Syndrome d’hyperréactivité nasale

0
2441

Introduction :

La conception d’hyperréactivité nasale a beaucoup évolué ces dernières années.

Ce terme a été choisi par analogie avec l’hyperréactivité bronchique, ce qui souligne la notion d’unité de l’appareil respiratoire dans sa continuité naso-sinuso-trachéobronchique.

Syndrome d’hyperréactivité nasaleOn entend par hyperréactivité nasale l’aptitude de la muqueuse nasale à réagir anormalement à différents stimuli physiques, chimiques ou pharmacologiques.

La muqueuse nasale dispose d’un équipement mécanique, biochimique, cellulaire et immunologique qui s’oppose normalement aux différents agents agresseurs.

Dans l’hyperréactivité nasale, il existe un abaissement du seuil des réactions de la muqueuse nasale.

Il n’y a toutefois pas de mesure standardisée de la réactivité nasale.

L’exemple type de l’hyperréactivité nasale spécifique est l’allergie, mais d’autres agents peuvent être responsables d’une hyperréactivité nasale de type non spécifique.

Quel que soit le stimulus, les symptômes cliniques de l’hyperréactivité nasale sont représentés par les signes de la triade classique, évoluant par crises : obstruction nasale, rhinorrhée, éternuements.

À cette triade classique s’ajoutent le prurit nasal, palatin ou oculaire, les céphalées, les troubles de l’olfaction.

Si aucun élément tiré de l’examen clinique n’est spécifique du syndrome d’hyperréactivité nasale, différentes techniques, plus ou moins complexes, ont été développées pour étudier la réponse nasale (tant sur le versant obstructif que sécrétoire) à des stimuli variés.

Sur le plan étiologique, l’hyperréactivité nasale accompagne, à des degrés divers, l’ensemble des rhinites chronique, allergiques ou non allergiques.

L’évolution, ainsi que les relations avec l’hyperréactivité bronchique, sont fonction de l’étiologie de la rhinite.

Physiopathologie :

Plusieurs mécanismes ont été avancés pour expliquer l’hyperréactivité nasale :

– augmentation de la perméabilité épithéliale facilitant la stimulation des fibres nerveuses sensitives périvasculaires et périglandulaires ;

– augmentation du seuil de sensibilité des terminaisons nerveuses périphériques sensitives ; les prostaglandines (PG) et les leucotriènes facilitent cette stimulation ;

– modification de la réponse vasculaire et glandulaire, avec réponse sécrétoire augmentée lors des tests de provocation à la métacholine chez les patients allergiques ou non.

A – RHINITES ALLERGIQUES :

L’hyperréactivité nasale se rencontre à des degrés divers dans la plupart des rhinites chroniques.

L’exemple type, et le mieux connu sur le plan physiopathologique, est représenté par la rhinite allergique.

La réaction allergique comporte deux phases :

– la phase de sensibilisation initiale où la présentation de l’allergène aboutit à la formation d’anticorps de type immunoglobuline (Ig) E et au déclenchement de la réponse humorale ;

– la phase clinique apparaît lors d’une nouvelle exposition à l’antigène ; chez les sujets sensibilisés, les mastocytes de la muqueuse nasale ont donc à leur surface des IgE spécifiques des allergènes ; la phase clinique comporte deux étapes : la phase précoce, largement médiée par les mastocytes, et la phase tardive, associée à l’infiltration cellulaire et au relargage des cytokines dans la muqueuse nasale.

Dans la phase précoce, le couplage des antigènes sur les IgE spécifiques présentes à la surface des mastocytes entraîne la dégranulation des mastocytes avec relargage des médiateurs de l’inflammation comme l’histamine, la tryptase.

Ceci est responsable des symptômes caractéristiques de la rhinite : éternuements, prurit, rhinorrhée, congestion nasale.

La phase tardive de la réponse allergique intervient plusieurs heures après la stimulation antigénique.

Sur le plan clinique, le symptôme dominant de cette phase est l’obstruction nasale.

Après la stimulation et l’activation des mastocytes, l’épithélium nasal est infiltré par des éosinophiles, des basophiles, des monocytes et des lymphocytes T.

De nombreux médiateurs sont relargués par ces cellules comprenant les leucotriènes, les kinines, l’histamine.

Un des plus importants processus de régulation de la réponse inflammatoire est la production de cytokines.

Elles sont représentées par l’interleukine 4 (IL4) sécrétée par les mastocytes, l’IL3, l’IL4, l’IL5 et le granulocyte macrophage-colony stimulating factor (GM-CSF) sécrétés par les lymphocytes TH2, et l’IL6 produite par les cellules épithéliales.

Les cytokines libérées durant la réaction inflammatoire jouent un rôle direct expliquant en partie l’expression clinique de la réaction allergique, et surtout interviennent dans le recrutement et la coopération cellulaires.

L’infiltration des tissus par des cellules, normalement uniquement présentes dans le sang, entraîne la surexpression de molécules d’adhésion comme l’integrine cellular adhesion molecule (ICAM)-1 ou la sélectine E qui permettent aux éosinophiles, basophiles et lymphocytes T circulants, d’adhérer aux cellules endothéliales avant de traverser l’épithélium et de pénétrer dans les tissus (diapédèse).

Les molécules d’adhésion jouent un rôle fondamental dans le passage transvasculaire des cellules inflammatoires et interviennent probablement pour contenir l’inflammation dans un lieu précis.

De plus, elles interviennent dans les phénomènes de résolution de l’inflammation et dans les fibroses cicatricielles qui suivent parfois la phase aiguë de l’inflammation.

L’expression des molécules d’adhésion est dépendante d’un certain nombre de stimuli, dont les médiateurs et les cytokines.

L’épithélium nasal ne se comporte pas uniquement comme une barrière puisqu’il est aussi impliqué dans la production d’IL6, IL8, GM-CSF et RANTES (agent chimiotactique des éosinophiles).

