La pathologie veineuse est faite de tableaux cliniques multiples et
variés.
À côté des étiologies de l’insuffisance veineuse chronique les
plus fréquemment rencontrées telles que la maladie
thromboembolique ou l’insuffisance veineuse superficielle, il existe
un cadre nosologique moins bien défini regroupant, sous le vocable
d’anomalies veineuses congénitales, des altérations morphologiques
ou structurales nombreuses par leurs types mais d’observation rare.
L’expression de ces anomalies peut se faire sur un mode mineur par
la constatation de dispositions anatomiques, s’écartant du schéma
« modal » des auteurs classiques ; c’est l’ensemble des variations
anatomiques dont certaines sont exceptionnelles.
D’autres s’expriment par des altérations des différents stades de la
morphogenèse ou de la maturation des veines et entraînent des
tableaux cliniques variés, allant de la simple anomalie latente de
découverte fortuite aux malformations complexes à expressions
multiples.
Les techniques modernes d’exploration ont ouvert de nouveaux
champs de découverte de ces anomalies, aussi bien par
l’échographie-doppler dans le dépistage, que l’imagerie par
résonance magnétique (IRM) dans le bilan d’extension.
Dans cet article, nous dressons une revue des différents niveaux
d’anomalies veineuses, des moyens d’investigations qui nous sont à
ce jour offerts pour établir un diagnostic et une stratégie
thérapeutique cohérente.
Les aspects dermatologiques des anomalies
congénitales veineuses ne sont pas abordés.
Généralités
:
A - DÉFINITION ET CADRE NOSOLOGIQUE
:
Par définition, une anomalie désigne un écart, une irrégularité par
rapport à la normale.
Au plan anatomique, celle-ci peut porter sur
l’existence même du vaisseau concerné, son trajet, sa terminaison
ou tout autre élément de sa description. Le déterminisme
morphogénétique des veines est tel que ces anomalies appelées
variations sont multiples et polymorphes ; sans être corrélées de
façon constante à une pathologie donnée, elles peuvent entraîner
des erreurs de diagnostic ou de traitement.
Le terme d’anomalie englobe également l’ensemble des
malformations qui apparaissent comme le fruit d’une altération du
développement de ces vaisseaux ; une malformation congénitale est
définie comme une erreur innée du développement
morphogénétique de l’organe, aboutissant à de véritables anomalies
de structure.
Ces lésions présentes dès la naissance et donc
congénitales ont une expression clinique qui dépend du moment où
le processus tératogène se manifeste : simple altération d’une
structure arrivée à maturité, ou au contraire forme archaïque
persistante d’un vaisseau ou d’un tissu embryonnaire.
B - CLASSIFICATIONS
:
Le côté imprécis du cadre nosologique se retrouve dans les diverses
classifications retrouvées dans la littérature.
Quatre paramètres y
sont le plus souvent pris en compte :
– la référence au stade où s’est arrêté le développement du
vaisseau ;
– la localisation prédominante (artères, veines, lymphatiques) ;
– la nature histologique des anomalies des cellules (actives ou
quiescentes) ;
– le profil hémodynamique des lésions observées.
De nombreuses classifications ont été successivement proposées,
basées sur des notions anatomiques, cliniques ou embryologiques :
toutes visent à regrouper, dans un concept global, les différents
aspects de ces malformations.
En 1964, Malan et Puglionisi publiaient un important rapport où
était proposée une classification des angiodysplasies qui distinguait
les dysplasies veineuses, artérielles, mixtes et les formes complexes.
Les dysplasies veineuses comprenaient :
– les phlébectasies ;
– les phlébangiomes ;
– la phlébangiomatose ;
– ou leur association.
Une autre classification a été proposée par Belov ; plus
anatomique, elle divise les anomalies en artérielles, veineuses, ou
mixtes avec ou sans participation lymphatique.
Chacune de ces
grandes catégories est ensuite subdivisée selon que les lésions sont
tronculaires ou extratronculaires.
Les lésions tronculaires sont
identifiées par l’absence, l’hypoplasie, ou la dilatation de vaisseaux
différenciés ; ce sont des lésions plus localisées que diffuses et sont
souvent significatives au plan hémodynamique.
Les formes extratronculaires sont divisées en formes limitées et en formes
infiltrantes et sont faites de vaisseaux immatures.
En 1982, Mulliken et Glowacki ont proposé une classification
reprise par l’International Scientific Society of Vascular Anomalies
(ISSVA, 1992) qui permet de différencier les tumeurs vasculaires
à cellules immatures (hémangiomes essentiellement) des
malformations vasculaires faites de cellules à faible potentiel
évolutif.
Cette classification tient en outre compte de
l’hémodynamique des vaisseaux impliqués dans la malformation en
distinguant les formes à haut et à bas débit, et de la structure
anatomique désignant l’élément principal incriminé : capillaire,
artériel, veineux ou lymphatique.
Elle est largement
adoptée dans la littérature.
Les malformations congénitales à prédominance veineuse peuvent
être localisées, régionales ou diffuses et prennent la forme
d’angiomes plans, d’anomalies des troncs veineux superficiels et/ou
profonds, accompagnés éventuellement de localisations tissulaires
diverses : os, articulations, muscles.
Les anomalies congénitales fixées sont les aplasies valvulaires, les
agénésies, hypoplasies et anomalies de développement des troncs
principaux (anévrismes veineux, vaisseaux embryonnaires
persistants) ; elles peuvent être diffuses et s’inscrire dans des
tableaux complexes tels que le syndrome de Klippel-Trenaunay, de
Parkes-Weber et autres syndromes apparentés.
Nous limitons notre présentation à la description des anomalies
veineuses isolées et des formes complexes rencontrées dans la
pratique de la médecine vasculaire.
