Les aspects radiologiques des lésions osseuses observées chez les
patients atteints de cancers du tissu hématopoïétique sont actuellement
bien établis.
Les anomalies radiographiques et tomodensitométriques
résultent d’un déséquilibre entre l’activité ostéoblastique et
ostéoclastique induit par les cellules néoplasiques.
Les anomalies objectivées par la scintigraphie osseuse révèlent les lésions médullaires, également de façon indirecte, puisqu’elles résultent d’une accélération
de l’activité ostéoblastique induite par les cellules néoplasiques.
Les anomalies médullaires observées par résonance magnétique sont
encore actuellement moins bien comprises.
Cette technique permet
d’imager directement le tissu médullaire et fournit des renseignements
sur l’équilibre entre les composantes graisseuse et non graisseuse de la
moelle.
Les anomalies médullaires observées par IRM résultent, pour
une large part, d’une modification de l’importance relative du volume
occupé par les adipocytes dans la moelle osseuse.
Un premier chapitre est consacré aux notions d’imagerie et de clinique
qui sont communes aux lymphomes, leucémies, myélome multiple et
syndromes myéloprolifératifs.
Les spécificités de chacune de ces
maladies, ainsi que leurs complications osseuses, seront revues
séparément.
Nous négligerons volontairement les très rares manifestations
articulaires associées directement à ces cancers.
Les manifestations
articulaires associées indirectement à ces maladies, ou secondaires aux
traitements (goutte, nécrose, neuropathies périphériques, arthrites
infectieuses, fractures épiphysaires), constituent une cause fréquente de
consultation radiologique.
Leurs présentations radiologique et IRM ne
présentent pas de particularité et ne sont pas détaillées.
Généralités
:
A - Imagerie médicale
:
1- Distribution des lésions
:
De façon quasiment systématique, la distribution des lésions
néoplasiques de la moelle osseuse est parallèle à la distribution du tissu
hématopoïétique dans le squelette.
Le tissu hématopoïétique
occupe la quasi-totalité des espaces médullaires à la naissance et se
rétracte progressivement pendant la croissance dans une direction
centripète.
Au-delà de la troisième décade de la vie, la distribution du
tissu hématopoïétique ne présente plus que des variations discrètes.
Chez le sujet adulte, la moelle rouge occupe les vertèbres, le crâne, les
ceintures scapulaires et pelviennes, ainsi que les côtes et le sternum.
En
conséquence, chez les sujets adultes, les lésions ostéomédullaires
associées aux cancers du tissu hématopoïétique sont localisées dans le
squelette axial et les racines des membres.
Les deux tiers distaux des
membres sont le plus souvent préservés, alors que leur atteinte est fréquente chez les enfants.
À titre d’exemple, l’ostéoporose secondaire
à une infiltration myélomateuse affecte le squelette axial et les racines
des membres.
Le squelette appendiculaire distal est épargné, puisque
l’hyperactivité ostéoclastique induite localement par le tissu
néoplasique n’affecte que le réseau osseux en contact avec le tissu
anormal.
À l’inverse, l’ostéoporose sénile ou postménopausique
affecte l’ensemble du squelette puisqu’elle résulte d’une altération
globale du métabolisme osseux.
2- Détection des lésions
:
La sensibilité de la radiologie standard pour la détection des lésions
osseuses lytiques dépend, pour chaque os, du type de réseau osseux
prédominant (cortical ou trabéculaire) et de la forme de l’os (plat ou
rond).
Il faut néanmoins garder en mémoire que ces lésions ne seront
détectées par la radiologie que pour autant que les cellules néoplasiques
interfèrent avec l’équilibre entre l’activité des ostéoclastes et des
ostéoblastes.
De façon générale, une zone d’ostéolyse est d’autant mieux visible en
radiographie standard que le rapport trabéculocortical de l’os dans
lequel elle se développe est faible (côtes, crâne).
Dans les
vertèbres et le sacrum, ce rapport est élevé. Le sacrum, les os iliaques et
le sternum sont plats et offrent peu de tangence aux rayons incidents.
La tomographie computérisée abaisse considérablement le seuil de
détection des anomalies osseuses, en permettant une analyse détaillée
du réseau trabéculaire.
La forme de l’os n’intervient plus dans la
détection des lésions osseuses.