D’autre part, plusieurs facteurs non allergiques influencent la réponse allergique, par exemple la température extérieure et le degré d’humidité.

Desrosiers et al ont montré que l’augmentation de l’humidité et de la température diminuait la réponse vasculaire à la stimulation antigénique, ceci est probablement en rapport avec des modifications de l’osmolarité des fluides de la muqueuse nasale.

La réponse allergique est donc moins importante dans un environnement chaud et humide que dans un milieu froid et sec.

Il apparaît aussi que les patients présentant une rhinite allergique sont plus susceptibles aux stimuli non spécifiques (comme l’air froid par exemple) que les patients non allergiques.

En utilisant la TAME estérase comme marqueur de l’activité sécrétoire, une étude sur 18 patients a montré que la réponse de base à l’air froid était augmentée 24 heures après stimulation par un allergène.

Ceci suggère une interaction entre stimuli allergiques et non allergiques.

Le système nerveux autonome joue aussi un rôle important dans la physiopathologie de la rhinite allergique.

Une étude réalisée chez neuf patients présentant une rhinite allergique pollinique, conduite en dehors de la saison pollinique, a montré que la stimulation d’une fosse nasale avec une dose unique d’allergène entraînait la stimulation du système nerveux autonome avec, par conséquent, une augmentation notable des sécrétions nasales dans les fosses nasales ipsi- et controlatérales.

Cet effet est antagonisé par l’administration d’atropine, suggérant qu’il est médié par le système parasympathique.

Quand les patients sont stimulés par des doses croissantes d’allergène, il existe une corrélation entre les doses d’allergène et le poids des sécrétions nasales, aussi bien dans la fosse nasale homolatérale que dans la fosse nasale controlatérale.

En revanche, il existe une augmentation dose-dépendante du relargage d’histamine induit par l’allergène uniquement dans la fosse nasale homolatérale, montrant que l’antigène entraîne directement l’activation mastocytaire.

Les résistances nasales sont aussi uniquement augmentées du côté de la stimulation, suggérant qu’elles sont en relation avec la réponse inflammatoire locale du côté de la stimulation.

Les différents éléments entrant en jeu dans la réaction allergique sont les médiateurs, les cytokines et facteurs de croissance, les molécules d’adhésion et les cellules inflammatoires.

1- Médiateurs :

Il en existe deux grandes familles : les médiateurs préformés et les médiateurs néoformés. Au premier rang des médiateurs préformés, il faut citer l’histamine.

Elle est rapidement libérée lors du contact antigène-IgE membranaires des mastocytes, exerçant ainsi une action sur la microcirculation muqueuse.

Elle stimule d’autre part les terminaisons nerveuses sensitives, entraînant une libération antidromique de neuropeptides qui augmentent les effets de l’histamine sur la perméabilité vasculaire.

Cette stimulation est responsable du prurit nasal.

L’histamine est également retrouvée dans le liquide de lavage nasal durant la phase tardive de la réaction allergique.

Il existe d’autres médiateurs préformés : des mastocytes (chymase, tryptase, kallikréine, sérotonine, héparine, vaso-intestinal peptide [VIP]), des polynucléaires éosinophiles (major basic protein, eosinophil cationic protein [ECP], eosinophil derived neurotoxin, eosinophil protein X, eosinophil peroxydase), des polynucléaires neutrophiles (lysozyme, hydrolases acides, protéases neutres, lactoferrine, collagénase, protéine liant la vitamine B12, myéloperoxydase).

Les médiateurs néoformés regroupent principalement les dérivés de l’acide arachidonique et le platelet activating factor (PAF).

Le métabolisme de l’acide arachidonique se fait selon deux voies : celle de la cycloxygénase aboutissant à la formation des PG et celle de la lipoxygénase aboutissant à la formation des leucotriènes.

Les PG jouent un rôle dans la bronchomotricité.

Au niveau de la muqueuse nasale, une libération de PGD2 a été montrée au cours de la phase précoce de la réaction allergique.

Les effets physiologiques de la PGD2 au niveau nasal seraient sous-tendus par ses propriétés vasoactives, histamine-like.

D’autre part, les PG sont des agents modulateurs de la libération d’histamine par les basophiles.

Les leucotriènes ont des propriétés vasodilatatrices et augmentent l’exsudation plasmatique. Ils stimulent d’autre part la sécrétion de mucus.

Ils jouent également un rôle dans le recrutement et l’activation des cellules inflammatoires. Le PAF provient des phospholipides membranaires.

Il a une action vasoactive responsable d’une vasodilatation et d’une augmentation de la perméabilité vasculaire.

Il a d’autre part une action chimiotactique et activatrice des polynucléaires éosinophiles, neutrophiles et des macrophages.

L’administration de PAF chez des sujets-témoins entraîne une augmentation des résistances nasales en réponse à l’histamine et à la bradykinine avec une augmentation parallèle des taux d’ECP dans le liquide de lavage nasal, ce qui suggère une activation des polynucléaires éosinophiles par le PAF.

Les neuromédiateurs sont classés en fonction de leur nature chimique et du type de fibres sensitives qui les libère.

On distingue les neuromédiateurs adrénergiques, cholinergiques et non adrénergiques, non cholinergiques (substance P, neurokinine A, neurokinine B, VIP). Des neuropeptides ont été mis en évidence dans les cellules inflammatoires recrutées.

Parallèlement, il a été démontré que les fibres nerveuses sensitives peuvent libérer des cytokines.

Ces données aboutissent au concept de la neuromodulation de la réaction allergique.

Les neuromédiateurs sont des agents histaminolibérateurs sur les cellules métachromatiques et ont une action directe sur les récepteurs vasculaires.

Sur la muqueuse nasale de l’allergique, l’application de substance P augmente les résistances respiratoires et entraîne une rhinorrhée et un afflux de granulocytes.

