Traitement chirurgical des tumeurs des os

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Introduction :

La prise en charge actuelle des tumeurs osseuses ne se conçoit que dans un cadre pluridisciplinaire dont le traitement chirurgical n’est qu’un aspect.

Traitement chirurgical des tumeurs des osCela suppose la définition d’une stratégie thérapeutique, possible grâce au bilan lésionnel et d’extension réalisé en préopératoire.

Outre les protocoles de chimiothérapie ou de radiothérapie, cette stratégie doit inclure un premier geste chirurgical, fondamental pour le diagnostic lésionnel exact, et déterminant pour les possibilités chirurgicales ultérieures : la biopsie tumorale.

Elle doit prendre aussi en compte la possibilité de thérapeutiques adjuvantes telles qu’embolisation préopératoire ou radiothérapie peropératoire.

C’est le développement de ces coopérations ajouté aux progrès des techniques qui ont permis l’essor de la chirurgie conservatrice des membres qui domine actuellement les indications thérapeutiques.

Définitions :

A – PRINCIPES DE ENNEKING :

Les principes du traitement chirurgical des tumeurs reposent à l’heure actuelle essentiellement sur la classification de Enneking qui utilise les notions de compartiment et de capsule.

Un compartiment est limité par des structures anatomiques constitutionnelles et non néoformées : corticales, aponévroses, parois de loges, capsules articulaires, cartilages de croissance, fascia…

Une tumeur est dite « intracompartimentale » lorsqu’elle reste enclose entièrement dans son site d’origine sans en franchir les limites.

Elle est dite « extracompartimentale » quand elle a franchi les limites de son compartiment d’origine, ou qu’elle se développe dans une région sans limite individualisable telle que la région axillaire ou le creux poplité.

La capsule, au contraire, n’est qu’une production réactionnelle qui entoure la tumeur.

Elle est produite plus par les tissus de voisinage que par la tumeur.

Elle est d’autant plus nette, intacte et épaisse que la tumeur est peu évolutive.

Elle peut être soulevée, perforée, voire détruite, dans les cas les plus agressifs.

Enneking déduit de ces deux notions différents types de résection selon l’endroit où passe le bistouri :

– chirurgie intralésionnelle (intracapsulaire) : c’est le curetage ;

– chirurgie marginale : la dissection se fait au ras du tissu lésionnel, sans pénétrer dans la lésion ; c’est une excision simple ou une exérèse limitée ;

– chirurgie large : on passe au large en tissu sain, mais en restant dans le compartiment où s’est développée la tumeur ;

– chirurgie radicale : l’exérèse concerne le compartiment tumoral dans son entier, sans y pénétrer ; il peut s’agir, par exemple, d’une fémorectomie totale pour un ostéosarcome de la métaphyse inférieure, ou d’une amputation de cuisse pour une tumeur du tibia étendue aux parties molles adjacentes.

B – CURETAGE :

Il s’agit d’une chirurgie intralésionnelle.

On pénètre délibérément dans la tumeur que l’on évide de l’intérieur.

Le risque est bien sûr de réaliser une exérèse incomplète.

Ce geste est donc réservé à certaines tumeurs bénignes.

C – RÉSECTION :

Elle consiste à pratiquer l’exérèse en bloc de la tumeur sans y pénétrer.

On distingue différents types de résection en fonction de la distance existant entre le bistouri et la lésion.

1- Résection marginale :

La tumeur est vue.

On passe au ras de sa périphérie, le long de la capsule que l’on ne franchit jamais.

2- Résection large :

On passe à distance de la tumeur, en laissant une épaisseur plus ou moins grande de tissus apparemment sains.

Ni la tumeur, ni sa capsule ne sont vues à aucun moment.

Cette résection reste une résection intracompartimentale.

3- Résection radicale :

Il s’agit d’une résection extracompartimentale, où l’on passe encore plus à distance de la tumeur, en dehors du compartiment concerné par la lésion.

Ce type de résection peut imposer des sacrifices extrêmement lourds.

Par exemple, pour un ostéosarcome métaphysaire fémoral inférieur, envahissant en avant le quadriceps, il faudrait enlever le fémur en entier, ainsi que toute la loge antérieure de cuisse en passant en dehors des aponévroses (compartiments osseux et musculaires).

Ce geste, très souvent excessif, doit être réservé à certaines indications exceptionnelles, pour des tumeurs de haute malignité histologique et d’extension locale importante.

Le plus souvent, les résections larges suffisent, même dans des formes « à mauvais pronostic histologique ».

4- Résections contaminées et par morcellement :

Il s’agit en fait d’échecs d’excisions.

Du fait de difficultés locales, le chirurgien peut, à un certain moment, pénétrer de façon accidentelle dans la tumeur (résection contaminée) ou être obligé de la fragmenter pour pouvoir l’extirper (résection par morcellement).

L’intervention est alors dite « non carcinologique » avec un risque de récidive nettement accru.

Dans certains cas, ces résections incomplètes peuvent être délibérées (résections palliatives).

D – AMPUTATION :

L’amputation ou la désarticulation consiste à sacrifier le membre.

Elle ne doit pas être opposée à la résection, car tout comme elle, elle peut être radicale, large, marginale ou même contaminée.

Elle n’apporte pas, en elle-même, plus de sécurité carcinologique.

Ses indications découlent en fait des contre-indications des résections : monstrueux envahissement des parties molles ; interventions multiples, infection, séquelles de radiothérapie.

