Actuellement, le cliché thoracique fait partie intégrante de l’approche
diagnostique non invasive des cardiopathies congénitales.
Il constitue
la première étape avant la réalisation du bilan échocardiographique.
En
outre, il demeure une technique simple et indispensable pour la
surveillance médicale et postchirurgicale des cardiopathies
congénitales.
Sa réalisation technique requiert beaucoup de soins : cliché en moyenne
tension, temps de pause le plus court possible, en bonne inspiration et
bien centré.
Chez le nouveau-né et le petit nourrisson, il peut être réalisé
en décubitus.
Dans la plupart des cas, l’incidence de face suffit.
Elle peut
être occasionnellement complétée par des incidences transverses,
obliques antérieures gauche et droite avec éventuellement opacification
de l’oesophage.
L’interprétation du cliché standard nécessite l’analyse logique et
méthodique des informations qu’il contient : silhouette cardiaque
(position, taille et contours du coeur, des gros vaisseaux), vascularisation
pulmonaire proximale et périphérique, autres constituants thoraciques
qui entourent le coeur.
A - Silhouette cardiaque
:
1- Position du coeur
:
Sur un cliché bien orienté et bien centré de face, il convient en premier
lieu de situer l’emplacement de la silhouette cardiaque en le confrontant
à celui des viscères abdominaux.
Dans sa position normale, le coeur est à gauche, ce qui définit le situs
solitus.
Il peut être à droite : c’est la dextrocardie, soit par dextroposition
(pointe à gauche), soit pas dextroversion (pointe à droite), avec viscères
abdominaux en place.
Il peut s’agir également d’une dextrocardie avec
inversion des viscères abdominaux (situs inversus complet).
Le coeur
peut enfin rester en position intermédiaire, c’est la mésocardie.
2- Taille du coeur
:
L’index cardiothoracique varie avec l’âge.
Ainsi, on peut considérer
qu’il existe une cardiomégalie lorsqu’il est supérieur à 0,6 jusqu’à
1 mois, supérieur à 0,55 de 1 mois à 2 ans, supérieur à 0,50 de 2 à 12 ans
et supérieur à 0,45 après 12 ans.
Mais toutes les cardiopathies ne s’accompagnent pas de cardiomégalie.
Par ailleurs, il peut exister de « faux gros coeurs » dus à une mauvaise
technique (agrandissement, expiration), en rapport avec un gros thymus
recouvrant largement la silhouette cardiaque ou dans le cas d’une
déformation thoracique.
3- Contours du coeur
:
La modification des contours cardiaques traduit habituellement
l’augmentation de taille des cavités.
– Oreillette droite.
L’augmentation de taille de l’oreillette droite se traduit par un débord et
surtout une hyperconvexité plus ou moins marquée de l’arc inférieur
droit du médiastin.
À noter qu’une saillie modérée de l’arc inférieur droit
n’est pas toujours pathologique : elle est assez fréquente chez le
nourrisson normal.
Une grosse oreillette droite se rencontre dans plusieurs conditions :
atrésie et insuffisance tricuspidienne, maladie d’Ebstein,
communication interauriculaire à gros débit, obstacle de la voie
pulmonaire.
– Oreillette gauche.
Une grosse oreillette gauche est responsable de face d’une image en
double contours de l’arc inférieur droit et un dédoublement de l’arc
moyen gauche en rapport avec la saillie de l’auricule gauche.
Dans cette
incidence, elle peut également ne se manifester que par un diastasis et
une ascension des bronches souches, particulièrement chez le nouveauné.
De profil, elle entraîne une empreinte et un refoulement vers l’arrière
de l’oesophage.
La dilatation de l’oreillette gauche se rencontre dans les malformations
mitrales et surtout dans les shunts gauche-droite importants à l’étage
ventriculaire ou artériel (communication interventriculaire, persistance
du canal artériel).
– Ventricule droit.
La dilatation et l’hypertrophie réalisent de face une ascension de l’apex
en haut et en dehors, une horizontalisation de l’axe longitudinal du coeur
réalisant une pointe « sus-diaphragmatique ».
De profil, il existe un
comblement de l’espace clair rétrosternal.
