-ci ont obtenu un modèle animal de cryptophtalmie par carence en vitamine A.
Une autre hypothèse fait intervenir des phénomènes inflammatoires
intra-utérins responsables d’une adhésion entre le globe oculaire et
les paupières.
Les théories les plus récentes font intervenir une
anomalie de l’apoptose qui scinde mal les paupières.
4- Traitement :
Le traitement de cette malformation majeure est difficile et s’avère
souvent un échec.
Il a pour but la reconstruction d’une fente
palpébrale, avec pour objectif un équipement par prothèse
esthétique dans les formes complètes.
Dans certaines formes mineures de cryptophtalmie, certaines
équipes ont tenté la reconstruction du segment antérieur afin de
restaurer une acuité visuelle.
En effet, la bonne différenciation choriorétinienne permet parfois l’obtention d’une réponse électrique
de la rétine.
B - MICROBLÉPHARIE ET ABLÉPHARIE
:
La microblépharie est une affection rare, elle va de la brièveté de la
paupière dans sa portion moyenne et dans le plan frontal jusqu’au
colobome quasi complet de la paupière avec persistance d’une fine
ligne tégumentaire marquant le bord libre.
L’ablépharie représente la forme majeure de l’affection avec une
absence complète de paupière.
En général, elle est associée à des
anomalies oculaires ou systémiques telles qu’une ichtyose.
1- Syndrome ablépharie-macrostomie (AMS)
:
On observe chez les patients des rudiments de paupières et une
macrostomie, une hypoplasie du nez, une ambiguïté sexuelle, une
arcade zygomatique absente, des doigts palmés et une cryptorchidie.
2- Syndrome de Barber-Say :
En 1982, Barber a décrit le cas d’un patient présentant l’association
d’une ablépharie, d’un ectropion, d’une macrostomie, d’une peau
atrophique, d’une hypertrichose et d’un retard de croissance.
À la
suite de cette première observation, différentes publications ont fait
état de cas similaires.
Dans la description initiale, le syndrome
de Barber-Say n’était pas distingué de l’AMS.
C’est en 1998 que Mazzanti a suggéré que ce syndrome soit considéré comme distinct
de l’AMS.
Selon lui, il pourrait s’agir d’une anomalie de régulation
différente d’un même gène.
3- Génétique de l’AMS :
Une localisation possible a été décrite par Pellegrino en 1996, à
propos du cas d’un enfant présentant l’association d’un AMS et cutis
laxa, et chez lequel une délétion-inversion de 18q a été découverte
(délétion 18q21.3-18q23 et inversion entre les bandes 18q12.3 et
18q21.2).
Le gène de l’AMS pourrait se trouver soit dans la zone de
délétion, soit à la charnière de l’inversion.
Il faut noter qu’il s’agit
du premier cas où une anomalie du caryotype a été découverte dans
le cadre d’un AMS.
Il a été suggéré que le mode de transmission de
l’AMS soit de type autosomique récessif, tout comme le
syndrome de cryptophtalmie.
En effet, certains auteurs ont
rapproché les deux syndromes, puisqu’un certain nombre d’atteintes
systémiques sont communes et que certains cas associant ablépharie
unilatérale et cryptophtalmie controlatérale ont été décrits.
4- Physiopathogénie :
Au cours de l’embryogenèse, les replis palpébraux s’étirent à la
dixième semaine, les paupières s’ouvrent au sixième mois.
Cette
séparation est attribuée à la kératinisation et aux sécrétions holocrines et lipidiques du rebord palpébral.
Une première hypothèse pathogénique repose sur une anomalie de
migration des cellules de la crête neurale, avec un défaut de
l’induction ectoderme-mésoderme.
Une seconde hypothèse
impliquerait des facteurs locaux comme des bandes amniotiques,
des phénomènes inflammatoires ou un excès d’apoptose.
5- Traitement :
Il dépend du degré d’atteinte des paupières et du globe oculaire
sous-jacent.
Lorsque le globe oculaire est intact, il faut lubrifier la cornée et éviter une perforation cornéenne.
La reconstruction
palpébrale repose sur des lambeaux pédiculés associés à des greffes
de peau de pleine épaisseur.
Le lambeau utilisé par Price est
constitué par la transposition d’un lambeau pariétal bipédiculé et
bilobé.
Si le globe n’est pas fonctionnel, il s’agit de
reconstruire un cul-de-sac pour l’adaptation d’une prothèse
esthétique.
B - ANOMALIES DU BORD LIBRE
:
1- Colobome palpébral
:
Il s’agit d’une solution de continuité au dépend du bord libre de la
paupière.
Le defect peut être partiel ou de pleine épaisseur.
* Colobome de la paupière supérieure
:
Dans la majorité des cas, il se situe à la jonction du tiers interne et
du tiers moyen de la paupière.
Il concerne toute l’épaisseur de
celle-ci.
