Le principe de la scintigraphie repose sur l’administration d’une
substance radioactive (traceur) couplée à un support, qui par son
affinité pour un organe ou un système donné sert de vecteur à la
molécule qui lui est couplée.
L’ensemble traceur-vecteur constitue le
radiopharmaceutique.
Certains radioéléments possèdent
intrinsèquement ce tropisme pour tel tissu, organe ou système et
n’ont pas besoin d’une substance vectrice ; ils sont utilisés seuls,
comme le fluor 18 (18F)-fluorodéoxyglucose (FDG) qui possède un
tropisme pour les tissus présentant un hypermétabolisme comme
les lésions néoplasiques.
En scintigraphie dite monophotonique, le radiopharmaceutique se
fixe sur l’organe ou le tissu cible, le traceur radioactif sert d’émetteur
de photons gamma, détectés au moyen d’une gammacaméra.
En
raison de la diversité des tissus et des fonctions de l’appareil digestif,
il existe de nombreux radiopharmaceutiques destinés à l’étude d’un
organe, d’un système ou d’un tissu tumoral.
Concernant l’imagerie
TEP (tomographie par émission de positons), l’isotope émet des
positons qui se transforment très rapidement en deux photons
d’énergie identique (511 KeV) et émis simultanément à 180° l’un de
l’autre.
Cette caractéristique est à l’origine de l’imagerie TEP, car les
photons émis sont détectés simultanément par une couronne de
détecteurs placés autour du patient.
Certaines machines TEP
peuvent être aujourd’hui couplées avec un scanner ; ce qui permet
une correction d’atténuation et une meilleure précision anatomique.
Explorations tumorales digestives
:
A - RÉCIDIVE DES CANCERS COLORECTAUX
:
1- Rappels cliniques et position du problème
:
L’autorisation de mise sur le marché (AMM) du 18F-FDG a été
initialement limitée aux cancers rectocoliques et vient d’être élargie
à l’ensemble de la cancérologie digestive.
La recherche de récidives
de cancer du côlon et du rectum reste pour l’heure le principal
domaine d’application, avec trois indications bien établies dans ce
contexte :
– recherche de maladie occulte devant une augmentation isolée de
la concentration de l’antigène carcinoembryonnaire (ACE) circulant ;
– caractérisation de lésion(s) équivoque(s) en imagerie
conventionnelle ;
– évaluation préthérapeutique avant résection chirurgicale d’une ou
plusieurs récidives authentifiées.
D’autres indications hors AMM existent en cancérologie digestive
pour le 18F-FDG mais ne sont pas détaillées dans cet article.
2- Méthodologie
:
Le patient doit être à jeun depuis au moins 6 heures.
Une perfusion
de sérum physiologique est posée, le patient étant allongé, au repos
musculaire.
L’injection d’une activité de 2 à 6 MBq/kg de 18F-FDG se fait par la
tubulure de la perfusion.
Le patient reste ensuite allongé pendant
45 minutes à 1 heure, puis la perfusion est retirée, le patient est
invité à vider sa vessie, puis l’examen scintigraphique est réalisé.
L’examen consiste en une étude tomographique de la région
cervicale et de l’ensemble du tronc.
La mesure de l’atténuation du
rayonnement est évaluée grâce à une source externe ou à un scanner
intégré, et les coupes tomographiques sont reconstruites grâce à un
algorithme itératif, avec puis sans correction de l’atténuation.
3- Résultats et stratégie diagnostique
:
* Détection des récidives occultes
:
L’ACE est un indicateur précoce de récidive dont la sensibilité est
rapportée entre 59 et 80 %, et la spécificité entre 70 et 80 %.
Flanagan, chez 22 patients présentant une élévation de la
concentration circulante de l’ACE sans explication retrouvée sur les
examens morphologiques pratiqués, rapporte une valeur prédictive
positive de la TEP-FDG de 89 % (15 patients sur 17) et une valeur
prédictive négative de 100 % (cinq patients sur cinq).
Flamen,
chez 50 patients présentant une augmentation de la concentration
circulante de l’ACE isolée (31 patients) ou associée à des anomalies
équivoques de la tomodensitométrie (TDM) (19 patients), rapporte
une sensibilité de la TEP-FDG de 79 % (34 patients sur 43) et une
valeur prédictive positive de 89 % (34 patients sur 38).
Chez 14 de
ces 50 patients (28 %), la TEP-FDG a permis de réaliser une résection
chirurgicale à visée curative de la (ou des) récidive(s) détectée(s).
* Caractérisation d’images équivoques en imagerie conventionnelle
:
La TEP au FDG se révèle efficace dans cette indication, en particulier
dans deux circonstances fréquentes :
– la caractérisation de lésions hépatiques, dont l’origine angiomateuse ou secondaire est parfois impossible à déterminer sur
les données de la TDM ou même de l’imagerie par résonance
magnétique (IRM) ;
– la caractérisation de masses résiduelles pour lesquelles il est
impossible, sur les données de l’imagerie conventionnelle, de faire
la part entre tissu cicatriciel et récidive.
En effet, aucune fixation significative du FDG n’est visualisée en cas
d’angiome hépatique, et aucune fixation pathologique n’est
détectable en cas de cicatrice fibreuse.
* Recherche d’autres localisations avant résection chirurgicale
de récidive(s) authentifiée(s) :
Le rôle de la TEP au FDG est également reconnu lors du bilan
d’opérabilité à visée curative de métastase(s) authentifiée(s).
