Sarcomes cutanés

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Introduction :

Les sarcomes cutanés sont des tumeurs malignes issues du tissu conjonctif commun ou spécialisé et du tissu nerveux.

Sarcomes cutanésIls peuvent prendre leur origine dans le derme, dans l’hypoderme, ou envahir la peau à partir des tissus sous-cutanés superficiels ou profonds.

Il s’agit de tumeurs qui posent, du fait de leur rareté, de leur diversité histologique et de leur hétérogénéité évolutive, des problèmes difficiles de diagnostic anatomopathologique, d’évaluation pronostique et de stratégie thérapeutique.

Notre première partie est consacrée aux principes généraux du diagnostic histologique, du grade histopronostique, du stade évolutif et de la prise en charge thérapeutique.

Nous étudions ensuite les principaux sarcomes cutanés en nous basant sur une classification fondée sur l’aspect morphologique.

Les sarcomes de l’enfant font l’objet d’un chapitre particulier.

La localisation à la peau d’un sarcome, quel qu’en soit le type, lui confère une individualité qui ne remet pas en cause la nécessité absolue d’une prise en charge pluridisciplinaire.

Toutefois, elle devrait conduire à l’engagement de dermatologues et de chirurgiens plasticiens spécifiques participant à l’élaboration de standards de prise en charge des patients atteints de sarcome cutané. 

Principes généraux du diagnostic, du pronostic et du traitement :

A – DIAGNOSTIC :

Les sarcomes cutanés sont des tumeurs rares, représentant moins de 1 % de tous les cancers.

Leur diagnostic est anatomopathologique.

1- Objectifs du diagnostic :

Ils sont multiples :

– établir le diagnostic de sarcome ;

– classer la tumeur ;

– aider à préciser le pronostic ;

– guider les décisions thérapeutiques.

2- Établir le diagnostic de sarcome :

Les informations cliniques sont essentielles.

L’âge du patient, la connaissance des antécédents (notion de radiothérapie pour une autre tumeur par exemple), le siège de la tumeur, sa taille et son évolutivité sont des facteurs déterminants du diagnostic.

Le diagnostic de la tumeur est fait, soit sur l’analyse histologique de la pièce d’exérèse, soit sur une biopsie qui doit être de bonne taille.

Dans certaines circonstances, elle doit être faite par un chirurgien expérimenté, après réalisation d’une imagerie guidant le site de la biopsie et sa voie d’abord.

L’examen histologique, aidé d’une étude immunohistologique, va permettre de porter le diagnostic de sarcome en éliminant une autre tumeur maligne.

Il doit aussi écarter d’autres tumeurs conjonctives bénignes qui peuvent ressembler à un sarcome.

C’est le cas des fasciites nodulaires, de certains histiocytofibromes cellulaires et profonds.

3- Classification des sarcomes :

La classification utilisée est celle d’Enzinger et Weiss.

Il s’agit d’une classification histogénétique fondée sur l’aspect morphologique (ou type) des cellules qui prolifèrent. Les deux types de sarcomes les plus fréquents sont l’histiocytome fibreux malin (HFM) et le liposarcome (LS).

Cinq à 15 % des sarcomes restent inclassés.

Les types histologiques observés varient en fonction de l’âge du malade et de certains antécédents, comme l’existence d’une radiothérapie antérieure.

La classification d’un sarcome repose essentiellement sur l’examen histologique standard.

Elle reste délicate, avec des discordances entre les observateurs allant de 15 à 40 % des cas. Trois techniques peuvent aider à classer un sarcome.

– L’immunohistochimie occupe aujourd’hui une place importante.

Les anticorps commercialisés utilisables sur coupes de tissus inclus en paraffine sont très utiles pour l’identification de certains types : synovialosarcome (SS), sarcome épithélioïde, sarcome vasculaire, léiomyosarcome (LMS), sarcome à cellules claires et dermatofibrosarcome de Darier et Ferrand.

Aucun marqueur n’est absolument spécifique et l’immunomarquage doit être interprété selon le contexte clinique et l’aspect morphologique de la tumeur.

– La microscopie électronique, du fait de contraintes techniques et de difficultés d’interprétation, est moins utile en principe.

On devrait pouvoir y avoir recours dans les cas non classés par l’immunohistochimie.

– Les études cytogénétiques, qui ne sont pas d’utilisation courante, montrent des anomalies caryotypiques spécifiques dans certains types de sarcomes (LS myxoïde, SS, sarcome à cellules claires, sarcome d’origine neuroectodermique ou malignant peripheral neurectodermal tumor [MPNET], rhabdomyosarcome…).

B – PRONOSTIC :

1- Histopronostic :

Les éléments histologiques qui permettent de préciser le pronostic d’un sarcome sont, outre l’analyse des marges d’exérèse chirurgicale de la tumeur, le grade histologique et le type histologique.

Le grade histologique est probablement le facteur pronostique le plus important.

Différents systèmes de grade histologique sont utilisés.

Ils prennent en compte le degré de différenciation tumorale, l’index mitotique et la présence ou l’absence de nécrose.

Il n’y a cependant pas de consensus sur le grade attribué à une tumeur, qui peut varier selon les systèmes utilisés.

En France, le système défini par la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer est le plus utilisé.

Le type histologique est, pour certaines tumeurs, plus informatif que le grade histologique.

Ainsi, les tumeurs à malignité intermédiaire ou locale (fibroxanthome atypique, dermatofibrosarcome de Darier et Ferrand, LS bien différencié, hémangioendothéliome épithélioïde) et les tumeurs à potentiel métastatique important (certains types de LS) ne doivent pas être gradées.

2- Pronostic et stade évolutif :

Le recueil des informations relatives à l’extension de la maladie a pour but d’établir un pronostic, d’aider au choix des modalités thérapeutiques, et d’en évaluer les effets.

Les facteurs pronostiques pour le contrôle local de la tumeur varient selon les études.

Toutefois, le facteur retrouvé de façon relativement constante et significative est la qualité de l’exérèse chirurgicale lors du traitement initial.

En second lieu, le grade histopronostique apparaît. Dans le cas des sarcomes cutanés, en règle sus-aponévrotiques, la localisation n’est pas un facteur discriminatif.

Pour le pronostic général, le facteur qui émerge est le grade histologique.

Plusieurs systèmes d’appréciation du stade évolutif sont utilisés, et aucun n’est basé sur des critères unanimement reconnus.

Les systèmes de l’American Joint Committee on Cancer (AJCC) et de l’Union internationale contre le cancer (UICC) sont les plus utilisés et sont applicables aux sarcomes cutanés.

Ils prennent en compte la taille et l’extension de la tumeur (T1, T2, T3), l’envahissement des ganglions lymphatiques régionaux (N0, N1), la présence de métastases (M0, M1) et le grade du sarcome (G1, G2, G3).

Quatre stades sont ainsi définis :

– stade I : G1, T1-T2, N0, M0 ;

– stade II : G2, T1-T2, N0, M0 ;

– stade III :

– IIIa : G3, T1-T2, N0, M0 ;

– IIIb : tous G, T1-T2, N1, M0 ;

– stade IV : – IVa : tous G, T3, N0-N1, M0 ;

– IVb : tous G, tous T, tous N, M1.

C – BILAN RADIOLOGIQUE :

1- Bilan préthérapeutique :

* Bilan d’extension locorégional :

Il est fonction de la localisation anatomique et, pour les membres, de la localisation superficielle ou profonde.

+ Sarcomes des membres :

– Dans les tumeurs superficielles, l’échographie suffit pour les tumeurs de diamètre inférieur à 5 cm.

On complète par une imagerie par résonance magnétique (IRM) lorsque le diamètre est supérieur à 5 cm ou lorsque la tumeur franchit l’aponévrose musculaire.

– Dans les tumeurs profondes, on pratique une IRM.

La tomodensitométrie (TDM) garde sa supériorité pour l’analyse des structures osseuses (envahissement osseux par contiguïté, détection de calcifications).

Les signes de malignité retenus sont la taille supérieure à 5 cm, la présence de nécrose tissulaire, l’envahissement des tissus adjacents, la prise de contraste intense et précoce avant la première minute.

+ Sarcomes du massif facial :

La TDM, qui permet une meilleure définition des contours osseux que l’IRM, complète au mieux les clichés simples.

* Bilan d’extension général :

+ Poumons :

C’est le site métastatique préférentiel et le seul site dont l’exploration systématique est nécessaire.

La radiographie de thorax standard permet de déceler des lésions secondaires infracliniques et sert de point de repère ultérieur.