Dans certains territoires osseux
contenant de la moelle graisseuse et peu de travées osseuses (par
exemple la diaphyse fémorale), le scanner permet une visualisation
directe du contenu médullaire car, en absence de réseau trabéculaire, le
coefficient d’absorption du tissu néoplasique est différent de celui de la
moelle jaune.
L’approche tomographique ne permet cependant pas
d’analyser l’ensemble du squelette et le CT est utilisé pour explorer une
région anatomique délimitée par un examen clinique, une radiographie,
ou une scintigraphie osseuse.
La sensibilité de l’IRM pour la détection des lésions médullaires est dans
une large mesure influencée par la composition, et donc le signal, du
tissu médullaire dans lequel la lésion se développe.
Dans une moelle
riche en cellules hématopoïétiques, le contraste entre le signal du tissu
sain et celui du tissu pathologique est réduit en pondération T1 et le seuil
de détection est élevé.
La détection des lésions est facilitée quand elles
se développent dans une cavité médullaire riche en tissu adipeux, de
signal élevé en pondération T1.
D’autres paramètres interviennent
également dans la détection des lésions, tels que les séquences
d’imagerie et les produits de contraste utilisés, ou encore le signal et le
type de lésion à rechercher.
De nombreuses pathologies de la moelle osseuse s’accompagnent
également de modifications de la distribution de la moelle rouge.
Chez
les patients atteints de troubles métaboliques (anémies, etc) ou de
cancers du tissu hématopoïétique, le tissu hématopoïétique s’étend dans
les espaces médullaires du squelette périphérique.
Ce phénomène,
caractérisé par la transformation lente et ordonnée de la moelle jaune du
squelette périphérique en moelle rouge, porte le nom de reconversion
médullaire, car ce processus est l’inverse de la conversion
médullaire.
Cette expansion médullaire peut être détectée par IRM
pour autant que soient examinées les régions anatomiques contenant
normalement de la moelle jaune (par exemple les genoux) ou les régions
où se trouve l’interface entre la moelle jaune et la moelle rouge (par exemple les têtes fémorales, les grands trochanters et le segment distal
du sacrum).
L’obtention de coupes coronales du bassin permet
d’analyser le contenu de ces territoires et de détecter une reconversion
médullaire.
De plus, l’examen du bassin permet d’investiguer un volume
médullaire important puisque que ce territoire contient environ 35 %du
volume total de moelle rouge.
3- Caractérisation tissulaire
:
Une fois les anomalies reconnues, l’imagerie médicale contribue peu au
diagnostic, vu l’absence de spécificité des anomalies observées.
Des
prélèvements tissulaires sont de toute façon indispensables pour un
diagnostic précis et pour l’obtention d’éléments pronostiques.
Les
paramètres biologiques permettent bien souvent d’orienter le diagnostic
de façon plus efficace que l’imagerie médicale.
Une connaissance fine de la séméiologie radiologique et IRM n’est pas
superflue.
Elle permet un diagnostic de présomption destiné à orienter
les investigations ultérieures si la présentation clinique initiale est peu
précise.
Les manifestations cliniques et biologiques sont parfois
aspécifiques et la confrontation des données radiocliniques peut être
nécessaire.
Par exemple, une ostéoporose sénile avec hypertrophie du
réseau trabéculaire, chez un patient porteur d’un pic monoclonal, ne doit
pas nécessairement transformer une gammopathie monoclonale bénigne
en myélome multiple de stade III.
Enfin, des lésions focales bénignes
dépourvues de signification clinique, telles que des hémangiomes
vertébraux, des hernies intravertébrales de matériel discal ou enchondromes, doivent être reconnues et ne peuvent être confondues
avec des lésions néoplasiques.
B - Généralités cliniques
:
1- Épidémiologie
:
Chez le sujet adulte, les cancers du tissu hématopoïétique sont rares par
rapport à la fréquence élevée des cancers secondaires des os.
Les
hémopathies malignes ne représentent que 10 à 15 % de l’ensemble
des néoplasies se développant chez l’adulte.
Dans la population
blanche américaine, l’incidence annuelle de nouveaux cas par an pour
100 000 habitants est de 17 pour les lymphomes, 5 pour les leucémies
aiguës, 5 pour les leucémies chroniques et de 2,5 pour le myélome
multiple.
La fréquence de certaines de ces pathologies varie
également en fonction d’autres paramètres tels que, entre autres, l’âge,
le sexe et la race.
