La tuberculose abdominale reste un problème d’actualité en raison,
d’une part, de sa fréquence encore élevée dans les pays en voie de
développement et d’autre part, de sa recrudescence dans les pays
industrialisés, en partie liée à l’avènement et à l’extension du
syndrome de l’immunodéficience acquise (sida).
Cette réémergence de la tuberculose a entraîné un regain d’intérêt pour
cette pathologie qui se caractérise par son polymorphisme clinique
et radiologique et par les difficultés diagnostiques, notamment chez
les sujets atteints de sida.
La reconnaissance des lésions tuberculeuses est primordiale pour
éviter le recours à la chirurgie, car la plupart des atteintes peuvent
régresser sous traitement médical.
Les examens d’imagerie en coupe permettent parfois d’évoquer le
diagnostic, parfois de le confirmer grâce à la ponction guidée à
l’aiguille fine des lésions les plus accessibles.
Ils permettent
également d’établir un bilan lésionnel précis et d’apprécier
l’évolution de la maladie sous thérapie antituberculeuse.
La tomodensitométrie (TDM) constitue l’examen de choix pour
l’étude de la cavité abdominopelvienne : organes pleins, mésentère,
cavité péritonéale.
Ses progrès technologiques ont également modifié
l’approche radiologique du tube digestif mais n’ont pas supplanté
les examens conventionnels avec opacification digestive qui gardent
encore leurs indications pour l’établissement du diagnostic.
Au stade actuel, les avantages de l’imagerie par résonance
magnétique (IRM) nucléaire semblent encore limités par rapport à
la TDM.
Généralités. Physiopathologie
:
La tuberculose abdominale occupe la troisième place parmi les
localisations extrapulmonaires.
Elle peut être primitive,
correspondant à une forme de primo-infection, ou secondaire à une
autre localisation, notamment pulmonaire.
La coexistence d’une tuberculose pulmonaire et abdominale varie
de 5 à 38%.
Ce pourcentage dépend en fait du siège de l’atteinte
tuberculeuse abdominale.
Ainsi, il est de 5 à 8% pour l’atteinte
intestinale, de 25 à 30 % pour l’atteinte hépatique, et de 13 à 24 %
pour l’atteinte péritonéale.
Au cours des miliaires pulmonaires, l’atteinte hépatosplénique est
presque toujours associée.
Le maximum de fréquence de la tuberculose abdominale est
rapporté dans les pays d’Amérique latine, du Moyen-Orient,
d’Extrême-Orient et d’Afrique.
Certains facteurs favorisent le
développement de cette affection tels que l’alcoolisme, la
toxicomanie, le diabète, la corticothérapie et le sida.
Ce dernier est
révélé par une tuberculose dans environ 15 % des cas.
Il s’agit le
plus souvent d’une tuberculose extrapulmonaire touchant plusieurs
organes avec des localisations souvent inhabituelles.
Elle est d’autant
plus sévère qu’elle répond moins aux antibiothérapies spécifiques.
La tuberculose abdominale s’observe chez l’homme comme chez la
femme, chez le vieillard comme chez l’adulte jeune, mais avec
cependant une prédominance entre la troisième et la quatrième
décade.
Les voies de cheminement des bacilles sont :
– hématogène : c’est le mode de contamination le plus fréquent ; cette
voie explique la dissémination des foyers tuberculeux au niveau
péritonéal, ganglionnaire, digestif, hépatique et splénique ;
– lymphatique : l’atteinte s’effectue à partir de ganglions
mésentériques ou trachéobronchiques ;
– endogène : l’atteinte abdominale est secondaire à la déglutition de
bacilles de Koch (BK) provenant de lésions tuberculeuses des voies
aériennes supérieures ;
– exogène : la contamination abdominale s’effectue par l’absorption
de produits laitiers souillés ; ceci est fréquent dans les régions où le
lait n’est pas pasteurisé ;
– atteinte par contiguïté : elle est surtout prédominante dans
l’atteinte péritonéale à partir des ganglions ou à partir des organes
génitaux féminins.
Anatomopathologie
:
L’inflammation tuberculeuse correspond à l’ensemble des
modifications tissulaires en rapport avec la présence de Mycobacterium
tuberculosis dans l’organisme.
Bien que les lésions de la
tuberculose puissent être imitées par d’autres agents pathogènes
vivants ou chimiques, elles présentent des caractères
morphologiques qui permettent le plus souvent leur identification.
A - MACROSCOPIE
:
1- Tuberculose péritonéale
:
On décrit plusieurs formes.
– Les formes granuliques sont caractérisées par un semis de
granulations jaunâtres ou blanchâtres de 0,5 à 2 mm de diamètre, de
taille à peu près égale, uniformément réparties sur le péritoine ; ces
granulations peuvent siéger sur le foie, la rate, l’intestin grêle, le
diaphragme et les annexes ; elles s’accompagnent de phénomènes
inflammatoires péritonéaux, elles évoluent vers la sclérose et
peuvent se calcifier ; ces lésions peuvent devenir volumineuses,
réalisant parfois de véritables tuberculomes, voire un aspect
pseudotumoral.
– Les formes ascitiques : l’épanchement liquidien s’associe à une
éruption discrète de granulations miliaires.
– Les formes ulcérocaséeuses : elles sont caractérisées par la présence
de tubercules de taille variable pouvant confluer et former des
masses caséeuses ; celles-ci sont entourées de bandes fibreuses qui
limitent des logettes remplies d’un liquide séropurulent.
L’intestin
grêle est au centre de ces lésions caséeuses.
L’épiploon est toujours
atteint, de même que les ganglions mésentériques généralement
caséeux.
– Les formes fibroadhésives : la fibrose envahit les granulations ; ainsi
se forment des brides et des lames de fibrose qui étranglent
l’intestin.
2- Tuberculose intestinale
:
Quatre formes macroscopiques sont décrites.
– La forme ulcéreuse : il s’agit de pertes de substances uniques ou
multiples, perpendiculaires à l’axe de l’intestin et séparées par des
zones de muqueuse saine ; ce sont de petites ulcérations peu
profondes, pénétrant peu la musculeuse, à contours irréguliers et
déchiquetés en « carte géographique », à bords décollés, et dont le
fond présente un aspect purulent avec des grumeaux caséeux.