La TDM pulmonaire est systématique dans le bilan d’extension initial.

+ Autres organes :

Les techniques d’exploration complémentaire spécifiques (scintigraphie osseuse, TDM et IRM cérébrales) ne sont réalisées qu’en fonction des signes d’appel cliniques.

2- Bilan d’évaluation en cours de traitement :

Il a pour objectifs de rechercher des reliquats tumoraux après une exérèse chirurgicale non réglée, de rechercher une récidive tumorale, d’évaluer l’évolution tumorale au cours d’un traitement non chirurgical.

3- Surveillance à long terme :

Elle tient compte de l’histoire naturelle des sarcomes, dont le risque maximal de récidive et de métastases se situe dans les 3 premières années.

Il n’y a pas de consensus concernant le rythme de surveillance.

Il est recommandé un examen clinique et une radiographie thoracique tous les 2 à 3 mois les 2 à 3 premières années, puis tous les 3 à 4 mois jusqu’à la cinquième année.

Le bilan radiologique local est fonction de l’examen clinique.

Si l’examen est normal, on ne pratique pas d’exploration complémentaire.

Si l’examen est suspect, on demande une échographie, voire une TDM, pour l’abdomen, une IRM pour le rachis ou les membres.

En cas de doute, une drill biopsy sous contrôle radiologique s’impose.

D – PRINCIPES GÉNÉRAUX DU TRAITEMENT :

1- Biopsie chirurgicale : règles

Elle doit impérativement être chirurgicale, de façon à ramener un prélèvement de taille suffisante pour permettre le diagnostic histologique, tenant compte des inclusions en paraffine, des coupes pour immunohistochimie, du caractère souvent hétérogène et nécrosé de la tumeur.

La ponction est insuffisante.

Lorsque la tumeur est de diamètre inférieur à 3 cm, on pratique une biopsie-exérèse.

L’incision est faite en regard de la tumeur, dans l’axe des fibres musculaires, sans décollement, de façon à ne pas disséminer la tumeur.

Le choix du tracé de l’incision doit tenir compte du dessin d’éventuels lambeaux de couverture futurs et de l’excision totale du trajet de la biopsie, et de son éventuel drainage lors du traitement chirurgical ultérieur.

2- Chirurgie :

La chirurgie obéit à deux impératifs : carcinologique et fonctionnel.

Elle s’efforce d’être conservatrice mais doit être large.

L’exérèse marginale seule (énucléation) s’accompagne d’un taux de récidive de 50 à 93 % et doit être proscrite.

L’exérèse élargie, applicable aux sarcomes cutanés, emporte la tumeur, avec des marges de 2 cm de tissus sains dans tous les plans de l’espace ou une barrière anatomique saine.

3- Radiothérapie externe :

La radiothérapie exclusive est réservée aux tumeurs inopérables.

Les résultats de l’association radio-chirurgie sont comparables à ceux obtenus avec une chirurgie radicale (amputation).

Ainsi, elle constitue actuellement l’indication de première intention pour les sarcomes des membres.

La radiothérapie est le plus souvent postopératoire. Le volume et la dose sont fonction des résultats histologiques.

La curiethérapie peut être pratiquée en association à la radiothérapie externe et à la chirurgie, ou en association à la chirurgie seule.

Elle peut être pratiquée sur la tumeur primitive ou sur une récidive.

4- Chimiothérapie :

Les objectifs sont :

– le traitement de la maladie micrométastatique chez les patients à haut risque ;

– le traitement complémentaire des patients évolués ne pouvant bénéficier d’un traitement chirurgical radical d’emblée ;

– le traitement palliatif des malades inopérables.

* Monochimiothérapie :

Les agents cytostatiques utilisés sont la doxorubicine, l’ifosfamide, la dacarbazine.

Le taux de réponse pour la doxorubicine (Adriblastinet) utilisée en monothérapie varie de 16 % à 29 % selon les équipes. L’ifosfamide utilisé en monothérapie a une efficacité variable en fonction de la dose et du schéma utilisés.

Les résultats d’études de phase II montrent un effet dose-dépendant au prix d’une toxicité hématologique, rénale et neurologique élevée.

Seules des études randomisées permettraient de définir les schémas thérapeutiques optimaux.

La dacarbazine (Déticènet) est très peu utilisée en monothérapie, le taux de réponse serait de 14 % à 19 % selon les études.

* Association :

L’association de choix est l’association doxorubicine-ifosfamide.

Les polychimiothérapies type CYVADIC (cyclophosphamide, VP 16, adriamycine, Déticènet, cisplatine) ou MAID (mesna, adriamycine, ifosfamide, cisplatine) majorent les taux de réponse objective observés mais ne modifient pas la survie globale des patients.

* Chimiothérapie néoadjuvante :

Elle n’a pas fait la preuve de son efficacité tant sur le plan de la durée de vie sans rechute, que sur le plan de la survie globale pour les tumeurs opérables d’emblée.

Elle peut induire une réduction du volume tumoral et permettre une chirurgie secondaire lorsque la tumeur est localement avancée, et ne permet pas de chirurgie carcinologiquement satisfaisante d’emblée.

Il n’existe pas de protocole de chimiothérapie standard.

Cependant, l’objectif étant d’obtenir un taux maximal de réponses, le choix se porte de préférence sur les polychimiothérapies.

Celles-ci ne peuvent se concevoir que dans le cadre d’essais thérapeutiques.

* Chimiothérapie adjuvante :

L’objectif est de traiter la maladie micrométastatique et d’améliorer la survie globale.

Elle impose donc de définir les groupes à risque.

Les études publiées à ce jour ne sont pas contributives et ne permettent pas d’affirmer un bénéfice, tant sur le plan de la survie globale que sur le plan de la survie sans métastases.

Elles semblent, en revanche, mettre en évidence un bénéfice significatif sur le plan de la récidive locorégionale.

La chimiothérapie adjuvante ne peut aussi se concevoir que dans le cadre d’essais thérapeutiques.

Sarcomes fibrohistiocytaires :

A – DERMATOFIBROSARCOME DE DARIER ET FERRAND :

Le dermatofibrosarcome, décrit par Darier et Ferrand en 1924, est une tumeur rare, de développement lent, particulière par son agressivité locale et sa tendance aux récidives en l’absence de chirurgie adaptée.

Cette tumeur survient le plus souvent chez l’adulte jeune, entre 20 et 40 ans, exceptionnellement chez l’enfant, voire le nouveau-né.

Il existe une très discrète prédominance masculine.

Sa nature fibroblastique, histiocytaire ou neurectodermique est toujours discutée.

La pathogénie de cette tumeur est inconnue.

Des anomalies génétiques ont été rapportées sans que leur signification soit déterminée.

Il ne semble pas exister de prédisposition familiale.

Le rôle des traumatismes, rapportés dans près de 20 % des patients, est difficile à interpréter, mais certaines tumeurs se développent sur des cicatrices (chirurgicales ou brûlures).

1- Aspects cliniques :

Le siège le plus fréquent est le tronc (47 %), notamment la ceinture scapulaire, les extrémités proximales (38 %) ou la région cervicocéphalique (15 %).

Les localisations acrales sont très rares, sauf peut-être chez l’enfant.

Cette tumeur débute le plus souvent par une plaque unique, ferme, indurée, brun-rouge, violacée ou couleur de peau normale. Rarement, la lésion initiale prend l’aspect d’un nodule ferme, d’une plaque atrophique ou d’une lésion sclérodermiforme.

Au bout de plusieurs années (souvent plusieurs décennies), apparaissent un ou plusieurs nodules, enchâssés dans la plaque et saillants (dermatofibrosarcoma protuberans).

La taille de la lésion dépend du délai entre le début et la première consultation, parfois très tardive devant cette tumeur asymptomatique et d’évolution très lente (parfois plus de 40 ans).

Elle est en règle de 1 à 5 cm, avec des extrêmes de plus de 20 cm de diamètre.

Peu à peu, cette tumeur, longtemps superficielle, va envahir les plans profonds, s’étendant volontiers le long des fascias.

La tumeur de Bednar, rare (moins de 5 % des cas), est la forme pigmentée du dermatofibrosarcome. Elle survient surtout chez le sujet de race noire et contient, histologiquement, des dépôts de mélanine.

2- Aspects histologiques et immunohistochimiques :

La prolifération tumorale siège dans le derme et l’hypoderme.

La tumeur est composée de cellules fusiformes, avec peu d’atypies et de mitoses.