Chez l’enfant, les hémopathies malignes sont nettement plus fréquentes,
puisqu’elles représentent 30 % de l’ensemble des cancers.
Les
leucémies lymphoïdes représentent le contingent le plus large des
hémopathies, les lymphomes venant ensuite, et le myélome multiple
peut être considéré comme inexistant.
2- Manifestations cliniques
:
Elles sont rarement spécifiques.
Les symptômes initiaux résultent du
cancer lui-même (adénopathies, syndrome de masse thoracique ou
abdominale), ou de ses complications telles que fractures et déficience
du système hématopoïétique.
Altération de l’état général, fièvre,
infection et hémorragie profonde ou superficielle sont parmi les
symptômes motivant le plus fréquemment la consultation initiale.
3- Développement et histoire naturelle des hémopathies malignes
:
De nombreux arguments basés sur des similitudes d’antigènes de
surface, intracytoplasmiques ou intranucléaires, des caractéristiques
biochimiques et des réarrangements chromosomiques suggèrent que les
leucémies, les lymphomes, le myélome multiple et les syndromes
myéloprolifératifs se développent à partir d’un clone cellulaire situé
initialement dans la moelle osseuse, le tissu lymphoïde périphérique ou
le thymus.
Le clone cellulaire d’origine provient d’une des lignées
de différentiation d’une cellule souche pluripotentielle bloquée à un
stade particulier du processus de maturation.
L’histoire naturelle de ces maladies varie considérablement.
En
l’absence de traitement, le décès survient rapidement chez les patients
atteints d’un myélome multiple de stade III, d’une leucémie aiguë ou
d’un lymphome de grade élevé.
À l’opposé, les patients atteints de
leucémies chroniques, de gammopathie monoclonale de signification
indéterminée ou de lymphome de bas grade, peuvent survivre
longtemps, même en cas d’abstention thérapeutique.
La prise en charge
médicale du patient prend en considération son état physique, mais aussi
l’histoire naturelle de la maladie, d’où l’importance de facteurs
pronostiques.
Certains malades, peu symptomatiques et souffrant d’une
hémopathie maligne peu agressive et peu évolutive, bénéficient
éventuellement plus d’un suivi médical attentif que d’une
chimiothérapie.
4- Biologie moléculaire et traitement
:
Le développement des techniques de biologie moléculaire a bouleversé
la compréhension des cancers de la moelle osseuse.
L’analyse des
anomalies membranaires, chromosomiques et génétiques jette un
éclairage nouveau sur l’oncogenèse, le diagnostic et éventuellement, à
terme, le traitement des cancers du tissu hématopoïétique.
Les schémas thérapeutiques évoluent vers des associations de
substances de plus en plus efficaces.
Leurs effets néfastes sur le tissu
hématopoïétique normal résiduel sont réduits grâce à l’utilisation de
substances stimulant la croissance des différentes lignées cellulaires
indispensables.
Les techniques de greffe de moelle osseuse se
perfectionnent et dans certaines indications, la greffe de moelle est la
seule technique permettant une survie à long terme.
Le radiologue ne peut ignorer ces progrès.
Ils modifient les questions
éventuelles du clinicien et ils peuvent entraîner des complications dont
le diagnostic est plus du recours du spécialiste des maladies ostéoarticulaires (nécrose, goutte) que de l’hématologue.
5- Intégration de l’imagerie médicale à la prise en charge
des patients
:
Les apports potentiels de l’imagerie médicale sont nombreux.
Son rôle peut être considérable dans la détection des lésions
osseuses focales ou dans le bilan des complications osseuses,
articulaires ou neurologiques.
Les questions du clinicien sont essentiellement fonction du mode de
présentation initiale du patient.
En cas de symptôme osseux initial, le
rôle du radiologue est de reconnaître l’origine osseuse et non articulaire
du symptôme.
Dans la plupart des cas, les symptômes d’origine osseuse
sont absents ou discrets, et le radiologue intervient dans un second temps
pour le bilan d’extension (pathologie plasmocytaire ou lymphocytaire).
Dans le domaine des leucémies, le rôle de l’imagerie médicale des os est
négligeable.
L’appréciation de la réponse au traitement et la détection des rechutes
sont réalisées sur la base de l’évolution clinique et biologique.
Les
contributions éventuelles de l’imagerie sont variables selon chaque
pathologie.