La dilatation du ventricule droit s’observe dans certaines cardiopathies
congénitales cyanogènes (tétralogie de Fallot, atrésie pulmonaire à
septum ouvert, ou dans les shunts, notamment la communication interauriculaire).
– Ventricule gauche.
La dilatation du ventricule gauche réalise de face une augmentation du
volume cardiaque avec allongement de l’arc inférieur gauche.
L’apex
est abaissé et déplacé en dehors et en arrière.
Elle s’observe dans les
shunts gauche-droite volumineux (communication interventriculaire,
persistance du canal artériel), les obstacles à l’éjection aortique en voie
de décompensation, l’insuffisance aortique volumineuse.
B - Gros vaisseaux
:
1- Aorte
:
Il faut toujours commencer par préciser la position du bouton aortique
de face.
La crosse aortique est à droite dans 25 % des tétralogies de
Fallot et 35 % des troncs artériels communs.
Il faut également analyser sa taille : il est habituel de constater un petit
bouton aortique dans les shunts gauche-droite.Au contraire, l’aorte peut
être élargie, soit en raison de la présence d’un obstacle (dilatation
poststénotique du rétrécissement aortique), soit par augmentation du
flux aortique (canal artériel volumineux, élargissement de l’aorte
ascendante dans la tétralogie de Fallot).
2- Artère pulmonaire
:
Sur le cliché de face, elle correspond à l’arc moyen gauche.
Celui-ci peut
être saillant ou creux.
L’arc moyen saillant s’observe dans les augmentations de débit dans
l’artère pulmonaire (shunt gauche-droite), dans les obstacles d’aval
(sténose des branches de l’artère pulmonaire), dans les dilatations
poststénotiques (sténose pulmonaire orificielle).
L’arc moyen creux traduit une hypoplasie de l’artère pulmonaire
(tétralogie de Fallot, atrésie pulmonaire) ou une malposition vasculaire
où le pédicule vasculaire est anormalement étroit (transposition des gros
vaisseaux).
3- Vascularisation pulmonaire
:
Les conditions hémodynamiques engendrées par la cardiopathie vont
entraîner ou non des modifications de la vascularisation pulmonaire.
Il
convient donc de préciser à chaque fois si celle-ci est normale,
augmentée ou diminuée, et en cas d’augmentation, s’il s’agit d’une
congestion active ou passive, la topographie de ces modifications
(proximale ou distale par rapport au hile, symétrique ou non dans les
deux champs pulmonaires).
* Vascularisation pulmonaire normale
:
Il n’est pas toujours aisé de l’affirmer car il n’existe pas de critère
objectif chiffré.
Néanmoins, il existe quelques points de repère : sur un
cliché thoracique de bonne qualité, on doit pouvoir distinguer les artères
des veines pulmonaires.
La densité vasculaire est normalement plus
importante aux bases qu’aux sommets.
Les ombres vasculaires
diminuent uniformément de calibre de la région hilaire vers la
périphérie.
Leur trajet est rectiligne.
Ce type de vascularisation se rencontre dans les cardiopathies sans
retentissement hémodynamique pulmonaire.
* Vascularisation pulmonaire augmentée
:
Dans l’hypervascularisation artérielle, les hiles sont augmentés de
volume.
Les branches de division de l’artère pulmonaire sont saillantes,
dilatées et s’étendent plus loin qu’habituellement, jusqu’en périphérie
(cas des shunts gauche-droite volumineux).
Dans l’hypervascularisation veineuse, on retrouve des images
nodulaires, au contour flou, floconneuses, surtout périhilaires.
Elles
traduisent l’oedème interstitiel, voire même alvéolaire, occasionné par
un barrage sur la circulation de retour (coeur triatrial, retour veineux
pulmonaire anormal total...), une défaillance ventriculaire gauche.
* Vascularisation pulmonaire diminuée
:
Elle se traduit par une hyperclarté des champs pulmonaires.
Les
vaisseaux périphériques sont rares, minces, effilés, filiformes.
Cette hypovascularisation se rencontre dans les cardiopathies avec obstacle
sur le coeur droit : atrésie tricuspide ou pulmonaire, tétralogie de Fallot
sévère, maladie d’Ebstein...