C - RAPPELS EMBRYOLOGIQUES
:
Le développement des anomalies veineuses congénitales des
membres inférieurs se base sur des altérations du déroulement
normal de l’embryologie des vaisseaux entre la quatrième et la
dixième semaine du développement du foetus.
Les travaux de Sabin
et Woollard (1920) repris par de nombreux auteurs ont permis
de déterminer, au plan embryologique, trois stades dans le
développement du système vasculaire.
1- Stade indifférencié (plexiforme)
:
C’est le stade le plus précoce, où on observe la condensation des
cellules mésenchymateuses angioformatrices en cordons ; les cellules
périphériques donnent les angioblastes, futurs capillaires primitifs.
Par un phénomène de bourgeonnements et de connexions successifs,
ces capillaires s’étendent et se rejoignent pour former le réseau
capillaire primitif.
2- Stade réticulaire
:
La circulation sanguine à travers les interconnexions du réseau se
polarise avec un versant « artériel » et un autre « veineux ».
Un
schéma morphogénique mal connu s’installe, remodelant à plusieurs
reprises le plexus veineux pour en délimiter des vaisseaux
reconnaissables.
3- Stade tronculaire
:
Certains plexus disparaissent, d’autres se forment, d’autres
fusionnent pour donner des structures plus grosses, alors que
d’autres sont épargnés pour donner les capillaires définitifs.
À la lumière des publications dans le domaine génétique, trois
étapes de différenciation tissulaire sont individualisées : la vasculogenèse, l’angiogenèse
et le remodelage qui se succèdent, aboutissant à la maturation
du système vasculaire.
4- Vasculogenèse
:
Dans la vasculogenèse, un plexus vasculaire primitif est établi à
partir des précurseurs endothéliaux ; dès la fin de la deuxième
semaine, le plexus vasculaire primitif est formé.
Les amas
précurseurs de cellules endothéliales et du sang se différencient en
groupes de cellules épithéliales et en masses isolées appelés les îlots
sanguins.
Les cellules internes se différencient en précurseurs
hématopoïétiques et les couches externes de ces amas s’aplatissent
pour former les premières cellules primitives qui se creusent d’une
lumière.
Les couches périphériques sont recrutées pour envelopper
l’endothélium ; dans les capillaires, ce sont les péricytes ; dans les
gros vaisseaux, ce sont les cellules musculaires dérivées, quant à
elles, du neuroectoderme (crêtes neurales).
5- Angiogenèse
:
Quand le plexus primaire est formé, de nouveaux contingents de
cellules endothéliales apparaissent pour former de nouveaux
vaisseaux.
L’angiogenèse survient alors par différents mécanismes :
– bourgeonnement à partir d’un gros vaisseau ;
– intussusception (invagination) quand les vaisseaux préexistants
sont clivés par des piliers transcapillaires ou des invaginations des
péricytes et de la matrice extracellulaire ;
– par croissance intercalée des vaisseaux autorisant la fusion de
capillaires préexistants pour augmenter diamètre et longueur.
La
membrane basale périphérique est localement dégradée, permettant
la réorganisation des cellules endothéliales qui adhèrent fermement
les unes aux autres pour former la lumière du nouveau vaisseau.
6- Processus de remodelage
:
Durant cette période mal connue, certains vaisseaux régressent et
d’autres se forment.
Leur diamètre change pour s’adapter aux
besoins des tissus environnants ; l’action des facteurs de croissance
tissulaires y a été démontrée.
7- Maturation du système veineux
:
La maturation du système veineux définitif est donc caractérisée par
l’apparition successive de vaisseaux qui involueront tour à tour pour
laisser place à des éléments plus développés.
Le réseau veineux primitif initial du membre pelvien est superficiel ;
il est fait des veines marginales externes (système postaxial) et
interne (système préaxial) ramenant vers le coeur du foetus le sang
apporté par l’artère axiale.
Secondairement, la veine marginale
interne disparaît et la veine marginale externe donnera la veine
tibiale antérieure et la petite veine saphène (saphène externe).
La
grande veine saphène (saphène interne) est issue directement de la
veine cardinale postérieure qui donnera naissance aussi à la veine
fémorale et aux veines tibiales postérieures.
Le système veineux
profond naîtra de la succession de trois réseaux primitifs :
– un plexus axial satellite du nerf sciatique ; il prolonge la veine
hypogastrique ;
– un plexus préaxial qui suivra le développement de l’axe artériel
iliaque externe.
Ces deux courants, en se réunissant, vont former la
veine poplitée ;
– le plexus fémoral restera localisé à la cuisse qui donnera la veine
fémorale profonde (veine profonde de la cuisse) ; il connecte le
réseau axial par les futures veines perforantes, et le déverse dans le
plexus préaxial pour former le futur confluent fémoral.
La partie proximale du réseau veineux profond verra l’involution
de la veine sciatique primitive qui donnera la veine hypogastrique
et le développement de la veine iliaque externe à partir du
développement du confluent de la veine cave inférieure.
La formation de la veine cave caudale (inférieure) (VCI) fait appel à
trois réseaux veineux primitifs différents :
– le système des veines cardinales postérieures drainant la région
caudale de l’embryon ;
– le réseau veineux induit par l’apparition du corps de Wolff : les
veines subcardinales ou veines internes du mésonéphros ;
– les veines issues de la région dorsale juxtasympathique de
l’embryon : les veines supracardinales ou sympathiques externes.
Ces trois réseaux involuent tour à tour partiellement après avoir
établi de nombreux ponts anastomotiques entre eux :
– anastomoses intersubcardinales ;
– anastomoses subsupracardinales ;
– anastomoses intercardinales ;
– anastomoses cardinosubcardinales.
Une asymétrie à prédominance droite va se constituer, aboutissant à
la configuration habituellement rencontrée (disposition modale) de
la VCI.
