Surdité de l’adulte

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Introduction :

La surdité peut, et doit, être abordée sous plusieurs aspects.

La surdité est un handicap sensoriel qui, lorsqu’il devient socialement gênant, impose la mise en oeuvre d’une ou plusieurs méthodes de réhabilitation auditive (traitement médical, traitement chirurgical, appareillage auditif, implant d’oreille moyenne, implant cochléaire ou du tronc cérébral, rééducation orthophonique).

Surdité de l’adulteLa surdité est un symptôme qui doit conduire le praticien à adopter une stratégie diagnostique rigoureuse afin d’en déterminer l’étiologie.

Cette démarche diagnostique, avant tout basée sur l’examen clinique et le bilan audiométrique, découle directement de l’anatomie de l’oreille et de la physiologie de l’audition.

Anatomie de l’oreille :

L’oreille est formée de nombreuses cavités creusées dans le rocher, qui fait lui-même partie de l’os temporal.

A – OREILLE EXTERNE :

Elle est constituée du pavillon et du conduit auditif externe (CAE).

Le pavillon a une structure cartilagineuse et joue le rôle de cornet acoustique, dirigeant les ondes vers le CAE.

Le CAE est formé d’un segment externe cartilagineux, recouvert de peau, et d’un segment interne osseux, recouvert d’une fine couche cutanée dépourvue de formations annexes (follicules pileux, glandes cérumineuses).

Le fond du CAE est fermé par le tympan.

B – OREILLE MOYENNE :

C’est un ensemble de cavités (caisse du tympan et cellules mastoïdiennes) aérées par la trompe d’Eustache (qui débouche dans le rhinopharynx).

Le tympan est une membrane formée de trois couches : couche superficielle épidermique, couche intermédiaire fibreuse, couche profonde muqueuse.

Les osselets sont logés dans la caisse du tympan.

Le marteau, dont le manche est enchâssé dans le tympan, est articulé avec l’enclume, elle-même articulée avec l’étrier.

Le système tympano-ossiculaire transmet les vibrations sonores à l’oreille interne par l’intermédiaire de la platine de l’étrier qui obture la fenêtre ovale.

Le muscle stapédien s’attache à l’étrier et est innervé par le nerf facial.

Ce muscle est responsable, aux fortes intensités, d’un réflexe de protection acoustique : le réflexe stapédien.

Les cellules mastoïdiennes sont de petites cavités qui prolongent la caisse du tympan vers l’arrière, avec une cellule centrale plus volumineuse appelée antre mastoïdien.

L’oreille moyenne entretient des rapports plus ou moins étroits avec le nerf facial, la cochlée et le vestibule, la méninge et le lobe temporal (le toit de l’oreille moyenne, la séparant de la fosse temporale, est appelé tegmen), le sinus latéral (qui se jette dans le golfe de la jugulaire).

C – OREILLE INTERNE :

L’oreille interne ou labyrinthe peut être divisée en deux entités anatomophysiologiques : la cochlée (labyrinthe antérieur) et le vestibule (labyrinthe postérieur).

L’oreille interne est constituée d’une série de cavités osseuses, le labyrinthe osseux, à l’intérieur desquelles est contenu le labyrinthe membraneux, siège des récepteurs sensoriels.

Le labyrinthe membraneux est rempli d’endolymphe.

Entre labyrinthes osseux et membraneux s’interpose la périlymphe.

Plusieurs voies de communication existent entre le secteur périlymphatique et les espaces sous-arachnoïdiens, dont la principale est représentée par l’aqueduc de la cochlée.

La cochlée ou limaçon est le siège de l’organe acoustique récepteur appelé organe de Corti.

Il contient deux types de cellules ciliées : les cellules ciliées externes (CCE) et les cellules ciliées internes (CCI).

Les CCI font synapse avec la plupart des fibres du nerf cochléaire et sont considérées comme les véritables cellules transductrices de la cochlée.

Les CCE sont dotées de propriétés contractiles et ont pour rôle de moduler l’information mécanique arrivant aux CCI.

Le labyrinthe membraneux donne naissance aux voies nerveuses acoustiques et vestibulaires qui vont se réunir pour former la VIIIe paire crânienne.

D – VOIES NERVEUSES ET CENTRES NERVEUX AUDITIFS :

Le nerf auditif chemine dans le conduit auditif interne (CAI) et pénètre dans le tronc cérébral au niveau de la protubérance.

Différents relais vont s’effectuer au niveau du tronc cérébral (noyaux cochléaires, complexe olivaire supérieur), du mésencéphale (colliculus inférieur), puis du thalamus (corps genouillés médians).

Du thalamus, les projections se font vers le cortex auditif (situé dans le lobe temporal).

Physiologie de l’audition :

Les atteintes auditives sont classiquement divisées en surdités de transmission et surdités de perception (ou neurosensorielles).

La physiologie de l’audition peut être abordée en fonction de ces deux entités.

A – APPAREIL DE TRANSMISSION :

Il est constitué par l’oreille externe et l’oreille moyenne.

1- Oreille externe :

Elle joue un rôle modéré dans l’audition : localisation des sons et amplification (principe du cornet acoustique).

2- Oreille moyenne :

Son rôle est essentiel dans l’audition : transmission des sons à l’oreille interne, protection de l’oreille interne contre les agressions sonores.

* Transmission des sons à l’oreille interne :

Les vibrations sonores sont transmises à l’oreille interne grâce au système tympano-ossiculaire.

L’onde sonore arrivant contre le tympan entraîne une vibration de cette structure, provoquant un déplacement du marteau qui se transmet à l’enclume puis à l’étrier.

L’étrier, par l’intermédiaire de sa platine, va lui-même s’enfoncer dans le labyrinthe et mettre en mouvement le liquide périlymphatique.

Cette transmission peut se faire sans perte d’énergie grâce à un phénomène d’amplification, dû au système de levier constitué par les osselets et à la différence existant entre la surface du tympan et celle de la platine de l’étrier (20/1).

* Protection cochléaire :

Lors d’une stimulation acoustique de forte intensité, le système d’amplification de l’oreille moyenne va être partiellement neutralisé, grâce à la mise en jeu du réflexe acoustique ou réflexe stapédien.

Le réflexe stapédien est dû à la contraction du muscle de l’étrier, qui va rigidifier le système tympano-ossiculaire et protéger ainsi l’oreille interne contre le traumatisme sonore.

Il s’agit d’un réflexe polysynaptique dont la voie afférente est le nerf auditif et la voie efférente le nerf facial.

Ce réflexe est bilatéral, c’est-à-dire que la stimulation d’une oreille déclenche le réflexe stapédien des deux côtés.

Le réflexe stapédien survient à partir d’une intensité de stimulation de 80 dB au-dessus du seuil auditif du patient.

L’intensité la plus faible permettant de déclencher le réflexe stapédien est appelée seuil du réflexe stapédien.

La latence d’apparition du réflexe stapédien (20 à 40 ms) explique qu’un son fort ayant une attaque rapide puisse entraîner un traumatisme sonore.

B – APPAREIL DE PERCEPTION :

Il est représenté par la cochlée, le nerf auditif (VIII) et les voies auditives centrales.

L’appareil de perception joue plusieurs rôles : transformation de l’énergie mécanique sonore en énergie électrique (phénomène de transduction), codage des signaux électriques permettant de reconnaître les caractères de fréquence et d’intensité du son, transmission des informations aux structures centrales.

Les mouvements des liquides labyrinthiques, induits par le déplacement du système tympano-ossiculaire, entraînent une dépolarisation des CCI, conduisant à la genèse d’un potentiel d’action, responsable de l’innervation des fibres du nerf auditif.

Le message est ensuite véhiculé, après différents relais centraux, au cortex auditif temporal.

Il existe pour la fréquence des sons une tonotopie cochléaire : chaque CCI est sensible à une fréquence donnée. Cette tonotopie se retrouve à tous les niveaux des voies auditives.

Conduite diagnostique devant une surdité de l’adulte :

Devant une surdité, le problème principal est d’en déterminer l’étiologie afin de proposer un traitement adapté (médical, chirurgical, prothétique).

