Rétinoïdes

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Introduction. Historique :

La découverte des rétinoïdes (dérivés de synthèse de la vitamine A) a constitué un progrès majeur dans la prise en charge thérapeutique de dermatoses telles que l’acné sévère, le psoriasis et les troubles de la kératinisation (ichtyoses).

RétinoïdesLa structure chimique de la vitamine A naturelle a été découverte en 1931.

En 1935, la découverte de son métabolite, le rétinal, ainsi que de son rôle majeur dans la vision, mettait en avant le rôle essentiel de cette vitamine.

En 1946, la mise en évidence de la structure de la vitamine A acide ou acide rétinoïque était corrélée à l’importance de cette molécule dans les phénomènes de croissance.

De nombreux travaux ont depuis démontré le rôle déterminant de la vitamine A et de ses métabolites dans les phénomènes de différenciation tissulaire, notamment au moment de l’embryogenèse.

La carence en vitamine A s’exprime dans le tissu cutané par une xérose, une hyperkératose et une métaplasie squameuse des muqueuses.

L’analogie de ces manifestations avec certains états pathologiques cutanés a conduit à proposer la vitamine A dans le traitement de diverses dermatoses : acné, psoriasis, ichtyoses, maladie de Darier, états précarcinomateux.

La nécessité d’utiliser de fortes doses, exposant rapidement à des manifestations cliniques d’hypervitaminose A (fatigue, céphalées, amaigrissement, anorexie) sans offrir de résultats thérapeutiques satisfaisants, a conduit à synthétiser puis à développer des dérivés de synthèse (rétinoïdes) à la fois plus efficaces et moins toxiques.

Classification des rétinoïdes :

A – RÉTINOÏDES NATURELS :

Ils comprennent la vitamine A naturelle ou rétinol (ROL) et ses métabolites, le rétinaldéhyde (RAL), l’acide rétinoïque tout-trans (ARTT) et l’acide 9-cis-rétinoïque.

L’organisme ne peut effectuer la synthèse de novo de rétinol, qui provient donc de l’alimentation (origine animale : esters de ROL [graisses, huiles de foie de poisson] ; origine végétale : bêtacarotène [caroténoïdes, carottes]).

B – RÉTINOÏDES DE SYNTHÈSE :

Au début des années 1960, la synthèse de la vitamine A acide (ou acide rétinoïque) a permis de faire progresser le traitement topique des formes comédoniennes d’acné.

Son utilisation par voie systémique n’a pas été développée en dermatologie en raison d’effets secondaires notables.

Dès 1968, des dérivés de synthèse de la vitamine A, moins toxiques que la vitamine naturelle utilisée à doses thérapeutiques, ont été développés.

Grâce à des modifications du noyau et de la chaîne latérale, ainsi que du groupement terminal, plus de 2 000 molécules ont été synthétisées. Seules quelques-unes ont été développées en clinique.

L’acide 13-cis-rétinoïque ou isotrétinoïne est disponible par voie générale depuis le début des années 1980 (Roaccutane), dans l’indication principale des formes sévères d’acné. L’isotrétinoïne topique est proposée actuellement dans le traitement de l’héliodermie.

Les rétinoïdes aromatiques ont été représentés dans un premier temps par l’étrétinate, remplacé actuellement par l’acitrétine (Soriatane).

Les rétinoïdes aromatiques sont indiqués par voie générale dans le psoriasis et les troubles de la kératinisation.

La découverte des propriétés différenciantes de l’acide rétinoïque sur les cellules de leucémie promyélocytaire humaine a conduit à utiliser avec succès ce rétinoïde par voie générale dans le traitement de cette forme de leucémie et à positionner les rétinoïdes en oncologie.

L’adapalène (Différine) est la première molécule d’une nouvelle classe de rétinoïdes : les différines.

Elle est indiquée par voie topique dans le traitement de l’acné.

Le rétinaldéhyde (Ysthéal) est proposé dans le traitement de l’héliodermie.

Le tazarotène (Zorac) est un rétinoïde acétylénique indiqué par voie topique dans les formes très localisées de psoriasis.

L’acide 9-cis-rétinoïque, métabolite naturel du ROL, est actuellement développé en oncologie.

Plusieurs molécules, définies plus par leur affinité avec les récepteurs nucléaires aux rétinoïdes que par leur structure moléculaire (relativement éloignée de celle du ROL), sont actuellement en cours de développement, principalement en oncologie : bexarotène, fenrétidine, thiazolinediones.