Curetage-comblement :

Le curetage-comblement est un geste exigeant sur le plan technique, extrêmement minutieux et ne doit pas être réalisé à la légère.

Cette intervention qui est le prototype de la chirurgie intralésionnelle s’adresse essentiellement aux tumeurs bénignes.

L’objectif en est l’ablation de toutes les cellules tumorales par exérèse endolésionnelle.

Elle comporte deux temps, un premier temps de curetage visant à l’exérèse des cellules tumorales et un deuxième temps de comblement de la cavité ainsi créée.

Dans certaines lésions, une embolisation artérielle préalable peut être indiquée pour diminuer le saignement peropératoire.

A – CURETAGE :

L’utilisation d’un garrot pneumatique, quand elle est possible, est recommandée ; un champ exsangue facilitant considérablement le geste opératoire.

La zone tumorale osseuse est exposée assez largement.

Le curetage nécessite une trépanation corticale suffisante, de plusieurs centimètres carrés, pour permettre un accès large à la masse tumorale, en évitant les « effets de surplomb » sur les bords.

Un volet est découpé à la scie oscillante ou au ciseau frappé selon le grand axe de la lésion.

Il faut prendre garde à éviter les refends.

Le capot osseux n’est en règle pas conservé.

L’exérèse du tissu tumoral se fait à la curette, en utilisant des tailles de plus en plus petites pour pouvoir explorer le moindre recoin de la cavité.

Les cloisons sont effondrées et les parois avivées au ciseau ou à la fraise.

L’ensemble du matériel tumoral est envoyé en anatomie pathologique pour analyse.

Il faut prendre garde à respecter les cartilages articulaires ou de croissance s’ils sont adjacents, et à bien protéger les tissus environnants pour éviter leur contamination par des débris de tumeur.

La cavité est ensuite lavée au sérum physiologique, le liquide étant récupéré par un aspirateur pour ne pas contaminer l’ensemble de la plaie.

L’utilisation d’un « jet pulsé » est souvent commode.

Dans certains cas, on peut être amené à réaliser une « cautérisation » pour éliminer les éventuelles cellules tumorales restantes.

Différents procédés ont été proposés : cautérisation chimique avec du sérum hypertonique ou de l’eau distillée, formolisation ou phénolisation, ou cautérisation thermique à l’azote liquide ou au bistouri électrique.

B – COMBLEMENT :

Les objectifs du comblement sont essentiellement le renforcement de la solidité osseuse, mais aussi le fait d’éviter des espaces résiduels vides, facteurs favorisants des récidives.

Le comblement doit donc, en fait, réaliser un véritable « plombage » de la cavité, le matériau de remplissage devant s’insinuer dans la moindre anfractuosité.

Différents produits peuvent être utilisés, principalement de l’os spongieux autogène ou allogène, plus rarement du ciment chirurgical.

Il peut être nécessaire, dans certains cas, d’y associer une ostéosynthèse pour renforcer un os fragilisé.

1- Comblement par autogreffe spongieuse :

Il s’adresse principalement à des cavités de petite taille.

Pour des cavités plus importantes ou à proximité d’articulations portantes, il peut être nécessaire d’y associer des baguettes d’os cortical prélevées sur la face interne du tibia ou sur la diaphyse péronière.

Ces baguettes disposées en étai jouent le rôle de pilotis.

Une ostéosynthèse complémentaire peut aussi permettre de renforcer le montage.

La greffe doit être tassée et impactée au marteau et au chassegreffon.

Les meilleurs sites de prélèvement sont les crêtes iliaques.

On peut, pour de petites quantités, utiliser les épiphyses fémorale distale ou tibiale proximale.

2- Comblement par allogreffe :

On utilise des allogreffes essentiellement en cas de manque d’os autologue, soit du fait de prélèvements antérieurs, soit du fait de la taille de la cavité à combler.

Si la résistance mécanique précoce est meilleure, la consolidation est plus longue qu’avec une autogreffe, et bien que minimes, les risques de maladie transmissible ne sont pas totalement écartés.

Le meilleur matériau est la tête fémorale de banque cryoconservée ou autoclavée dont on utilise un gros fragment introduit en force dans la cavité, associé à de petits fragments morcelés, associés de préférence à de l’autogreffe, tassés tout autour.

3- Comblement par du ciment chirurgical :

Le ciment présente l’avantage d’une grande résistance mécanique, immédiate et définitive.

Il aurait aussi une certaine activité antitumorale du fait de l’élévation thermique pendant sa polymérisation.

Mais il n’établit jamais de liaison intime avec l’os et son utilisation implique la persistance d’une solidité corticale satisfaisante.

Il doit donc être réservé en cas de capital osseux insuffisant ou de récidive.

On peut l’utiliser aussi pour le traitement de métastases osseuses quand l’espérance de vie est réduite et qu’une chirurgie de résection apparaît trop lourde.

Dans certaines tumeurs infectées, on peut utiliser du ciment aux antibiotiques.

4- Comblement par des biomatériaux :

Dans les tumeurs bénignes, des biomatériaux, dont on espère la réhabitation, éventuellement mélangés à des greffons autologues, sont utilisés par certaines équipes chirurgicales.

Mais le recul reste encore insuffisant pour juger cette technique.

