Examen clinique et paraclinique du patient atteint de vertiges et/ou de troubles de l’équilibre
Cours d'ORL (Oto-rhino-laryngologie)
Introduction
:
Le vertige est une pathologie fréquente.
Le médecin généraliste, en
pratique, examine par semaine cinq patients présentant des vertiges
ou des déséquilibres, dont trois en consultation et deux en visite à
domicile.
Il adresse son patient à l’oto-rhino-laryngologiste (ORL)
pour un diagnostic et une prise en charge dans 80 % des cas.
En 1980, seuls 6 % des patients vertigineux étaient adressés aux
ORL : depuis une vingtaine d’années, l’ORL est donc reconnu
compétent sur cette pathologie difficile et en pleine évolution.
Les trois quarts des diagnostics sont cliniques, et environ la moitié
reposent déjà sur les données de l’interrogatoire.
L’autre quart est
révélé par l’examen vidéonystagmographique et les autres
explorations complémentaires.
Définitions :
A - VERTIGE :
Le mot vertige vient du latin « vertere » : tourner.
Le vrai sens
médical de ce mot doit correspondre à une sensation de rotation,
soit de l’environnement, soit de son propre corps.
Avec le vertige
apparaît un déséquilibre et/ou une sensation de déséquilibre.
Il
existe une autre sorte de vertige, celui de la pathologie otolithique
où le patient ne voit pas tourner, mais sent la pièce s’incliner, osciller,
pencher.
B - TROUBLE DE L’ÉQUILIBRE :
Le trouble de l’équilibre peut être ressenti par le patient de façon
isolée, sans vertige.
Le mot équilibre vient du latin « libra » : balance.
Il se définit comme
une égalité de force entre deux ou plusieurs choses qui s’opposent.
C - DÉSÉQUILIBRE :
Le déséquilibre est cette dérive de l’équilibre postural, qui échappe
au contrôle volontaire et entraîne vers la chute.
Cette régulation
subtile, que l’on peut appeler le contrôle postural fin lorsqu’on est
debout, immobile, est assurée par la triple entrée sensorielle visuelle,
labyrinthique et proprioceptive, et maintient l’équilibre postural de
façon automatique.
D - SENSATION DE DÉSÉQUILIBRE :
C’est la sensation subjective que le corps ne garde pas son équilibre.
Cette sensation peut être erronée, le corps étant parfaitement stable,
ou réelle.
E - DIFFÉRENTES ÉTIOLOGIES :
Toutes les pathologies vestibulaires ne s’expriment pas par des
vertiges.
Si la pathologie est chronique, lentement évolutive, tel un
neurinome de l’acoustique, la pathologie s’exprimera peut-être par
un déséquilibre.
Ainsi, la pathologie vestibulaire correspond soit à des vertiges
rotatoires, soit à des sensations erronées de déplacements linéaires,
soit à des déséquilibres.
De même, tous les vertiges ne sont pas forcément vestibulaires.
On
peut avoir des sensations vertigineuses dans le cas d’une pathologie
musculaire cervicale ou oculomotrice, ou purement neurologique,
sans atteinte vestibulaire périphérique, mais touchant les voies et
centres vestibulaires centraux.
On ne trouve que ce que l’on cherche, et il nous faut donc dans un
premier temps récapituler les grands diagnostics des vertiges et
leurs pièges diagnostiques, pour bien préciser le but de l’examen
clinique et paraclinique.
F - DIAGNOSTICS :
Nous distinguons quatre principales familles diagnostiques.
Il s’agit d’un vertige bref positionnel qui se répète depuis plusieurs
jours, plusieurs semaines.
L’interrogatoire cherche à éliminer les
diagnostics différentiels : les fistules endolymphatiques, les lésions
de la fosse postérieure et les rares conflits vasculonerveux (nouvelles
pathologies otoneurologiques émergentes dont on ignore la vraie
prévalence).
2- Vertiges récurrents :
Les vertiges récurrents de quelques heures, dont le type est la
maladie de Ménière, peuvent être ou non associés à des signes
auditifs.
Les diagnostics différentiels le plus couramment recherchés
sont les maladies auto-immunes, l’otospongiose, l’otite chronique,
le cholestéatome, la fistule ou fuite de liquide labyrinthique et le
neurinome de l’acoustique (le schwannome vestibulaire).
3- Grand vertige rotatoire :
Le grand vertige rotatoire évoluant pendant quelques jours a pour
type la névrite vestibulaire.
Parmi les diagnostics différentiels, on
note l’accident aigu des noyaux vestibulaires ou du vestibulocérébellum (archéocervelet et vermis), la fracture du rocher
a minima.
4- État de déséquilibre
:
L’état de déséquilibre fait évoquer :
– une atteinte otolithique ; les troubles de l’équilibre sont en général
déclenchés par des stimulations otolithiques répétées (un trajet en
voiture, essentiellement sur autoroute, l’ascenseur) ; ils peuvent
survenir de façon isolée ou dans le cadre d’un VPPB ;
– un déficit vestibulaire bilatéral périphérique ; après un début
intense, le déséquilibre s’amende progressivement au fil du temps ;
penser à l’intoxication aux aminosides ;
– un syndrome postural phobique ; l’état de déséquilibre est
constant depuis plusieurs mois ou plusieurs années ; le bilan
clinique est tout à fait normal, avec une exploration fonctionnelle et
un bilan neuroradiologique normal ;
– chez le sujet âgé, la presbyataxie, qui peut être majorée par
certains médicaments (les hypotenseurs et tout particulièrement les
diurétiques, les sédatifs, surtout les benzodiazépines) ;
– une atteinte centrale, bien que beaucoup plus rare : un schwannome vestibulaire, une maladie dégénérative des noyaux gris
centraux ou du cervelet, un syndrome extrapyramidal, une lésion
d’origine vasculaire telle la leucoaraïose, une hydrocéphalie à
pression normale.
