En théorie, le diagnostic de pneumopéritoine est du ressort des clichés
standards d’ASP, et le diagnostic de pneumopéritoine entraîne une
laparotomie en urgence.
En réalité, des examens d’imagerie autres que
l’ASP sont parfois nécessaires pour faire le diagnostic de
pneumopéritoine, et l’attitude thérapeutique devant un pneumopéritoine
peut dépendre de sa cause.
Moyens d’imagerie diagnostiques
:
* Abdomen sans préparation
:
Le cliché d’ASP en position debout, centré sur les hémicoupoles
diaphragmatiques, objective le mieux le pneumopéritoine sous forme
d’un croissant clair, gazeux, sous-diaphragmatique, à ne pas confondre
avec une interposition colique hépatodiaphragmatique (syndrome de
Chilaiditi), ou avec l’image claire du liseré graisseux sous-péritonéal
bordant la face inférieure du diaphragme.
Lorsque le patient ne peut pas tenir en position debout ou assise, l’ASP
est réalisé en décubitus dorsal avec un rayonnement X horizontal, ou
mieux, en décubitus latéral gauche avec un rayonnement X vertical.
Le
pneumopéritoine est recherché sous forme d’une clarté aérique de siège
sous-pariétal antérieur, lorsque le patient est en décubitus, ou de siège
interhépatopariétal lorsque le patient est en décubitus latéral gauche.
Lorsque le cliché est réalisé en décubitus dorsal avec un rayon vertical
parce que le patient ne peut pas être mobilisé ou que le pneumopéritoine
n’est pas suspecté, un certain nombre de signes ont été décrits comme
témoignant d’un pneumopéritoine.
Le plus facile à identifier est la pariétographie digestive (la paroi du tube digestif étant silhouettée par
l’air intraluminal digestif et l’air intrapéritonéal).
Cependant, ce signe
témoigne d’une quantité importante d’air extradigestif et d’air
intraluminal mais également d’un épanchement intrapéritonéal
refoulant les anses digestives en avant, leur permettant ainsi d’être
entourées par l’air extradigestif qui siège en position antérieure.
La
visualisation spontanée de ligaments sus- ou sous-mésocoliques comme
les ligaments ombilicaux, le ligament falciforme, ou la portion
extrahépatique du ligament rond, sont également des signes de
pneumopéritoine, au même titre que la visualisation spontanée du bord
inférieur du foie, ou des contours de la vésicule biliaire.
Ces signes restent subjectifs, manquent de sensibilité en n’identifiant
que des pneumopéritoines abondants et manquent de spécificité
puisqu’une quantité importante de graisse péritonéale peut silhouetter
un ligament ou la paroi d’un viscère et peut faire croire à tort à un
pneumopéritoine.
* Tomodensitométrie
:
Les limites de l’ASP dans le diagnostic de pneumopéritoine, justifient
l’évaluation du scanner pour ce diagnostic.
La TDM apparaît très
performante aussi bien dans les pneumopéritoines en péritoine libre que dans les pneumopéritoines cloisonnés dans un récessus péritonéal.
Dans
les pneumopéritoines en péritoine libre, de tout petits pneumopéritoines
peuvent ne pas être identifiés sur les radiologies conventionnelles mais
retrouvés uniquement sur la TDM.
Dans les pneumopéritoines
cloisonnés, la TDM a un grand intérêt pour affirmer le caractère
extradigestif des certaines images aériques.
La topographie de l’air extradigestif permet d’évoquer le siège de la perforation. Dans une
perforation duodénale, l’air extradigestif moule le duodénum ou siège
dans l’espace pararénal antérieur.
Dans une perforation gastrique ou
bulbaire, l’air piégé siège dans l’arrière-cavité des épiploons.
Dans une perforation sigmoïdienne, l’air piégé siège dans le
mésosigmoïde.
* Échographie
:
En échographie, le pneumopéritoine est visualisé sous la forme
d’images hyperéchogènes linéaires ou punctiformes, avec
artefact postérieur en « queue de comète » ou en « anneau ».
L’air intrapéritonéal sera différencié de l’air intradigestif, d’une part par son
absence de cloisonnement par une paroi digestive et d’autre part, par sa
mobilité, lorsque le patient passe du décubitus dorsal au décubitus
latéral.
* Étiologie
:
Les causes de pneumopéritoine sont multiples. En pratique, un
pneumopéritoine s’observe dans trois circonstances principales : en postchirurgical, dans le cadre d’un traumatisme, dans le cadre d’un
abdomen aigu non traumatique.
* Pneumopéritoine postchirurgical
:
Les trois quarts des patients ont un pneumopéritoine vu sur l’ASP
après une chirurgie abdominale ouverte.
Ce pneumopéritoine est résorbé
dans la grande majorité des cas dans les 10 jours suivant l’intervention.
Contrairement à ce qui était pressenti, la fréquence et la durée des
pneumopéritoines postopératoires sont similaires dans les chirurgies coelioscopiques et dans les laparotomies conventionnelles.
Tout geste intrapéritonéal peut être à l’origine d’un pneumopéritoine.
Ainsi, la
fréquence du pneumopéritoine en TDM était de 30 % chez les patients
ayant bénéficié d’une dialyse péritonéale même en l’absence de
perforation digestive.
Aussi, dans ce cadre-là, la présence d’un
pneumopéritoine ne permet pas d’affirmer avec certitude une
perforation digestive associée.
De même, dans les suites précoces d’une
intervention portant sur le tube digestif, un pneumopéritoine ne
témoigne pas nécessairement d’un lâchage de suture.
* Pneumopéritoine d’origine traumatique
:
La constatation d’un pneumopéritoine par la radiologie ou par le
scanner, aux décours immédiats d’un traumatisme fermé de l’abdomen
est un signe très évocateur de rupture du tube digestif et doit faire
rechercher une lésion du duodénum, siégeant le plus souvent au niveau
du troisième duodénum, une lésion grêle, siégeant le plus souvent au
niveau de l’iléon, ou une lésion du côlon, siégeant préférentiellement au
niveau des côlons ascendant et sigmoïde.
Dans certains cas, le pneumopéritoine peut avoir d’autres origines :
– il peut être en rapport avec le passage d’air à travers le péritoine
pariétal antérieur à partir d’un emphysème sous-cutané abdominal
important ;
– il peut également être en rapport avec le passage d’air susdiaphragmatique.
La voie de passage la plus classique d’air susdiaphragmatique
vers le péritoine passe par la constitution d’un
pneumomédiastin, la diffusion de ce pneumomédiastin vers l’espace rétrocrural le long de l’aorte et de la veine cave inférieure jusqu’au
rétropéritoine.
À partir de ce rétropéritoine, l’air diffuse le long du
mésentère, avec rupture du feuillet péritonéal et passe en intrapéritonéal.
L’air sus-diaphragmatique peut aussi atteindre l’espace intrapéritonéal
à travers des defects pleuraux diaphragmatiques et péritonéaux, en
particulier lorsque l’espace pleural et le diaphragme sont distendus,
expliquant ainsi la survenue de pneumopéritoine chez des patients
porteurs de pneumothorax et ventilés en pression positive continue ;
– il peut être observé dans un traumatisme ouvert, en l’absence de
rupture d’un organe creux, et traduire uniquement le passage aérique
transpariétal.
Enfin, dans le cadre des perforations digestives traumatiques, doivent
être évoquées les perforations d’origine iatrogène qui sont surtout le fait
de manoeuvres instrumentales endoluminales (dilatation de sténose,
biopsie profonde, accident de progression d’un endoscope, embrochage
lors d’une ponction transpariétale ou lâchage de suture).
* Pneumopéritoine dans le cadre d’un abdomen aigu
non traumatique
:
Dans ce cadre, le pneumopéritoine signe la perforation d’un organe
creux.
Le siège éventuel de bulles d’air piégées permet d’orienter sur la
cause de la perforation digestive, ce qui peut avoir une incidence sur le
type de chirurgie réalisée (par exemple, chirurgie coelioscopique des
perforations d’ulcères duodénaux).