Si le colobome de la paupière supérieure est le plus souvent isolé
sans atteinte systémique, le syndrome de Goldenhar associe un
colobome en regard d’un dermoïde du limbe, un appendice
prétragien, une microtie, une surdité, une macrostomie, une
microstomie, une asymétrie faciale et des anomalies vertébrales.
* Colobome de la paupière inférieure
:
Il est plus rare.
Il se situe alors à la jonction du tiers moyen et du
tiers latéral et n’intéresse pas la pleine épaisseur.
Il est bilatéral dans
20 % des cas et est souvent associé à une atteinte générale, comme
dans le syndrome de Treacher Collins.
* Étiopathogénie
:
Il existe plusieurs théories pathogéniques.
Pour le colobome de la
paupière inférieure intéressant la portion centrale, il s’agit
vraisemblablement d’une anomalie de migration des cellules de la
crête neurale.
Ce serait le cas dans la dysostose mandibulofaciale où
la lésion est symétrique (syndrome de Treacher Collins).
D’autres
auteurs impliquent la présence de bandes amniotiques, un défaut
de fusion entre le feuillet antérieur de la paupière (cutané) et le
feuillet postérieur (conjonctival), une diminution de la circulation
placentaire, voire une anomalie du métabolisme de la vitamine A.
* Traitement
:
Il dépend de l’importance du colobome et de la souffrance de
l’épithélium cornéen.
Le colobome de la paupière inférieure est de meilleur pronostic, car
l’exposition cornéenne est souvent moins importante ; cependant, il
est souvent associé à un trichiasis qui peut aggraver la souffrance
cornéenne.
Quand la perte intéresse moins de 30 % de la longueur
palpébrale, une suture directe après avivement des bords est
idéale.
Si le defect est compris entre 30 et 50 %, il faut
associer une cantholyse externe ou un lambeau semi-circulaire de
Tenzel.
Dans les pertes plus importantes, il faut privilégier les
techniques de reconstruction évitant l’occlusion de l’axe visuel,
source d’une amblyopie profonde car précoce.
Il peut s’agir d’un
lambeaux de rotation de pleine épaisseur de type Abbé-Mustardé.
2- Ankyloblépharon :
Il correspond à la fusion entre la paupière supérieure et de la
paupière inférieure. Cette anomalie a été décrite pour la première
fois par Ammon en 1841.
Sa localisation préférentielle intéresse le
tiers externe de la paupière, puis le tiers interne.
Les fusions siégeant
dans la portion moyenne sont rares.
La transmission se fait sur le mode autosomique dominant avec une
pénétrance incomplète ; cependant, certaines formes sont
sporadiques.
La présence d’un ankyloblépharon peut donner l’impression d’une
exotropie ou d’une ésotropie selon la localisation médiale ou latérale
de celui-ci.
Le traitement repose sur l’ouverture de la fente palpébrale.
Elle est
réalisée aux alentours de 3-4 ans.
La longueur totale de la fente
palpébrale est de 25 mm. Il ne faut pas dépasser cette longueur, en
veillant à ce que la conjonctive recouvre le bord libre.
En effet, en
évitant une kératinisation de celui-ci, elle prévient la souffrance
cornéenne.
Dans l’ankyloblépharon interne, on réalise une
punctoplastie après repérage des points lacrymaux et intubation
siliconique.
3- Ankyloblépharon filiforme ad natum :
Il est caractérisé par la présence de bandes de tissu élastique tendues
entre les bords libres des paupières supérieure et inférieure et qui
s’insèrent entre la ligne ciliaire et l’orifice des glandes de Meibomius.
Ces bandes sont en nombre variable.
Elles peuvent empêcher
l’ouverture palpébrale ou simplement limiter celle-ci.
Rosenman a classé cette anomalie en quatre types :
– formes sporadiques :
– le type 1 est isolé ;
– le type 2 est associé à des anomalies cardiaques ou du système
nerveux central ;
– transmission autosomique dominante à expressivité variable :
– le type 3 est associé à des syndromes ectodermiques comme le
syndrome des ptérygions poplités (ptérygion poplité, fentes
labiales et palatines, anomalies génito-urinaires) ;
– le type 4 est associé à des fentes labiales ou palatines isolées.
Certaines associations ont été décrites avec la trisomie 18,
pouvant faire évoquer la création d’un cinquième type.
Le traitement repose sur la section des bandes aux ciseaux.
Le
saignement est en général minime et les reliquats régressent
spontanément.
Malpositions du bord libre
des paupières :
A - ÉPIBLÉPHARON :
Il est dû à un excès cutané dans la partie interne de la marge
palpébrale inférieure ou supérieure.
Cet excès abouti à la verticalisation de la ligne ciliaire.
En général, il intéresse les paupières inférieures de façon symétrique,
mais peut toucher les quatre paupières.
L’épiblépharon est souvent
familial et s’avère plus fréquent chez les Asiatiques.
Classiquement, son évolution est spontanément résolutive dans les
premières années de la vie, en rapport avec la croissance du nez et
du massif facial.