Rappel anatomique et physiologique :
L’appareil vestibulaire, dans chaque oreille, est constitué de deux
parties : les canaux semi-circulaires et les organes otolithiques.
Les
canaux semi-circulaires comprennent, de chaque côté, un canal semicirculaire
horizontal, un canal semi-circulaire vertical antérieur et
un canal semi-circulaire vertical postérieur.
Les organes otolithiques
comprennent, de chaque côté, un utricule et un saccule.
L’appareil labyrinthique contient des capteurs d’accélération dans
l’oreille interne : les canaux semi-circulaires mesurent les
accélérations angulaires dans les trois plans de l’espace ; le système
otolithique, utricule et saccule, mesure les accélérations linéaires
dans toutes les directions de l’espace (préférentiellement dans le
plan horizontal pour l’utricule et dans le plan vertical pour le
saccule).
Ces informations de mouvement sont ensuite transformées en
activité électrique et transmises à notre cerveau grâce :
– aux cellules neurosensorielles situées sur les crêtes ampullaires
dans les canaux semi-circulaires et sur les macules dans les organes
otolithiques ;
– puis au nerf vestibulaire composé de deux branches : branche
supérieure comprenant les nerfs canalaires antérieur et horizontal,
et utriculaire ; branche inférieure comprenant les nerfs canalaire
postérieur et sacculaire.
Le nerf vestibulaire transmet ensuite les informations aux noyaux
vestibulaires situés dans le tronc cérébral.
Il s’agit de véritables petits
ordinateurs qui reçoivent des informations, non seulement de
l’appareil vestibulaire homo- et controlatéral, mais aussi du système
visuel, proprioceptif spinal, cérébelleux et cortical.
Des noyaux
vestibulaires partent les neurones vestibulaires centraux à
destination des motoneurones spinaux (système vestibulospinal),
des motoneurones oculomoteurs (système vestibulo-oculomoteur) et
de quelques aires corticales.
Le système vestibulospinal permet les réactions d’équilibration et
d’adaptation du corps aux mouvements.
Le système vestibulo-oculaire permet la stabilisation de la vision lors
des mouvements.
Ces informations permettent de savoir si c’est nous qui bougeons
ou l’environnement, et de connaître la vitesse et la direction du
mouvement.
Les réflexes vestibulo-oculaires et vestibulospinaux sont soumis à
un contrôle cérébelleux grâce aux cellules de Purkinje du flocculus,
qui se projettent également sur les noyaux vestibulaires.
Examen clinique :
A - INTERROGATOIRE :
Première étape diagnostique indispensable : faire préciser par le
patient les caractéristiques du vertige :
– sa durée ;
– son caractère rotatoire ou la sensation de tangage perçue par le
patient ;
– la fréquence des crises vertigineuses ;
– l’existence de signes auditifs associés (baisse d’audition,
acouphènes) ;
– l’existence de céphalées associées évoquant des céphalées de
tension ou des migraines, leur rapport dans le temps avec les
vertiges ;
– l’existence de signes d’hypotension orthostatique ;
– la notion de perte de connaissance ;
– l’existence d’un traumatisme crânien ayant précédé la survenue
des vertiges ;
– la survenue d’un épisode infectieux ;
– les antécédents personnels ;
– le traitement médical à la recherche de médicaments ototoxiques
(aminosides, quinine) ;
– les antécédents familiaux de vertiges ou de migraines.
B - EXAMEN OTOLOGIQUE :
Il recherche une perforation tympanique (interdisant une épreuve
calorique à l’eau), des signes d’otite moyenne aiguë ou chronique,
des signes d’aplasie de l’oreille, un antécédent chirurgical.
C - EXAMEN NEUROLOGIQUE :
Il recherche des signes d’atteinte centrale : atteinte des paires
crâniennes.
L’examen de l’oculomotricité est traité à part.
L’examen du nerf facial (VII) commence par l’examen de la motilité
faciale (fronceur des sourcils, releveur des ailes du nez, labial et de
la houppe du menton pour les groupes musculaires paramédians, et
les muscles releveurs des sourcils, orbiculaires, buccinateurs et
zygomatiques), puis par l’examen plus fin du signe des cils de
Souques (on demande au patient de fermer les yeux fortement ; des
cils moins enfoncés d’un côté trahissent une faiblesse musculaire et
ainsi une suspicion d’atteinte minime du VII).
On recherche une hypotonie d’une hémiface : au niveau de la
paupière, du sillon nasogénien et de la bouche.
L’examen neurologique se poursuit par la recherche d’un syndrome
cérébelleux, syndrome extrapyramidal, des signes d’atteinte
périphérique (déficit moteur ou sensitif des membres).
D - EXAMEN DE L’ÉQUILIBRE POSTURAL
:
Cet examen du patient debout essaie d’évaluer la régulation
posturale statique et dynamique sous contrôle des fonctions
vestibulaires utriculosacculaires et proprioceptives principalement,
mais aussi vestibulaires canalaires et visuelles.
1- Évaluation du système moteur postural
:
On mesure l’alignement du sujet par rapport à la verticale physique,
en position assise et debout.
Un écart trop important par rapport à
celle-ci peut limiter les capacités de réponse à un déséquilibre et
augmenter le risque de perte d’équilibre dans certaines
directions.