Les principales causes de perforations digestives non traumatiques sont
les perforations d’ulcère gastrique ou duodénal, les perforations sur
diverticulose ou diverticulite, et les perforations du cæcum en amont
d’un cancer colique sténosant qui représente la principale cause des
perforations coliques non traumatiques.
* Pneumopéritoine sans contexte d’orientation
:
Dans un certain nombre de cas, un pneumopéritoine est retrouvé en
dehors d’un tableau d’abdomen aigu traumatique ou non, et en l’absence
de procédure diagnostique ou thérapeutique pouvant être à l’origine
d’un pneumopéritoine.
Il faudra de principe rechercher une maladie
kystique de la paroi de tube digestif (pneumatose kystique colique ou
grêle), et savoir qu’une cause possible de pneumopéritoine est le passage
d’air par aspiration vaginale (exercice physique dans le post-partum,
cunnilingus, douche vaginale...).
B - Épanchement liquidien
:
1- Sémiologie
:
* Échographie
:
C’est le mode d’imagerie le plus sensible pour la détection d’un
épanchement péritonéal. Des volumes aussi petits que 5 à 10 mL
peuvent être visualisés.
Aussi, les petites quantités de liquide péritonéal
présentes chez les femmes durant toutes les phases du cycle menstruel
sont vues en échographie, dans le cul-de-sac de Douglas.
En échographie, les épanchements péritonéaux liquidiens apparaissent anéchogènes, mobiles, homogènes, et s’accompagnent d’un
renforcement postérieur.
Les épanchements libres ne déplacent pas et ne
compriment pas les organes mais s’insinuent entre eux. Ils sont
mobilisés par la pression de la sonde et par les changements de position
du patient.
Les épanchements de petite abondance sont collectés dans les zones
déclives : cul-de-sac de Douglas, poche de Morison.
Les épanchements
plus abondants vont se collecter également dans les gouttières paracoliques, dans l’espace sous-mésocolique en étirant les replis
mésentériques, dans les espaces sous-phréniques droit et gauche, et dans
le pelvis.
* Tomodensitométrie
:
Les épanchements péritonéaux sont également bien visualisés en TDM,
qui est surtout utile pour l’orientation étiologique, par la
mesure des valeurs d’atténuation de l’épanchement, par l’étude de la
distribution de l’épanchement, mais surtout par la mise en évidence de
nodules ou d’épaississements péritonéaux et de formation de septa ou
d’encoches des contours hépatiques et spléniques, évocateurs d’une
atteinte néoplasique.
* Imagerie par résonance magnétique
:
Comme l’échographie ou la TDM, l’IRM permet de mettre en évidence
des petits épanchements péritonéaux.
Elle peut amener des éléments
d’orientation sur la nature d’un épanchement : la présence d’un hypersignal en pondération T1, témoigne de sang ou d’une
concentration protéique élevée et s’observe dans les hémopéritoines, les
ascites infectées ou les ascites mucineuses.
D’autre part, par l’abord multicoupes (notamment coupes frontales et sagittales) qu’elle permet,
l’IRM, sensibilisée par l’injection intrapéritonéale de sérum salé et
réalisée avec des coupes très pondérées en T2, pourrait, pour certains
auteurs, favoriser la détection de petites carcinoses péritonéales.
2- Diagnostic différentiel
:
Les pathologies qui posent des problèmes de diagnostic différentiel avec
un épanchement péritonéal sont essentiellement les volumineuses
tumeurs kystiques abdominales, les épanchements pleuraux et les
épanchements sous-capsulaires hépatiques ou spléniques.
* Tumeurs kystiques abdominales
:
Parmi les tumeurs kystiques abdominales, les très grosses tumeurs
kystiques de l’ovaire à développement pelviabdominal peuvent parfois
poser des problèmes diagnostiques différentiels.
C’est la reconnaissance
de la paroi profonde qui permet d’affirmer le diagnostic de kyste, à
l’échographie comme au scanner.
* Épanchement pleural
:
La distinction entre un épanchement liquidien pleural droit et un
épanchement péritonéal périhépatique parfois associé, peut être difficile.
Cependant, quatre signes maintenant bien connus en échographie
comme enTDMpermettent le diagnostic différentiel entre épanchement
péritonéal et épanchement pleural :
– un épanchement péritonéal ne siège jamais en arrière de la zone non péritonéisée du foie, un épanchement siégeant en arrière de cette zone
est d’origine pleurale, rétropéritonéale ou sous-capsulaire hépatique ;
– un épanchement péritonéal siège en dedans du diaphragme, alors
qu’un épanchement pleural siège en dehors du diaphragme ;
– un épanchement péritonéal ne déplace jamais les piliers du
diaphragme en dehors, à la différence d’un épanchement pleural ;
– un épanchement péritonéal a une interface nette et bien définie avec
le parenchyme hépatique, alors que l’interface entre un épanchement
pleural et le parenchyme hépatique est mal définie.
* Épanchement sous-capsulaire
:
Les collections sous-capsulaires hépatiques ou spléniques se moulent à
la forme de l’organe impliqué.
Les collections sous-capsulaires
hépatiques sont en général limitées par le ligament falciforme, mais, en
revanche, peuvent s’étendre en arrière et en dedans au niveau de la zone
non péritonéisée du foie.
D’autre part, en échographie, une collection sous-capsulaire se mobilise de la même façon que l’organe impliqué au
cours des mouvements respiratoires alors que le foie ou la rate
« glissent » à l’intérieur d’un épanchement intrapéritonéal.
3- Étiologie
:
* Ascite :
C’est une augmentation du volume liquidien intrapéritonéal.
L’ascite
peut être un transsudat ou un exsudat riche en protéines.
La présence de
fins échos au sein de l’ascite en ultrasonographie, et l’augmentation de la densité de l’épanchement en TDM, témoignent d’une richesse
importante en protéines et sont des arguments en faveur d’une exsudat.
En revanche, un rehaussement tardif après injection de produit de
contraste n’a aucune valeur d’orientation pour un transsudat ou un
exsudat.
Il s’observe chez près de la moitié des patients et résulte
vraisemblablement d’une augmentation de la perméabilité péritonéale.
Devant une ascite, un certain nombre de signes échographiques ouTDM
ont été identifiés en faveur de son origine néoplasique :
– dans une ascite d’origine néoplasique, l’intestin grêle est plaqué
contre le péritoine pariétal postérieur alors que dans une ascite bénigne,
les anses grêles flottent librement ;
– les ascites néoplasiques sont souvent cloisonnées et réalisent une
empreinte sur les parenchymes hépatiques ou spléniques au lieu de
s’adapter à la forme des organes ;
– les ascites néoplasiques sont peu mobiles aux changements de
position ;
– le développement d’un épanchement péritonéal au sein de l’arrièrecavité
des épiploons, serait également pour certains auteurs un
argument en faveur d’une ascite néoplasique. Dans une ascite d’origine
bénigne, l’épanchement péritonéal prédomine le plus souvent dans la
grande cavité péritonéale (sauf lorsque l’épanchement est dû à une
pancréatite ou à une perforation d’ulcère, cas dans lesquels l’ascite
prédomine dans l’arrière-cavité des épiploons) ;
– la présence d’un épaississement homogène, circonférentiel, de la
paroi vésiculaire, accompagnant l’ascite, traduit une hypertension
portale et est donc un argument contre une origine néoplasique de
l’ascite ;
– enfin, comme nous le verrons dans le paragraphe sur les carcinoses
péritonéales, l’identification de nodules péritonéaux, d’un
épaississement diffus ou localisé du péritoine ou des mésos, ou d’une
prise de contraste anormale du péritoine pariétal, restent les meilleurs
signes pour affirmer le caractère néoplasique d’une ascite.
