Les tumeurs du rein de l’enfant ne sont pas exceptionnelles ; elles
sont essentiellement malignes et la tumeur de Wilms ou
néphroblastome est de loin la plus fréquente ; à l’inverse, à l’âge
pédiatrique, les tumeurs des voies excrétrices sont exceptionnelles
aussi bien au niveau urétéral qu’au niveau urétral.
Des tumeurs ou
pseudotumeurs de vessie peuvent se rencontrer ; elles demeurent
cependant très rares.
Tumeurs rénales
:
Tout radiologiste ayant un exercice polyvalent peut être confronté,
dans son exercice habituel, à la découverte et donc au bilan initial
d’une masse rénale chez un enfant.
Son premier objectif est de
rapporter avec certitude l’origine de la masse au rein, puis d’en
affirmer la nature tumorale.
L’échographie est dans la grande
majorité des cas suffisante.
Quand il s’agit à l’évidence d’une
tumeur, le bilan préthérapeutique doit être réalisé en accord avec
l’équipe oncologique pédiatrique qui va prendre en charge l’enfant,
et la réalisation d’une tomodensitométrie (TDM) ou d’une imagerie
par résonance magnétique (IRM) ne sera contributive que si elle est
intégrée dans une réflexion d’équipe.
Le diagnostic radiologique a un intérêt majeur puisque la décision
thérapeutique d’instaurer une chimiothérapie préopératoire dans le néphroblastome chez l’enfant est prise sans preuve
anatomopathologique.
Le radiologue a donc une responsabilité
essentielle ; il doit :
– affirmer qu’il s’agit bien d’une masse d’origine rénale ;
– réunir les arguments d’imagerie en faveur du néphroblastome ;
– confronter ces arguments avec ceux des cliniciens, pour aboutir
ensemble à une proposition diagnostique cohérente.
A - CLASSIFICATION DES TUMEURS DU REIN DE L’ENFANT
:
La tumeur du rein la plus fréquente chez l’enfant est le
néphroblastome ou tumeur de Wilms (87 à 90 % des tumeurs
rénales), mais dans les premiers mois de la vie, une tumeur bénigne,
le néphrome mésoblastique congénital ou tumeur de Bolande,
prédomine.
Cette approche simplifiée n’est pas fausse ; cependant,
elle est insuffisante devant la diversité des formes histologiques
progressivement identifiées et décrites expliquant en partie
l’hétérogénéité pronostique observée.
Ainsi, un certain nombre de
classifications ont vu le jour, associant l’histologie et le pronostic.
Il existe une classification usuelle reposant sur les données histopathologiques.
En France, les équipes d’oncologie pédiatrique travaillent dans le
cadre de la Société internationale d’oncologie pédiatrique (SIOP) ;
cette société propose une classification basée sur le pronostic.
Ces classifications montrent la variété des types possibles de
tumeurs du rein, avec un pronostic très différent et donc une prise
en charge thérapeutique très différente.
Nous nous attacherons à
préciser, chaque fois que cela est possible, les éléments pouvant
intéresser l’équipe prenant en charge l’enfant.
B - NÉPHROBLASTOME
:
Le néphroblastome est donc la tumeur rénale la plus fréquente chez
l’enfant (87 à 90 %), sans prédominance de sexe ; le pic de fréquence
se situe à 3 ans et demi, mais 15 % sont observés avant l’âge de 1 an
et des cas peuvent être observés au-delà de l’âge de 7 ans (2 %),
voire même chez l’adulte.
Le néphroblastome représente en France 6 à 8 % des cancers de
l’enfant et son incidence est estimée entre cinq et dix cas par million
d’enfants et par an.
Des anomalies sur le chromosome 11 ont pu être mises en évidence
dans un petit nombre de tumeurs de Wilms associées à des
syndromes polymalformatifs ; gène WT1 pour le syndrome Wilm’s
tumor-aniridia-genitourinary anomalies-mental retardation (WAGR)
et de Drash, gène WT2 pour le syndrome de Beckwith-Wiedemann
et l’hémihypertrophie corporelle (ces syndromes sont décrits infra).