On mesure la largeur spontanée de la base de sustentation.
On mesure l’amplitude de certains mouvements comme la flexion
du tronc, de la colonne cervicale, et l’amplitude des mouvements
des chevilles.
Après une réalisation passive de ces mouvements, leur
réalisation active permet d’estimer si la force musculaire du sujet est
suffisante.
On contrôle la capacité de réaliser les trois stratégies de correction
d’un déséquilibre (stratégie de cheville, de hanche, du pas) selon
trois modalités successives :
– volontairement en demandant et contrôlant la présence ou
l’absence de flexion de hanche ou de déplacement des pieds ;
– en réponse à un déplacement passif des hanches ou des épaules ;
après une poussée antérieure des hanches du patient, le retour à la
position d’équilibre, sans flexion des hanches, témoigne de la
capacité de développer une stratégie de chevilles ; des composantes
supplémentaires ou asymétriques, comme des flexions excessives
des genoux, des rotations du tronc ou des mouvements anormaux
des bras, peuvent être quantifiées ;
– par anticipation, le centre de gravité se déplace avant l’exécution
d’un mouvement de bras soulevant une charge.
Cette évaluation porte sur les aspects musculaires, ostéoarticulaires
et neurologiques des réponses posturales.
Des troubles posturaux
statiques et des limitations d’amplitude de mouvements peuvent
résulter d’altérations motrices, sensorielles, articulaires, de
compensations justifiées ou non à celles-ci, ou d’une peur injustifiée
de franchir certaines limites.
2- Test de Romberg :
Ce test étudie la régulation motrice de la position statique,
comparant deux conditions visuelles : les yeux ouverts puis
les yeux fermés.
Il peut être sensibilisé de plusieurs manières, par exemple par la
manoeuvre de Jendrassik, qui consiste à demander au sujet
d’agripper vigoureusement ses mains l’une dans l’autre, coudes à
l’horizontale.
Les résultats normaux sont une stabilité de la position.
Il est normal
d’avoir de toutes petites oscillations du corps, dont l’angle ne
dépasse pas 2°.
Dans les affections otologiques, quelques secondes après la
fermeture des yeux, il est classique de dire que le sujet dévie sur son
vestibule malade.
En cas d’affection du système nerveux central, l’instabilité du patient
est augmentée aussi par l’occlusion palpébrale.
Chez le patient hystérique, la chute est souvent spectaculaire,
débutant parfois avant la fermeture des yeux.
Il existe très souvent
un contraste entre le classique test de Romberg, bien connu du
patient, et les autres tests de la fonction vestibulospinale plus
difficiles et paradoxalement normaux.
3- Test de piétinement aveugle de Fukuda :
Ce test, très sensible, consiste à demander au sujet de piétiner sur
place, les yeux fermés, en levant les genoux de 30°, d’effectuer
50 pas, en les comptant mentalement, au rythme d’un pas par
seconde.
On mesure ou on estime l’angle de rotation sur place :
– le spin, vers la gauche ou vers la droite c’est-à-dire l’angle de
rotation en degrés ;
– la déviation latérale que l’on mesure en mètres.
Le résultat normal est une stabilité du piétinement, avec une discrète
rotation ne dépassant pas 60° à 80°.
Le résultat pathologique est une rotation supérieure à 80°, le plus
souvent vers le déficit vestibulaire.
Des réponses plus rares peuvent
être obtenues :
– soit une déviation du côté opposé en cas de recovery syndrome ;
– soit une latéropulsion au test du piétinement aveugle, cette
déviation latérale ne s’accompagnant pas de rotation sur place ;
parfois de plusieurs mètres (en 50 pas), il peut s’agir d’un
dysfonctionnement otolithique.
4- Test de marche aveugle :
Le sujet est debout, tête droite et yeux fermés, il avance et recule de
quelques pas.
Le résultat normal est une absence de déviation.
Le
principal résultat pathologique est une déviation du côté du déficit
vestibulaire, qui réalise une marche dite en « étoile ».
La forme de
cette étoile peut être très déformée par une latéropulsion.
Cette latéropulsion traduit plus un déficit otolithique tel qu’il se constate
dans les névrites vestibulaires, mais surtout dans les syndromes
bulbaires.
Dans le recovery syndrome, la déviation se fait du côté opposé.
Dans la pathologie cérébelleuse, on constate une marche festinante,
chaque pas entraînant une déviation excessive de tout le corps, avec
une mise en route hésitante, retardée, et un arrêt incertain.
Les pas sont inégaux, irréguliers. Les membres
inférieurs sont anormalement projetés, les membres supérieurs
anormalement balancés et le tronc reste en arrière.
5- Test des index :
On demande au sujet assis sur un divan, ou sur un
tabouret (le dos non soutenu), de tendre les bras en avant,
immobile, les yeux fermés.
Le résultat normal est l’absence de déviation au
bout de 10 à 20 secondes.
Le résultat pathologique est une déviation d’au
moins 2 à 3 cm en 10 à 20 secondes.
6-
Test d’indication :
On demande au sujet, assis, dos non soutenu, de
tendre les bras et les index devant ceux du praticien qui servent de
repère, puis d’effectuer de grands mouvements d’élévation et de
rabaissement des index les yeux fermés.
Le résultat normal est un positionnement des
index devant ceux du praticien, à moins de 1 cm d’écart. Le résultat
pathologique classique est une déviation latéralisée progressive.
7- « Functional reach point test »
:
On demande au patient, debout, l’écart entre les pieds étant similaire
à la distance entre les épaules, de tendre un bras horizontalement
vers l’avant le plus loin possible, sans bouger les pieds (entre 20 et
40 cm).