* Hémopéritoine
:
Les arguments en faveur d’un hémopéritoine devant un épanchement
péritonéal sont l’hyperéchogénécité de l’épanchement (mieux mis en
évidence avec des sondes haute fréquence) en échographie et
l’hyperdensité en TDM.
Cette hyperéchogénécité et cette hyperdensité
sont surtout visualisées dans les hémopéritoines récents.
Cependant,
même les hémopéritoines récents peuvent être de densité purement
liquidienne (inférieure à 20 UH).
La densité basse de l’hémopéritoine
s’explique alors par une transsudation péritonéale accompagnant
l’hémopéritoine et le diluant, ou par une anémie associée.
La mise en évidence d’un hématome au sein d’un méso ou d’une
lésion parenchymateuse hépatique ou splénique est fondamentale pour
préciser l’origine de l’hémopéritoine, que l’on soit dans un cadre posttraumatique
ou non.
* Ascite chyleuse
:
Elle est due à une interruption du flux lymphatique sur son trajet, de la
villosité intestinale jusqu’à l’abouchement du canal thoracique dans la
veine brachiocéphalique gauche.
Les principales causes d’ascites
chyleuses sont les lymphomes, les interruptions iatrogènes chirurgicales
ou traumatiques des canaux lymphatiques et les cirrhoses.
Les ascites chyleuses sont le plus souvent de densité liquidienne.
Dans
certains cas, la visualisation d’un niveau liquide/liquide, la partie
proclive du contenu étant de densité et d’échogénicité graisseuse
(hypodense, hyperéchogène), permet de caractériser une ascite
chyleuse.
* Cholépéritoine
:
Souvent important en volume, il doit être suspecté devant l’apparition
brutale d’un épanchement après un geste chirurgical, biopsique ou de
radiologie interventionnelle sur les voies biliaires.
Il n’a pas de caractère
particulier, en dehors de sa propension à s’étendre à l’ensemble de la
cavité péritonéale, reflétant la fluidité importante de la bile.
La densité
des cholépéritoines est liquidienne mais peut s’élever en cas d’infection.
* Épanchements péritonéaux d’urine
:
Ils s’observent dans le cadre des lésions traumatiques de la vessie pour
lesquelles les ruptures intrapéritonéales sont plus rares que les ruptures
extrapéritonéales.
Elles sont dues plus souvent à un embrochage osseux
qu’à un phénomène d’hyperpression sur vessie pleine.
La déchirure
intéresse le dôme vésical et son adhérence péritonéale.
L’origine de
l’épanchement est bien visualisée sur les coupes TDM réalisées
tardivement après injection intraveineuse de produit de contraste, qui
montrent alors une péritonéographie opaque.
* Ascite gélatineuse dans le cadre de pseudomyxomes péritonéaux
:
Les pseudomyxomes péritonéaux représentent une pathologie rare,
associant un épanchement péritonéal gélatineux et des dépôts mucineux
péritonéaux.
D’après des travaux récents, l’origine des pseudomyxomes péritonéaux est presque toujours appendiculaire à
partir d’une lésion allant du mucocèle jusqu’à l’adénocarcinome.
Des
lésions ovariennes classiquement décrites dans la littérature, gastriques,
coliques, pancréatiques ou de la voie biliaire, seraient des extensions
secondaires à partir de lésions appendiculaires.
Même si l’aspect de l’épanchement peut être celui d’une ascite banale,
il existe un certain nombre d’arguments d’imagerie en faveur d’un pseudomyxome péritonéal :
– le caractère relativement échogène de l’épanchement en échographie
et sa densité hétérogène en TDM, avec coexistence de composants de
densité pseudograisseuse et de composants de densité supérieure à celle
de l’eau ;
– la position centrale des anses digestives qui sont plaquées contre le
péritoine pariétal postérieur (comme dans les ascites néoplasiques) ;
– la présence de septa avec formation de logettes pseudokystiques ;
– la présence d’encoches des contours hépatiques par les collections mucineuses ;
– la présence de calcifications péritonéales ;
– enfin, la visualisation d’une masse liquidienne (mucocèle) ou solide
d’origine appendiculaire, associée à un épanchement péritonéal est
également un argument diagnostique de grande valeur.
* Kystes péritonéaux
:
Encore appelés inclusions kystiques multiloculaires, mésothéliomes
kystiques bénins, pseudokystes du péritoine, ils représentent une cause
classique de kystes pelviens.
Ils surviennent chez la femme non
ménopausée et sont liés à une absence de résorption du liquide péritonéal
normalement produit au niveau de l’ovaire et de l’annexe.
Lorsque les
propriétés de résorption du péritoine sont altérées et qu’il existe des
adhérences, le liquide péritonéal stagne, induisant une réaction mésothéliale métaplasique, ainsi qu’une réaction de fibrose.
Les
patientes non ménopausées avec des adhérences pelviennes présentent
donc des risques de développement de kyste péritonéal.
Ces adhérences
sont le plus souvent dues à une chirurgie pelvienne, plus rarement à un
traumatisme, à une maladie inflammatoire du pelvis, ou à une
endométriose.
Les kystes péritonéaux se présentent sous la forme d’une masse
totalement anéchogène en échographie, à contenu strictement liquidien en TDM, non rehaussée, à parois fines, présentant inconstamment des
cloisons, et s’étalant entre les structures abdominales de la région
pelvienne.
Le contexte clinique, et surtout les rapports très
étroits que le kyste péritonéal a avec l’ovaire homolatéral, paraissant
siéger le plus souvent à l’intérieur du kyste, sont des arguments en
faveur d’un kyste péritonéal.
Devant une masse liquidienne du pelvis,
les diagnostics différentiels incluent les tumeurs kystiques de l’ovaire,
les kystes paraovariens et les hydrosalpinx.
Tumeurs du péritoine
:
A - Carcinose péritonéale
:
1- Physiopathologie
:
La dissémination intrapéritonéale de toute tumeur dont le point de départ
n’est pas le péritoine lui-même, est appelée carcinomatose péritonéale.
L’atteinte péritonéale se fait selon quatre voies.
* Par contiguïté
:
Les cellules tumorales sont capables de migrer au travers du tissu
interstitiel par le biais de substances enzymatiques et de facteurs chémotactiques et de motilité.
C’est, par exemple, le mode d’extension
des cancers du col utérin qui vont envahir la paroi antérieure du rectum,
ou le mode d’extension des cancers de l’estomac s’étendant aux
ligaments gastrocoliques et au côlon transverse.
* Par voie hématogène (tube digestif, sein)
:
Les cellules s’arrêtent au niveau du premier lit capillaire qu’elles
rencontrent, et peuvent générer des métastases si elles trouvent les
facteurs favorables à leur croissance.
* Par voie lymphatique (ovaire)
:
Il existe en particulier des plexus lymphatiques situés de part et d’autre
du diaphragme, se comportant comme de véritables capteurs de cellules
tumorales circulant dans la cavité péritonéale et expliquant la fréquence
des localisations péritonéales péridiaphragmatiques droites observées
dans les cancers de l’ovaire.
* Par diffusion péritonéale
:
Il s’agit du mode le plus fréquent de dissémination.
Dès lors qu’une
tumeur franchit la séreuse digestive ou la capsule périhépatique ou
périsplénique, une dissémination directe de la cavité péritonéale est
possible.
Les cellules tumorales essaiment dans le liquide péritonéal.
Elles provoquent une inflammation de la séreuse péritonéale et induisent
une sécrétion fibrineuse facilitant leur implantation.
Ce phénomène
explique que les nodules de carcinose péritonéale développés à partir de
cellules tumorales résiduelles à la suite d’une exérèse chirurgicale,
s’implantent de façon préférentielle dans les zones de cicatrisation.
En
effet, lors de l’exérèse de lésions macroscopiques, il persiste au sein de
la cavité péritonéale un certain nombre de cellules tumorales qui
adhèrent au gel de fibrine recouvrant les zones dépéritonéisées, gel de
fibrine d’ailleurs responsable des adhérences viscérales compliquant les
interventions abdominales.