Il peut exister une asymétrie de vascularisation des deux champs
pulmonaires : l’agénésie d’une artère pulmonaire, généralement la
droite, entraîne un petit poumon droit, généralement hypovascularisé
avec attraction du médiastin et surélévation diaphragmatique,
contrastant avec un poumon gauche distendu et hypervascularisé.
Une hyperclarté totale ou partielle d’un champ pulmonaire peut être observée
dans les shunts gauche-droite volumineux avec hypertension
pulmonaire sous l’effet de la compression des bronches par les artères
pulmonaires dilatées.
4- Environnement cardiaque
:
Les autres constituants anatomiques du médiastin doivent être analysés
systématiquement : thymus, dont l’absence peut orienter vers un
syndrome de Di George ; oesophage, dont l’opacification barytée de
profil peut révéler des encoches anormales caractéristiques d’un arc
aortique anormal ; médiastin, dont l’élargissement avec aspect en huit
de chiffre est classique du retour veineux pulmonaire anormal total supracardiaque.
Échocardiographie doppler :
C’est la méthode de référence pour l’étude des cardiopathies
congénitales.
A - Mode bidimensionnel
:
À l’heure actuelle, l’étude des cardiopathies congénitales concerne
essentiellement des nourrissons et des enfants.
À cet âge, la petite taille
des patients et la proximité des structures cardiaques et thoraciques
permettent l’obtention d’images de haute résolution grâce à des sondes
à fréquence élevée.
Il est rare qu’une distension pulmonaire gêne la
réalisation de l’exploration, comme c’est souvent le cas chez l’adulte.
1- Incidences réalisées
:
Elles peuvent être multipliées, augmentant ainsi les performances de
l’examen.
Outre les incidences parasternales, longitudinales et
transversales, les incidences apicales, on obtient des images d’une
grande précision par voie sous-costale et également suprasternale.
2- Analyse segmentaire
:
Il est indispensable de pratiquer, en échocardiographie, une analyse
systématique du coeur segment par segment, surtout en cas de
cardiopathie complexe.
On devra donc définir le situs viscéroatrial, la
morphologie ventriculaire et les connexions auriculoventriculaires, la
morphologie, la position des gros vaisseaux et les connexions
ventriculoartérielles.
*
Identification du situs viscéroatrial :
– Situs viscéral : une coupe transversale de l’étage supérieur de
l’abdomen permet de définir le situs viscéral.
Normalement, l’aorte est à
gauche du rachis, la veine cave inférieure à droite, ainsi que le foie.
– L’oreillette droite est facilement identifiée par sa connexion avec la
veine cave inférieure qui reçoit les veines sus-hépatiques juste audessous
du plancher auriculaire.
Sa surface septale est caractérisée par
le septum secondum.
Le septum interauriculaire bombe normalement
vers l’oreillette droite.
On identifie l’abouchement du sinus coronaire
ainsi qu’au niveau du plancher auriculaire droit, la valve d’Eustachi.
Parfois sont mises en évidence des images endocavitaires correspondant
au réseau de Chiari.
– L’oreillette gauche est identifiée par son auricule gauche, véritable
appendice non incorporé au corps de l’oreillette, par sa surface septale
caractérisée par le septum primum, et enfin par l’abouchement des
veines pulmonaires.
* Identification de la boucle ventriculaire
:
Normalement, l’inflexion du tube cardiaque primitif vers la droite place
le sinus ventriculaire droit à droite du ventricule de morphologie gauche.
– Le ventricule droit reçoit la valve tricuspide qui possède trois feuillets
dont l’un, au moins, présente des insertions par des cordages tendineux
au niveau du septum interventriculaire.
Les muscles papillaires du
ventricule droit sont nombreux et petits et viennent des surfaces septales
et du mur antérieur.
Un seul muscle papillaire est habituellement bien
développé, le muscle papillaire antérolatéral.
L’anneau tricuspidien se situe un peu plus bas, vers la pointe du coeur, que l’anneau mitral.
L’apparence du ventricule droit est triangulaire et il présente de
nombreuses trabéculations.
Normalement, il n’existe pas de continuité
entre la valve semi-lunaire (normalement la valve pulmonaire) et la
valve tricuspide.
Cette discontinuité tricuspidopulmonaire est due à la
présence du conus sous-pulmonaire.
