La goutte constitue l’expression ostéoarticulaire d’une
hyperuricémie, conséquence d’une production excessive et/ou d’une
élimination défaillante de l’acide urique.
Elle se caractérise par des
épisodes récurrents d’arthrite aiguë affectant une ou plusieurs
articulations.
Après plusieurs années et en l’absence de traitement
adapté se développe la goutte tophacée chronique.
Biochimie
:
L’acide urique correspond au catabolite ultime des purines.
Il
provient de trois sources différentes :
– le catabolisme des acides nucléiques alimentaires.
L’acide urique
ainsi formé peut être absorbé par la muqueuse intestinale et gagner
la circulation générale ;
– la dégradation des acides nucléiques cellulaires.
Lors de la mort
cellulaire se produit un catabolisme des acides nucléiques,
responsable d’une production non négligeable d’acide urique.
Cette
production peut devenir considérable dans les destructions
cellulaires exagérées (cancers, affections hématologiques
malignes…) ;
– la purinosynthèse de novo, qui constitue la source principale
d’acide urique.
L’acide urique est essentiellement éliminé par le rein.
C’est à ce
niveau que peut se produire une compétition avec d’autres
métabolites (lactates, corps cétoniques…) et médicaments
(diurétiques, acide acétylsalicylique…).
Terrain
:
La goutte est le plus souvent idiopathique, c’est-à-dire primitive,
résultant le plus souvent d’une anomalie génétique à l’origine d’une
erreur du métabolisme.
Elle est alors volontiers révélée par des
erreurs alimentaires et affecte essentiellement l’homme (20 fois plus
que la femme), notamment dans la cinquième décennie.
Chez les
femmes, la goutte se manifeste dans la période postménopausique,
avec une topographie souvent moins caractéristique (les pieds sont
volontiers épargnés).
Un facteur iatrogène, notamment la prise de
diurétiques thiazidiques, est à rechercher systématiquement.
La
goutte peut cependant survenir à tout âge.
Il existe une
prévalence familiale, mais d’importance très diverse dans la
littérature (6 % à 80 %).
L’hyperuricémie est en fait la conséquence d’une production
excessive ou d’une élimination insuffisante de l’acide urique, ou
d’une association des deux.
Clinique
:
La goutte se manifeste sous deux formes cliniques : l’accès aigu et la
goutte tophacée chronique.
A - ACCÈS AIGU GOUTTEUX
:
Il s’agit le plus souvent d’une arthrite, mais une bursite ou une ténosynovite aiguë peut également constituer la manifestation
inaugurale de cette affection.
Cette arthrite peut être déclenchée par
un excès alimentaire, une prise d’alcool, un jeûne, ou par divers facteurs favorisants (prise médicamenteuse, traumatisme local,
intervention chirurgicale…).
Elle est provoquée par le passage
de microcristaux d’urate de sodium dans la cavité articulaire.
Ce
passage est secondaire à la rupture d’un dépôt microcristallin
synovial ou cartilagineux, ou à un phénomène de précipitation des
microcristaux dans le liquide articulaire.
Cette arthrite aiguë, parfois précédée de prodromes à type
d’irritabilité, d’asthénie ou de divers troubles digestifs, se caractérise
par une douleur intense et une tuméfaction articulaire
inflammatoire, de survenue brutale, volontiers nocturne.
La
mobilisation de l’articulation est souvent impossible.
Des frissons et
une fièvre modérée peuvent s’observer.
Ces éléments peuvent
parfois simuler une arthrite septique, d’autant qu’un syndrome
inflammatoire est fréquemment présent.
La ponction intra-articulaire
ramène un liquide opalin, plus rarement puriforme, contenant 2 000
à 5 000 éléments/mm3, mais parfois davantage (> 50 000/mm3).
Cette arthrite est typiquement mono- ou oligoarticulaire, rarement
polyarticulaire, ce qui pose alors des problèmes de diagnostic
différentiel, notamment avec une polyarthrite rhumatoïde.