Ces
ulcérations correspondent à des lésions assez récentes et évolutives.
La confluence des petites ulcérations réalise un ulcère annulaire
typique de la tuberculose.
– La forme hypertrophique : elle traduit une inflammation chronique
observée électivement au niveau de la région cæcale et iléocæcale
où elle réalise un aspect pseudotumoral ; elle est secondaire à
l’hyperplasie scléreuse ou sclérolipomateuse.
– La forme ulcérohypertrophique : elle associe les deux formes décrites
précédemment et s’observe surtout dans la région iléocaecale.
– La forme sténosante : rencontrée surtout sur le grêle, les sténoses
sont en général annulaires et peu étendues.
Elles sont la conséquence
de la sclérose réactionnelle tuberculeuse.
3- Tuberculose gastroduodénale
:
On distingue trois formes :
– la forme ulcéreuse : l’ulcération tuberculeuse unique ou multiple
siège le plus souvent sur la petite courbure ;
– la forme hypertrophique : il s’agit d’une réaction hyperplasique
de la paroi gastroduodénale qui siège au niveau de la région
pylorique et qui s’accompagne d’une importante réaction
péritonéale et de volumineuses adénopathies ;
– la forme sténosante : caractérisée par une fibrose qui s’étend de
l’antre au duodénum, elle est responsable de la constitution de
fistules.
4- Tuberculose hépatique
:
Trois formes lésionnelles macroscopiques sont décrites au niveau du
foie.
– La forme macronodulaire : très rare, rencontrée le plus souvent chez
les patients immunodéprimés.
Elle est caractérisée par la présence
de tuberculomes qui résultent probablement de la coalescence de
multiples granulomes tuberculeux.
Ils sont réguliers, de taille
variable, généralement supérieure à 2 cm, entourés d’une épaisse
coque scléreuse parfois calcifiée, et truffant le parenchyme
hépatique.
– La forme micronodulaire ou miliaire : réunit la quasi-totalité des
cas de tuberculose hépatique.
Elle est soit primitive, soit secondaire
à une miliaire tuberculeuse avec insémination hématogène.
Elle est
caractérisée par la présence de multiples nodules gris-blanc
dispersés à la surface et dans la profondeur du foie.
Leur taille est
celle d’une tête d’épingle, les plus gros atteignant la taille d’un grain
de millet, soit environ 2 mm de diamètre.
Le foie garde le plus
souvent une taille et une morphologie normales.
– La tuberculose canaliculaire est exceptionnelle : il s’agit d’une
angiocholite suppurée où les lésions tuberculeuses se limitent aux
canalicules biliaires.
5- Tuberculose splénique
:
Macroscopiquement, la tuberculose splénique revêt plusieurs
formes :
– miliaire, réalisant un semis de granulations ;
– macronodulaire, qui correspond à une poche remplie de caséum
et entourée d’une coque ;
– fibrocaséeuse, où les tuberculomes confluent et forment des foyers
caséeux ;
– fibreuse, caractérisée par une rate fibreuse sans foyer caséeux ;
– nécroticohémorragique, qui constitue un véritable infarctus par
atteinte spécifique des artérioles.
B - MICROSCOPIE
:
Les lésions microscopiques sont de plusieurs types.
Au stade initial
de l’inflammation apparaissent des lésions exsudatives non
spécifiques, riches en lymphocytes et en cellules histiocytaires macrophagiques.
Cette phase est très fugace et ne s’observe que
dans certaines tuberculoses très graves à évolution rapide.
À un stade plus avancé se surajoute une nécrose caséeuse
particulière à la tuberculose, qui résulte d’une part du caractère avasculaire du nodule inflammatoire, et d’autre part des réactions
complexes entre le germe et les tissus.
Cette nécrose peut être
minime et passer inaperçue lors de l’étude histologique.
La réaction de défense tissulaire contre ces atteintes destructives se
manifeste par l’apparition de lésions folliculaires autour du caséum,
formées par des cellules épithélioïdes, géantes et lymphocytaires.
Quand tous les éléments d’une telle lésion caséofolliculaire sont
réunis, leur nature tuberculeuse est pratiquement certaine.
Mais
selon l’incidence des coupes, un tel follicule peut avoir un aspect
moins spécifique, gigantoépithélioïde, épithélioïde ou
lymphocytaire, prêtant dans ce cas à confusion avec d’autres
affections, telles que la sarcoïdose et la brucellose.
La résorption d’une inflammation tuberculeuse est possible
spontanément, mais elle est surtout le fait de l’antibiothérapie.
Les lésions non caséifiées évoluent vers la fibrose, et les lésions
caséifiées s’entourent d’une coque fibreuse.
Le caséum dans ce cas
ne peut se résorber, mais il se modifie avec assèchement, calcification
ou ramollissement.
Les conséquences du ramollissement sont liées à la possibilité
d’évacuation de cette nécrose : des ulcérations se forment au niveau
des revêtements entre autres digestifs, des abcès froids au sein des
tissus pleins (rate, foie), et des cavernes au sein des parenchymes
pourvus de voies de drainage.
Comme tous les foyers inflammatoires, les lésions tuberculeuses ne
sont pas disposées au hasard au sein des viscères.
Leur
configuration, leur taille et leur volume sont conditionnés par l’entité
anatomique où elles se développent et à partir de laquelle elles
s’accroissent avec une certaine systématisation.
L’importance et
l’étendue des lésions ne dépendent pas de la quantité et de la
virulence des bacilles, mais du terrain, de la réactivité de l’individu
et des organes, et de la présence de conditions générales ou
locorégionales favorisantes.
Clinique
:
Les manifestations cliniques de la tuberculose abdominale sont
protéiformes réalisant souvent des tableaux trompeurs,
particulièrement parmi les sidéens chez qui la possibilité d’infection
par plusieurs germes rend la clinique encore déroutante.
Le début est généralement lent et progressif fait d’un syndrome
fébrile quasi constant.
La fièvre est habituellement modérée et
prolongée, revêtant divers aspects, notamment pseudopalustres et
pseudotyphiques.
L’altération de l’état général est plus ou moins importante, marquée
par l’amaigrissement, l’anorexie et l’asthénie.
Ces manifestations générales s’accompagnent de signes inhérents à
chaque localisation.
