Alors que l’imagerie vasculaire numérique, en tomodensitométrie à
rayons X et en résonance magnétique, effectue des progrès
considérables et devient susceptible de fournir une alternative à
l’angiographie, l’ultrasonographie reste l’examen de dépistage et
d’évaluation de la pathologie vasculaire de la tête et du cou.
La mission qui lui est confiée n’est plus seulement le diagnostic positif,
mais aussi l’évaluation morphologique et fonctionnelle détaillée
(voire chiffrée) des lésions en vue de déterminer la conduite à tenir
et, notamment, les indications chirurgicales.
Dans de nombreux centres, l’angiographie n’est plus réalisée
systématiquement avant une endartériectomie carotidienne.
Ceci
implique non seulement que l’examen ultrasonographique soit
effectué avec méthode et rigueur, mais aussi que l’opérateur sache
en énoncer les écueils et les limites, déterminant ainsi la nécessité
du recours éventuel à d’autres techniques d’exploration.
Physiopathologie des accidents
ischémiques cérébraux :
A - MÉCANISMES
:
Quelles que soient les lésions artérielles causales, le mécanisme
physiopathologique qui conduit à leur expression clinique est, a
priori, simple :
– l’embolie interrompt le débit d’une artère dont le calibre est
d’autant plus large que le volume de l’embole est grand ;
– la réduction de débit en aval d’un obstacle circulatoire crée des
conditions d’ischémie.
La principale différence entre ces deux mécanismes est représentée
par la topographie.
En effet, les embolies concernent souvent des
artères de petit calibre.
En ce qui concerne la circulation cérébrale,
celles-ci sont généralement des artères terminales, pénétrant au sein
du parenchyme cérébral, et donc dépourvues d’anastomoses.
En
revanche, la réduction de débit en aval d’une occlusion ou d’une
sténose concerne généralement un territoire plus vaste, avec des
conséquences cliniques d’autant plus importantes.
Celles-ci peuvent
être plus ou moins marquées, pour une même lésion causale, en
fonction du développement des circuits anastomotiques.
Il est classique d’opposer ces deux mécanismes.
En réalité, la
réduction de débit sanguin en aval d’une sténose ou d’une occlusion
ne donne en général lieu à des manifestations cliniques que lors
d’une aggravation rapide de la lésion ou à l’occasion de
perturbations hémodynamiques systémiques (chute de pression
artérielle ou diminution de débit cardiaque, par exemple lors d’une intervention chirurgicale).
En effet, lorsqu’une lésion artérielle
s’établit progressivement, sur une artère principale, le réseau
collatéral se développe parallèlement.
C’est donc surtout lorsqu’une
sténose s’accroît brutalement (par thrombose surajoutée, nécrose ou
hémorragie décollant la plaque...) ou lorsqu’une voie collatérale fait
elle-même l’objet d’une lésion, que l’ischémie se développe et se
manifeste cliniquement.
La classique opposition des mécanismes physiopathologiques
(réduction de débit versus embolie) doit en outre être réexaminée à
la lumière des résultats apparemment paradoxaux des études
multicentriques NASCET et ECST qui démontrent que le
principal bénéfice de l’endartériectomie carotidienne concerne les
patients symptomatiques porteurs d’une sténose réduisant de plus
de 70 % le calibre de l’artère carotide interne.
Alors qu’il est admis
que la grande majorité des accidents vasculaires cérébraux résulte
d’un mécanisme embolique, il est en effet surprenant de constater
que la réduction de mortalité et morbidité des lésions carotidiennes
grâce à l’endartériectomie concerne surtout les sténoses ayant un
retentissement hémodynamique plutôt que des plaques non
sténosantes mais susceptibles d’être ulcérées, donc sources
d’embolies.
En fait, la probabilité de complication d’une plaque
d’athérome (ulcération, c’est-à-dire effraction de son revêtement intimal, fracture donnant lieu à une hémorragie par rupture des vasa
vasorum, nécrose...) est d’autant plus grande que cette plaque subit
des contraintes mécaniques importantes.
Or, la loi de la conservation
de l’énergie démontre que l’énergie cinétique du sang, au niveau
d’une sténose, s’accroît en proportion du carré de la vitesse
d’écoulement, tandis que la pression diminue. Immédiatement en
aval, l’énergie cinétique décroît et la pression augmente.
Ceci crée
un gradient de pression soumettant la plaque à des contraintes
d’autant plus fortes que la sténose est serrée, entraînant sa
déformation.
Ainsi donc, les remaniements de la plaque pouvant
conduire à son augmentation de volume ou à la rupture de son
revêtement et à la formation d’emboles sont d’autant plus probables
que le degré de sténose est important.