Cependant, en cas de souffrance cornéenne rebelle au traitement
médical, il faut envisager un traitement chirurgical par excision de
l’excès myocutané a minima et sutures éversantes.
B - ENTROPION CONGÉNITAL :
Il s’agit d’une affection rare, souvent confondue avec l’épiblépharon
qui est beaucoup plus fréquent.
L’épiblépharon est primitif et isolé,
alors que l’entropion est fréquemment associé à une microphtalmie
ou à une anophtalmie.
L’entropion a tendance à s’aggraver avec le
temps, alors que l’épiblépharon se corrige.
Les cils sont dirigé vers
le globe dans l’entropion et sont verticaux dans l’épiblépharon.
On a longtemps considéré que l’origine de l’entropion congénital
reposait sur l’association d’une hypertrophie de l’orbiculaire et d’un
spasme de celui-ci.
Tse a montré qu’il n’existait pas de preuve
histologique d’une hypertrophie musculaire de l’orbiculaire et a
suggéré qu’il pouvait s’agir d’une désinsertion du rétracteur de la
paupière.
Il peut s’intégrer dans des syndromes complexes comme le
syndrome de Larsen qui se traduit par une dislocation articulaire,
une face aplatie, des fentes palatines et quelquefois un retard
mental.
L’indication du traitement dépend de l’importance de la souffrance
cornéenne.
Il repose sur l’ablation minime d’un croissant de peau et
d’orbiculaire, et sur la réinsertion du rétracteur de la paupière au
bord inférieur du tarse.
C - ECTROPION CONGÉNITAL :
Il est défini par l’éversion du bord libre, présente dès la naissance,
d’une ou plusieurs paupières.
L’ectropion peut être primitif isolé ou
s’intégrer dans des syndromes complexes comme le blépharophimosis.
Enfin, il peut être secondaire à des anomalies
osseuses ou cutanées.
1- Ectropion congénital primitif isolé :
Il est exceptionnellement isolé et affecte le plus souvent les quatre
paupières.
On retrouve une brièveté de la lamelle antérieure
constante, plus ou moins associée à une hyperlaxité du bord libre
constituant un facteur aggravant.
La fente palpébrale n’est pas
allongée et il n’y a pas de déplacement latéral des canthus comme
dans l’euryblépharon.
2- Ectropion congénital primitif associé
:
On le retrouve dans :
– le blépharophimosis composé d’une tétrade associant
blépharoptôsis, épicanthus inversus, télécanthus et ectropion
congénital ;
– le syndrome de Down qui regroupe un ectropion des paupières
inférieures, une hypoplasie glabellaire, un épicanthus
palpébral et inclinaison mongoloïde des fentes palpébrales.
Les
atteintes du globe oculaire sont nombreuses : myopie forte,
kératocône, strabisme.
Le diagnostic de certitude repose sur le
caryotype.
3- Ectropion congénital secondaire :
Il est secondaire à des pathologies orbitaires ou cutanées :
– les syndromes fissuraires sont impliqués et en particulier la fente
n° 6 de la classification de Tessier.
Elle correspond à la partie externe
de la paupière inférieure et à l’éminence malaire.
Le déficit est
essentiellement osseux et les tissus mous sont plus hypoplasiques
que véritablement mutilés.
Lorsque la fente n° 6 est bilatérale et
associée aux fentes n° 7 et n° 8, elle constitue le syndrome de Franceschetti ;
– d’autres associations ont été décrites avec une microphtalmie, une buphtalmie, un euryblépharon, des anomalies cutanées comme les
ichtyoses lamellaires.
* Traitement
:
Il dépend des anomalies anatomiques rencontrées. Un traitement
conservateur est proposé par lubrification de la peau dans les
ichtyoses et chez les bébés-collodions.
La rétraction ou l’insuffisance de lamelle antérieure nécessite une
greffe de peau totale.
Un excès de laxité horizontale est corrigé par
raccourcissement du bord libre ou canthoplastie.
4-
Euryblépharon :
*
Clinique
:
Cette anomalie a été décrite pour la première fois par Desmarres en
1854 à propos de trois cas.
Elle consiste en une fente palpébrale plus
large que la normale, associée à des paupières plus grandes que la
normale.
L’anomalie est symétrique, le plus souvent avec un
déplacement latéral des commissures externes.
Les globes oculaires sont normaux.
L’association à un ectropion de la paupière inférieure entraîne un épiphora avec un risque d’exposition cornéenne.
Ce risque est
majeur lorsque l’atteinte est symétrique au niveau des paupières
supérieures et inférieures.
Cependant, l’ectropion congénital est une
pathologie à part entière, et on ne peut parler d’euryblépharon qu’en
présence d’un élargissement de la fente palpébrale.
La longueur
normale à l’âge de 5 mois est de 21,5 mm et de 28 mm à l’âge adulte.
* Génétique et pathogénie
:
Il s’agit d’une affection le plus souvent sporadique, mais elle peut
être héréditaire.