Métabolisme et mécanisme d’action des rétinoïdes :

A – RÉTINOÏDES NATURELS :

Les rétinylesters ingérés sont hydrolysés dans l’intestin en ROL, qui est absorbé.

Les caroténoïdes (principalement bêtacarotène) subissent également un métabolisme intestinal avec hydrolyse en rétinal (sous l’action d’une bêtacarotène dioxygénase) puis réduction en ROL par une RAL réductase.

Le ROL est estérifié (rétinyl palmitate) et transporté lié aux chylomicrons jusqu’au foie où il est stocké.

Après hydrolyse intrahépatique, le ROL est lié à une protéine de transport plasmatique, la retinol binding protein (RBP), synthétisée par le foie.

La régulation de la synthèse de RBP par le foie permet de maintenir constants les taux de ROL circulants.

L’ARTT, métabolite naturel actif du ROL, est absorbé directement par le système porte, mais la plus grande partie de l’ARTT circulant provient de la métabolisation du ROL au sein des tissus cibles.

B – MÉTABOLISME INTRACELLULAIRE DES RÉTINOÏDES NATURELS : SCHÉMA D’ENSEMBLE :

Le complexe ROL-RBP circulant se fixe à des récepteurs membranaires spécifiques présents à la surface des cellules cibles. Après fixation, le complexe se dissocie et seul le ROL libre pénètre à l’intérieur de la cellule. La RBP libérée recircule.

À l’intérieur de la cellule cible, le ROL se lie à un récepteur cytosolique (cellular retinol binding protein [CRBP]).

Le rôle principal de CRBP reste encore à définir (place dans le processus d’estérification intracellulaire du ROL et dans le stockage sous forme inactive ?).

Plusieurs voies métaboliques sont possibles pour le ROL.

1- Voie de métabolisation en acide rétinoïque tout-trans (ARTT) :

Le ROL est initialement transformé en RAL, métabolite intermédiaire, sous l’influence d’une ROL déshydrogénase.

Le gène de la ROL déshydrogénase a été cloné.

Son expression prédomine au sein des couches les plus différenciées de l’épiderme.

Dans le foie, cette transformation est sous la dépendance des cytochromes P450 CYP1A2 et CYP3A4 (CYP1A1 et CYP1B1 au sein des autres tissus).

Le RAL est transformé en ARTT sous l’influence de CYP1A1, 1A2, 1B1 et 3A4 + b5.

L’ARTT se lie à un récepteur soluble cytosolique, la cellular retinoic acid binding protein (CRABP) et est transporté jusqu’au noyau où s’exerce son action biologique, après liaison avec des récepteurs nucléaires.

L’ARTT non utilisé est dégradé au sein de la cellule cible en métabolites polaires moins actifs (4 oxo, 4 OH, 4 kéto, 18 OH ARTT).

Cette dégradation est sous la dépendance d’hydrogénases liées au CYP450.

Très récemment, deux isoformes nommées P450RAI-1 et -2 ont été identifiées comme intervenant dans cette dégradation.

En revanche, le rôle de CYP26A1 a été discuté.

2- Voie de métabolisation en acide 9-cis-rétinoïque :

Le ROL présente une deuxième voie métabolique en 9-cis-rétinal.

Cette transformation est sous la dépendance d’une cis-ROL déshydrogénase, récemment identifiée.

Le 9-cis-rétinal se transforme à son tour en acide 9-cis-rétinoïque.

3- Voie d’estérification :

Le ROL non métabolisé est stocké sous forme d’esters non actifs au sein de la cellule cible.

C – RÉCEPTEURS CYTOSOLIQUES :

Le ROL non métabolisé est lié à la CRABP.

L’ARTT se lie à la CRABP, dont on connaît deux isoformes (CRABP1 et 2), codées par deux gènes différents, régulables par les rétinoïdes naturels et les rétinoïdes de synthèse.

Les concentrations en CRABP varient en fonction des phases du développement embryonnaire, en fonction de la nature du tissu et au cours des divers processus pathologiques.

Au sein de la peau normale, les concentrations en CRABP sont très significativement plus élevées dans l’épiderme (évaluées à 3,1 pmol/mg de protéine) qu’au sein du derme.

La CRABP1 présente une affinité supérieure à la CRABP2 pour l’ARTT.

L’acide 9-cisrétinoïque n’est pas un ligand physiologique de CRABP, de même que les dérivés métaboliques de l’ARTT.