Les deux mécanismes agissent
donc de façon convergente, comme le suggèrent des études
récentes.
Ceci démontre tout l’intérêt des techniques en cours de
développement pour illustrer les déformations de la plaque au cours
du cycle cardiaque.
B - LÉSIONS CAUSALES
:
1- Athérome
:
L’athérome est, de très loin, la première cause de lésion artérielle
impliquée dans les accidents vasculaires cérébraux. Les plaques
d’athérome se développent dans la lumière artérielle dont elles
réduisent le calibre progressivement.
Leur rupture et
l’interruption du revêtement intimal de l’artère peuvent libérer des
fragments représentant autant d’emboles, ou constituer le point de
départ d’agrégats et de thrombi que le courant sanguin peut
entraîner. Dans certains cas, la thrombose se développant à la
surface d’une plaque peut aboutir à l’occlusion.
2- Embolie
:
Les emboles peuvent être formés d’éléments lipidiques, ou
d’agrégats plaquettaires et érythrocytaires provenant de lésions
artérielles d’amont (lésions carotidiennes mais aussi lésions
aortiques).
De telles embolies sont souvent à l’origine de
l’obstruction d’artères de petit ou moyen calibre.
Des emboles de
plus larges dimensions, pouvant obstruer de grosses artères comme
la carotide commune ou la carotide interne, ont en général pour
point de départ l’atrium gauche (phénomène fréquent en cas de
pathologie mitrale et/ou de fibrillation atriale).
Plus rarement,
peuvent survenir des embolies paradoxales en raison de la
persistance d’une communication interatriale permettant à des
emboles provenant de veines périphériques de passer dans la
circulation systémique et d’obstruer les artères cérébrales.
3- Dissections artérielles
:
Les signes cliniques des dissections artérielles des artères cervicales
et cérébrales sont actuellement mieux reconnus, et l’imagerie est
mise en oeuvre plus rapidement, ce qui permet d’en confirmer plus
souvent le diagnostic.
En effet, une de leurs caractéristiques
principales est l’évolutivité avec possibilité de reperméabilisation
mais aussi de réocclusion dans un délai relativement bref.
Elles
résultent du clivage de la paroi artérielle par un hématome
d’extension variable, sous-intimal (carotide interne intracrânienne)
ou sous-adventiciel (artères cervicales).
Si l’origine de l’hématome
reste débattue, la fréquence de cette pathologie est actuellement
mieux connue et l’on estime qu’environ 20 % des accidents
ischémiques de l’adulte jeune sont dus à une dissection artérielle.
Ces dissections sont dites « spontanées » lorsque les facteurs
favorisants comme un traumatisme artériel ou une anomalie
préexistante de la paroi comme une dysplasie ne sont pas retrouvés.
L’hypertension artérielle est une cause favorisante de la dissection
mais son rôle est cependant mal précisé.
Par ailleurs, les axes carotidiens peuvent également être concernés
par l’extension d’une dissection de l’aorte ascendante, mais le
tableau neurologique n’est jamais au premier plan dans ce contexte
d’urgence chirurgicale thoracique.
On peut également observer des
dissections localisées dans les suites d’une irradiation cervicale ou
d’une chirurgie carotidienne.
4- Artérites inflammatoires
:
Bien que rares dans les pays occidentaux, les artérites
inflammatoires comme la maladie de Takayasu sont à l’origine d’un
rétrécissement étendu des axes artériels supra-aortiques.
Survenant
surtout chez la femme jeune et dans un contexte inflammatoire, ces
lésions peuvent donner des obstructions multiples et sévères.
D’autres maladies vasculaires de physiopathologie complexe et mal
connue, comme la maladie de Moya-Moya, sont à l’origine de
lésions multiples des artères de la base du crâne.
Des perturbations
hématologiques comme la drépanocytose s’accompagnent aussi de
sténoses des artères concernant essentiellement les segments intracérébraux.
Épidémiologie et topographie
des lésions :
La fréquence des lésions d’athérosclérose des axes artériels cervicaux
augmente avec l’âge et les principaux facteurs de risque vasculaire
(diabète, hypertension artérielle, tabagisme, hypercholestérolémie et
baisse du rapport high density lipoprotein/low density lipoprotein
[HDL/LDL], hyperhomocystéinémie...).
En l’absence même
de symptomatologie neurologique, les sujets porteurs d’une
artériopathie des membres inférieurs présentent une prévalence
accrue de lésions des artères carotides, ce qui justifie la réalisation
d’une exploration systématique des axes artériels cervicocéphaliques
après la découverte d’une artériopathie des membres inférieurs.