L’examen clinique et les explorations fonctionnelles auditives permettent, soit de poser le diagnostic, soit d’orienter la demande d’investigations complémentaires.

On emploie les termes surdité ou hypoacousie pour désigner une baisse d’audition sans préjuger de son importance.

Une surdité peut être légère, moyenne, sévère ou profonde. Une cophose est une surdité totale (uni- ou bilatérale).

A – INTERROGATOIRE :

1- Histoire de la surdité :

On tente de faire préciser un certain nombre d’éléments : date et mode de survenue (brutal ou progressif), évolution (permanente, fluctuante, transitoire), uni- ou bilatéralité des troubles, retentissement socioprofessionnel…

2- Signes d’accompagnement :

Ils peuvent être de plusieurs ordres, mais on s’attache plus particulièrement à rechercher les symptômes suivants : otalgie, otorrhée, acouphènes, sensation de plénitude d’oreille, vertiges ou troubles de l’équilibre, symptomatologie rhinologique (obstruction nasale, rhinorrhée, épistaxis), céphalées, troubles visuels…

3- Antécédents :

Certains antécédents pathologiques peuvent se révéler particulièrement importants pour le diagnostic étiologique : antécédents otologiques (otite aiguë ou chronique, chirurgie otologique…), antécédents rhinologiques (rhinopathie, déviation septale, sinusite, chirurgie rhinosinusienne…), antécédents traumatiques (fracture du rocher, traumatisme crânien, blast auriculaire, traumatisme sonore aigu ou chronique), traitements ototoxiques (aminosides, certaines chimiothérapies anticancéreuses…), antécédents généraux (hypertension artérielle, troubles métaboliques, méningite, irradiation cervicofaciale…), antécédents familiaux de surdité…

B – EXAMEN CLINIQUE :

1- Otoscopie :

Elle s’effectue à l’oeil nu (spéculum d’oreille et bon éclairage grâce au miroir de Clar) ou plus souvent à l’aide d’un otoscope à loupe grossissante.

Le spécialiste oto-rhino-laryngologique (ORL) effectue fréquemment l’examen otoscopique au microscope binoculaire (ou à l’aide d’optiques d’otoendoscopie).

Une otoscopie rigoureuse et de qualité est un temps fondamental de l’examen d’un patient malentendant, puisqu’elle permet de noter l’état du CAE et du tympan.

2- Acoumétrie :

Il s’agit de l’examen de l’audition à l’aide de diapasons (128, 256, 512 Hz…).

L’acoumétrie est importante à connaître pour le médecin non spécialiste, car elle permet, de façon simple, de déterminer le type de surdité (transmission ou perception).

L’épreuve de Weber consiste à placer le pied du diapason sur le vertex.

Chez le sujet normal, la vibration est perçue au milieu (ou de façon identique dans les deux oreilles).

En cas de surdité de transmission, la vibration est perçue du côté sourd (ou du côté le plus sourd si l’atteinte est bilatérale).

En cas de surdité de perception, la vibration est perçue du côté sain (ou du meilleur côté si l’atteinte est bilatérale). L’épreuve de Rinne compare l’audition en conduction aérienne (CA) et en conduction osseuse (CO), oreille par oreille.

On étudie la CA en plaçant le diapason (en vibration) à 20 cm du méat auditif et la CO en plaçant le pied du diapason sur la mastoïde.

Si l’oreille est normale ou en cas de surdité de perception, la CA est meilleure (c’est-à-dire mieux perçue) que la CO : on dit que le Rinne est positif. Dans les surdités de transmission, la CO est meilleure que la CA : on dit que le Rinne est négatif.

3- Examen complémentaire :

On effectue un examen clinique complet qui est plus particulièrement orienté sur l’examen des fosses nasales et du cavum, sur l’examen neurologique avec examen des paires crâniennes (notamment V et VII) et examen vestibulaire (recherche d’un nystagmus, d’une déviation posturale…).

C – EXPLORATIONS FONCTIONNELLES AUDITIVES :

Nous ne reviendrons pas sur les différents examens audiologiques qui peuvent être pratiqués, puisqu’ils sont déjà abordés dans un chapitre de l’Encyclopédie Médico-Chirurgicale (17-018-A-10).

Nous les citons pour mémoire :

– audiométrie tonale liminaire ;

– audiométrie vocale ;

– impédancemétrie (tympanométrie et étude des seuils du réflexe stapédien) ;

– potentiels évoqués auditifs ;

– otoémissions acoustiques et produits de distorsion acoustique.

D – AUTRES ÉLÉMENTS DU BILAN ÉTIOLOGIQUE :

Les autres examens utiles au bilan étiologique sont fonction du type de la surdité (et donc de sa localisation) et de l’étiologie suspectée.

Ils sont détaillés lors de l’étude de chaque pathologie.

Les examens le plus fréquemment pratiqués sont :

– l’exploration de la fonction vestibulaire : épreuve calorique vestibulaire calibrée et/ou épreuve rotatoire impulsionnelle, dont l’enregistrement peut se faire par vidéonystagmographie ou par électronystagmographie ;

– les explorations radiologiques : scanner des rochers, imagerie par résonance magnétique nucléaire des CAI et des angles pontocérébelleux.

E – ÉLÉMENTS D’ORIENTATION DU DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE :

La première étape de l’orientation étiologique repose sur la classification du type de surdité (transmission, perception, mixte), qui peut habituellement se faire au terme de l’examen clinique et audiométrique.

1- Surdités de transmission :

Elles sont dues à des lésions de l’oreille externe et/ou de l’oreille moyenne.

Le diagnostic de surdité de transmission repose sur :

– l’otoscopie qui peut montrer une atteinte du CAE ou du tympan ;

– l’acoumétrie au diapason avec un Weber latéralisé du côté sourd et un Rinne négatif (CO > CA) au niveau de l’oreille concernée ;

– l’audiométrie tonale qui retrouve une altération des seuils auditifs en CA, alors que les seuils auditifs en CO (reflétant le niveau de l’oreille interne) sont conservés.

2- Surdités de perception :

Elles résultent d’une atteinte de la cochlée, du nerf auditif ou des voies auditives centrales.

Le diagnostic de surdité de perception repose sur :

– l’otoscopie normale ; – l’acoumétrie au diapason montrant : Weber latéralisé du côté sain, Rinne positif (CA > CO) du côté de l’oreille concernée ;

– l’audiométrie tonale : courbes en CA et en CO accolées et abaissées.

3- Surdités mixtes :

Elles associent une atteinte de l’appareil de transmission et une atteinte neurosensorielle.

Elles peuvent provenir de l’association des deux étiologies différentes (par exemple : otite barotraumatique et presbyacousie).

Elles peuvent également être dues à une entité clinique et étiologique bien définie (par exemple : otospongiose évoluée, otite moyenne chronique labyrinthisée, fracture de rocher…).

Surdités de transmission :

La surdité de transmission est due à un défaut de transmission de l’onde sonore entre sa source et la cochlée.

L’atteinte siège au niveau de l’oreille moyenne et/ou de l’oreille externe.

A – AFFECTIONS DE L’OREILLE EXTERNE :

Les bouchons de cérumen et les bouchons céruminoépidermiques sont une cause extrêmement fréquente de surdité de transmission, mais doivent rester un diagnostic d’élimination (c’est-à-dire que l’hypoacousie doit immédiatement disparaître après ablation du bouchon).

L’ablation du bouchon peut se faire par lavage à la seringue ou à l’énéma.

En cas de suspicion de perforation, le lavage est contreindiqué et l’ablation se fait à l’aide de micropinces et de microcrochets ou par aspiration.

Les ostéomes et exostoses du CAE se rencontrent classiquement chez les plongeurs et nageurs en eau froide.

Lorsqu’ils deviennent obstructifs, ils peuvent être responsables d’otites externes à répétition et/ou de surdité de transmission.

Il est alors possible d’en réaliser une cure chirurgicale (canaloplastie).

Les otites externes diffuses et les furoncles du CAE sont avant tout responsables d’otalgies, et parfois de surdité de transmission par sténose inflammatoire du CAE.