La CRABP2 est nettement prédominante au sein de l’épiderme, alors que la CRABP1, plus ubiquitaire, est peu exprimée au sein de la peau.

L’expression de la CRABP2 est significativement accrue au cours de la différenciation kératinocytaire.

L’application d’ARTT topique stimule l’expression épidermique de CRABP2.

Au sein d’un épiderme psoriasique, les concentrations en acide ribonucléique messager (ARNm) de la CRABP2 apparaissent significativement réduites par rapport à un épiderme non lésionnel.

Le rôle physiologique des CRABP n’est pas encore parfaitement connu.

Il apparaît en tout cas clair que celui-ci ne se limite pas à un simple « transporteur » de l’ARTT vers son site d’action nucléaire.

La CRABP pourrait aussi constituer un véritable régulateur « intracrine » des quantités d’ARTT libres disponibles pour une action biologique, et constituer l’un des mécanismes protecteurs physiologiques contre des concentrations toxiques d’ARTT.

Les mécanismes de transfert d’ARTT des CRABP vers les récepteurs nucléaires ont été bien étudiés récemment : dissociation CRABP1-ARTT puis transfert de l’ARTT libre vers le récepteur nucléaire ; interaction CRABP2-récepteur nucléaire.

D – RÉCEPTEURS NUCLÉAIRES :

1- Classification :

La découverte de l’existence de récepteurs nucléaires à l’ARTT a permis de faire progresser de manière déterminante la compréhension du mécanisme d’action biologique des rétinoïdes.

Les récepteurs à l’acide rétinoïque (RAR) appartiennent à la super-famille des récepteurs aux hormones stéroïdiennes, aux hormones thyroïdiennes et à la vitamine D.

Les rétinoïdes exercent donc leur action biologique d’une manière comparable à celle des hormones stéroïdiennes. On décrit RAR-alpha, RAR-bêta, RAR-gamma.

La peau humaine adulte contient RAR-gamma et exprime fortement RAR-alpha, principalement RAR-alpha1, par ailleurs peu exprimé au sein des autres tissus.

À l’inverse, RAR-bêta est faiblement exprimé dans la peau.

L’application d’ARTT topique induit cependant son expression au niveau du fibroblaste.

Plus récemment, des retinoid X receptors (RXR) ont été découverts.

Ces récepteurs ont comme ligand naturel l’acide 9-cis-rétinoïque.

RXR est normalement exprimé par la peau humaine normale, notamment par le follicule pileux, mais aussi par le kératinocyte, le mélanocyte, le fibroblaste et la cellule de Langerhans.

Le gène codant pour le RXR a récemment été cloné.

L’épiderme psoriasique lésionnel exprime des quantités d’ARNm réduites pour RAR-alpha et RXR.

La progression tumorale de carcinomes induits chez la souris s’accompagne d’une diminution de l’expression des RAR et d’une augmentation de l’expression des RXR.

L’interprétation de ce phénomène reste à faire.

Des cellules de certains carcinomes mammaires perdent l’expression de RARbêta, de même que les leucoplasies orales au cours de leur transformation carcinomateuse.

Le complexe récepteur nucléaire-ligand se lie à des sites précis de l’acide désoxyribonucléique (ADN), de mieux en mieux étudiés.

Cette liaison entraîne une modulation transcriptionnelle de gènes cibles codant pour diverses protéines impliquées dans la prolifération et la différenciation cellulaire (facteurs de croissance, oncogènes, kératines, élastine, transglutaminase…).

Pour se lier à l’ADN et exercer leur action, les récepteurs aux rétinoïdes doivent interagir sous forme d’hétérodimères dans lesquels les RXR sont constants (RXR-RAR, RXR-RXR, RvitD-RXR…).

Cette modulation de la synthèse protéique sous-tend probablement en grande partie l’action pharmacologique complexe des rétinoïdes de synthèse.

2- Ligands :

L’ARTT et l’acide 9-cis-rétinoïque sont les ligands naturels des RAR. L’acide 9-cis-rétinoïque est le ligand naturel des RXR.

Il apparaît ainsi comme un panagoniste.

Les rétinoïdes de synthèse se lient également d’une manière variable et encore imparfaitement connue aux récepteurs nucléaires.

Ainsi s’élabore une nouvelle définition des rétinoïdes, en fonction de leur spécificité de liaison aux récepteurs nucléaires.

À noter enfin qu’il existe des antagonistes des récepteurs nucléaires.