En ce qui concerne les plaques et les sténoses, les lésions siègent
principalement à la bifurcation carotidienne et à l’origine de l’artère
carotide interne, sur le segment V1 de l’artère vertébrale et, à un
moindre degré, sur le tronc brachiocéphalique.
Les occlusions
concernent en premier lieu la carotide interne, puis le segment V1
de l’artère vertébrale.
Rappel anatomique
:
Sont seules rappelées ici les notions anatomiques qui présentent un
intérêt particulier dans le cadre de l’exploration ultrasonographique.
A - AXE CAROTIDIEN
:
Du côté droit, l’artère carotide commune et l’artère subclavière
naissent d’un tronc commun (artère brachiocéphalique), tandis que
ces deux artères naissent séparément de la crosse aortique du côté
gauche.
L’artère carotide commune n’abandonne aucune branche au cours de son trajet.
Il en est de même pour l’artère carotide interne
depuis son origine jusqu’à l’issue du siphon carotidien.
En revanche,
l’artère carotide externe donne de nombreuses branches dont la
première est généralement l’artère thyroïdienne supérieure.
La
bifurcation carotidienne est localisée en regard de C4 dans 65 % des
cas.
Elle est marquée par un élargissement localisé ou bulbe. En aval,
le calibre de l’artère carotide externe est généralement inférieur à
celui de l’artère carotide interne.
B - ARTÈRE OPHTALMIQUE
:
C’est la première branche abandonnée par l’artère carotide interne à
la sortie du siphon carotidien. Pénétrant dans l’orbite par la fente
sphénoïdale, l’artère ophtalmique croise ensuite la face supérieure
du nerf optique et s’oriente en dedans pour se terminer, au niveau
du canthus interne de l’oeil, en artère frontale interne et artère nasale.
Celles-ci entretiennent des anastomoses avec les branches de l’artère
carotide externe (respectivement l’artère temporale superficielle et
l’artère faciale).
Des branches plus profondes de l’artère ophtalmique
peuvent aussi développer de telles anastomoses, comme l’artère
lacrymale avec la branche maxillaire de la carotide externe.
C - ARTÈRE VERTÉBRALE
:
Elle naît du versant supérieur et dorsal de la convexité de l’artère
subclavière.
Après son origine ou ostium (V0), le premier segment
de l’artère vertébrale la conduit jusqu’au niveau de la sixième
vertèbre cervicale (C6) où, dans 90 % des cas, elle pénètre dans le
canal formé par les processus transverses des vertèbres cervicales,
(segment V2).
Sortant de ce canal, elle contourne alors en
arrière la masse latérale de l’atlas (segment V3), puis pénètre dans la
boîte crânienne par le foramen magnum ou « trou occipital »
(segment V4) pour rejoindre enfin l’artère vertébrale controlatérale
et former, par cette fusion, l’artère basilaire.
L’asymétrie de diamètre des artères vertébrales est fréquente.
Parfois, une artère vertébrale de petit calibre ne rejoint pas l’artère
basilaire.
D’autre part, l’origine de l’artère vertébrale est variable,
particulièrement du côté gauche où elle naît parfois directement de
l’aorte.
D - ARTÈRES CÉRÉBRALES
:
L’artère cérébrale moyenne, branche terminale de la carotide interne,
s’oriente latéralement dans la vallée sylvienne.
En revanche, l’artère
cérébrale antérieure présente tout d’abord un court trajet dirigé vers
la ligne médiane, puis s’oriente en avant et en haut, pour cheminer
le long de la face médiale de l’hémisphère cérébral.
Au début de ce
segment, elle s’unit à l’artère controlatérale par l’artère
communicante antérieure.
L’artère cérébrale postérieure, issue de l’artère basilaire, s’oriente
latéralement puis en arrière, après avoir établi une anastomose avec
la terminaison de l’artère carotide interne, par l’artère communicante
postérieure.
E - ANASTOMOSES
:
Les anastomoses entre le système carotidien interne et le système
carotidien externe empruntent les voies mentionnées,
comme les branches de l’artère ophtalmique.
Les anastomoses entre côté droit et côté gauche se développent à
partir des branches des carotides externes, notamment les artères
thyroïdiennes supérieures et faciales, ainsi que les branches des
artères temporales superficielles.
Les anastomoses entre le système carotidien et le système vertébral
se situent à chaque niveau métamérique, entre des branches de
l’artère cervicale ascendante et de l’artère cervicale profonde et
l’artère vertébrale, puis entre l’artère occipitale, branche de la
carotide externe, et la branche occipitale de l’artère vertébrale.