Le mode de transmission est autosomique
dominant. L’euryblépharon peut être présent dans la trisomie 21.
La pathogénie n’est pas claire : il peut s’agir d’une anomalie de
séparation des paupières in utero avec hypoplasie des tarses et de
certaines parties du muscle orbiculaire.
Il existe aussi une dystopie
canthale associée.
* Traitement
:
Dans les formes mineures, une simple surveillance de la cornée
suffit.
Dans les formes sévères avec un degré majeur d’ectropion, une
rétraction de la lamelle antérieure et une kératopathie d’exposition,
le traitement est chirurgical.
Il dépend des constatations
anatomiques et repose sur une canthoplastie latérale qui permet de
repositionner la paupière inférieure.
5- Syndrome Kabuki :
Il s’agit d’une affection très rare ainsi nommée car la dysmorphie
rencontrée dans ce syndrome évoque le maquillage des acteurs du
théâtre traditionnel japonais.
Les patients présentent un
allongement des fentes palpébrales avec une éversion du tiers
externe de la paupière inférieure.
Le nez est large, camus, les lobes
des oreilles sont proéminents.
Le syndrome comprend aussi, au niveau des mains un
raccourcissement du cinquième doigt, une anomalie des
dermatoglyphes, des fentes palatines, une scoliose, un retard mental
et un trouble de la croissance.
Des malformations cardiaques ont été décrites, telles qu’un
ventricule unique avec une oreillette commune, un défaut du
septum interauriculaire et/ou interventriculaire, une tétralogie de
Fallot, une coarctation de l’aorte et une transposition des gros
vaisseaux.
Si la plus grande série est japonaise, cette affection a été décrite
en Espagne, en Europe centrale, aux États-Unis. Le mode de
transmission est autosomique dominant avec une expressivité
variable.
En 1912, Elschnig décrit l’association d’un ectropion des paupières
inférieures, d’un hypertélorisme, de fentes labiopalatines.
Depuis, dans le cadre du syndrome, rebaptisé syndrome blépharocheilo-
dontique, des anomalies dentaires et des syndactylies ont été
observées.
Le mode de transmission est autosomique dominant.
D - ÉVERSION CONGÉNITALE DES PAUPIÈRES :
Une variation de l’ectropion est l’éversion bilatérale totale des
paupières supérieures, décrite par Adams en 1896.
La cause est un chémosis majeur de la conjonctive, probablement lié à une gêne au
retour veineux au cours de la délivrance liée aux contractions
utérines et au passage dans la filière utérovaginale lors de
l’accouchement.
Cette affection touche le plus souvent des nouveau-nés de race noire,
nés de femmes primipares et primigestes.
Elle est aussi plus
fréquente dans la trisomie 21.
Le traitement repose sur une lubrification de la cornée et de la
conjonctive et sur le repositionnement des paupières avec
application d’une pression pendant quelques heures par une pièce
de monnaie (10 centimes) maintenue par un sparadrap.
Le plus
souvent, l’intervention chirurgicale n’est pas nécessaire, le chémosis
se résorbant spontanément.
En cas d’échec, on peut réaliser des sutures intermarginales, des
sutures éversantes, une tarsorraphie, ou une greffe de peau totale.
Anomalies des canthus
:
A -
PLIS ÉPICANTHAUX :
1- Clinique :
L’épicanthus est un repli cutané, issu de la racine du nez, qui se
projette en regard de la commissure interne.
Il est toujours bilatéral
mais il peut être asymétrique.
Il existe quatre types d’épicanthus en fonction de la localisation du
pli cutané par rapport à la paupière :
– épicanthus supraciliaris : il débute dans la région du sourcil et
traverse la région du sac lacrymal vers la racine ;
– épicanthus palpebralis : il débute en paupière supérieure audessus
du tarse et s’étend au rebord orbitaire inférieur ;
– épicanthus tarsalis : il débute dans le pli palpébral et se perd dans
la peau proche du canthus interne ;
– épicanthus inversus : il débute en paupière inférieure et remonte
de façon progressive et se perd dans la paupière supérieure qui est
relativement préservée.
2- Génétique et pathogénie
:
Des études réalisées chez le foetus montrent que l’épicanthus est
constant entre le troisième et le sixième mois.
Il régresse pour
disparaître à la naissance.
Il reste marqué chez les sujets asiatiques,
alors que chez les nouveau-nés européens, il augmente
progressivement jusqu’à l’âge de 2 ans.
Par la suite, la croissance de
l’arête nasale entraîne une régression pour aboutir à une quasidisparition
à l’âge scolaire.
Ces constatations évolutives sont valables pour les épicanthus palpebralis et supraciliaris, mais pas pour
l’épicanthus inversus.
L’origine est inconnue ; il pourrait s’agir d’un
arrêt de la croissance des paupières ou d’une hypoplasie des os
propres du nez.
Lorsque l’épicanthus est héréditaire, autosomique dominant, il est
de type supraciliaris ou palpebralis.