Ainsi, l’atteinte intestinale est marquée par des douleurs
abdominales d’intensité variable allant de la simple pesanteur
jusqu’à la douleur vive diffuse à l’ensemble de l’abdomen ou
localisée, siégeant le plus souvent au niveau des fosses iliaques, dans
les régions périombilicales ou épigastrique.
Les troubles du transit sont fréquemment rencontrés.
Il s’agit le plus
souvent de diarrhée qui peut prendre un caractère dysentériforme
parfois mortel en cas de déficit immunitaire, notamment lorsque le
taux des lymphocytes CD4 est très bas.
Dans d’autres cas, la diarrhée
alterne avec des périodes de constipation plus ou moins prolongées.
L’examen peut révéler une sensibilité, un empâtement, voire une
masse abdominale.
La tuberculose intestinale peut se manifester d’emblée par une
complication telle qu’une occlusion, une perforation ou une
hémorragie.
Ces complications sont d’autant plus fréquentes que
l’état immunitaire est déficient.
L’atteinte péritonéale peut réaliser la triade fortement évocatrice :
douleurs abdominales, ascite et fièvre.
Dans environ 10 % des cas,
elle peut se révéler par un tableau aigu pseudochirurgical avec
début brutal, douleur vive et défense abdominale.
L’atteinte hépatosplénique peut être responsable d’une hépatosplénomégalie généralement indolore et d’importance
variable.
La tuberculose ganglionnaire, quant à elle, est souvent latente.
Dans
certains cas, elle peut se manifester par un syndrome de
compression des structures de voisinage tel que l’ictère obstructif
par compression du pédicule hépatique.
Biologie
:
À l’instar des signes cliniques, la biologie n’est pas spécifique.
Les
examens biologiques montrent souvent un syndrome inflammatoire
d’intensité variable.
Ce signe présente peu d’intérêt pour le
diagnostic mais garde une certaine importance pour la surveillance
des patients sous chimiothérapie antibacillaire.
La vitesse de sédimentation constitue un excellent test d’activité.
Elle
est constamment élevée et baisse rapidement dès le début du
traitement.
L’hémogramme révèle une anémie généralement modérée, une
hyperleucocytose avec lymphocytose, parfois une leucopénie.
En cas
d’atteinte hépatique, on peut noter un degré variable de cholestase.
L’activité sérique des phosphatases alcalines est souvent élevée,
entre 1,5 et 5 fois la normale, alors que celle des aminotransférases
est normale ou peu élevée. Un syndrome de malabsorption, bien
que rare, peut être noté.
Il peut être dû soit à une atteinte diffuse de
la paroi intestinale, soit à une atteinte lymphatique obstructive à
l’origine d’une entéropathie exsudative, soit à une pullulation
microbienne en amont de sténoses du grêle ou, dans les séquelles
de fistules, entre les différents segments intestinaux.
L’intradermoréaction à la tuberculine n’apporte pas d’arguments
formels au diagnostic.
Sa négativité ne permet pas d’exclure le
diagnostic, car dans les formes évoluées ou lorsque l’état général est
très altéré, il peut exister une anergie tuberculinique.
Quand elle est
positive, elle ne constitue pas forcément une preuve de la nature
tuberculeuse de l’affection abdominale.
L’étude du liquide d’ascite montre un exsudat Rivalta positif riche
en lymphocytes.
Certains soulignent l’intérêt de l’abaissement du glucose dans le
liquide d’ascite ainsi que l’élévation de l’adénosine désaminase pour
le diagnostic de tuberculose.
Bactériologie
:
Le diagnostic de tuberculose repose dans tous les cas sur la mise en
évidence du Mycobacterium tuberculosis.
Cette recherche est très
rarement positive à l’examen direct, car à la différence de la
tuberculose pulmonaire riche en bacilles, les lésions extrapulmonaires sont plutôt paucibacillaires.
L’isolement du BK est
d’autant plus difficile que les patients sont exempts d’immunodépression.
Le BK peut être recherché dans les selles, les crachats et le liquide
de tubage gastrique. La culture sur milieu de Löwenstein a une
meilleure sensibilité pour apporter la preuve bactériologique de la
tuberculose mais le résultat est tardif (3 à 4 semaines) en raison du
temps de division prolongé du M. tuberculosis.
Actuellement, les espoirs reposent sur l’emploi de nouvelles
méthodes de culture en milieu liquide radiomarqué selon le système
BACTEC qui permettent une obtention nettement plus rapide
des résultats (48 heures).
Imagerie
:
La tuberculose abdominale est caractérisée par la diversité de ses
atteintes.
Ainsi, elle peut être péritonéale, ganglionnaire, intestinale,
hépatosplénique et pancréatique.
L’imagerie médicale peut aller de la simple radiographie
pulmonaire, qui peut montrer une tuberculose pulmonaire évolutive
ou séquellaire, à l’abdomen sans préparation qui peut mettre en
évidence des calcifications ganglionnaires, hépatiques ou spléniques
, jusqu’à l’échographie, le scanner et l’IRM.
L’apport de ces trois examens est détaillé en fonction de chaque
localisation.
A - TUBERCULOSE PÉRITONÉALE
:
Elle compte parmi les localisations les plus fréquentes de la
tuberculose abdominale et inclut l’atteinte de la cavité péritonéale,
du mésentère et de l’épiploon.
1- Échographie
:
Les signes échographiques de la tuberculose péritonéale ne sont pas
spécifiques mais l’association de l’ascite, des adhérences, des granulations et de l’épaississement péritonéal est fortement
évocatrice de l’origine tuberculeuse.
* Ascite :
C’est le signe le plus habituel au cours de l’atteinte péritonéale.
Elle
est retrouvée dans 38 % des cas.
Elle est aisément détectée en
échographie, même quand elle est minime. Elle peut présenter un
aspect échogène lorsque sa teneur protéique est augmentée et peut
comporter des cloisons qui réalisent des bandes linéaires
hyperéchogènes et entrelacées.
Ces cloisons sont le témoin de la présence de fibrine et d’adhérences.
Elles ne sont pas spécifiques de la tuberculose et peuvent s’observer
au cours de la carcinose péritonéale, du pseudomyxome et du
mésothéliome péritonéal.