De même, dans les otites externes virales (myringites phlycténulaires), la surdité de transmission passe au second plan derrière l’otalgie. Dans ces cas, la surdité est transitoire et régresse rapidement sous traitement médical adapté.

La pathologie tumorale du CAE est relativement rare mais peut être responsable de surdité de transmission par obstruction du CAE.

Il s’agit essentiellement de tumeurs malignes (épithélioma spinocellulaire ou basocellulaire).

B – AFFECTIONS DE L’OREILLE MOYENNE :

1- Pathologie otitique :

* Otite moyenne aiguë :

Les otites moyennes aiguës sont beaucoup plus fréquentes chez l’enfant que chez l’adulte.

La surdité passe habituellement au second plan derrière la symptomatologie algique et infectieuse.

Le diagnostic est porté lors de l’examen otoscopique.

Le traitement repose essentiellement sur l’antibiothérapie associée aux antalgiques et l’hypoacousie régresse avec la guérison de l’otite.

* Catarrhe tubaire :

Il est lié au dysfonctionnement transitoire de la trompe d’Eustache lors d’une rhinite aiguë, d’une rhinopharyngite ou d’une sinusite.

Le patient consulte pour une hypoacousie avec sensation d’oreille bouchée (impression de coton ou de liquide dans l’oreille), en contexte rhinopharyngé aigu.

L’otoscopie montre un tympan discrètement inflammatoire ou rétracté mais parfois normal. L’examen clinique confirme la rhinite ou la rhinopharyngite.

La manoeuvre de Valsalva permet habituellement, mais de façon transitoire, de rétablir la perméabilité tubaire et l’audition.

La tympanométrie montre un pic décalé vers les pressions négatives, témoignant de la mauvaise aération de la caisse du tympan par la trompe d’Eustache.

Le traitement du catarrhe tubaire se confond avec celui de la rhinite aiguë ou de la rhinopharyngite (désinfection rhinopharyngée, gouttes nasales à base de vasoconstricteurs, anti-inflammatoires).

* Otite séreuse ou séromuqueuse :

L’otite séreuse ou séromuqueuse (OSM) se caractérise par la présence d’un épanchement séreux ou séromuqueux dans les cavités de l’oreille moyenne, derrière un tympan fermé.

Il s’agit d’une pathologie avant tout pédiatrique, mais qui peut également se voir chez l’adulte.

Elle peut être secondaire à un dysfonctionnement tubaire idiopathique, à une allergie, à un foyer infectieux nasosinusien, à une irradiation sur le cavum ou à une tumeur du cavum (cancer surtout).

Il faut donc retenir que toute OSM survenant chez l’adulte doit faire examiner le cavum à la recherche d’un cancer.

L’OSM se manifeste habituellement par une sensation de plénitude d’oreille ou d’oreille bouchée avec autophonie et hypoacousie. L’examen otoscopique montre un tympan épaissi, infiltré et dépoli.

On peut également voir un niveau liquide rétrotympanique ou un épanchement rétrotympanique de couleur jaune chamois, ou des bulles aériques rétrotympaniques.

La tympanométrie montre une courbe plate, témoignant de la présence d’un épanchement rétrotympanique.

L’audiogramme confirme l’existence d’une surdité de transmission et permet d’en apprécier l’importance.

La prescription d’un traitement médical, associant antibiotiques et corticoïdes par voie générale et vasoconstricteurs par voie nasale, permet le plus souvent d’obtenir la guérison de l’OSM.

En cas de persistance, malgré un traitement médical bien conduit, on est amené à mettre en place un aérateur transtympanique sous anesthésie locale ou courte anesthésie générale.

* Otites moyennes chroniques non cholestéatomateuses :

On appelle otite moyenne chronique tous les processus inflammatoires ou infectieux de l’oreille moyenne, évoluant depuis plusieurs semaines.

On distingue plusieurs tableaux d’otite moyenne chronique, qui peuvent réaliser des états séquellaires (certaines perforations tympaniques, lyses ossiculaires…) ou des otites évolutives (otite fibroadhésives, otite atélectasique avec poche de rétraction tympanique évolutive…).

Les otites moyennes chroniques non cholestéatomateuses sont habituellement qualifiées de non dangereuses, mais certaines formes réalisent de véritables états précholestéatomateux et peuvent évoluer vers un cholestéatome.

La symptomatologie est dominée par la surdité et les épisodes d’otorrhée, témoignant d’une surinfection.

Certaines otites moyennes chroniques peuvent évoluer à bas bruit et être de découverte fortuite à l’occasion d’un examen otoscopique systématique.

Le diagnostic positif repose sur l’examen otoscopique qui est, au mieux, réalisé par le spécialiste ORL sous microscope binoculaire.

L’audiométrie permet d’apprécier le type et l’importance de la surdité : il s’agit le plus souvent d’une surdité de transmission, mais certaines formes peuvent présenter un certain degré de labyrinthisation, c’est-à-dire de dégradation neurosensorielle (ce qui réduit d’autant les possibilités de réhabilitation chirurgicale).

La prise en charge thérapeutique repose tout d’abord sur le traitement médical des poussées de surinfection (gouttes auriculaires et/ou antibiothérapie par voie générale).

Lorsque l’oreille est « sèche », il est possible d’envisager un traitement chirurgical (tympanoplastie), dont le but est de mettre l’oreille à l’abri des infections et d’améliorer l’audition.

Certaines surdités postotitiques ne sont pas accessibles à la chirurgie et il peut être utile de proposer un appareillage auditif.

* Otite chronique cholestéatomateuse :

Le cholestéatome est une otite chronique dangereuse par son potentiel d’érosion osseuse et d’infection, susceptible d’engendrer de graves complications.

Il se définit par la présence d’un épithélium malpighien kératinisé dans les cavités de l’oreille moyenne.

Le cholestéatome est le plus souvent secondaire et acquis postotitique, mais peut également être d’origine post-traumatique ou iatrogène (par exemple après une tympanoplastie) ou plus rarement congénital.

Les deux principaux symptômes pouvant révéler un cholestéatome sont une otorrhée purulente et fétide et une surdité d’importance variable.

Plus rarement, le cholestéatome se révèle à l’occasion d’une complication : paralysie faciale, vertige, labyrinthite, méningite…

L’examen otoscopique au microscope binoculaire permet dans la majorité des cas d’affirmer, à lui seul, le diagnostic de cholestéatome en visualisant les squames épidermiques au niveau des cavités de l’oreille moyenne.

Plusieurs aspects otoscopiques peuvent être observés : perforation tympanique marginale postérosupérieure laissant voir les débris épidermiques blanc nacré dans la caisse, atticite cholestéatomateuse, poche de rétraction tympanique remplie de débris épidermiques…

Le bilan complémentaire comporte un examen audiométrique pour apprécier l’importance et le type de la surdité, et un scanner des rochers pour tenter de préciser l’extension du cholestéatome et surtout rechercher des complications.

Les complications du cholestéatome sont en rapport avec son potentiel d’érosion osseuse et d’infection : surdité d’importance variable (avec parfois labyrinthisation par atteinte de l’oreille interne), paralysie faciale périphérique, fistule labyrinthique (siégeant le plus souvent au niveau du canal semi-circulaire externe), labyrinthite aiguë, complication neuroméningée (méningite, abcès cérébral ou cérébelleux, thrombophlébite du sinus latéral).

Le traitement est chirurgical et comporte un double but : l’exérèse totale du cholestéatome et la réhabilitation de l’audition. Dans tous les cas, le premier objectif prime sur le second.

Plusieurs techniques chirurgicales peuvent être proposées (tympanoplastie en technique fermée, tympanoplastie en technique ouverte, évidement pétromastoïdien).

Quelle que soit la technique chirurgicale employée, une surveillance à long terme est indispensable, car le cholestéatome est une pathologie qui peut récidiver.

2- Otospongiose :

L’otospongiose est une ostéodystrophie de la capsule otique.

Elle associe des phénomènes d’ostéolyse et de reconstruction osseuse responsables de la formation de foyers otospongieux qui peuvent siéger à différents niveaux de l’oreille moyenne ou interne.

La localisation la plus fréquente est représentée par la platine de l’étrier, entraînant une ankylose stapédovestibulaire (c’est-à-dire une fixation de l’étrier).