Le
contexte le plus fréquent est la détermination de l’opérabilité de
métastases hépatiques.
En effet, le bénéfice en termes de survie de la
résection des métastases hépatiques a été démontré, à condition que
la tumeur primitive ait au préalable été réséquée (avec marges de
résection saines), qu’il n’existe pas de métastases extrahépatiques
(une ou quelques métastases pulmonaires résécables peuvent
toutefois être associées), et que la résection des lésions hépatiques
puisse être complète.
Le rôle de la TEP au FDG est ainsi de
permettre la réalisation des interventions curatives en évitant les
chirurgies inutiles, coûteuses en termes économiques et de confort
pour le patient, et associées à une mortalité de 2 à 7%.
La TEP au FDG s’est révélée dans cette indication plus performante
que la TDM, à la fois pour le diagnostic de l’atteinte extrahépatique,
et pour la détermination de l’étendue de l’atteinte hépatique ellemême.
L’exactitude de la TEP au FDG rapportée par Schiepers
pour l’étude du pelvis chez 76 patients était de 95 % pour la TEP au
FDG, contre 65 % pour la TDM.
L’exactitude de détection de
l’atteinte extrahépatique était de 92 % pour la TEP au FDG contre
71 % pour la TDM dans l’étude de Delbeke.
En ce qui concerne
l’évaluation de l’atteinte hépatique elle-même, la TEP au FDG se
révèle plus performante que la TDM.
En effet, la TDM échoue à
démontrer l’atteinte secondaire hépatique supracentimétrique dans
7 % des cas, et sous-estime le nombre de lobes envahis dans 33 %
des cas.
Delbeke et al ont rapporté une sensibilité du porto-
TDM (97 %) supérieure à celle de la TEP au FDG (91 %), mais la
fréquence des résultats faussement positifs en porto-TDM a fait que
l’exactitude de la TEP au FDG (92 %) était finalement supérieure à
celle du porto-TDM (80 %) et à celle de la TDM (78 %).
L’IRM
semble plus performante que la TDM pour l’évaluation de la
malignité des lésions hépatiques, mais aucune étude, à notre
connaissance, n’a comparé l’IRM et la TEP au FDG dans cette
indication.
Globalement, la TEP au FDG a permis une modification de l’attitude
thérapeutique chez 28 % des patients de l’étude de Delbeke, soit
en indiquant l’exérèse de lésions localisées alors que les examens
morphologiques suspectaient une atteinte plus étendue, soit au
contraire en évitant une intervention inutile si l’atteinte était plus
étendue que ne le laissaient présager les examens morphologiques.
Chez 34 patients pour lesquels un examen TEP-FDG était réalisé
pour déterminer l’opérabilité de métastases hépatiques, une atteinte
extrahépatique a été montrée par le FDG chez 11 patients (32 %),
entraînant une modification de l’attitude thérapeutique (chirurgie
hépatique récusée) chez dix d’entre eux (29 %).
4- Limites de la technique
:
La principale limite de la technique est la taille inframétrique des
lésions.
Dans ce cas, la TEP au FDG ne permet de détecter
qu’environ un quart des lésions au niveau du foie ou en
extrahépatique.
Ainsi, les carcinoses péritonéales faites de
multiples nodules millimétriques sont souvent non détectées par le
FDG, alors que la TEP-FDG est plus performante que l’imagerie
conventionnelle lorsque les nodules de carcinose sont
supracentimétriques.
En dehors de la petite taille des lésions, un
type histologique particulier est également source de résultats
faussement négatifs du FDG, même en cas de lésions volumineuses.
Il s’agit du type colloïde muqueux ou mucineux de certains
adénocarcinomes.
En effet, les lésions de ce type, peu cellulaires, ne
fixent qu’inconstamment le FDG.
À l’inverse, des résultats faussement positifs peuvent être observés,
expliqués par des phénomènes inflammatoires non malins
(adénopathies médiastinales correspondant à une granulomatose de
type sarcoïdose associée et méconnue, abcès, lésions inflammatoires
postopératoires ou postradiothérapie, adénomes coliques) ou par la
mauvaise interprétation de fixations physiologiques.
Les fixations
urétérales localisées, correspondant à la simple visualisation de
l’activité urinaire, sont ainsi parfois difficiles à interpréter, surtout
lorsqu’il existe une fibrose post-thérapeutique responsable d’une
gêne à l’élimination urinaire.
Dans ces cas, il peut être impossible de
conclure entre un nodule néoplasique comprimant un uretère, et la
simple rétention urinaire au-dessus d’un obstacle non néoplasique.
Enfin, une cholestase intrahépatique, à condition qu’une réaction
inflammatoire y soit associée, peut être également source de résultats
faussement positifs.
B - TUMEURS ENDOCRINES ENTÉROPANCRÉATIQUES
:
1- Rappels cliniques et position du problème
:
La somatostatine est un peptide présent dans de nombreux tissus
sains et tumoraux.
Des analogues de la somatostatine sont utilisés
dans le traitement symptomatique de certaines tumeurs endocrines
digestives sécrétantes.
Les effets de la somatostatine et de ses
analogues sont médiés par des récepteurs membranaires spécifiques.
Cinq types de récepteurs de la somatostatine ont été clonés chez
l’homme.
L’effet de l’octréotide (SMS 201-995,
Sandostatine),
analogue de longue durée d’action de la somatostatine le plus utilisé
actuellement, exerce ses propriétés par l’intermédiaire du récepteur
de type 2.
Des récepteurs de la somatostatine ont été mis en évidence dans les
tumeurs endocrines digestives.