1- Anatomie
:
Il s’agit d’une tumeur rénale maligne embryonnaire à trois
composantes : blastémateuse, épithéliale et mésenchymateuse.
Sa
malignité est variable en fonction du type histologique ; celui-ci n’est
en général évalué que secondairement, lors de la néphrectomie,
après une chimiothérapie préopératoire.
Les principaux types sont
essentiels à prendre en compte ; ils conditionnent le pronostic et
donc le traitement postopératoire.
La tumeur entièrement nécrosée
par la chimiothérapie a un bon pronostic alors que l’existence d’un
important contingent blastémateux résiduel ou a fortiori anaplasique
est de nettement moins bon pronostic.
Le développement de la tumeur de Wilms est très rapide et au
moment de sa découverte, elle est le plus souvent volumineuse
(diamètre de 8 à 10 cm) et bien limitée.
Elle est solide et peut
présenter des zones de nécrose et d’hémorragie d’allure pseudokystique ou des contingents réellement kystiques.
Des
calcifications sont découvertes dans 15 % des spécimens
anatomiques.
Le néphroblastome franchit souvent la capsule rénale, mais reste
bien limité dans la plupart des cas par une pseudocapsule.
Il refoule
les structures de voisinage, en particulier les structures artérielles
sans les englober.
Il peut envahir la veine rénale, gagner la veine
cave inférieure et réaliser ainsi un thrombus néoplasique qui peut
s’étendre jusqu’aux cavités cardiaques droites.
Une atteinte
ganglionnaire locorégionale est possible.
Les métastases à distance
sont essentiellement pulmonaires (85 % de l’ensemble des
métastases), beaucoup plus rarement hépatiques.
L’atteinte rénale bilatérale existe dans 5 à 13 % des cas (de façon
synchrone pour les deux tiers), posant des problèmes nosologiques
avec la néphroblastomatose.
En fonction de l’extension, la classification comporte cinq stades.
Cette classification est établie sur le plan local lors de l’intervention
chirurgicale, après chimiothérapie, et sur le plan général, au moment
du bilan initial.
Il a été rapporté des formes survenant sur des sites extrarénaux
rétropéritonéaux, médiastinaux, pelviens ou inguinaux, développées
probablement à partir d’éléments mésonéphrotiques résiduels.
2- Clinique
:
Habituellement, il s’agit d’une masse abdominale non
symptomatique à croissance très rapide.
Plus rarement, la masse est
découverte à l’occasion de douleurs abdominales, d’une fièvre,
d’une hématurie (dans les suites d’un traumatisme minime plutôt
que spontané) ou d’une hypertension artérielle (sécrétion tumorale
de rénine).
La plupart des cas sont sporadiques ; un caractère familial n’est
retenu que dans moins de 1 % des cas sans anomalie du
chromosome 11 identifiée.
En revanche, il existe des anomalies
associées dans 15 % des cas, avec anomalies fréquentes du
chromosome 11 :
– aniridie sporadique, tumeur de Wilms, bilatérale dans un tiers des
cas ;
– syndrome de Drash ou de Denys-Drash, caractérisé par un
pseudohermaphrodisme masculin, une dysgénésie gonadique, une
pathologie glomérulaire progressive à type de sclérose mésangiale
aboutissant à une insuffisance rénale ;
– syndrome WAGR qui associe une aniridie, des anomalies génitourinaires
et un retard mental ;
– syndrome de Beckwith-Wiedemann caractérisé par un gigantisme
avec viscéromégalie et macroglossie, associé à des anomalies de la
paroi abdominale (omphalocèle, hernie ombilicale ou diastasis des
grands droits), fréquence de la tumeur de Wilms accrue, surtout en
cas de gigantisme asymétrique ;
– hémihypertrophie corporelle ;
– syndrome de Sotos ou gigantisme cérébral, associant un excès de
croissance avec disproportion au niveau des extrémités et retard
mental ;
– syndrome de Perlman associant une viscéromégalie, un
gigantisme, une cryptorchidie, une dysmorphie, une dysplasie
rénale et parfois un retard mental ;
– rein en « fer à cheval » et ectopies croisées.