Elle détermine habituellement une surdité de transmission ou une surdité mixte (par atteinte cochléaire associée) et plus rarement une surdité de perception (otospongiose cochléaire).

C’est une maladie génétique, dont la transmission se fait sur un mode autosomique dominant à pénétrance variable.

Des antécédents familiaux sont retrouvés dans près de la moitié des cas.

Il existe une nette prédominance féminine (2/1).

La maladie débute classiquement chez un adulte jeune (le plus souvent entre 15 et 35 ans).

Les manifestations cliniques sont aggravées (ou déclenchées) par les épisodes de la vie génitale de la femme, en particulier la grossesse.

La symptomatologie est dominée par l’hypoacousie, uni- ou bilatérale, dont l’aggravation est habituellement progressive.

Elle s’accompagne fréquemment d’acouphènes.

L’otoscopie montre un tympan normal.

L’acoumétrie au diapason retrouve les signes d’une surdité de transmission (Weber latéralisé du côté atteint, Rinne négatif).

L’audiométrie tonale montre une surdité de transmission ou une surdité mixte, avec tympanométrie normale et absence de réflexe stapédien.

Le scanner des rochers, demandé en cas de doute diagnostique, montre des images d’hypodensité focale caractéristiques de l’otospongiose.

Le traitement de l’otospongiose est essentiellement chirurgical.

Son principe consiste à retirer l’étrier ankylosé (stapédectomie ou stapédotomie) et à le remplacer par une prothèse, interposée entre l’enclume et la fenêtre ovale, afin de restaurer la transmission des sons aux liquides de l’oreille interne.

L’appareillage prothétique représente une alternative intéressante à la chirurgie lorsque celle-ci est contre-indiquée (atteinte importante de l’oreille interne, cophose controlatérale…) ou refusée par le patient.

De façon beaucoup plus rare, certaines affections peuvent être responsables d’ankylose stapédovestibulaire et provoquer une surdité de transmission à tympan normal : maladie de Lobstein, maladie de Paget, tympanosclérose.

3- Traumatismes de l’oreille moyenne :

* Fractures du rocher :

Elles sont fréquentes (20 à 40 % des fractures du crâne) et le plus souvent dues à un accident de la voie publique. Le traumatisme est typiquement temporopariétal.

De nombreux signes peuvent révéler ou accompagner une fracture du rocher (otorragie, otoliquorrhée, surdité, acouphènes, vertiges, paralysie faciale).

L’otoscopie peut montrer un hémotympan, une perforation tympanique ou un tympan normal.

L’examen clinique recherche une paralysie faciale périphérique, un syndrome vestibulaire, une otoliquorrhée et des signes d’atteinte neurologique.

L’atteinte de l’audition peut être une surdité de transmission (perforation tympanique, hémotympan, fracture ou luxation ossiculaire), une surdité de perception (fracture de l’oreille interne) ou une surdité mixte.

Les autres complications des fractures du rocher sont : les brèches ostéodurales (avec risque infectieux neuroméningé), les fistules périlymphatiques, les paralysies faciales et les atteintes vestibulaires.

Le bilan radiologique repose sur le scanner des rochers, qui montre le trait de fracture et les éventuelles complications.

La prise en charge thérapeutique est conditionnée par les complications et conséquences liées à la fracture.

On peut également signaler qu’une surdité (de transmission ou de perception) peut également se voir après un traumatisme crânien sans fracture du rocher.

* Autres lésions traumatiques de l’oreille moyenne :

Les traumatismes par corps étranger pénétrant (Coton-Tiget…) peuvent être responsables d’une surdité de transmission, en rapport avec une perforation tympanique et/ou une atteinte ossiculaire.

Le blast auriculaire est une lésion traumatique par effet de souffle (gifle, explosion…).

Il entraîne une perforation tympanique avec surdité de transmission.

Les perforations tympaniques traumatiques cicatrisent habituellement spontanément et nécessitent rarement le recours à une tympanoplastie.

En cas d’atteinte ossiculaire, il faut réaliser une ossiculoplastie.

Le barotraumatisme auriculaire résulte d’un dysfonctionnement tubaire aigu avec hyperpression relative à la face externe du tympan.

Deux types d’activité favorisent cet accident : l’aviation et la plongée sous-marine.

L’accident est marqué par une otalgie aiguë rapidement remplacée par une hypoacousie avec sensation de plénitude d’oreille et acouphènes.

L’otoscopie montre une infiltration ecchymotique du tympan, un hémotympan ou une perforation tympanique.

L’audiométrie retrouve une surdité de transmission habituellement modérée.

Si le tympan n’est pas perforé, la tympanométrie montre un pic décalé vers les pressions négatives ou un tympanogramme plat.

Le traitement repose sur les vasoconstricteurs nasaux (par voie locale et/ou générale) et sur les anti-inflammatoires (stéroïdiens).

4- Tumeurs de l’oreille moyenne :

Les tumeurs de l’oreille moyenne sont relativement peu fréquentes.

Les tumeurs bénignes sont essentiellement représentées par les tumeurs glomiques tympanojugulaires.

Ce sont des chémodectomes, nés aux dépens du tissu paraganglionnaire non chromaffine, s’étalant de la base du crâne jusqu’à la crosse aortique.

Ils peuvent se développer au niveau du golfe de la jugulaire ou dans la caisse du tympan et s’étendre vers la région cervicale et/ou la base du crâne.

Il s’agit de tumeurs très vascularisées responsables de complications graves par leur extension.

Cliniquement, elles sont responsables de surdité de transmission avec acouphènes pulsatiles.

L’otoscopie montre un bombement du tympan refoulé par une masse rouge violacé rétrotympanique ou une masse bourgeonnante et hémorragique extériorisée dans le CAE.

Elles peuvent être responsables d’atteintes des paires crâniennes.

Le bilan otoneurologique permet d’en évaluer l’extension grâce au scanner et à l’angio-imagerie par résonance magnétique (angio-IRM).

Le traitement repose sur l’artériographie avec embolisation sélective suivie d’exérèse chirurgicale.

Le neurinome du nerf facial est très rare et se développe habituellement dans l’oreille moyenne.

Il est responsable d’une surdité de transmission progressive à tympan normal associée à une paralysie faciale périphérique.

Le traitement est chirurgical.

Les tumeurs malignes de l’oreille moyenne sont également extrêmement rares.

Il s’agit le plus souvent d’un carcinome épidermoïde.

Les signes d’appel sont une otorrhée chronique sanguinolente avec surdité de transmission et volontiers compliquée de paralysie faciale.

Le traitement repose sur la chirurgie et la radiothérapie.

5- Malformations de l’oreille externe et de l’oreille moyenne :

* Aplasies majeures :

Elles sont caractérisées par une atrésie du pavillon (qui est souvent réduit à un simple bourrelet cartilagineux) et une imperforation du CAE. Des anomalies de l’oreille moyenne peuvent s’y associer.

Les aplasies majeures posent deux problèmes : esthétique et fonctionnel.

L’atteinte fonctionnelle est représentée par une surdité de transmission importante pouvant atteindre 60 dB. Celle-ci n’est prise en charge que si l’oreille controlatérale est pathologique.

En revanche, dans les aplasies majeures unilatérales avec audition controlatérale normale, on ne s’occupe que du problème esthétique (chirurgie plastique ou épithèse de pavillon).

* Aplasies mineures :

Elles intéressent essentiellement l’oreille moyenne et en particulier les osselets (blocage, atrophie ou malformation ossiculaire).

Elles peuvent être associées à une anomalie minime du pavillon (enchondrome, défaut de plicature…) et doivent être suspectées devant toute malformation du pavillon.

Elles sont responsables de surdité de transmission à tympan normal.

Elles peuvent être accessibles à un geste chirurgical d’ossiculoplastie, en l’absence de malformation associée de l’oreille interne, qui est dépistée par un scanner des rochers.

Surdités de perception :

Les surdités de perception sont la conséquence d’une atteinte de l’oreille interne (cochlée ou labyrinthe antérieur), des voies cochléaires (VIII) ou des centres auditifs.