* Nodules péritonéaux
:
Ils sont l’équivalent des granulations observées à la laparoscopie.
Les granulations ne sont visibles à l’échographie que si elles sont
superficielles, de grande taille (supérieure à 1 cm) ou quand
elles sont entourées d’ascite.
L’utilisation de sondes de haute
fréquence et la présence d’une ascite abondante peuvent permettre
la visualisation de nodules infracentimétriques au contact du
péritoine pariétal.
Les granulations se présentent sous forme de nodules échogènes,
réguliers, à limites nettes, isolés ou groupés au contact du péritoine
viscéral et surtout péritonéal.
* Épaississement péritonéal
:
L’épaississement du péritoine se traduit par une bande transsonore
antérieure étendue ou localisée mesurant 10 à 20 mm d’épaisseur.
Cet aspect pourrait correspondre au péritoine inflammatoire décrit
au cours de la laparoscopie.
À côté de l’épaississement du péritoine, on peut noter celui du
mésentère.
L’étude échographique du mésentère est paradoxalement
plus facile chez les obèses.
L’épaisseur mésentérique normale varie
de 7 à 12mm, indépendamment de l’âge ou de la corpulence des
sujets.
Au cours de la tuberculose péritonéale, le mésentère
s’épaissit et dépasse 15 mm.
Cet épaississement est fréquemment
rencontré.
Il est lié à l’oedème, aux dépôts graisseux et aux
adénopathies.
Un autre signe est également observé : c’est l’accentuation de
l’échogénicité mésentérique expliquée probablement par
l’obstruction lymphatique.
La présence d’adénopathies confère parfois au mésentère un aspect multinodulaire.
L’épaississement mésentérique n’est pas spécifique de la tuberculose.
Il peut s’observer au cours d’autres affections telles que
l’hypertension portale et le lymphome.
Dans le premier cas, le
mésentère est épaissi par congestion et par dilatation veineuse.
Dans
le deuxième cas, c’est la présence d’adénopathies qui élargit le
mésentère dont l’échogénicité n’est pas modifiée.
L’épaississement mésentérique au cours de la tuberculose doit
également être différencié de celui dû à une carcinose péritonéale
ou à un pseudomyxome et à un mésothéliome péritonéal. De même,
la maladie de Crohn peut être responsable d’un épaississement
nodulaire du mésentère.
Le diagnostic différentiel est difficile à
établir sur les seules données de l’échographie.
* Anomalies digestives
:
L’échographie permet d’apprécier la mobilité des anses
généralement diminuée, voire absente, réalisant un aspect figé des
anses qui peuvent être agglutinées, accolées entre elles ou à la paroi
abdominale antérieure.
Dans certains cas, les anses agglutinées entourent le méso épais et
sont englobées et entourées par une coque hypoéchogène épaisse
atteignant le centimètre.
L’échographie permet également de mettre en évidence un
épaississement de la paroi digestive généralement modéré et qui
prédomine au niveau de la jonction iléocæcale.
L’épaississement pariétal associé à l’épanchement intrapéritonéal de
faible abondance réalise un aspect caractéristique en « tranches de
pain » (slice bread des Anglo-Saxons).
L’ascite, les adhérences, les granulations, l’épaississement péritonéal
et les anomalies digestives sont diversement associées, permettant
de décrire plusieurs formes :
– ascitique : caractérisée par une ascite libre ou cloisonnée, plus ou
moins abondante, un péritoine modérément épaissi et des
granulations péritonéales de petite taille ;
– fibroadhésive : se distinguant par la faible abondance de l’ascite,
par un épaississement péritonéal plus important, par la grande taille
des granulations et par l’agglutination et l’accolement des anses
entre elles et à la paroi abdominale antérieure ;
– fibrocaséeuse : elle se caractérise par l’importance de
l’épaississement péritonéal, la confluence des granulations dont la
taille dépasse celle de la forme fibroadhésive et par une ascite
minime ;
– encapsulante : elle se distingue par un mésentère très épaissi,
entouré d’anses agglutinées et accolées les unes aux autres,
englobées elles-mêmes par une coque épaisse.
L’ascite est
généralement de faible abondance ;
– pseudokystique : elle réalise un cloisonnement ascitique refoulant
les anses à sa périphérie.
2- Tomodensitométrie
:
Le scanner est considéré comme l’examen de choix pour l’étude de
la pathologie péritonéale.
Il est cependant peu spécifique.
Sa
sensibilité dans le diagnostic de présomption de la tuberculose
péritonéale voisine 70 %.
La technique d’examen doit être parfaite. Les coupes doivent être
réalisées depuis les coupoles diaphragmatiques jusqu’au niveau de
la symphyse pubienne.
L’opacification digestive est de règle.
L’injection de contraste veineux facilite l’identification des structures
vasculaires du mésentère et des anomalies péritonéales.
L’épaisseur des coupes varie de 8 à 10mm, complétées si nécessaire
par des coupes plus fines (5 mm) sur les zones d’intérêt.
Le diagnostic TDM de la tuberculose péritonéale repose sur un
faisceau d’arguments.
* Ascite
:
La TDM est très sensible pour mettre en évidence les petits
épanchements péritonéaux qui se localisent au niveau des zones
déclives (poche de Morison, cul-de-sac de Douglas).
L’ascite peut
être libre ou cloisonnée par un péritoine épaissi, parfois d’aspect
nodulaire, rehaussé après injection de produit de contraste ;
elle peut présenter parfois un aspect hyperdense si sa teneur
protéique est augmentée ou comporter des cloisons et des débris.
Cet aspect est caractéristique mais non spécifique.
L’ascite n’a aucun
caractère distinctif : en effet ni sa topographie ni sa densité n’ont de
valeur prédictive, d’où la recherche des autres signes associés.
L’atteinte mésentérique est d’importance variable, pouvant prendre
l’aspect d’une simple densification de la graisse mésentérique ou
d’une infiltration nodulaire.
Ces nodules sont la traduction des tubercules.
Ils peuvent siéger à la
surface du mésentère ou dans les ganglions. Ils peuvent être microou
macronodulaires.
Leur visualisation scanographique dépend de
leur taille, de la présence ou non d’ascite et de leur topographie.