Chez l’allergique saisonnier en phase d’exposition naturelle à l’allergène, la concentration moyenne de substance P et de VIP dans les sécrétions nasales est significativement supérieure à celle des témoins.

En ce qui concerne la chronologie de la libération des médiateurs, il était classiquement admis que les médiateurs préformés étaient libérés précocement, alors que les médiateurs néoformés étaient libérés plus tardivement.

En fait, les dérivés de l’acide arachidonique interviennent très tôt dans la réaction allergique, l’histamine participe aussi à la phase tardive de l’inflammation.

De nombreux autres facteurs que les écosanoïdes entretiennent la phase tardive, comme le PAF ou certaines cytokines.

2- Cytokines et facteurs de croissance :

Les cytokines (interleukines, GM-CSF, tumor necrosis factor [TNF], transforming growth factor [TGF], interférons) et les facteurs de croissance sont des médiateurs solubles intervenant dans la réponse inflammatoire.

Les cytokines interviennent à de multiples niveaux :

– synthèse des IgE : l’IL4 produite par les lymphocytes TH2 stimule la production d’IgE par les lymphocytes B.

L’interféron gamma (IFNc) inhibe au contraire la synthèse d’IgE par les cellules B.

Une différence dans les proportions d’IL4 et d’IFNc sécrétées apparaît comme une caractéristique de l’atopie ;

– histaminolibération : l’IL3 et le GM-CSF sont des agents histaminolibérateurs des basophiles ;

– chimiotactisme : l’IL5 est un facteur chimiotactique puissant des polynucléaires éosinophiles ; l’IL4 a une action chimiotactique indirecte sur les polynucléaires éosinophiles en stimulant l’expression de molécules d’adhésion sur les cellules endothéliales ; l’IL8 est le facteur chimiotactique le plus puissant des polynucléaires neutrophiles ;

– activation et survie cellulaire : la durée de vie des polynucléaires éosinophiles est allongée in vitro par l’IL3, l’IL5 et le GM-CSF ; de même, la multiplication cellulaire et la différenciation cellulaire sont augmentées par la plupart des cytokines ;

– fibrose tissulaire : certaines cytokines ont une action sur les processus de cicatrisation ou de modelage tissulaire.

3- Molécules d’adhésion :

Elles jouent un rôle très important dans le recrutement des leucocytes circulants, permettant le phénomène d’adhérence entre les leucocytes et les cellules endothéliales, et leur migration intratissulaire.

Elles sont classées en quatre familles principales : superfamille des Ig, intégrines, sélectines, carbohydrates.

L’augmentation de l’expression des molécules d’adhésion par les cellules endothéliales, épithéliales et les leucocytes est une donnée connue lors de l’inflammation de la muqueuse nasale.

4- Cellules inflammatoires :

De nombreuses cellules sont impliquées dans la réaction inflammatoire, leucocytaires et cellules endothéliales.

* Mastocytes et basophiles :

Les granules des mastocytes peuvent libérer des médiateurs préformés (l’histamine est le plus abondant) et des médiateurs néoformés (PGD2 essentiellement), du PAF, des leucotriènes. Les mastocytes contiennent aussi des cytokines.

La membrane des mastocytes exprime les récepteurs pour le fragment Fc des IgE mais aussi d’autres marqueurs membranaires comme l’ICAM-1.

La liaison de l’antigène sur deux IgE membranaires adjacentes entraîne la libération des médiateurs préformés, et la synthèse et la libération des médiateurs néoformés.

Cette liaison entraîne une modification de la structure du récepteur transmembranaire des IgE, responsable d’une entrée de Ca++ dans le mastocyte, permettant la dégranulation.

Cette libération commence par les mastocytes les plus superficiels de la muqueuse, puis l’allergène peut pénétrer au sein de la muqueuse du fait de la destruction de tight-junctions consécutive à la libération de médiateurs de l’inflammation, de sorte que les mastocytes plus profondément situés peuvent dégranuler.

De plus, les mastocytes du chorion subissent une migration vers l’épithélium où le contact allergénique est plus facile.

* Polynucléaires éosinophiles (PNEo) :

Les polynucléaires éosinophiles amplifient la réaction inflammatoire et sont des cellules potentiellement cytotoxiques.

En plus des protéines basiques préformées, les polynucléaires éosinophiles synthétisent et libèrent de nombreux médiateurs néoformés : PGE2, LTC4, PAF.

D’autre part, les polynucléaires éosinophiles libèrent des radicaux libres, de la substance P et du VIP, ainsi que de nombreuses enzymes.

Ils synthétisent aussi de nombreuses cytokines.

Ils peuvent exprimer de nombreux récepteurs membranaires (pour le fragment Fc des IgG, pour le fragment Fc des IgE, pour le fragment Fc des IgA, pour le PAF, pour certaines cytokines, molécules d’adhésion).

L’adhérence des PNEo aux cellules endothéliales semble plus intense que celle des autres granulocytes et impliquerait principalement les récepteurs VLA-4 (molécule d’adhésion) sur les PNEo et le corécepteur VCAM-1 sur les cellules endothéliales.

Ceci expliquerait la prépondérance des PNEo dans l’infiltrat inflammatoire allergique par rapport aux autres granulocytes.

La libération des médiateurs des PNEo est le résultat de la liaison d’un ligand à son récepteur membranaire.

La libération des médiateurs des PNEo est aussi possible durant la réaction inflammatoire par la fixation de PAF, de leucotriènes, de PG ou de fractions du complément sur leur récepteur membranaire.

Le PNEo, qui est lui-même une source importante de ces médiateurs, peut être considéré comme un autoactivateur.

L’addition d’allergène à des PNEo de patients allergiques, porteurs d’IgE de surface, induit la libération de médiateurs, l’allergie de type I peut donc concerner les PNEo.

La libération IgG-dépendante est également possible mais moins constante que la libération IgEdépendante, de même la dégranulation des PNEo par les IgA est possible.