Ces cellules tumorales sont piégées au sein des adhérences qui réalisent
un microenvironnement favorable à leur développement.
Les travaux de Meyers ont démontré que le liquide péritonéal n’était pas statique
et suivait continuellement une circulation dynamique.
Aussi, la
répartition des implants tumoraux péritonéaux n’est pas aléatoire et
s’explique en fonction de la cinétique des fluides intrapéritonéaux et de
la présence des récessus et des accolements du péritoine.
La gravité
entraîne le liquide péritonéal dans les récessus les plus déclives que sont
la poche de Morisson et le cul-de-sac de Douglas. Le liquide accumulé
dans le pelvis peut remonter la gouttière pariétocolique gauche mais il
est arrêté par le ligament phrénicocolique gauche.
En revanche, le flux
remontant le long de la gouttière pariétocolique droite va d’abord
s’accumuler dans la poche de Morisson, et ensuite remonter directement
dans l’espace sous-phrénique droit où il est arrêté par la zone non
péritonéisée du foie.
Ces caractéristiques expliquent que le cul-de-sac
de Douglas, les gouttières pariétocoliques et les espaces sous-phrénique
droit et sous-hépatique droit soient les sites les plus fréquents des
implants tumoraux intrapéritonéaux.
Par ailleurs, les cellules
tumorales vont s’accumuler au niveau des sites intestinaux immobiles :
l’antre gastrique, la région de la valvule iléocæcale, le ligament de Treitz
et le côlon rectosigmoïde, tandis que les surfaces des anses intestinales
animées de mouvements péristaltiques sont épargnées.
2- Sémiologie
:
* Ascite :
Deux mécanismes principaux expliquent la survenue d’une ascite dans
la carcinose péritonéale : d’une part, la diminution de résorption du
liquide péritonéal, normalement assurée par les vaisseaux lymphatiques
obstrués du fait de la carcinose, et d’autre part, l’excès de production de
liquide péritonéal consécutif à l’augmentation de la perméabilité
capillaire sous la dépendance d’un facteur de perméabilité vasculaire
sécrété par les cellules tumorales.
L’ascite est le signe le plus souvent rencontré dans la carcinose
péritonéale.
Elle est retrouvée chez environ 70 % des patients.
Sa
formation est extrêmement rapide puisqu’elle peut survenir en 3 à
5 jours à la suite de la libération de cellules malignes dans le
péritoine.
Même s’il existe des caractéristiques de l’ascite évocatrices
de son caractère néoplasique en imagerie, le plus souvent ces
signes sont absents, et l’ascite a un aspect aspécifique.
* Envahissement du grand épiploon
:
Le grand épiploon possède un potentiel important de phagocytose et
génère des adhérences.
Ces deux éléments expliquent qu’il représente
une cible privilégiée pour les cellules tumorales.
Dans les formes de début, il faudra rechercher, en
échographie et en TDM, une infiltration de la graisse épiploïque plus ou
moins associée à la présence de petits nodules au sein de cette graisse.
La graisse épiploïque infiltrée se présente sous la forme d’un fin treillis
avec des tractus hypoéchogènes en échographie et hyperdenses en
TDM.
Les nodules sont souvent infracentimétriques.
En échographie,
ils sont d’échostructure variable, souvent hypoéchogènes, parfois
isoéchogènes avec le reste de l’épiploon.
La nature pathologique de ces
nodules est alors révélée par une convexité antérieure de l’épiploon, qui
est non compressible.
En TDM, ces nodules sont mieux visualisés par
des coupes fines.
Dans les formes plus tardives, le remplacement de la graisse épiploïque par une masse solide séparant le côlon ou le grêle de la paroi
abdominale antérieure, donne l’image du « gâteau » épiploïque.
Ce « gâteau » épiploïque se présente sous la forme d’une masse grossière
possédant des contours irréguliers et polylobés, hypoéchogène en
échographie et de densité tissulaire en TDM.
* Infiltration du mésentère
:
Les nombreux replis mésentériques sont des sites fréquents
d’accumulation d’ascite qui favorisent l’implantation des cellules
tumorales et la formation de nodules sur son revêtement péritonéal,
expliquant, comme l’a montré Meyer, que le méso servant de point
d’attache à la jonction iléocæcale soit souvent atteint.
L’infiltration du
mésentère peut se traduire par une fixation anormale des anses
grêles, associée à un épaississement des parois digestives, une
augmentation de la densité et une diminution de l’échogénécité de la
graisse mésentérique, la présence d’une masse stellaire mésentérique ou
d’un ou plusieurs nodules mésentériques plus ou moins confluents.
* Implants tumoraux au niveau de la séreuse péritonéale
:
La TDM a longtemps été considérée comme supérieure à l’échographie
pour diagnostiquer ces implants.
Certains auteurs ont proposé
d’optimiser l’examen scanner par l’injection d’un produit de contraste
dans la cavité péritonéale.
Cette technique augmente la
sensibilité du scanner par la détection des implants séreux péritonéaux.
En revanche, sa spécificité est médiocre, en particulier au niveau de la
loge sous-phrénique gauche, les adhérences et les cicatrices épiploïques
entraînant des faux diagnostics positifs de carcinose péritonéale.
En
pratique, la TDM est utilisée le plus souvent sans injection
intrapéritonéale dans la recherche d’une carcinose péritonéale.
Les travaux de Rioux ont récemment bien illustré le potentiel de
l’échographie dans l’étude de la séreuse péritonéale.
Plutôt qu’opposer
l’échographie à la TDM, il faut les considérer comme des techniques
complémentaires dans l’étude de la séreuse péritonéale.
La TDM est
plus performante dans l’étude du péritoine périhépatique, en particulier
autour de la portion haute du foie.
À l’inverse, l’échographie avec sonde
de haute fréquence permet facilement d’étudier le péritoine pariétal
antérieur.
En échographie, les implants péritonéaux ont en
général un aspect hypoéchogène, nodulaire, ou allongé en plaques.
En TDM, l’envahissement de la séreuse péritonéale se traduit par un
épaississement péritonéal souvent nodulaire rehaussé après injection de
produit de contraste.
L’envahissement péritonéal peut simuler des
métastases hépatiques au niveau du péritoine périhépatique en exerçant
une empreinte sur la surface hépatique.
La limite inférieure de détection de ces nodules est variable selon les
auteurs et classiquement, autour de 5 mm.
Cependant, les
nodules de plus petite taille peuvent maintenant être visualisés grâce aux
coupes fines TDM et grâce à l’échographie haute résolution avec des
sondes de haute fréquence qui permettent de visualiser des infiltrations
linéaires du péritoine antérieur sous forme d’une interruption focale et
hypoéchogène de la ligne normalement hyperéchogène du péritoine
pariétal antérieur.
Ainsi, l’échographie comme la TDM, ont des
performances améliorées dans les détections des implants péritonéaux
séreux.
3- Particularités de la carcinose péritonéale
en fonction du cancer primitif
:
La cavité péritonéale est un site fréquent de métastases de nombreux
néoplasmes abdominopelviens.
Les tumeurs primitives en cause sont
par ordre de fréquence, les cancers de l’ovaire, les cancers du tube
digestif (en particulier côlon et estomac), les cancers du pancréas, les
cancers de l’utérus, les cancers de l’appareil urinaire (vessie), les cancers extra-abdominaux (mélanome malin, cancer du sein, cancer du
poumon).
Le siège préférentiel de la carcinose et surtout l’identification de lésions
métastatiques associées peuvent orienter quant à la localisation de la
lésion primitive :
– les cancers de l’ovaire s’étendent fréquemment au cul-de-sac de
Douglas, au grand épiploon, à la gouttière pariétocolique droite, et à
l’espace sous-phrénique droit, et tout cela en l’absence de
métastase hépatique.
