Granulomes et inflammations spécifiques

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Généralités :

Dans de nombreux cas l’évolution du foyer inflammatoire est caractérisée par la diminution progressive des phénomènes vasculaires et l’apparition de cellules nouvelles qui vont constituer un granulome ou infiltrat inflammatoire.

Granulome spécifique et non spécifique :

A – Définition :
Granulomes et inflammations spécifiques

Le granulome se définit comme un ensemble cellulaire polymorphe comportant en quantité variable des polynucléaires, des histiocytes, des cellules immunologiquement compétentes lymphocytes et plasmocytes et toutes les cellules intermédiaires à ces deux derniers types.

En fonction de son étiologie et de sa durée d’évolution le granulome est plus ou moins riche en fibroblastes et en fibres de collagène.

La proportion de ces cellules est fonction de la nature de l’agent inflammatoire et des moyens de défense de l’organisme.

L’agencement des cellules du granulome a parfois une certaine spécificité étiologique.

Ainsi dans certains cas des processus cellulaires et immunitaires de défense vont aboutir à la constitution de lésions plus ou moins caractéristiques permettant d’évoquer une étiologie précise.

Il s’agit alors de granulome ou inflammation spécifique.

B -Causes :

Le granulome inflammatoire traduit toujours la persistance de l’agent inflammatoire sous une forme visible ou non.

Cette persistance peut être liée :

• à une phagocytose insuffisante, voir impossible : résistance de germes ; corps étrangers non biodégradables ; déficit enzymatique.

• à une inefficacité partielle ou totale des processus immunitaires : granulome des maladies auto-immunes.

• à un débordement des deux processus de défense soit par arrivée permanente d’agents inflammatoires, soit par résistance naturelle propre à certains germes : affection chronique comme la tuberculose, la brucellose…

Granulomes inflammatoires non spécifiques :

En pathologie humaine les granulomes fréquents sont le plus souvent des lésions non spécifiques auxquelles se rattachent des notions d’inflammation subaiguë et chronique.

L’inflammation chronique est un processus inflammatoire qui évolue depuis un certain temps, qui persiste ou s’aggrave malgré le traitement.

Le granulome est constitué de lymphocytes, de plasmocytes, d’une quantité variable d’histiocytes et d’une sclérose d’intensité variable mais qui est toujours la marque de la chronicité du processus inflammatoire.

Cette sclérose peut compromettre le bon fonctionnement d’un organe.

Le terme d’inflammation subaiguë est attribué soit à une inflammation aiguë en voie de guérison, soit à une inflammation aiguë évoluant vers la chronicité.

Ce terme doit être évité car il ne correspond pas à un tableau anatomo-clinique précis.

Granulomes et inflammations spécifiques :

A – Données générales :

Ce sont des lésions qui permettent à elles seules un diagnostic étiologique :

• soit du fait de l’aspect caractéristique de l’agencement cellulaire – granulome épithélioïde et gigantocellulaire.

En fait ces lésions ont une spécificité relative et ne représentent qu’un élément d’orientation diagnostique vers un groupe d’affections hétérogènes.

• soit du fait de la présence de l’agent pathogène identifiable.

Ce sont les lésions de spécificité absolue, rares en pathologie humaine.

B – Principaux types de lésions :

1- Les lésions d’origine bactérienne :

Tuberculose due à une mycobactérie, le bacille de Koch, parfois mis en évidence par la coloration de Ziehl.

Infection due à des mycobactéries atypiques chez les sujets atteints de SIDA : poumon, ganglions, tissus hématopoïétiques.

En dehors de ces affections il est exceptionnel de mettre en évidence l’agent bactérien responsable d’une lésion sur les coupes histologiques.

2- Infections fungiques – mycoses :

Relativement fréquentes car favorisées actuellement par l’antibiothérapie, la corticothérapie, les chimiothérapies immunosuppressives et le déficit immunitaire du SIDA.

Deux variétés anatomocliniques de mycoses :

• mycose cutanéo-muqueuse exemple : candidose

• mycose viscérale ou profonde : aspergillose bronchopulmonaire ; cryptococcose ou torulose ; histoplasmose (Amérique du nord).

Lésions histologiques :

– lésions inflammatoires banales aiguës ou chroniques

– lésions granulomateuses épithélioïdes et gigantocellulaires

Diagnostic : mise en évidence du champignon par coloration spéciale (PAS, grocott), sous la forme de levure et/ou de filaments ramifiés.

3- Les viroses :

Les granulomes liés aux infections virales seront traités ultérieurement.

4- Les parasitoses :

Certaines s’accompagnent d’un tableau anatomoclinique particulier :

• Amibiase : amibes à la surface de la muqueuse colique ou dans la sous-muqueuse, responsables d’un inflammation aiguë abcédée.

• Parasitoses vermineuses : oxyurose, distomatose hépatique.

Echinococcose responsable du kyste hydatique du foie.

• Schistosomiase ou bilharziose : granulome tuberculoïde autour des oeufs de bilharzie dans le foie, dans la paroi intestinale ou vésicale.

• Pneumocystose : pneumopathie interstitielle avec accumulation d’un protozoaire le pneumocystis carinii dans les alvéoles pulmonaires.

Dans certains cas l’agent pathogène présent dans les lésions échappe à l’examen histologique conventionnel.