Sa constitution définitive est donc issue des différents
segments suivants :
– anastomose intercardinale postérieure ;
– veine supracardinale droite ;
– anastomose subsupra-cardinale droite ;
– veine subcardinale droite.
La partie rétrohépatique de la VCI dépend de l’évolution de la veine
vitelline droite.
D - ÉTIOPATHOGÉNIE
:
Si l’on s’accorde à admettre que ces anomalies sont issues d’un arrêt
de l’organogenèse des veines, les causes qui le déterminent restent à
ce jour hypothétiques.
1- Hypothèse hémodynamique
:
Pour certains, le remodelage des vaisseaux est
conditionné par les contraintes hémodynamiques appliquées sur ce vaisseau entraînant son développement si la pression augmente ou
son involution si la pression baisse.
À l’opposé, les travaux de Folkman ont montré in vitro que des cellules endothéliales
conservaient la possibilité de donner de nouveaux réseaux
capillaires à tout instant de leur vie, impliquant par là même que la
formation de ce réseau puisse se faire en l’absence de flux sanguin.
2- Facteurs tératogènes
:
D’autres facteurs de nature chimique, hormonale, ou toxique
pourraient intervenir.
Cependant, l’incapacité des tératogènes
connus à produire des malformations est frappante et suggère
qu’une simple aberration des paramètres locaux physicochimiques
est exclue.
Certains ont évoqué un processus défectueux de la coagulation
(thrombose et fibrinolyse) de même qu’un rôle du système nerveux
autonome, ou une hypothèse infectieuse.
En fait, on ne dispose
d’aucune donnée histologique, embryologique ou expérimentale qui
puisse démontrer comment et surtout à quel stade le
dysfonctionnement survient.
La variété des cibles suggère que la
cause puisse être présente à tout temps du développement et que,
lorsqu’elle a disparu, les anomalies puissent affecter leur propre
développement et celui des tissus environnants.
3- Hypothèse génétique
:
La plupart des malformations veineuses sont sporadiques, mais il
existe des formes familiales à transmission autosomique dominante.
Vikkula et al., Boon et al. ont localisé, dans deux familles, un
gène muté sur le chromosome 9p identifiant la substitution d’un
acide aminé dans le domaine kinase de TIE2.
Ils suggèrent que dans
ces malformations veineuses, cette mutation altère le signal entre
l’endothélium et les cellules musculaires lisses pariétales ; le TIE2
est un récepteur exprimé de façon prédominante dans les cellules
endothéliales ; ses ligands, l’angiopoïétine 1 et 2, sont sécrétés par
les cellules mésenchymateuses entourant les tubes endothéliaux en
développement.
Les lésions observées impliquent une anomalie de développement
du mésoderme qui peut être régulée par des facteurs angiogéniques
et vasculogéniques tels que vascular endothelial growth factor
(VEGF) ; la rupture d’équilibre dans la balance du remodelage
par le VEGF peut entraîner un développement anormal des
vaisseaux.
Des études récentes montrent que les cellules
endothéliales continuent de produire du VEGF responsable de la
néovascularisation de ces lésions.
Wang a montré que les différences pathologiques et fonctionnelles
entre artères et veines ne sont pas simplement dues aux lois
hémodynamiques ; les cellules sont distinctes au plan moléculaire et
génétiquement déterminées ; certains ligands (ephrin B2) se
localisent uniquement sur les cellules artérielles et non sur les
cellules veineuses.
En fait, le déterminisme de l’endothélium se joue sur les effets
combinés de multiples signaux positifs ou négatifs transmis aux
cellules par de nombreux récepteurs.
D’autres travaux, sur des formes familiales de nævi, suggèrent une
possible transmission autosomique dominante à expression variable.
Il est possible que les gènes impliqués dans les formes familiales le
soient également dans les formes sporadiques par un phénomène
de mosaïcisme du gène dont la forme entière serait létale.
E - PRÉVALENCE GÉNÉRALE
:
Les malformations vasculaires congénitales sont des lésions rares.
L’incidence globale de ces malformations est d’environ 1,5 %.
Les
formes veineuses sont les plus communes et représentent les deux
tiers des malformations vasculaires.
Les lésions peuvent survenir
isolément ou le plus souvent être associées à d’autres lésions des
tissus environnants.
Clinique
:
Il existe une grande multiplicité de tableaux cliniques qui dépendent
de l’importance de l’anomalie et de son retentissement sur les
organes voisins.
A - ANOMALIES MINEURES : VARIATIONS ANATOMIQUES
1- Duplication des veines profondes
:
Leur connaissance est importante même si, le plus souvent, elles
sont asymptomatiques.
L’échographie en permet facilement la
détection, comme le montre la série de Kerr, où 9,1 % des patients
examinés dans le cadre d’un bilan de thrombose veineuse profonde
avaient une anomalie.
Celle-ci est unilatérale dans 67 % des cas ; il
n’y a pas de côté préférentiel.
Les symptômes rapportés sont : la
douleur (75 %), l’oedème (45,7 %).
Ceux-ci sont en partie inexpliqués
si l’on considère qu’il n’a été constaté qu’un seul reflux à
l’échographie.
Dona rapporte des résultats similaires.
2- Veines embryonnaires
:
Au niveau du membre pelvien à proprement parler, deux types de
vaisseaux embryonnaires peuvent persister : la veine sciatique
(ischiatique) persistante (VSP) ; la veine marginale externe ; il
convient d’y rajouter les anomalies caves en tenant compte de leur
retentissement éventuel sur les membres inférieurs.
* Veine sciatique persistante
:
Elle est habituellement décrite dans les syndromes malformatifs de
type Klippel-Trenaunay ; elle peut cependant
être observée chez le sujet sain, chez qui sera porté à tort le
diagnostic d’angiodysplasie.