Ils
apparaissent sous forme de lésions focales noyées dans la graisse
mésentérique, de taille variable, de densité tissulaire homogène ou
hétérogène, pouvant comporter une hypodensité centrale liée
à la nécrose caséeuse et parfois des calcifications.
La présence d’une atteinte mésentérique associant des macronodules
avec hypodensité centrale et des calcifications est très évocatrice de
tuberculose bien qu’elle puisse s’observer au cours d’autres pathologies telles que le lymphome de Burkitt, les lymphomes
traités, les métastases et la maladie de Whipple.
* Atteinte épiploïque
:
Leur détection est aisée en scanographie, surtout s’il existe une
ascite.
Elle traduit l’infiltration plus ou moins complète du tablier épiploïque situé entre la paroi abdominale antérieure, le côlon
transverse et les anses grêles.
L’aspect réalisé peut aller d’une simple
densification de la graisse jusqu’à l’épaississement nodulaire
conduisant dans les atteintes massives à de véritables « gâteaux épiploïques » où toute structure graisseuse a disparu,
entièrement remplacée par des éléments tissulaires.
Cet aspect n’est
pas spécifique de la tuberculose. Le diagnostic différentiel avec la carcinomatose péritonéale peut se révéler délicat.
Dans ce contexte,
l’analyse des contours externes de l’infiltration est importante.
Ainsi, des contours externes épais et irréguliers plaident
davantage en faveur d’une atteinte carcinomateuse.
En revanche, la
présence d’une ligne fine entourant la région infiltrée et lui conférant
un aspect bien limité est en faveur d’une atteinte tuberculeuse.
Cette
ligne correspond à une fibrose périlésionnelle témoin d’une
évolution lente et chronique.
3- IRM
:
Les anomalies péritonéales observées en IRM sont superposables à
celles mises en évidence en TDM : épaississement des feuillets
péritonéaux, du tablier épiploïque et infiltration nodulaire
ou stellaire du mésentère associé à l’ascite.
Les séquences qui semblent le mieux adaptées à l’étude du péritoine
sont les séquences rapides car elles diminuent les artefacts liés aux
mouvements respiratoires, au péristaltisme intestinal et aux
pulsations cardiaques.
Les séquences T1 avec saturation de graisse s’avèrent également
intéressantes car, en supprimant l’hypersignal de la graisse
mésentérique, elles facilitent la détectabilité des lésions.
L’injection
intraveineuse d’un agent de contraste paramagnétique améliore en
règle générale la sensibilité de l’IRM.
B - TUBERCULOSE GANGLIONNAIRE
:
Les localisations ganglionnaires sont parmi les plus fréquentes des
localisations abdominales, mais elles sont souvent latentes.
Elles sont
fréquemment associées à un autre foyer pleuropulmonaire,
péritonéal, digestif ou hépatosplénique.
Il est à noter que chez les
patients positifs au virus de l’immunodéficience humaine (VIH), la
coexistence d’une atteinte ganglionnaire et d’une atteinte splénique
est observée dans environ 70 % des cas.
Les formes ganglionnaires pures sont rares et soulèvent des
problèmes de diagnostic différentiel.
1- Échographie
:
Les adénopathies intéressent préférentiellement les ganglions
viscéraux : mésentériques, péripancréatiques, épiploïques et
pédiculaires hépatiques.
Cette distribution est en rapport avec le
drainage lymphatique à partir du foie ou du grêle.
Les ganglions rétropéritonéaux sont relativement épargnés au moins
au début de l’affection.
En fait, au cours de la tuberculose avancée,
toutes les chaînes peuvent être intéressées.
L’aspect échographique des adénopathies est variable.
Il peut être hypoéchogène, échogène homogène, mixte ou calcifié.
Seuls les deux
derniers aspects sont évocateurs de la tuberculose.
Les adénopathies sont généralement multiples, de taille variable,
pouvant être groupées en amas confluants, réalisant parfois une
masse polycyclique.
2- Tomodensitométrie
:
Le diagnostic TDM des adénopathies tuberculeuses repose sur
l’étude topographique et morphologique.
La TDM confirme la distribution périvasculaire des adénopathies
qui apparaissent soit sous forme de structures nodulaires de petite
taille, soit sous forme de gros nodules généralement supérieurs à
15 mm, disséminés, soit encore sous forme d’un magma
d’adénopathies conglomérées.
La densité des adénopathies est variable.
L’aspect typique associe
une hypodensité centrale signant la présence de caséum ou de
nécrose, et une paroi inflammatoire se rehaussant après injection de
contraste endoveineux.
Cet aspect est hautement évocateur
de l’origine tuberculeuse.
Cependant, il n’est pas pathognomonique.
L’hypodensité peut être liée à une nécrose tumorale ou à une
infiltration graisseuse ; ainsi, elle peut se rencontrer au cours des
adénopathies métastatiques, des lymphomes abdominaux traités par
chimiothérapie et au cours de la maladie de Whipple.
Par ailleurs, le rehaussement annulaire peut s’observer au cours des
infections à M. avium intracellulaire survenant chez les malades
atteints de sida.
Certaines localisations peuvent rendre plus délicate l’interprétation TDM, c’est le cas des adénopathies confinées à la région
péripancréatique qui peuvent simuler une tuméfaction pancréatique
et soulever un problème de carcinome.
3- IRM
:
En IRM, les adénopathies prennent volontiers un aspect nécrosé et
apparaissent en hyposignal sur les séquences pondérées T1, en
hypersignal sur les séquences pondérées T2 avec un rehaussement
généralement en « couronne » après injection de contraste veineux,
donnant une image en « cible ».
Un aspect lésionnel
particulier est retrouvé dans nos observations ; il réalise sur les
séquences pondérées T2 une image hyperintense en périphérie et de
moindre intensité au centre.
Cet aspect, sans doute en
relation avec l’évolution du contenu caséeux, n’a pas été signalé à
notre connaissance dans d’autres atteintes ganglionnaires d’origine
non tuberculeuse.
Nous pensons que l’association d’un hyposignal central sur les
séquences pondérées T2 et d’un rehaussement en « cible » est très
évocatrice de tuberculose.
C - TUBERCULOSE INTESTINALE
:
Elle peut intéresser tous les segments du tube digestif, mais elle
siège préférentiellement au niveau de la région iléocæcale (80 % des
cas).