Dyscrasies plasmocytaires
ou gammopathies monoclonales
:
A - Introduction
:
Les gammopathies monoclonales sont un groupe d’hémopathies
caractérisées par la présence d’une immunoglobuline (Ig) monoclonale
dans le sérum et parfois les urines.
Le myélome multiple est la forme
classique, mais d’autres entités sont individualisées en fonction de
caractéristiques cliniques et biologiques.
Bien que la séméiologie
radiologique de ces pathologies soit identique, il n’est pas inutile de
rappeler certaines entités cliniques, car la signification clinique des
anomalies ostéomédullaires peut varier d’une situation à l’autre.
– La gammopathie monoclonale de signification indéterminée (MGUS)
est une pathologie fréquente du sujet âgé (incidence de 3 % au-delà de
70 ans) caractérisée par la présence isolée d’une Ig monoclonale dans le
sang, sans anomalie médullaire.
La stabilité de la dysprotéinémie
dans le temps est pathognomonique de la forme bénigne de MGUS.
La
maladie évolue vers un myélome classique chez environ 4 % des
patients après un suivi de 10 ans.
– Le plasmocytome solitaire est une pathologie rare et très localisée,
caractérisée par la présence d’une seule lésion osseuse contenant des
plasmocytes anormaux, un myélogramme et une biopsie médullaire
normaux et une quantité très réduite d’Ig monoclonale dans le sang.
– Le myélome multiple est une forme relativement fréquente,
caractérisée par une infiltration médullaire par des plasmocytes
anormaux, un pic monoclonal élevé (IgG, D, A) et des lésions osseuses.
Le système clinique de stadification développé par Salmon et Durie et
basé sur des données biologiques reflétant le volume tumoral présumé
est utilisé couramment pour guider le traitement.
La
présence de plus d’une lésion osseuse lytique lors du bilan radiologique
du squelette entier, une hypercalcémie, une anémie, ou une insuffisance
rénale signent un stade avancé de la maladie (stade III selon Durie et
Salmon).
– La maladie de Waldenström est une forme rare de pathologie
plasmocytaire caractérisée par la présence d’une IgM dans le sérum.
Les
lésions osseuses sont moins fréquentes (mais similaires) que dans le
myélome multiple.
– L’amyloïdose est une présentation rare de dyscrasie plasmocytaire
dans laquelle les dépôts amyloïdes sont à l’avant plan par rapport à
l’infiltration plasmocytaire.
Les lésions osseuses lytiques présentent
volontiers des calcifications de type chondroïde.
Les manifestations
articulaires liées aux dépôts de bêta2-microglobuline sont identiques à
celles du dialysé (érosion marginale large, non circonscrite par un liseré
osseux, sans hyperostose réactionnelle ni chondrolyse).
– Le syndrome de POEMS est une entité observée chez l’adulte mâle,
caractérisée par une polyradiculonévrite progressive (P), une organomégalie (O : hépatosplénomégalie, adénopathie), des troubles
endocriniens (E : diabète, impuissance, gynécomastie), une Ig
monoclonale (M, le plus souvent de type M, parfois G), et des lésions
cutanées (S : pigmentation, sudation, hirsutisme).
B - Imagerie des dyscrasies plasmocytaires non traitées
:
1- Radiologie conventionnelle
:
L’anomalie radiologique principale est l’ostéolyse qui se manifeste de
façon focale et/ou diffuse.
L’ostéolyse résulte des relations particulières
entre les plasmocytes anormaux et les ostéoclastes.
Il existe de plus
une inhibition de l’activité ostéoblastique, ce qui explique le rendement
réduit de la scintigraphie, marqueur de l’activité ostéoblastique dans le
myélome multiple.
Occasionnellement, aucune anomalie osseuse n’est observée, même
dans les stades avancés de la maladie.
Exceptionnellement, des
lésions focales condensantes sont remarquées, éventuellement en
association avec le syndrome de POEMS.
* Ostéolyse focale
:
La lésion lytique focale associée aux dyscrasies plasmocytaires est une
lacune osseuse ronde ou ovalaire, bien circonscrite, à l’emporte-pièce,
sans sclérose périphérique ni apposition périostée.
Cette
morphologie est le témoin d’une lésion de croissance lente, qui n’est pas
sans rappeler l’évolution souvent lente de ces maladies.
Lorsque le foyer
d’ostéolyse déborde les contours de l’os, il reste parfois délimité par un
fin liseré périosté ossifié.