En cas d’anomalies associées, l’âge de survenue est plus précoce.
Une surveillance systématique et régulière tous les 3 mois jusqu’à
l’âge de 6 ans est recommandée ; il ne faut pas cependant sousévaluer
les répercussions psychologiques significatives sur les
parents.
* Imagerie :
L’exploration, par l’imagerie, d’une masse abdominale de l’enfant
doit toujours débuter par une échographie ; l’apport du cliché
simple de l’abdomen est minime, celui-ci n’est en pratique plus
réalisé.
* Échographie
:
Elle met en évidence une masse qui, dans la plupart des cas, est
volumineuse, de diamètre supérieur à 8 cm, bien limitée.
La
structure est en général échogène, plus ou moins hétérogène avec
assez fréquemment des plages transsonores, correspondant aux
zones nécrotiques ou kystiques.
La masse peut apparaître
parfois à dominante kystique, encapsulée avec des cloisons
d’épaisseur variable.
Cette tumeur présente, en doppler, une
vascularisation variable, sans caractéristique.
Le pédicule artériel
rénal est en général refoulé par la tumeur.
L’origine de cette tumeur est le rein, le parenchyme rénal sain étant
refoulé à la périphérie, moulé sur la masse.
Le rein peut être
invisible, la masse étant trop volumineuse.
Parfois, au contraire, le
rein paraît normal et la tumeur semble posée sur sa corticale en cas de néphroblastome à développement exorénal.
Il faut
montrer dans ces cas la continuité entre la tumeur et le parenchyme
rénal.
Il existe d’autres formes moins caractéristiques : tumeurs de
petite taille ou tumeur à développement intrarénal prédominant.
L’évaluation du volume de la tumeur est essentielle pour le
traitement et le pronostic ; il faut donc mesurer, suivant les trois plus
grands diamètres, la masse principale et en cas de localisations
multiples, chaque nodule séparément.
La découverte échographique de cette masse rénale doit conduire à
réaliser un bilan d’extension locorégionale :
– recherche d’une extension dans la veine rénale et la veine cave
inférieure, parfois prolapsus dans les cavités excrétrices ;
– recherche d’anomalies sur le rein controlatéral : nodules tumoraux
ou anomalies corticales ;
– recherche d’adénomégalies rétropéritonéales ;
– recherche de métastases hépatiques.
* Radiographie du thorax face et profil
:
Elle doit être systématique lors du bilan initial, à la recherche de
métastases pulmonaires qui existent dans 10 % des cas.
Le
volume tumoral sous-diaphragmatique ne favorise pas la réalisation
d’un cliché en parfaite inspiration, ce qui rend son analyse difficile.
* Tomodensitométrie
:
Un examen TDM est essentiel pour l’évaluation initiale.
Il doit être
réalisé en concertation avec l’équipe d’oncologie pédiatrique qui doit
prendre en charge l’enfant car il va servir de base à la surveillance
du volume tumoral (reproductibilité des mesures), et son
analyse doit prendre en compte les éléments requis dans le protocole
thérapeutique dans lequel va être inclus l’enfant.
Aspect de la masse. Sur les coupes sans injection intraveineuse de
produit de contraste, la masse apparaît solide et hétérogène ; des
calcifications et des îlots graisseux intratumoraux sont parfois
visibles.
Cette hétérogénéité se renforce par le rehaussement après
injection intraveineuse de produit de contraste.
L’existence d’un
épanchement sanguin intracapsulaire ou périrénal est facilement
reconnue.
Parfois, la tumeur peut apparaître majoritairement
kystique et cloisonnée, toujours très bien limitée.