Cette prédominance est expliquée par la richesse de la région
en éléments lymphoïdes, le ralentissement du transit, la relative
stase physiologique au niveau de l’iléon terminal, l’intensité de
l’absorption intestinale et le pH alcalin favorable au développement
du BK.
Le diagnostic de tuberculose intestinale peut être établi par les
explorations conventionnelles barytées qui restent indispensables
pour l’étude endoluminale et muqueuse.
La TDM, quant à elle,
constitue l’examen de choix pour l’évaluation de l’atteinte pariétale,
l’extension péridigestive et pour la mise en évidence des
complications.
1- Opacifications barytées
:
Elles apportent des arguments importants d’orientation
diagnostique.
* Au niveau iléocæcal
:
Les aspects radiologiques sont variables et dépendent du stade
évolutif de la maladie.
Ainsi, au début, on peut noter une iléite
folliculaire qui traduit l’hypertrophie des follicules lymphoïdes et
qui réalise des images lacunaires uniques ou multiples arrondies ou
ovalaires donnant un aspect clouté à la muqueuse.
Il s’y associe
souvent des troubles fonctionnels à type d’hypertonie et
d’hyperkinésie.
Ces lésions de début sont rarement rencontrées ; en effet, la
tuberculose intestinale est en règle générale diagnostiquée à un stade
plus avancé, celui des ulcérations, des sténoses et des rétractions.
De taille et d’aspect variables, le plus souvent à grand axe
longitudinal, les lésions ulcéreuses sont plus fréquentes au niveau
de l’iléon terminal.
Au niveau du cæcum, elles sont
volontiers peu profondes, irrégulières et transversales.
L’inflammation, la fibrose et l’épaississement pariétal peuvent
réduire la lumière intestinale de manière étendue ou localisée.
Les
sténoses peuvent être uniques ou multiples et sont le plus souvent
progressives et centrées.
Typiquement, la sténose intéresse le
segment prévalvulaire de l’iléon terminal.
Elle est généralement
courte et rigide, responsable d’une dilatation d’amont.
Les rétractions surviennent soit spontanément, soit sous l’effet du
traitement antituberculeux.
Elles prédominent au niveau du cæcum
et aboutissent à des raccourcissements et des déformations
caractéristiques en « entonnoir » ou en « bourse » qui
peuvent, dans les cas extrêmes, disparaître complètement.
L’iléon se
continue directement dans le côlon ascendant.
La région iléocæcale est le siège électif des fistules qui peuvent être
borgnes ou communiquer avec un organe de voisinage digestif ou extradigestif.
Le trajet fistuleux est plus ou moins long, rectiligne,
tortueux ou ramifié.
Le principal diagnostic différentiel de la tuberculose iléocæcale se
fait avec la maladie de Crohn.
Il est impossible de séparer les deux
affections sur les seules données du lavement baryté et/ou du transit
du grêle.
Le scanner semble un bon moyen diagnostique dans ces
cas.
* Au niveau des autres segments
:
L’atteinte colique isolée est rare.
Elle ne représente que de 2 à 9%
des cas.
Elle intéresse plus le côlon droit et transverse que le côlon
gauche.
La forme sténosante est la plus fréquente. Devant cet aspect
et compte tenu de la fréquence élevée de l’atteinte néoplasique
colique, c’est cette dernière qui est généralement évoquée.
Le
diagnostic de tuberculose reste une surprise anatomopathologique.
L’atteinte gastrique se fait généralement à partir des ganglions périgastriques.
Elle prédomine au niveau de la région antropylorique.
Ceci s’explique par la richesse lymphatique à ce
niveau.
Les images d’ulcérations sont les plus fréquentes.
Elles sont souvent
interprétées comme malignes en raison de leur grande taille et de
leur aspect.
Certains signes peuvent aider dans l’orientation
diagnostique : la relative conservation du péristaltisme gastrique, la
variation des aspects et l’extension au duodénum.
L’atteinte duodénale prédomine au niveau de D1.
L’aspect peut être
celui d’un ulcère banal ou bien d’une sténose pyloroduodénale avec
dilatation gastrique.
2- Échographie
:
Elle peut apprécier :
– l’épaississement pariétal digestif qui est généralement modéré,
inférieur à 2 cm, régulier, symétrique, hypoéchogène localisé ou
multifocal.
Il prédomine au niveau de la région iléocæcale.
Il réalise,
selon le plan de coupe, la classique image en « cible » ou en
« sandwich » ;
– la mobilité des anses qui est diminuée, voire absente ;
l’agglutination des anses et leur accolement à la paroi abdominale
antérieure ;
– la dilatation des anses en amont d’une sténose : éventualité rare ;
– la présence d’éventuelles complications telle qu’une collection
abcédée ou une péritonite.
3- Tomodensitométrie
:
Cet examen permet d’établir un bilan d’extension de la maladie.
Il
renseigne sur les anomalies pariétales digestives, apprécie l’état de
l’environnement péridigestif et détecte d’éventuelles complications.
– L’atteinte de la paroi digestive réalise un épaississement mural et
circonférentiel symétrique et modéré rétrécissant la lumière en
regard.
Il peut être étendu ou localisé, se rehaussant de façon
hétérogène après injection de contraste endoveineux, réalisant un
aspect en « cible » ou en « double halo » avec un anneau
central hypodense entouré d’un anneau périphérique hyperdense.
– L’atteinte mésentérique : l’extension à la graisse mésentérique est
facilement reconnue en TDM par la perte de la transparence normale
de la graisse qui devient dense.
Il s’y associe souvent des
adénopathies locorégionales.
– Les signes d’engorgement vasculaire : au cours de la tuberculose
péritonéale, il se produit des modifications vasculaires à type de
congestion vasculaire bien démontrée par le scanner spiralé, et se
traduisant par des dilatations vasculaires réalisant des bandes
parallèles plus ou moins larges et rectilignes.
– Les fistules : celles-ci sont faciles à mettre en évidence si elles
contiennent du produit de contraste ou de l’air. Les fistules entérocutanées sont très bien explorées par les coupes TDM réalisées
après fistulographie.
– Les collections abcédées : ce sont les fistules qui sont généralement
à l’origine de ces abcès. Leur localisation est variable : mésentérique, rétropéritonéale, pelvienne, musculaire ou pariétale.