Ces cellules sont groupées en petits faisceaux flexueux, enchevêtrés dans les zones nodulaires de forte densité cellulaire réalisant un aspect en « panier tressé » (l’aspect « storiforme » des Anglo-Saxons).

En périphérie, dans le derme, les cellules tumorales s’agencent en grands faisceaux lâches, ondulés et flexueux, parallèles à la surface.

En profondeur, la tumeur infiltre l’hypoderme en nappes dissociant les lobules adipeux, et sous forme de coulées dans les cloisons interlobulaires.

Elle peut s’étendre très à distance du foyer principal, atteignant les fascias ou les plans aponévrotiques sous-jacents.

Le diagnostic différentiel peut être difficile, notamment sur des prélèvements biopsiques :

– les zones de forte densité cellulaire peuvent ressembler à un histiocytofibrome de forme cellulaire et profond ou à un HFM ;

– les zones de faible densité cellulaire peuvent être confondues avec un neurofibrome, un dermatomyofibrome.

Les cellules expriment le CD 34 dans 90 % des tumeurs et n’expriment généralement pas le facteur XIIIa (contrairement aux histiocytofibromes).

La négativité de la PS100 permet d’éliminer une tumeur nerveuse.

3- Évolution et traitement :

Si l’évolution de cette tumeur est longue, elle est fréquemment émaillée de récidives, leur fréquence dépendant des marges de l’exérèse initiale : 40 % si elles sont de 2 cm, 10 à 20 % pour des marges à 3 cm, 1,75 % pour des marges à 4 cm dans les tumeurs primitives.

Dans tous les cas, l’exérèse doit emporter un plan aponévrotique sain en profondeur. Les métastases sont rares (5 %), essentiellement pulmonaires.

Quelques cas ont été rapportés de dermatofibrosarcome récidivant sous forme de sarcome de plus haut grade de malignité.

B – HISTIOCYTOMES FIBREUX MALINS :

Ce sont les plus fréquents des sarcomes de l’adulte survenant entre 50 et 70 ans dans deux cas sur trois chez un homme.

Là encore, l’étiopathogénie est inconnue : certains sont cependant radio-induits, et les HFM représenteraient les sarcomes postradiques les plus fréquents.

Cependant, la tendance actuelle est au reclassement d’un certain nombre de HFM en sarcomes d’autre type, en fonction de données morphologiques, immunohistochimiques, voire cytogénétiques.

1- Aspects cliniques :

Ils siègent préférentiellement aux extrémités inférieures (notamment la hanche), puis aux membres supérieurs, et enfin dans la région rétropéritonéale.

La tumeur réalise une masse non douloureuse, le plus souvent musculaire mais parfois sous-cutanée, de 5 à 10 cm.

Cliniquement souvent bien limitée, elle s’étend en fait volontiers à distance de long des fascias et au sein des faisceaux musculaires.

Le délai et la rapidité d’apparition de la tumeur dépendent de son type et de son grade histologiques.

2- Aspects histologiques et immunohistochimiques :

* HFM pléiomorphe et storiforme :

C’est le plus fréquent. Son aspect histologique extrêmement polymorphe associe de façon variable des zones de cellules globuleuses disposées en tous sens avec des cellules multinucléées, des zones de cellules fusiformes agencées en petits faisceaux enchevêtrés réalisant également des aspects de « panier tressé », voire des zones de grands faisceaux entrelacés comme dans un fibrosarcome.

Enfin, on peut observer quelques zones myxoïdes.

Les atypies cytonucléaires et les mitoses sont variables selon l’agressivité de la tumeur.

L’étude immunohistochimique est peu utile au diagnostic : elle sert surtout pour éliminer d’autres sarcomes ou tumeurs sarcomatoïdes.

Certains marqueurs histiocytaires sont exprimés de façon variable mais n’ont pas de grande spécificité (CD 68, a-1-antitrypsine et a-1-antichymotrypsine, lyzozyme…).

À noter la possibilité d’expression focale de desmine, de kératine, d’actine.

Le diagnostic différentiel se pose avec d’autres sarcomes pléiomorphes et des carcinomes sarcomatoïdes.

Il s’agit surtout des LS pléiomorphes, des rhabdomyosarcomes pléiomorphes, plus rarement des sarcomes neurogéniques (SN), des LMS, voire exceptionnellement d’une maladie de Hodgkin ; pour les carcinomes sarcomatoïdes, l’immunohistochimie permet souvent de retrouver une expression d’une ou de plusieurs cytokératines, associée à une expression fréquente de vimentine.

* HFM myxoïde :

Il comprend, outre des aspects semblables au HFM pléiomorphe, de larges zones (plus de la moitié de la tumeur) où les cellules tumorales sont dispersées de façon lâche dans une substance mucopolysaccharidique abondante.

Les atypies et les mitoses sont peu marquées. Les vaisseaux sont nombreux, arciformes.

Le diagnostic différentiel se pose avec des lésions bénignes comme une fasciite nodulaire, un myxome ou avec d’autres sarcomes, notamment un LS myxoïde.

* HFM à cellules géantes :

Encore appelée tumeur maligne à cellules géantes des parties molles, c’est une tumeur rare, plurinodulaire, associant dans des proportions variables des cellules géantes plurinucléées de type ostéoclastique, des fibroblastes et des histiocytes.

La présence possible de zones ostéoïdes pose le problème d’un ostéosarcome extraosseux.

* HFM de type inflammatoire :

Il se rencontre presque exclusivement dans la région rétropéritonéale.

3- Aspects évolutifs :

Pour les HFM pléiomorphes et storiformes, le taux de récidive est lié à la qualité de l’exérèse chirurgicale ; 37 % si elle est large ou consiste en une amputation ; 50 à 84 % si elle est insuffisante.

Le taux de métastases est de 34 à 40 %, surtout pulmonaires (90 %) et dans 12 % des cas ganglionnaires.

L’évolution globale est corrélée au grade histopronostique, à la taille de la tumeur et à sa localisation superficielle ou profonde.

Seules 10 % des tumeurs superficielles métastasent, 27 % de celles qui envahissent le fascia, et 43 % des tumeurs profondes intramusculaires.

La survie est corrélée à la taille : à 5 ans, elle est de 82 % pour les tumeurs inférieures à 5 cm, de 68 % pour une taille entre 5 et 10 cm et de 51 % quand la taille est supérieure à 10 cm.

La plupart de ces HFM pléiomorphes et storiformes sont de grade II ou III, avec une survie à 5 ans de 80 % pour les grades II et de 60 % pour les grades III.

Par ailleurs, les tumeurs distales auraient un meilleur pronostic.

Les HFM de type myxoïde récidivent dans deux tiers des cas et métastasent dans un quart des cas. Ils sont le plus souvent de grade II.

Cependant, ils doivent être traités par exérèse large, voire par amputation.

Les HFM à cellules géantes sont de meilleur pronostic quand ils sont superficiels (deux tiers récidivent mais seulement un sur six métastase).

C – FIBROXANTHOME ATYPIQUE (FXA) :

Il est considéré comme une forme à part des HFM.

1- Aspects cliniques :

Le FXA s’observe chez les personnes âgées, le plus souvent sur les zones photoexposées (nez, joues, oreilles).

De rares cas sont décrits sur le tronc ou les membres chez des patients plus jeunes.

Il peut survenir dans certaines conditions particulières, sur les sites de radiothérapie ou au cours de certaines génodermatoses comme le xeroderma pigmentosum.

Il s’agit d’un nodule unique, parfois ulcéré, mesurant typiquement moins de 2 cm et de croissance lente.

2- Aspects histologiques :

C’est une tumeur dermique pouvant s’étendre dans la partie superficielle de l’hypoderme.

La prolifération est faite de cellules ovoïdes et fusiformes éparses ou organisées en structures fasciculées.

Il s’y mêle de grandes cellules spumeuses pouvant traduire une différenciation histiocytaire.

Les atypies sont marquées avec des noyaux volumineux, hyperchromatiques, mitotiques. Les cellules plurinucléées sont nombreuses.

La prolifération peut être collée à l’épiderme.

Il n’y a pas de marqueurs immunohistochimiques spécifiques du FXA, mais l’absence d’expression de la PS100, de la cytokératine, permet d’éliminer les diagnostics de carcinome épidermoïde ou de mélanome que l’on peut évoquer histologiquement surtout lorsque manquent les cellules spumeuses.

3- Aspects évolutifs :

C’est une tumeur de très bon pronostic : moins de 10 % de récidives après exérèse simple.

On n’a jamais rapporté de métastases.