Il est alors utile d’avoir recours à d’autres techniques d’examen : immunofluorescence (antigène viraux), microscopie électronique, hybridation in situ.

Les granulomes à corps étrangers :

Ils sont extrêmement fréquents

A – corps Etrangers inertes :

1- Description :

Accumulation d’histiocytes, de cellules géantes multinucléées au contact de la substance étrangère.

Les cellules géantes se forment soit par coalescence, c’est à dire fusion des histiocytes

– cellules géantes syncytiales dont les noyaux se disposent en périphérie ou cellules de Langhans, soit par division nucléaire dans division cytoplasmique

– cellules géantes plasmodiales à noyaux disposés sans ordre ou cellules de Muller.

Ces granulomes s’entourent très souvent d’une fibrose périphérique.

2- Etiologies :

a- corps étrangers exogènes :

• Matériel chirurgical : fils de suture non résorbables ; talc des gants chirurgicaux.

• Matériel d’origine traumatique : débris de verre

• Substances médicamenteuses : granulome macrophagique des sinus ganglionnaires après injection de Lipiodol pour lymphographie ; corps étrangers non lipidiques mis en évidence par biréfringence à l’examen en lumière polarisée.

b- endogènes :

• Poils ou squames de kératine : kyste du sinus pilonidal ;

• Débris alimentaires et fécaux par perforation digestive dans le péritoine,

• Cristaux de cholestérol, athérome

• Cristaux d’urate dans la goutte

• Granulome de la cytostéatonécrose

B – corps étrangers toxiques :

Inhalation de fines particules de silice de 1 à 5 microns responsables du granulome silicotique.

La silicose est avant tout une maladie des mineurs mais s’observe dans les professions où il y a libération de silice dans l’air ambiant (fabrication du verre).

Les particules de silice inhalées sont phagocytées par les macrophages et entraînent la mort des cellules macrophagiques responsables d’une réaction fibroblastique et d’un nodule silicotique acellulaire entraînant une insuffisance respiratoire chronique.

Granulomes épithélioïdes et gigantocellulaires :

Lésions très fréquentes rencontrées dans des affections très diverses ayant en commun de solliciter des phénomènes d’immunité à médiation cellulaire, c’est à dire des réactions immunitaires d’hypersensibilité retardée.

Certaines particularités morphologiques du granulome vont orienter le diagnostic vers telle ou telle étiologie.

Il s’agit donc de lésions ayant une certaine spécificité.

A – Description :

Ces granulomes à structure particulière sont constitués de cellules épithélioïdes disposées de façon concentrique en follicules et souvent associées à des cellules géantes.

B – Mécanisme de formation :

Ce granulome témoigne de la participation prédominante des lymphocytes T.

Les phénomènes d’hypersensibilité retardée jouent un rôle très important dans la formation du granulome épithélioïde et gigantocellulaire par l’intermédiaire des lymphokines sécrétées par les T lymphocytes en présence de l’antigène :

• facteur chémotactique

• facteur inhibant la migration des macrophages

• facteur de fusion des macrophages

D’autres facteurs seraient susceptibles d’intervenir tels que l’interleukine 2 et l’interféron gamma.

C – Affection avec lésions épithélio-giganto-cellulaires :

1- La tuberculose :

2- La sarcoïdose ou maladie de Besnier-Boeck-Schaumann :

Affection relativement fréquente en France d’étiologie mystérieuse.

Maladie de système qui touche tous les organes ou presque dont le diagnostic est fait par biopsie soit sur des lésions ganglionnaires, soit sur des biopsies bronchiques étagées, soit sur des biopsies hépatiques.

En l’absence de contexte clinique et biologique le granulome sarcoïdosique est très difficile à distinguer du granulome tuberculeux.

3- Etiologies diverses :

Le plus souvent le diagnostic étiologique précis de très nombreuses affections n’est fait qu’après confrontation clinique, bactériologique ou sérologique :

• brucellose

• mycobactéries atypiques

• chlamydiacées (sorte de macrovirus)

– lymphoréticulose bénigne d’inoculation ou maladie des griffes du chat.

Ces lésions sont parfois appelés adénites réticulohistiocytaires abcédées.

– maladie de Nicolas et Favre : maladie vénérienne ou lymphogranulome vénérien.

– yersiniose de l’enfant et de l’adolescent avec adénolymphadénopathie mésentérique.

• mycoses et levures où les filaments mycéliens sont colorés en pourpre par la coloration de PAS.

• autres lésions beaucoup plus rares :

– la maladie de Crohn

– la syphilis tertiaire

– la bilharziose et la lèpre chez les sujets ayant vécu hors de France.

Conclusion :

L’introduction d’un agent étranger dans l’organisme déclenche une réaction inflammatoire qui pourra être non spécifique ou au contraire assez caractéristique de l’agent pathogène.

Le plus souvent la mise en évidence de l’agent pathogène à l’intérieur des lésions permet de parler de granulome ou inflammation spécifique.

Les lésions granulomateuses de type épithélioïde et gigantocellulaire fréquentes orientent vers un groupe relativement précis d’étiologies.

Ces lésions anatomopathologiques ne sont, le plus souvent, qu’un élément d’orientation le diagnostic étiologique reposant sur l’anamnèse, le tableau clinique et les résultats des examens biologiques – bactério et sérologies –

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