Trigaud en retrouve sept sur 2 000 patients par méthode
phlébographique chez le sujet sain ; elle peut coexister avec un
réseau profond intact et perméable, ou à l’inverse
s’accompagner d’une agénésie partielle ou totale des voies veineuses
profondes.
La présence d’une veine sciatique a été invoquée dans les cas de
varices récidivantes.
La survenue de l’IRM a accru la détection de
telles lésions difficiles à objectiver de façon certaine à la
phlébographie. Sa prévalence est estimée à l’heure actuelle sur les
seules données de la phlébographie.
Elle est unilatérale dans 90 %
des cas, sans côté prédominant et non liée au sexe.
Son étendue est
variable.
Elle peut être complète, allant de la poplitée à l’iliaque
interne (38,1 %), de localisation haute (fesse et haut de la cuisse)
(28,6 %), ou localisée dans la partie basse de la cuisse se jetant dans
la veine fémorale profonde (33,3 %).
Elle est
exceptionnellement associée à une artère sciatique persistante.
Bien que le plus souvent asymptomatique, la veine sciatique peut
entraîner des complications autres que celles de l’insuffisance
veineuse chronique et peut être responsable notamment de
saignements (28,6 %) par hypertension veineuse dans le territoire
pelvien, d’embolie pulmonaire (23 %) en raison de la stase induite
à ce niveau.
Ce dernier chiffre, nettement supérieur à la prévalence
estimée de l’embolie pulmonaire dans le syndrome de Klippel-Trenaunay (2,8 %), laisse à penser que la présence d’une VSP est un
marqueur des formes évoluées et graves de ce syndrome.
Le diagnostic repose sur la constatation d’un trajet veineux aberrant
à l’échographie ; l’exploration difficile de la région fessière peut
amener à la réalisation d’une angiographie par résonance
magnétique (ARM), surtout si le contexte d’une malformation
diffuse est évoqué ; la phlébographie a été également utilisée, mais
sa fiabilité n’est pas absolue.
Au plan thérapeutique, le traitement médical et la contention sont
de règle.
La chirurgie d’excision de la VSP n’est pas indiquée dans
la majorité des cas ; mais des gestes chirurgicaux ciblés visant à
réduire l’hypertension veineuse et les hémorragies sont parfois
nécessaires et font appel à la ligature de la VSP ou à
l’embolisation de ses branches pelviennes.
* Persistance de la veine marginale latérale
:
Elle est l’anomalie la plus commune et est également habituellement
associée à des malformations complexes comme le syndrome de Klippel-Trenaunay.
Sa présence en tant que lésion isolée est exceptionnelle.
Elle est
cliniquement facilement reconnaissable par son aspect de phlébectasie et par son trajet sur le versant latéral de la jambe. Sa
terminaison est variable.
La veine marginale latérale peut se
drainer dans la veine poplitée (11 %), la veine fémorale superficielle
(17 %), la profonde (20 %), l’iliaque externe (5 %), la grande veine
saphène (14 %) et l’iliaque interne (33 %).
La présence des veines marginales est souvent associée à une hypoou
aplasie des veines profondes et doit faire craindre une telle
éventualité, impliquant la réalisation d’un bilan échographique.
Les symptômes dérivant de la persistance de la veine marginale
peuvent être liés également aux déformations osseuses associées
dans les malformations complexes ou aux signes d’insuffisance
veineuse chronique.
Des phlébolithes, calcifications de ces veines anormales, traduisent
les séquelles de thromboses itératives et peuvent être repérés à la
radiographie standard.
Des gestes chirurgicaux sont parfois proposés sous réserve de la
perméabilité du réseau profond, une aplasie des veines profondes
contre-indiquant la chirurgie.
* Anomalies de la veine cave caudale (inférieure)
:
Elles sont nombreuses au plan théorique mais relativement rares.
Décrites en premier par Augier en 1914, elles représentent les jalons
des différentes étapes de l’organogenèse complexe de cette veine.
Les travaux de Mac Clure et Butler 1925, Reagan et Robinson 1927
et Pillet 1980 ont apporté des renseignements précieux sur la
chronologie de ces malformations redécouvertes par l’intermédiaire
du scanner.
Parmi les plus typiques citons :
– la veine cave gauche infrarénale : elle est issue de la persistance
de la veine supracardinale gauche ; le segment transversal provient
de l’anastomose subsupracardinale gauche et de l’anastomose
intersubcardinale.
C’est une anomalie de découverte fortuite, parfois
accompagnée d’anomalies rénales ;
– la veine cave double sous-rénale : elle est liée à la
persistance des deux veines supracardinales conservant le plus
souvent l’anastomose transversale déjà décrite recevant la veine
rénale gauche, et l’anastomose intercardinale postérieure (future
veine iliaque commune gauche) ;
– l’uretère rétrocave : il contourne par l’arrière la VCC et se place en
médial puis en ventral de la veine cave.
Le diagnostic est rarement
lié à une compression de l’uretère ; le plus souvent, c’est une
découverte d’examen radiologique : au plan embryologique, c’est
l’absence de développement de la veine supracardinale droite dans
son segment sous-rénal ; elle est alors remplacée par la veine
cardinale postérieure droite.
Une variante en est l’anneau veineux périurétéral se traduisant au plan clinique par la
compression de l’uretère avec hydronéphrose ; cette anomalie
comporte la persistance de la veine cardinale postérieure droite et le
développement de la veine supracardinale selon le schéma normal
entraînant le passage de l’uretère dans une pince veineuse ;
– les anomalies du segment rénal : elles forment les anneaux
veineux périaortiques ; les éléments préaortiques proviennent de
l’anastomose intersubcardinale et les éléments rétroaortiques de la
persistance de l’anastomose subsupracardinale.
Des anomalies
ponctuelles peuvent aboutir à la formation de membranes
congénitales comme certains types de synéchies observés dans le
syndrome de Cockett.