La bande modératrice tendue du
pilier de la tricuspide à la bande septale est toujours visible en coupe
transverse.
– Le ventricule gauche reçoit la valve mitrale, caractérisée par la
présence de deux feuillets valvulaires ne possédant aucune insertion par
des cordages tendineux au niveau du septum interventriculaire.
Ces
deux feuillets sont reliés à deux muscles papillaires dont l’origine est
toujours la paroi libre ventriculaire gauche mais jamais la surface
septale.
L’absence d’insertion septale de la valve mitrale, ainsi que la
présence de deux muscles papillaires sont caractéristiques du ventricule
gauche.
Le feuillet antérieur de la valve mitrale est en continuité avec la
racine postérieure de l’aorte.
L’anneau mitral est situé plus haut que
l’anneau tricuspidien.
L’apparence du ventricule gauche est ellipsoïde
et la surface septale gauche est lisse, présentant peu de trabéculations.
* Identification des gros vaisseaux
:
– L’aorte est normalement postérieure et décrit une crosse,
généralement vers la gauche.
On peut visualiser les premiers millimètres
des artères coronaires.
Enfin, il existe une continuité entre la partie
postérieure de la racine aortique et le feuillet antérieur de la valve
mitrale.
– L’artère pulmonaire se bifurque normalement en deux branches.
Elle
est postérieure à l’aorte à l’état normal et surtout, il existe un conus souspulmonaire
faisant apparaître la valve pulmonaire plus haute que la
valve aortique.
Du fait de l’existence de ce conus, il y a une discontinuité
entre la tricuspide et l’artère pulmonaire.
3- Possibilités et limites actuelles de l’exploration
:
Outre l’analyse segmentaire sus-décrite, l’échographie bidimensionnelle
permet une analyse très précise de la totalité des structures
intracardiaques : septa interauriculaires et interventriculaires, valves
auriculoventriculaires et sigmoïdes.
L’aspect de la courbure du septum interventriculaire renseigne sur le rapport des pressions entre le
ventricule droit et le ventricule gauche.
Il est possible d’analyser la
fonction segmentaire ventriculaire gauche.
L’aspect du septum interauriculaire permet d’évaluer le gradient de pression entre les
oreillettes.
Le péricarde est bien sûr analysable dans sa totalité.
Les structures extracardiaques, en particulier vasculaires, sont
également accessibles : position et anatomie des retours veineux caves
inférieur et supérieur, identification des retours veineux pulmonaires,
analyse de la crosse aortique dans sa totalité ainsi que des troncs supraaortiques.
L’origine des artères pulmonaires est bien visible.
L’échocardiographie a néanmoins des limites, notamment en cas de
mauvaises conditions d’examen (déformation thoracique, distension pulmonaire, cicatrice de thoracotomie...).
Certaines structures restent
encore peu ou mal accessibles aux ultrasons : distribution et
morphologie des coronaires, partie distale des artères pulmonaires.
B - Mode temps-mouvement (TM)
:
L’enregistrement est réalisé après repérage bidimensionnel.
Il permet
des mesures très précises des diamètres des épaisseurs ventriculaires,
des intervalles de temps systolique. On peut ainsi réaliser une étude
quantitative chiffrant la fonction systolique et la fonction diastolique
ventriculaires.
C - Doppler pulsé, continu et couleur
:
Ils fournissent des renseignements précis sur de nombreux paramètres
hémodynamiques et ont, de ce fait, réduit considérablement l’indication
des explorations invasives dans les cardiopathies congénitales.
Cet
apport du doppler s’explique aisément du fait de la grande diversité des
flux sanguins anormaux dans les malformations cardiaques.
1- Flux de sténoses
:
Il est possible de mesurer avec précision les vitesses et donc les
gradients : gradient de sténose aortique, de sténose pulmonaire, de
coarctation de l’aorte, etc.
La mesure après réalisation d’un traitement
permet de connaître instantanément le résultat.
2- Flux de régurgitation
:
Leur identification est grandement aidée par le doppler à codage couleur.
Il permet également l’estimation précise des pressions interventriculaires
(pression systolique du ventricule droit à l’aide d’une
insuffisance tricuspidienne).