L’arthrite aiguë goutteuse évolue par crises de 1 à 2 semaines
entrecoupées de rémissions de plusieurs mois ou années pendant
lesquelles les patients sont asymptomatiques.
Cependant, avec la
répétition des accès et en l’absence de thérapeutique adaptée,
l’arthrite peut persister plus longtemps, survenir sur un rythme plus
fréquent et avoir une distribution polyarticulaire.
De même, la
rémission des symptômes peut être incomplète.
B - GOUTTE TOPHACÉE CHRONIQUE
:
Elle est de survenue tardive puisqu’elle se manifeste habituellement
8 à 10 ans après le premier accès goutteux.
Elle est caractérisée par
la présence de tophus, dépôts tissulaires uratiques dont le
développement est corrélé au taux de l’hyperuricémie et à la durée
de la maladie.
Ces tophus affectent les tissus sous-cutanés et les
tissus articulaires et para-articulaires.
Ils se traduisent par des
tuméfactions de taille progressivement croissante en l’absence de
traitement, fermes à la palpation, blanchâtres et indolores.
Ils peuvent être le siège d’une inflammation, s’ulcérer et se fistuliser,
et alors laisser sourdre une bouillie crayeuse. Ils s’infectent
très rarement.
Ils peuvent également être responsables de
compressions nerveuses.
L’administration de corticoïdes semble
favoriser leur développement en situation intradermique.
Leur
topographie intra- ou para-articulaire est responsable du
développement d’une arthropathie de siège identique à celui des
accès aigus, mais de traduction clinique généralement moins intense.
Le développement d’un tophus en l’absence d’antécédents d’arthrite
aiguë goutteuse est rare et peut être source d’erreurs
diagnostiques.
C - AUTRES MANIFESTATIONS
:
Les patients goutteux présentent par ailleurs, dans 20 à 40 % des
cas, une lithiase urique.
C’est parfois une colique néphrétique qui
fait découvrir une hyperuricémie par ailleurs asymptomatique.
Plus
que l’hyperuricurie, c’est en fait l’acidité urinaire qui est responsable
de la précipitation des cristaux et de la formation des lithiases.
Celles-ci sont radiotransparentes.
Les dépôts uratiques intrarénaux
peuvent également être responsables du développement d’une
néphropathie interstitielle pouvant aboutir à une insuffisance rénale.
Diagnostic
:
A - ACCÈS AIGU
:
La prévalence de la goutte, de l’ordre de 0,5 à 2 % des cas selon
l’âge des sujets dans la population générale, contraste avec la
prévalence de l’hyperuricémie idiopathique, de l’ordre de 5 à 20%.
L’hyperuricémie (uricémie supérieure à 70 mg/L [416 µmol/L] chez
l’homme et 60 mg/L [350 µmol] chez la femme), condition nécessaire
au développement de la goutte, ne suffit donc pas à elle seule à
définir la maladie.
De plus, lors d’un accès aigu, l’uricémie peut être normale.
L’élément majeur du diagnostic est donc, en présence d’une arthrite
aiguë, la présence de cristaux d’urate de sodium dans le liquide
articulaire.
Ces cristaux ont une forme « en aiguille » avec des
extrémités effilées, parfois un aspect « en corde ».
Ils sont fortement
biréfringents en lumière polarisée et sont dissous par l’uricase.
Cette
ponction permet en outre d’éliminer le diagnostic d’arthrite
septique, principal diagnostic différentiel au départ.
La synoviale est le siège d’une réaction inflammatoire non
spécifique, mais elle présente des microtophus à sa partie
superficielle.
En l’absence de cristaux d’urate de sodium dans le
liquide articulaire, la découverte de ces dépôts lors de l’étude
microscopique ou chimique d’une biopsie synoviale peut donc
également confirmer le diagnostic.
Cependant, les antécédents
personnels et familiaux du patient, l’existence de facteurs
favorisants, et la diminution importante de l’inflammation
articulaire dans les 48 heures suivant l’administration de colchicine,
constituent également des éléments diagnostiques majeurs et
rendent l’indication d’une biopsie synoviale tout à fait
exceptionnelle.