En ce qui concerne les artères cérébrales, on leur reconnaît trois
niveaux principaux d’anastomoses :
– d’une part les anastomoses limitrophes entre les branches
superficielles, corticales, des artères cérébrales antérieure, moyenne
et postérieure ;
– d’autre part les anastomoses extra- et intracrânienne décrites ;
– enfin, les anastomoses constituant le polygone de Willis (artère
communicante antérieure, et artères communicantes postérieures).
Ce polygone n’est cependant conforme à sa description classique
que dans moins de 50 % des cas.
De nombreuses variantes ont été
décrites, d’une simple asymétrie de calibre des artères
communicantes postérieures jusqu’à l’absence d’une artère
communicante, la naissance d’une artère cérébrale postérieure
directement de la carotide interne, ou, inversement, l’alimentation
d’une artère cérébrale moyenne par l’artère basilaire.
Technique d’examen
:
A - EXAMEN STATIQUE
:
1- Conditions d’examen
:
Les conditions de déroulement de l’examen ultrasonographique sont
actuellement bien standardisées.
Le sujet doit être allongé
sur le dos, calme et détendu.
Il est possible de relever le dossier du
lit d’examen pour placer le patient en position semi-assise, à la
condition que le cou reste en extension.
Une demi-rotation de la tête
du côté opposé facilite l’examen des artères carotides communes et
surtout carotides internes.
L’examen du trajet cervical des artères à
destinée cérébrale nécessite l’usage d’une sonde ultrasonore de
haute fréquence, barrette linéaire ou courbe de 7,5 à 10 MHz.
L’exploration de l’origine des troncs supra-aortiques impose de
recourir à une sonde de fréquence plus basse (de l’ordre de 5 à 3,5
MHz) et de petite surface de contact pour permettre un abord susclaviculaire
ou sus-sternal.
L’examen des artères cérébrales est quant à lui pratiqué à l’aide
d’une sonde de type sectoriel électronique (phased array), de 2 à 2,5
MHz.
Des préréglages spécifiques du doppler transcrânien sont
essentiels.
Le patient est en décubitus dorsal pour l’examen par voie
orbitaire ou temporale, assis ou en décubitus latéral avec la tête
fléchie sur le thorax pour l’abord sous-occipital.
2- Carotide commune
:
L’examen de l’artère carotide commune doit être réalisé en coupes
transversales étagées et en coupes longitudinales (ces dernières étant
réalisées dans plusieurs plans, depuis l’incidence antéropostérieure
jusqu’à une incidence frontale, voire oblique en avant).
Un
enregistrement de référence du signal doppler (en doppler à
émission pulsée) doit être réalisé sur la plus basse partie accessible
de la carotide commune, en coupe longitudinale, en recherchant un
angle d’incidence inférieur ou égal à 60°.
Le signal doppler, recueilli
dans un volume de mesure centré sur la lumière du vaisseau et
couvrant au moins les deux tiers de celle-ci, est ainsi obtenu en
analyse spectrale en temps réel.
Il est nécessaire de mesurer à ce
niveau, après avoir soigneusement déterminé l’angle d’incidence, la
vitesse systolique maximale et la vitesse télédiastolique maximale.
3- Bulbe carotidien et carotide interne
:
Le bulbe carotidien et la carotide interne sont ensuite examinés en
coupes transversales puis longitudinales.
Ces dernières
coupes peuvent être avantageusement réalisées selon une incidence
oblique de dehors en dedans et d’arrière en avant, une position postérolatérale de la sonde évitant une butée sur le maxillaire et
permettant ainsi une visualisation complète du segment cervical de
la carotide interne.
Un enregistrement doppler spectral doit être
effectué dans la lumière de la carotide interne le plus haut possible,
en aval des mouvements tourbillonnaires du sang dans le bulbe et,
le cas échéant, au niveau le plus serré d’une éventuelle sténose,
après repérage de ce niveau en doppler couleur.
La vitesse
systolique maximale et la vitesse télédiastolique doivent être aussi
mesurées à ce niveau.
4- Artère carotide externe
:
Généralement située en avant et en dedans de la carotide interne à
son origine, l’artère carotide externe présente le plus souvent un
calibre plus grêle et ses premières branches de division sont visibles.
5- Artère ophtalmique
:
L’enregistrement doppler de l’artère ophtalmique a longtemps été
une étape essentielle de l’exploration ultrasonographique des axes carotidiens, en raison des renseignements indirects que cette artère
peut apporter sur les conditions circulatoires au niveau du siphon
carotidien.