Les tumeurs envahissant l’hypoderme, les fascias, rejoignent le pronostic des HFM superficiels.

D – SARCOME FIBROMYXOÏDE DE FAIBLE GRADE :

Cette nouvelle entité de sarcome de faible grade de malignité survient chez des adultes jeunes, surtout sur les parties proximales des membres et le tronc.

Sur le plan histologique, elle comporte des zones myxoïdes et des zones plus cellulaires.

Ces sarcomes, autrefois étiquetés comme HFM myxoïdes ou LS myxoïdes, sont des tumeurs de croissance lente, récidivant dans 10 % des cas, et donnant rarement (6 % des cas) des métastases pleuropulmonaires. L’exérèse complète est suffisante.

Léiomyosarcomes :

Les LMS représentent moins de 3 % des sarcomes des tissus mous.

Ils surviennent plus souvent chez l’homme que chez la femme et apparaissent entre la cinquième et la septième décennie, bien que l’on puisse en voir à tout âge, y compris chez l’enfant.

Le rôle de certains facteurs déclenchants a été souligné, comme les traumatismes, la radiothérapie.

Récemment, on a rapporté, mais uniquement dans des localisations profondes, le développement de LMS chez des patients transplantés, immunodéprimés avec mise en évidence du virus Epstein-Barr dans les tumeurs.

Il existe deux grands types de LMS : les LMS superficiels, intradermiques développés à partir des muscles arrecteurs des poils ou de muscles spécialisés, dartos du scrotum ou des grandes lèvres, muscle du mamelon, et les LMS sous-cutanés issus des parois vasculaires.

Cette distinction est essentielle en termes de pronostic.

1- Aspects cliniques :

Le LMS dermique se présente comme un nodule généralement unique, bien qu’il existe des formes multifocales, mesurant rarement plus de 3 cm lors du diagnostic, érythémateux, parfois ulcéré ou ombiliqué, souvent douloureux.

Il siège préférentiellement aux membres, notamment à la face externe des jambes.

Les localisations au visage, au cou et au tronc sont moins fréquentes.

Le LMS hypodermique se présente comme une masse hémisphérique recouverte d’une peau légèrement érythémateuse ou parfois rouge violacé dont la taille est variable de 1 à 15 cm.

Il peut aussi être douloureux et siège essentiellement aux membres inférieurs.

2- Aspects histologiques, immunohistochimiques et ultrastructuraux :

La nature musculaire lisse de la tumeur est le plus souvent identifiable dès l’examen histologique standard.

Selon les cas, la prolifération siège dans le derme et/ou l’hypoderme, avec une extension possible dans le fascia ou les muscles.

Dans les formes dermiques pures, la tumeur est mal délimitée, alors que les formes profondes sont mieux circonscrites et comportent une croissance nodulaire progressive.

La prolifération est faite de faisceaux enchevêtrés avec des zones de différenciation variable.

Il s’agit de cellules fusiformes ayant un noyau allongé à bouts carrés.

Le degré des atypies nucléaires est variable d’une zone à l’autre.

On trouve parfois des cellules multinucléées, anaplasiques et monstrueuses.

Le degré des atypies, la présence de foyers de nécrose, le nombre des mitoses, permettent d’apprécier le grade de malignité de la tumeur.

L’étude immunohistochimique permet de confirmer la nature musculaire de la tumeur qui exprime dans 100 % des cas l’actine, dans moins de 70 % des cas la desmine.

La PS100, le CD 34 peuvent être exprimés de façon focale et faible.

L’étude ultrastructurale, lorsqu’elle est faite, montre que les cellules tumorales contiennent des myofibrilles avec des corps denses et des plaques d’attache le long de la membrane plasmique, des vésicules de pinocytose et une membrane basale entourant chaque cellule.

3- Diagnostic différentiel :

Il est histologique.

Dans les formes dermiques pures, très bien différenciées et de bas grade, le diagnostic se pose avec le léiomyome, et ce n’est parfois qu’à l’occasion d’une récidive que le diagnostic de LMS est fait.

Le diagnostic peut se poser avec d’autres sarcomes, l’HFM, le dermatofibrosarcome de Darier et Ferrand, le schwanome malin ou même le mélanome.

Les études immunohistochimiques permettent en règle de préciser la nature du sarcome.

4- Traitement et facteurs pronostiques :

Le traitement, indiscutablement chirurgical, est le seul à permettre la guérison.

L’exérèse doit être large, et l’on recommande des marges de 3 à 5 cm emportant le tissu hypodermique et le fascia.

Le taux de récidives locales est très largement dépendant de la qualité de l’exérèse.

Elles surviennent dans les 5 années qui suivent le traitement initial, dans 42 % des LMS superficiels et 58 % des LMS profonds.

Les métastases ne se développent que dans les formes profondes et atteignent principalement le poumon.

Aucune étude ne permet de dire l’intérêt de la radiothérapie en tant que traitement adjuvant.

Le facteur déterminant du pronostic d’un LMS est son siège superficiel ou profond avec une évolution favorable quel que soit le grade histologique des LMS dermiques, lorsque le traitement chirurgical a été correct.

Dans les LMS profonds, la taille de la tumeur (plus de 5 cm), l’atteinte du fascia et le haut grade de malignité sont corrélés à la survenue de métastases et au décès (près de 60 % dans un travail récent).

Liposarcomes :

Les LS sont parmi les plus fréquents des sarcomes de l’adulte.

Ils surviennent dans 60 % des cas chez l’homme entre 40 et 60 ans.

Les cas chez l’enfant sont exceptionnels.

Ils semblent se développer à partir d’une cellule mésenchymateuse primitive plutôt qu’à partir d’un adipocyte.

Ils sont en effet rares dans le tissu adipeux souscutané, là où se développent les lipomes.

Là encore, le rôle d’un traumatisme est difficile à prouver.

Les LS post-radiques sont très rares, de même que ceux naissant d’un lipome.

1- Aspects cliniques :

Les deux localisations principales sont :

– les extrémités notamment inférieures (41 %) surtout au niveau de la cuisse et du creux poplité (exceptionnellement les extrémités distales) ;

– la région rétropéritonéale (42 %).

D’autres localisations sont plus rares : cordon spermatique, paroi thoracique, sein, voire la région cervicoencéphalique.

Il s’agit d’une tumeur souvent volumineuse (de 7 à 48 cm avec une moyenne de 15 cm de grand axe lors du diagnostic), bien limitée, nodulaire, de consistance élastique, d’évolution lente, de plusieurs mois à plus de 20 ans.

Les tumeurs évoluées peuvent être douloureuses.

2- Aspects histologiques :

Plusieurs types sont individualisés.

* LS myxoïdes :

Ce sont les plus fréquents (la moitié des cas).

Ils sont composés de lipoblastes souvent peu différenciés, parfois vacuolaires, dispersés sur un fond myxoïde comportant une vascularisation arborescente.

La tumeur réalise des lobules bien limités, avec parfois des nodules satellites à distance.

Ils sont parfois difficiles à distinguer de zones de dégénérescence myxoïde du tissu adipeux, d’un myxome intramusculaire ou d’un HFM de type myxoïde.

Ils sont de bon pronostic.

Certains LS myxoïdes sont actuellement considérés comme des sarcomes fibromyxoïdes de faible grade.

* LS bien différenciés :

Ce sont des tumeurs de très bas grade de malignité, parfois appelées « lipomes atypiques ».

Ils ressemblent à des lipomes avec quelques cellules fusiformes et quelques lipoblastes. Le diagnostic de malignité est parfois difficile à affirmer et n’est quelquefois posé que sur la (ou les) récidive(s).

* LS pléiomorphes :

Ils comportent, à côté d’éléments fusiformes ou arrondis, des cellules volumineuses, plurinucléées, à noyaux bourgeonnants.

Il peut être difficile de les différencier d’autres sarcomes pléiomorphes (HFM, rhabdomyosarcomes…).

* LS à cellules rondes :

Assez rares, plus agressifs, ils sont faits de nappes de cellules arrondies pouvant faire discuter une tumeur d’Ewing ou un lymphome.

3- Aspects évolutifs et thérapeutiques :

Les LS myxoïdes et les LS bien différenciés sont des tumeurs de bas grade de malignité, pouvant récidiver (le plus souvent entre 5 à 10 ans, parfois plusieurs dizaines d’années), mais ne donnant qu’exceptionnellement des métastases.

Lorsqu’elles sont superficielles, elles ne nécessitent qu’une exérèse simple.