Au niveau du corps vertébral, la présence d’une
ostéolyse quasi-complète du réseau trabéculaire avec respect relatif de
la corticale des murs vertébraux ou des plateaux est une manifestation
évocatrice de la lésion plasmocytaire, la croissance lente de la lésion
autorisant un évidement vertébral et un respect relatif du réseau
cortical.
Chez certains patients, des lésions lytiques perméatives avec
rupture corticale et tuméfaction des tissus mous sont observées et
témoignent de lésions à croissance rapide.
Il faut noter que la taille des
lésions et le type d’ostéolyse sont souvent identiques pour un patient
donné.
La tomodensitométrie computérisée permet une analyse plus fine des
lésions osseuses et une étude des tissus mous adjacents tout en détectant
un nombre plus élevé de lésions que la radiographie standard.
De façon caractéristique, les foyers d’ostéolyse trabéculaire
ne sont pas délimités par un liseré de sclérose.
Les dimensions des
lésions sont variables.
Chez certains patients, de larges lésions de type pseudométastatique sont éparpillées dans le squelette.
Chez d’autres
patients, la tomodensitométrie révèle une dissémination de foyers
lytiques d’un diamètre proche du millimètre.
Le diagnostic différentiel des lésions lytiques multiples comporte
essentiellement les métastases et les lymphomes.
La présence de lésions
multiples de taille similaire constitue un élément en faveur du myélome.
Le diagnostic différentiel de la lésion focale lytique et expansive
comporte les métastases à croissance lente (rein, thyroïde), le kyste
anévrismal ou l’ostéoblastome.
* Ostéolyse diffuse
:
C’est une des manifestations fréquentes du myélome. Elle peut être
homogène et sévère, sans remaniement lacunaire ni hypertrophie du
réseau trabéculaire résiduel.
Elle présente parfois un aspect hétérogène
lié à la dissémination de foyers microlacunaires d’ostéolyse.
L’aspect microlacunaire est difficile à individualiser au niveau des vertèbres en
radiographie standard mais est observé en tomodensitométrie.
Dans les côtes et les os longs, le remaniement microlacunaire se
manifeste sous la forme de multiples encoches sur le versant endostéal
des corticales.
2- Imagerie par résonance magnétique
:
Diverses lésions médullaires sont rencontrées chez les patients myélomateux puisque des foyers de remplacement médullaire focal, une
infiltration diffuse homogène ou hétérogène peuvent être observés.
* Remplacement médullaire focal
:
Le remplacement médullaire focal par du tissu myélomateux
présente un signal faible en pondération T1 et élevé en pondération T2
(spin écho, écho de gradient, séquences d’inversion-récupération
[STIR]).
Les contours de la lésion sont généralement nets,
sans modification de la moelle adjacente.
Très exceptionnellement, le
remplacement focal présente un signal intermédiaire élevé sur toutes les séquences, y compris la séquence spin écho pondérée T1.
La
lésion ne devient visible que sur les images pondérées T2 ou parfois
après injection de contraste.
Après injection de gadolinium, les
lésions focales présentent un rehaussement systématique mais variable
de l’intensité du signal.
* Remplacement diffus homogène
:
En cas de remplacement diffus et homogène, la moelle osseuse
présente un signal faible en pondération T1, identique ou inférieur à
celui des disques intervertébraux normaux.
Sur les images pondérées
T2, le signal médullaire est diffusément élevé ou très hétérogène suite à
la présence de lésions focales de signal élevé, contrastant par rapport à
la moelle adjacente de signal plus faible.
Après injection intraveineuse
de dérivé de gadolinium, il existe un rehaussement variable de l’intensité
du signal osseux, généralement précoce.
Quand les modifications de
signal après injection sont discrètes, le rehaussement se traduit à la fois
par une augmentation subtile de l’intensité du signal osseux et par une
diminution paradoxale du signal des disques intervertébraux.
* Remplacement diffus hétérogène
:
Le remplacement diffus hétérogène ou aspect « poivre et sel »,
est caractérisé par la présence d’une dissémination de foyers de signal
faible en pondération T1 et de signal variable en pondération T2, le plus
souvent élevé, au sein d’une moelle normale en apparence.
Les dimensions de ces nodules sont de l’ordre de quelques
millimètres, mais des zones de confluence peuvent créer de véritables
foyers de remplacement focal.