Au cours des syndromes
malformatifs d’origine chromosomique, il est de type palpebralis.
3- Traitement :
L’épicanthus inversus régresse moins bien avec l’âge.
Il nécessite le
plus souvent une correction chirurgicale par plastie « Y-V » ou de
Mustardé, au prix d’une cicatrice.
Les autres épicanthus (supraciliaris, palpebralis et tarsalis) sont
souvent peu marqués cliniquement et ne nécessitent que rarement
une réparation chirurgicale à la fin de la croissance faciale.
B- TÉLÉCANTHUS :
Dans la dystopie médiocanthale, l’espace entre les canthus internes
est augmenté alors que les distances interpupillaires et intercanthales
externes restent normales.
Le télécanthus qui l’accompagne
correspond à un espacement des canthus de plus de 38 mm.
La sclère n’est pas visible entre la cornée et le canthus interne.
Il ne
s’agit pas d’un hypertélorisme qui correspond à une augmentation
de l’espace interorbitaire et qui se traduit par une augmentation de
la distance entre les globes oculaires.
Pour les différencier, il existe
différentes formules faisant intervenir la distance intercanthale
interne, la distance intercanthale externe et la distance
interpupillaire.
Le télécanthus n’a pas tendance à se corriger
spontanément, et seule une intervention chirurgicale permet une
correction esthétique.
Le télécanthus peut intéresser le canthus latéral comme dans
l’euryblépharon et le syndrome Kabuki.
1- Blépharophimosis :
Il s’agit d’une rare malformation entraînant un véritable phimosis
orbitopalpébral bilatéral.
Il associe une orbite osseuse étroite et
profonde, des paupières petites, ptôsées et épaisses, des fentes
palpébrales courtes, un épicanthus inversus, un télécanthus
(distances interpupillaire et interorbitaire normales), constituant
alors une tétrade décrite par Kohn et Romano en 1971.
2- Syndrome de Waardenburg ou dystopie
médiocanthale :
Le syndrome de Waardenburg est un ensemble polymalformatif
congénital décrit pour la première fois en 1951.
Il regroupe des
anomalies morphologiques, des troubles de la pigmentation et une
surdité.
La présence ou non de ces anomalies permet de définir
différents types de syndrome de Waardenburg.
* Clinique
:
Les différents signes cliniques observés sont :
– dystopie canthale interne : il s’agit d’une malposition des canthus
internes qui sont trop espacés. Dans le syndrome de Waardenburg,
la dystopie est congénitale et bilatérale ;
– troubles de la perméabilité des voies lacrymales : l’élargissement
des canthus s’accompagne d’un élargissement des points lacrymaux
et d’un allongement des canalicules, entraînant un
dysfonctionnement de la pompe lacrymale ;
– synophris : c’est l’hypertrichose de la partie interne des sourcils. Il
est moins fréquent dans le type 2 que dans le type 1.
Sa pénétrance
est de 50 % environ ;
– albinisme partiel : il peut se traduire par la dépigmentation de
l’iris, des cils (poliose), des sourcils, d’une mèche blanche de
cheveux ou d’un blanchiment précoce de l’ensemble de la chevelure.
L’hypopigmentation du fond d’oeil est classique mais ne
s’accompagne pas d’une baisse de vision ;
– surdité de perception par agénésie de l’organe de Corti : elle peut
être unilatérale ou bilatérale, mais est plus fréquente dans le type 2
(50 à 87 %) que dans le type 1 (20 à 67 %).
Pour poser le diagnostic, il faut l’association de deux signes majeurs,
ou d’un signe majeur associé à deux signes mineurs.
Dans le type 2,
le télécanthus n’existe pas et le blanchiment précoce de la chevelure
est un signe majeur.
* Génétique et pathogénie
:
Les différents types de syndromes de Waardenburg sont hétérogènes
sur le plan génétique, alors que leur présentation
clinique est assez homogène.
Cependant, les mutations connues
interviennent sur la différenciation, la migration ou la survie des
mélanocytes.
Ces cellules dérivent de la crête neurale et
interviennent dans la pigmentation cutanée, oculaire et des cheveux.
L’existence d’une strie vasculaire anormalement fine au niveau de la
cochlée est la conséquence de l’absence des mélanocytes.
Elle se
traduit par une désorganisation de l’organe de Corti et par une
surdité de perception.
De ce fait, on peut considérer que le type 1 et
certains types 3 et 4 sont des neurocristopathies, alors que le type 2
est secondaire à une atteinte mélanocytique.
* Traitement
:
Il repose principalement sur la cure chirurgicale du télécanthus.
Elle
débute par une plastie en « Y » transformée en « V » ou en « double
Z » transformée en « W » (lorsqu’il existe un petit repli épicanthal).
Ensuite, on peut réaliser une plicature du tendon médiocanthal ou une canthopéxie interne transnasale en fonction de
l’importance du télécanthus.