B - GOUTTE TOPHACÉE CHRONIQUE
:
À la phase chronique, la présence de tophus est caractéristique et
pose peu de problèmes diagnostiques.
En cas de doute, la ponction
ou la biopsie d’un tophus permet aisément de reconnaître les
cristaux d’urate de sodium.
Topographie des atteintes
:
L’accès aigu, mono- ou oligoarticulaire, présente une prédilection
pour les articulations des membres inférieurs, notamment pour la
première articulation métatarsophalangienne (site initial de
l’affection dans 75 % à 90 % des cas).
Les articulations médiotarsiennes, les chevilles et les genoux sont également
volontiers affectés.
L’atteinte des articulations métacarpophalangiennes et
interphalangiennes des doigts, des poignets et des coudes, s’observe
en revanche dans des arthrites de plus longue durée.
L’atteinte du
rachis, des hanches, des épaules et des articulations sacro-iliaques et sternoclaviculaires est inhabituelle et ne survient que dans les
maladies de longue durée.
Les structures para-articulaires peuvent également être le siège
d’une inflammation aiguë, notamment les bourses séreuses
prépatellaire et rétro-olécranienne, et les tendons calcanéens,
épicondyliens, épitrochléens et surtout de la patte-d’oie.
À la phase chronique, les dépôts d’urate se situent dans le cartilage,
l’os sous-chondral, la membrane synoviale, la capsule, les structures
périarticulaires et la graisse sous-cutanée.
On les retrouve volontiers
au pavillon de l’oreille, dans les régions rétro-olécranienne et
prépatellaire, mais également aux mains et aux pieds où ils
prédominent sur les faces d’extension.
Ils sont typiquement de
distribution excentrique et asymétrique.
Le siège des arthropathies
goutteuses mécaniques est identique à celui des accès aigus.
Signes radiographiques
:
A - ACCÈS AIGU
:
En cas d’arthrite aiguë goutteuse, les radiographies sont le plus
souvent normales.
Un épanchement intra-articulaire ou un
oedème périarticulaire non spécifique sont parfois observés.
B - GOUTTE TOPHACÉE CHRONIQUE
:
Elle se caractérise par une affection polyarticulaire asymétrique, avec
prédilection pour les membres inférieurs.
Elle associe :
– des tophus sous-cutanés.
Ils se traduisent par des masses
excentrées de taille variable, de distribution asymétrique,
pouvant parfois déformer l’extrémité d’un doigt ou d’un orteil.
Ces masses sont denses et peuvent se calcifier ;
– des érosions osseuses para-articulaires excentrées.
Elles sont
secondaires aux tophus adjacents.
Elles sont bien limitées, parfois cerclées d’un liseré de condensation, et réalisent l’aspect en
hallebarde lorsqu’elles sont marginales et contiguës.
Elles sont
habituellement de grande taille et profondes, de grand axe parallèle
à celui des diaphyses.
Une surélévation du bord des érosions par le
tophus est responsable d’un aspect de spicule extrêmement
évocateur de la goutte ;
– des géodes intraosseuses pseudokystiques : elles témoignent de
dépôts d’urate de sodium dans l’os.
Elles sont arrondies ou
ovalaires, de grand axe parallèle à celui des diaphyses, et sont bien
limitées, à l’emporte-pièce, parfois bordées d’un liseré
d’ostéocondensation.
Elles peuvent se calcifier.
Elles sont de taille variable mais sont très évocatrices de la
goutte lorsqu’elles sont de grande taille (> 5 mm de grand axe).
Elles
peuvent être uniques ou multiples, centrées ou excentrées, mais elles
siègent habituellement à proximité des articulations.
Lorsqu’elles
sont excentrées, elles amincissent la corticale en regard et peuvent
souffler l’os.
Elles sont susceptibles de s’ouvrir dans
l’articulation, et par conséquent, de donner une image de géode ou
d’érosion intra-articulaire.