On connaît de mieux en mieux le dialogue entre les récepteurs nucléaires, ainsi que les conséquences de la liaison des ligands (naturels ou de synthèse) avec les hétérodimères.

Les hétérodimères RAR-RXR sont sélectivement activés par les ligands RAR mais les ligands RXR peuvent potentialiser l’action transcriptionnelle des ligands RAR.

Les agonistes RXR stimulent la croissance folliculaire alors que les agonistes RAR l’inhibent.

Les hétérodimères RAR-RXR seraient plus puissants que les homodimères RXR-RXR dans l’inhibition de la croissance de cellules néoplasiques.

On connaît de mieux en mieux, grâce à l’observation d’effets de molécules connues comme agonistes ou antagonistes, la fonction physiologique des récepteurs nucléaires.

De plus, le développement des modèles animaux transgéniques permet d’optimiser cette connaissance.

Les RAR-gamma seraient ainsi les médiateurs de l’irritation cutanée imputable aux rétinoïdes.

L’utilisation expérimentale des rétinoïdes de synthèse agonistes RAR-alpha n’entraîne pas d’irritation.

Les souris déficientes en RAR-gamma ne présentent pas d’effets toxiques de type rétinoïde sous traitement.

L’activation des RAR par l’acide 9-cis-rétinoïque et l’ARTT entraîne l’apoptose des lymphocytes T.

Au sein du sébocyte, les RAR médieraient les effets antiprolifératifs et antidifférenciants (particulièrement importants concernant l’action pharmacologique de l’isotrétinoïne).

Les RAR seraient responsables de l’effet différenciant de l’ARTT sur les cellules de la lignée HL60 (leucémie promyélocytaire humaine).

E – RÉTINOÏDES DE SYNTHÈSE : MÉCANISME D’ACTION, INTERACTION AVEC LE MÉTABOLISME DES RÉTINOÏDES NATURELS

Beaucoup d’incertitudes persistent dans la compréhension du mécanisme d’action pharmacologique des rétinoïdes de synthèse.

– Liaison aux récepteurs nucléaires : parmi les molécules mises sur le marché, l’ARTT, l’isotrétinoïne, l’acitrétine, le tazarotène et l’adapalène se lient aux RAR.

Cependant, seuls l’ARTT et l’isotrétinoïne ont été montrés comme ligands des récepteurs nucléaires.

L’acitrétine a en effet une affinité très faible avec les récepteurs nucléaires.

– Liaison aux récepteurs cytosoliques : tous les rétinoïdes de synthèse ont une affinité de liaison, variable, avec CRABP.

L’isotrétinoïne est 30 à 50 fois moins affine que l’ARTT.

– Variation des concentrations de CRABP : l’administation d’acitrétine au cours du psoriasis entraîne une augmentation de près de 200 % des concentrations de CRABP épidermique en peau non lésionnelle (absence de modification significative en peau psoriasique au sein de laquelle les taux de base sont élevés).

L’administration d’isotrétinoïne entraîne une augmentation des concentrations en CRABP2 au sein du sébocyte.

In vitro, l’ARTT augmente également très significativement les concentrations cellulaires en CRABP2. L’ARTT topique augmente l’expression cutanée des ARNm de CRABP2.

La signification de ces modifications n’est pas claire.

– Interaction avec le métabolisme des rétinoïdes naturels : l’acide rétinoïque et l’isotrétinoïne diminuent de manière très significative la transformation cutanée du ROL en 3-4 didéshydro-ROL (métabolite qui s’accumule dans certaines circonstances pathologiques), alors que l’acitrétine (rétinoïde aromatique) a peu d’effet sur cette transformation.

Action pharmacodynamique des rétinoïdes de synthèse :

A – ACTION SUR L’ÉPIDERME :

1- Épiderme normal :

La différenciation épidermique normale apparaît significativement modulée par les rétinoïdes de synthèse.

Cette modulation est en grande partie responsable des effets secondaires cutanéomuqueux observés en peau saine sous traitement par rétinoïdes de synthèse.

* À l’échelon moléculaire et cellulaire :

Sous rétinoïdes, la synthèse de kératines de type I, de haut poids moléculaire, caractéristiques des épithéliums kératinisants, entrant dans la synthèse des tonofilaments, est réduite au profit de celle de kératines de poids moléculaire plus faible, caractéristiques des épithéliums de type sécrétoire.