Ce mode de dégranulation est d’autant plus intéressant à considérer que les taux d’IgA dans les sécrétions nasales sont fortement augmentés chez les sujets allergiques saisonniers en phase d’exposition, comparés aux faibles taux observés en dehors de la période allergique.

Il existe, selon l’état d’activation, deux formes de PNEo : la forme « dormante » et la forme « activée ».

L’activation des PNEo se traduit par des modifications morphologiques (les PNEo activés sont hypodenses) et fonctionnelles (l’ECP est sous forme activée, reconnaissable par les anticorps monoclonaux spécifiques).

La muqueuse nasale normale contient peu de PNEo.

L’inflammation s’accompagne d’une infiltration de la muqueuse respiratoire par des PNEo.

De plus, les PNEo apparaissent dans les sécrétions nasales dans lesquelles sont libérés leurs médiateurs.

L’infiltration à PNEo survient dans les heures qui suivent l’exposition allergénique.

L’infiltration muqueuse nasale s’accompagne d’une éosinophilie sécrétoire nasale.

* Lymphocytes :

On distingue les lymphocytes B et les plasmocytes dont la fonction est la synthèse d’Ig, et les lymphocytes T dont les fonctions multiples sont assurées par les différentes sous-populations.

Les cellules K (killer) et NK (natural killer) n’ont aucun des marqueurs des cellules B ou T.

Les lymphocytes T ont une double fonction : cytotoxicité et libération de facteurs solubles (les cytokines).

Les cytokines interviennent dans la maturation et l’activation de nombreuses cellules.

On a décrit, vis-à-vis de la régulation de la réponse immunitaire, des lymphocytes T-helpers (lymphocytes CD4+) et des lymphocytes suppresseurs (lymphocytes CD8+).

Dans les rhinites allergiques, il existe une augmentation du nombre de lymphocytes T (CD3+) qui sont majoritairement activés, exprimant le CD25 ou le récepteur de l’IL2.

* Polynucléaires neutrophiles (PNN) :

De nombreux facteurs non spécifiques peuvent être responsables de la libération des médiateurs des PNN.

Le PNN obéit par une réponse migratoire à de nombreux stimuli. L’IL8 est une cytokine essentielle pour le chimiotactisme des PNN.

Dans la migration des PNN sur les lieux de l’inflammation, les molécules d’adhésion jouent un rôle important.

L’existence de myélopéroxydase, marqueur spécifique des PNN, a été mise en évidence dans les sécrétions nasales de sujets présentant une rhinite allergique perannuelle.

Dans la rhinite allergique, le challenge par le PAF entraîne une apparition massive de PNN dans les sécrétions nasales.

* Monocytes et macrophages :

Les macrophages peuvent libérer une vaste gamme de médiateurs.

Au niveau de la muqueuse nasale, une augmentation significative du nombre de macrophages a été observée après tests de provocation au moyen de l’allergène chez l’allergique.

Le nombre de macrophages reste toutefois modéré.

* Cellules épithéliales et dendritiques :

L’épithélium respiratoire a longtemps été considéré comme une simple barrière physique.

Puis il est apparu que les cellules ciliées jouent un rôle dans la réaction inflammatoire en libérant des médiateurs dérivés de l’acide arachidonique.

Plus récemment, le rôle de l’épithélium dans la présentation de l’antigène a été montré, par le biais des cellules dendritiques.

Enfin, le rôle des cellules épithéliales, par l’expression de molécules d’adhésion sur leur membrane cellulaire, dans la migration transmuqueuse et intraluminale des cellules recrutées est un concept actuellement bien établi.

Les cellules épithéliales interviennent dans l’inflammation de la muqueuse respiratoire, passivement lorsque leur destruction permet un développement de l’inflammation, activement par l’intermédiaire de la libération de médiateurs.

L’allergie entraîne l’expression d’ICAM-1, ce qui permet d’expliquer la fréquence des rhinites virales chez l’allergique (l’ICAM-1 étant le récepteur membranaire de la majorité des rhinovirus).

Les cellules dendritiques ont pour fonction présumée de conditionner et de présenter l’antigène aux cellules T.

D’autre part, elles produisent des médiateurs et des cytokines.

Le nombre de cellules dendritiques est significativement augmenté dans l’allergie nasale par rapport aux témoins, en période d’exposition naturelle à l’allergène ou après test de provocation nasale à l’allergène.

B – RHINITES NON ALLERGIQUES :

Les connaissances physiopathologiques concernant les rhinites chroniques non allergiques sont pauvres.

Les stimuli pouvant induire des symptômes de rhinite sont nombreux tels l’air froid, les aliments épicés, l’aspirine et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS).

Une forme non allergique de rhinite peut être induite par inhalation d’air froid chez des patients présentant une sensibilité particulière à l’environnement froid et venteux.

Il semblerait exister chez ces patients une augmentation de l’osmolarité des sécrétions nasales consécutive à la stimulation par l’air froid.

Certains auteurs ont suggéré que l’hyperosmolarité des sécrétions nasales stimulait les sécrétions glandulaires par des mécanismes neuronaux.

De plus, l’hyperosmolarité a été corrélée avec une augmentation du relargage des médiateurs, suggérant que la tonicité des sécrétions nasales joue un rôle dans l’initiation de la réaction.

Dans cette étude, neuf patients qui répondaient à l’inhalation d’air froid par le développement d’une rhinite et le relargage de médiateurs de l’inflammation, avaient aussi une augmentation de l’osmolarité des sécrétions nasales.

Chez six patients qui n’étaient pas affectés par l’inhalation d’air froid, l’osmolarité des sécrétions nasales était inchangée.

Chez les répondeurs, il y avait une corrélation significative entre la concentration des médiateurs et l’osmolarité des sécrétions nasales.

La stimulation unilatérale par l’air froid entraîne une réponse sécrétoire bilatérale, ce qui prouve l’existence d’un réflexe neuronal.