Lorsqu’elles sont de petite taille et ont
une topographie marginale, elles peuvent mimer une arthrite
rhumatismale.
La reconnaissance des spicules est alors utile.
Lorsqu’elles sont de grande taille, elles sont susceptibles de détruire
l’articulation ;
– des proliférations osseuses juxta-articulaires.
Outre les spicules
osseux réactionnels à la présence de tophus adjacents, parfois
exubérants, et pouvant mimer une pathologie tumorale, il
peut s’agir d’appositions périostées (notamment au premier rayon
métatarsophalangien), de volumineux ostéophytes (responsables du classique « pied hérissé ») et de proliférations osseuses
épaisses et irrégulières aux insertions tendineuses et musculaires
(calcanéus, olécrane et patella notamment), mais dont la
fréquence serait similaire à celle de la population générale.
Des
modifications dégénératives peuvent se surajouter ;
– un interligne articulaire longtemps préservé, contrastant avec la
présence d’érosions et de géodes.
Les lésions ostéocartilagineuses sont en effet focales, épargnant des plages de
cartilage normal.
Tardivement, peuvent cependant s’observer un
pincement uniforme et une désaxation ou une destruction
articulaire.
L’ankylose osseuse est rare, excepté aux
articulations interphalangiennes des mains et des pieds et dans la
région intercarpienne.
Signes négatifs
:
À la différence d’autres pathologies articulaires, notamment la
polyarthrite rhumatoïde, la raréfaction osseuse juxta-articulaire est
absente ou très modérée dans la goutte, contrastant avec la présence
d’érosions osseuses.
Imagerie complémentaire
:
Celle-ci est essentiellement réalisée lors de complications ou à visée
préopératoire, plus rarement en cas de doute diagnostique.
En
échographie, l’aspect du tophus dépend de sa structure.
Il apparaît
d’échogénicité homogène lorsqu’il n’est pas trop dur à la palpation,
et sous la forme d’une bande hyperéchogène avec ombre acoustique
correspondant à sa partie superficielle lorsqu’il est dur à la palpation
et fortement calcifié.
Entre ces deux stades, de fines calcifications
nodulaires peuvent être individualisées en son sein.
En scanner, les tophus apparaissent comme des masses polylobées
denses, volontiers calcifiées.
En imagerie par résonance
magnétique (IRM), ils sont en hyposignal ou de signal
intermédiaire en T1.
En pondération T2, ils sont le plus souvent hypo-intenses, mais un hypersignal peut également être observé.
Après injection de gadolinium, un rehaussement
homogène du tophus est fréquent.
Les articulations affectées
peuvent présenter un épaississement synovial marqué, de type
pannus, ou un épaississement synovial nodulaire comportant des
masses lobulées.
Un épanchement d’abondance variable peut être
associé.
Un oedème des parties molles adjacentes est fréquemment
rapporté.
Un oedème de l’os adjacent à des tophus intraosseux
peut également s’observer.
Formes topographiques
:
A - PIEDS
:
L’atteinte la plus caractéristique est celle de la première articulation
métatarsophalangienne.
Au départ, les érosions se traduisent
souvent par une simple irrégularité de la corticale et sont à rechercher sur les faces médiale et dorsale de la première tête
métatarsienne.
Une tuméfaction des parties molles et un hallux valgus sont fréquemment associés.
Des constructions osseuses
sont également fréquentes, à l’origine d’un aspect élargi et irrégulier
de la première tête métatarsienne.
Avec le temps, les érosions
et géodes ouvertes dans l’articulation peuvent aboutir à une
ostéolyse complète de la tête du premier métatarsien et/ou à un
pincement marqué de l’interligne, voire même à une ankylose.
L’atteinte des autres articulations métatarsophalangiennes
(notamment du cinquième rayon) et interphalangiennes peut
également s’observer.
L’atteinte de l’arrière-pied est
plus tardive et intéresse essentiellement les articulations
médiotarsiennes.