Ce test est bien reproductible et prédictif du risque de
chute.
Il est en outre sensible à une rééducation de l’équilibre.
8- Réactions posturales à la poussée brève
:
Le patient est placé en position de Romberg, les
yeux fermés.
On l’informe que l’on va s’installer derrière
lui, qu’on va le bousculer par les deux épaules et qu’il devra
réagir rapidement pour retrouver son équilibre.
Deux types de réaction posturale sont retrouvés :
soit un fléchissement en avant du tronc, soit un déplacement en
arrière de l’un des deux pieds pour retrouver ainsi rapidement
l’équilibre.
Chez le sujet âgé, on constate fréquemment un
retard de réaction posturale. Parfois même, le patient part en
arrière, piétinant des deux talons, ne pouvant plus se redresser
jusqu’à la chute.
Il est donc important dans ce cas-là, pour
apprécier l’ensemble du phénomène, de rester bien en arrière du
patient, les bras tendus pour le rattraper sous les bras.
9- « Timed get up and go test » :
On demande au patient de se lever d’une chaise,
de marcher 3 m, de faire demi-tour et de se rasseoir.
Les résultats de ce test montrent que les
patients autonomes pour l’équilibre et les tâches de préhension le
réalisent en moins de 10 secondes, tandis que ceux dont
l’indépendance n’est acquise que pour les transferts le réalisent en
moins de 20 secondes.
Les patients le réalisant en plus de 30 secondes
sont dépendants pour la plupart des tâches de la vie journalière.
Une première version non quantifiée du test montrait une bonne
corrélation avec le risque de chute chez les personnes âgées.
Les items suivants sont cotés de 0 (mauvais) à 4 (bon) : station assise
sans soutien dorsal ni accoudoir ; passage assis-debout ; passage
debout-assis ; transfert d’un siège à un autre ; station debout sans
soutien ; station debout yeux fermés ; station debout pieds joints ;
station debout en tandem (pieds l’un derrière l’autre sur une ligne) ;
station unipodale ; rotation du tronc ; ramassage d’un objet au sol ;
tour complet (360°) ; monter sur une marche ; se pencher en avant.
Ce test est réputé avoir une bonne valeur test-retest et être
reproductible entre plusieurs examinateurs.
11- Cas particulier de l’enfant de moins de 4 ans
:
L’examen les yeux fermés est difficilement obtenu chez l’enfant de
moins de 4 ans.
On regarde tout d’abord l’enfant s’approcher, se
promener dans la salle d’examen et jouer.
On le fait marcher puis
courir sur un sol dur puis sur un sol mou.
Chez l’enfant
ataxique, il faut bien observer la façon dont il prend les objets, les
manipule, lorsqu’il est en position assise maintenue.
Une bonne
motricité des membres contrastant avec le déséquilibre est en faveur
d’une ataxie d’origine vestibulaire plutôt que d’un syndrome
cérébelleux.
E - NYSTAGMUS :
Le nystagmus désigne des mouvements oculaires répétés, succession
d’un mouvement lent suivi d’un retour rapide.
La phase lente de ce
mouvement est produite par l’asymétrie de fonctionnement des
noyaux vestibulaires : asymétrie physiologique pendant un
mouvement, ou pathologique en cas de lésion du labyrinthe ou des
voies vestibulaires.
La phase rapide est non seulement un retour de
l’oeil en position initiale, mais une saccade qui dirige l’oeil « là où on
va aller ».
Ce mouvement rapide est une saccade oculaire
programmée par la formation réticulée et les noyaux vestibulaires.
Le nystagmus se définit par sa direction, son intensité et sa forme.
La direction du nystagmus est définie par le sens de sa secousse
rapide.
Il peut être droit, gauche, haut, bas, horaire ou antihoraire.
L’intensité du nystagmus se définit selon trois degrés :
– un nystagmus gauche (par exemple) qui est vu uniquement dans
le regard à gauche et non pas dans le regard de face, ni dans le
regard à droite, est de degré I ;
– un nystagmus gauche qui est vu non seulement dans le regard à
gauche mais aussi dans le regard de face et non pas dans le regard à
droite est de degré II ;
– un nystagmus gauche qui est vu non seulement dans le regard à
gauche, dans le regard de face, mais aussi dans le regard à droite est
de degré III.
Généralement, l’intensité du nystagmus est corrélée à l’intensité du
vertige.
Un phénomène de plasticité neuronale, structurale et
cinétique tend à faire disparaître vertiges, nystagmus et
déséquilibre : c’est le phénomène de compensation vestibulaire
centrale.
La forme du nystagmus : les nystagmus peuvent battre dans différents
plans en fonction du plan du canal semi-circulaire stimulé :
– le plan horizontal (à gauche ou à droite), comme dans les VPPB
du canal horizontal, ou dans certaines atteintes centrales (en
général peu diminué ou augmenté par la fixation), ou congénital
(en général variable en fréquence et en amplitude, et augmentant
à la fixation) ;
– le plan vertical (en haut ou en bas), comme dans le cas d’une
malformation d’Arnold-Chiari ; ayant valeur d’atteinte centrale, il
persiste, en général, à la fixation ;
– le plan torsionnel (rotatoire horaire ou antihoraire), comme dans
un VPPB du canal postérieur ou dans certaines atteintes centrales
(en général peu diminué ou augmenté par la fixation) ;
– le plan horizontal et rotatoire, associant plusieurs composantes,
qui traduit l’atteinte globale du système vestibulaire périphérique
(comme dans le cas d’une névrite vestibulaire ou d’une crise de
maladie de Ménière).