Cet aspect « poivre et sel » de la moelle
n’est pas toujours aisément différencié d’une moelle normale
hétérogène.
La séquence en pondération T2 ou l’injection de dérivés de
gadolinium permettent de reconnaître le caractère pathologique de cet
aspect lorsque les lésions focales ont un signal élevé sur ces images,
alors qu’une moelle hématopoïétique hétérogène est le plus souvent de
signal intermédiaire en T2 et T1 après contraste.
Le caractère
pathologique de l’aspect « poivre et sel » est également plus aisé à
reconnaître sur les images du bassin que sur celles du rachis, car les
nodules apparaissent de façon plus distincte dans la moelle pelvienne
moins riche.
* Aspect normal
:
La moelle osseuse peut présenter un aspect strictement normal dans
toutes les séquences, alors qu’une infiltration plasmocytaire est
démontrée à l’examen microscopique.
Cet aspect est observé chez 25 à 50 % des patients atteints d’un myélome multiple de stade I selon la
classification de Durie et Salmon.
Il est observé chez environ 20 %
des patients atteints d’un myélome multiple de stade III.
* Remarques
:
Ces catégories lésionnelles basées sur l’aspect IRM sont difficilement
transposables en termes de catégories de patients.
Chez un même
patient, les aspects lésionnels varient d’une région à l’autre.
Dans une
même région anatomique, des foyers de remplacement peuvent être
associés à une dissémination micronodulaire ou à une infiltration diffuse
homogène.
De plus, il ne semble pas exister de parallélisme entre le type
de lésion en IRM et la distribution des plasmocytes à l’examen
histologique.
Il existe toutefois un parallélisme relatif entre l’importance des lésions
et certains paramètres biologiques indicateurs du volume tumoral.
L’aspect « poivre et sel » semble être observé plus fréquemment dans
les formes de bas grade et est rare dans le myélome multiple de stade III.
3- Fractures
:
L’infiltration myélomateuse du squelette s’accompagne d’une
résorption ostéoclastique accrue menant à la fragilisation osseuse et
prédisposant à la survenue de fractures.
Parmi ces fractures, le tassement
vertébral constitue une complication très fréquente et potentiellement
grave, puisque l’on estime que 80 %des patients atteints d’un myélome
multiple vont présenter des tassements avec, dans 10 à 15 %des cas, des
compressions médullaires ou radiculaires.
Fractures pathologiques par excellence, puisque associées à une
pathologie néoplasique, les fractures du patient myélomateux se
distinguent par leur aspect et leur distribution, des fractures associées
aux métastases ou aux lymphomes.
Les fractures vertébrales
observées chez le patient myélomateux ont une distribution semblable à
celle observée chez les patients atteints d’une ostéoporose sénile.
Elles
se développent essentiellement dans la région de la charnière
dorsolombaire et les fractures sus-jacentes à D4 sont rares.
De plus, les
aspects IRM et radiologiques des tassements vertébraux observés chez
le patient myélomateux sont proches de ceux observés dans les
tassements bénins.
Dans une série de 50 patients atteints de myélome
multiple de stade III et observés systématiquement en IRM au
diagnostic, 17 % des fractures présentaient un aspect malin et 40 %
étaient récentes et d’aspect bénin.
La similitude d’aspect et de
distribution entre les fractures vertébrales associées au myélome ou à
l’ostéoporose peut s’expliquer par le fait que, dans les deux situations,
la résorption osseuse est diffuse.
Il en résulte une réduction
diffuse de la résistance osseuse aux contraintes biomécaniques, alors que
cette fragilisation est focale dans la pathologie métastatique et lymphomateuse (foyer d’ostéolyse).
C - Imagerie du myélome traité
:
Le but de la chimiothérapie est d’atteindre une phase dite de plateau
pendant laquelle aucune manifestation biologique relative au myélome
n’est détectée.
Cette période est transitoire car la rechute est
quasiment systématique si aucune greffe de moelle osseuse n’est
réalisée.
L’aspect radiologique et l’IRM des lésions se modifie durant le
traitement.
La signification clinique et les implications thérapeutiques
de ces modifications restent, pour une large part, inconnues.
La
démonstration de nouvelles lésions osseuses ou médullaires semble être
le meilleur signe de maladie active.
Les relations entre l’évolutivité de
la maladie établie sur base biologique ou radiologique ne sont pas encore
établies.