On distingue donc trois types de surdité de perception : les surdités de perception endocochléaires, les surdités de perception rétrocochléaires (ou radiculaires) et les surdités de perception centrales.

Une fois le diagnostic de surdité de perception affirmé par l’examen clinique et le bilan audiométrique, on cherche à déterminer le siège de l’atteinte lésionnelle (endocochléaire, rétrocochléaire, centrale).

Le diagnostic topographique d’une surdité de perception repose sur :

– l’examen clinique : syndrome vestibulaire, paralysie faciale, signes de déficit neurologique… ;

– la confrontation de l’audiométrie tonale et vocale : une discordance entre ces deux examens évoque une atteinte rétrocochléaire ;

– l’étude du réflexe stapédien permet également d’orienter sur le siège lésionnel : l’enregistrement du réflexe stapédien à des seuils normaux, malgré la baisse d’audition, est appelé recrutement et est en faveur d’une atteinte endocochléaire (alors que l’absence de réflexe stapédien évoque une atteinte rétrocochléaire) ;

– les explorations électrophysiologiques des voies auditives (potentiels évoqués auditifs, électrocochléographie, otoémissions acoustiques) et les explorations fonctionnelles vestibulaires ;

– l’imagerie essentiellement représentée par l’IRM.

A – SURDITÉS DE PERCEPTION ENDOCOCHLÉAIRES :

1- Presbyacousie :

La sénescence auditive ou presbyacousie se définit comme une altération lente de la fonction auditive liée au vieillissement.

De façon plus générale, il faut englober sous ce terme les difficultés de communication et les problèmes sociopsychologiques qui en résultent.

L’ensemble des structures composant l’appareil auditif est sensible aux effets du vieillissement, depuis l’oreille interne jusqu’aux centres nerveux.

Il a d’ailleurs été montré que les cellules qui forment l’appareil auditif, depuis l’oreille interne jusqu’au cortex, sont incapables de se reproduire.

La presbyacousie comporte donc des atteintes multiétagées de l’appareil auditif, avec association d’altérations périphériques et centrales.

Schématiquement, le vieillissement auditif se manifeste à la fois par : des lésions cochléaires périphériques, touchant les différentes structures de la cochlée et de façon préférentielle les CCE, des désordres nerveux au niveau des fonctions synaptiques des cellules sensorielles, du nerf auditif et des relais du tronc cérébral (faisant intervenir des lésions de dégénérescence et des troubles de la régulation des neuromédiateurs, comme par exemple la dopamine, dont le rôle protecteur a récemment été montré au niveau du noyau olivocochléaire latéral du tronc cérébral), et des altérations centrales au niveau des connexions corticales et sous-corticales.

Le tableau clinique s’installe de façon progressive et insidieuse chez un sujet de plus de 50-60 ans.

Chez le sujet plus jeune, on parle de presbyacousie précoce ou accélérée, pour laquelle il est classique de rechercher des facteurs favorisants ou aggravants : terrain familial, troubles du métabolisme glucidolipidique, exposition anormale au bruit, traitements ototoxiques.

Les troubles débutent par une gêne auditive dans le bruit, puis l’audition va s’altérer progressivement.

Ce mode d’installation très progressif retarde la première consultation, car le patient s’adapte naturellement à ce déficit.

Le patient signale surtout des difficultés de compréhension, particulièrement en milieu bruyant (« j’entends, mais ne comprends pas bien »), témoignant d’une atteinte de l’intégration centrale.

Des acouphènes sont présents dans 10 à 40 % des cas (intermittents ou permanents).

L’audiométrie tonale montre typiquement une surdité de perception pure, bilatérale et symétrique, prédominant sur les fréquences aiguës.

La perte auditive moyenne est représentée par la moyenne des seuils auditifs, sur les fréquences 500, 1 000, 2 000 et 3 000 Hz.

La tympanométrie est normale.

Le seuil des réflexes stapédiens est conservé, malgré l’élévation des seuils auditifs (recrutement).

L’audiométrie vocale est un examen essentiel pour apprécier la valeur réelle de l’audition.

Il est assez fréquent de retrouver en audiométrie vocale des altérations plus marquées que ne l’aurait laissé supposer l’audiométrie tonale.

Cette discordance entre l’audiométrie tonale et vocale est le témoin de troubles de l’intégration auditive, d’origine centrale.

De nombreux traitements médicamenteux, proposés pour améliorer les « troubles du déficit intellectuel du sujet âgé », peuvent être prescrits dans la presbyacousie.

La place réelle de ces traitements reste à définir et une étude prospective multicentrique est d’ailleurs en cours en France.

Il ne faut, bien sûr, pas en attendre d’effets spectaculaires sur les seuils auditifs, mais certaines molécules permettent d’améliorer les phénomènes d’intégration centrale et de compréhension de la parole.

L’appareillage auditif est le seul moyen d’éviter l’exclusion sociale du sujet presbyacousique.

La prescription doit classiquement être précoce et au mieux bilatérale (pour essayer d’obtenir un effet de stéréophonie).

Si l’indication d’appareillage peut être orientée par des critères audiométriques (à partir d’une perte auditive moyenne de 30 dB), la décision doit surtout tenir compte de la gêne et de la demande du patient.

Dans tous les cas, l’intérêt d’un appareillage, mais aussi ses limites, doivent être clairement expliqués au patient, pour éviter les déceptions d’une attente excessive (« la prothèse est une aide auditive et pas une oreille neuve »).

2- Maladie de Ménière :

La maladie de Ménière répond à une définition relativement précise, essentiellement clinique et évolutive.

C’est une affection idiopathique du labyrinthe membraneux, caractérisée par une triade clinique associant des crises vertigineuses, une surdité neurosensorielle fluctuante et des acouphènes ipsilatéraux, évoluant par crises et dont le substratum histopathologique est un hydrops endolymphatique.

L’hydrops endolymphatique est une distension du labyrinthe membraneux, en rapport avec une hyperpression du liquide endolymphatique relevant soit d’une hypersécrétion, soit d’une insuffisance de résorption.

Ces accès d’hyperpression endolymphatique sont responsables des crises puis des séquelles (en particulier auditives) de la maladie de Ménière.

Les mécanismes et l’origine de l’hydrops endolymphatique demeurent actuellement inconnus.

L’incidence de la maladie varie selon les séries de 0,1 à 1,5 ‰.

Elle touche avec prédilection l’adulte d’âge moyen (45 ± 25 ans), sans prédominance de sexe.

La maladie de Ménière s’inscrit très fréquemment dans un contexte psychologique et environnemental particulier (stress, anxiété, surmenage professionnel, soucis personnels ou professionnels, chocs émotionnels…).

Le diagnostic de la maladie de Ménière repose essentiellement sur l’anamnèse (à la recherche de crises itératives associant la triade symptomatique) et sur l’examen clinique et audiovestibulaire. Dans sa forme typique, la maladie de Ménière en crise associe :

– des vertiges rotatoires durant de plusieurs minutes à quelques heures (rarement plus de 24 heures) avec syndrome neurovégétatif marqué et syndrome vestibulaire périphérique harmonieux ;

– une surdité unilatérale (ou l’aggravation d’une surdité préexistante), avec diplacousie, distorsion sonore et sensation d’oreille bouchée (ou de plénitude d’oreille) ;

– des acouphènes ipsilatéraux, le plus souvent de tonalité grave (mais pouvant être de tout type).

L’audiométrie tonale montre, lorsqu’elle est réalisée à proximité d’une crise ou au stade des séquelles, une surdité neurosensorielle avec une courbe de type ascendant (prédominant sur les fréquences graves) ou en « plateau », avec un recrutement témoignant de l’origine endocochléaire de l’affection, ce que viennent confirmer les potentiels évoqués auditifs.

Le test osmotique au glycérol montre classiquement une amélioration des seuils auditifs.

Cette surdité est habituellement fluctuante (en particulier au début de l’affection).

Les explorations fonctionnelles vestibulaires (examen calorique ou épreuve rotatoire avec vidéonystagmographie) peuvent montrer une hyper- ou une hyporéflectivité en période de crise, puis un aspect d’hyporéflectivité après un certain temps d’évolution de la maladie.