Généralement, les nystagmus sont congruents.
C’est-à-dire que les
deux yeux exécutent les mêmes mouvements dans le même plan et
dans le même sens.
Parfois, les nystagmus sont disjonctifs : les
mouvements se font en vergence ; c’est le rare cas des nystagmus
convergents.
Ils sont rencontrés dans les atteintes pédonculaires.
Parfois les nystagmus sont dissociés ; les deux yeux ne se déplacent
pas d’un même mouvement : dans l’ophtalmoplégie internucléaire,
le nystagmus prédomine sur l’oeil en abduction, par atteinte du
faisceau longitudinal médian situé dans le tronc cérébral.
Il existe d’autres mouvements oculaires périodiques nommés
nystagmus, comme le nystagmus pendulaire où on ne retrouve plus
la nette dissociation entre phase rapide et phase lente.
Il s’agit d’un
mouvement sinusoïdal parfois dans le plan horizontal, parfois dans
le plan vertical, parfois dans les deux plans, réalisant un nystagmus
de circumduction : l’oeil décrit un mouvement vaguement circulaire
et continu.
Parfois, ce mouvement périodique est pseudocycloïde,
formant sur le tracé un aspect de dômes ou de pics comme une
succession d’arcs de cercle, donnant cliniquement l’impression que
l’oeil est comme une balle qui rebondit.
Ce phénomène est très
fréquent dans les déficits visuels sévères.
Le nystagmus retractorius est constitué de clonies de tous les
muscles oculaires, entraînant un enfoncement brutal du globe
oculaire dans l’orbite, survenant parfois par salves.
Ceci traduit une
lésion de la région épiphysaire, très rarement rencontrée.
C’est l’examen vidéonystagmoscopique qui permet de visualiser ces
nystagmus dans le noir. L’oeil est filmé par une caméra infrarouge.
La fixation est ainsi inhibée.
Cet appareillage vient remplacer les
lunettes de Frenzel, permettant une meilleure visualisation des
mouvements oculaires et l’enregistrement des nystagmus.
1- Nystagmus spontané
:
Le nystagmus spontané défini par les otologistes est un nystagmus
observé sous vidéonystagmoscopie, dans le regard de face, chez un
patient assis, immobile et tête droite. Un tel nystagmus semble
toujours pathologique.
Chez le sujet normal, dans le regard latéral extrême, à partir de
50° d’excentration peuvent apparaître quelques secousses nystagmiques battant dans le sens de l’excentration du regard.
Il bat
à gauche dans le regard à gauche, à droite dans le regard à droite,
en haut dans le regard en haut.
Ce nystagmus est dit physiologique.
*
Influence de la fixation oculaire :
Un nystagmus spontané vestibulaire (en crise de maladie de Ménière
ou de névrite vestibulaire) est toujours plus ample et plus net sous
vidéonystagmoscopie que les yeux ouverts à la fixation, le sujet
regardant une mire.
Le taux de réduction est au moins de la moitié
de l’amplitude.
Ce feed back visuel utilise la voie optique accessoire
du flocculus cérébelleux et un contrôle inhibiteur sur les noyaux
vestibulaires.
En cas de pathologie vestibulaire centrale (noyau
vestibulaire ou flocculus cérébelleux), ce nystagmus est soit peu
modifié, parfois inchangé, voire augmenté par la fixation visuelle.
À un degré de plus, il peut apparaître à la fixation visuelle et
disparaître sous vidéonystagmoscopie.
* Aspects inhabituels des nystagmus :
+ Composante horizontale-rotatoire
Dans une pathologie vestibulaire, comme une névrite vestibulaire
ou une maladie de Ménière, le nystagmus est horizontal-rotatoire.
La composante rotatoire est antihoraire quand le nystagmus bat à
droite, horaire quand le nystagmus bat à gauche.
On pourrait dire
que le nystagmus roule sur le plancher inférieur de l’orbite.
Dans
les affections bulbaires, type syndrome de Wallenberg, le nystagmus
spontané horizontal rotatoire a une composante rotatoire qui est parfois inverse, roulant sur le plafond de l’orbite : par exemple à
composante horaire quand il bat à droite en cas de Wallenberg
gauche et antihoraire en cas de nystagmus gauche dans un
Wallenberg droit.
Le nystagmus spontané, dans le syndrome de
Wallenberg, peut s’inverser d’une part à la fermeture des yeux et/ou
d’autre part lorsque le sujet regarde du côté opposé.
·
+ Piège rare : le nystagmus volontaire
C’est généralement vers l’âge de 7 ans que les jeunes enfants
prennent conscience qu’ils sont capables de faire trembler leurs
yeux, dans une sorte d’effort de convergence contrariée.
Cette
trémulation oculaire apparaît à l’examen être constituée d’une série
de saccades dos à dos comme un flutter oculaire et peut durer de 5 à
6 secondes, mais pas plus du fait de la fatigue que cela entraîne.
Cette aptitude à faire trembler ses yeux s’apprend facilement à cet
âge, pour faire rire les petits amis.
Elle peut être utilisée plus tard
dans la vie pour étonner les médecins, parfois pour les abuser.
2- « Gaze nystagmus » ou nystagmus de fixation
du regard excentré
:
« To gaze » signifie scruter, regarder attentivement.
Un gaze
nystagmus est un nystagmus constaté à la fixation visuelle d’une
cible placée dans le regard latéral.
Il faut donc le distinguer du
nystagmus spontané vu sous lunettes de Frenzel ou en
vidéonystagmographie, majoré par l’excentration du regard.