Il semble que la rhinorrhée induite par l’air froid soit liée à la stimulation glandulaire parasympathique puisqu’elle est partiellement bloquée par l’application locale d’atropine.

Il a bien été démontré que l’hyperosmolarité est un facteur de relargage des médiateurs mastocytaires in vitro et in vivo. D’autre part, elle active les terminaisons nerveuses sensorielles.

Chez les patients présentant une rhinorrhée après ingestion d’aliments épicés, il s’agit d’une réaction purement neurogène et médiée par le parasympathique, puisqu’elle est bloquée par l’atropine.

Chez les patients présentant une hypersensibilité à l’aspirine, il existe une augmentation des leucotriènes dans le liquide de lavage nasal après stimulation orale par l’aspirine. Les réactions respiratoires à la stimulation par l’aspirine sont diminuées par les inhibiteurs de la 5-lipo-oxygénase et les antagonistes des récepteurs des leucotriènes.

Ceci prouve le rôle central de la production des leucotriènes par le métabolisme de l’acide arachidonique dans le syndrome d’hypersensibilité à l’aspirine.

Chez les patients présentant une rhinite non allergique d’étiologie inconnue, il est important de savoir s’il existe une hyperréactivité de la muqueuse nasale, c’est-à-dire si elle répond de manière exagérée aux stimulations non spécifiques. Toutefois, il n’y a pas de méthode standardisée.

De plus, en fonction du stimulus utilisé, différents éléments de la muqueuse nasale peuvent être activés : glandulaires, vasculaires ou nerveux.

Un autre niveau de complexité est représenté par le fait que les éléments muqueux peuvent être activés directement ou indirectement : par exemple les glandes sousmuqueuses peuvent sécréter du mucus soit par stimulation directe de leurs récepteurs muscariniques par la métacholine, soit par le biais d’un réflexe neuronal.

Une étude réalisée par Borum suggère que les patients présentant une rhinite non allergique d’étiologie inconnue ont une hyperréactivité glandulaire.

Dans une étude sur la provocation nasale à la capsaïcine, Stjärne suggère que les patients présentant une rhinite non allergique ont une réponse sécrétoire plus élevée que les patients des groupes contrôle.

Dans une étude comparant les effets de la provocation nasale à l’histamine chez trois groupes de patients

– rhinites non allergiques, rhinites allergiques perannuelles et sujets contrôle

– le groupe rhinite non allergique présente une réactivité inférieure au groupe rhinite allergique mais supérieure au groupe contrôle, si l’on tient compte des éternuements et de la perméabilité vasculaire en réponse à un stimulus.

Les éternuements sont un symptôme neuromédié et la perméabilité vasculaire induite par l’histamine est probablement un effet direct sur les récepteurs H1 des vaisseaux sanguins.

Les observations concernant l’hyperréactivité de la muqueuse nasale des rhinites non allergiques d’étiologie inconnue posent la question de savoir si la cause sous-jacente est l’inflammation chronique.

Une inflammation muqueuse active peut exister dans la muqueuse nasosinusienne des patients souffrant de rhinite chronique non allergique.

Toutefois, on ne sait pas si ces patients présentent des signes d’hyperréactivité muqueuse.

Une hyperéosinophilie existe chez les patients présentant un non allergic rhinitis eosinophilic syndrome (NARES).

Cependant, aucune étude n’est validée en ce qui concerne l’hyperréactivité muqueuse de ces patients.

Chez les patients présentant une rhinite chronique non allergique d’étiologie inconnue dite « vasomotrice », il n’a pas été retrouvé de différence dans les sécrétions nasales ou les biopsies de muqueuse entre ces patients et les sujets contrôle, en ce qui concerne les marqueurs cellulaires ou biochimiques de l’inflammation.

Aspects cliniques :

A – SIGNES FONCTIONNELS :

Le tableau clinique de l’hyperréactivité nasale est dominé par la triade obstruction nasale-rhinorrhée-éternuements survenant de manière paroxystique. D’autres signes fonctionnels peuvent s’y associer : le jetage postérieur, le prurit nasal, palatin ou oculaire, les céphalées, les troubles de l’olfaction.

L’obstruction nasale est le plus souvent bilatérale ou « à bascule », influencée par le décubitus.

Le cycle nasal normal est ressenti comme une gêne fonctionnelle importante.

Elle est d’intensité variable (mineure, ne gênant pas les activités, gênante à l’effort, importante ou totale, parfois responsable de troubles du sommeil).

La rhinorrhée peut survenir par accès de façon isolée ou associée aux autres symptômes.

Elle est volontiers aqueuse et peut parfois se présenter comme une véritable hydrorrhée paroxystique pouvant être déclenchée par des facteurs positionnels, des substances irritantes (pollution, tabac…), des variations de température ou des facteurs psychogènes parfois au premier plan.

Les éternuements surviennent préférentiellement en salves. Il existe une relation significative entre l’intensité des éternuements et celle de la rhinorrhée.

La notion classique de salves d’éternuements précédant un paroxysme sécrétoire est confirmée non seulement à l’exposition allergénique, mais aussi sous l’influence de stimulations non spécifiques ou de la réactivité cyclique du système neurovégétatif (matin et fin d’après-midi).

Le jetage postérieur est responsable d’une sensation de corps étranger pharyngé, de brûlures ou de picotements pharyngés.

Le prurit nasal, palatin ou oculaire avec sensation de brûlure, de démangeaisons, est surtout rencontré dans les pollinoses.

Les troubles olfactifs, hyposmie ou anosmie, sont parfois associés à une hypogueusie.

Les céphalées, retrouvées dans 30 % des cas, ne sont pas corrélées aux anomalies sinusiennes.

B – RHINOSCOPIE :

Elle peut montrer des aspects divers. Généralement, il existe un oedème de la muqueuse des cornets inférieurs symétrique dont la coloration est variable, allant de la normalité apparente à la coloration lilas aspécifique.