Ces tumeurs peuvent être localisées
dans le pancréas, mais également au niveau de tout le tractus gastrointestinal.
Elles peuvent être non sécrétantes, ou sécrétantes et sont
alors classées en fonction du type d’hormone qu’elles produisent
(gastrinome, insulinome, glucagonome, VIPome…).
La présence de récepteurs de la somatostatine au niveau de ces
tumeurs endocrines a incité Lamberts et son équipe à Rotterdam, à
développer le marquage isotopique d’un analogue de la
somatostatine afin de visualiser « in vivo », par technique
scintigraphique, les tumeurs qui expriment ce type de récepteur.
2- Méthodologie
:
Le traceur utilisé actuellement est l’octréotide marqué à l’indium
111 (OctréoScan).
Son élimination est principalement urinaire, mais
il existe également une faible élimination hépatobiliaire.
Une activité moyenne de 120 MBq d’OctréoScant est injectée par
voie intraveineuse (220 MBq s’il est réalisé une tomoscintigraphie).
La dose d’analogue injectée est de 10 µg.
Les 3 jours précédant
l’examen, un régime sans résidu est préconisé, ainsi qu’une
préparation colique afin de diminuer l’accumulation digestive du
traceur.
Il a été recommandé de suspendre, 3 jours avant l’examen,
un éventuel traitement par analogues de la somatostatine, ces
derniers pouvant saturer les récepteurs.
Néanmoins, l’interruption
du traitement peut être dangereuse chez certains malades, et son
intérêt n’a jamais été démontré.
L’acquisition des images est réalisée au moyen d’une caméra
équipée d’un collimateur moyenne énergie, centrée sur les deux pics
de l’indium (171 et 245 keV).
La durée de chaque acquisition
planaire est de 10 à 15 minutes, en matrice 256 X 256.
Des images
planaires centrées sur l’abdomen sont effectuées 4 heures après
injection en incidences antérieure et postérieure.
Vingt-quatre heures
après l’injection, un balayage corps entier et des images centrées
sont réalisées.
Les images centrées sur l’abdomen sont répétées après
30 à 48 heures, principalement s’il existe une accumulation digestive.
Des images tomographiques abdominales peuvent également être
effectuées 24 heures après injection pour aider à la localisation
tumorale.
3- Résultats et stratégie diagnostique
:
Il existe une accumulation physiologique faible du traceur au niveau
de l’hypophyse, de la thyroïde et des glandes mammaires.
La
fixation est un peu plus marquée au niveau du foie en raison de
l’élimination hépatobiliaire du traceur, mais reste relativement
modérée et surtout homogène.
La fixation est intense, au niveau des
reins due à l’élimination rénale, et surtout au niveau de la rate.
Une tumeur apparaît comme un foyer hyperfixant dont l’intensité
est variable.
La visualisation des tumeurs en scintigraphie
dépend surtout de leur densité de récepteurs. Des tumeurs de moins
de 5 mm ont été visualisées en scintigraphie.
Ce sont les images acquises 24 heures après injection qui permettent
le mieux de détecter ces tumeurs. Cependant, certaines tumeurs
hépatiques, dont la fixation est faible, ne sont visibles que sur les
images réalisées à la quatrième heure, la fixation physiologique étant
alors plus faible.
Il faut noter que des fixations peuvent être retrouvées dans les sites
d’inflammation aiguë, au décours d’une intervention chirurgicale
récente, au niveau pulmonaire en cas d’irradiation préalable ou au
niveau des fosses nasales en cas de virose respiratoire.
* Détection des tumeurs primitives
:
La sensibilité de cet examen dans la détection des tumeurs
primitives (gastrinomes et carcinoïdes) est évaluée de 70 à 100 %
selon les équipes et semble similaire pour les tumeurs sécrétantes et
non sécrétantes.
Seule la sensibilité de détection
des insulinomes semble plus faible (50 %), liée à une plus faible
densité de récepteurs retrouvés dans ces tumeurs.
L’intérêt de la scintigraphie est de permettre la découverte de
tumeurs non visualisées par les autres techniques d’imagerie.
Dans notre expérience de plus de 160 patients
porteurs de tumeurs endocrines digestives, sur les 46 patients chez
lesquels aucune tumeur primitive n’avait été mise en évidence
(endoscopie, échographie, TDM), la scintigraphie a permis de révéler
chez 17 patients (37 %) la lésion primitive.
Pour la détection des tumeurs primitives duodénales ou pancréatiques, la sensibilité de
l’association de l’échoendoscopie duodénopancréatique et de la
scintigraphie est de 90 %.
La scintigraphie peut permettre également de révéler ou confirmer
une récidive tumorale postopératoire, et de juger de l’intérêt d’un
traitement par analogues de la somatostatine. Elle suggère enfin le
caractère neuroendocrine d’une masse tumorale visualisée en
imagerie conventionnelle.
* Détection des métastases
:
Le deuxième intérêt de cette technique est la mise en évidence de
métastases, pouvant modifier les décisions thérapeutiques.
Dans toutes les séries de tumeurs neuroendocrines, la
scintigraphie a détecté de nouveaux sites tumoraux, en particulier,
des métastases osseuses ou médiastinales, jusque-là inconnues, chez
20 à 54 % des malades.
Dans notre expérience, des foyers
métastatiques ont été découverts exclusivement par la scintigraphie
chez 25 % des patients.