La TDM permet, avec plus de précision que l’échographie, de
répondre à certaines questions : extension vers les voies excrétrices
, atteinte ganglionnaire, franchissement capsulaire avec
envahissement de la graisse périrénale, et surtout atteinte
du rein controlatéral.
La TDM permet également une
évaluation volumétrique plus reproductible qu’en échographie.
Enfin, la TDM doit permettre actuellement d’établir une
cartographie vasculaire suffisante en bilan préopératoire, à la
demande du chirurgien.
Métastases pulmonaires. L’étude pulmonaire à la recherche de
métastases est essentielle, la TDM permettant de mettre en évidence
des nodules invisibles sur la radiographie simple.
Ces
nodules peuvent parfois s’excaver.
Actuellement, dans les
protocoles thérapeutiques, la mise en évidence par TDM de
métastases pulmonaires non visibles sur le cliché thoracique simple
lors du bilan initial ne sont prises en compte que dans les stades 1 ;
dans les autres stades, elles ne modifient pas les protocoles
thérapeutiques.
* Imagerie par résonance magnétique
:
En pondération T1, la masse présente un signal plus faible que le
parenchyme rénal, avec perte de la visibilité des pyramides ; en
pondération T2, le signal de la tumeur devient intense, plus difficile
à dissocier du parenchyme sain .
L’hétérogénéité de la masse
apparaît bien également en IRM.
Cette technique permet également de répondre aux objectifs du bilan
abdominal et en particulier de l’atteinte de la veine cave, mais ne
permet pas l’évaluation pulmonaire ; aussi, nous lui préférons
encore la TDM qui permet de réaliser un bilan complet d’extension
dans le même temps.
* Angiographie
:
L’angiographie rénale est encore régulièrement citée dans les
protocoles en précisant que ses indications concernent les tumeurs
de Wilms sur rein en « fer à cheval », les tumeurs de Wilms
bilatérales ou sur rein unique, et chaque fois que le chirurgien en a
la nécessité en préopératoire.
En pratique, cet examen a disparu dans
la plupart des équipes.
Une enquête rapide par mail auprès des radiopédiatres de la Société francophone de radiopédiatrie (SFIP),
réalisée à l’occasion de la rédaction de cette mise au point, confirme
cette donnée.
* Surveillance par imagerie
:
En France, les protocoles utilisés débutent par une chimiothérapie
pendant environ 4 semaines (variations suivant protocole).
L’effet de
cette chimiothérapie est contrôlé par des échographies
hebdomadaires.
En dehors des formes kystiques ou nécrotiques, la
réduction de volume est en général rapide ; elle s’accompagne de
modifications de l’échostructure.
La néphrectomie est effectuée
ensuite.
La stadification définitive est faite à ce moment-là.
Une absence ou une faible régression du volume tumoral d’une
tumeur à prédominance tissulaire (non kystique ou non nécrotique)
est un élément défavorable en cas de tumeur de Wilms ou doit faire
reconsidérer le diagnostic si d’autres éléments discordants existent,
et conduire éventuellement à une ponction à l’aiguille de la tumeur.
C - NÉPHROBLASTOMATOSE
:
1- Données anatomocliniques
:
La néphroblastomatose représente un groupe de lésions caractérisé
par la persistance d’îlots corticaux de blastème rénal, de façon
diffuse ou multifocale.
La néphronogenèse est habituellement
terminée à la 34e semaine de gestation mais des îlots périphériques
de blastème peuvent persister chez le petit nourrisson (1 % des
autopsies d’enfants de moins de 3 mois).
Il s’agit d’un état
intermédiaire entre dysplasie et tumeur mais la néphroblastomatose
doit être considérée comme un précurseur de la tumeur de Wilms.
Des foyers de néphroblastomatose sont retrouvés dans 30 à 40 % des
reins porteurs d’une tumeur de Wilms et surtout dans 99 % des
formes bilatérales de Wilms.