Les sécrétions sont le plus souvent fluides et non surinfectées.

L’examen des méats moyens est fondamental à la recherche d’anomalies muqueuses ou sécrétoires : oedème, polypes, suppuration, qui sont le témoin d’une participation sinusienne.

C – PARTICIPATION SINUSIENNE :

Elle doit être systématiquement recherchée devant des signes cliniques inhabituels : troubles olfactifs, épisodes fréquents de surinfection, céphalées, ou devant des anomalies endoscopiques du méat moyen.

Mieux que les radiographies standards des sinus, qui ne permettent pas une bonne visualisation des cellules ethmoïdales, l’examen tomodensitométrique des sinus est actuellement l’examen de première intention.

D – HYPERRÉACTIVITÉ BRONCHIQUE :

L’existence d’une hyperréactivité bronchique doit systématiquement être recherchée.

Toux, dyspnée d’effort ou après exposition aux irritants non spécifiques, aux changements de température, sibilances vespérales, oppression thoracique, sont des éléments évocateurs.

Exploration de l’hyperréactivité nasale :

Différentes techniques plus ou moins complexes ont été développées pour étudier la réponse nasale à des stimuli variés, qui, comme pour l’hyperréactivité bronchique, peuvent être allergéniques, pharmacologiques ou physiques.

A – EXPLORATION DU VERSANT OBSTRUCTIF :

1- Rhinomanométrie :

Deux méthodes peuvent être utilisées permettant la mesure simultanée du débit et des variations de pression que subit le courant aérien en traversant les fosses nasales, elles obéissent au comité international de standardisation de la rhinomanométrie :

– la rhinomanométrie antérieure de réalisation simple et rapide semble la mieux adaptée aux tests de pratique quotidienne ; elle mesure la perméabilité nasale successivement dans une fosse nasale, puis dans l’autre ;

– la rhinomanométrie postérieure active, plus difficilement réalisable en raison de la nécessité de positionner une sonde buccale, présente l’avantage de permettre une mesure globale des résistances des fosses nasales sans introduire d’embout narinaire susceptible de modifier la muqueuse nasale.

La résistance nasale totale est normalement inférieure à 0,3 Pa/mL/s.

Les résistances unilatérales normales sont inférieures à 0,6 Pa/mL/s.

La rhinomanométrie, quelle que soit la technique, n’autorise aucune quantification précise de l’obstruction nasale.

En effet, comme l’a souligné Cole, il n’existe pas de corrélation absolue entre l’importance de l’élévation des résistances nasales et la sévérité de l’obstruction ressentie par le patient.

Par ailleurs, la rhinomanométrie peut être normale en dehors des épisodes d’hyperréactivité nasale.

Quelle que soit la technique, la réponse positive à l’agent agresseur se caractérise par un doublement de la résistance nasale associée à l’existence de manifestations cliniques, dose-dépendantes.

2- Rhinométrie acoustique :

Il s’agit d’une technique récente permettant une étude objective de la géométrie des fosses nasales par échographie acoustique.

C’est une méthode rapide, reproductible, non invasive, requérant peu de coopération de la part du patient.

Toutefois, les résultats méritent d’être validés et de nombreux problèmes techniques ne sont pas encore résolus.

3- Imagerie :

Les radiographies standards des sinus sont inutiles au diagnostic de l’hyperréactivité nasale, de même elles n’ont que peu d’intérêt dans son bilan étiologique car elles sont insuffisantes pour l’étude des sinus ethmoïdaux.

La tomodensitométrie permet la mise en évidence beaucoup plus précise d’une participation sinusienne.

B – EXPLORATION DU VERSANT SÉCRÉTOIRE :

Les sécrétions nasales contiennent de nombreux constituants protéiques provenant soit du secteur vasculaire par extravasation (au premier rang desquels se trouve l’albumine), soit des sécrétions glandulaires.

La mesure des différents composants sécrétoires, avant et après application au niveau de la muqueuse nasale de différents stimuli, a été utilisée pour expliquer les mécanismes de la rhinorrhée.

Des profils sécrétoires différents ont été décrits en association avec certaines étiologies de rhinite chronique.

Néanmoins, cette technique de réalisation relativement complexe reste surtout utilisée en recherche clinique.

Il est également possible de doser dans les sécrétions nasales, basales ou après stimulation, différents types de médiateurs de l’inflammation.

Certains sont d’origine plasmatique, résultant de l’activation des systèmes du complément, des kinines ou de la coagulation.

D’autres sont d’origine cellulaire, libérés par les cellules résidentes ou recrutées sur place au cours de l’inflammation induite.

L’histamine est le médiateur vasoactif le plus connu, mais d’autres substances comme les kinines, les leucotriènes ou certaines PG peuvent être également libérées et mesurées dans les sécrétions nasales.

Enfin, comme par analogie avec les voies aériennes inférieures, certaines équipes ont développé des techniques de lavage nasal permettant d’étudier la composition cellulaire de la lumière des fosses nasales avant et après stimulation allergénique.

C – RECHERCHE D’UNE HYPERRÉACTIVITÉ BRONCHIQUE ASSOCIÉE :

Devant un asthme cliniquement évident ou des signes évocateurs à l’interrogatoire, une exploration fonctionnelle respiratoire doit être réalisée.

La spirométrie ou les courbes débit-volume mettent en évidence un trouble ventilatoire obstructif réversible partiellement ou totalement après inhalation d’un bêta-2-mimétique.

En cas de normalité de la spirométrie avec forte suspicion clinique, il est possible de mettre en évidence l’hyperréactivité bronchique soit par la surveillance pendant quelques jours du débit de pointe par un débitmètre qui objective la variabilité journalière des mesures, soit par la réalisation d’un test de provocation bronchique non spécifique (histamine, métacholine, carbacholine).