D’autre part, devant des signes de carcinose
péritonéale, sans lésion tumorale primitive, il faut penser en premier
abord à une néoplasie ovarienne, puisque la tumeur primitive n’est
identifiée que chez 50 % des patients présentant une carcinomatose
péritonéale d’origine ovarienne.
Ceci est dû au fait que même
lorsqu’ils sont tumoraux, les ovaires peuvent avoir un volume normal et
présenter des anomalies tout à fait mineures à la TDM comme à la
chirurgie;
– les tumeurs gastriques s’étendent rapidement aux ligaments gastrocoliques, avec extension au côlon transverse.
Les patients atteints
de néoplasie gastrique ont également souvent une carcinose péritonéale
diffuse.
Les formes infiltrantes gastriques diffuses (ou linites gastriques)
sont caractérisées par une fréquence élevée de métastases ovariennes
souvent bilatérales (syndrome de Krukenberg).
Ces tumeurs ovariennes
se différencient des tumeurs primitives par leur aspect solide.
C’est
pourquoi, la mise en évidence d’une carcinomatose péritonéale avec des
masses ovariennes d’aspect solide doit faire rechercher en premier lieu
une tumeur primitive gastrique ;
– les tumeurs colorectales avec envahissement péritonéal ont également
en général des métastases hépatiques et des métastases ganglionnaires péricoliques et coeliomésentériques ;
– l’identification précise de l’extension péritonéale n’a pas la même
importance selon l’origine de la carcinose péritonéale.
Dans une
néoplasie digestive, la découverte d’un seul nodule péritonéal modifiera
considérablement l’approche thérapeutique du patient.
À l’inverse, dans
un contexte d’une néoplasie ovarienne métastatique, c’est la détection
de nodules supérieurs à 2 cm qui s’avère importante afin de guider la
réduction chirurgicale tumorale précédant la chimiothérapie.
B - Pathologie tumorale diffuse du péritoine
autre que la carcinose péritonéale
:
1- Pseudomyxome péritonéal ou maladie gélatineuse du péritoine
:
Le pseudomyxome péritonéal associe un épanchement péritonéal
gélatineux et des implants mucineux sur la séreuse péritonéale et sur le
grand épiploon.
Cette maladie rare, rencontrée environ deux fois sur
chaque 10 000 laparotomies, est deux à trois fois plus fréquente chez
la femme que chez l’homme.
La tumeur primitive est classiquement
d’origine ovarienne ou appendiculaire.
En réalité, la plupart des lésions
ovariennes décrites comme primitives seraient d’origine appendiculaire
.
Exceptionnellement, la tumeur primitive est située dans
l’endomètre, l’ouraque, le canal omphalomésentérique ou le sein,
puisque les carcinomes mucineux du sein peuvent aussi être à l’origine
de métastases péritonéales se présentant sous la forme de
pseudomyxome péritonéal.
La sémiologie en imagerie de la maladie gélatineuse du péritoine n’est
pas spécifique et associe un épanchement péritonéal, des nodules
péritonéaux et une infiltration du grand épiploon.
Cet aspect est le même
que celui rencontré dans les carcinoses péritonéales.
Il existe
cependant un certain nombre de signes d’imagerie en faveur d’un pseudomyxome péritonéal : l’importance de l’empreinte hépatique, ou
scalloping, traduisant la compression extrinsèque du foie par les masses
gélatineuses, le cloisonnement de l’épanchement intrapéritonéal, les
calcifications évocatrices lorsqu’elles sont curvilignes, la prédominance
des lésions sur le grand épiploon et sur le péritoine diaphragmatique
alors que la séreuse digestive est rarement envahie, la visualisation
d’une masse liquidienne ou tissulaire appendiculaire.
Le diagnostic de pseudomyxome péritonéal est important puisque, à la
différence du traitement de la plupart des carcinoses péritonéales, une
attitude chirurgicale agressive, associant une exérèse systématique à
l’anse diathermique de toute la surface péritonéale envahie, associée à
une chimiothérapie intrapéritonéale, est recommandée dans le
traitement de cette pathologie.
2- Mésothéliome malin du péritoine
:
C’est une tumeur primitive rare, de nature conjonctive, qui naît au
niveau des séreuses pleurale, péritonéale ou péricardique.
L’atteinte
péritonéale représente environ 25 % de l’ensemble des mésothéliomes, l’atteinte pleurale 65 %, et l’atteinte péricardique 10 %.
Le mésothéliome péritonéal, comme les autres formes de mésothéliome, est
favorisé par l’exposition à l’amiante que l’on trouve dans 50 % des cas.
Sur le plan macroscopique, les aspects sont identiques aux carcinomatoses péritonéales, associant ascite, épaississement diffus
et/ou nodulaire de la séreuse péritoine, infiltration du grand épiploon
avec parfois formation de « gâteaux » épiploïques, masses
mésentériques.
Comme dans les carcinoses péritonéales en rapport avec
un cancer de l’ovaire ou un cancer digestif mucosécrétant, il peut
également exister des calcifications des masses tumorales.
Aussi, aucun
critère d’imagerie ne permet de différencier un mésothéliome péritonéal
d’une carcinomatose péritonéale, et c’est pourquoi une preuve
diagnostique ne peut être généralement apportée que par l’examen
anatomopathologique.
Il existe cependant un certain nombre
d’arguments cliniques et paracliniques en faveur d’un mésothéliome :
l’anamnèse (exposition professionnelle), la présence d’anomalies
pleurales telles que la présence de plaques calcifiées suggérant une
asbestose, l’absence de tumeur primitive décelée et de lésion secondaire
hépatique ou ganglionnaire.
3- Carcinomatose péritonéale primitive ou carcinome
papillaire séreux du péritoine
:
Deuxième cause de tumeur maligne péritonéale primitive après le mésothéliome péritonéal, cette tumeur a une structure histologique
identique à celle des cancers papillaires de l’ovaire, mais les ovaires sont
anatomiquement normaux ou porteurs de lésions tumorales
superficielles siégeant uniquement sur leur membrane séreuse.
Cette
affection survient chez des femmes le plus souvent ménopausées.
Deux
théories expliquent la similitude entre les carcinomatoses péritonéales
primitives et les cancers papillaires de l’ovaire.
La première suggère que
la carcinomatose péritonéale primitive atteint des reliquats de tissu
ovarien laissés dans le péritoine durant la migration embryonnaire des
ovaires.
La deuxième théorie souligne l’origine embryologique
commune du péritoine et de l’épithélium ovarien à partir de l’organe de
Muller.
L’aspect en imagerie des carcinomatoses péritonéales primitives est
le même que celui des carcinomatoses péritonéales classiques, associant
une ascite, un envahissement tumoral du grand épiploon et du
mésentère, et des implants séreux péritonéaux.
Il existe un certain
nombre d’arguments en faveur d’une carcinomatose péritonéale primitive démontrés dans une série récente : la présence de
calcifications diffuses, expansives, notée chez la plupart des patientes,
l’importance de l’infiltration du grand épiploon avec également des
calcifications épiploïques, l’absence de masse ovarienne.
Le diagnostic
différentiel avec un envahissement péritonéal d’un carcinome de
l’ovaire reste difficile.
En effet, dans une carcinose péritonéale d’origine
ovarienne, des calcifications péritonéales sont présentes chez un tiers
des patientes et les lésions ovariennes primitives peuvent ne pas être
visualisées.
Quoi qu’il en soit, la prise en charge des patientes avec carcinomatose primitive est identique à celle des patientes porteuses
d’un cancer ovarien avancé et comprend une cytoréduction chirurgicale
suivie par une chimiothérapie adjuvante, même si le pronostic de cette
carcinomatose péritonéale primitive est encore plus sévère que le
pronostic des cancers ovariens avancés.
4- Lymphomes péritonéaux
:
Les atteintes péritonéales diffuses sont rares dans les lymphomes malins
non hodgkiniens (exceptionnelles dans les maladies de Hodgkin), alors
que les localisations mésentériques sont très fréquentes.