5- Renforcement par une ostéosynthèse :

Dans certains cas où le curetage entraîne une fragilisation importante de l’os, en emportant plus du tiers de la périphérie corticale sur une diaphyse, ou en laissant une cavité très étendue en zone épiphysaire, il peut être nécessaire de réaliser une ostéosynthèse pour éviter une fracture secondaire.

Toutes les techniques d’ostéosynthèse peuvent être envisagées, du moment que la solidité du montage puisse permettre une reprise précoce de la mobilité.

C – SUITES OPÉRATOIRES :

La surveillance radioclinique est impérative pour surveiller la consolidation osseuse et surtout l’absence de récidive.

Celle-ci peut se traduire par la réapparition de douleurs et d’une augmentation de la chaleur locale, mais est souvent asymptomatique.

Son expression radiologique est souvent difficile à mettre en évidence.

La réapparition d’images géodiques et d’une lyse des greffons doit y faire penser.

Il peut être utile de réaliser en postopératoire immédiat un examen scanographique, qui sert ensuite de référence pour les examens de contrôle futurs.

La réapparition d’une nouvelle hyperfixation scintigraphique est aussi un élément en faveur de la récidive.

En cas de doute, une nouvelle biopsie s’impose.

Résection :

A – PRINCIPES :

Le principe de la résection est de procéder à l’exérèse complète de la tumeur, en bloc, en passant plus ou moins à distance de la capsule ou en dehors du compartiment comme décrit par Enneking.

1- Stratégie opératoire, objectifs :

La stratégie, face à une tumeur osseuse, se détermine dès avant la biopsie.

Le choix d’une voie d’abord en est dépendant, et il importe de ne pas alourdir le pronostic par une biopsie techniquement insuffisante.

On a ensuite le temps de se préparer au geste d’excision, au vu de l’histologie.

Souvent une première phase de traitement par chimiothérapie permet la réalisation d’une prothèse sur mesure ou la recherche d’une allogreffe massive.

La qualité du bilan d’extension est primordiale, plus particulièrement le scanner pour l’extension osseuse et dans les parties molles, l’imagerie par résonance magnétique (IRM) pour les rapports vasculaires et la recherche de skip metastases, la scintigraphie pour d’autres localisations osseuses, et éventuellement l’artériographie pour préciser une vascularisation et/ou un envahissement vasculaire ainsi que l’état du réseau d’aval. Bien entendu, la recherche de métastases est indispensable.

L’objectif de la chirurgie conservatrice dans les tumeurs malignes est avant tout la conservation d’une fonction.

Il vaut mieux une amputation bien appareillée qu’un membre raide, paralysé et insensible.

Le but du bilan préopératoire est donc de s’attacher à déterminer l’étendue des sacrifices nécessaires et les éventuels gestes de reconstruction à envisager (ostéoarticulaires bien sûr, mais aussi d’éventuels pontages vasculaires ou de transferts musculaires).

2- Abord :

L’abord doit permettre non seulement le contrôle de la tumeur en entier, mais aussi le contrôle éventuel des structures nobles à conserver, et la reconstruction.

Il doit aussi inclure la cicatrice de biopsie qu’il faut exciser en monobloc jusqu’au plan choisi pour la résection.

Plusieurs incisions peuvent être nécessaires, et il faut veiller à conserver entre elles suffisamment de tissu pour éviter des nécroses cutanées.

3- Exérèse :

La résection de la tumeur se fait en monobloc, de préférence au bistouri électrique dans les muscles ; il est souvent commode de réaliser rapidement les sections osseuses au-dessus et en dessous de la tumeur : cela donne un certain degré de liberté pour « faire tourner sur elle-même » la pièce opératoire afin d’en aborder la face profonde.

La distance par rapport à la capsule varie selon le type de résection choisi, mais aussi, en cas de résection large, selon la nature des tissus dans lesquels on passe.

La qualité du tissu apparaît plus importante que son épaisseur.

Une aponévrose d’enveloppe musculaire ou une capsule articulaire valent mieux qu’une épaisseur plus importante de tissu adipeux.

Il faut absolument éviter (dans la mesure du possible) de venir au contact ou de pénétrer dans la tumeur, ce qui péjore considérablement le pronostic.

Si cela arrive ou que les marges apparaissent limites, il vaut mieux procéder à une recoupe que refermer sur un doute.

Dans ces cas, l’analyse histologique extemporanée est précieuse.

La pièce est envoyée en totalité au laboratoire, orientée par un ou plusieurs fils de repérage pour permettre à l’anatomopathologiste d’indiquer la topographie d’une éventuelle coupe trop limite ou insuffisante.

B – RECONSTRUCTION OSSEUSE :

Elle fait appel à différentes techniques qui peuvent éventuellement être combinées entre elles (une prothèse massive peut être manchonnée par une allogreffe).

Il importe que la qualité de cette reconstruction autorise au moins une mobilisation immédiate, qui seule permet d’obtenir un bon résultat fonctionnel à terme.

1- Allogreffe :

Compte tenu des pertes de substances osseuses engendrées par les grandes résections, où les autogreffes s’avèrent souvent insuffisantes, l’utilisation des allogreffes massives s’est considérablement développée.

Si les séries les plus anciennes de Merle d’Aubigné, Ottolenghi, Parrish ou Volkov confirment la possibilité pour ces allogreffes de fusionner avec l’os receveur, il demeure cependant un taux de complications élevé : non-consolidations, fractures, résorptions inexpliquées ou complications infectieuses.