Le doppler à codage couleur peut fournir
des renseignements d’ordre semi-quantitatif sur le volume des
régurgitations.
3- Flux de shunt
:
Là encore, c’est le doppler à codage couleur qui renseigne
instantanément sur la présence d’une ou plusieurs communications
anormales : communication interventriculaire, naissance anormale
d’une coronaire à partir du tronc artériel pulmonaire.
D - Échocardiographie transoesophagienne
:
Cette technique, qui prend beaucoup d’essor chez l’adulte, reste encore
peu utilisée chez l’enfant, d’une part parce que les indications sont
beaucoup moins fréquentes, d’autre part parce que la réalisation
technique nécessite des sondes miniaturisées et le plus souvent, surtout
chez le jeune enfant, une anesthésie générale.
Cette technique est utile dans les cardiopathies congénitales complexes
de l’adolescent et du grand enfant, dans les cardiopathies congénitales
de l’adulte peu échogènes par voie transthoracique.
En effet,
l’échographie par voie oesophagienne montre parfaitement le septum interauriculaire et permet de détecter aisément un défaut ou un
anévrisme.
Les cardiopathies valvulaires, en particulier les insuffisances
mitrales, peuvent bénéficier de l’échocardiogramme transoesophagien
pour détecter le mécanisme exact de l’insuffisance.
Les pathologies de
l’aorte thoracique, anévrisme des sinus de Valsalva, maladie annuloectasiante, coarctation de l’aorte, sont étudiées avec plus de
précision par cette méthode.
L’intérêt de l’échographie transoesophagienne en chirurgie cardiaque est
de plus en plus grand.
En peropératoire, il est possible d’évaluer le
résultat d’une intervention chirurgicale, de contrôler la performance
ventriculaire gauche, de rechercher un shunt résiduel, surtout si on
l’associe à l’échographie de contraste.
Cathétérisme cardiaque
et angiocardiographie
:
A - Indication actuelle des explorations invasives
:
Actuellement, la plupart des cardiopathies congénitales sont accessibles
à un diagnostic lésionnel précis par les méthodes non invasives,
notamment l’échocardiographie doppler.
Le cathétérisme cardiaque
n’est donc plus indispensable à ce diagnostic, y compris pour le bilan
préopératoire.
D’autre part, dans la mesure où les patients concernés sont le plus
souvent des nourrissons ou de jeunes enfants, la réalisation des
explorations invasives n’est pas dénuée de difficultés.
Une cédation
profonde, voire une anesthésie générale, est pratiquement toujours
nécessaire.
L’abord vasculaire (le plus souvent par voie veineuse
fémorale), les manipulations intracardiaques nécessitent une équipe
expérimentée.
La morbidité et la mortalité de ces examens ne sont pas nulles.
Outre le
risque d’arythmie cardiaque grave déclenchée par les manipulations du
cathéter, de perforation cardiaque (heureusement exceptionnelle), c’est
surtout le risque de décompensation que fait courir cet examen,
notamment chez les petits nourrissons en mauvais état hémodynamique.
La longueur de l’exploration, la survenue fréquente d’une hypothermie,
voire d’une acidose, les arythmies déclenchées par l’examen, et surtout
l’injection de quantités quelquefois importantes de produit de contraste
peuvent déstabiliser une situation circulatoire précaire.
De plus en plus, on a tendance à confier les patients fragiles aux
chirurgiens sans exploration hémodynamique et angiocardiographique
préalable.
Néanmoins, le cathétérisme cardiaque reste encore nécessaire dans
l’exploration préopératoire de certaines cardiopathies congénitales.
Ses
indications sont plus larges chez le grand enfant et l’adulte.
Il peut
permettre d’apprécier certaines lésions anatomiques peu ou mal
accessibles à l’échocardiographie : état des branches pulmonaires,
notamment en distalité, anatomie et distribution des artères coronaires,
évaluation précise des defects du septum interventriculaire, etc.
Mais l’intérêt essentiel du cathétérisme cardiaque, à l’heure actuelle, est
représenté par le cathétérisme interventionnel, c’est-à-dire la réalisation
d’un geste thérapeutique au décours de l’exploration hémodynamique
et angiocardiographique.