Les vestiges néphrogéniques peuvent être périlobaires (corticale et
colonne de Bertin) ; cette forme est associée plus fréquemment au
syndrome de Beckwith-Wiedemann, à l’hémihypertrophie
corporelle et au syndrome de Perlman.
Les vestiges néphrogéniques
peuvent être intralobaires ; cette forme est associée à 78 % des
syndrome de Drash, et à près de 100 % des aniridies sporadiques ;
elle peut se rencontrer dans le syndrome WAGR.
La symptomatologie est variable selon l’étendue des lésions.
La néphroblastomatose diffuse réalise habituellement une
néphromégalie bilatérale découverte in utero ou avant l’âge de
4 mois.
La forme multifocale se traduit par des reins bosselés.
Ailleurs, c’est dans le bilan d’une tumeur rénale que l’existence de
foyers de néphroblastomatose peut être découverte ou bien dans le
bilan d’un syndrome prédisposant.
* Imagerie :
La présentation en imagerie n’est pas univoque.
Les formes diffuses
se traduisent, en échographie, par deux gros reins dont l’architecture
est désorganisée par la présence de nodules plutôt hypoéchogènes.
En TDM, les lésions apparaissent de type solide hypodense, ne se
rehaussant que très faiblement par le produit de contraste.
La
localisation sous-capsulaire est très évocatrice du diagnostic ; elle
peut réaliser une espèce de croûte sous-corticale de plusieurs
millimètres d’épaisseur, entourant le parenchyme rénal normal.
En IRM, il s’agit de lésions en hyposignal en T1 et en
T2.
Les formes multifocales ne peuvent être distinguées d’une
authentique tumeur de Wilms bilatérale.
D - AUTRES TUMEURS RÉNALES
:
D’autres masses et/ou tumeurs du rein sont possibles.
Leur
diagnostic n’est pas facile car il n’y a pas beaucoup d’éléments
spécifiques permettant de les différencier du néphroblastome ou
tumeur de Wilms.
Ce
diagnostic différentiel repose sur un faisceau d’arguments à la
fois cliniques et radiologiques.
1- Néphrome mésoblastique congénital
:
Encore appelé tumeur de Bolande ou hamartome rénal foetal, le
néphrome mésoblastique est la tumeur rénale solide la plus
fréquemment rencontrée avant l’âge de 3 mois.
Il existe une petite
prédominance masculine.
Son diagnostic échographique est possible
en période anténatale où l’association à un hydramnios est
rapportée.
Il s’agit d’une lésion solide, volumineuse, non encapsulée,
intéressant une part importante du rein, sans limite nette avec le
parenchyme fonctionnel restant.
Elle envahit fréquemment le sinus
du rein et la graisse périrénale.
Le néphrome est constitué d’une
prolifération de cellules mésenchymateuses fusiformes.
Des zones
hémorragiques, nécrotiques ou kystiques sont rarement rencontrées.
Les moyens d’imagerie ne permettent pas de distinguer cette tumeur
d’une tumeur de Wilms en dehors d’un élément particulier : des
éléments glomérulaires et tubulaires inclus dans la tumeur peuvent
entraîner une excrétion intratumorale de produit de contraste.
Le pronostic du néphrome
mésoblastique congénital après néphrectomie est bon, mais il
faut connaître la possibilité de récidive locale en cas de
résection incomplète ou d’exceptionnelles métastases
pulmonaires, cérébrales ou osseuses.
2- Cystadénome multiloculaire
:
Le cystadénome multiloculaire englobe un groupe de tumeurs allant
du néphrome kystique, constitué de kystes bordés par des septa
fibreux contenant des tubules matures, au néphroblastome kystique
dans lequel les septa contiennent des îlots blastémateux.
Le néphrome kystique est une tumeur rénale rare.
Son pic de
fréquence se situe avant l’âge de 5 ans ; il existe une prédominance
masculine.
La tumeur est caractérisée par de multiples kystes non
communicants et une capsule épaisse.