Le synophris est traité par une exérèse de la zone d’hypertrichose
avec greffe de peau totale prélevée en rétroauriculaire.
3- Malposition congénitale du tendon médiocanthal :
Il s’agit d’une affection rare, associée à des anomalies du nez
homolatérales, qui se manifeste par l’insertion trop basse située du
tendon canthal médial.
Le tendon qui s’insère normalement au niveau de la crête lacrymale
postérieure s’insère plus bas, à la jonction du mur médial et latéral
de l’orbite.
Cette anomalie de position résulte d’un arrêt de
croissance au deuxième mois de vie intra-utérine (période cruciale
de développement des structures canthales et externes du nez).
La correction repose sur une suture du tendon canthal au mur
médial de l’orbite.
En cas d’échec, il faut réaliser une canthopéxie
transnasale.
4- Syndrome de Opitz (G/BBB syndrome)
:
Le syndrome, décrit en 1969 par Opitz, comprend un ensemble
d’anomalies de la ligne médiane : une dysmorphie (hypertélorisme, télécanthus, malformation des oreilles, fentes faciales), une
dysphagie en rapport avec des anomalies pharyngées et
oesophagiennes, un hypospadias, une cryptorchidie, une agénésie du
corps calleux, un retard mental, des anomalies cardiaques.
Le gène a été localisé en Xp22.3 pour le type 1 (transmission liée à
l’X) et en 22q11.2 pour le type 2 (transmission autosomique
dominante).
Il n’y a pas de différence phénotypique entre les
deux types de syndrome.
C - MALPOSITION CANTHALE EXTERNE
:
Elle est responsable d’une anomalie de l’obliquité de la fente
palpébrale.
Elle est souvent associée à des anomalies osseuses
sous-jacentes.
Chez le sujet caucasien, la fente palpébrale est oblique en haut et en
dehors.
En effet, les canthus latéraux sont plus haut de 1 à 2mm
que les canthus médiaux.
1- Dystopie supérieure
:
Elle entraîne une obliquité mongoloïde de la fente palpébrale.
En
dehors de la forme raciale dans les populations asiatiques, elle peut
s’observer dans certains syndromes dysmorphiques tels que la
trisomie 21 et le blépharophimosis.
*
Syndrome de Down ou trisomie 21 :
Down a décrit le premier, en 1866, l’association d’un retard mental,
d’un faciès caractéristique et d’anomalies générales en particuliers
cardiaques.
Le mongolisme tire son nom de l’accentuation de l’obliquité
mongoloïde des fentes palpébrales associée à un épicanthus.
La dysmorphie comprend aussi une brachycéphalie, une face ronde, des
lèvres épaisses.
C’est pour ce syndrome que la première aberration chromosomique, la
trisomie 21 a été décrite par Lejeune en 1959.
2- Dystopie inférieure
:
Elle est due à une position plus basse du canthus externe par
rapport au canthus interne.
Elle entraîne une obliquité antimongoloïde de la fente palpébrale.
Elle s’observe dans le
syndrome de Franceschetti et dans le chromosome 21 en « anneau »
(contretype de la trisomie 21).
* Syndrome de Franceschetti
:
+ Clinique
:
Si Treacher Collins a décrit en 1900 deux cas incomplets du
syndrome, c’est Franceschetti et Klein en 1949 qui ont donné le nom
de dysostose mandibulofaciale à une dysmorphie très caractéristique
et reconnaissable au premier coup d’oeil.
En effet, les manifestations cliniques les plus fréquentes sont :
– une obliquité antimongoloïde bilatérale des fentes palpébrales,
avec un colobome de la partie externe des paupières inférieures ;
– une hypoplasie des os malaires et des mandibules ;
– des fentes faciales 6, 7 et 8 de la classification de Tessier ;
– une malformation de l’oreille externe et, dans quelques cas, de
l’oreille moyenne et interne ;
– une macrostomie, un palais ogival, une malocclusion dentaire ;
– des fistules borgnes dans les angles, formées par la bouche et les
oreilles ;
– une implantation atypique des cheveux qui s’avancent vers les
joues en formant de petites languettes.
+ Génétique et pathogénie
:
Cette affection résulte probablement d’une anomalie de migration
des cellules de la crête neurale des premiers et deuxièmes arcs
branchiaux.
La transmission est autosomique dominante avec une pénétrance
quasi complète, mais avec une expressivité variable. Le gène TCOF1
a été localisé sur l’extrémité du bras long du chromosome 5 en 5q32-
33.1.
Si le mode de transmission du syndrome de Franceschetti est de
type autosomique dominant, en 1985 Lowry décrit une famille
présentant une dysostose mandibulofaciale similaire à un syndrome
de Franceschetti mais dont le mode de transmission est autosomique
récessif.
Le tableau, dans cette famille, est complet, avec une
obliquité antimongoloïde des paupières, un colobome de la paupière
inférieure et une hypoplasie du malaire.