Il faut garder à l’esprit que seule une partie superficielle du greffon est réellement réhabitée, et que la couche profonde déshabitée se comporte comme de l’os sec.

Des phénomènes immunitaires seraient aussi probablement en cause et pourraient expliquer un certain nombre de résorptions, mais n’ont jamais été prouvés en clinique.

La responsabilité des transfusions sanguines comme facteur favorisant d’immunisation a aussi été envisagée.

Certains travaux suggèrent que le respect des groupes human leucocyte antigen (HLA) favoriserait une meilleure incorporation de ces greffes.

Différents types d’allogreffes existent, en fonction de leur mode de conservation et de leur nature (os, cartilage, insertions tendineuses).

* Utilisation des allogreffes massives :

Il faut planifier l’intervention, à l’aide de radiographies du patient et du greffon osseux, dont on a soin de repérer le facteur d’agrandissement.

L’adéquation en taille du greffon et du site receveur doit être vérifiée.

Différentes combinaisons doivent être envisagées, une résection proximale de fémur pouvant très bien être remplacée par une extrémité distale fémorale que l’on a recoupée et adaptée, de même un fémur droit pouvant très bien remplacer un segment de fémur gauche.

Ce qui importe, c’est le diamètre du canal médullaire, surtout si l’on envisage d’armer le greffon par un clou ou une prothèse. En salle d’opération, le greffon a besoin d’être retaillé et façonné.

Il est plus commode de travailler sur un greffon décongelé depuis 2 ou 3 heures.

Outre les instruments habituels de la chirurgie orthopédique, des appareils tels que râpes, étaux, fraises d’alésage, sont souvent indispensables.

Il faut être très attentif au respect des règles d’asepsie lors de ces manipulations.

Les possibilités de montage sont variables, mais il faut obtenir impérativement une fixation solide et rigide de la greffe, compte tenu des délais longs de consolidation et de réhabitation.

Aux montages de type plaque, lame-plaque ou clou-plaque, on préfère, à chaque fois que possible, les montages par clou centromédullaire qui offrent de meilleures garanties de solidité et permettent une reprise plus précoce de l’appui.

Les jonctions entre la greffe et l’os receveur peuvent être entourées de greffons autologues spongieux ou corticospongieux dans l’espoir de favoriser la consolidation.

Différentes découpes peuvent être utilisées pour améliorer la congruence entre les deux extrémités (coupe plane, en « chevron », oblique).

Une autre possibilité, peut être plus satisfaisante quant à la stabilité et à la fusion, consiste à encastrer le greffon dans l’os hôte, notamment en zone métaphysoépiphysaire.

+ Greffes intercBalaires :

On les utilise dans le cadre de résections diaphysaires ou d’arthrodèses, l’allogreffe étant interposée entre deux segments osseux du patient.

Le montage par clou centromédullaire, au besoin verrouillé, apparaît le meilleur, mais suppose une longueur osseuse suffisante de part et d’autre du greffon.

On utilise de préférence des clous pleins dont la résistance mécanique permet de tenir jusqu’à la consolidation de l’allogreffe, en général vers le huitième mois.

+ Greffes terminales :

Elles entrent dans le cadre des reconstructions épiphysaires ou métaphysoépiphysaires plus ou moins étendues à la diaphyse.

On peut utiliser, soit des allogreffes avec conservation de cartilage, soit plus fréquemment des allogreffes manchonnant une prothèse.

Dans ces cas, il est recommandé de cimenter la prothèse dans le greffon et d’utiliser des prothèses massives à haute résistance mécanique.

À la hanche, il semble que le manchonnage des prothèses par une allogreffe joue un rôle protecteur à long terme et soit préférable à l’utilisation de prothèses massives de reconstruction isolées.

Au genou, en revanche, le manchonnage par allogreffe semble inutile, voire nocif.

+ Cas particuliers :

Pour les reconstructions des pertes de substance du bassin, on peut utiliser des allogreffes massives, combinées à une arthroplastie de hanche.

Ce procédé semble donner de meilleurs résultats à long terme que l’utilisation de prothèses massives seules, mais il n’est pas exempt de complications.

* Différents types d’allogreffe :

+ Allogreffes cryoconservées :

La cryoconservation est la méthode la plus utilisée.

Elle offre l’avantage de ne pas entraîner de modification des propriétés mécaniques du greffon, mais n’offre aucune garantie en matière de stérilisation.

Les possibilités de contamination sont nombreuses, lors du prélèvement, du conditionnement, du stockage, du déconditionnement et de la mise en place, sans parler des maladies virales ou à prion.

Les prélèvements peuvent être effectués sur donneur vivant ou en coma dépassé.

Sur donneur vivant (cas des têtes fémorales de banque), le prélèvement est réalisé dans les conditions d’asepsie de la chirurgie orthopédique réglée, avec la possibilité d’un suivi à distance du devenir sérologique du patient.

Les conditions sont donc idéales, comme en témoigne l’utilisation courante de ce type d’allogreffe.

Les greffes massives sont en revanche prélevées sur donneur en coma dépassé dans des conditions techniques souvent moins satisfaisantes, pratiquement toujours à la fin d’un prélèvement multiorgane.

Plus de 30 % de ces greffons sont éliminés d’emblée du fait d’une contamination.

D’autre part, aucun contrôle sérologique à distance n’est possible, ce qui laisse planer un doute quant à la transmission éventuelle de pathologies telles que l’hépatite, le syndrome de l’immunodéficience acquise (sida), ou la maladie de Creutzfeldt-Jakob.