Ce rôle diagnostique est désormais confié au doppler transcrânien. L’enregistrement doppler de l’artère ophtalmique
s’impose cependant :
– lorsque la clinique oriente vers une pathologie de l’artère
ophtalmique ou de ses branches ;
– lorsque la clinique oriente vers une lésion au niveau du siphon
carotidien, pouvant intéresser l’artère ou la veine ophtalmique ;
– lorsque le doppler transcrânien n’est pas réalisable en raison de
l’absence de fenêtre acoustique.
L’artère ophtalmique peut être examinée à partir de son émergence
dans le cône orbitaire, à l’aide d’une sonde linéaire effectuant une
coupe horizontale à mi-hauteur de l’orbite.
En arrière du pôle
postérieur de l’oeil, la zone hypoéchogène signalant le nerf optique
sert de repère.
L’artère ophtalmique se situe initialement dans un
plan légèrement supérieur.
Elle chemine parallèlement au nerf
optique, le croise de dehors en dedans, puis longe la paroi
médiale de l’orbite jusqu’à sa terminaison.
Ses différentes branches
sont visibles, comme l’artère lacrymale avant le croisement du nerf
optique, puis les artères ethmoïdales immédiatement après le
croisement.
Enfin, on observe, sans toujours pouvoir le détailler, un
ensemble formé par les artères centrales du nerf optique et de la
rétine, le réseau des artères ciliaires courtes postérieures, ainsi que
le cercle artériel choroïdien qui entoure la tête du nerf optique.
6- Artère subclavière
:
Elle peut être examinée en coupe tranversale ou longitudinale par
voie sus-claviculaire, puis en coupe horizontale par voie sousclaviculaire
permettant d’observer la transition de l’artère
subclavière à l’artère axillaire.
7- Artère vertébrale
:
Elle peut être observée en coupe axiale dans la région de son ostium
(V0, pas toujours facilement accessible, notamment du côté gauche
lorsque l’ostium est trop postérieur) où elle doit être différenciée du
tronc thyrocervical.
Dans son segment V1, elle est en général
rectiligne et facile à examiner jusqu’à sa pénétration dans le
canal transversaire, sauf parfois dans sa portion initiale lorsqu’elle
présente une boucle ou un siphon.
Dans le segment V2,
l’échographie donne accès à de courts segments de l’artère
vertébrale entre deux processus transverses.
En V1 et V2,
l’image de la veine vertébrale est visible en avant de l’artère.
Une coupe oblique sous-occipitale permet d’observer l’artère
vertébrale en V3, au niveau de sa boucle, en arrière de la masse
latérale de l’atlas.
L’image caractéristique est celle d’une « anse de
seau » avec les deux versants de l’artère montrant un sens
d’écoulement apparemment différent.
8- Artères cérébrales
:
Les fenêtres acoustiques, incidences et profondeurs d’exploration
pour l’examen transcrânien des artères cérébrales, ont été décrites
avec précision.
La première incidence est celle de l’écaille
temporale, en dessus de l’arcade zygomatique, immédiatement en
avant du tragus de l’oreille.
La présence d’une fenêtre acoustique
convenable est attestée par la possibilité de visualiser l’arc du rebord
sphénoïdal et les structures cérébrales médianes.
Cette voie donne
accès à la terminaison du siphon carotidien, à l’artère cérébrale moyenne (M1 et M2), à la première portion, précommunicante, de l’artère cérébrale antérieure, ainsi que
la portion pré- (P1) et postcommunicante (P2, P3) de l’artère cérébrale
postérieure.
L’artère communicante postérieure est aussi
parfois visible.
Ces différents segments artériels sont rarement
visualisés sur un plan de coupe unique et leur mise en évidence
complète impose souvent de varier quelque peu l’inclinaison de la
sonde.
L’incidence sous-occipitale permet de visualiser les segment V4 des
artères vertébrales et leur réunion en artère basilaire à environ
80 mm de la sonde.
L’utilisation des agents de contraste ultrasonore trouve une bonne
indication dans cette exploration où les fenêtres acoustiques sont
assez souvent de qualité médiocre.
B - TESTS ET MANOEUVRES DYNAMIQUES
:
Quelques tests simples permettent de s’assurer d’une identification
correcte de certaines artères.
Une compression oscillante de l’artère
temporale superficielle en avant du tragus de l’oreille permet
d’imposer, sur le tracé doppler de l’artère carotide externe, une
modulation caractéristique.
Ce test, naturellement insuffisant
à lui seul permet de distinguer carotide interne et carotide
externe.
En effet, les critères habituels (calibre, situation, et tracé
doppler) sont parfois pris en défaut, notamment dans les situations
pathologiques.