* Syndrome de Nager et de Reynier
:
C’est une dysostose mandibulofaciale qui associe une micrognathie
et une hypoplasie malaire entraînant une dysmorphie comparable à
un syndrome de Franceschetti.
Cependant, une atteinte de l’avantbras
est associée (absence de radius, synostose radiocubitale,
hypoplasie ou absence de pouce).
La localisation du gène est en
9q32.
La transmission serait autosomique et récessive, mais de
nombreux cas sont sporadiques.
* Syndrome otomandibulaire
:
Il s’agit d’une malformation osseuse en relation avec une hypoplasie
malaire et une fente faciale (n° 6 classification de Tessier).
L’atteinte est unilatérale et responsable d’une dystopie inférieure.
* Syndrome de Noonan
:
D’abord décrite comme syndrome masculin de Turner, c’est en 1968
que Noonan identifie un syndrome séparé.
Le phénotype correspond à un syndrome de Turner associé à une
dysmorphie : hypertélorisme, obliquité antimongoloïde des fentes
paplébrales, épicanthus, ptôsis, pterygium colli.
Les atteintes oculaires les plus fréquemment décrites sont des
strabismes, des cataractes, des dystrophies cornéennes stromales
antérieures, des hypoplasies du nerf optique, des colobomes
choriorétiniens.
Les atteintes générales sont principalement cardiaques (88 %),
squelettiques (petite taille, pectus carinatus ou excavatus, cou
palmé), génitales (cryptorchidie), sanguines (troubles de la
coagulation), oto-rhino-laryngologiques (surdité).
Il n’y pas de retard
intellectuel dans 85 % des cas.
Contrairement au syndrome de Turner, il n’y a pas d’anomalies
chromosomiques et le mode de transmission est autosomique
dominant, avec une localisation en 12q24 pour le syndrome de Noonan de type 1 le plus fréquent.
Il existe un syndrome de
type 2 rarissime dont la transmission est autosomique récessive.
Anomalies de la cinétique
des paupières
:
Le ptôsis est défini par la chute de la paupière supérieure par
impotence du muscle releveur.
La classification classique sépare les
ptôsis acquis et les ptôsis congénitaux présents dès la naissance.
Dans le cadre de cet article il est préférable d’utiliser la classification
physiopathologique.
En effet, certains ptôsis myogènes,
bien qu’acquis, sont d’origine génétique et ne se déclarent qu’à l’âge
adulte.
A - PTÔSIS MYOGÈNES HÉRÉDITAIRES OU CONGÉNITAUX
:
1- Ptôsis congénital isolé ou simple :
C’est le plus fréquent, unilatéral dans 75 % des cas. L’enfant
compense le ptôsis par une hyperaction du muscle frontal et en
basculant la tête en arrière.
Il peut entraîner une amblyopie lorsque
l’axe visuel est obstrué, mais cela reste rare.
En effet, c’est une anisométropie
ou un strabisme associé qui sont responsables dans cinq cas sur six
d’amblyopie.
Récemment, des gènes responsables de ptôsis familial ont été
localisés, permettant de distinguer deux types de syndromes de
ptôsis héréditaire :
–
type 1 : localisation en 1p32-p34.1 (transmission autosomique
dominante) ;
–
type 2 : localisation en Xq24-q27.1 (transmission liée à l’X).
L’intervention chirurgicale consiste à raccourcir le muscle releveur
de paupière supérieure ou à suspendre la paupière au muscle frontal.
L’indication dépend de la fonction musculaire résiduelle.
2- Blépharophimosis et syndromes apparentés
:
* Blépharophimosis de type 1
:
+ Clinique
:
Il s’agit d’un syndrome malformatif complexe associant la tétrade
ptôsis bilatéral majeur, télécanthus, épicantus inversus, et ectropion
des paupières inférieures.
Une hypertrichose, un rebord
orbitaire plat, une pseudoénophtalmie ont été décrits.
Le ptôsis est
myogène, avec histologiquement une raréfaction des fibres
musculaires associée à une fibrose.
+ Génétique
:
Il existe quelques cas sporadiques, mais le plus souvent la
transmission est autosomique dominante avec une expressivité
variable permettant de définir deux types de blépharophimosis :
– le type 1A pour lequel la pénétrance est complète ; le blépharophimosis est transmis par l’homme car la fertilité des
femmes est considérablement réduite (dysménorrhée ou stérilité);
– le type 1B dont la pénétrance est incomplète et qui est transmis
aussi bien par les hommes que par les femmes.
De nombreux cas de délétions et de translocation du chromosome 3 ont permis de localiser le gène en 3q22-q23.
La
localisation étant identique pour les formes 1A et 1B.
+ Traitement
:
La cure chirurgicale du blépharophimosis est complexe, toujours
imparfaite, et souvent décevante.
On corrige d’abord le télécantus et
l’épicantus inversus par une plastie en « double Z » de Mustardé ou une canthopéxie transnasale.
Puis, 3 mois plus tard, on
traite le ptôsis par une double suspension au muscle frontal par du
fascia lata.