1- Radiologie
:
Dans la toute grande majorité des cas, les modifications induites par le
traitement et détectables par la radiographie portent sur la périphérie des
lésions focales et il n’existe que peu ou pas de modifications décelables
au sein des lésions.
Dans le cas de lésions lytiques expansives, le
traitement semble induire une ossification périostée continue et une
régression des dimensions de la lésion.
En cas d’ostéoporose
diffuse, l’aspect radiologique est stable, en dehors de l’apparition de
tassements vertébraux.
L’introduction récente des diphosphonates dans
la thérapeutique du myélome pourrait modifier cet aspect, suite à
l’apparition d’un épaississement du réseau trabéculaire résiduel.
Le scanner confirme ces changements mais démontre mieux que la
radiologie standard les modifications induites par le traitement dans les
lésions lytiques trabéculaires.
Sous traitement, l’absence
d’ostéolyse persiste, et aucun liseré de sclérose n’apparaît.
Occasionnellement, le scanner démontre l’apparition de tissu graisseux
dans la périphérie des lésions traitées.
2- Imagerie par résonance magnétique
:
En cas de lésion focale, les traitements entraînent souvent, mais pas
systématiquement, une diminution des dimensions des lésions.
Dans certains cas, un liseré périphérique de signal graisseux apparaît.
Les modifications centrales résiduelles ont un signal variable, de faible
à élevé, en pondération T2.
Après injection intraveineuse de gadolinium,
un rehaussement de signal peut être présent, absent ou hétérogène
(centre avasculaire).
Ces différents aspects peuvent être observés
chez un même patient et la corrélation entre les données du suivi clinique
et IRM est quasiment impossible à réaliser.
Qui plus est, des
prélèvements tissulaires au sein de lésions avasculaires présumées
nécrotiques peuvent montrer la présence de plasmocytes anormaux.
En cas d’infiltration médullaire diffuse initiale, le traitement entraîne
généralement une augmentation diffuse de l’intensité du signal sur les
images pondérées T1, témoignant d’une augmentation de la proportion
des adipocytes.
L’aspect médullaire peut alors être homogène, mais, le
plus souvent, il est hétérogène suite à la présence de multiples foyers de
remplacement médullaire.
Ces foyers étaient souvent présents avant le
traitement sous la forme de lésions focales de signal élevé en
pondération T2 et étaient masqués sur les images pondérées T1 par
l’infiltration diffuse.
La radiothérapie de lésions focales induit une réduction rapide des
dimensions de la composante extraosseuse et une réduction plus lente
de la taille de la composante intraosseuse.
Des zones centrales avasculaires, a priori nécrotiques, sont souvent observées sur les images
pondérées T1 obtenues après injection de gadolinium.
Le suivi à long
terme par IRM des segments rachidiens irradiés montre un taux
significativement moindre de survenue de nouveaux tassements et de
récidives lésionnelles focales que dans les segments non irradiés.
Ce
mécanisme protecteur paraît attribuable à la fois à un effet tumoricide
local et à de profondes modifications du compartiment médullaire, avec
disparition des constituants médullaires, cellulaires, vasculaires et
conjonctifs, au profit d’une substitution graisseuse.
Les cures de chimiothérapie et l’irradiation corporelle totale, réalisées
dans le cadre de la greffe osseuse, entraînent des modifications
identiques, auxquelles s’ajoutent les effets des facteurs de croissance et
des transfusions.
Sur les images en écho de gradient, le signal de
la moelle osseuse est souvent très faible, probablement suite à une
surcharge en fer de la moelle.
D - Signification pronostique de l’imagerie médicale
:
La signification pronostique des anomalies ostéomédullaires, en termes
d’évolution spontanée de la maladie, de réponse au traitement, de survie
à long terme, et de risque fracturaire doit impérativement être établie en
tenant compte de chaque forme de dyscrasie plasmocytaire, vu la
diversité des évolutions spontanées et des thérapeutiques.
1- Radiologie
:
Traditionnellement, la radiologie standard joue un rôle clef dans la prise
en charge du patient porteur d’une gammopathie monoclonale.
De
plus, la présence d’une lésion lytique lors du bilan radiologique initial
est un signe indirect de masse tumorale élevée et annonce une maladie
dont le pronostic spontané est très réservé.