L’imagerie (IRM) n’apporte pas d’argument en faveur de la maladie de Ménière, mais est souvent réalisée pour éliminer une autre pathologie des voies audiovestibulaires (en particulier neurinome de l’acoustique, malformation de l’oreille interne…).

L’évolution classique est marquée par la survenue, à une fréquence variable (et imprévisible), de crises associant vertiges, hypoacousie et acouphènes.

Au début, les crises régressent, spontanément ou sous traitement, en laissant peu ou pas de séquelles.

Au fil du temps, la symptomatologie des crises se modifie avec des vertiges de moins en moins violents, mais avec une aggravation de la symptomatologie cochléaire (surdité en « plateau » se stabilisant aux environs de 50-70 dB, acouphènes).

Néanmoins, l’évolution de la maladie de Ménière est extrêmement variable d’un patient à l’autre, totalement imprévisible et capricieuse.

Le traitement de la maladie de Ménière est difficile et décevant.

Il permet le plus souvent de contrôler les vertiges, mais est assez peu efficace sur l’évolution de la surdité (et des acouphènes).

Le traitement de la crise repose essentiellement sur le repos avec administration d’antivertigineux par voie orale (acétyl-d-leucine, méclozine) ou parentérale (acétyl-d-leucine), d’antiémétiques et parfois de sédatifs.

On y associe volontiers à la phase aiguë des corticoïdes, des vasodilatateurs ou de la bétahistine, des diurétiques ou des substances osmotiques (acétazolamide, mannitol, sulfate de magnésium…).

Une hospitalisation initiale est parfois nécessaire pour instaurer un traitement par voie parentérale, notamment lorsque la symptomatologie vestibulaire est marquée.

Le traitement de fond vise à prévenir la récidive des crises et est souvent instauré au décours de celles-ci.

Il n’y a pas de traitement type, mais plutôt plusieurs choix thérapeutiques qui peuvent être proposés seuls ou en association en fonction de la réponse et de la tolérance du patient et des habitudes du prescripteur.

Le traitement du terrain fait partie intégrante de la prise en charge : bonne relation médecin-malade, soutien psychologique, règles hygiénodiététiques, parfois traitement médicamenteux de l’anxiété.

Parmi les différentes thérapeutiques médicamenteuses de la maladie de Ménière, nous ne citons que celles qui sont le plus employées : bétahistine, diurétiques à faible dose, substances osmotiques (par exemple glycérotone), flunarizine, vasodilatateurs et apparentés.

Une surdité séquellaire socialement gênante justifie le recours à un appareillage auditif (il n’existe pas de traitement chirurgical permettant d’améliorer l’audition dans la maladie de Ménière).

Dans certaines formes, où les crises vertigineuses ne sont pas contrôlées par un traitement médical bien conduit pendant une période suffisante, plusieurs solutions peuvent être proposées pour supprimer les vertiges : labyrinthectomie chimique par injection transtympanique d’aminosides ototoxiques, labyrinthectomie chirurgicale (systématiquement responsable d’une surdité totale), décompression chirurgicale du sac endolymphatique, neurotomie vestibulaire (section du nerf vestibulaire dans l’angle pontocérébelleux par voie otoneurochirurgicale).

3- Surdité brusque idiopathique et surdité fluctuante :

La surdité brusque idiopathique représente une urgence médicale, caractérisée par l’apparition brutale ou rapidement progressive d’une surdité de perception unilatérale, sans cause évidente.

L’hypoacousie s’accompagne habituellement d’acouphènes et parfois de vertiges.

L’audiométrie tonale confirme la surdité de perception, dont l’importance est variable.

Le diagnostic de surdité brusque impose un bilan étiologique et la mise en route d’un traitement en urgence. Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer ces surdités brusques (virale, vasculaire, auto-immune, pressionnelle), mais l’étiopathogénie reste actuellement floue.

Le bilan étiologique comporte : des épreuves vestibulaires, des potentiels évoqués auditifs si le déficit auditif ne dépasse pas 60-70 dB, un bilan d’imagerie centré sur le CAI et l’angle pontocérébelleux, un bilan biologique et sérologique.

La notion de surdité brusque idiopathique impose d’éliminer les surdités d’installation brutale révélatrices d’autres pathologies :

– tumorale : neurinome du VIII ;

– infectieuse : labyrinthites, zona, syphilis ;

– traumatique : fracture du rocher, blast auriculaire, barotraumatisme auriculaire, traumatisme sonore… ;

– vasculaire : syndrome de Wallenberg ;

– otologique : maladie de Ménière, fistule périlymphatique, cholestéatome labyrinthisé ;

– générale : maladie auto-immune, sclérose en plaques…

Certaines surdités brusques idiopathiques régressent spontanément mais, en l’absence de critères fiables de bon pronostic, il est classique d’instituer un traitement en urgence (et parfois en hospitalisation).

Il n’existe pas de schéma thérapeutique validé et unanimement admis.

La plupart des protocoles associent diversement : corticoïdes, vasodilatateurs, inhalations de carbogène, substances osmotiques, hémodilution normovolémique, chimiothérapie antivirale…

L’évolution d’une surdité brusque est imprévisible, laissant parfois des séquelles auditives plus ou moins importantes.

Les surdités fluctuantes sont des surdités de perception d’installation brutale ou rapidement progressive évoluant par poussées.

Les premiers épisodes régressent habituellement sans séquelles mais au fur et à mesure, la fonction cochléaire s’altère, aboutissant à une hypoacousie sévère.

Les surdités fluctuantes peuvent révéler plusieurs pathologies (maladie de Ménière, fistule périlymphatique, neurinome du VIII), mais le plus souvent, le bilan étiologique est négatif.

Chaque poussée est traitée comme une surdité brusque.

En cas de surdité séquellaire socialement gênante, un appareillage auditif peut être proposé.

4- Surdités de perception d’origine infectieuse :

Les labyrinthites séreuses sont secondaires à une inflammation du labyrinthe en rapport avec une otite moyenne aiguë ou une poussée de réchauffement d’otite chronique.

La labyrinthite serait due au passage de toxines bactériennes à travers les fenêtres ronde ou ovale.

La surdité de perception est souvent associée à des acouphènes et à des vertiges.

La régression est habituelle sous traitement antibiotique et anti-inflammatoire.

La labyrinthisation d’une otite chronique est une atteinte progressive de l’oreille interne lors de l’évolution d’une otite chronique.

À la surdité de transmission initiale s’associe une atteinte neurosensorielle prédominant sur les fréquences aiguës, réalisant une surdité mixte.

L’atteinte neurosensorielle est en général irréversible.

Les labyrinthites aiguës suppurées sont dues à un envahissement bactérien brutal de l’oreille interne et sont responsables d’une destruction cochléovestibulaire souvent totale.

Elles surviennent lors d’une otite moyenne aiguë ou surtout chronique (notamment otite chronique cholestéatomateuse avec fistule labyrinthique).

Elles se traduisent par un grand syndrome vertigineux et une surdité de perception sévère (cophose fréquente).

La surdité est en règle générale irréversible.

Les surdités postméningitiques sont dues à un envahissement bactérien qui se fait, soit par l’aqueduc de la cochlée, soit par le fond du CAI.

La surdité est habituellement définitive, sévère, bilatérale et asymétrique.

L’évolution peut être marquée par une ossification cochléaire qui complique la prise en charge thérapeutique.

La sévérité de la surdité peut conduire à proposer rapidement une implantation cochléaire.

Il semble donc souhaitable de réaliser un bilan auditif au décours d’une méningite.

Bien que rare actuellement, la syphilis peut provoquer des atteintes de l’oreille interne à type d’hydrops.

La surdité de perception est habituellement bilatérale et fluctuante.

Elle peut s’accompagner de vertiges et simuler une maladie de Ménière.

Le signe de Hennebert est très évocateur de l’affection : la compression d’air dans le CAE provoque un nystagmus battant du côté opposé à l’oreille.

Le traitement associe pénicilline et corticoïdes.

La maladie de Lyme peut également être responsable d’une surdité de perception, habituellement régressive sous antibiothérapie adaptée.