En échographie, la masse apparaît bien limitée, enchâssée dans le
parenchyme rénal sain qu’elle refoule.
Elle est constituée de kystes
multiples, de taille variable, séparés par des cloisons fines, sans tissu
charnu visible.
Les autres examens d’imagerie n’apportent pas
d’éléments supplémentaires au diagnostic.
Il n’est pas possible, par l’imagerie, de différencier une tumeur de Wilms kystique d’un néphrome kystique.
Le traitement repose sur la néphrectomie, éventuellement suivie de
chimiothérapie si des éléments malins sont mis en évidence à
l’examen anatomopathologique.
3- Tumeur rhabdoïde
:
La tumeur rhabdoïde est une lésion rare, excessivement agressive,
de très mauvais pronostic, touchant préférentiellement le nourrisson ; l’âge moyen est de 11 mois.
Les âges extrêmes
vont cependant de la naissance à plus de 9 ans.
La tumeur infiltre
le parenchyme rénal plus qu’elle ne le refoule.
Le point de départ centrorénal est habituel.
Le diagnostic en est
histologique.
Son appellation vient de la similitude des cellules
tumorales avec les myoblastes du muscle squelettique.
L’hématurie est fréquente, mais une métastase peut être le signe
d’appel.
Il n’y a pas de sémiologie radiologique spécifique
pouvant la différencier d’une tumeur de Wilms.
L’association
possible à une tumeur neurogliale de la fosse postérieure suggère
une origine neuroectodermique.
4- Sarcome à cellules claires
:
Le sarcome à cellules claires est une lésion agressive s’accompagnant
de métastases osseuses dans plus de la moitié des cas. L’âge de
survenue est le même que celui de la tumeur de Wilms et elle est
pour certains considérée comme une forme particulière de tumeur
de Wilms.
Comme dans le cas de la tumeur rhabdoïde, le caractère
infiltrant du sarcome est prédominant, mais aucun élément
d’imagerie ne le différencie formellement d’une tumeur de Wilms.
Il existe des formes kystiques ; le diagnostic avec le cystadénome multiloculaire et la tumeur de Wilms kystique est impossible.
Enfin, rappelons la possibilité de formes frontières entre
le néphrome mésoblastique congénital et le sarcome à cellules
claires.
La survie globale est d’environ 60 % après chirurgie et
chimiothérapie.
5- Adénocarcinome ou tumeur de Grawitz
:
L’adénocarcinome du rein est rarement rencontré en pratique
pédiatrique (moins de 2 % des adénocarcinomes du rein surviennent
à l’âge pédiatrique).
Dans cette période, l’âge moyen est de 10 ans,
beaucoup plus élevé que celui de la tumeur de Wilms.
L’hématurie
est souvent un mode de découverte.
Au moment du diagnostic, la
tumeur est rarement volumineuse.
À l’échographie, elle se présente
comme une masse intrarénale, solide, mal limitée, envahissant le
parenchyme.
Des calcifications sont beaucoup plus fréquentes que
dans la tumeur de Wilms (25 % des cas).
L’extension se fait vers les
ganglions lymphatiques rétropéritonéaux et la veine cave inférieure ;
les métastases pulmonaires ou hépatiques se rencontrent dans 20 %
des cas.
La bilatéralité est fréquente.
En cas d’association au
syndrome de von Hippel-Lindau, les localisations multiples sont
classiques.
La survie est d’environ 65 % après chirurgie large
d’exérèse et chimiothérapie.
6- Carcinome médullaire rénal
:
Il s’agit d’une tumeur agressive décrite récemment chez les
adolescents drépanocytaires hétérozygotes.
Elle survient après
l’âge de 10 ans.
Elle n’a pas de spécificité en imagerie mais elle est
plutôt centrorénale avec envahissement rapide des éléments du
sinus du rein.
Le diagnostic repose sur le contexte hématologique
particulier ; le pronostic est mauvais.