Les six muscles oculomoteurs de chaque oeil, qui maintiennent l’oeil
dans cette position excentrée, sont soumis à un contrôle cérébelleux.
Le gaze nystagmus traduit une dérive de cette position excentrée,
avec des secousses de rattrapage pour replacer l’oeil sur la cible.
À
l’examen électronystagmographique, on constate souvent que le
décours de cette dérive n’est pas régulier mais exponentiel.
Ce
nystagmus ne s’accompagne pas de sensation vertigineuse.
L’examinateur approche une mire à 30 cm du sujet, dans le regard
de face qu’il maintient pendant 20 secondes, pour entraîner d’un
mouvement brusque le regard de son patient vers la gauche de
20° d’excentration environ, maintenant le regard pendant une
vingtaine de secondes, puis retournant dans le regard de face ; la
même séquence est effectuée dans le regard latéral droit.
Le résultat normal est une stabilité parfaite du regard dans chacune
de ces positions excentrées.
* « Rebound nystagmus »
:
Il s’agit d’un nystagmus du regard excentré apparaissant à la
fixation, qui apparaît dans le regard latéral (que l’on peut constater
au-delà de 40°, qui peut s’épuiser et disparaître comme un
nystagmus physiologique).
Cependant, lorsque les yeux retournent
à la position médiane dans le regard de face, ce nystagmus s’inverse,
dure quelques secondes et disparaît.
Quand les yeux vont dans le
regard opposé, ce gaze nystagmus va à nouveau apparaître, puis
s’inverser au retour dans le regard de face.
Ce phénomène peut être
ainsi répété indéfiniment.
La valeur cérébelleuse a été confirmée, mais parfois on peut le retrouver dans certains nystagmus
congénitaux ou certains strabismes.
* Nystagmus monoculaire (ataxique de Harris)
:
Il s’agit d’un nystagmus du regard excentré prédominant sur l’oeil
en abduction.
Plusieurs formes sont possibles : uni- ou bilatérale,
minime ou majeure (nystagmus monoculaire).
Cette affection
accompagne en règle une ophtalmoplégie internucléaire uni- ou
bilatérale, dont le diagnostic serait fait a minima sur l’étude des
saccades.
Cette hypermétrie donne l’impression clinique que l’oeil
rebondit sur la paroi externe de l’orbite.
Ce n’est pas un signe
cérébelleux.
3- Nystagmus verticaux :
Il s’agit de nystagmus apparaissant dans le regard de face à la
fixation visuelle, dont la phase rapide est verticale supérieure ou
verticale inférieure.
Des nystagmus verticaux, supérieurs dans le regard en haut (up-beat
nystagmus), verticaux inférieurs dans le regard en bas (down-beat
nystagmus), sont presque constamment retrouvés dans les cas
d’ophtalmoplégies internucléaires.
Dans ces cas-là, c’est
l’interruption des voies vestibulaires ascendantes vers les noyaux
de l’oculomotricité verticale, le plus souvent du faisceau
longitudinal médian, qui en est la cause.
* Nystagmus vertical inférieur :
Il est plus visible dans le regard vers le bas ou latéral ; il est souvent
associé avec un gaze nystagmus horizontal ou peut apparaître
oblique dans le regard latéral.
Chez certains patients, le nystagmus
vertical inférieur est intermittent et il n’est parfois évident que
pendant la convergence ou dans le regard latéral.
Ainsi, demander
au patient de regarder vers le bas puis latéralement est le meilleur
moyen pour révéler le nystagmus vertical inférieur.
Il est peu diminué par la fixation d’une cible.
Il peut être aggravé ou avoir sa direction changée par un
changement de position de la tête, ou un head shaking vigoureux
(horizontal ou vertical), ou par une vibration mastoïdienne.
La convergence peut l’augmenter, le supprimer ou le transformer en
nystagmus vertical supérieur.
Il est associé à d’autres signes d’atteinte vestibulocérébelleuse : des
anomalies oculomotrices (la poursuite verticale lente et le réflexe
vestibulo-oculaire vertical sont souvent anormaux).
Le nystagmus vertical inférieur est généralement présent dans les
yeux en position centrale.
Chez la plupart des patients avec un
nystagmus vertical inférieur, la loi d’Alexander est appliquée : la
vitesse de la phase lente du nystagmus augmente dans le regard
vers le bas et diminue dans le regard vers le haut.
Les conséquences
du glissement de l’image sur la rétine par les phases lentes sont des oscillopsies et une instabilité posturale.
Quelques patients rapportent
aussi l’existence d’une diplopie, reflétant peut-être la coexistence
d’une skew déviation.
Le nystagmus vertical inférieur est parfois
dissocié, plus vertical pour un oeil et torsionnel pour l’autre.
Dans
ces circonstances, il peut être accompagné par une ophtalmoplégie
internucléaire.
*
Nystagmus vertical supérieur :
Il peut être considéré comme une forme de nystagmus vestibulaire
central.
Il est peu supprimé par la fixation d’une cible à distance.
Le nystagmus vertical supérieur permet une localisation moins
précise de son origine que le nystagmus vertical inférieur, les lésions
retrouvées étant situées de la moelle au mésencéphale.
Le
nystagmus vertical supérieur avec les yeux fermés en position
centrale devrait être différencié du nystagmus apparaissant
uniquement dans le regard vers le haut, qui survient en général dans
les atteintes périphériques oculomotrices incluant les myasthénies
(graves) ou la maladie d’Erb-Goldflam, et chez quelques sujets
normaux.