Le même type de test peut être effectué pour identifier avec certitude
l’artère vertébrale en V1 : une compression oscillante appliquée sur
l’artère vertébrale en V3, environ 2 cm en arrière de l’apophyse
mastoïde, provoque une modulation nette du tracé de l’artère
vertébrale en V0-V1, la distinguant ainsi des artères voisines
(branches du tronc thyrocervical).
Une compression de la carotide commune homolatérale réduit ou
annule le flux de l’artère cérébrale moyenne, alors que celui de la
cérébrale antérieure s’inverse, si la communicante antérieure est
fonctionnelle.
Une compression de la carotide commune
controlatérale augmente le flux le la cérébrale antérieure lorsqu’elle
alimente la communicante antérieure.
L’influence des compressions
est plus inconstante sur les cérébrales postérieures.
Quoiqu’il en soit, ces manoeuvres de compression carotidienne ne
peuvent être réalisées qu’après s’être assuré de l’absence de lésion
significative des bifurcations.
Elles sont rarement indispensables en
pratique, en particulier depuis l’utilisation de l’échodoppler couleur
pour le repérage des vaisseaux.
Résultats normaux
:
A - PAROI ARTÉRIELLE NORMALE
:
En coupe longitudinale, la paroi artérielle normale apparaît formée
de trois couches :
– sur le versant luminal, une couche fine formant un liséré de
tonalité grise, régulier, peu épais ;
– une couche intermédiaire hypoéchogène ou anéchogène ;
– une couche externe plus épaisse, hyperéchogène.
Il serait bien sûr tentant d’attribuer à ces trois couches
échographiques une dénomination histologique (intima, média,
adventice).
Ce serait là, cependant, un abus de langage car
l’échographie montre non pas les couches histologiques elles-mêmes
mais les interfaces successives séparant les tissus :
– l’interface sang-intima ;
– l’interface intima-média ;
– l’interface média-adventice ;
– l’interface adventice-tissus environnants.
Néanmoins, la couche hypoéchogène intermédiaire correspond
effectivement à l’emplacement de la média et représente, par
exemple, le plan de clivage de l’endartériectomie.
Lorsqu’il s’agit de
mesurer l’épaisseur de la paroi artérielle et d’observer son
épaississement du fait de la maladie athéromateuse, la mesure est
effectuée entre l’interface sang-intima et l’interface média-adventice,
regroupant ainsi l’ensemble « intima-média ».
L’aspect caractéristique de la paroi artérielle en trois couches est
d’autant plus apparent que l’artère est large et rectiligne. Tel est donc
le cas spécialement de la carotide commune et de la première
portion de la carotide interne.
B - CAROTIDE COMMUNE
:
Dans la majorité des cas, la carotide commune se présente, en coupe
longitudinale, sous la forme d’une structure rectiligne anéchogène,
délimitée par une paroi présentant l’aspect échographique
caractéristique décrit.
À droite, la carotide
commune peut être observée, en coupe transversale, depuis sa
naissance du tronc brachiocéphalique.
À gauche, cette origine,
beaucoup plus profonde, n’est généralement pas accessible.
Enfin,
dans de nombreux cas, chez les personnes âgées, la carotide
commune présente un trajet sinueux.
Le tracé doppler de la carotide commune est caractérisé par un pic
systolique ample mais relativement étroit, avec une phase
ascendante quasi verticale et une phase descendante marquée par
une encoche (ou dicrotisme), et suivie d’une onde négative qui se
rapproche de la ligne de base sans l’atteindre.
La composante
diastolique continue est ensuite d’importance moyenne, ce qui
correspond à un indice de résistance de 0,7 à 0,9.
C - CAROTIDE INTERNE
:
À son origine, la carotide interne présente généralement un
renflement en « ampoule », ou « bulbe carotidien ».
Au-delà,
le calibre de la carotide interne est généralement supérieur à celui
de la carotide externe. Leur topographie respective est très variable,
y compris entre le côté droit et le côté gauche d’un même sujet.
La
carotide interne se situe cependant le plus souvent, à son origine, en
arrière et en dehors de la carotide externe.
Le tracé de la carotide interne est caractérisé par une composante
diastolique continue importante, correspondant à un indice de
résistance inférieur à 0,7.
La pente postsystolique est douce, finement
modulée.
D - CAROTIDE EXTERNE
:
Plus grêle que la carotide interne, elle s’en distingue aussi par le fait
que ses premières branches sont le plus souvent bien visibles,
notamment à l’aide du doppler couleur.
Son tracé doppler témoigne d’une plus haute résistance circulatoire
d’aval, de sorte que le pic systolique est plus étroit, suivi d’une onde
de reflux qui peut croiser la ligne de base, et d’une vitesse télédiastolique faible ou nulle.