7- Adénome métanéphrique
:
Il s’agit d’une tumeur bénigne pouvant survenir à tout âge.
Les cas les plus jeunes ont été rapportés à partir de l’âge de 15 mois.
Les signes d’appel sont variables, douleur, syndrome de masse,
découverte d’un hématome à l’occasion d’un traumatisme minime.
Il existe une prédominance féminine.
C’est une masse bien limitée, d’échostructure variable, pouvant
parfois être partiellement kystique.
En TDM, le rehaussement après
contraste est inférieur à celui du parenchyme normal.
Évoquer le diagnostic est important car une néphrectomie partielle
est suffisante.
8- Tumeur rénale ossifiante de l’enfant
:
Il s’agit d’une tumeur très rare (11 cas décrits), bénigne, rapportée
chez des enfants âgés de 6 jours à 14 mois et découverte à l’occasion
d’une hématurie.
L’origine de la masse se situe au sommet des
pyramides ; la masse est de type pédiculé et s’étend dans la tige calicielle vers le bassinet. Une origine urothéliale est discutée.
La
masse est caractérisée, sur le plan anatomique, par un centre ossifié,
des ostéoblastes et des cellules en fuseau.
En imagerie, il s’agit d’une masse bien limitée, calcifiée en son
centre, de 2 à 3 cm de diamètre, pouvant entraîner une obstruction
localisée du système collecteur.
Le risque est de la confondre avec
un calcul enclavé, voire une pyélonéphrite xanthogranulomateuse.
9- Angiomyolipome
:
La lésion présente divers composants en quantité variable : graisse,
vaisseaux, muscles lisses. Dans la plupart des cas, les lésions sont
multiples, bilatérales et de petite taille ; très rarement, il s’agit d’une
lésion unique et de grande taille.
Les angiomyolipomes se
rencontrent chez plus de 50 % des enfants porteurs d’une sclérose
tubéreuse de Bourneville (STB), et donc, tout enfant porteur d’un
angiomyolipome est très suspect de STB.
Il existe cependant souvent
des cas sporadiques.
Chaque lésion a un aspect échographique évocateur ; l’échostructure
est fine et homogène, supérieure à celle du parenchyme rénal, ou
parfois, hétérogène avec des zones d’échogénicité très élevée
correspondant aux amas graisseux.
Les aspects TDM varient selon
les composants tumoraux.
Habituellement, le contingent graisseux
suffit à faire le diagnostic.
Des calcifications intratumorales sont
parfois rencontrées.
Des hémorragies intratumorales peuvent
survenir dans les tumeurs les plus grosses (diamètre supérieur à
4 cm), expliquant des augmentations brutales de volume et une
modification de la structure en échographie ou en TDM.
L’association à de petites lésions kystiques complète les
manifestations rénales de la STB.
10- Lymphome
:
Rare avant l’âge de 6 ans, l’atteinte rénale du lymphome peut se
présenter sous différentes formes : multiples nodules intraparenchymateux, infiltration bilatérale diffuse
responsable d’une néphromégalie et, plus rarement, nodule solitaire
ou envahissement par contiguïté par une masse lymphomateuse
rétropéritonéale. Dans les formes uni- ou multinodulaires, la lésion
élémentaire est plutôt homogène et faiblement échogène.
En TDM,
le rehaussement des nodules après injection intraveineuse de
produit de contraste est faible.
Des adénopathies rétropéritonéales,
une atteinte hépatique et/ou splénique, voire médiastinale sont
fréquemment associées.
En cas d’atteinte nodulaire unique, l’âge et l’aspect en imagerie
doivent éveiller le doute et faire recourir à une ponction diagnostique, le traitement reposant essentiellement sur la
chimiothérapie et non la chirurgie.
11- Métastase et envahissement rénal par contiguïté
:
L’atteinte secondaire du rein de l’enfant par un processus malin non
hématologique peut se faire par contiguïté ou par voie hématogène.
Dans le premier cas, il s’agit essentiellement de l’envahissement par
un neuroblastome surrénalien ou médian.