Selon la classification
proposée par Durie et Salmon en 1975 et encore actuellement
d’actualité, tout patient porteur d’au moins deux lésions lytiques
détectées lors du bilan radiologique présente un myélome de stade III, quel que soit son bilan biologique.
Toutefois, parmi les patients de stade III, l’absence de lésion osseuse radiologique semble être de mauvais
pronostic.
2- Imagerie par résonance magnétique
:
Incontestablement, l’IRM permet de détecter plus de lésions médullaires
que la radiologie standard, pour une région donnée du squelette.
Elle permet également une analyse plus détaillée des lésions.
La
valeur pronostique de cette technique a déjà été ébauchée dans certaines
situations cliniques.
* Évolution spontanée de la maladie
:
Trois entités particulières bénéficient, soit d’une abstention
thérapeutique (MGUS, myélome multiple de stade I), soit d’une
thérapeutique éventuellement locale (plasmocytome solitaire).
Dans ces
trois entités, le bilan radiographique doit être normal (MGUS) ou ne peut
révéler qu’une seule lésion osseuse lytique (plasmocytome solitaire,
stade I).
Que signifie, dans ce contexte, la présence d’autres lésions
objectivées par IRM ?
Dans ces trois situations cliniques, la présence
d’anomalies médullaires occultes à la radiographie et détectées par IRM
semble être de mauvais pronostic.
En effet, les patients présentant un plasmocytome solitaire traité par radiothérapie qui ont des anomalies
additionnelles objectivées par IRM, ont une réponse biologique et
clinique nettement moins satisfaisante que ceux dont l’IRM est normale.
Les patients atteints d’une MGUS ou d’un myélome
multiple de stade I dont l’IRM est anormale présentent une survie sans
traitement plus courte et une évolution plus rapide vers un stade plus
avancé de la maladie que ceux dont l’IRM initiale était normale.
L’absence d’anomalie en IRM n’implique pas la stabilité à long
terme de la maladie mais l’évolution vers un stade plus évolué de la
maladie se fera de façon statistiquement significative plus tardive qu’en
cas d’IRM anormale.
* Réponse à la chimiothérapie, survie à long terme
:
Parmi les patients atteints de myélome multiple de stade II ou III selon
Durie et Salmon, ceux dont l’IRM est normale se distinguent par une
meilleure réponse à la chimiothérapie initiale de ceux dont l’IRM
montre des lésions focales ou une infiltration diffuse.
Ce groupe de
patients montre également une survie meilleure avec un taux de survie à
5 ans de 70 % contre un taux de 28 % dans le groupe des patients
présentant des anomalies médullaires focales ou diffuses en IRM.
Ces données ont été établies dans une série de patients n’ayant pas
bénéficié de greffe de moelle osseuse et cette technique pourrait modifier
la valeur pronostique de l’IRM initiale.
Risque fracturaire
Dans une population de patients présentant un myélome multiple de
stade III, le risque de développer une fracture vertébrale varie en
fonction de la calcémie initiale et de l’aspect de la moelle en IRM.
Il
semble que les patients ayant, lors de l’évaluation IRM préthérapeutique, une moelle osseuse d’aspect normal, ou présentant
moins de dix lésions focales, présenteront des tassements vertébraux
moins nombreux et plus tardifs dans le décours de la maladie que les
patients dont l’IRM initiale montre soit plus de dix lésions focales, soit
une infiltration diffuse de la moelle osseuse.
Dans ces deux dernières sous-populations, le risque fracturaire relatif est six à 11 fois supérieur à
celui observé parmi les deux premiers groupes de patients.
Partant de la sensibilité de l’IRM pour la détection des lésions myélomateuses rachidiennes focales et du postulat que de telles lésions
pourraient être à l’origine d’une fragilisation osseuse locale précipitant
la survenue d’une fracture, il est intéressant de voir si l’IRM permet
d’apprécier le risque fracturaire d’une vertèbre donnée.
Un étude basée
sur le suivi systématique de patients avant et pendant le traitement
indique que l’IRM ne permet pas de détecter la vertèbre qui va présenter
ultérieurement une fracture.
Près de deux tiers des tassements
vertébraux ne sont précédés d’aucune anomalie médullaire focale
décelée en IRM.
Pour l’autre tiers des tassements précédés d’une lésion
focale, il n’existe pas de différence significative entre la taille des lésions
suivies d’un tassement et celle des lésions contemporaines non suivies
de fracture.