Plus profondes, il convient d’effectuer une exérèse plus large.

Certains LS myxoïdes peuvent donner des foyers à distance sur les séreuses ou être multicentriques.

Les survies à 5 ans sont de 88 % et 100 %.

Les autres LS sont de moins bon pronostic, pouvant récidiver et surtout donner des métastases (poumons ou autres organes et os), avec des survies à 5 ans ne dépassant guère 50 %.

Synovialosarcomes et sarcomes épithélioïdes :

A – SYNOVIALOSARCOMES :

Ce sont des tumeurs fréquentes, survenant chez l’adolescent et l’adulte jeune (15 à 40 ans), avec une prédominance masculine.

Quelques cas sont rapportés chez l’enfant. Leur histogenèse et leur étiologie restent obscures.

Contrairement à ce que leur appellation sous-entend, leur origine n’est pas prouvée.

La majorité des patients rapportent une histoire de traumatisme dans les semaines ou les 15 années précédentes.

Ce rôle est difficile à évaluer en raison de la fréquence des traumatismes au niveau des membres.

1- Aspects cliniques :

Il s’agit d’une tumeur des extrémités (85 à 95 % des cas), surtout inférieures (60 %), notamment dans la région du genou, voire la cheville ou le pied ; au niveau du membre supérieur (23 %), la tumeur siège le plus souvent au niveau de l’épaule, parfois sur l’avant-bras ou le poignet, plus rarement au niveau des orteils ou des doigts ; les localisations tête et cou et tronc ne représentent que 5 % à 15 % des cas.

La tumeur siège au contact des tendons ou des capsules articulaires, mesurant de 3 à 5 cm (voire 20 cm).

Elle se présente sous forme d’une masse volontiers douloureuse, de croissance lente longtemps insidieuse, existant en moyenne depuis 2 à 4 ans lors du diagnostic (parfois 20 ans).

Elle est le plus souvent intimement liée aux gaines tendinoaponévrotiques.

L’examen radiologique peut, dans 15 à 20 % des cas, évoquer le diagnostic devant la présence de petites opacités punctiformes (calcifications).

2- Aspects histologiques :

On peut observer deux types cellulaires :

– des cellules fusiformes en nappes avec des zones myxoïdes et des calcifications ;

– des cellules d’aspect épithélial en cordons centrés par des cavités glanduliformes. Selon l’association de ces deux types, on distingue les SS biphasiques, monophasiques sarcomateux (cellules fusiformes uniquement), monophasiques « épithéliaux » (très rares).

Les cellules, quel qu’en soit le type, expriment la vimentine et les cytokératines de bas poids moléculaires.

Les cellules épithéliales expriment en outre l’epithelial membrane antigen (EMA) et l’antigène carcinoembryonnaire (ACE).

Sur le plan cytogénétique, on observe dans la majorité des cas une translocation entre les chromosomes X et 18.

3- Aspects évolutifs :

Quel que soit le type ou le grade histologique, les SS sont de mauvais pronostic.

Les récidives surviennent dans 80 % des cas après chirurgie limitée, et 30 % après chirurgie large et radiothérapie.

Les métastases, souvent tardives, surviennent dans la moitié des cas : elles sont surtout pulmonaires (94 % des cas), plus rarement ganglionnaires (10 à 21 %).

Si les survies à 5 ans vont, selon les études, de 96 à 64 %, les survies à 10 ans ne sont que de 20 à 38 %.

B – SARCOMES ÉPITHÉLIOÏDES :

Rares (1,4 % des sarcomes des tissus mous), ils surviennent chez l’adulte jeune entre 10 et 39 ans (âge moyen de 28 ans avec des extrêmes de 3 mois à 90 ans), siégeant essentiellement aux extrémités :

– aux membres supérieurs : 66 % des cas dont 90 % au niveau de la main et de l’avant-bras et 10 % dans les régions proximales ;

– aux membres inférieurs : 27 % des cas sans prédominance distale ou proximale.

Les autres sièges sont la tête et le cou, les organes génitaux externes (grandes lèvres chez la femme) et le tronc.

Le sex-ratio est de 1,8 homme/1 femme.

1- Aspects cliniques :

La tumeur débute par un nodule ferme, indolore, d’évolution lente (de quelques mois à 6 ans).

Les formes superficielles (extrémités distales) vont réaliser volontiers des nodules multiples notamment après récidives, mobiles par rapport aux plans profonds ; les formes profondes (racines des membres) sont représentées par une masse multilobulaire, fixée sur les plans musculoaponévrotiques et tendineux.

Les localisations génitales se présentent sous forme d’un nodule unique.

2- Diagnostic différentiel :

Il est essentiellement celui d’une maladie de Dupuytren.

3- Aspects histologiques, immunohistochimiques et ultrastructuraux :

La tumeur est faite de nodules souvent creusés de plages de nécrose, entourées de cellules arrondies d’aspect pseudoépithélial, l’ensemble pouvant réaliser des aspects de granulomes épithélioïdes et tuberculoïdes.

Les formes de début sont parfois trompeuses, avec un aspect de fibromatose.

Sur le plan immunohistochimique, les cellules expriment des marqueurs à la fois conjonctifs (vimentine, parfois CD 34, antichymotrypsine, actine…) et épithéliaux (cytokératines, EMA…).

Sur le plan histologique, le diagnostic différentiel peut se poser avec des lésions granulomateuses nécrosantes (nodule rhumatoïde, granulome annulaire, granulome béryllique…), une maladie de Dupuytren, certains carcinomes peu différenciés, un sarcome à cellules claires et des formes épithélioïdes d’autres sarcomes (LMS, SN, SS).

L’étude ultrastructurale met en évidence dans les cellules tumorales des filaments intermédiaires (kératine et vimentine), des structures réticulogranulaires correspondant à des filaments dégénérés, et des microfilaments d’actine.

4- Aspects évolutifs :

Des récidives locales sous forme de nodules multiples (au nombre de un à dix), étagés le long des axes tendinoaponévrotiques, surviennent dans 71 % des cas dans un délai de 6 mois à 3 ans.

Elles surviennent surtout pour les tumeurs profondes ou mesurant plus de 3 cm.

Les métastases surviennent dans 30 % des cas chez la femme et 50 % des cas chez l’homme.

Elles sont plus fréquentes pour les tumeurs proximales (71 %) que pour les tumeurs distales (38 %).

Il s’agit de métastases ganglionnaires locorégionales, pulmonaires, cutanées (cuir chevelu) et hépatiques.

La survie à 6 ans est de 70 %, mais elle n’est que de 50 % à 10 ans.

Sarcomes vasculaires :

Les angiosarcomes (AS) désignent des tumeurs vasculaires malignes développées à partir des cellules endothéliales.

Le terme d’hémangioendothéliome est actuellement appliqué à des tumeurs vasculaires de malignité intermédiaire ou incertaine, comme c’est le cas de l’hémangioendothéliome épithélioïde que nous étudions plus loin.

S’il existe très probablement des sarcomes développés à partir des vaisseaux sanguins (hémangiosarcomes) ou à partir des vaisseaux lymphatiques (lymphangiosarcomes), et si l’arrivée de nouveaux anticorps monoclonaux devrait permettre la distinction entre cellules endothéliales capillaires et lymphatiques, la caractérisation précise de ces deux types de sarcomes n’est pas encore possible.

Aussi, le terme générique d’angiosarcome reste encore aujourd’hui justifié.

A – ANGIOSARCOMES :

1- Incidence et facteurs étiologiques :

Les AS représentent environ 1 % de tous les sarcomes et leur siège de prédilection est la peau, ce qui contraste avec la localisation le plus souvent profonde des autres sarcomes.

Le lymphoedème chronique est le facteur prédisposant le plus fréquent.

Il est à l’origine d’une variété clinique d’AS décrite par Stewart et Treves en 1948.

Le second facteur étiologique est la radiothérapie.

Les autres circonstances d’apparition d’un AS sont plus anecdotiques : fistules artérioveineuses, sites d’implantation de matériel étranger.

De même, la transformation maligne d’une lésion bénigne préexistante est exceptionnelle.

2- AS non associés au lymphoedème :

Ce sont les AS les plus fréquents, apparaissant chez les personnes âgées de plus de 60 ans, un peu plus souvent chez l’homme que chez la femme (sex-ratio 3/2), au niveau de la tête et du cou, et plus précisément au niveau du cuir chevelu et du front.

* Aspects cliniques :

Le début est le plus souvent insidieux, avec apparition d’une lésion faussement anodine à type de tache maculeuse, bleutée, ecchymotique, dont les limites floues s’infiltrent progressivement.