Les labyrinthites virales peuvent compliquer certaines maladies infectieuses : oreillons, rubéole, herpès, varicelle, zona, mononucléose infectieuse, grippe…

Le zona otitique se présente comme une surdité de perception, d’installation souvent brutale, associée à une éruption vésiculeuse caractéristique siégeant au niveau de la conque et du CAE (zone de Ramsay-Hunt).

Dans sa forme complète (syndrome de Sicard), il associe une surdité de perception, des vertiges et une paralysie faciale.

La surdité zostérienne est classiquement reconnue comme étant de mauvais pronostic, en particulier chez le sujet âgé. Le traitement repose sur l’association d’une chimiothérapie antivirale et d’une corticothérapie.

5- Surdités toxiques :

La surdité toxique ou ototoxicité est responsable d’une surdité de perception bilatérale et symétrique prédominant sur les fréquences aiguës avec recrutement. Les lésions cochléaires sont habituellement associées à une atteinte vestibulaire peu symptomatique.

Les épreuves vestibulaires montrent une hyporéflexie bilatérale et symétrique.

La surdité peut survenir au cours ou au décours du traitement d’où l’intérêt d’une surveillance régulière.

Le type en est la surdité par les antibiotiques de la famille des aminosides utilisés par voie générale ou locale.

L’insuffisance rénale favorise l’apparition de cette ototoxicité.

D’autres médicaments peuvent être responsables de surdités toxiques : salicylates à fortes doses, diurétiques de l’anse (acide étacrynique, furosémide), quinine et ses dérivés, cisplatine…

6- Surdités de perception post-traumatiques :

Un traumatisme crânien, avec ou sans fracture du rocher, peut être responsable d’une surdité de perception.

Plusieurs mécanismes peuvent expliquer cette surdité : trait de fracture passant par le labyrinthe (la surdité est alors irréversible), commotion labyrinthique, fistule périlymphatique.

En cas de commotion labyrinthique, un traitement de soutien cochléaire (associant corticoïdes et vasodilatateurs) est instauré pour accélérer une éventuelle récupération.

En dehors de l’aspect diagnostique et thérapeutique, il semble important de faire pratiquer rapidement un bilan auditif chez un traumatisé crânien se plaignant d’une hypoacousie, afin de faciliter les démarches médicolégales ultérieures de réparation juridique du dommage corporel.

La fistule périlymphatique est une brèche microscopique siégeant au niveau de la coque osseuse de l’oreille interne permettant l’écoulement de liquide labyrinthique dans les cavités de l’oreille moyenne.

Elle est responsable d’une surdité de perception fluctuante avec symptomatologie vertigineuse positionnelle.

Elle peut survenir après tout traumatisme crânien (même minime), après un blast auriculaire ou après un barotraumatisme.

En l’absence de récupération spontanée, le traitement est chirurgical (et consiste à colmater la brèche).

Toute chirurgie de l’oreille moyenne (et de la base du crâne postérolatérale) comporte un risque de souffrance de l’oreille interne (ou du nerf auditif), se traduisant par une surdité de perception plus ou moins importante et généralement irréversible.

Une information claire, loyale et intelligible doit être systématiquement délivrée en préopératoire, avant de recueillir le consentement éclairé du patient.

Le traumatisme sonore chronique est une surdité en rapport avec une exposition prolongée au bruit.

Il s’agit parfois de surdités professionnelles pouvant être reconnues comme maladie professionnelle.

La surdité de perception est d’aggravation progressive, irréversible, souvent bilatérale et symétrique, prédominant sur les fréquences aiguës et maximale sur la fréquence 4 000 Hz.

Le traitement est avant tout préventif : surveillance régulière, casque antibruit, reclassement professionnel…

Le traumatisme sonore aigu est une surdité brutale survenue après exposition à un bruit intense (tir au fusil, explosion…).

On retrouve un tableau associant acouphènes et surdité de perception uni- ou bilatérale maximale sur la fréquence 4 000 Hz.

Un traitement d’urgence s’impose (de type surdité brusque).

La surdité par déflagration ou blast auriculaire associe au traumatisme sonore un effet de souffle qui peut être responsable de dégâts tympano-ossiculaires ou de fistule périlymphatique.

7- Autres causes de surdités de perception endocochléaires :

* Surdités de perception d’origine otospongieuse :

L’otospongiose labyrinthisée est une forme évolutive de la maladie otspongieuse qui se manifeste par une atteinte de l’oreille interne donnant une surdité mixte avec atteinte perceptionnelle prédominant sur les fréquences aiguës.

Il existe également des otospongioses cochléaires se manifestant par une surdité de perception pure.

Dans ce cas, la chirurgie n’a aucune indication et certains auteurs proposent un traitement par fluorure de sodium pour freiner l’évolution de la maladie.

En cas de surdité socialement gênante, on a recours à un appareillage auditif.

* Surdités neurosensorielles auto-immunes :

Certaines atteintes de l’oreille interne peuvent avoir une origine auto-immune.

Ces surdités auto-immunes peuvent s’intégrer dans le cadre d’une maladie auto-immune systémique ou apparaître de façon isolée.

Le diagnostic est facile lorsqu’elles surviennent dans un contexte évident : périartérite noueuse, polychondrite atrophiante chronique, lupus érythémateux disséminé, maladie de Behçet, granulomatose de Wegener, thyroïdite, syndrome de Cogan (kératite interstitielle, syndrome cochléovestibulaire souvent bilatéral évoquant une maladie de Ménière et parfois atteinte polysystémique), syndrome de Vogt-Koyanagi-Harada (uvéite granulomateuse, méningite monolymphocytaire, surdité neurosensorielle bilatérale, vitiligo)…

Le diagnostic de surdité autoimmune isolée (hors d’un contexte d’atteinte systémique) est beaucoup plus difficile à affirmer, puisqu’il n’existe pas d’anticorps spécifique, et repose sur un faisceau d’arguments cliniques (surdité de perception bilatérale, asymétrique et évolutive), biologiques (syndrome biologique inflammatoire, bilan immunitaire non spécifique) et thérapeutiques (test thérapeutique aux corticoïdes).

Le traitement de ces surdités neurosensorielles auto-immunes isolées repose essentiellement sur la corticothérapie ou plus rarement sur les immunosuppresseurs ou la plasmaphérèse.

Nous avons arbitrairement classé le syndrome de Susac dans le chapitre consacré aux surdités auto-immunes, bien que son étiopathogénie reste floue.

Le diagnostic repose sur une triade clinique associant des troubles neurologiques (encéphalopathie aiguë avec syndrome confusionnel), des troubles cochléovestibulaires (vertiges, acouphènes, surdité neurosensorielle uni- ou bilatérale) et des troubles ophtalmologiques (troubles de la vision avec amputation du champ visuel).

L’IRM met en évidence sur les séquences pondérées en T2 de multiples zones d’hypersignal au niveau de la substance blanche et grise, qui prennent le gadolinium sur les séquences pondérées en T1.

L’audiogramme montre une surdité de perception qui prédomine volontiers sur les fréquences graves. L’angiographie rétinienne met en évidence des occlusions des branches distales de l’artère centrale de la rétine.

Le pronostic est variable et difficilement prévisible.

Différents schémas thérapeutiques ont été proposés (corticothérapie et/ou immunosuppresseurs et/ou immunoglobulines).

* Surdités congénitales :

Nous ne nous étendrons pas sur les nombreuses causes de surdités congénitales (surdités génétiques isolées ou syndromiques, surdités par embryofoetopathies, surdités d’origine malformative, surdités congénitales d’origine indéterminée), dont le diagnostic est le plus souvent fait durant l’enfance et dont la prise en charge relève habituellement de l’appareillage auditif.

B – SURDITÉS DE PERCEPTION RÉTROCOCHLÉAIRES (OU RADICULAIRES) :

1- Neurinome de l’acoustique :

C’est la plus fréquente des tumeurs de la fosse postérieure.

Le neurinome du VIII est une tumeur bénigne (schwannome) qui naît dans 90 % des cas dans le CAI, à partir du nerf vestibulaire, et dont le développement se fait vers l’angle pontocérébelleux.