Toutes ces malformations sont le plus souvent asymptomatiques et
de découverte fortuite lors d’un examen intercurrent.
Il a été
notamment démontré qu’elles ne majoraient pas le risque d’embolie
pulmonaire.
Certaines peuvent toutefois entraîner des
complications d’organe (hémorragies, hydronéphrose).
Un même
déterminisme morphogénétique fait que la présence d’une anomalie
cave doit faire suspecter une anomalie rénale associée.
B - MALFORMATIONS STRUCTURALES ISOLÉES
:
1- Phlébectasies (8 à 36 % des malformations
veineuses complexes)
:
Elles désignent des dilatations régulières et étendues des veines
superficielles, présentes à la naissance et s’aggravant au fil des ans.
Isolées ou segmentaires, elles sont asymptomatiques et sans
conséquence hémodynamique ; plus diffuses, elles donnent des
manifestations qui sont celles de l’insuffisance veineuse chronique ;
elles sont pour certains hautement emboligènes et justifient une
sanction chirurgicale adaptée à l’état du réseau veineux profond.
2- Aplasies et hypoplasies
(2 à 8 % des malformations veineuses)
:
Elles peuvent rester non diagnostiquées toute la vie ou être une
partie d’autres malformations parlantes car disgracieuses et
symptomatiques (veines superficielles de type marginal externe ou
varices).
Leur reconnaissance est indispensable car elles représentent
un obstacle sur la voie de retour nécessairement compensé par des
veines superficielles, normales ou non, forcément dilatées et qui
doivent être respectées ; elles seraient pour certaines engainées de
bandes fibreuses dont la section chirurgicale permettrait une
récupération fonctionnelle partielle.
L’atrésie de la veine cave est exceptionnelle ; elle serait pour certains
à l’origine de thromboses veineuses du membre inférieur de cause
obscure.
Le diagnostic repose sur la réalisation d’une IRM ou d’un scanner
montrant la compensation pariétale postérieure (système azygos) et
l’absence de signal en regard de la veine cave inférieure.
Les ulcères de jambe sont une forme de révélation de ces aplasies.
3- Anévrismes veineux
:
Les anévrismes veineux représentent une entité clinique
relativement bien connue.
La localisation poplitée est la plus
courante.
Leur étiopathogénie est mal précisée, mais on distingue
des formes secondaires (insuffisance veineuse, traumatisme) et des
formes primitives.
La dysplasie congénitale est fortement évoquée dans les anévrismes
primitifs et en présence d’autres manifestations des formes
complexes de malformations veineuses.
L’utilisation large de l’échographie en a révélé la réalité ; leur intérêt est lié à la menace
d’embolie pulmonaire qu’ils font peser.
Le traitement en est discuté.
Les premières descriptions d’anévrismes ont été rapportées par May
et Nissel en 1968 et d’autres publications ont mis en avant
la menace d’embolie pulmonaire que fait planer ce type de lésion.
Une dilatation est considérée comme anévrisme si la lésion est une
zone isolée, qui communique avec un vaisseau principal par un seul
chenal, sans fistule artérioveineuse ni faux anévrisme et si elle se
situe dans un segment indemne de varices ; la plus grosse série dans
la littérature fait état de plus de 600 cas.
* Prévalence, épidémiologie
:
Elle est estimée à 8 % dans le cadre des malformations veineuses.
La localisation aux membres inférieurs est l’une des plus fréquentes
(28,8 %) avec la localisation cervicale (28 %).
Pour les anévrismes
poplités, l’incidence annuelle (toutes étiologies confondues) serait
de 0,2 % à l’échodoppler ; il n’y a pas de prédominance de sexe ni
de côté.
L’anévrisme veineux peut concerner le réseau superficiel
comme le réseau profond.
Au plan anatomopathologique, on distingue les anévrismes
fusiformes et les anévrismes sacciformes. Les premiers peuvent
correspondre à un renflement du sinus valvulaire et le diagnostic
différentiel est parfois difficile.
Pour éviter toute confusion, on admet
que le calibre de la dilatation doit être une fois et demie à deux fois
celui de la veine sus-jacente ou de la veine poplitée controlatérale.
Le type fusiforme est le plus répandu dans la population
asymptomatique ; le type sacciforme, plus rare, est en cause dans la
majorité des accidents d’embolie pulmonaire et se développe le plus
souvent sur le versant externe de la veine.
Les données histologiques sont peu contributives et contradictoires ;
on note, soit une hypoplasie de la musculature lisse, soit au
contraire une hyperplasie musculaire avec fibrose.
* Clinique
:
L’anévrisme veineux est le plus souvent asymptomatique et se
découvre à l’occasion d’un examen échographique pour tout autre
motif ; dans le cas contraire, il peut se manifester par les signes
habituels des anévrismes : dans ce cas, la douleur est au premier
plan (79 %) puis la palpation d’une masse dans le creux poplité
(64 %) ou un oedème (43 %) ; il peut enfin se révéler par une
complication : thrombose veineuse, embolie pulmonaire.
Les
anévrismes veineux profonds sont paradoxalement mieux
diagnostiqués que les anévrismes superficiels, souvent source
d’erreurs diagnostiques.
La menace évolutive la plus importante est la thrombose veineuse
et sa complication embolique dont la fréquence varie selon les
auteurs entre 17 et 71 %, justifiant pour certains une approche
agressive, qu’elle soit médicale ou chirurgicale.
* Diagnostic
:
L’utilisation de l’échodoppler a été prônée la première fois par Katz
et Comerota ; c’est l’examen de référence.
Il permet, par
des coupes transversales, de mettre en évidence l’anévrisme, de
déterminer sa taille, l’importance de la stase traduite par un aspect
contraste spontané aux manoeuvres de compression et de préciser
l’existence d’une éventuelle thrombose endoanévrismale ; dans le
cadre des malformations vasculaires étendues, l’échographie cède le
pas à l’IRM.