Dans ce cas,
l’englobement éventuel du pédicule artériel rénal dans la tumeur
est un élément en faveur de l’origine extrarénale alors que dans les
tumeurs d’origine rénale, celui-ci est refoulé.
Le second cas, beaucoup plus exceptionnel, est le fait de sarcomes
indifférenciés de topographie variable ; l’atteinte secondaire rénale
est alors rarement isolée.
12- Fausses tumeurs et pseudomasses
:
Parfois, des images peuvent induire en erreur en échographie :
hypertrophie d’une colonne de Bertin, nodule de régénération…
Le
contexte clinique et éventuellement un examen TDM permettent de
corriger le diagnostic.
Dans un contexte infectieux, il n’est pas toujours facile de
reconnaître en échographie un abcès en cours de constitution.
Tumeurs de la voie excrétrice
:
Plusieurs lésions sont rapportées chez l’enfant, toutes très rares.
Dans le chapitre des tumeurs rénales, nous avons déjà décrit la
tumeur ossifiante rénale de l’enfant dont l’origine urothéliale est
possible, ce qui en ferait anatomiquement une tumeur des voies
excrétrices.
Il existe par ailleurs des tumeurs ou pseudotumeurs
possibles à trois niveaux : uretères, vessie et urètre chez le garçon.
A - TUMEURS OU PSEUDOTUMEURS URÉTÉRALES
:
Elles sont représentées essentiellement par le polype fibroépithélial.
Il s’agit d’une lésion bénigne et très rare qui peut se situer à tous les
niveaux de l’arbre urinaire : bassinet, jonction pyélo-urétérale,
uretère, vessie et urètre.
Des cas ont été rapportés à tous les âges
dès la période néonatale.
Les signes d’appels sont variés : hématurie,
douleurs abdominales par obstruction intermittente urinaire sont les
situations les plus fréquentes.
La localisation la plus fréquente est la jonction pyélo-urétérale et le
tableau est celui d’une distension intermittente.
Mais cette lésion
peut se rencontrer également à tout niveau de l’uretère.
En
urographie intraveineuse, le polype peut apparaître sous forme
d’une lacune intraluminale ; le diagnostic, dans tous les cas, est fait
lors de l’intervention.
B - TUMEURS ET PSEUDOTUMEURS DE VESSIE
:
La découverte d’une lésion développée aux dépens de la paroi
vésicale est une situation très rare en pédiatrie.
Le signe d’appel
essentiel est l’hématurie.
Les possibilités diagnostiques sont très
variées, bénignes ou malignes. Deux types de lésions
doivent toujours être évoqués : la cystite pseudotumorale et le
rhabdomyosarcome du sinus urogénital.
La cystite pseudotumorale peut prendre un aspect très exubérant,
mais les différentes techniques d’imagerie, échographie ou IRM,
montrent que la lésion est développée à partir de la paroi sur son
versant endovésical sans aucun envahissement en profondeur.
Le rhabdomyosarcome se révèle par une hématurie ou une dysurie ;
l’échographie et l’IRM montrent une masse polycyclique développée
dans la vessie mais avec une extension extravésicale vers le sinus
urogénital dans la majorité des cas.
Les autres lésions sont encore plus rares.
Le diagnostic est en
règle fait par la biopsie, sur des signes d’appels non spécifiques :
hématurie, dysurie…
C - POLYPE URÉTRAL
:
Il s’agit d’une anomalie rare, se manifestant par des blocages
mictionnels intermittents, une hématurie ou d’autres symptômes
urinaires.
Le polype, de nature hamartomateuse, présente un long
pédicule qui est implanté dans la région du veru montanum, sur la
paroi postérieure de l’urètre prostatique.
Le polype est très mobile :
lors de la cystographie, il apparaît sous forme d’une image lacunaire
qui peut se situer en regard du col vésical ou dans l’urètre postérieur
et se déplacer vers le bas au cours de la miction.