Il peut s’agir aussi d’un oedème plus ou moins inflammatoire.

Très rapidement, l’aspect devient franchement tumoral, avec formation de plaques et de nodules violacés, hémorragiques, qui peuvent s’ulcérer et qui se multiplient.

Le caractère multifocal est une des particularités de cette tumeur dont le degré d’extension est très difficile à apprécier, débordant les limites cliniquement visibles.

En quelques mois, la tumeur peut envahir l’ensemble du cuir chevelu, du visage, et s’étendre à la partie supérieure du tronc.

* Aspects histologiques, immunohistochimiques et ultrastructuraux :

La prolifération vasculaire se développe dans toute l’épaisseur du derme et envahit progressivement l’hypoderme et parfois le fascia.

La plupart des AS comportent des zones de différenciation variable.

Les zones les mieux différenciées forment des structures vasculaires de taille et de forme irrégulières, disséquant les fibres de collagène et les cellules adipeuses.

Ces vaisseaux communiquent entre eux en formant un réseau anastomotique complexe.

Ils sont tapissés de cellules endothéliales irrégulièrement disposées, parfois empilées, avec formation de papilles flottant dans les lumières vasculaires.

Les cellules sont de grande taille avec des noyaux hyperchromatiques.

Dans les zones indifférenciées, de haut grade de malignité, la prolifération est plus compacte, faite de cellules pléiomorphes comportant un index mitotique élevé.

La mise en évidence d’un réseau de réticuline peut aider au diagnostic.

Surtout, la confirmation du diagnostic est apportée par les études immunohistochimiques utilisant un panel d’anticorps, ayant pour buts d’éliminer une autre tumeur si l’échantillon biopsique a porté sur une zone dédifférenciée, et de mettre en évidence la nature vasculaire de la prolifération.

Le CD 31 (molécule d’adhésion plaquette-cellule endothéliale) est le marqueur vasculaire qui est le plus utile, plus spécifique et plus sensible que l’antigène lié au facteur VIII, la lectine Ulex Europeus et le CD 34.

L’expression du Fli-1 est utilisée, aujourd’hui, dans le diagnostic des tumeurs vasculaires.

La microscopie électronique est peu utile au diagnostic, les marqueurs morphologiques de l’origine vasculaire étant surtout trouvés dans les formes bien différenciées : vésicules de pinocytose le long des membranes plasmiques soulignées par une membrane basale, filaments intracytoplasmiques et corps de Weibel-Palade.

* Diagnostic différentiel :

Aucun autre diagnostic clinique ne se pose que celui d’AS devant l’installation récente chez une personne âgée d’une tache angiomateuse ou ecchymotique du visage et du cuir chevelu en l’absence de traumatisme.

Le diagnostic histologique peut être au début difficile dans les formes bien différenciées, avec un hémangiome ou un lymphangiome ou une maladie de Kaposi.

L’hyperplasie angiolymphoïde, que l’on peut discuter cliniquement, se distingue par son organisation architecturale et par l’infiltrat d’accompagnement.

L’angiomatose bacillaire, le granulome pyogénique récidivant sont facilement reconnus par le terrain sur lequel ils surviennent.

Dans les formes indifférenciées, les études immunohistochimiques permettent d’éliminer, en général, un carcinome et les autres sarcomes.

* Évolution et traitement :

Le pronostic est sombre.

Ceci est lié au fréquent retard de consultation pour des lésions en apparence bénigne chez des patients âgés, au caractère multifocal de la tumeur et à l’inefficacité des traitements.

La plupart des séries rapportent des taux de survie à 5 ans de 12 à 25 % avec une survie moyenne de 15 à 20 mois. Le facteur pronostique déterminant est la taille de la tumeur au moment du diagnostic, la frontière se situant à 5 cm.

Les autres facteurs comme le sexe, le siège et le grade histologique ne sont pas corrélés au pronostic.

Le décès survient par extension locale et métastases.

Récidives et métastases apparaissent dans les 2 ans qui suivent le diagnostic.

Les métastases ganglionnaires surviennent dans 20 à 30 % des cas, ce qui est beaucoup plus fréquent que dans les autres sarcomes.

Elles peuvent aussi se développer dans le poumon, le foie et la rate.

Le traitement n’est pas codifié et les modalités thérapeutiques font appel à la chirurgie, la radiothérapie et la chimiothérapie, chaque méthode utilisée seule n’étant pas satisfaisante.

Un travail récent, portant sur 14 patients, montre que l’association d’une chirurgie d’exérèse des tumeurs cliniquement visibles et d’une radiothérapie très large apporte un taux de survie à 5 ans de 50 %.

Toutefois, l’addition d’un traitement systémique apparaît impératif pour contrôler les récurrences locales, qui peuvent survenir à très grande distance du site traité, et les métastases.

3- Angiosarcome sur lymphoedème :

Ce sont Stewart et Treves qui ont, en 1948, décrit cette variété clinique d’AS dont le dénominateur commun est leur développement sur un lymphoedème chronique.

Près de 90 % d’entre eux apparaissent sur le membre supérieur dans les suites d’une mammectomie associée à un curage ganglionnaire axillaire pour cancer du sein.

Plus rarement, l’AS se développe au niveau de la paroi abdominale après curage inguinal pour carcinome des régions génitale ou pelvienne ou sur lymphoedème d’un membre, d’origine congénitale, traumatique, filarienne ou idiopathique.

Le délai d’apparition du sarcome est variable, en moyenne 10 ans après le traitement, souvent plus long encore sur les lymphoedèmes congénitaux ou idiopathiques.

Les mécanismes pathogéniques sont mal compris.

L’obstruction lymphatique, une dysrégulation immunitaire locale, la radiothérapie souvent associée au traitement du carcinome initial sont les facteurs invoqués.

* Aspects cliniques :

Comme pour les AS de la tête et du cou, le début est insidieux, marqué par l’apparition d’une ou plusieurs lésions bleuâtres infiltrées sur une peau profondément remaniée par le lymphoedème.

Ces lésions deviennent peu à peu nodulaires et confluent en larges plaques violacées s’infiltrant et s’ulcérant.

Le degré d’extension peut être considérable, avec atteinte de tout le membre et diffusion à la paroi thoracique.

* Aspects histologiques :

Ils ne sont guère différents des autres AS.

La constatation, dans quelques cas, de zones de lymphangiomatose qui représenteraient un stade prolifératif précancéreux, est le seul argument pour penser que ces sarcomes sont d’origine lymphatique.

Les études immunohistochimiques, plus que la microscopie électronique, permettent d’affirmer la nature vasculaire de la tumeur et d’éliminer une extension locorégionale du carcinome initial.

* Diagnostic différentiel :

Il se pose essentiellement avec la maladie de Kaposi, notamment lorsque l’angiosarcome siège aux membres inférieurs, voire au dos.

* Évolution et traitement :

L’absence de standards thérapeutiques empêche une analyse précise des résultats.

Le taux de survie est quoi qu’il en soit faible, inférieur à 3 ans dans la plupart des séries.

Le caractère multifocal du sarcome ne permet le plus souvent qu’une chirurgie palliative.

Les métastases pleuropulmonaires sont fréquentes et responsables de la plupart des décès.

4- Angiosarcomes postradiothérapie :

Leurs aspects cliniques et histologiques sont comparables aux autres AS, et il s’agit de sarcomes de haut grade de malignité, de très mauvais pronostic.

Ils apparaissent sur le site d’une radiothérapie, 3 à 5 ans après la fin du traitement et ne sont pas associés à un lymphoedème.

B – HÉMANGIOENDOTHÉLIOME ÉPITHÉLIOÏDE :

L’hémangioendothéliome épithélioïde (HEE) a été individualisé par Weiss et Enzinger en 1982.

Pour cette tumeur vasculaire de malignité incertaine ou intermédiaire, les auteurs ont choisi l’appellation d’hémangioendothéliome.

La peau et le tissu sous-cutané sont un des sites privilégiés, bien que les localisations hépatiques, pulmonaires ou osseuses soient plus fréquentes.

Il survient chez les adultes jeunes, un peu plus souvent chez la femme.

1- Aspects cliniques :

La présentation clinique des HEE est variable.

Il peut s’agir d’une tumeur unique nodulaire, érythémateuse, parfois douloureuse, de croissance lente et de siège ubiquitaire.

Les tumeurs souscutanées n’ont guère de particularités cliniques et sont plus volontiers localisées aux extrémités des membres.