Il doit être également différencié du nystagmus transitoire à la fois
vertical supérieur et torsionnel, induit par le positionnement dans le
cadre du VPPB classique du canal postérieur.
Le nystagmus vertical supérieur présent en position centrale suit
toujours les lois d’Alexander, le nystagmus se majorant
considérablement dans le regard vers le haut.
Quelquefois,
cependant, le nystagmus augmente dans le regard vers le bas, la
vitesse de la phase lente étant augmentée.
Contrairement au
nystagmus vertical inférieur, le nystagmus vertical supérieur ne
s’accentue habituellement pas dans le regard latéral.
La suppression
de la fixation peut modifier la fréquence des phases rapides, mais
n’influence pas la vitesse de la phase lente.
La convergence
augmente le nystagmus chez certains patients, le supprime chez
d’autres, et parfois le transforme en nystagmus vertical inférieur.
La
position tête penchée en avant augmente le nystagmus chez certains
patients.
Le réflexe vestibulo-oculaire vertical et la poursuite lente
sont habituellement anormaux.
4- Mouvements oculaires spontanés :
* Latéropulsion oculaire
:
Il s’agit d’un mouvement de dérive oculaire qui apparaît dès que le
sujet ne fixe pas son regard sur une cible : les yeux dans l’obscurité,
les yeux fermés, entre deux saccades oculaires.
Au cours des
saccades, cette latéropulsion induit l’association d’une hypermétrie
dans le sens de cette dérive et d’une hypométrie dans le sens
opposé.
Lorsque le sujet ferme les yeux quelques secondes, puis
regarde l’examinateur, à l’ouverture des paupières ses deux globes
oculaires dérivent d’un côté et reviennent rapidement dans le regard
de face.
La latéropulsion oculaire est généralement évocatrice d’une
lésion bulbaire ou cérébelleuse souvent unilatérale.
On peut trouver
des formes a minima, hypométrie dans une seule direction ou
hypermétrie uniquement dans l’autre direction, ayant sans doute la
même valeur sémiologique.
* « Flutter » oculaire :
Il s’agit d’oscillations saccadiques des deux yeux, dans le plan
horizontal, sans ondes carrées.
Ce sont des saccades « dos à dos »
qui surviennent par bouffées de 300 à 500 millisecondes, parfois
dans le regard de face, mais parfois uniquement dans le regard
excentré, qui sont ressenties par le patient comme une période de
bref flou visuel.
Les étiologies sont variables : encéphalites,
tumeurs, intoxications médicamenteuses, défaut d’alignement des
axes visuels.
* Opsoclonie :
C’est un très rare mouvement de saccades oculaires dissociées des
deux yeux, dans tous les plans, horizontal, vertical, rotatoire, parfois
même en profondeur.
Les étiologies sont les mêmes que celles du
flutter oculaire.
* Grandes saccades en ondes carrées : macro « square jerks »
Ce sont des saccades de grande amplitude : supérieures à 5°, suivies
d’un retour dans le regard de face après une latence d’environ
80 millisecondes.
On a l’impression que le patient ne peut pas garder
l’oeil droit devant lui et qu’une saccade aberrante l’emmène vers une
cible non désirée.
Ces bouffées saccadiques sont à peu près
stéréotypées pour un même individu.
Elles peuvent survenir dans
le noir ou à la fixation ; elles sont rarement supprimées par la
fixation.
On les rencontre dans la sclérose en plaques.
Parfois, ces saccades surviennent par bouffées : ce sont les macrosaccadic oscillations.
Leur amplitude augmente puis diminue,
avec des intervalles intersaccadiques d’environ 200 millisecondes ;
elles peuvent avoir une composante verticale ou torsionnelle.
Elles
ont été décrites dans des atteintes cérébelleuses ou du tronc cérébral.
* Petites saccades en ondes carrées :
Les square wave jerks sont des saccades de petite amplitude : de 10°
à 30°, très souvent constatées chez le sujet normal lors de l’occlusion
des yeux, surtout en cas de fatigue ou de stress.
Elles sont plus
fréquemment constatées chez le sujet âgé, ou en cas de maladie de
Parkinson ou de syndrome de Steele-Richardson-Olszewski
débutant, et plus rarement dans les paralysies supranucléaires
progressives ou dans certains syndromes cérébelleux.
5- Étude des mouvements oculaires saccadiques :
On demande au sujet de suivre les points lumineux qui vont alterner
dans le plan horizontal puis dans le plan vertical, de façon aléatoire,
en amplitude et en délai d’apparition ou cliniquement en
regardant deux objets espacés de 30° à 40° d’excentration, à moins
de 50 cm de lui.
Les saccades vont d’un objet à l’autre à la demande
de l’examinateur.
Le système des saccades est un système de
balistique qui permet de diriger les deux yeux sur une nouvelle cible
visuelle ; c’est donc un mouvement rapide, le plus rapide possible
par la mécanique musculaire et ses contraintes viscoélastiques.
On estime :
– la latence d’exécution du mouvement saccadique, c’est-à-dire le
délai entre l’apparition du signal lumineux et le départ de la
saccade ; on compare cette estimation pour chaque oeil dans chacune
des directions, à gauche, à droite, vers le haut, vers le bas ; on peut
donc constater ainsi des retards d’exécution des mouvements,
l’anomalie maximale étant constatée dans les négligences d’un
hémichamp visuel, où la latence peut être de l’ordre de 1 seconde
par rapport à un délai habituel de moins de 200 millisecondes ;
– l’analyse des vitesses, qui permet d’évaluer la possibilité d’une ophtalmoplégie internucléaire (une pseudoparalysie du muscle droit
interne) ou un ralentissement général des saccades dans toutes les
directions, tel qu’on le voit dans le syndrome de
Steele-Richardson-Olszewski ;
– la congruence des mouvements des deux yeux simultanément ; il
faut regarder les deux yeux ensemble en fixant son regard sur la
racine du nez du patient et en appréciant ainsi dans son propre
champ visuel périphérique la vitesse des yeux du patient ; on note
ainsi un certain décalage des vitesses, l’oeil ralenti étant
pathologique ;
– la précision de la saccade ;
– le maintien sur le nouveau point de fixation.