La sensibilité dans la détection des métastases hépatiques a été
estimée à 93-95 %. Dans notre expérience, les métastases
hépatiques connues ont été confirmées par la scintigraphie dans
95 % des cas ; la technique permet en plus de révéler des sites
hépatiques chez 9 % des 90 patients ayant une exploration hépatique
normale en TDM et/ou IRM.
* Impact de la scintigraphie des récepteurs à la somatostatine (SRS)
sur la stratégie thérapeutique :
La découverte de sites métastatiques peut contre-indiquer un geste
chirurgical qui serait alors non curatif.
Ainsi, dans notre
série, les résultats de la scintigraphie, après confirmation
radiologique, biopsique ou après laparotomie, ont modifié l’attitude
thérapeutique (contre-indication à une possible chirurgie curative ou
à la transplantation hépatique) chez plus d’un quart des patients
étudiés.
La scintigraphie peut permettre de confirmer la nature
tumorale d’un aspect radiologique évoquant une récidive
postopératoire ou une lésion métastatique.
Dans les tumeurs
endocrines digestives, cet examen apparaît indispensable avant un
geste chirurgical pour, d’une part, dépister d’éventuelles
localisations tumorales qui contre-indiqueraient la chirurgie, ou
nécessiteraient des explorations ou un traitement spécifiques et,
d’autre part, permettre un suivi si la lésion tumorale initiale contient
des récepteurs de la somatostatine.
Plusieurs travaux ont montré que l’effet inhibiteur de l’octréotide
n’était observé qu’en cas de fixation tumorale scintigraphique.
En revanche, la relation entre la visualisation tumorale scintigraphique et l’effet antitumoral de l’octréotide est à étudier.
4- Performances de l’imagerie TEP au 18F-FDG versus
scintigraphie à l’octréotide marqué pour les tumeurs
neuroendocrines entéropancréatiques :
Plusieurs études ont permis d’évaluer les performances de la TEPFDG
pour les tumeurs neuroendocrines digestives malignes.
Les
performances diagnostiques semblent moins bonnes dans la
caractérisation de la masse tumorale, ainsi que dans la recherche de
métastases, que celles de la scintigraphie à l’octréotide marqué.
Cependant, les foyers de fixation observés avec le 18F-FDG
correspondent plus souvent à des tumeurs indifférenciées ou à fort
potentiel évolutif.
Cette propriété liée au FDG apparaît
particulièrement intéressante en complément de la scintigraphie à
l’octréotide marqué, car la fixation de ce radiopharmaceutique
s’effectue sur des récepteurs de la somatostatine, impliquant un
certain degré de différenciation cellulaire.
Il semble donc exister une certaine complémentarité de ces deux
examens :
– dans le bilan d’extension où certains foyers de fixation n’ont été
observés qu’avec l’un ou l’autre des radiopharmaceutiques.
C’est
pourquoi l’utilisation combinée des deux techniques apparaît
souhaitable ;
– dans la recherche de la différenciation tissulaire et l’appréciation
du caractère agressif ou non de la tumeur.
En conclusion, les tumeurs neuroendocrines digestives sont
l’indication privilégiée de la scintigraphie des analogues de la
somatostatine marquée.
L’intérêt majeur actuel de la scintigraphie
est la mise en évidence de tumeurs endocrines gastroduodéno-
pancréatiques et/ou de leurs métastases, non visualisées
par les autres techniques d’imagerie.
Elle peut permettre de préciser
le caractère neuroendocrine des tissus tumoraux visualisés en
radiologie, et poser l’indication d’un traitement par l’octréotide.
D’autres applications des analogues marqués sont possibles : la
détection peropératoire des foyers tumoraux pourrait permettre,
associée à d’autres techniques peropératoires (endoscopie,
transillumination, échographie), une cure chirurgicale la plus
complète possible.
Le marquage par d’autres isotopes émetteurs
de rayons pourrait permettre l’utilisation thérapeutique de ces
analogues.
C - CARACTÉRISATION D’UNE MASSE HÉPATIQUE :
ANGIOME HÉPATIQUE VERSUS MÉTASTASE
1- Rappels cliniques et position du problème
:
L’angiome hépatique représente la tumeur bénigne du foie la plus
fréquente : 0,4 à 7,3 % des séries autopsiques, 2 % environ des
séries échographiques, et il est le plus souvent totalement
asymptomatique.
Ces deux caractéristiques expliquent pourquoi il
est généralement découvert fortuitement, à l’occasion d’une maladie
intercurrente (rénale, gynécologique, vésiculaire, etc), ou dans le
cadre d’un bilan d’extension d’une affection néoplasique. Se pose
alors le problème de l’identification de cette masse hépatique
lorsqu’il persiste un doute échographique.
2- Méthodologie
:
Radiopharmaceutique
:
L’examen repose sur le marquage des globules rouges du patient.
Plusieurs méthodes de marquage sont décrites, nous préférons
la méthode dite in vivo modifiée, qui consiste en l’injection
intraveineuse de 1 à 1,5 mL de pyrophosphate stanneux (ce qui
sensibilise le globule rouge) suivie d’un prélèvement sanguin
permettant l’isolement d’un culot globulaire.
Les globules rouges
sont alors incubés avec 740 MBq de 99mTc.
Aucune préparation du
patient n’est nécessaire.
* Protocole d’examen
:
Les globules rouges autologues marqués sont réinjectés au patient
positionné sous la gammacaméra.
Trois séries d’images sont
réalisées : une dynamique rapide destinée à explorer la phase
vasculaire ; des images statiques pendant une vingtaine de minutes ;
une exploration 2 heures plus tard avec tomographie.