On peut s’aider d’une canthotomie externe afin
d’augmenter la longueur de la fissure palpébrale.
Certains auteurs proposent la réalisation d’un remodelage orbitaire
osseux afin de corriger l’énophtalmie.
* Blépharophimosis de type 2
:
Une nouvelle localisation a été réalisée dans une famille indienne
par Maw en 1996.
Le phénotype est identique au blépharophimosis
de type 1 mais le gène se trouve sur le chromosome 7 (7p21-p13).
La
transmission est autosomique dominante.
* Syndromes complexes associés à un blépharophimosis
:
Le blépharophimosis peut faire partie de syndromes complexes tels
que le syndrome de Dubowitz ou le syndrome de blépharophimosis
avec ptôsis, syndactylie et petite taille.
3- Ophtalmoplégies externes
:
* Formes progressives
:
Elles débutent dans l’enfance ou chez l’adulte jeune et entraînent un
ptôsis et une limitation de l’élévation. Puis la maladie progresse et
la limitation s’étend à l’ensemble des muscles oculomoteurs.
Dans
la forme classique, l’atteinte reste purement oculaire, l’oculomotricité
intrinsèque et la vision restent normales.
Cependant, il existe de
nombreux syndromes associant l’ophtalmoplégie à des atteintes plus
générales (déglutition, phonation, ceintures scapulaires).
* Syndrome de Kearns et Sayre
:
Décrit par Kearns en 1965, c’est le prototype des ophtalmoplégies
liées à une pathologie mitochondriale.
Il apparaît vers l’âge de
10 ans, associant une rétinopathie pigmentaire, une ophtalmoplégie,
un ptôsis et une surdité.
La transmission se fait sur le mode
mitochondrial.
4- Fibroses congénitales des muscles extraoculaires :
C’est en 1879 que Heuck à décrit pour la première fois l’association
d’un ptôsis congénital et d’une impotence des muscles oculomoteurs
en rapport avec une fibrose musculaire.
Les yeux sont fixes avec
une mobilité horizontale du regard de 20 à 30° environ.
Il existe
deux formes, caractérisées par un mode de transmission différent :
– le type 1 est le plus fréquent, la transmission est autosomique
dominante et la localisation est en 12p11.2-q12 ;
– le type 2 est transmis sur le mode autosomique récessif et localisé
en11q13.1.
5- Maladie de Steinert
:
Elle se déclare le plus souvent à l’âge adulte, vers 30 ans, entraînant,
au niveau ophtalmologique, un ptôsis, une faiblesse à la fermeture
des yeux, une limitation des mouvements oculomoteurs et une
cataracte postérieure iridescente typique.
L’atrophie des masséters,
des sterno-cléido-mastoïdiens et des muscles temporaux donne au
patient un air hagard.
Il existe une myotonie qui donne son nom à
la maladie.
Elle prédomine au niveau des mains.
Rarement, une forme congénitale de la maladie a pu être observée.
Le diagnostic est souvent difficile en l’absence de symptômes non
encore déclarés chez les parents.
B - PTÔSIS NEUROGÈNES HÉRÉDITAIRES
OU CONGÉNITAUX
:
1- Ptôsis associé à une paralysie congénitale
de la troisième paire crânienne
:
L’existence d’un globe hypotrope et dévié en dehors complique la
prise en charge de cette forme de ptôsis.
En effet, l’absence
d’élévation lors de la fermeture des paupières empêche la protection
cornéenne après chirurgie et augmente le risque de lagophtalmie.
Il
faut d’abord traiter les troubles oculomoteurs avant d’envisager une
chirurgie du ptôsis.
2- Phénomène de Marcus Gunn :
C’est l’association d’une syncinésie mandibulopalpébrale et d’un
ptôsis.
Le ptôsis se corrige lorsque l’enfant ouvre la bouche ou
réalise des mouvements de diduction mandibulaire.
La syncinésie
serait liée à l’innervation anormale du releveur de la paupière
supérieure par une branche du nerf trijumeau.
Un déficit de
l’élévation du globe homolatéral est fréquente et source
d’amblyopie.
3- Syndrome de Claude Bernard-Horner :
Il associe une énophtalmie, un myosis, une hétérochromie irienne et
un ptôsis modéré par paralysie du muscle de Müller en rapport avec
une atteinte du nerf sympathique.
Il est quasiment toujours acquis,
mais une famille hollandaise présente une forme autosomique
dominante qui ne touche que les hommes.
C - RÉTRACTION CONGÉNITALE DE LA PAUPIÈRE
SUPÉRIEURE :
On parle de rétraction de la paupière supérieure lorsque celle-ci
découvre le limbe supérieur, donnant un aspect de fausse
exophtalmie.
La forme congénitale isolée a été décrite par Colin en
1990.
En général, la rétraction est asymétrique et aucune étiologie
particulière n’a été découverte. Dans certains cas, la rétraction est
liée à une syncinésie de Marcus Gunn sans ptôsis associé.