Elles se
traduisent par des masses de densité liquidienne se rehaussant en
« couronne » pouvant comporter parfois des clartés aériques.
Le scanner permet le drainage percutané des abcès et le contrôle
précis après traitement.
Ces signes TDM ne sont pas spécifiques de la tuberculose.
Ils
peuvent également se rencontrer au cours de la maladie de Crohn.
Certains éléments permettent cependant de pencher vers l’une ou
l’autre affection.
En faveur de la tuberculose on retient :
– l’absence d’ulcérations profondes ; celles-ci témoignent du
caractère transmural de l’atteinte inflammatoire observée
généralement au cours du Crohn ;
– le caractère modéré de l’infiltration de la graisse péricolique et
mésentérique ; celle-ci est très importante au cours du Crohn,
prenant parfois un aspect pseudotumoral refoulant les anses
digestives à son contact ;
– la fréquence moins élevée des fistules par comparaison avec le Crohn ;
– le caractère nécrosé des adénopathies et leur taille généralement
plus grande que celle observée au cours du Crohn.
4- IRM
:
Elle a longtemps été d’un intérêt limité dans l’étude du tractus
gastro-intestinal en raison notamment des artefacts de mouvement.
L’apparition de séquences rapides permettant le raccourcissement
du temps d’examen et l’obtention de coupes en apnée ainsi que
l’utilisation de contraste ont été évaluées.
L’injection d’air rétrograde
dans le tube digestif apparaît convenable.
Elle permet de
diminuer le péristaltisme intestinal.
La tuberculose intestinale est bien imagée en IRM, notamment sur
les séquences pondérées en T2 avec saturation de graisse et injection
de gadolinium.
On peut ainsi évaluer l’étendue des lésions,
l’épaississement pariétal, et apprécier l’intensité du rehaussement
digestif qui dépend du degré inflammatoire.
L’IRM permet également d’analyser l’environnement péridigestif, de
visualiser les fistules et de détecter les abcès.
D - TUBERCULOSE HÉPATIQUE
:
La tuberculose hépatique est la plus fréquente des granulomatoses
hépatiques d’origine infectieuse.
Elle peut être primitive, survenant
de façon isolée en l’absence d’antécédents tuberculeux et sans autre
atteinte associée décelable.
Cette forme est rarissime même en pays
d’endémie.
Elle réalise souvent des aspects trompeurs pseudotumoraux.
L’imagerie ne permet pas d’établir le diagnostic,
par ailleurs délicat.
Elle permet toutefois de guider les biopsies dont
l’étude anatomopathologique peut seule fournir un diagnostic de
certitude.
La forme secondaire est plus fréquente.
Elle accompagne une
tuberculose généralisée ou localisée à un autre organe.
Elle ne
soulève que peu de problèmes de diagnostic.
1- Échographie
:
La forme miliaire est généralement sans traduction échographique,
tout au plus peut-on noter une accentuation de l’échogénicité
hépatique.
Dans certains cas cependant, on peut mettre en évidence
des micronodules de taille inférieure à 2 mm, hypoéchogènes,
parsemant le parenchyme hépatique et lui conférant un aspect
« clouté ».
La forme macronodulaire appelée tuberculome réalise des lésions
focales uniques ou multiples, d’échogénicité variable, le plus
souvent hypoéchogène homogène, dont la taille varie généralement
de 1 à 3 cm, et pouvant comporter parfois des calcifications.
La forme abcédée ressemble à un abcès à pyogène ou parasitaire.
Elle réalise une formation liquidienne contenant de faibles échos
internes, et entourée d’une épaisse coque hyperéchogène.
2- Tomodensitométrie
:
La miliaire tuberculeuse peut se traduire parfois sous forme
d’hypodensités punctiformes ne se rehaussant pas après injection
de contraste endoveineux.
L’aspect TDM du tuberculome hépatique est variable et non
spécifique.
Il apparaît comme une lésion circonscrite isolée ou non,
généralement hypodense, se rehaussant modérément en périphérie.
Il peut être également hyperdense, homogène ou hétérogène, avec
ou sans rehaussement, pouvant comporter parfois des calcifications.
La variabilité des aspects scanographiques reflète les différentes
étapes de l’évolution du tuberculome, allant du tissu granulomateux
avec ou sans nécrose caséeuse à la calcification et à la fibrose dans la
phase tardive.
3- IRM
:
Cet examen est capable de montrer les différences histologiques
entre le centre des lésions et leur périphérie ; ainsi, il a l’avantage
par rapport à la TDM de séparer la nécrose caséeuse centrale des
tissus granulomateux périphériques sans utilisation de contraste
veineux.
L’aspect IRM des lésions hépatiques tuberculeuses est variable et
change au cours de l’évolution de la maladie ;
Ainsi, les lésions
peuvent être en hyposignal en T1 et T2 par rapport au parenchyme
hépatique sain, en hyposignal T1 et en isosignal T2, en hyposignal
T1 et hypersignal T2, et enfin en hypersignal T1 et T2, avec ou
sans anneau périphérique.
Celui-ci apparaît en hyposignal sur toutes
les séquences, prenant parfois un aspect concentrique, se rehaussant
ou non après injection de contraste paramagnétique.
Comme pour les adénopathies, l’atteinte tuberculeuse hépatique la
plus évocatrice semble celle associant une lésion hyperintense en
périphérie, de moindre intensité au centre sur les séquences
pondérées T2, et qui se rehausse en périphérie après injection
de contraste endoveineux.
Les données de l’échographie, de la TDM et de l’IRM ne sont pas
spécifiques et peuvent faire évoquer un abcès hépatique à pyogène
ou amibien, des métastases, un carcinome hépatocellulaire et
d’autres tumeurs malignes ou bénignes nécrosées.
Il existe
cependant certaines particularités en faveur du tuberculome, telles
que l’existence d’une nécrose au sein d’une masse de petit volume,
fait relativement rare au cours des processus tumoraux, et la
présence d’adénopathies médiastinales ou abdominales avec le
caractéristique centre nécrosé.
En cas de persistance de doute diagnostique, la ponction-biopsie
hépatique transpariétale à l’aiguille fine écho- ou scanoguidée
s’impose, évitant le recours à une laparotomie intempestive.