3- Résultats
:
Le foie apparaît sur la séquence dynamique quelques secondes après
l’injection.
Sa structure est homogène, sauf en regard de l’angiome
où l’on note une plage hypofixante.
Plus rarement,
l’angiome peut être confondu avec le reste du parenchyme
(isofixation) mais il n’est pas hyperfixant d’emblée.
Sur les images
statiques des 20 premières minutes suivant l’injection, on voit
typiquement disparaître la zone hypofixante décrite au cours de la
phase vasculaire.
Le foie devient alors uniformément
homogène en quelques minutes.
Parfois, la tumeur peut même
devenir modérément hyperfixante vers la 15e ou 20e minute, mais
cette précocité est inconstante.
Deux heures après l’injection, sur
l’étude tomographique, l’angiome apparaît hyperfixant du fait du
piégeage des globules rouges marqués dans le lac vasculaire tumoral.
La sensibilité de la scintigraphie hépatique aux globules rouges
marqués (SHGRM) dans le diagnostic d’angiome hépatique varie
avec le diamètre tumoral.
Elle est proche de 100 % lorsque le
diamètre dépasse 3 cm, et se situe autour de 85 % pour les angiomes
de 1,5 à 3 cm.
Lorsque le diamètre n’excède pas 2 cm, le
diagnostic est d’autant plus difficile que la tumeur se situe au centre
du parenchyme, près des axes vasculaires.
La sensibilité est
médiocre pour les tumeurs inférieures à 1,5 cm, bien que certains
auteurs aient réussi à visualiser des angiomes de 0,5 à 1,5 cm avec
une caméra triple tête dotée d’un système à très haute résolution.
Toutes les études ont montré que la spécificité de la SHGRM dans le diagnostic d’angiome hépatique était de 100 % avec
la séquence complète (hypofixation à la phase vasculaire laissant
progressivement place à une hyperfixation à la phase tardive).
Seuls
quatre faux positifs ont été, avec la séquence complète, décrits dans
la littérature.
Il s’agissait d’un angiosarcome, de deux métastases
coliques et d’une métastase d’un carcinome neuroendocrine
d’origine gastrique.
Quelques cas d’hyperfixation tardive isolée
au niveau du site tumoral ont été décrits sur des carcinomes
hépatocellulaires.
Il s’agissait de patients ayant une forte altération
du parenchyme hépatique et présentant une hyperfixation tumorale
visible dès la phase vasculaire.
4- Stratégie diagnostique
:
Le diagnostic d’angiome hépatique est souvent posé par la seule
échographie lorsque la sémiologie est complète et en l’absence de
contexte carcinologique.
Lorsqu’un angiome est suspecté, quel que
soit son diamètre tumoral, l’examen de deuxième intention reste
pour l’heure l’IRM.
À condition de prendre un T2 suffisamment long
(valeur limite de 112 ms pour McFarland), la sensibilité de l’IRM est
proche de 100 % avec une spécificité de 92 %.
Dans une série avec
injection de gadolinium, l’IRM permettait de trancher entre hémangiome et métastases dans 88 % des cas, avec 12 % de
diagnostics indéterminés.
La précision diagnostique était alors de
96 %.
On notait cependant que pour les tumeurs inférieures à 2 cm,
le pourcentage de diagnostics indéterminés passait alors à 39 %.
Comme pour la SHGRM, les performances de l’IRM diminuent avec
le diamètre tumoral.
Dans certains cas, l’IRM ne répond donc pas de façon formelle, et il
est proposé une surveillance à 6 mois pour apprécier une éventuelle
augmentation du volume tumoral.
Par ailleurs, il existe des
situations où l’IRM ne peut être pratiquée : patients claustrophobes,
porteurs de clips métalliques ou de stimulateur cardiaque.
C’est en particulier dans ces différentes situations que la SHGRM se
révèle une excellente alternative à l’IRM.
La SHGRM permet de
confirmer ou d’infirmer immédiatement le diagnostic en sachant que
la spécificité reste excellente dans tous les cas (100 %), mais que la
sensibilité dépend du diamètre tumoral.
Pour les tumeurs
inférieures à 1,5 cm, c’est le scanner spiralé (rotation continue) et
non la scintigraphie qui est l’alternative à l’IRM.
Dans le cadre d’un bilan néoplasique, la TEP au 18F-FDG s’avère
également intéressante dans l’indication de la caractérisation d’une
masse hépatique suspecte.
En effet, lorsqu’une fixation du FDG par
la masse hépatique suspecte est alors constatée, la nature maligne
de la masse apparaît quasi certaine, la probabilité d’abcès (cause rare
de résultat faux positif) étant très faible s’il n’existe pas de signe
clinique ou de contexte évocateur.
La possibilité d’une origine angiomateuse de la masse peut également être écartée.
En effet,
aucune fixation significative du FDG n’est visualisée en cas
d’angiome hépatique.
Ceci est également vrai pour les
hyperplasies nodulaires focales pour lesquelles aucun résultat faux
positif du FDG n’a été rapporté.
Si la masse ne fixe pas le FDG, il est en revanche impossible de
conclure entre lésion bénigne (angiome, hyperplasie nodulaire
focale) ou métastase hépatique ne fixant pas le FDG.
La scintigraphie aux globules rouges marqués peut alors être
l’examen recommandé dans la poursuite de la stratégie diagnostique
puisque, en cas de positivité, cet examen permet d’affirmer le
diagnostic d’angiome.