La croissance du neurinome est classiquement lente, mais en fait variable selon les cas (de 1 mm à 1 cm de diamètre par an).

Certains neurinomes peuvent rester stables pendant plusieurs années et il a même été décrit des involutions tumorales.

Le neurinome de l’acoustique est habituellement unilatéral, solitaire et non héréditaire, sauf lorsqu’il s’intègre dans le cadre d’une maladie de Recklinghausen.

La surdité unilatérale est le signe d’appel le plus fréquent (90 %).

Elle est habituellement progressive, mais peut se présenter comme une surdité brusque (1 à 4 %) ou fluctuante.

Toute surdité de perception unilatérale, ou bilatérale et asymétrique, doit faire pratiquer un bilan complémentaire à la recherche d’un neurinome du VIII. Des acouphènes peuvent accompagner la surdité ou être révélateurs.

La symptomatologie vestibulaire est plus rare (en raison de la lenteur de croissance), mais des troubles de l’équilibre souvent discrets, voire des vertiges rotatoires, peuvent être observés.

Du fait de la proximité des nerfs crâniens dans le CAI, une paralysie faciale peut également être un signe d’appel.

Les symptômes extraotologiques sont rarement des circonstances de découverte, car ils témoignent de l’importance du développement du neurinome (névralgie du trijumeau ou anesthésie faciale, paralysie des nerfs mixtes, céphalées, syndrome cérébelleux, hypertension intracrânienne).

L’audiométrie tonale montre une surdité de perception unilatérale ou bilatérale et asymétrique, avec des troubles de l’intelligibilité en audiométrie vocale (classique discordance tonale-vocale).

Les réflexes stapédiens sont souvent abolis, ce qui doit orienter vers une atteinte rétrocochléaire.

Les potentiels évoqués auditifs permettent, si la perte auditive n’est pas trop importante, de différencier l’origine endo- ou rétrocochléaire de la surdité.

L’atteinte rétrocochléaire est objectivée par l’allongement des latences des ondes III et V avec allongement des intervalles I-III et I-V et aspect désorganisé des tracés.

Néanmoins, des potentiels évoqués auditifs normaux n’éliminent pas formellement la présence d’un neurinome.

Les explorations fonctionnelles vestibulaires sont souvent perturbées, et leur association aux potentiels évoqués auditifs en augmente la sensibilité diagnostique.

Le diagnostic de neurinome de l’acoustique est assuré par l’IRM avec injection de gadolinium, qui entraîne un rehaussement de la tumeur, permettant de mettre en évidence de minuscules neurinomes intracanalaires.

L’IRM permet également de mesurer et de classer le neurinome en fonction de sa taille.

La prise en charge des neurinomes de l’acoustique dépend de nombreux paramètres : âge et état général du patient, taille du neurinome et rapports avec le tronc cérébral, état de l’audition ipsiet controlatérale…

En fonction de ces différents paramètres, plusieurs attitudes peuvent être adoptées : abstention et surveillance régulière (clinique, audiométrique et radiologique), exérèse par voie oto-neuro-chirurgicale, radiochirurgie stéréotaxique (gamma knife).

Beaucoup plus rarement, d’autres tumeurs de la base du crâne peuvent être responsables d’une surdité de perception de type rétrocochléaire : méningiome, chémodectome, kyste arachnoïdien, cholestéatome primitif de l’angle pontocérébelleux, granulome à cholestérine de l’apex pétreux…

2- Neuropathies auditives :

Les progrès des méthodes d’exploration des voies auditives ont récemment permis d’isoler une nouvelle entité nosologique, la neuropathie auditive.

Il s’agit d’une atteinte non tumorale du nerf auditif.

La neuropathie auditive se présente comme une surdité de perception de type rétrocochléaire avec abolition des réflexes stapédiens, potentiels évoqués auditifs perturbés, otoémissions acoustiques conservées (témoignant du bon fonctionnement des CCE de la cochlée) et audiométrie vocale beaucoup plus perturbée que l’audiométrie tonale (expliquant les difficultés de l’adaptation audioprothétique).

L’IRM permet d’éliminer une atteinte tumorale. Une fois le diagnostic de neuropathie auditive établi, on fait pratiquer un bilan neurologique complet afin d’en déterminer l’étiologie.

Plusieurs publications ont déjà permis de rapporter certains cas de neuropathies auditives à une affection neurologique caractérisée : maladie de Charcot-Marie-Tooth, ataxie de Friedreich.

D’autres neuropathies périphériques peuvent s’accompagner d’une surdité qui correspond probablement à une neuropathie auditive : syndrome de Guillain-Barré, neuropathie diabétique, neuropathie toxique.

Plusieurs cas de neuropathies auditives isolées et d’étiologie indéterminée ont été publiés.

Certaines de ces neuropathies auditives peuvent être la première manifestation d’une neuropathie périphérique, ce qui impose, outre une surveillance audiologique, un suivi neurologique régulier.

La prise en charge audioprothétique (que ce soit par appareillage conventionnel ou implantation cochléaire) est difficile, en raison des troubles de l’intelligibilité qui accompagnent l’affection (comme en témoignent les perturbations souvent importantes de l’audiométrie vocale).

C – SURDITÉS CENTRALES :

L’hypoacousie est liée à une atteinte des voies auditives situées en amont du nerf auditif : tronc cérébral, thalamus, cortex auditif temporal.

Les surdités secondaires à une atteinte du tronc cérébral sont rarement révélatrices et s’associent le plus souvent à d’autres manifestations neurologiques qui dominent le tableau clinique.

La surdité est de type rétrocochléaire avec absence de recrutement et désynchronisation des potentiels évoqués auditifs.

Le diagnostic étiologique est habituellement apporté par l’IRM.

Parmi les affections du tronc cérébral pouvant entraîner une surdité, on peut citer : lésions tumorales (gliome du tronc cérébral), accidents vasculaires (syndrome de Wallenberg), affection démyélinisante (sclérose en plaques), traumatisme crânien…

Les atteintes auditives d’origine corticale sont rares, car les informations sonores empruntent des voies bilatérales à partir de l’étage sous-cortical.

La symptomatologie se manifeste plus par des troubles de l’intelligibilité ou des distorsions dans la perception des sons (ce qui rend les explorations auditives difficiles à réaliser avec des réponses souvent incohérentes et discordantes) que par une surdité à proprement parler.

L’atteinte auditive se voit lors de lésions bitemporales, dont l’origine peut être un accident vasculaire, un traumatisme, une encéphalite…

Les atteintes de l’audition liées à des troubles de la pression du liquide céphalorachidien (LCR) sont plus difficiles à classer, car elles sont, en fait, dues à des variations pressionnelles des liquides labyrinthiques, par le biais des voies de communication existant entre les espaces sous-arachnoïdiens et périlymphatiques.

Ainsi, les hypotensions intracrâniennes peuvent être responsables de manifestations cochléovestibulaires (acouphènes, surdité de perception, vertiges) dont la principale caractéristique est de prédominer en position debout et de s’amender plus ou moins complètement en position allongée.

Des surdités liées à une perte de LCR ont été rapportées après ponction lombaire, chirurgie intracrânienne, rachianesthésie.

En l’absence de récupération spontanée, une surdité secondaire à une ponction lombaire ou à une rachianesthésie peut utilement bénéficier d’un blood-patch.

De même, on peut observer des manifestations cochléovestibulaires (acouphènes pulsatiles, syndrome méniériforme) secondaires à une hypertension intracrânienne.

Ces relations entre les espaces périlymphatiques et sous-arachnoïdiens ont permis de développer un système d’exploration non invasive de la pression intracrânienne, appelé tympanic membrane displacement analyser ou test de Marchbanks.

Le principe consiste à enregistrer les mouvements de la membrane tympanique par l’intermédiaire d’une simple sonde introduite dans le CAE.

Les variations de mouvements de la membrane tympanique dépendent de la pression périlymphatique et/ou intracrânienne.

Des résultats intéressants sur la surveillance des valves de dérivation ventriculaire ou sur l’exploration de certaines pathologies cochléovestibulaires ont été publiés, mais demandent à être confirmés et validés.

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