On conçoit donc la nécessité de la réglementation contraignante mise en place par le législateur et appliquée par l’Établissement français des greffes.

Mais ceci, associé à des refus fréquents de la part des familles des donneurs, contribue à une pénurie chronique d’allogreffes massives.

Ces greffons doivent donc être utilisés avec parcimonie et uniquement à bon escient.

+ Allogreffes lyophilisées :

Elles n’offrent pas plus de garantie quant à la stérilité que les greffes cryoconservées, et de plus ont une résistance mécanique diminuée.

Leur utilisation ne semble intéressante que pour des greffes de petite taille.

+ Allogreffes irradiées :

Cette technique limite le risque de transmission des maladies infectieuses, mais augmente un peu le risque de complications mécaniques.

L’irradiation est le plus souvent associée à la cryoconservation, ce qui permet de diminuer de façon notable le taux de complications infectieuses (de 15 à 7 % selon Loty).

Actuellement, la tendance est à l’utilisation d’allogreffes cryoconservées plutôt que d’allogreffes irradiées, compte tenu notamment de leur meilleure résistance mécanique.

+ Allogreffes avec conservation de cartilage :

Dans certains cas, chez des patients jeunes ou pour des pertes de substance articulaires partielles, il peut être intéressant, plutôt que de réaliser une arthroplastie, d’utiliser une allogreffe avec conservation de cartilage.

Il s’agit d’allogreffes cryoconservées, sans irradiation, avec un agent cryoprotecteur comme le diméthylsulfoxyde (DMSO) à 10 %.

Bien que l’efficacité de ce procédé soit discutée, Poitout (à propos de huit greffes de ce type, avec un recul de 3 à 7 ans) et Bell (à propos de 16 greffes avec un recul moyen de 9 ans) font état de bons résultats sur le plan articulaire.

En revanche, Mankin observe une évolution arthrosique à 6 ans de recul, imposant une arthroplastie dans 16 % des cas.

Cette technique a aussi été utilisée pour le membre supérieur avec de bons résultats.

Ce procédé de conservation peut être appliqué aux tendons et ligaments qui permettent d’assurer la stabilité et la mobilité articulaire de ces greffes massives.

La fixation apparaît satisfaisante et ne semble pas entraîner de phénomènes de rejet.

* Réimplantation de la pièce de résection :

Dans certains cas, soit parce que l’on ne dispose pas de greffon massif, soit pour des raisons socioculturelles, la pièce osseuse de résection peut être réimplantée après avoir été débarrassée de toute cellule vivante.

Le procédé le plus utilisé est l’autoclavage de la pièce, au préalable débarrassée de tous les tissus mous et du cartilage qui l’accompagne.

Cette méthode semble garantir une stérilisation complète de la pièce, et les différentes séries ne rapportent pas de taux de récidive ou de complications plus élevé qu’avec les autres techniques.

Une autre voie de recherche, qui reste à valider, est l’exposition de la pièce de résection aux micro-ondes.

2- Arthroplastie massive :

La chirurgie prothétique est plus facilement employée pour le membre inférieur, où la conservation des mobilités articulaires est nécessaire pour la déambulation, que pour le membre supérieur où les arthrodèses sont souvent bien tolérées.

La chirurgie prothétique est couramment utilisée pour les grosses articulations, telles que la hanche ou le genou, plus rarement pour l’épaule.

Les indications sont plus discutables pour les autres articulations telles que la cheville, le coude ou le poignet.

* Arthroplastie de la hanche :

Elle fait appel à des prothèses massives utilisées seules ou manchonnées par une allogreffe.

En fonction de l’étendue de la résection, on utilise soit les prothèses de reconstruction existant sur le marché, soit des prothèses sur mesure.

Il faut être particulièrement attentif au respect des règles d’asepsie, les complications infectieuses étant particulièrement fréquentes dans ce type de chirurgie.

Les luxations représentent la deuxième complication principale de ces interventions.

Elles sont liées directement à l’importance de la résection des parties molles.

Langlais recommande l’utilisation de têtes de gros diamètre (32 mm), et surtout insiste sur le positionnement du cotyle qui doit être très horizontal et peu antéversé, et de l’implant fémoral dont l’antéversion ne doit pas dépasser 10°.

Anract préconise, en cas de sacrifice musculaire important, une période de traction postopératoire de 15 jours, suivie d’une immobilisation par un hémibermuda plâtré pendant 6 semaines, mais personnellement nous préférons une mobilisation immédiate sur arthromoteur pour préserver le résultat fonctionnel.

Les luxations apparaissent plus fréquentes avec les prothèses massives qu’avec les prothèses composites, probablement du fait des réinsertions musculaires sur l’allogreffe.

Le résultat fonctionnel est dépendant des résections musculaires, mais semble meilleur pour les prothèses manchonnées par une allogreffe qui permettent une meilleure fixation musculaire.

La réinsertion des abducteurs doit faire l’objet de soins particuliers.

La meilleure solution semble la conservation d’un médaillon trochantérien assurant une continuité digastrique entre les fessiers et le vaste externe.

Cette technique n’est possible que pour des tumeurs de petite taille et/ou éloignées du grand trochanter.