Exploration isotopique de la motricité
digestive :
A - MOTRICITÉ OESOPHAGIENNE
:
1- Rappels cliniques et position du problème
:
La scintigraphie intervient en complément de la manométrie pour
l’étude des troubles moteurs oesophagiens ; elle permet de visualiser
la progression du bol alimentaire dégluti, et d’étudier sa cinétique
de passage dans le conduit oesophagien.
Méthode d’exploration
simple et atraumatique, ne nécessitant pas d’intubation, elle
objective les anomalies de motricité oesophagienne et les effets des
traitements appliqués.
2- Méthodologie
:
* Choix du bol dégluti
:
L’utilisation successive de deux bols, liquide (eau marquée par du sulfocolloïde technétié, 10-15 MBq) et solide (morceau d’omelette ou
de pâté technétié, 20-30 MBq) rehausse la sensibilité du test.
* Réalisation pratique
:
Le patient est assis, en position physiologique.
La même acquisition
d’images consécutives est faite après la déglutition de chaque bol.
* Traitement informatique
:
La même analyse des données est appliquée à l’étude des deux bols :
– qualitative : par l’ « image condensée » qui décrit la progression
oesophagienne du bol en fonction du temps ;
– quantitative : par le calcul de la fraction d’extraction
oesophagienne (FE) et du temps de transit moyen (TTM) à partir des
courbes d’activité.
* Tests pharmacologiques
:
L’examen est sensibilisé par la réalisation d’une scintigraphie avant
et après l’administration de substances pharmacologiques :
– test thérapeutique :
Risordan 5 mg, ou Adalate 10 mg ;
– test de provocation :
Tensilon 80 µg/kg.
3- Résultats et stratégie diagnostique
:
* Évaluation pronostique des effets du traitement des mégaoesophages
:
Le mégaoesophage, ou achalasie du sphincter inférieur de
l’oesophage, est traité chez la majorité des patients par dilatation
pneumatique progressive.
Les données du transit radio-isotopique
ont une bonne valeur prédictive sur l’efficacité de la dilatation.
* Symptomatologie fonctionnelle et manométrie normale
:
La manométrie n’explore pas la force de propulsion pharyngée. Une
anomalie de la pompe pharyngée peut générer des troubles moteurs
objectivés en scintigraphie et non en manométrie.
* Anomalies motrices aspécifiques en manométrie
:
Certaines anomalies manométriques isolées, comme l’hyperpression
du sphincter inférieur de l’oesophage, ont des conséquences
fonctionnelles mal connues.
Couplée à la manométrie, la
scintigraphie aide à reconnaître l’anomalie fonctionnelle
oesophagienne.
* Appréciation de l’efficacité d’un médicament ou de l’origine
oesophagienne des douleurs :
La comparaison des transits radio-isotopiques réalisés avant et après
la prise de Risordan ou d’Adalate chez des patients présentant
des troubles moteurs oesophagiens, permet d’objectiver l’effet du
médicament et donc de guider le traitement.
Inversement, la
provocation de douleurs et d’anomalies scintigraphiques par
l’administration de Tensilon chez des patients ayant une
symptomatologie pseudoangineuse suggère l’origine oesophagienne
de la douleur.
En conclusion, la scintigraphie oesophagienne est un examen non
invasif, court, et de réalisation simple.
Physiologique, riche en
informations, elle ne remplace pas la manométrie mais la
complète.
B - EXPLORATION RADIO-ISOTOPIQUE
DE LA VIDANGE GASTRIQUE
:
1- Vidange gastrique et diabète
:
* Rappels cliniques et position du problème
:
La prévalence de la gastroparésie diabétique (GD) est difficile à
apprécier car elle est fréquemment asymptomatique.
Elle semble
néanmoins proche de 50 %.
L’endoscopie digestive haute permet d’éliminer une cause
organique.
Parfois, elle peut découvrir un bézoard par accumulation
de résidus fibreux alimentaires.
La plupart des auteurs s’accordent
pour faire de la GD une neuropathie viscérale avec atteinte de la
voie parasympathique.
Il faut cependant garder à l’esprit que cette
« autovagotomie » peut atteindre un segment quelconque du tractus digestif,
notamment l’oesophage, le pylore et le duodénum.
*
Méthodologie :
+ Radiopharmaceutique
:
– Phase solide digestible : omelette dont l’ovalbumine est marquée
in vitro par 40 MBq de sulfure de rhénium technétié.
– Acquisition en double fenêtrage (140 keV pour le 99mTc et 245 keV
pour l’111In) : acquisitions multistatiques abdominales antérieures et
postérieures de 1 minute chacune et séparées par un intervalle de
repos de 13 minutes.
Le patient, en position debout au moment des
clichés, peut s’asseoir pendant les périodes de repos.
– Tracé d’une région d’intérêt (ROI : region of interest) autour de
l’estomac, incidence par incidence et image par image ; tracé d’une
ROI paragastrique de façon à soustraire le bruit de fond de l’activité
brute provenant de la région d’intérêt gastrique.
– Réalisation de courbes de l ’activité gastrique résiduelle pour
chacune des phases solide et liquide.
Détermination de paramètres
fonctionnels.
* Résultats et stratégie diagnostique
:
Décrite pour la première fois il y a 30 ans par Griffith qui proposa
du porridge marqué au chrome 51, la scintigraphie a
considérablement évolué et reste encore actuellement la méthode de
référence par sa fiabilité, sa reproductibilité, son caractère non
invasif et son respect des conditions physiologiques.