* Dysmétries :
Il peut s’agir d’hypométries où le mouvement s’arrête trop tôt.
Il est
poursuivi après un délai de 50 millisecondes à 200 millisecondes
par une nouvelle saccade de refixation, parfois plusieurs. On parle
alors de saccades fragmentées.
Il peut s’agir de saccades hypermétriques, l’oeil dépassant la cible et
la retrouvant après une deuxième saccade de sens opposé, ou même
plusieurs en oscillations.
On distingue différents types de saccades hypermétriques :
– soit des saccades hypermétriques en ondes carrées ; l’oeil est
maintenu sur la cible pendant 200 millisecondes ; les structures du
système nerveux central recalculent une nouvelle saccade de
correction ;
– soit des saccades avec retour glissé, généralement exponentiel ;
– soit des saccades des deux yeux comme on peut le constater dans
les cas de flutter oculaire ;
– soit des saccades constatées uniquement sur l’oeil en abduction et
généralement associées à une hypométrie sur l’oeil en adduction,
traduisant ainsi l’hypermétrie de correction d’une ophtalmoplégie
internucléaire controlatérale.
Hypermétries et hypométries peuvent s’associer, réalisant le
phénomène de latéropulsion oculaire.
Chez le sujet normal, on peut constater de temps à autre quelques
saccades hypométriques, peu fréquentes (une sur dix), de faible
amplitude (2° environ).
6- Étude de la poursuite oculaire
:
La poursuite oculaire est un système de guidage automatique de
l’oeil sur une cible en mouvement. Il s’agit d’un asservissement très
précis des muscles oculomoteurs pour garder une cible visuelle sur
la fovea.
Cette poursuite ne s’effectue pas avec retard par rapport à
la cible mais en prédiction, cette vitesse étant calculée, estimée,
corrigée au fur et à mesure de la trajectoire de l’objet en mouvement.
Ce mouvement commence quelque 200 millisecondes après le départ
de la cible, et persiste 200 millisecondes après l’arrêt de la cible.
L’analyse des mouvements lents de poursuite doit être distinguée
des saccades de rattrapage.
Grâce à un traitement informatique du
signal, il est possible d’obtenir une courbe de gain de la poursuite
en fonction de la vitesse du stimulus vers la droite et vers la gauche,
et en fonction de la fréquence du stimulus utilisé.
On compare le
gain vers la gauche et vers la droite.
Le protocole le plus simple est de demander au sujet de suivre le
petit objet ou le point lumineux que l’on va déplacer
devant lui régulièrement de façon sinusoïdale, dans le plan
horizontal puis dans le plan vertical.
Il peut être confortable de lui
demander de suivre les oscillations libres d’un pendule placé à
60 cm devant lui, pendule d’une longueur de 1 m oscillant ainsi à la
fréquence de 0,5 Hz.
On peut aussi utiliser la baguette d’orthoptie
ou encore, pour un petit enfant, un jouet de petite taille.
Le résultat normal est un mouvement de poursuite souple régulière
sans saccade.
Le principal résultat pathologique est une poursuite saccadique en « marches d’escalier », que l’on constate tout
particulièrement dans la pathologie cérébelleuse.
La poursuite peut
être saccadique dans une seule direction, des deux yeux, ce qui
traduit généralement une lésion cérébelleuse ipsilatérale.
En cas d’ophtalmoplégie internucléaire associée à une pathologie
cérébelleuse, la poursuite n’est saccadique que sur l’oeil qui se dirige
en abduction.
En cas de nystagmus congénital, la poursuite devient
pathognomonique, associant une succession de mouvements
oculaires non pas saccadiques mais pseudocycloïdes (donnant sur
l’enregistrement électronystagmographique un aspect de dôme et de
pagode).
La preuve ultime qu’il s’agit bien d’une affection supranucléaire est
que la manoeuvre des « yeux de poupée » est normale.
Ce test
consiste à osciller passivement la tête du patient dans le plan
horizontal, en lui demandant de regarder un point fixe devant lui.
Ces mouvements ne sont plus une poursuite mais un asservissement
vestibulaire.
Ceci prouve ainsi que la voie commune de
l’oculomotricité est indemne.
Les principales causes d’erreurs de l’appréciation d’une poursuite saccadique sont :
– le patient est malvoyant ;
– il présente un nystagmus congénital inhabituel ;
– il présente un strabisme et change d’oeil fixateur au cours de la
poursuite.
F - MANOEUVRES DIAGNOSTIQUES DE POSITION :
Le vertige déclenché par les changements de position de la tête est
la plainte de 35 % des patients vertigineux.
Des manoeuvres
effectuées par le praticien permettent de déclencher ces vertiges et
d’objectiver un nystagmus dont l’ensemble des caractéristiques
permet de faire un diagnostic.
Les manoeuvres doivent déclencher
un seul phénomène physiopathologique à la fois.
On évite d’ajouter,
par exemple, une torsion cervicale musculaire et vasculaire, aux
effets purement vestibulaires.