On retient les constructions ostéophytiques
dorsales des articulations talonaviculaires et naviculocunéennes
réalisant l’aspect de « pied hérissé », et les excroissances
osseuses rétro- et sous-calcanéennes parfois extrêmement marquées
(véritable blindage calcanéen).
Un volumineux tophus peut
également être responsable de la destruction de plusieurs os du tarse.
L’atteinte de la cheville est plus rare et se traduit
essentiellement par des géodes des malléoles et par des ostéophytes
marginaux.
B - GENOU
:
La présence d’encoches des faces latérales et médiale des plateaux
tibiaux et des condyles fémoraux, ou l’existence de volumineuses
lacunes intraosseuses fémorales ou tibiales pouvant mimer
une tumeur ou une géode pseudokystique, sont très évocatrices de
la goutte, surtout lorsqu’elles contrastent avec l’absence de
pincement articulaire.
L’atteinte de la patella est également
fréquente et est évocatrice lorsqu’il s’agit d’érosions finement
cerclées associées à des spicules osseux réactionnels à la présence
des tophus prépatellaires.
C - MAINS ET POIGNETS
:
Il s’agit essentiellement de l’atteinte des articulations
interphalangiennes et, à un moindre degré, des articulations
métacarpophalangiennes.
L’absence
de symétrie est un élément intéressant pour la différenciation avec
une polyarthrite rhumatoïde.
Des érosions du carpe et des
articulations carpométacarpiennes peuvent également s’observer,
remarquables par l’absence de systématisation.
Un
volumineux tophus détruit parfois les os du carpe, notamment sur
le bord ulnaire.
D - COUDE
:
Une bursite recouvrant la face dorsale de l’olécrane est fréquente,
de même que des érosions et des proliférations osseuses.
E - AUTRES ARTICULATIONS
:
Elles sont exceptionnellement affectées de façon isolée.
L’atteinte de
l’épaule et de la hanche est rare et se traduit par une tuméfaction
des parties molles, des érosions osseuses, des lésions pseudokystiques et/ou des proliférations osseuses. Les
articulations sacro-iliaques peuvent également être affectées, avec un
aspect irrégulier et festonné des berges articulaires.
Au
rachis, des érosions de l’odontoïde, des plateaux vertébraux et des
articulations zygapophysaires, des pincements discaux et des
subluxations vertébrales ont été signalés.
Une
compression médullaire secondaire à la présence de dépôts de
cristaux d’urate de sodium en situation extradurale a également été
rapportée.
Enfin, on note la possibilité d’atteinte extrêmement rare
des articulations temporomandibulaires, cricoaryténoïdiennes,
costochondrales et manubriosternales.
Diagnostic différentiel
:
A - ARTHRITE SEPTIQUE
:
C’est le principal diagnostic différentiel lors d’un accès aigu. En cas
de suspicion, une ponction articulaire est indispensable et permet
de trancher entre ces deux affections.
B - POLYARTHRITE RHUMATOÏDE
:
À un stade tardif, l’atteinte polyarticulaire de la goutte peut simuler
celle de la polyarthrite rhumatoïde.
Cependant, cette dernière se
caractérise par une atteinte typiquement symétrique qui prédomine
aux mains et poignets, une tuméfaction fusiforme des parties molles,
une raréfaction osseuse, un pincement articulaire précoce et des
érosions marginales.
Il n’y a pas d’érosions para-articulaires ni de
signes de reconstruction de type spicules. De plus, les nodules
rhumatoïdes sont rarement calcifiés.
C - ARTHRITE PSORIASIQUE
:
Dans cette affection, le pincement articulaire est également
volontiers précoce, associé à des érosions marginales de petite taille.
Lorsque l’atteinte articulaire est plus avancée, une résorption
osseuse des têtes métacarpiennes, métatarsiennes et phalangiennes
peut s’observer et est évocatrice d’une arthrite psoriasique.
Enfin,
les constructions osseuses sont en général floues, irrégulières, à type
de microspicules, et sont par conséquent différentes de celles
observées dans la goutte, réactionnelles à la présence des trophus.