Elles se
rencontrent surtout dans les lymphomes compliquant un sida et dans les
lymphomes de Burkitt.
Les signes d’imagerie ne sont pas spécifiques et associent une
ascite, le plus souvent non cloisonnée, une infiltration du grand épiploon
et du mésentère, et un épaississement anormal de la séreuse péritonéale.
Devant ce
type d’atteinte, les arguments en faveur d’un lymphome sont
l’existence d’une atteinte ganglionnaire, cependant inconstante,
associant des adénomégalies coeliomésentériques et
rétropéritonéales, et la présence de localisations tumorales au
niveau du tractus gastrointestinal (en particulier au niveau de
l’estomac et de l’iléon terminal).
5- Léiomyosarcome péritonéal
:
Cette tumeur correspond à la dissémination intrapéritonéale des fibres
musculaires lisses, malignes, provenant des léiomyosarcomes.
La
tumeur primitive est le plus souvent d’origine digestive (estomac ou
intestin grêle) ou génito-urinaire.
Plus rarement, ces tumeurs peuvent
provenir de la transformation maligne d’exceptionnels cas de leiomyomatosis peritonealis disseminata.
Les signes en imagerie sont, là encore, non spécifiques, associant des
implants sur la séreuse péritonéale et des masses de densité tissulaire de
siège mésentérique et épiploïque.
L’ascite et les adénomégalies sont
rares, les métastases hépatiques fréquentes, et les tumeurs sont souvent
volumineuses, avec une nécrose centrale de densité liquidienne.
6- Leiomyomatosis peritonealis disseminata
:
Il s’agit d’une pathologie exceptionnelle caractérisée par la
dissémination de muscle lisse à l’intérieur de la cavité
abdominopelvienne et du péritoine.
Elle survient en général chez des
femmes en période d’activité génitale et est souvent associée à des
fibromes utérins.
Les cas rapportés en imagerie sont exceptionnels et retrouvent la
présence de masses péritonéales non spécifiques.
Devant la découverte
de ces lésions, il faut penser à une léiomyomatose péritonéale
disséminée chez une femme en période d’activité génitale, avec un état
général conservé et en l’absence d’ascite et de lésion hépatique
secondaire.
C - Tumeurs isolées du mésentère et du grand épiploon
:
Elles sont rares.
Les gammes diagnostiques dépendent du caractère
solide tissulaire, liquide ou graisseux de la tumeur.
1- Tumeurs solides
:
Dans le mésentère, ces tumeurs sont dominées en fréquence par la
tumeur desmoïde (25 % des cas).
Ces tumeurs desmoïdes
surviennent le plus souvent chez des patients ayant des antécédents de
chirurgie abdominale ou de traumatisme.
Elles peuvent se développer
également au niveau des muscles et notamment des muscles grands
droits de l’abdomen.
Elles constituent une lésion intermédiaire entre le
fibrome bénin et le fibrosarcome bien différencié.
Ces tumeurs
conjonctives sont proches des tumeurs fibreuses rencontrées dans le
syndrome de Gardner, qui associe une polypadénomatose familiale, des
tumeurs conjonctives de localisation ubiquitaire (maxillaire, voûte du
crâne, mésentère), des lésions ectodermiques (kyste épidermoïde ou
sébacé) et une hypertrophie congénitale de la rétine.
Les tumeurs desmoïdes n’ont pas de spécificité en imagerie ; elles sont en général
bien limitées, d’échostructure homogène, modérément hypervascularisées
au scanner.
Les autres tumeurs primitives parfois rencontrées au niveau du
mésentère sont les tumeurs musculaires (léiomyomes ou léiomyosarcomes), les hémangiopéricytomes qui sont très
hypervascularisés, les lymphomes angiofolliculaires ou tumeurs de
Castelmann (plus fréquentes au niveau du médiastin), qui revêtent
l’aspect d’une masse pseudolymphomateuse très rehaussée, et les
neurofibromes isolés ou rentrant dans le cadre d’une neurofibromatose,
qui sont de contenu homogène, hypodense en TDM.
Enfin, un certain nombre de processus tumoraux envahissant en règle
générale le péritoine de façon diffuse peuvent se présenter sous la forme
d’une lésion unique mésentérique.
Citons en exemple les lymphomes
mésentériques, les formes sarcomateuses de mésothéliome et les
métastases de tumeur carcinoïde qui se présente habituellement sous
la forme d’une masse mésentérique rétractile, à contours spiculés,
induisant une rétraction et une fixité du bord mésentérique des anses
grêles avoisinantes dont les parois sont épaissies par un processus
ischémique local.
Au niveau du grand épiploon, les tumeurs solides le plus fréquemment
rencontrées, sont les tumeurs d’origine musculaire, incluant les
léiomyomes, les léiomyosarcomes et les hémangiopéricytomes.
Ces
tumeurs musculaires sont souvent volumineuses, avec une nécrose
centrale importante et un rehaussement périphérique intense après
injection de produit de contraste.
Exceptionnellement peuvent être
observées, au niveau du grand épiploon, des tumeurs desmoïdes (dans
le cadre d’un syndrome de Gardner) ou des mésothéliomes.
2- Tumeurs graisseuses
:
Les tumeurs à composante graisseuse peuvent être identifiées en TDM
par la mise en évidence d’un contingent de densité négative.
Les lipomes
sont de densité et d’échostructure homogènes, la capsule qui les
différencie des lipomatoses n’est pas toujours visible.
Les liposarcomes
associent des éléments de densité graisseuse et des éléments de densité
tissulaire.
Cependant, certains liposarcomes peuvent (comme pour les
localisations rétropéritonéales plus fréquentes) ne renfermer aucune
structure graisseuse identifiable sur les images scanographiques et se
présenter alors comme une masse tissulaire infiltrante solide évoquant
une tumeur musculaire lisse en premier lieu.
Les tératomes contiennent
souvent de la graisse, mais il s’y associe souvent des éléments kystiques
et des calcifications périphériques diagnostiqués en TDM.
Enfin, les
lymphangiomes kystiques, d’habitude de contenu liquidien, peuvent
avoir un contenu chyleux et une densité graisseuse.
3- Tumeurs kystiques
:
Les plus fréquentes, du mésentère et du grand épiploon, sont d’origine
lymphatique et correspondent à des lymphangiomes kystiques.
Elles
sont plus fréquentes chez l’enfant et l’adolescent et sont plus souvent
développées dans le mésentère que dans le grand épiploon.
Elles ont
habituellement un contenu liquidien homogène et des cloisons donnant
un aspect multiloculaire à la tumeur.
Elles se moulent sur la forme des
organes avoisinants.
En l’absence de cloisons très évocatrices de lymphangiome kystique, un
certain nombre d’autres lésions kystiques doivent être évoquées :
– les duplications digestives dont la paroi est épaisse, identique à la
paroi digestive, composée d’une muqueuse, d’une sous-muqueuse et
d’une musculeuse.
Elles siègent dans le mésentère ;
– les kystes entériques dont la paroi est fine, formée par un épithélium
cylindrique ;
– les kystes mésothéliaux, de siège épiploïque ou mésentérique ;
– les pseudokystes d’origine pancréatique ;
– les hématomes, les abcès ou les pseudokystes séquellaires d’un
hématome ou d’un abcès, qui ont souvent une paroi épaisse et qui
peuvent contenir un niveau liquide-liquide ;
– les tératomes kystiques au sein desquels il existe souvent des
calcifications et des contingents graisseux associés ;
– les mésothéliomes bénins kystiques, souvent cloisonnés et
habituellement développés dans le pelvis ;
– les tumeurs musculaires (léiomyomes et léiomyosarcomes), avec
nécrose centrale prédominante.
Atteintes infectieuses, inflammatoires
et ischémiques du péritoine :
A - Péritonite aiguë et abcès intrapéritonéaux
:
1-
Péritonite postopératoire
:
La chirurgie abdominale est la première cause de péritonite ou d’abcès intra-abdominal.