* Traitement
:
Le traitement de ces anomalies reste discuté.
Il dépend de la
taille de l’anévrisme, de son type fusiforme ou sacciforme, de son
expression clinique et de l’expérience des auteurs.
Le traitement conservateur est proposé pour les anévrismes de petite
taille, fusiforme et sous surveillance régulière.
Le traitement médical par anticoagulants est prôné par les partisans
de l’abstention chirurgicale en raison des risques de thrombose
postopératoires.
Discuté si la lésion est muette, il sera proposé à vie
si l’anévrisme est symptomatique.
Pour ses détracteurs, un tel
traitement n’apporte pas de sécurité suffisante puisque des cas de
récidive d’embolie pulmonaire parfois mortelle ont été décrits sous
anticoagulants à doses efficaces.
Le traitement chirurgical peut se matérialiser par un geste de
résection tangentielle dans les anévrismes sacciformes ou une résection-anastomose,
une greffe veineuse dans les fusiformes.
Il doit être
suivi d’une thérapie anticoagulante pendant les 3 à 6 mois qui
suivent l’intervention.
Les
résultats de perméabilité à long terme pour les sacciformes
donnent un taux variant de 40 à 93 % selon les auteurs.
4- Avalvulie
:
Mise en avant par Luke en 1941, c’est une pathologie rare (4 à 7 %
des patients porteurs de malformations veineuses) et exceptionnelle
ailleurs ; sa prévalence est inconnue et si des dissections
cadavériques ont permis de constater l’absence de valvules
profondes dans 1,3 % des cas, ce chiffre paraît discordant avec la
rareté des observations rapportées.
C’est une anomalie autosomique dominante comme l’ont montré les
publications de Lodin et de Plate entraînant un reflux majeur, par
agénésie des valvules dont le développement, décrit par
Kampmeyers, s’effectue en cinq stades sur une période comprise
entre le troisième et le cinquième mois de la vie intra-utérine.
Ces
anomalies touchent aussi bien le réseau veineux superficiel que le
réseau profond ; les atteintes lymphatiques associées sont fréquentes.
* Diagnostic
:
Le diagnostic doit en être suspecté chez des patients jeunes (voire
des enfants) porteurs de signes sévères d’insuffisance veineuse
profonde primitive : oedème, troubles trophiques cutanés,
acrocyanose sans antécédent clinique de thrombose veineuse
profonde ou chez le jeune adolescent.
Les agénésies valvulaires sont
souvent diagnostiquées à tort comme des maladies postthrombotiques
avec reflux complet malgré l’absence d’arguments
cliniques.
L’échographie permet de porter le diagnostic en montrant un reflux
majeur, une insuffisance veineuse profonde sévère sans les signes
habituels des séquelles de thrombose : absence d’irrégularité,
d’occlusion segmentaire ou de séquestre, de collatérales dilatées et
surtout impossibilité de mettre en évidence un sinus valvulaire, quel
que soit le niveau observé.
La phlébographie, lorsqu’elle est pratiquée, montre des images
« pseudoartérielles » de veines rectilignes, à parois parallèles :
critère qui permet de les distinguer des hypoplasies valvulaires où
se dessine le sinus valvulaire ; il peut cependant apparaître des
ébauches de valvules au niveau jambier.
Au plan hémodynamique, les tests pléthysmographiques, rarement
pratiqués de nos jours, montrent une diminution sévère des
capacités de vidange veineuse.
* Traitement
:
La compression de force IV (pression de 40 à 50 mmHg) est le
traitement de base, suffisant dans la majorité des cas si la compliance
est bonne.
La chirurgie d’exérèse du réseau superficiel peut apporter une
amélioration des paramètres objectifs de retour veineux (exérèse des
varices superficielles et ligature des perforantes), mais le meilleur
traitement au plan théorique, quand on dispose d’un site donneur,
est une transposition valvulaire ; une exploration préalable est bien
sûr nécessaire.
5- Insuffisance valvulaire profonde primitive
:
C’est une entité clinique non exceptionnelle secondaire à une
dysgénésie valvulaire dont la prévalence est diversement appréciée
(entre 15 et 71 %).
Le concept de cette pathologie est basé sur la constatation d’une
insuffisance veineuse chronique, souvent chez l’adulte jeune, sans
argument en faveur d’antécédents thrombotiques ; elle s’en
distingue également par des perspectives thérapeutiques
spécifiques.
L’insuffisance valvulaire profonde primitive regroupe, dans son étiopathogénie, trois types d’anomalies : l’aplasie valvulaire
congénitale décrite plus haut, l’insuffisance valvulaire primitive et
l’insuffisance valvulaire sur phlébectasie.
Il en résulte une
hypertension veineuse à son tour génératrice de lésions
sous-jacentes.
* Clinique
:
Elle est basée sur la présence d’oedèmes et de complications
trophiques de l’insuffisance veineuse ; varices, dermite ocre, ulcères
sévères et survenant chez un sujet jeune en l’absence de tout élément
évocateur de séquelles de thrombose veineuse profonde.
Les investigations complémentaires reposent sur l’échodoppler et,
pour certains, les tests pléthysmographiques permettant de faire la
part de l’insuffisance veineuse superficielle et/ou profonde grâce
aux tests de garrot.
Ils doivent, dans la perspective d’un geste
chirurgical, être complétés par une phlébographie dynamique.
* Traitement
:
Il est loin d’être codifié.
Les objectifs visent à neutraliser les effets de
l’hypertension veineuse et/ou à rétablir la continence des valvules ;
face à un traitement purement médical, la chirurgie oppose, soit un
ensemble de gestes visant à éradiquer la composante superficielle
de la maladie par l’ablation des varices, ou la ligature des
perforantes, ou mieux à refaire un appareil valvulaire fonctionnel.