Différentes étiologies d’hyperréactivité nasale :

La plupart des rhinites chroniques, avec ou sans participation sinusienne, s’accompagnent d’une hyperréactivité nasale.

Toutefois, la physiopathologie de plusieurs formes de rhinites n’est pas clairement élucidée.

La rhinite allergique est l’exemple type de l’hyperréactivité nasale.

Son diagnostic et son traitement sont bien codifiés.

Les rhinites non allergiques sont de diagnostic plus difficile.

Elles peuvent être classées en rhinites non allergiques d’étiologie connue et rhinites non allergiques d’étiologie inconnue. Parmi les causes de rhinites non allergiques, il faut citer :

– les rhinites infectieuses, il faut y ajouter les syndromes d’immunodéficiences congénitaux ou acquis, mucoviscidose, syndrome de dyskinésie ciliaire primitif où la fonction déficiente de l’épithélium nasal et sinusien est probablement responsable du développement d’infections chroniques ;

– les rhinites induites par des facteurs chimiques ou physiques : les rhinites induites par l’ingestion d’aliments épicés (rhinite alimentaire), les rhinites induites par l’air froid et sec, les rhinites induites par la pollution ; l’exposition chronique à la fumée de tabac et aux polluants extérieurs induit une métaplasie de l’épithélium nasal.

Chez les patients se plaignant d’une rhinorrhée à l’effort ou à l’ingestion de mets épicés, certains auteurs ont pu mettre en évidence l’existence d’une réponse sécrétoire anormale probablement en partie d’origine cholinergique et/ou neuropeptidique.

Une hyperréactivité nasale, mesurée par test de provocation nasale à l’histamine ou à l’air froid, peut être transitoirement induite chez des sujets sains par une infection virale ; enfin, la réponse nasale spécifique immédiate ou retardée à l’allergène est augmentée par l’exposition, préalablement au test de provocation allergénique, à des irritants ou polluants comme le dioxyde d’azote (NO2) ;

– les rhinites chroniques non allergiques survenant dans un contexte post-traumatique ou iatrogène ;

– les rhinites induites par certaines drogues (vasoconstricteurs, aspirine, AINS, antihypertenseurs, cocaïne, contraceptifs oraux, antidépresseurs) ; l’aspirine et tous les AINS sont classiquement responsables d’une hyperréactivité nasale fréquemment associée à une sinusite chronique avec polypose nasale et asthme ;

– la grossesse, l’hypothyroïdie ;

– les maladies granulomateuses (granulomatose de Wegener, sarcoïdose).

Il existe d’autres rhinites avec hyperréactivité nasale d’étiologie inconnue :

– la rhinite non allergique à éosinophiles ou NARES ;

– la rhinite dite « vasomotrice » ; ce terme est fréquemment utilisé, il suppose que la cause sous-jacente est un dysfonctionnement vasculaire et neurogène de la muqueuse, or il n’y a pas d’argument permettant d’affirmer cette notion ; dans ces formes de rhinites dites « essentielles », le trépied de l’hyperréactivité nasale est plus ou moins dissocié et l’évolution irrégulière ; le facteur psychogène est assez fréquent (situation de stress, difficultés relationnelles, émotivité) mais son interprétation n’est pas toujours évidente.

La classification des rhinites est rendue encore plus difficile par l’interaction et la potentialisation des différents facteurs entre eux.

En effet, la plupart des patients présentant une rhinite chronique, quelle qu’en soit l’étiologie, se plaignent de la réactivation de leurs symptômes lorsqu’ils sont soumis à des irritants non spécifiques comme la fumée de cigarette, les odeurs fortes, les variations de température, voire l’effort.

Ces manifestations sont superposables aux symptômes d’hyperréactivité bronchique non spécifique observés chez les patients asthmatiques soumis à différentes stimulations environnementales.

La réalité de l’hyperréactivité nasale a pu être confirmée grâce aux techniques d’exploration décrites précédemment.

Devillier et al, en utilisant la rhinomanométrie postérieure, ont mis en évidence, par rapport à des témoins, l’existence d’une hyperréactivité à la métacholine et à la substance P chez des patients présentant une rhinite chronique allergique.

Cette hyperréactivité nasale n’est pas uniquement liée à l’existence d’une inflammation nasale, mais pourrait être constitutionnelle et caractéristique de l’atopie puisqu’elle est susceptible de persister chez les sujets asymptomatiques.

Ainsi, White et al ont démontré, chez des patients atteints de rhinite allergique saisonnière testés en dehors de la saison pollinique, une réponse sécrétoire très nettement supérieure à celle observée chez des témoins.

Cette observation est renforcée par le fait que l’hyperréactivité nasale peut aussi être observée en dehors de toute pathologie inflammatoire chronique des voies aériennes.

Relations hyperréactivité nasale/hyperréactivité bronchique :

L’hyperréactivité nasale coexiste souvent avec l’hyperréactivité bronchique.

Il a souvent été proposé d’assimiler réponse bronchique et nasale aux agressions allergiques ou non spécifiques et d’établir un parallèle entre hyperréactivité nasale et bronchique.

Cependant, si les effecteurs de la réponse nasale ou bronchique sont qualitativement proches, ils sont aussi quantitativement très différents.

Sur le plan physiopathologique, nez et bronches s’individualisent.

L’hyperréactivité nasale est surtout dépendante du tonus vasomoteur, alors que l’hyperréactivité bronchique est fonction du tonus musculaire lisse bronchique.

La muqueuse des fosses nasales est par ailleurs en continuité directe avec la muqueuse des voies respiratoires basses.

Les fosses nasales jouent ainsi leur rôle de sentinelle, réchauffant, humidifiant, filtrant et épurant l’air inspiré.

À ces propriétés s’ajoute une fonction de défense immunitaire non spécifique.