Néanmoins, dans certains cas
(vasodilatation faciale due à la chaleur ou l’émotion, implication de
la carotide externe dans un réseau de suppléance...), la composante
diastolique peut être importante sur la carotide externe et créer une
confusion.
Dans de tels cas, l’épreuve de compression oscillante de
l’artère temporale superficielle, modulant le tracé de la carotide
externe, permet une identification plus sure.
E - ARTÈRE OPHTALMIQUE
:
Son tracé normal est celui d’une artère destinée à un territoire à
basse résistance, tout au moins en ce qui concerne la portion
proximale de cette artère (avant et au niveau de son croisement avec
le nerf optique).
Dans sa partie distale, ainsi qu’au niveau de
ses branches terminales, l’artère ophtalmique donne un tracé qui se
rapproche davantage de celui de la carotide externe.
F - ARTÈRE SUBCLAVIÈRE
:
Au repos, elle donne un tracé caractéristique d’une haute résistance
circulatoire d’aval, avec un pic systolique ample, un reflux
postsystolique, et une vitesse télédiastolique nulle.
Ce tracé est
cependant susceptible de se modifier en réponse à un effort
musculaire du membre supérieur, voire spontanément.
En effet, les
variations vasomotrices cycliques sont importantes, chez le sujet
jeune notamment, au niveau du membre supérieur.
G - ARTÈRE VERTÉBRALE
:
Une artère vertébrale anatomiquement et fonctionnellement normale
présente un tracé doppler évocateur d’une basse résistance
circulatoire distale.
L’aspect du tracé est cependant très
variable, avec une composante diastolique continue généralement
d’autant plus faible que le calibre de l’artère est grêle.
À l’extrême,
si l’artère vertébrale est de très petit calibre et surtout si elle ne
participe pas à la formation de l’artère basilaire, son tracé traduit
une très haute résistance circulatoire d’aval.
H - ARTÈRES CÉRÉBRALES
:
Le tracé doppler normal enregistré sur les artères cérébrales est
caractéristique d’une résistance circulatoire basse.
Le pic systolique
à front raide est suivi d’une composante diastolique continue
importante, de sorte que l’indice de résistance est généralement
voisin de 0,6 ou inférieur.
Il existe peu de différences dans les
conditions de base, entre les différentes artères cérébrales du point
de vue de leur tracé de vitesse circulatoire.
Lors de
l’enregistrement par voie temporale, l’artère cérébrale moyenne
donne un tracé positif (flux orienté vers la sonde), tandis que l’artère
cérébrale antérieure donne un tracé négatif (flux s’éloignant de la
sonde, en direction de la ligne médiane).
L’artère cérébrale
postérieure, dans sa portion postcommunicante (P2), donne d’abord
un tracé positif puis, lorsqu’elle s’oriente en arrière (P3), un tracé
négatif.
Le siphon carotidien, enregistré par voie orbitaire ou temporale, peut
donner un signal positif ou négatif selon l’orientation de la sonde.
Une confusion est cependant possible, en particulier avec l’origine
de l’artère cérébrale antérieure ou moyenne.
Par voie occipitale, les artères vertébrales dans le segment V4, de
même que l’artère basilaire, donnent des tracés de basse résistance
circulatoire d’aval, avec un signal négatif.
Les vitesses sont en
général nettement plus élevées dans le tronc basilaire que dans les
artères vertébrales.
Sémiologie descriptive
:
A - LÉSIONS ATHÉROMATEUSES (PLAQUES)
:
L’aspect échographique des plaques d’athérome peut être décrit en
termes de situation, dimensions, échostructure, échogénicité, et
surface.
1-
Situation :
L’examinateur doit décrire avec précision la situation des plaques
d’athérome, en particulier par rapport aux bifurcations qui
constituent leur siège principal.
L’extension de la lésion, par exemple
en direction de l’artère carotide interne ou de l’artère carotide
externe, doit être précisée.
2- Dimensions
:
La forme et les dimensions de la plaque d’athérome doivent être
aussi décrites dans toute la mesure du possible, sachant que les
plaques complexes ne sont pas assimilables à des formes
géométriques simples, ni facilement mesurables.
Certaines plaques
simples ont une disposition circonférencielle plus ou moins excentrée (en «
croissant »), tandis que d’autres se situent sur un seul versant
de l’artère. L’examinateur doit s’attacher à mesurer l’étendue
(longueur, selon le grand axe de l’artère) et l’épaisseur
maximale de ces plaques.
3- Échostructure
:
Il est classique d’opposer les plaques d’échostructure homogène aux
plaques d’échostructure hétérogène, qui seraient plus souvent
symptomatiques.