Les chirurgies de l’estomac, du pancréas et des voies
biliaires sont les causes les plus fréquentes d’abcès postopératoires.
Le diagnostic de ces péritonites postopératoires repose sur l’échographie
et le scanner.
En effet, l’ASP ne retrouve que de façon exceptionnelle
des signes positifs sous forme d’une masse de densité hydrique ou de
gaz extradigestifs.
La radiographie du thorax pourra mettre en évidence,
de façon plus fréquente, un épanchement pleural réactionnel, mais
celui-ci n’est absolument pas spécifique d’une collection septique sous-diaphragmatique.
* Échographie
:
C’est le premier examen demandé en cas de suspicion de péritonite ou
d’abcès profond chez un patient en postopératoire.
Elle est parfois
rendue difficile par les drains, les pansements et l’absence de
coopération des patients.
L’échographie recherchera une formation hypoéchogène, n’ayant pas de mouvement brownien (à la différence du
tube digestif), plus ou moins hétérogène dont la paroi est rarement
identifiée.
La présence d’échos très intenses et atténuants, siégeant dans
la partie antérieure de la collection, témoigne de bulles d’air.
Une
structure hyperéchogène, homogène, noyée au fond de la collection,
peut faire évoquer un textilome.
En pratique, il n’existe pas de spécificité échographique, et il est
difficile de différencier un abcès d’un hématome, d’une lymphocèle,
d’un bilome collecté ou d’une collection séreuse postopératoire.
Aussi,
une collection liquidienne identifiée en échographie, chez un patient
fébrile en postopératoire, doit être ponctionnée, quel que soit son aspect,
car les collections stériles ne sont en général pas différentiables des
collections septiques.
* Tomodensitométrie
:
Elle reste la meilleure méthode d’imagerie pour le diagnostic positif
d’abcès péritonéal ou de péritonite.
Elle va rechercher une collection
de densité liquidienne avec des contours plus ou moins épaissis et une
infiltration de la graisse autour de la collection.
Le rehaussement en
coque périphérique des parois de la collection et/ou du péritoine, après
injection de produit de contraste est un élément diagnostique important.
La présence de bulles au sein de la partie antérieure d’une collection est
un élément inconstant mais très évocateur d’une surinfection à germe
anaérobie ou d’une fistule avec le tube digestif.
Cependant, un drainage
récent (chirurgical ou percutané) peut entraîner le passage d’air en intrapéritonéal. L’absence de paroi et l’absence de continuité avec une
structure digestive permettent de différencier une collection
hydroaérique d’une anse grêle.
Comme en échographie, une
collection liquidienne postopératoire vue en TDM est souvent
aspécifique, de densité liquidienne, avec une paroi plus ou moins
visualisée, et doit faire pratiquer une ponction chez un patient chez
lequel est suspecté un sepsis profond.
2- Péritonite et abcès péritonéaux en l’absence d’intervention
chirurgicale récente :
En dehors d’un contexte postopératoire, une péritonite est suspectée
devant une douleur abdominale particulièrement intense ou associée à
une défense, une contracture, un collapsus et cela le plus souvent dans
un contexte septique.
La péritonite peut compliquer une atteinte
inflammatoire de voisinage ou être en rapport avec une perforation d’un
organe creux.
* Péritonite compliquant une atteinte inflammatoire de voisinage
:
Une appendicite, une sigmoïdite, une cholecystite, une diverticulite du
côlon droit, une maladie de Crohn, une infection annexielle, peuvent se
compliquer de péritonite.
L’échographie et la TDM pourront mettre en
évidence en plus des signes en rapport avec la pathologie causale, un
épanchement péritonéal plus ou moins cloisonné.
La TDM est
habituellement plus performante que l’échographie pour rechercher un
épaississement du péritoine ou une infiltration de la graisse
mésentérique ou épiploïque.
* Perforation d’un organe creux
:
Lors des perforations en péritoine libre, l’ASP démontre un
pneumopéritoine qui, dans ce contexte, affirme la perforation digestive
et doit en théorie conduire sans retard à l’intervention.
Cependant, même
dans cette situation, un scanner est de plus en plus souvent pratiqué, à la
recherche en dehors du pneumopéritoine antérieur évident d’air en
position extradigestive, dont le siège pourra orienter sur la perforation :
l’air extradigestif moule le duodénum ou siège dans l’espace pararénal
antérieur lors d’une perforation duodénale.
Il siège dans l’arrière-cavité
des épiploons lors d’une perforation gastrique ou bulbaire, et
dans les mésosigmoïdes lors d’une perforation sigmoïdienne.
Connaître
l’origine de la perforation digestive est important, car le type de
chirurgie (laparotomie ou laparoscopie) et la voie d’abord ne seront pas
les mêmes pour une perforation gastroduodénale ou pour une
perforation sigmoïdienne.
Par ailleurs, même dans les perforations en
péritoine libre, de tout petits pneumopéritoines peuvent ne pas être
identifiés sur la radiologie conventionnelle mais retrouvés uniquement
par la TDM.
Lorsque la perforation est cloisonnée et que le pneumopéritoine reste
bloqué dans un récessus péritonéal, des images aériques extradigestives
peuvent être difficiles à percevoir ou à différencier de clartés digestives
sur l’ASP.
La TDM a alors un grand intérêt pour affirmer le caractère
extradigestif de certaines images aériques.
De plus, une perforation
cloisonnée bouchée, ne s’accompagne pas toujours d’air en position extradigestive mais peut se traduire par une collection abcédée.
La TDM
peut alors identifier la cause de l’abcès en démontrant une extravasation
de produit de contraste orale ou rectale.
La communication n’est pas
toujours mise en évidence à la phase initiale. Après drainage,
l’opacification sous scopie de l’abcès peut identifier une fistule digestive
non visible sur le scanner initial.
Ce drainage percutané guidé par
échographie ou TDM, maintenu pendant un temps suffisamment long,
et associé à une antibiothérapie, permet souvent le tarissement de la
fistule digestive.
La TDM a donc un grand intérêt dans le diagnostic d’une perforation
digestive, lorsqu’il n’existe pas de pneumopéritoine sur l’ASP ou dans
son bilan, en identifiant le site de la perforation digestive et en orientant
les modalités du traitement chirurgical.
B - Péritonite subaiguë
:
1- Péritonite chez un patient dialysé péritonéal
:
La péritonite représente la complication la plus fréquente de la dialyse
péritonéale.
Environ 80 % des patients sous dialyse péritonéale feront
au moins un épisode de péritonite.
Les signes de péritonite associent
la présence d’une collection et d’une anomalie de rehaussement du
péritoine avec un péritoine très rehaussé, en règle de façon localisée.
Le
scanner avec injection intrapéritonéale de produit de contraste est alors
supérieur au scanner conventionnel pour différencier la collection d’un
dialysat péritonéal.
Ces péritonites vont diminuer le pouvoir de
dialyse de la membrane péritonéale et peuvent générer des brides ou de
véritables péritonites encapsulantes, ces complications étant à l’origine
d’une mauvaise ultrafiltration du péritoine et donc d’une inefficacité de
la dialyse péritonéale.
La péritonite sclérosante, compliquant ces épisodes de péritonite,
survient chez 1 à 7 % des patients.
Le scanner est très performant
pour diagnostiquer et faire le bilan de ces péritonites sclérosantes.
Il
retrouve des anomalies péritonéales, chez la quasi-totalité des patients,
sous forme de calcifications plus ou moins importantes et
d’épaississements du péritoine.
Des collections péritonéales
localisées et des anomalies des anses grêles avec des alternances de
dilatation et de fixation-angulation anormale du jéjunum ou de l’iléon
sont également souvent visualisées.
L’importance des calcifications et
de l’épaississement péritonéal est bien corrélée avec la sévérité clinicobiologique de la péritonite sclérosante évaluée selon le nombre et
l’importance des épisodes de douleurs abdominales et l’insuffisance
rénale.