Au niveau des fosses nasales, l’absence de muscle lisse, l’hypertrophie du système sécrétoire et de la vascularisation sous-muqueuse permettent de comprendre que la réponse nasale, chez le sujet allergique, soit parfois à l’opposé de la réponse bronchique pour certains stimuli non spécifiques, en particulier l’exercice physique.

L’atteinte conjointe du nez et des voies respiratoires inférieures est fréquente au cours de l’allergie respiratoire.

Pour Smith, 78 % des patients présentant un asthme extrinsèque présentent une rhinite.

Pour Gregg, 54 à 67 % des asthmatiques allergiques ont des manifestations nasales. Inversement, 23 à 44 % des sujets présentant une rhinite allergique saisonnière ou perannuelle ont des symptômes évocateurs d’asthme.

Vingt-cinq pour cent des patients allergiques souffrant d’asthme et de rhinite voient les deux affections apparaître simultanément.

Dans plus de la moitié des cas, la rhinite précède l’asthme.

L’influence péjorative de l’atteinte oto-rhino-laryngologique (ORL) sur la fonction ventilatoire a pu être mise en évidence par Annesi et al.

Dans cette étude, la présence d’une rhinite chronique est associée avec une diminution significative du volume expiratoire maximal-seconde (VEMS).

Par ailleurs, il existe chez les patients présentant une rhinite saisonnière sans asthme, une aggravation transitoire de l’hyperréactivité bronchique pendant la saison pollinique, qui paraît liée à la majoration de l’état inflammatoire au niveau nasal.

Mais l’association rhinite-asthme est loin d’être spécifique de l’allergie, puisque la rhinite chronique à éosinophiles ou la polypose nasosinusienne s’accompagnent fréquemment de symptômes d’asthme.

En ce qui concerne les aspects thérapeutiques, il est actuellement clairement démontré par un certain nombre d’études que la prise en charge thérapeutique de l’atteinte nasale améliore l’hyperréactivité bronchique, qu’elle soit patente ou infraclinique.

Cependant, les différences histologiques entre muqueuses nasale et bronchique permettent d’expliquer la sensibilité différente de la muqueuse des fosses nasales et de la muqueuse bronchique à certaines thérapeutiques antiallergiques.

Aubier et al rapportent une étude montrant la diminution de l’hyperréactivité bronchique lors du traitement de la rhinite par une corticothérapie locale intranasale chez des patients présentant une rhinite allergique aux acariens évoluant depuis plus de 2 ans, avec des radiographies des sinus normales.

Corren et al ont montré, sur un groupe de patients présentant une hyperréactivité bronchique et une rhinite pollinique depuis au moins 2 ans, qu’un traitement intranasal par béclométasone durant la saison pollinique, permettait de prévenir l’augmentation de l’hyperréactivité bronchique observée chez ces patients en l’absence de traitement.

De même, une diminution de l’ascension saisonnière des IgE spécifiques sériques a été observée chez des patients allergiques traités par corticoïdes locaux.

En ce qui concerne les aspects pronostiques, plusieurs questions se posent :

– peut-on prévenir l’apparition de l’asthme ?

– y a-t-il des facteurs prédictifs de l’apparition d’un asthme chez les patients présentant une rhinite allergique ?

– l’existence d’une rhinite allergique est-elle un facteur d’aggravation des symptômes bronchiques ?

D’une manière générale, il semble que les antécédents de rhinite allergiques sont un facteur de risque important dans l’apparition d’une maladie asthmatique.

Ce risque est plus élevé en cas de rhinite perannuelle qu’en cas de rhinite saisonnière.

La présence d’une hyperréactivité bronchique asymptomatique est relativement fréquente chez les patients présentant une rhinite chronique et pourrait représenter également un facteur de risque de développement ultérieur d’un asthme.

Il apparaît donc, au vu de ces éléments, que la muqueuse respiratoire doit être considérée dans sa globalité, tant d’un point de vue diagnostique que thérapeutique.

En effet, la prise en charge thérapeutique de la double atteinte, ORL et bronchique, est généralement possible sans alourdir exagérément la prescription.

La collaboration étroite entre l’ORL et le pneumologue, permet d’adopter une stratégie globale concertée de traitement face à une maladie inflammatoire qui intéresse souvent l’ensemble des voies respiratoires.

Aspects thérapeutiques :

La prise en charge thérapeutique spécifique des différents types de rhinites chroniques allergiques ou non allergiques a été détaillée dans un autre chapitre de ce traité.

A – HYPERRÉACTIVITÉ NASALE ET RHINITE ALLERGIQUE :

L’action des traitements anti-inflammatoires locaux, notamment des corticostéroïdes, lors des tests de provocation nasale allergénique, permet de confirmer les liens existant entre hyperréactivité nasale et inflammation allergique.

En effet, il a été démontré chez les patients allergiques aux acariens de la poussière de maison qu’un traitement par dipropionate de fluticasone diminuait la réponse immédiate et tardive après tests de provocation allergénique ou à l’histamine.

Les corticoïdes locaux diminuent également la production de PAF et de PG.

L’augmentation du taux de l’IL5 après provocation allergénique est inhibée après administration de fluticasone.

Il semble que l’hyperréactivité nasale aggrave significativement les scores des symptômes de la rhinite obtenus par les questionnaires de qualité de vie.

B – HYPERRÉACTIVITÉ NASALE ET RHINITE NON ALLERGIQUE :

À côté des rhinites non allergiques éosinophiliques qui répondent classiquement à la corticothérapie nasale, les autres types de rhinites non allergiques sont considérés comme des pathologies non inflammatoires répondant mal à la corticothérapie locale.

Cela suppose, dans ces cas de rhinopathies non allergiques non éosinophiliques, d’autres mécanismes encore inconnus faisant intervenir les systèmes nerveux sensitifs.

L’application répétée de capsaïcine sur la muqueuse nasale diminue les symptômes chez les patients présentant une rhinite chronique non allergique.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.