Le choix des indications se fait sur un ensemble d’arguments
cliniques et hémodynamiques.
Au plan clinique, la chirurgie est
réservée aux formes graves (hypodermite évolutive, ulcère
récidivant, oedème de plus de 3 cm non résolutif), aux échecs du
traitement médical bien conduit.
Au plan hémodynamique,
l’absence de chute de la pression veineuse aux manoeuvres
dynamiques, le reflux constaté sur les phlébographies rétrogrades
(correspondant à un type IV de la classification de Kistner) plaident
en faveur de la chirurgie.
Les résultats sont diversement appréciés, entre 50 et 75 % selon les
auteurs.
C - MALFORMATIONS VEINEUSES RÉGIONALES
OU DIFFUSES :
Ce sont des malformations vasculaires congénitales du réseau
veineux superficiel.
Elles peuvent être délimitées, plus ou moins
invasives, ou diffuses.
Cliniquement, l’aspect est celui de dilatations ampullaires bleutées,
plus ou moins enchâssées dans le derme, de localisation atypique, dépressibles à la palpation et se remplissant à la station debout.
1- Malformations veineuses pures
:
Elles peuvent être osseuses, articulaires, musculaires ou cutanées.
* Osseuses :
Elles sont rares ; leur localisation peut être intracorticale, périostée
ou médullaire.
La localisation intracorticale, la plus rare des trois, survient dans la
seconde partie de la vie ; elle se traduit par une lésion
radiotransparente entourée de sclérose.
La localisation périostée, très rare, se retrouve chez l’enfant comme
chez l’adulte ; au plan radiologique, elle se traduit par une
dépression cupuliforme de la corticale externe, avec épaississement
réactionnel de cette dernière et une fibrose du périoste.
La localisation médullaire se manifeste par des douleurs localisées
et la perception d’une masse survenue en l’absence de tout
traumatisme.
L’aspect radiographique de la lésion est dite en « bulle
de savon » avec souvent des modifications de la médullaire et lyse
de la corticale.
L’IRM donne un hyposignal en T1 et un hypersignal
en T2.
* Articulaires
:
La gravité de la malformation dépend de son degré de pénétration
articulaire.
La symptomatologie clinique est en effet marquée par le
risque d’hémarthrose avec douleur, limitation de la mobilité
articulaire ou amyotrophie.
La localisation de ces malformations peut être :
– intra-articulaire ou synoviale détruisant le cartilage et érodant
l’os ; son extension est variable ;
– juxta-articulaire, n’atteignant pas la capsule ni la synoviale, se
traduisant par une masse palpable ;
– mixte, à la jonction des deux.
Les signes d’appel sont le plus souvent orthopédiques (hémarthrose)
en l’absence de signe cutané.
La radiographie standard montre des
signes indirects (phlébolithes, épanchement ou réaction périostée).
L’arthroscopie a cédé la place à l’IRM qui fait le diagnostic en
montrant, sur les séquences T2, un hypersignal caractéristique des
flux lents veineux, ainsi que son degré d’extension.
Le traitement en est, soit chirurgical, soit radiologique par embolisation à l’éthanol.
* Intramusculaires
:
Ce sont les plus fréquentes, et la littérature fait état de plus de
550 cas.
La clinique rapporte des douleurs localisées plus ou moins
permanentes suivant le degré d’inflammation du muscle ou une
thrombose locale.
La masse est pratiquement toujours palpable et
possède les caractéristiques des masses veineuses.
Son diagnostic, le plus souvent clinique, est confirmé par l’IRM.
Celle-ci permet de visualiser un hypersignal en T1 moins important
que la graisse et un hypersignal en T2 ; le diagnostic pouvant se
poser, même à l’IRM, avec une tumeur musculaire, une biopsie peut
être parfois nécessaire.
Le traitement est chirurgical et peut être accompagné d’une embolisation.
* Cutanées
:
De diagnostic facile, les malformations veineuses cutanées n’ont pas,
en dehors du préjudice esthétique, de répercussion clinique.
2- Malformations extensives
:
Très souvent rattachées à tort au syndrome de Klippel-Trenaunay,
elles ont été mieux précisées par certains auteurs comme Servelle ou
Malan.
Ces malformations veineuses pures se manifestent dès la naissance
par un réseau superficiel dilaté en nappes et secondairement par
des varices induites par la malformation.
Au plan osseux, il existe le plus souvent une hypoplasie plutôt
qu’une hypertrophie.
La douleur est le symptôme qui oriente vers
la constatation d’une masse bleutée qui gonfle en orthostatisme.
Ces
veines sont dilatées et souvent calcifiées et entraînent une
déminéralisation osseuse ; le réseau veineux profond est le plus
souvent normal.
Elles ont progressivement été individualisées sous l’éponyme de
syndrome de Servelle-Martorell.
Le diagnostic d’extension requiert l’IRM qui montre, grâce aux
séquences T2, un hypersignal modéré spécifique des lacunes
veineuses, les coupes longitudinales renseignant sur l’extension de
la lésion.
L’opacification iodée de cette malformation reste possible, mais ne
permet pas de connaître avec certitude l’extension des lésions.
Les complications sont d’ordre hématologique avec des troubles de
la coagulation liés à une coagulopathie intravasculaire localisée
entraînant des thromboses locales, ou des accidents hémorragiques
lors de gestes invasifs et imposant la mise en route d’un traitement
par héparine de bas poids moléculaire (HBPM).
Elles sont aussi
orthopédiques avec les modifications de longueur du membre,
l’ostéoporose et des fractures de fatigue.
Des complications
trophiques ont également été rapportées.
Le traitement repose sur la contention élastique forte, l’embolisation
à l’Éthibloct ou la chirurgie, les HBPM en cas de coagulopathie de
consommation.