La procédure peut consister en la création d’une communication entre
les deux circulations (atrioseptostomie de Raskind dans la transposition
des gros vaisseaux), la réalisation d’une commissurotomie valvulaire à
l’aide d’un ballonnet (valvuloplastie pulmonaire ou plus rarement
aortique), la réalisation d’une angioplastie au ballonnet au niveau des
branches pulmonaires ou de la crosse aortique, la fermeture d’un defect
par prothèse occlusive larguée (canal artériel, communication
interauriculaire), la suppression d’une voie de conduction intracardiaque
anormale (ablation par radiofréquence).
Ces techniques connaissent actuellement un grand essor.
Elles peuvent
permettre la réalisation d’un traitement curatif sans recours à la
chirurgie.
Quelquefois, elles servent à la compléter.
B - Progrès réalisés
:
La digitalisation de l’image radiologique, qui a fait largement sa preuve
en radiologie vasculaire, a été, ces dernières années, appliquée à
l’angiocardiographie.
Les avantages qu’elle présente a rendu obsolète
l’angiocardiographie conventionnelle analogique.
Elle permet une diminution de la quantité de produit de contraste
injectée, ce qui évite les effets toxiques, notamment chez les petits
nourrissons en mauvais état hémodynamique.
Elle permet d’utiliser des cathéters de plus petit calibre, moins
traumatisants pour le système vasculaire périphérique, et plus faciles à
manipuler à l’intérieur des cavités cardiaques.
L’irradiation est diminuée puisque la digitalisation abaisse d’environ
50 % la dose d’irradiation par rapport à l’examen conventionnel.
L’intérêt est d’importance chez les porteurs de cardiopathie congénitale
complexe, souvent multiexplorés.
La bonne qualité des images du coeur gauche obtenue à partir d’injection
artérielle pulmonaire diminue la nécessité de ponction artérielle et de
cathétérisme rétrograde.
La résolution au contraste est très nettement supérieure à l’angiographie
conventionnelle, la qualité de l’image étant pratiquement constante,
quelle que soit la cardiopathie et quel que soit l’âge, même et surtout
chez le petit enfant de moins de 1 an.
Le double arceau n’est plus nécessaire, le film biplan n’apparaissant plus
réellement indispensable actuellement.
La cinéangiographie monoplan
dans des incidences bien choisies apporte une fiabilité diagnostique
excellente.
Le produit de contraste étant dilué, les injections peuvent être
aisément répétées.
Cette méthode a néanmoins quelques inconvénients : le temps global de
l’examen est un peu augmenté, non pas en raison de l’exploration elle même,
mais en rapport avec le traitement de l’image qui demande
patience, recherche et perfection.
Les mouvements respiratoires et cardiaques peuvent représenter un
obstacle à l’application pédiatrique.
L’enfant doit bien sûr être
immobile, mais le masque à un cycle respiratoire (cinq à huit images),
immédiatement avant l’apparition du contraste, paraît être un excellent
compromis, même et surtout chez le tout petit enfant à rythme
respiratoire rapide et superficiel.
Les produits de contraste se sont également beaucoup perfectionnés.
L’apparition de substances non ionisées, d’osmolarité plus faible, a
diminué la fréquence des effets néfastes : spasme artériel pulmonaire,
oedème pulmonaire, vasodilatation et hypotension systémique,
dépression de la fonction ventriculaire, hémolyse, acidose.
C - Conduite de l’exploration
:
Elle doit comporter, comme en échocardiographie, une analyse
segmentaire : orientation de l’axe du coeur, situs viscéroatrial, connexion
veineuse, étude de la morphologie ventriculaire et des connexions
auriculoventriculaires, étude des relations ventriculoartérielles,
recherche des shunts, des sténoses ou atrésies, des insuffisances
valvulaires et des anomalies vasculaires.
Chaque structure étudiée nécessite des incidences particulières.
Les veines caves inférieure et supérieure sont visibles en incidence de
face.
Elles s’abouchent à l’oreillette droite.
L’injection de quelques
millilitres de produit de contraste dans le tronc veineux innominé gauche
permet de dépister une éventuelle veine cave supérieure gauche se
drainant dans le sinus coronaire.
1- Oreillettes
:
L’oreillette droite est une cavité ovoïde à droite du rachis.