Les rétinoïdes induisent donc une sorte de métaplasie sécrétoire de l’épiderme.

Les rétinoïdes diminuent le contenu kératinocytaire total et altèrent le pattern de répartition avec induction de kératines foetales (K19-K13), habituellement non mises en évidence dans un épiderme normal.

Les rétinoïdes inhibent l’expression des transglutaminases et réduisent la synthèse des protéines d’enveloppe (filaggrine, involucrine).

L’acide rétinoïde inhibe l’expression des protéines constitutives du desmosome, fragilisant la cohésion kératinocytaire.

À forte dose, certains rétinoïdes induisent une labilisation des membranes lysosomiales qui est responsable de la libération enzymatique pouvant en partie expliquer certains effets secondaires.

Les rétinoïdes peuvent être des molécules intermédiaires dans les processus de glycosylation (transfert des monosaccharides) et modifier les glycoprotéines présentes à la surface cellulaire, impliquées dans les phénomènes d’adhérence cellulaire et de reconnaissance cellulaire, et ainsi influer sur la différenciation.

Les rétinoïdes entraînent enfin sur certaines cellules une augmentation du nombre des gap-junctions, particulièrement impliquées dans la communication intercellulaire, et donc de l’homéostasie.

* Au plan structural :

On note un épaississement initial du corps muqueux, un dépôt de substance mucoïde au sein des espaces intercellulaires, une hypergranulose, une diminution de l’épaisseur et de la cohésion du stratum corneum.

Ces modifications fragilisent l’épiderme et sont responsables d’une sècheresse cutanée, ainsi que d’un état desquamatif plus ou moins important.

Au plan ultrastructural, on note une réduction du nombre de tonofilaments, une diminution de la densité desmosomiale, une accumulation de substance d’allure mucoïde interkératinocytaire, une perte de cohésion intercornéocytaire.

2- Épidermes pathologiques :

Les rétinoïdes exercent une action pharmacologique complexe, qui aboutit à une modulation favorisant la différenciation et réduisant la multiplication cellulaire d’épidermes hyperprolifératifs (psoriasis, ichtyoses).

Les mécanismes responsables de cette modulation font très probablement intervenir en grande partie l’action régulatrice sur des gènes impliqués dans les phénomènes de prolifération et de différenciation.

À partir de la deuxième semaine de traitement, quelle que soit la pathologie traitée, l’observation d’une substance intercellulaire amorphe, mucoïde, apparaît comme le marqueur de l’action pharmacologique du rétinoïde.

Des signes de kératinisation normale (normalisation de l’agencement des tonofilaments, réapparition de granules de kératohyaline) sont observés dès la troisième semaine de traitement.

B – ACTION SUR LE DERME :

Les rétinoïdes stimulent la synthèse de transforming growth factor bêta, qui stimule la synthèse de collagène et de fibronectine par le fibroblaste.

In vitro cependant, l’action directe de l’acide rétinoïque est freinatrice sur la synthèse de collagène.

Les rétinoïdes inhibent la stimulation induite par les ultraviolets (UV) des métalloprotéinases, enzymes qui dégradent le collagène.

L’acide rétinoïque inhibe la production de vascular endothelial growth factor par le kératinocyte.

C – ACTION SUR LES MÉDIATEURS DE L’INFLAMMATION :

Les rétinoïdes possèdent des propriétés anti-inflammatoires.

Sur des modèles expérimentaux de macrophages de rats stimulés par des molécules pro-inflammatoires, l’isotrétinoïne inhibe la libération d’acide arachidonique.

L’acide rétinoïque et l’isotrétinoïne réduisent in vitro la synthèse des métabolites 20:4 de l’acide arachidonique (voie de la cyclooxygénase [prostaglandines]) et de la lipo-oxygénase (leucotriènes), par un mécanisme d’action encore mal connu.

L’acide rétinoïque inhibe la synthèse de prostaglandine E2.

Plusieurs travaux récents indiquent que les rétinoïdes inhibent la stimulation de synthèse de la cyclo-oxygénase 2 en réponse à l’action du phorbol myristate acétate.

Les rétinoïdes inhibent la synthèse et stimulent la dégradation de certains leucotriènes.

D – ACTION IMMUNOMODULATRICE :

Les résultats des travaux consacrés à cette question ne permettent pas d’effectuer une synthèse précise, en raison de méthodologies non standardisées et de conditions expérimentales très variables (nature des cellules in vitro, concentration de la molécule dans le milieu de culture, rétinoïde étudié).