E - TUBERCULOSE VÉSICULAIRE
:
Quelques rares cas de tuberculose vésiculaire pseudotumorale ont
été rapportés dans la littérature, se manifestant par un
épaississement pariétal, des cloisons épaisses et des adénopathies
régionales, et dont le diagnostic n’était réalisé qu’à l’étude
anatomopathologique.
F - TUBERCULOSE SPLÉNIQUE
:
L’atteinte splénique est fréquente et s’observe souvent au cours des
miliaires tuberculeuses multiviscérales, mais elle est en général
cliniquement latente.
L’atteinte primitive est rare et soulève de grandes difficultés
diagnostiques, notamment avec les processus tumoraux.
En fait, le
BK ne se localise jamais en premier lieu sur la rate ; la primoinfection
est généralement ganglionnaire, thoracique ou abdominale,
et c’est à partir de ces localisations initiales (complexe primaire) que
le germe va regagner la voie sanguine ou lymphatique pour
atteindre entre autres la rate.
La tuberculose splénique est donc une
manifestation secondaire de la tuberculose, mais elle apparaît
primitive en raison du silence clinique qui entoure le complexe
primaire et la primo-infection.
L’origine de la tuberculose splénique est hématogène.
La voie
lymphatique reste peu probable, car pour concevoir cette
propagation lymphatique, il faudrait admettre l’envahissement à
contre-courant : on sait en fait que le cours de la lymphe va de la
rate aux ganglions spléniques et pancréatiques.
1- Échographie
:
La forme miliaire est rarement diagnostiquée au stade précoce.
Elle
n’est découverte parfois qu’au stade séquellaire sous forme de
micronodules calcifiés, volontiers associés à des calcifications
hépatiques et ganglionnaires.
Le plus souvent, le seul signe
d’atteinte est une splénomégalie homogène.
La forme macronodulaire réalise un aspect pseudotumoral sous
forme de lésions focales d’échogénicité variable, le plus souvent
hypoéchogènes sans renforcement postérieur.
2- Tomodensitométrie
:
Le rôle de la TDM dans l’orientation étiologique est modeste.
En
effet, les aspects lésionnels sont sans spécificité.
C’est par la
confrontation avec les signes cliniques et biologiques et la
découverte d’autres foyers tuberculeux que le diagnostic peut être
évoqué.
La miliaire se traduit rarement par un aspect piqueté hypodense du
parenchyme splénique.
Les tuberculomes se présentent sous forme de lésions circonscrites
pouvant atteindre plusieurs centimètres, hypodenses par rapport au
parenchyme splénique sain, faiblement rehaussés,
comportant parfois une couronne périphérique hypercaptante.
À un stade avancé ou à l’état cicatriciel, les lésions se calcifient,
réalisant des granulomes souvent multiples.
En échographie comme en TDM, il faut rechercher systématiquement
d’autres sites pathologiques associés, notamment
hépatiques, car l’atteinte hépatosplénique est quasi constante, même
si elle n’est pas toujours démontrée en imagerie.
3- IRM
:
Les anomalies lésionnelles de la tuberculose splénique sont variables
en IRM ; il nous semble cependant que l’aspect le plus évocateur
est celui déjà décrit au niveau du foie sur les séquences
pondérées en T2.
G - TUBERCULOSE PANCRÉATIQUE
:
La tuberculose pancréatique est rare, avec moins de 5 % de cas
rapportés dans les séries autopsiques.
Elle fait suite soit à une
inoculation hématogène, soit à une extension par contiguïté à partir
d’adénopathies avoisinantes.
Elle est exceptionnellement primitive,
de diagnostic dans ce cas purement histologique.
Le plus souvent,
elle est secondaire à une miliaire tuberculeuse, évoquée alors devant
l’association d’autres anomalies digestives, péritonéales et
hépatospléniques.
Le tableau clinique n’est pas spécifique. Le bilan biologique peut
révéler une augmentation des concentrations sériques de l’insuline
et du glucagon, une intolérance au glucose, une hyperamylasémie
et une cholestase.
Le bilan échoscanographique montre un certain nombre de signes
non spécifiques plus ou moins associés :
– une tuméfaction du pancréas homogène ou hétérogène ;
– des lésions focales hypoatténuantes le plus souvent céphaliques ;
– une masse tissulaire parfois assez volumineuse pouvant infiltrer
la graisse péripancréatique ;
– une masse kystique à contenu finement échogène.
Ces anomalies pancréatiques peuvent s’associer à une thrombose de
la veine splénique témoignant de la longue évolutivité et de la
chronicité de l’affection, un engainement et/ou une compression
du tronc coeliaque et de l’artère mésentérique supérieure, une
compression du bas cholédoque avec dilatation modérée d’amont,
et des adénopathies péripancréatiques.
Devant l’absence de contexte clinicoradiologique évocateur d’une
tuberculose, les anomalies suscitées évoquent presque toujours une
tumeur maligne pancréatique, entraînant dans ce cas une
laparotomie et parfois même une pancréatectomie dont seule l’étude
histobactériologique révèle le caractère tuberculeux.
Ces difficultés
diagnostiques sont retrouvées dans la quasi-totalité des cas de
tuberculose pancréatique rapportés dans la littérature, ce qui
démontre la nécessité d’y penser devant toute lésion pancréatique
afin d’entreprendre les investigations adéquates qui évitent une
chirurgie intempestive.
Enfin, il ne faut pas méconnaître, chez un tuberculeux avéré
présentant des anomalies pancréatiques, la possibilité d’une pancréatite concomitante ou d’une réaction allergique toxique du
pancréas aux antituberculeux, comme déjà décrit dans certains
cas.
Conclusion
:
Le diagnostic de tuberculose abdominale est toujours difficile à
établir car elle simule de nombreuses pathologies.
Les données de
l’imagerie ne sont pas spécifiques mais leur corrélation aux données
cliniques, biologiques et épidémiologiques oriente fortement le
diagnostic.
Le scanner se révèle l’examen de choix pour une évaluation réelle de
l’extension de la maladie.
Les opacifications digestives conventionnelles
gardent leur indication dans les atteintes intestinales.
Les remarquables
avancées de l’IRM en font une technique d’avenir tant pour le
diagnostic que pour l’évaluation de l’acuité lésionnelle.