Son auricule
est triangulaire en dedans et en avant. Elle est étudiée en oblique
antérieur droit (OAD) et de face.
L’oreillette gauche est opacifiée au temps d’une angiographie droite ou
directement après franchissement du septum interauriculaire.
De face,
son toit est convexe vers le haut et le plancher convexe vers le bas.
L’auricule gauche a une forme en « doigt de gant » et communique avec
la cavité principale par un orifice rétréci.
Le septum interauriculaire est étudié en OAD de 80° avec une
inclinaison craniocaudale de 30°.
Les veines pulmonaires sont visibles de face, au temps gauche d’une
angiographie droite et se drainent dans l’oreillette gauche en formant les
cornes droites et gauches de l’oreillette gauche.
2- Ventricules
:
Le ventricule droit est analysé de profil ou en OAD.
Cette dernière
incidence montre ses trois parties : la chambre d’admission représentée
par l’anneau tricuspide et la région adjacente ; la chambre trabéculée,
ou sinus ventriculaire, caractérisée par des trabéculations grossières
mais peu nombreuses ; la chambre de chasse, ou infundibulum pulmonaire, qui comprend une partie proximale avec la bande septale et
la bande modératrice, et une partie distale formée par la bande pariétale
et la paroi antérieure libre du conus.
Le ventricule gauche est opacifié, soit au temps gauche d’une
angiographie droite, soit après angiographie sélective.
Il comprend une
chambre d’admission visible en OAD avec son orifice mitral ; une
chambre de remplissage, ou sinus ventriculaire, caractérisée par des
trabéculations fines, et une chambre de chasse dégagée en OAD ou en
oblique antérieur gauche (OAG).
3- Gros vaisseaux
:
L’orifice pulmonaire est bien visible de profil. En diastole, les sigmoïdes
forment un oméga.
En systole, elles sont plaquées contre la paroi
artérielle.
La bifurcation et les artères pulmonaires s’étudient par des
injections de face ou en léger OAG, avec bascule craniocaudale.
L’angiographie pulmonaire bloquée consiste à injecter quelques
millilitres de produit de contraste par un cathéter à bout distal ouvert en
position capillaire.
Chez les sujets normaux, on met en évidence un flot
capillaire avec passage rapide du produit de contraste vers les veines
pulmonaires.
En cas d’hypertension artérielle pulmonaire obstructive,
on note la disparition du flot capillaire, un aspect tortueux et contourné
en « arbre mort » des artérioles pulmonaires avec un passage lent vers
les veines pulmonaires.
L’aorte est opacifiée à partir du ventricule gauche ou sélectivement après
cathétérisme artériel rétrograde. Les valves sont visibles en léger OAG
de profil ou en OAD.
L’aorte descendante est étudiée de face, de profil,
en OAD et en OAG.
La crosse aortique est bien déroulée en OAG, avec
inclinaison craniocaudale.
4- Artères coronaires
:
Elles sont étudiées, soit par une aortographie sus-sigmoïdienne globale,
soit au mieux par une injection sélective dans chacune des coronaires.
L’artère coronaire droite naît normalement du sinus de Valsalva droit.
L’incidenceOAGde 70° avec inclinaison craniocaudale et incidence de
profil suffisent habituellement pour voir l’artère coronaire droite et ses
branches.
L’artère coronaire gauche naît normalement du sinus de Valsalva
gauche, donne naissance à l’interventriculaire antérieure et l’artère
circonflexe.
Le tronc coronaire gauche, sa bifurcation ainsi que les artères marginales et diagonales sont visibles en OAG, avec inclinaison
craniocaudale.
L’artère interventriculaire antérieure et ses branches
septales sont étudiées en OAD de 30°.
L’étude de l’anatomie et de la distribution des coronaires est
particulièrement importante dans certaines malformations congénitales
comme la tétralogie de Fallot ou la transposition des gros vaisseaux.
Elle
vise à dépister une anatomie de trajet qui pourrait gêner, voire contreindiquer
la réparation complète.
Elle est utile également pour étudier
certaines malformations congénitales des artères coronaires comme
l’anomalie de naissance de l’artère coronaire gauche à partir du tronc
artériel pulmonaire, les fistules coronarocardiaques ou artérioveineuses
coronaires.