D - ARTHROSE
:
Il s’agit parfois du principal diagnostic différentiel car la goutte se
traduit par des lésions prolifératives réactionnelles de l’os
(ostéophytose, ostéocondensation sous-chondrale) pouvant obscurcir
les signes plus caractéristiques de cette affection.
De plus, les
nodules d’Heberlen, observés habituellement dans l’arthrose
digitale, ont été rapportés dans la goutte.
En fait, la topographie
des lésions, la présence de tophus et d’érosions notamment paraarticulaires
et le respect habituel de l’interligne permettent
habituellement la différenciation.
E - ARTHROSE ÉROSIVE
:
L’atteinte est symétrique et habituellement confinée aux articulations interphalangiennes des doigts, à la première articulation
carpométacarpienne et à l’articulation scaphotrapézienne.
Les
érosions débutent à la partie centrale de l’articulation, puis affectent
l’os marginal.
Les aspects cliniques et radiographiques ne posent
habituellement pas de problème diagnostique.
F - CHONDROCALCINOSE ET ARTHROPATHIE
À MICROCRISTAUX DE PYROPHOSPHATE DE CALCIUM :
La présence intra-articulaire de ces cristaux peut mimer le tableau
clinique de goutte, ce qui explique la dénomination habituelle de
syndrome pseudogoutteux.
En cas d’accès aigu, en l’absence de
chondrocalcinose sur les clichés standards, le diagnostic repose sur
l’individualisation de ces microcristaux de forme différente et non
biréfringents en lumière polarisée.
Au stade d’arthropathie, la
sévérité du pincement contraste avec l’absence ou le faible
développement de constructions osseuses.
On n’observe pas de
tophus ni d’érosions osseuses, notamment para-articulaires.
La
topographie des arthropathies est également généralement
différente.
G - SARCOÏDOSE
:
Bien que l’atteinte granulomateuse de la synoviale et de l’os juxtaarticulaire
puisse s’observer dans l’arthrite sarcoïdosique chronique,
les destructions articulaires et les déformations sont inhabituelles.
En cas de doute, une biopsie synoviale permet de trancher.
H - RÉTICULOHISTIOCYTOSE MULTICENTRIQUE
:
Cette affection rare de la synoviale et de la peau peut comporter des
signes proches de la goutte (érosions, absence de raréfaction
osseuse). L’atteinte est cependant symétrique et les espaces
articulaires se pincent rapidement.
I - AMYLOSE
:
L’amylose primitive ou secondaire peut entraîner des lésions
osseuses érosives et kystiques similaires à celles de la goutte, ainsi
que des masses des parties molles.
Ces dernières sont également hypo-intenses en pondération T2, mais ne sont théoriquement pas
calcifiées.
La présence d’un syndrome du canal carpien est
fréquemment associée, de même que l’atteinte d’autres viscères.
J - XANTHOMATOSE
:
Cette affection se traduit par le développement de masses nodulaires
excentriques des parties molles, avec érosions osseuses sous-jacentes
pouvant simuler la goutte.
Les xanthomes tendineux sont
particulièrement fréquents au niveau des tendons extenseurs de la
main et du pied et dans les tendons patellaire et calcanéen. Une
hypercholestérolémie est volontiers associée.
Complications
:
Les tophus intraosseux peuvent être le siège de fractures,
notamment aux doigts et au bassin. Une rupture de kyste
poplité est également possible.
Enfin, des compressions
médullaires et radiculaires, secondaires à des tophus intracanalaires,
ont été rapportées.
Traitement
:
L’accès aigu est habituellement traité par colchicine, mais les antiinflammatoires
non stéroïdiens peuvent être utilisés, notamment en
raison des troubles digestifs parfois causés par la colchicine.
En cas
de crises récidivantes, il convient de prescrire un régime, des règles hygiénodiététiques et un traitement hypo-uricémiant de fond
reposant sur les inhibiteurs de l’uricosynthèse (allopurinol) ou les
uricosuriques qui augmentent l’élimination urinaire de l’acide
urique (benzbromarone).