La dialyse péritonéale est la cause principale de péritonite sclérosante.
En dehors de ce contexte, il existe d’autres causes beaucoup plus rares
de péritonite sclérosante.
Citons les associations décrites avec des
médicaments comme les bêtabloquants et les tumeurs de l’ovaire
comme les thécomes.
2- Tuberculose péritonéale
:
Comme pour les autres atteintes tuberculeuses, la tuberculose
péritonéale est en recrudescence.
Elle se rencontre principalement chez
les patients transplantés et immunodéprimés, mais également hors de ce
contexte chez des sujets âgés.
Les signes échographiques ou TDM
rencontrés sont les mêmes que ceux décrits dans les infiltrations
tissulaires tumorales du péritoine, associant un épanchement péritonéal,
des infiltrations tissulaires du grand épiploon et du mésentère, un
épaississement du péritoine pariétal et viscéral.
Les calcifications
péritonéales, au niveau des nodules mésentériques en particulier, sont
classiques quoique rares, et ne sont pas spécifiques puisqu’elles peuvent être présentes dans les métastases péritonéales de cancer de l’ovaire ou
de cancer digestif mucosécrétant et dans les mésothéliomes.
Aussi, le
diagnostic de tuberculose péritonéale reste difficile.
Il existe cependant
un certain nombre de signes permettant d’orienter le diagnostic
différentiel vers une tuberculose péritonéale :
– la présence de macronodules mésentériques ;
– l’identification d’un épaississement régulier et rehaussé du péritoine
pariétal ;
– l’existence d’une splénomégalie et de calcifications spléniques ;
– l’association à une atteinte digestive pariétale iléocæcale ;
– la présence d’adénomégalies rétropéritonéales et péripancréatiques à
centre hypodense et à prise de contraste annulaire.
Le caractère irrégulier de l’épaississement du grand épiploon oriente
vers une carcinomatose péritonéale.
3- Actinomycose péritonéale
:
L’ensemencement de la cavité péritonéale est en général secondaire à
un traumatisme perforant, à une chirurgie abdominale, ou à un port
anormalement prolongé de dispositifs intra-utérins.
L’aspect
macroscopique et scanographique associe un épanchement péritonéal et
des masses péritonéales.
Il existe souvent une atteinte iléocæcale et/ou rectosigmoïdienne associée.
C - Atteintes inflammatoires
:
1- Atteintes inflammatoires primitives
ou panniculites mésentériques
:
La panniculite mésentérique est une infiltration xantogranulomateuse,
secondaire à une dégénérescence du tissu graisseux associée à une
infiltration inflammatoire et fibreuse du mésentère.
La panniculite
mésentérique est dénommée lipodystrophie mésentérique lorsque
l’infiltration est à prédominance inflammatoire, et mésentérite rétractile
lorsque l’infiltration est à prédominance fibreuse.
La plupart des cas sont
idiopathiques, même si cette pathologie doit faire rechercher de principe
un antécédent de traumatisme abdominal et doit faire redouter la
survenue d’un lymphome malin non hodgkinien qui s’observera au
cours de l’évolution dans environ 15 % des cas.
La panniculite
mésentérique peut être parfois asymptomatique et de découverte
fortuite, ou alors à l’origine de douleurs abdominales, de fièvre, de
nausées, de vomissements, voire d’une perte de poids.
La TDM est le meilleur examen diagnostique de la panniculite
mésentérique.
Dans la lipodystrophie mésentérique, elle met en
évidence une zone mal définie, de basse densité (densité intermédiaire
entre l’eau et la graisse) entourant les vaisseaux sans les refouler
, à la différence d’une tumeur graisseuse comme un
liposarcome ou un tératome.
À l’inverse, dans les mésentérites
rétractiles, l’infiltration du mésentère se présente sous la forme d’une
masse tissulaire à contours spiculaires avec indentation du bord
mésentérique des anses grêles.
L’aspect est alors identique à celui
observé dans les mésentérites rétractiles secondaires à une tumeur
carcinoïde de l’intestin grêle.
La dénomination de panniculite mésentérique exclut la présence d’une
pancréatite ou d’une maladie inflammatoire du tube digestif
(responsable d’atteinte inflammatoire secondaire du péritoine), et
implique une atteinte isolée de la graisse mésentérique, à la différence
de l’atteinte observée chez des patients cirrhotiques en décompensation
oedématoascitique, qui associe à l’oedème mésentérique un oedème de la
graisse épiploïque, rétropéritonéale et sous-cutanée.
2- Atteintes inflammatoires secondaires
:
Elles sont beaucoup plus fréquentes que les atteintes primitives.
Les
principales causes sont les pancréatites, les maladies inflammatoires du
tube digestif et les diverticulites.
Les modes de propagation des pancréatites aiguës au péritoine, par
l’espace sous-péritonéal, incluant les ligaments et les mésos, ont déjà été
vus précédemment.
Les atteintes inflammatoires secondaires à une
pathologie du tube digestif associent, en regard d’un épaississement
pariétal circonférentiel, une infiltration de la graisse péridigestive, la
présence de phlegmons ou d’abcès, voire l’identification de fistules à
point de départ digestif.
Dans la maladie de Crohn, une infiltration
fibreuse du péritoine, associée à une surcharge adipeuse massive, est
fréquente, donnant les classiques images de sclérolipomatose bien
visualisées en scanner, et parfois responsables d’un effet de masse sur
les structures avoisinantes.
3- Fibrose radique
:
La TDM est utile au diagnostic de mésentérite séquellaire radique, en
montrant un mésentère de densité augmentée, infiltré par des travées
plus ou moins nombreuses, pouvant entraîner une rétraction et une
fixation des anses.
Il s’y associe le plus souvent un épaississement
de la paroi des anses grêles siégeant dans le champ d’irradiation.
Dans
ce cadre, le problème diagnostique posé est celui de différencier une mésentérite radique d’une carcinose péritonéale.
D - Atteintes ischémiques : infarctus du grand épiploon
Les atteintes ischémiques du mésentère accompagnent celles de
l’intestin grêle qui représente le siège le plus fréquent de lésions
ischémiques du tube digestif.
La sémiologie des ischémies du grêle, ou
du côlon, ne sera pas traitée dans ce chapitre qui porte sur les atteintes
péritonéales.
En revanche, les atteintes ischémiques atteignant de façon exclusive des
feuillets péritonéaux, comme les infarctus du grand épiploon, rentrent
tout à fait dans le cadre de ce chapitre.
On distingue classiquement les
atteintes idiopathiques des infarctus secondaires à une torsion du grand
épiploon autour de son grand axe.
L’infarctus primitif du grand épiploon
est une cause souvent méconnue de syndrome douloureux abdominal
aigu ou subaigu.
La pratique en urgence de l’échographie ou du scanner
dans la pathologie abdominale non traumatique montre que la fréquence
de cette affection est largement sous-estimée.
La sémiologie radiologique des infarctus du grand épiploon est assez
univoque.
En échographie, le diagnostic est fait devant une
masse ovoïde, discrètement hyperéchogène, non compressible et
siégeant en regard du point douloureux électif.
En TDM, les lésions
apparaissent comme des masses bien limitées, en navettes, de
localisations sous-pariétale antérieure ou antérolatérale droite.
Leur
densité est discrètement supérieure à celle de la graisse normale.
Il existe
un épaississement du péritoine pariétal antérieur, contigu à la lésion,
expliquant la symptomatologie douloureuse, voire la défense,
observée chez la plupart de ces patients, puisque le feuillet pariétal du
péritoine, à la différence du feuillet viscéral, a une innervation sensitive.
Le diagnostic des infarctus du grand épiploon (comme c’est le cas pour
une pathologie analogue qui est la torsion des appendices épiploïques)
est important, car il permet d’éviter le recours à la chirurgie, pour une
affection dont la résolution spontanée s’observe en règle en quelques
jours.