D’autres techniques peuvent être utilisées : réinsertion du grand trochanter directement sur la prothèse ou sur l’allogreffe, suture du tendon du moyen fessier sur le tenseur du fascia lata, suture du tendon du moyen fessier sur le tendon conservé de l’allogreffe, interposition du biceps femoris.

La longévité de ces arthroplasties est inférieure à celle des arthroplasties conventionnelles avec des taux de survie entre 60 et 75 % à 10 ans.

Aucune différence statistique n’a pu être établie entre les prothèses massives et les reconstructions composites quant à leur survie.

Anract retrouve cependant un taux d’échec précoce plus important pour les reconstructions composites, et un taux d’échec à moyen et long termes plus élevé pour les prothèses massives.

Il ne confirme pas les résultats de Langlais concernant les arthroplasties massives qui semblaient encourageants à moyen terme.

* Arthroplastie du genou :

Elle impose l’utilisation de prothèses à charnière pour compenser le sacrifice des structures ligamentaires latérales et du pivot central.

Leur mise en place suppose la conservation d’un appareil extenseur du genou fonctionnel, qu’il faut parfois reconstruire à l’aide d’artifices.

Comme pour la hanche, cette chirurgie obéit aux règles de la chirurgie prothétique, avec utilisation de prothèses sur mesure ou de modèles existant sur le marché.

Il faut, en préopératoire, déterminer avec une grande exactitude les dimensions de l’implant en fonction du niveau de résection.

Il s’agit toujours d’implants à longue tige d’ancrage, scellés dans les diaphyses fémorale et tibiale.

Si la reconstitution d’un axe normal dans le plan frontal est pratiquement automatique, il faut être particulièrement attentif au positionnement en rotation.

Au fémur, le seul repère disponible est la ligne âpre.

Au tibia, on se base sur la tubérosité tibiale, si elle peut être conservée, et sur la position du pied.

Il faut régler très soigneusement la hauteur rotulienne et veiller à obtenir un excellent centrage, si nécessaire en soulevant la tubérosité tibiale.

Dans certains cas de résection tibiale, il est possible de conserver la trochlée fémorale, évitant ainsi la mise en place d’un médaillon rotulien.

Il faut parfois faire appel à des artifices pour réinsérer l’appareil extenseur.

Il faut proscrire une fixation directe sur la prothèse qui est vouée au lâchage à court terme.

Le tendon rotulien peut être suturé sur l’extrémité supérieure du péroné que l’on a transféré en avant du tibia après ostéotomie, ou au tendon rotulien conservé d’une allogreffe manchonnant la prothèse.

Dubousset transpose le jumeau interne en avant de la prothèse pour y amarrer le tendon rotulien.

Les tendons de la patte-d’oie ou les aponévroses de jambe peuvent aussi servir de point d’ancrage.

La fermeture cutanée peut s’avérer difficile.

Il faut savoir éviter les sutures sous tension qui exposent à un risque de désunion ou de nécrose cutanée, avec exposition de l’implant.

Dans ces cas, on doit avoir recours sans hésitation à différents procédés de couverture, principalement par transposition des muscles jumeaux, ischiojambiers externes ou de la patte-d’oie.

Le nombre de complications reste élevé.

Pour Kawai, ce taux dépend essentiellement de l’importance de la résection osseuse, avec une différence significative à partir de 40 % de la longueur de la diaphyse.

Pour les prothèses à charnière, le taux de survie à 10 ans varie, selon les séries, de 60 à 80 %.

Les prothèses utilisant des charnières « rotatoires » (GSB, Link, Rotating Hinge) n’ont pas fait l’objet de publications avec un recul équivalent et ne peuvent être évaluées.

La raideur articulaire est fréquente (19 % de la série de Mascard), aggravée par la radiothérapie postopératoire qui est responsable d’une sclérose progressive.

L’importance de l’excision musculaire semble aussi jouer un rôle.

* Autres articulations :

Au membre supérieur, la reconstruction par arthroplastie est moins utilisée, les résultats fonctionnels après prothèse étant souvent médiocres du fait des sacrifices musculaires.

Pour l’articulation scapulohumérale, Cherubino retrouve un lien direct entre la fonction résiduelle et le degré de conservation des muscles de la coiffe des rotateurs.

O’Connor obtient de meilleurs résultats avec des allogreffes ostéocartilagineuses qu’avec des prothèses, même en cas de conservation des muscles de la coiffe.

Dans les autres cas, il préconise l’arthrodèse scapulohumérale avec interposition de greffons (allogreffe, baguette tibiale autogène et surtout péroné vascularisé) ; ces arthrodèses sont difficiles à réaliser mais donnent d’excellents résultats fonctionnels.

Lee propose de reconstruire la cheville et l’extrémité distale du tibia par des implants sur mesure.

Il annonce de bons résultats à 5 ans, mais cette démarche reste à valider.

* Prothèses de croissance :

Chez l’enfant, les grandes résections posent le problème de la croissance quand elles emportent la plaque conjugale, cas le plus fréquent, puisque la majorité des tumeurs siègent en zone métaphysoépiphysaire.

Il n’est pas rare d’observer, après la puberté, des inégalités de longueur de l’ordre de 10 cm.

Pour permettre une croissance du membre malade, des prothèses dites « de croissance » ont été développées.

Leur inconvénient majeur est la nécessité de multiples réopérations au cours de la croissance pour obtenir l’allongement de ces implants, ce qui augmente considérablement le taux de complications.

Des implants possédant une motorisation interne, pouvant être allongés sans abord chirurgical, commencent actuellement à être mis au point.