La GD se traduit par un retard de la vidange gastrique des solides
(au début, les solides indigestibles), témoin d’une hypomotricité
antrale.
La vidange gastrique des liquides est le plus souvent
retardée, mais, dans près de 10 % des cas, elle peut se révéler
accélérée à un stade précoce de l’atteinte gastrique, traduisant
vraisemblablement un défaut de relaxation adaptative fundique.
Certains auteurs incriminent ici le syndrome d’insulinorésistance.
Un deuxième cas de figure à vidange dissociée (liquides
accélérés/solides normaux) chez les diabétiques non
insulinodépendants sans neuropathie autonome serait lié à des
troubles du rythme électrique de base (REB) (tachyarythmie).
Enfin,
une perte de la discrimination gastrique solides-liquides est parfois
identifiée, aboutissant à des cinétiques d’évacuation identiques pour
les deux phases du repas.
Une corrélation entre glycémie et vidange gastrique a été retrouvée.
L’hyperglycémie postprandiale excessive expose à un ralentissement
de la vidange gastrique ; l’hypoglycémie insulino-induite l’accélère
chez le diabétique insulinodépendant.
Une vidange gastrique isotopique (VGI) devrait être envisagée chez
le diabétique dont la glycémie reste incontrôlée de manière mal
expliquée, face à un syndrome dyspeptique sévère et/ou ne répondant pas aux gastrokinétiques (la VGI peut en ce cas faire
partie d’une épreuve thérapeutique), enfin en cas de bézoard.
2- Autres indications de la vidange gastrique isotopique
:
* Gastroparésies des vagotomies
:
L’approche objective des syndromes dyspeptiques des vagotomies
est difficile car, à l’exception de la vagotomie fundique, ces
interventions modifient la vidange gastrique, même chez des opérés
asymptomatiques.
Les vagotomies exposent à un ralentissement de
la vidange gastrique affectant souvent sélectivement les solides.
Celui-ci est parfois associé à une accélération de l’évacuation des
liquides, en particulier lors de la phase postprandiale précoce.
Il est
malaisé, à partir de la seule analyse des symptômes, de prédire le
trouble moteur gastrique sous-jacent : stase gastrique, incontinence
gastrique, reflux duodénogastrique, syndrome de l’anse afférente…
La VGI est donc particulièrement utile dans ces cas pour guider le
traitement symptomatique.
* Diagnostic et suivi du syndrome dyspeptique
:
Environ 50 à 75 % des troubles de la vidange gastrique ne relèvent
d’aucune cause identifiable.
Ils s’intègrent alors dans le cadre d’un
syndrome dyspeptique idiopathique appelé encore dyspepsie non
ulcéreuse.
La VGI s’avère un outil objectif irremplaçable dans le
diagnostic de syndromes dyspeptiques douteux ou rebelles aux
traitements classiques.
La stase gastrique n’est objectivée que chez environ 50 % des
patients consultant pour un syndrome dyspeptique idiopathique.
Il
est impossible d’en prédire l’existence à partir de la seule analyse
des symptômes.
La VGI s’avère aussi un instrument précieux pour
suivre de façon objective l’efficacité du traitement d’un syndrome
dyspeptique grave.
Exploration isotopique
d’un saignement digestif :
A - RECHERCHE D’UN SAIGNEMENT DIGESTIF
:
1- Rappels cliniques et position du problème
:
La scintigraphie aux globules rouges marqués aide à localiser les
saignements digestifs inexpliqués par les méthodes d’exploration
conventionnelles radiologiques et endoscopiques.
Son principe
repose sur l’extravasation et l’accumulation du traceur en regard du
site de saignement.
2- Méthodologie
:
* Marquage des globules rouges
:
Le marquage des hématies par le technétium est effectué en présence
d’ions stanneux qui agissent comme agents réducteurs.
L’ion pertechnétate traverse librement la membrane du globule rouge.
En
revanche, si le composé stanneux est dans l’hématie, le technétium
est réduit et reste intracellulaire en se liant à l’hémoglobine.
Le marquage in vitro est le marquage idéal, mais non utilisable en
situation d’urgence ; la technique in vivo est la plus rapide, mais la
présence de pertechnétate libre peut générer une activité intestinale,
la technique « modifiée in vivo » apparaît comme la méthode de
choix.
* Technique d’imagerie
:
L’activité injectée de technétium est de l’ordre de 750 MBq.
L’acquisition dynamique initiale est suivie d’images différées toutes
les 30 ou 60 minutes le jour de l’injection, et parfois d’images
tardives, à 24 heures.
Il n’est pas nécessaire que le patient soit à
jeun.
3- Résultats et stratégie diagnostique
:
Les hématies radioactives et non radioactives ont la même biodistribution.
Le saignement actif se traduit par l’apparition d’un
foyer de siège anormal qui, au cours du temps, se déplace.
Le siège
et l’aspect du foyer initial, son déplacement, aident à localiser le
saignement.
La scintigraphie permet habituellement de différencier les
saignements de l’intestin grêle et du côlon. Atraumatique, sans
contre-indication, elle peut être répétée sans risque ; son intérêt chez
le vieillard présentant plusieurs lésions susceptibles de saigner a été
souligné.
C’est un examen sensible à condition qu’il soit réalisé en
période hémorragique.
Les hématies technétiées restant longtemps
en circulation, le facteur limitant pour la détection est le volume de
sang collecté dans la lumière intestinale.
Une accumulation de 2 à
3 mL de sang serait suffisante pour être détectée.