Les lésions peuvent aussi être multiples.

Ce sont alors une à quelques dizaines de papulonodules disséminés mesurant quelques millimètres de diamètre, de couleur rose ou rouge, à surface lisse ou kératosique.

2- Aspects histologiques et immunohistochimiques :

La prolifération tumorale se développe dans le derme ou le tissu sous-cutané.

Elle est caractérisée par la présence de cellules endothéliales isolées ou groupées en cordons ou pseudotubes.

Elles sont dites épithélioïdes, polygonales ou ovoïdes, possédant un cytoplasme abondant et clair et des vacuoles intracytoplasmiques qui peuvent contenir des globules rouges, ce qui témoigne d’une différenciation vasculaire incomplète.

Le degré des atypies nucléaires, de même que l’index mitotique, sont variables.

Le stroma est souvent myxoïde, typiquement dépourvu d’infiltrat inflammatoire, et en particulier de polynucléaires éosinophiles.

Dans le tissu sous-cutané, la tumeur naît de la paroi d’une veine de gros ou moyen calibre.

L’étude immunohistochimique indispensable confirme la nature vasculaire de la tumeur qui exprime le facteur VIII, le CD 31 et parfois le CD 34, tandis que les marqueurs épithéliaux sont en principe négatifs.

3- Diagnostic différentiel :

Cliniquement, selon la topographie et le nombre des lésions observées, on peut évoquer une maladie de Kaposi, une hyperplasie angiolymphoïde, des granulomes pyogéniques ou une angiomatose bacillaire.

Histologiquement, la métastase cutanée d’un carcinome est facilement éliminée par le phénotype immunohistochimique.

Plus difficilement, on écarte un angiosarcome dont il existe une variété épithélioïde.

La distinction entre HEE et autres proliférations vasculaires épithélioïdes peut être difficile, à la fois cliniquement et histologiquement.

4- Évolution et traitement :

Une des particularités de l’HEE est son caractère plurifocal, et l’on s’interroge toujours pour savoir, dans le cas de localisations multiples et notamment cutanéoviscérales, s’il s’agit d’une maladie métastatique ou d’une tumeur multifocale d’emblée.

Le bilan d’extension, dirigé vers la recherche d’une atteinte pulmonaire (scanner thoracique), hépatique (échographie et/ou scanner abdominal) et osseuse (radiographies du squelette), permet parfois de constater, dès le moment du diagnostic, l’existence d’une maladie disséminée.

Le comportement évolutif des HEE est difficile à évaluer.

Le pronostic semble dépendre du site initial de développement de la tumeur.

Ainsi, le taux de mortalité est estimé à 13 % pour les HEE des tissus mous, à 35 % pour les HEE hépatiques et 65 % pour les HEE pulmonaires.

Par ailleurs, il semble que les atteintes multifocales d’emblée ont une évolution un peu plus bénigne.

Les critères histologiques habituellement considérés comme de mauvais pronostic ne semblent pas applicables à l’HEE.

Les choix thérapeutiques sont limités. Lorsque la tumeur est unique, l’exérèse chirurgicale simple est indiquée.

La chirurgie radicale n’est évidemment pas possible dans les formes disséminées.

Aucune chimiothérapie n’est efficace.

L’interféron alpha ne l’est guère davantage.

C – HÉMANGIOPÉRICYTOME MALIN :

Nous ne consacrons que quelques lignes à cette variété de tumeur vasculaire, en raison de sa localisation exceptionnelle au niveau de la peau, et surtout des incertitudes qui persistent sur son origine et son individualité.

On l’a décrite comme une tumeur sous-cutanée volontiers douloureuse, de siège ubiquitaire et survenant surtout chez l’adulte jeune.

Le diagnostic est histologique et évoqué devant une prolifération de cellules polygonales, ovoïdes ou fusiformes organisées autour de structures vasculaires formant un réseau dont la forme est comparée à des bois de cerf.

Il existe une fusion progressive entre les péricytes et les cellules tumorales.

Les colorations argentiques mettent en évidence un lacis de fibres réticuliniques entourant chaque cellule tumorale.

Les études immunohistochimiques et en microscopie électronique permettent surtout d’éliminer une autre tumeur.

Il s’agit en effet d’un diagnostic d’exclusion, car de nombreuses tumeurs (SS, HFM, LMS, mélanome…) peuvent avoir des zones de différenciation, parfois prédominantes, de type hémangiopéricytome.

Le traitement est chirurgical.

Mélanome des tissus mous (sarcome à cellules claires) :

L’intégration de cette tumeur dans une mise au point consacrée aux sarcomes cutanés est discutable, mais dans la mesure où certains auteurs continuent à parler de sarcome à cellules claires, nous lui réservons quelques lignes.

D’histogenèse longtemps discutée, ce sarcome d’aspect histologique très particulier est maintenant considéré comme un mélanome des parties molles sans connexion avec les sites de présence habituelle des mélanocytes.

Cependant, des données cytogénétiques tendent à lui préserver son originalité par rapport aux mélanomes.

1- Aspects cliniques :

Il s’agit d’une tumeur de l’adulte jeune entre 20 et 40 ans avec des extrêmes de 7 à 83 ans. Le sex-ratio est de 1.

Souvent étroitement liée à des structures tendinoaponévrotiques, cette tumeur siège dans 69 % des cas au membre inférieur, notamment le pied (31 %), et dans 23 % des cas sur le membre supérieur, avec 10 % des cas sur la main.

Le plus souvent, il s’agit d’une masse de croissance lente peu ou pas douloureuse apparue en moyenne 2,9 ans auparavant (avec des extrêmes allant de 1 mois à 30 ans).

La tumeur mesure en moyenne 4 cm (de 1 à 20 cm) au moment du diagnostic.

2- Aspects histologiques :

Il s’agit d’une prolifération monomorphe faite de grandes cellules fusiformes au cytoplasme clair ou faiblement éosinophile, agencées en lobules ou en faisceaux.

Il existe dans deux tiers des cas des cellules plurinucléées.

Dans 72 % des cas, on retrouve de la mélanine intracytoplasmique.

Par ailleurs, les cellules tumorales expriment dans 90 % des cas la PS100 et l’HMB 45.

L’origine mélanocytaire est en outre confirmée par la mise en évidence de mélanosomes en microscopie électronique.

3- Aspects évolutifs :

Le taux de récidive locale est élevé (47 %) avec des récidives volontiers multiples, et un délai moyen d’apparition de 4,6 ans (entre 1 mois et 22 ans).

Elles ne semblent pas avoir d’incidence sur la survie.

Les métastases sont fréquentes (67 %), se développant en moyenne en 3,2 ans, mais parfois très tardives (31 ans).

Elles sont avant tout ganglionnaires et pulmonaires, puis osseuses, cutanées et hépatiques.

Leur survenue semble liée au volume initial de la tumeur (plus fréquentes quand celle-ci mesure 5 cm de diamètre ou plus).

Cinquante-six pour cent des patients décèdent et la survie à 5 ans est de 43 % ; celle à 10 ans n’est que de 18 %.

Sarcomes neurogéniques :

Anciennement appelés schwannomes malins ou neurofibrosarcomes, puis SN, ces tumeurs, nées de certains composants des nerfs (cellules de Schwann ou fibroblastes du périnèvre) tendent à être regroupées par l’Organisation mondiale de la santé sous le terme de « tumeurs malignes des gaines des nerfs périphériques ».

Ces SN représentent 5 à 10 % des sarcomes des parties molles. Ils surviennent dans la moitié des cas dans le cadre d’une neurofibromatose de type 1 (NF1) ou maladie de Von Recklinghausen, l’incidence, dans le cadre d’une NF1, étant diversement appréciée (de 2 à 29% selon les études).

Il s’agit d’une tumeur de l’adulte entre 20 et 50 ans, l’âge moyen de survenue étant peut-être plus précoce lors d’une NF1 (29 à 36 ans) que sans NF1 (40 à 44 ans).

Des cas ont cependant été rapportés chez l’enfant.

Dans les cas sporadiques, le sex-ratio est de 1, alors que dans les cas de NF1, la prédominance masculine de ces sarcomes (80 %) est parallèle à celle observée dans cette maladie.

Si le rôle d’une intervention antérieure sur neurofibrome reste très discuté, 10 % des SN sur NF1 ont subi une irradiation dans les 15 ans précédents.

1- Aspects cliniques :

La tumeur se manifeste avant tout, soit par l’apparition d’une masse de novo, soit par une augmentation de volume d’un neurofibrome préexistant.