2- Ostéogenèse en distraction :

Les essais de reconstruction de la perte de substance osseuse par ostéogenèse en distraction, selon les principes décrits par Ilizarov, présentent des résultats variables.

Ils sont parfois grevés par un taux élevé de complications, une mauvaise qualité du régénérat, et des résultats fonctionnels médiocres.

D’autres séries présentent des résultats plus encourageants mais avec un taux de complications toujours très élevé.

3- Transferts osseux vascularisés :

Les techniques microchirurgicales sont aussi utilisées pour les reconstructions des pertes de substance engendrées par les résections osseuses.

Le transfert le plus utilisé est le péroné, moins fréquemment l’aile iliaque.

Les techniques sont celles de tout transfert microchirurgical.

Les indications prédominent au membre supérieur avec un taux de complications plus ou moins élevé selon les séries.

Des transferts de péroné libre ont aussi été appliqués au membre inférieur et au rachis.

Les complications à type de fracture sont nombreuses, l’adaptation du greffon aux contraintes biomécaniques demandant un certain temps.

Une solution séduisante est l’association d’un péroné vascularisé à une allogreffe, le péroné étant soit posé à côté de l’allogreffe, soit encastré dans cette dernière.

Des essais de transfert de plaque de croissance vascularisée ont été réalisés avec un certain succès, mais cette technique n’est pas encore banalisée.

C – RECONSTRUCTION DES PARTIES MOLLES :

Le succès de la chirurgie conservatrice dépend bien sûr de l’absence de récidive de la tumeur, mais aussi de la fonction résiduelle du membre.

Or il existe une relation directe entre l’importance des résections des parties molles (muscles, tendons) et la qualité du résultat.

C’est pourquoi il ne faut pas hésiter à réaliser des transferts musculaires pour réanimer des fonctions compromises ou des pontages vasculaires si un tronc artériel ou veineux principal a dû être sacrifié.

Ces lambeaux musculaires ou musculocutanés peuvent aussi jouer un rôle important de couverture en cas de perte de substance cutanée.

Apportant leur propre vascularisation, ils permettent d’améliorer le trophisme des tissus restants, surtout en cas de radiothérapie adjuvante.

D – RÉSECTIONS ARTICULAIRES :

Dans certains cas, l’importance des résections des parties molles n’autorise pas la mise en place d’une prothèse où, en particulier pour les articulations distales, il n’existe pas actuellement de solution prothétique satisfaisante.

La résection simple ou résectionarthrodèse apparaît alors comme la seule solution.

1- Résections de l’épaule :

Pratiquées pour des tumeurs n’ayant pas envahi les creux axillaires et respectant les éléments vasculonerveux, les grandes résections de l’épaule permettent d’obtenir des résultats meilleurs que ceux des désarticulations, grâce à la conservation de l’extrémité distale du membre dont la fonction apparaît relativement conservée.

Les possibilités de reconstruction dépendent de l’étendue des résections musculaires et osseuses.

La conservation du deltoïde permet l’arthroplastie si la résection est limitée à l’extrémité supérieure de l’humérus.

Si la résection est plus importante ou concerne le massif glénoïdien, l’arthrodèse telle que décrite par Enneking donne les meilleurs résultats fonctionnels, mais s’avère difficile techniquement, impose une immobilisation prolongée sur plusieurs mois avec un risque important de nonconsolidation.

Certains préfèrent rétablir la longueur de l’humérus avec une prothèse humérale passive utilisée comme spacer, manchonnée avec les parties musculaires périarticulaires restantes.

Les grandes résections scapulohumérales font appel à la technique de Tikkor-Linberg, où le moignon restant de l’humérus est fixé à la deuxième côte ou à la clavicule par des fils non résorbables.

Il est souvent possible de mettre en place une prothèse dans l’humérus à titre de spacer, fixée par des fils à la clavicule ou à la deuxième côte.

2- Résection-arthrodèse du genou :

La résection-arthrodèse du genou, décrite par Juvara en 1921, est le plus ancien procédé de résection-reconstruction des tumeurs de l’extrémité inférieure du fémur ou supérieure du tibia.

Bien que ses indications se soient considérablement raréfiées par rapport aux arthroplasties, il demeure un procédé sûr et garde encore certaines indications.

Le principe de cette technique, améliorée par Merle d’Aubigné, est de ponter la perte de substance osseuse par un greffon prélevé sur l’os adjacent, translaté ou retourné.

On y associe une greffe osseuse massive et une fixation par un grand clou fémorotibial.

La rotule est vissée sur les greffons.

Certaines variantes on été décrites : utilisation du péroné vascularisé (transfert microchirurgical), utilisation d’une allogreffe intercalée, coupes osseuses obliques pour améliorer le contact entre les différentes pièces osseuses.

Bien que grevée d’un taux élevé de complications, cette technique offre l’intérêt d’excellents résultats fonctionnels à très long terme.

3- Résections du bassin :

Il s’agit d’une chirurgie extrêmement lourde, nécessitant une équipe chirurgicale et anesthésique entraînée, et d’importants moyens de réanimation et de suivi.

Le patient doit lui aussi être capable de supporter ce geste tant physiquement que psychologiquement (il s’agit parfois d’une véritable mutilation fonctionnelle).

Les abords sont larges et doivent permettre un contrôle endo- et exopelvien.