3- Syndrome de Klippel-Trenaunay
:
Décrit dans les années 1900 par ces deux auteurs, le syndrome est
encore appelé « nævus variqueux ostéohypertrophique ». Servelle en
a rapporté 768 cas en 1977.
Il se définit par une triade :
– angiome plan ;
– varices unilatérales et constantes ;
– ostéohypertrophie du membre homolatéral.
Il touche non seulement les veines mais également les capillaires et
les lymphatiques, et induit un gigantisme monomélique
progressif.
Ce syndrome est lié à une dysmorphogenèse des vaisseaux ainsi
que des structures dépendant du même blastème mésonéphrotique ;
au plan veineux, on constate donc des agénésies, hypoplasies et des
vaisseaux embryonnaires persistants.
Des études ont montré que ce syndrome, de survenue le plus
souvent sporadique, pouvait être occasionnellement associé à un
facteur génétique ; pour concilier ces deux aspects opposés, on a
évoqué la possibilité d’une hérédité multifactorielle à expression
variable et une mutation somatique survenant tôt dans
l’embryogenèse, ou encore la survie d’un fragment de gène létal
dans sa forme complète (mosaïcisme).
Au plan clinique, la triade, en théorie nécessaire au diagnostic, n’est
pourtant retrouvée au complet que dans environ deux cas sur trois.
Dans l’étude de Jacob, 63 % des patients ont la triade, 37 % ont
deux des trois signes, 94 % ont un des trois signes précocement à la
naissance ; les malformations capillaires sont les plus fréquentes
(94 %), suivies des malformations veineuses (72 %) et des anomalies
osseuses (67 %) ; 90 % des atteintes concernent le membre inférieur
et dans 85 % des cas de façon unilatérale.
Le diagnostic est clinique et doit comporter la notion d’allongement
du membre.
Les moyens complémentaires ont longtemps été
résumés à la pratique de phlébographie et/ou d’artériographie.
Actuellement le diagnostic est étayé par l’échodoppler et l’IRM qui
montrent un ou plusieurs des éléments suivants :
– atrésie, agénésie des veines profondes : fémorales, tibiales ;
– compression par brides fibreuses ;
– dysplasie fibromusculaire des troncs profonds avec des vaisseaux
irréguliers, tantôt élargis, tantôt atrétiques par endophlébosclérose ;
– persistance des veines embryonnaires primitives ; la plus
typique est la veine marginale externe, ou veine de Servelle, présente
dans 70 à 80 % des syndromes.
Les principales complications sont liées à l’allongement du membre
et ses répercussions orthopédiques, des troubles trophiques cutanés
en rapport avec la dysplasie vasculaire, des complications
hémorragiques rectales ou génitales par hyperpression de réseau
veineux de compensation ; méléna et hématuries sont rares mais
graves (0,9 % pour Servelle).
Le traitement est conservateur, et répond à la contentioncompression
: selon les cas, il est nécessaire de recourir à la
sclérothérapie ; la malformation veineuse s’affaisse une fois
sur deux et diminue dans un quart des cas ; le taux de
reperméabilisation est toutefois non négligeable.
Les angiomes
doivent être respectés chirurgicalement car ils cicatrisent mal ; les
formes localisées et pâles peuvent être traitées au laser. Les avis
sont discutés sur l’opportunité de la chirurgie.
4- Malformations artérioveineuses
de type Parkes-Weber :
Elles sortent du cadre de cet article mais peuvent parfois poser un
problème de diagnostic différentiel avec les malformations veineuses
complexes.
Ce syndrome ajoute aux signes cutanés et osseux du syndrome de Klippel-Trenaunay des fistules artérioveineuses actives ou
potentiellement actives.
L’étiopathogénie de ce syndrome fait apparaître un arrêt au stade
intertronculaire de l’involution des communications entre artères
profondes et veines superficielles.
Sa localisation est le plus souvent située au membre inférieur et
entraîne des troubles trophiques volontiers hémorragiques pouvant
mettre en péril la vie du patient ou la conservation du membre.
Cliniquement, le membre est chaud, hypertrophique porteur de
varices monstrueuses et hyperpulsatiles.
La main perçoit un thrill
caractéristique et le stéthoscope un souffle continu à renforcement
systolique.
L’échodoppler montre des flux de fistule avec un débit continu à
renforcement systolique.
L’artériographie montre un retour veineux
précoce et la présence de fistules multiples.
L’IRM fait partie du
bilan d’extension montrant en T1 et T2 des lacunes noires car il s’agit
de malformations à haut débit.
Le pronostic de ce syndrome est péjoratif compte tenu des
complications nombreuses, souvent sévères, émaillant l’évolution de
syndrome dans le temps :
– décompensations cardiovasculaires si les fistules sont hémodynamiquement actives ;
– fractures pathologiques ;
– retentissement cutané avec aspect de pseudo-Kaposi et
hémorragies dangereuses ;
– amputation du membre lorsque les gestes destinés à retarder
l’évolution des fistules dépassent leur but ou pour contrôler une
hémorragie à risque vital.
La prise en charge thérapeutique comporte les versants
orthopédiques et chirurgicaux identiques à ceux du syndrome de Klippel-Trenaunay concernant les troubles de la croissance du
membre.
Une chirurgie souvent itérative a été proposée pour
déconnecter les fistules et retarder l’évolution ; ses résultats sont
temporaires et inconstants.
L’embolisation après cathétérisme sélectif
des artères nourricières de la malformation avec du matériel de
diverse nature (coils, ballonnets) permet de stabiliser ou de diminuer
le volume de la lésion et de limiter le retentissement général de ces
fistules à haut débit.
La maladie évolue par poussées souvent imprévisibles et peut
aboutir à l’amputation du membre.
Le retentissement cardiaque de
la fistule impose une surveillance échographique de la fonction
ventriculaire gauche.