Cette échostructure
ne peut être appréciée dans de bonnes conditions que lorsque la
plaque est accessible à l’examen dans sa totalité.
La présence
d’ombres acoustiques générées par des éléments calcifiés de la
plaque peut considérablement gêner cette analyse.
4- Échogénicité
:
Les lésions athéromateuses peuvent avoir un aspect hypo- ou
anéchogène (échogénicité identique à celle du sang circulant),
isoéchogène (similaire aux structures musculaires voisines), ou enfin
hyperéchogène (avec ou sans ombre acoustique).
Les lésions hypoéchogènes peuvent être le fait de la maladie
athéromateuse à des stades très différents : du premier stade
(dépôt lipidique non remanié par la fibrose) jusqu’au stade des
complications (hémorragie au sein ou sous une plaque, nécrose
athéromateuse, thrombus de surface).
Les plaques isoéchogènes
peuvent correspondre à des dépôts lipidiques non confluents ou
associés à des lésions modérées de fibrose.
En revanche, les lésions hyperéchogènes traduisent généralement les remaniements fibreux
de la plaque, et l’existence d’une ombre acoustique signe la présence
de calcifications.
Sans préjuger de l’existence ou non d’une ulcération à la surface de
la plaque, son caractère pathogène semble plus probable lorsque
plus de 50 % du volume de la plaque est constitué par des lésions
hypo- ou anéchogènes.
Il importe cependant d’insister sur le fait qu’il n’existe pas de critère
échographique spécifique permettant d’identifier telle ou telle lésion histologique.
En particulier, il n’est pas possible d’affirmer, sur le
seul aspect de l’image échographique, la présence d’une hémorragie
ou d’une nécrose, quand bien même un faisceau d’arguments
rendrait ce fait très probable.
5- Surface
:
La surface de la lésion peut être lisse, régulière ou, au contraire,
irrégulière, anfractueuse.
La résolution échographique n’est pas
toujours suffisante pour permettre une bonne analyse de la surface
de la plaque.
Il faut avoir recours systématiquement à l’imagerie
doppler couleur ou, mieux, de puissance, pour déterminer avec
précision les contours, visualiser les anfractuosités, et délimiter
d’éventuels composants anéchogènes à la surface de la plaque.
Ceci
impose des réglages adaptés car la vitesse du flux au contact de la
plaque, et a fortiori au sein des anfractuosités, est particulièrement
lente.
L’examen de la littérature et des conclusions des conférences de
consensus montre que cela ne constitue cependant pas un critère
majeur pour l’identification des plaques ulcérées, sauf lorsque
l’anfractuosité atteint 2 mm de profondeur.
Quoi qu’il en soit, le degré de sténose a une responsabilité très
grande dans l’apparition de la symptomatologie, même si, très
vraisemblablement, les irrégularités de surface de la plaque et sa
composition peuvent intervenir dans le potentiel emboligène.
6- Interprétation
:
Les plaques non sténosantes des axes carotidiens posent de délicats
problèmes d’interprétation physiopathologique.
Lorsque la plaque
ne réduit pas de plus de 60 % le diamètre artériel, aucune indication
chirurgicale ne peut être posée a priori, selon les études
multicentriques publiées (l’indication peut être posée devant
certaines sténoses de plus de 60 % dans un contexte où le risque
opératoire prévisible est très faible).
Ceci est vrai quel que soit
son aspect échographique, et que le patient soit ou non symptomatique.
Le risque d’accident vasculaire cérébral est, en fait,
plus élevé lorsque deux facteurs sont en présence : une sténose de
plus de 50 %, et une plaque majoritairement hypoéchogène.
Cependant, l’examen échodoppler doit s’attacher à l’analyse
détaillée de la plaque pour permettre d’évaluer sa part de
responsabilité dans la physiopathologie.
Les critères décrits doivent apparaître dans le compte rendu, en particulier
l’évaluation de la proportion de lésions hypoéchogènes et les
caractéristiques de surface.
La recherche de microemboles dans les
artères sylviennes, par un enregistrement prolongé en doppler pulsé
transcrânien, peut conforter le diagnostic de plaque à haut risque
emboligène.
Dans tous les cas, la description précise de la lésion, bien que ne
pouvant seule déboucher, dans l’état actuel des connaissances, sur
une indication chirurgicale, atteste du risque vasculaire et permet
d’adapter la prise en charge.
De plus, une description initiale
complète de la lésion en permet la surveillance, une progression
significative de la plaque étant un facteur de risque de survenue de
symptômes neurologiques chez les patients porteurs de plaques
antérieurement asymptomatiques.