Des gestes sur les viscères ou les pédicules vasculaires ne sont pas rares.

Les procédés de reconstruction varient selon la zone concernée, suivant la classification topographique de Enneking qui divise le bassin en trois zones : I (aile iliaque), II (cotyle), III (cadre obturateur).

En zone I, si la distance résiduelle entre le sacrum et le toit du cotyle est faible (2 ou 3 cm), la résection isolée peut suffire.

Si la distance est plus importante, la reconstruction fait appel à des greffes (autoou allogreffe) doublées d’une ostéosynthèse.

En zone II, la reconstruction est pratiquement toujours nécessaire.

On peut faire appel à des allogreffes massives dans lesquelles on implante une prothèse, ou à des prothèses métalliques massives existant dans le commerce, mais la durée de ce type de reconstruction (par allogreffe ou prothèse massive) reste incertaine.

Dans d’autres cas, le fémur peut être stabilisé sous le restant d’aile iliaque par arthrodèse ou simple ankylose, ou par une « Saddle » prothèse.

On peut encore réaliser une arthrodèse fémoro-obturatrice.

Si la perte de substance n’est pas trop importante, l’artifice de Puget, qui consiste à retourner la tête et le col fémoral pour rétablir la continuité de l’anneau pelvien, peut être tenté.

En zone III, aucune reconstruction n’est nécessaire.

4- Résections articulaires distales :

* Membre supérieur :

Les résections articulaires y entrent en compétition avec les amputations.

Elles sont préférées si la main sous-jacente conserve une certaine capacité fonctionnelle.

La résection peut être simple (cas d’une tête radiale) ou suivie d’une reconstruction, le plus souvent par arthrodèse.

Des arthroplasties par prothèse ou allogreffe peuvent être envisagées au coude ou au poignet, mais posent le problème de leur tolérance à long terme.

Au niveau de la main, la reconstruction de la première colonne est privilégiée.

* Membre inférieur :

Les résections distales de la cheville et de l’arrière-pied doivent permettre, après reconstruction, la reprise de l’appui.

On privilégie donc la longueur et la solidité, parfois au détriment de la mobilité.

Les indications des arthrodèses sont donc larges.

Pour l’avant-pied, une reconstruction est tentée en fonction de la qualité des parties molles restantes mais l’amputation s’impose en fait bien souvent.

Amputations :

Si les indications des amputations ont considérablement régressé avec les progrès de la chirurgie conservatrice, elles restent indiquées devant des tumeurs à extension locale très importante ou avec envahissement des pédicules neurovasculaires.

Il faut aussi savoir amputer dans certains cas où une résection large entraînerait des séquelles telles que le résultat fonctionnel du membre restant serait désastreux.

Sans entrer dans les détails techniques, il faut garder à l’esprit certains principes.

A – AU MEMBRE INFÉRIEUR :

Les résultats fonctionnels sont d’autant meilleurs que l’amputation est distale.

La conservation du genou transforme le pronostic fonctionnel, permettant au patient appareillé de marcher normalement.

En revanche, l’amputé au-dessus du genou voit ses possibilités fonctionnelles diminuer dramatiquement.

L’amputation en cuisse donne des résultats fonctionnels d’autant meilleurs que le moignon est long.

Un moignon inférieur à 10 cm est difficilement compatible avec un appareillage simple.

Les désarticulations de hanche et interilioabdominales entraînent une perte fonctionnelle maximale, à la marche, ainsi que pour s’asseoir ou se lever.

B – AU MEMBRE SUPÉRIEUR :

Il faut amputer le plus bas possible.

La perte du coude entraîne un préjudice important.

Les prothèses du membre supérieur sont médiocres, tant sur le plan esthétique que sur le plan fonctionnel.

C – PROBLÈMES POSÉS PAR LES AMPUTATIONS :

1- Prise en charge du patient :

L’amputation est dramatique pour le patient, drame qui le poursuit et est vécu en tant que tel toute sa vie durant.

L’annonce de ce geste doit être faite progressivement, avec ménagement, par le chirurgien lui-même, qui doit obtenir le consentement du patient.

Il ne faut en revanche surtout pas chercher à minimiser la gravité de la perte fonctionnelle résultant de l’amputation pour la faire mieux accepter, au risque de perdre la confiance du malade.

Cette annonce doit donc être faite plusieurs jours à l’avance et il faut, si possible, mettre le futur amputé en rapport avec d’autres malades ayant été dans la même situation.

2- Prévention des douleurs du membre fantôme :

Elle est très importante pour la bonne évolution du malade et la qualité du résultat final.

La prévention des douleurs repose tout d’abord sur des précautions opératoires : éviter les tractions sur les troncs nerveux, ne pas coaguler les artères des nerfs, infiltrer les nerfs avec un anesthésique local avant de les sectionner, et les couper assez haut pour éviter la formation de névromes douloureux en zone d’appui distal du moignon.

En postopératoire, outre les traitements antalgiques usuels, la prescription systématique d’un traitement thymoanaleptique et tranquillisant permet d’éviter la survenue de ces phénomènes douloureux.

Conclusion :

Si les progrès des techniques chirurgicales et le développement des coopérations pluridisciplinaires permettent actuellement la conservation des membres dans une très large proportion des indications, il faut garder à l’esprit que, plus que la conservation à tout prix d’une extrémité, il s’agit de conserver ou de restaurer une fonction.

C’est à ce moment que survient encore la discussion concernant l’amputation.

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