La scintigraphie a en revanche peu d’intérêt dans la détection des
saignements digestifs hauts, car l’activité vasculaire masque
partiellement la partie haute de l’abdomen.
À la différence de
l’artériographie ou de l’endoscopie, elle n’apporte aucune
information sur la nature de la lésion.
La localisation est
approximative, surtout au niveau du grêle en raison de la diffusion
rapide du traceur liée au péristaltisme intestinal. Son inconvénient
majeur est de n’être positive qu’en période hémorragique.
On ne doit considérer la scintigraphie ni comme un examen de
première intention, ni comme un examen de dernier recours après
avoir répété des explorations toutes négatives.
La scintigraphie est
une alternative à la répétition des examens habituels, elle peut
guider les autres explorations ou l’intervention chirurgicale vers le
site de saignement.
En conclusion, la scintigraphie aide à localiser les saignements
digestifs de diagnostic difficile.
Positive seulement en période
hémorragique, elle devrait être demandée plus tôt et réalisée en
urgence devant un saignement inexpliqué.
B - RECHERCHE D’UN DIVERTICULE DE MECKEL
:
1- Rappels cliniques et position du problème
:
Le diverticule de Meckel (DM) est un reliquat embryonnaire présent
dans environ 2 % de la population, dû à la fermeture incomplète de
l’extrémité iléale du canal omphalomésentérique reliant le sac
vitellin à l’intestin primitif.
Il se situe sur le bord antimésentérique
du dernier mètre distal de l’intestin grêle.
Ce diverticule est tapissé
de muqueuse iléale normale mais comporte fréquemment une
muqueuse hétérotopique, le plus souvent gastrique.
Le DM est symptomatique dans 4 % des cas : douleurs,
hémorragie voire perforation.
Une hétérotopie gastrique est présente
dans plus de la moitié des DM symptomatiques, et dans plus de
90 % des formes hémorragiques.
Les autres complications, occlusion
sur bride, invagination ou infection du DM, sont plus rares.
Plus de
la moitié des formes compliquées s’observent avant l’âge de 2 ans.
Le risque de complication, en particulier d’hémorragie, diminue
avec l’âge, l’occlusion étant la complication la plus fréquente chez
l’adulte.
Le pertechnétate est capté puis sécrété par les cellules à mucus de
l’estomac, mais aussi par les zones d’hétérotopie gastrique.
La
scintigraphie au pertechnétate ne met donc pas en évidence le DM
lui-même, mais visualise la muqueuse hétérotopique gastrique.
2- Méthodologie
:
* Préparation du patient
:
L’examen est réalisé chez un patient à jeun d’au moins 6 heures
pour diminuer la fixation gastrique.
Il est également souhaitable
d’effectuer cet examen à distance d’un transit du grêle.
L’utilisation d’agents pharmacologiques augmente vraisemblablement
la sensibilité et la spécificité de la scintigraphie, bien que
les rares publications ne concernent que des études expérimentales
ou des cas cliniques isolés.
La pentagastrine (6 ·-1 en injection sous-cutanée (SC) 15 minutes
avant l’examen) augmenterait la captation du traceur par une
augmentation de l’activité des cellules à mucus, elle-même
secondaire à une augmentation de la sécrétion acide des cellules
pariétales.
Cette augmentation de la sécrétion acide pourrait
toutefois aggraver la symptomatologie.
Le glucagon (0,25 à 2 mg en injection intraveineuse) pourrait
augmenter la concentration de pertechnétate au niveau du
diverticule en diminuant le péristaltisme intestinal.
Son utilisation a
été proposée en association avec la pentagastrine.
Les inhibiteurs des récepteurs H2 de l’histamine (per os pendant les
48 heures précédant l’examen ou intraveineux 1 heure avant celuici)
augmenteraient la concentration intracellulaire de pertechnétate
en diminuant son excrétion intraluminale.
* Radiopharmaceutique
:
L’activité du 99mTc pertechnétate injectée par voie intraveineuse est
de 150 MBq chez l’adulte, adaptée au poids chez l’enfant, avec un
minimum de 20 MBq.
Des acquisitions antérieures de 4 secondes sont effectuées pendant
la minute suivant l’injection du traceur, puis de 1 minute toutes les
5 minutes jusqu’à la 60e minute, complétées d’une acquisition postmictionnelle et éventuellement d’incidences complémentaires.
3- Résultats et stratégie diagnostique
:
Le DM se traduit par une fixation focale, de même cinétique que la
fixation gastrique, le plus souvent localisée dans la fosse iliaque
droite.
La sensibilité de la scintigraphie sans intervention
pharmacologique est d’environ 85 % avec une spécificité de 95 %.
La valeur prédictive négative est supérieure à 90 %.
Les études
sont peu nombreuses chez l’adulte avec des résultats classiquement
inférieurs, tant pour la sensibilité de détection de muqueuse
gastrique hétérotopique que pour la spécificité.
Bien qu’aucune
série clinique large n’ait été publiée, les quelques cas rapportés
suggèrent une amélioration significative des performances de la
scintigraphie lorsqu’une prémédication est utilisée, en particulier
chez l’adulte.
Le transit du grêle ou l’artériographie ont été proposés pour le
diagnostic de DM, mais avec des résultats nettement inférieurs à ceux des explorations isotopiques.
Le caractère peu invasif et
l’excellente acceptabilité de la scintigraphie au 99mTc pertechnétate
associés à son efficacité l’ont rapidement imposée comme la
technique diagnostique de choix.