Il peut s’y associer des douleurs, notamment quand la tumeur naît d’un gros tronc nerveux.

La taille est très variable au moment du diagnostic, de 2,5 à 45 cm.

2- Aspects histologiques :

Ils se caractérisent par un très grand polymorphisme d’une tumeur à l’autre ou au sein d’une même tumeur : peuvent s’observer des zones lâches myxoïdes ou à type de neurofibrome, des zones plus denses avec des ébauches d’agencement palissadique, de corpuscules de Meissner, des zones « léiomyosarcomateuses », des plages de cellules pseudoépithéliales.

Les atypies sont variables, parfois très marquées comme dans un HFM.

3- Aspects immunohistochimiques :

Dans 50 à 90 % des cas, il existe une expression de la PS100, en règle limitée à quelques amas de cellules tumorales.

Dans 50 % des cas s’observe une expression du CD 57 (Leu 7).

4- Aspects ultrastructuraux :

Certaines cellules tumorales comportent de longs prolongements cytoplasmiques enchevêtrés, des jonctions peu nombreuses, une membrane basale péricellulaire souvent incomplète, des grains neurosécrétoires, des microfilaments. Dans la matrice extracellulaire, on peut observer du collagène à longue périodicité.

5- Aspects évolutifs :

La plupart des SN sont des sarcomes de haut grade de malignité.

Les récidives sont fréquentes, survenant dans 20 à 87 % des cas.

Dans 65 % des cas se développent (en 14 à 18 mois) des métastases pulmonaires, osseuses, pleurales ou rétropéritonéales.

Les métastases ganglionnaires sont exceptionnelles.

À noter la possibilité dans les NF1 de voir apparaître deux SN concomitants.

Sarcomes de l’enfant :

Ils méritent un chapitre particulier car leur type et leur évolutivité sont bien différents des sarcomes de l’adulte.

A – RHABDOMYOSARCOME (RMS) :

Les RMS sont les sarcomes des tissus mous les plus fréquents chez l’enfant de moins de 15 ans.

Ils représentent 6 à 7% des cancers de l’enfant.

L’âge moyen de survenue est de 8 ans, et près de 2 % d’entre eux sont présents dès la naissance. Ils sont un peu plus fréquents chez le garçon.

Près de 15 % des RMS siègent aux membres (avant-bras, main, pied surtout), les deux autres localisations préférentielles concernant peu le dermatologue (tête et cou, tractus génito-urinaire et rétropéritoine).

Il s’agit d’une masse sous-cutanée de croissance plus ou moins rapide.

Quatre types histologiques principaux sont retenus dans la classification conventionnelle :

– le RMS embryonnaire, le plus fréquent (50 à 60 %) siège parfois aux membres.

Il est représenté par une prolifération fusocellulaire associée à un stroma myxoïde ;

– le RMS botryoïde (5 à 10 %) est un variant du premier type et se caractérise par son aspect polypoïde en « grappe de raisin ».

Il intéresse surtout les organes creux (vagin, vessie…) et peut s’extérioriser à la peau, au niveau du pelvis ;

– le RMS alvéolaire (20 %) est une tumeur de l’enfant et l’adolescent caractérisée par une prolifération de volumineuses cellules rondes.

L’architecture est alvéolaire avec formation de fentes entre les cellules tumorales, alignées le long de septa fibrovasculaires ;

– le RMS pléiomorphe (moins de 5 %) est le type histologique rencontré chez les adultes de plus de 40 ans au niveau des muscles des membres.

Le diagnostic de RMS, difficile, doit tenir compte du siège de la tumeur, de son aspect histologique, des études immunohistochimiques (expression de la desmine, de l’actine, de la myoglobine), de la microscopie électronique (présence de myofilaments), et parfois d’une analyse cytogénétique (translocations spécifiques dans les RMS alvéolaires).

Le pronostic est fonction de l’âge, du siège de la tumeur qui détermine les possibilités d’exérèse chirurgicale, du type histologique, et bien sûr du degré d’extension au moment du diagnostic.

Le traitement associe chirurgie, chimiothérapie et radiothérapie.

Quatre groupes ont été définis pour le stade évolutif selon le degré d’extension, local, régional, général, et selon les possibilités d’exérèse.

Dans le groupe I, la survie à 5 ans est de plus de 85 %.

B – SARCOME D’EWING EXTRASQUELETTIQUE ET MPNET :

Ces deux entités appartenant au même spectre de tumeurs sont des sarcomes survenant essentiellement chez l’enfant, parfois chez l’adulte jeune de moins de 30 ans.

Leur localisation cutanée dermique est exceptionnelle mais a néanmoins été rapportée dans plusieurs cas.

Leur diagnostic est histologique devant des nappes et des cordons de cellules rondes exprimant le CD 99.

Les études cytogénétiques sont indispensables pour les différencier d’autres tumeurs à cellules rondes : carcinome neuroendocrine de Merkel, neuroblastome, RMS, lymphome lymphoblastique.

L’exérèse chirurgicale (avec radiothérapie et/ou chimiothérapie selon les centres) en est le traitement.

Dans cette variété cutanée, le pronostic est favorable sans récidive ni métastases dans la plupart des cas.

C – FIBROSARCOME CONGÉNITAL ET FIBROSARCOME DE L’ENFANT :

Ce type de sarcome se développe à la naissance et chez les enfants de moins de 5 ans.

C’est une masse sous-cutanée de 1 à 20 cm, de croissance rapide, située aux extrémités des membres.

Il se caractérise par une prolifération monomorphe de petites cellules fusiformes exprimant la vimentine.

L’évolution est bonne après l’exérèse chirurgicale avec 85 % de survie à 5 ans.

Aucun critère ne permet de prévoir les tumeurs qui vont métastaser.

D – FIBROBLASTOME À CELLULES GÉANTES :

Il a été décrit en 1982 et est considéré comme un analogue juvénile du fibrosarcome de Darier et Ferrand.

L’âge moyen du diagnostic est de 3 ans, et il est deux fois plus fréquent chez le garçon.

Il s’agit d’un nodule dermique ou sous-cutané situé à la cuisse, dans la région inguinale ou à la paroi thoracique.

La prolifération est dermique profonde et hypodermique, faite de cellules fusiformes diversement orientées.

Surtout, on observe des espaces pseudovasculaires ectasiques bordés de cellules géantes.

La prolifération fusocellulaire exprime la vimentine et le CD 34.

Le traitement requiert une exérèse chirurgicale large.

Les exérèses insuffisantes exposent aux récidives comme dans le fibrosarcome de Darier et Ferrand, tumeur que l’on peut aussi voir chez l’enfant.

Aucun cas de métastases n’a été jusqu’à présent rapporté.

E – ANGIOENDOTHÉLIOME MALIN PROLIFÉRANT ENDOVASCULAIRE OU TUMEUR DE DABSKA :

C’est une tumeur vasculaire exceptionnelle de l’enfant, de malignité intermédiaire.

Elle se présente comme une masse sous-cutanée ou superficielle, angiomateuse, sans topographie élective.

Elle est caractérisée par des cavités bordées de cellules endothéliales formant des papilles qui se projettent dans les lumières vasculaires.

Le traitement est chirurgical.

Un seul des rares cas rapportés s’est accompagné de métastases ganglionnaires et pulmonaires.

Conclusion :

Les sarcomes à expression cutanée sont des tumeurs rares.

Leur diagnostic peut être difficile.

Il repose avant tout sur l’examen histopathologique ; ce dernier doit porter sur un fragment tumoral de grande taille, aussi la biopsie doit être chirurgicale afin de rapporter suffisamment de matériel tumoral.

L’examen anatomopathologique va porter le diagnostic de sarcome (de tumeur maligne), essayer d’en préciser le type histogénétique (au besoin à l’aide d’études immunohistochimiques, voire ultrastructurales) et surtout établir un grade histopronostique qui permet d’évaluer le risque de métastases et de décès.

Le bilan d’extension locale est réalisé par échographie ou IRM, selon la taille de la tumeur ; un bilan d’extension pulmonaire est systématique.

Les stratégies thérapeutiques dépendent de nombreux facteurs : siège profond ou superficiel, certains types histogénétiques, grade histologique.

La prise en charge initiale adéquate de ces tumeurs, notamment sur le plan chirurgical, est un facteur important du pronostic, et elle ne peut être effectuée de manière satisfaisante que par des équipes pluridisciplinaires intégrant dermatologues, chirurgiens, anatomopathologistes, radiothérapeutes et chimiothérapeutes.

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