Peu de travaux d’immunopharmacologie clinique sont disponibles dans la littérature concernant les rétinoïdes.

1- Action sur les polynucléaires neutrophiles :

La trétinoïne et l’isotrétinoïne inhibent la production d’anion superoxyde, la libération d’enzymes lysosomiales, la réponse chimioluminescente et le chimiotactisme des polynucléaires neutrophiles stimulés.

L’isotrétinoïne freine in vivo le chimiotactisme des polynucléaires neutrophiles à travers les barrières biologiques, telles que l’épiderme.

Ces propriétés expliquent très probablement l’action spectaculaire des rétinoïdes dans des dermatoses pustuleuses telles que l’acné ou le psoriasis pustuleux.

2- Action sur les lymphocytes :

In vitro, l’acide rétinoïque et l’acide 9-cis-rétinoïque induisent l’apoptose de lymphocytes T.

L’acide rétinoïque inhibe la production d’interféron (IFN) gamma mais stimule la synthèse des récepteurs membranaires à l’interleukine 2.

Les études ayant évalué in vitro l’action des rétinoïdes sur la prolifération lymphocytaire T en présence d’alloantigènes ou de mitogènes ont donné des résultats contradictoires, de même que celles ayant évalué l’action sur la stimulation ou l’inhibition des lymphocytes B.

3- Action sur les cellules néoplasiques :

Chez l’animal, la carence en vitamine A entraîne une métaplasie squameuse, précancéreuse, des muqueuses, ainsi qu’une susceptibilité accrue à certains carcinogènes.

À l’inverse, l’administration de rétinoïdes naturels a pu exercer un certain effet protecteur dans d’autres études expérimentales.

Les rétinoïdes constituent des molécules au profil pharmacodynamique intéressant en oncologie.

Ils possèdent une action antiproliférative et une action différenciante.

L’acide rétinoïque induit une différenciation des cellules de la lignée HL60 (leucémie promyélocytaire) qui retrouvent les caractéristiques fonctionnelles de granulocytes normaux. Cette action différenciante est potentialisée par l’interféron.

L’ARTT per os a donné des résultats nets dans le traitement de leucoses promyélocytaires humaines.

Cette activité différenciante a été également démontrée sur d’autres lignées néoplasiques (tératocarcinomes notamment).

Les mécanismes pharmacologiques à l’origine de cette action sont complexes et probablement plurifactoriels.

Il faut rappeler ici la modulation de l’expression de certains gènes impliqués dans la prolifération et la différenciation.

In vitro, l’action différenciante de l’acide rétinoïque sur certaines lignées cellulaires néoplasiques est corrélée à l’inhibition de l’expression de certains oncogènes, tels que c-myc.

Une action membranaire directe est également possible.

Les rétinoïdes modulent la glycosylation des glycoprotéines membranaires et pourraient ainsi modifier la structure de récepteurs membranaires impliqués dans la réponse aux facteurs de croissance.

Au cours de la transformation néoplasique, il a été observé une diminution du nombre des gap-junctions, communications intercellulaires particulièrement importantes dans le dialogue intercellulaire et l’homéostasie tissulaire.

Les rétinoïdes entraînent une augmentation significative du nombre des gapjunctions au sein des tissus néoplasiques.

In vitro, les rétinoïdes s’opposent à la transformation maligne causée par certains carcinogènes chimiques, des radiations ionisantes ou certains virus.

Bollag a développé un modèle de papillome induit de la souris ayant servi à calculer l’index thérapeutique des rétinoïdes de synthèse.

Les rétinoïdes ont montré un effet chimiopréventif dans l’induction et le développement de cancers variés sur plusieurs modèles animaux (cancer du sein chez le rat, cancer de la vessie chez la souris et le rat).

Les rétinoïdes exercent leur action chimiopréventive par une action antipromotrice : diminution de l’activité de l’ornitine décarboxylase intervenant dans la synthèse des polyamines, impliquées dans la prolifération et la différenciation cellulaires ; réduction de l’induction de cette enzyme par des promoteurs tumoraux tels que le phorbol myristate acétate ou l’huile de croton.

Certains arguments expérimentaux indiquent une action également inhibitrice dans la phase d’initiation de la carcinogenèse (particulièrement celle induite par les hydrocarbures).

L’acide rétinoïque inhibe la sensibilité de la protéine kinase C (calciumdépendante), intervenant dans les mécanisme de différenciation, à l’action de certains promoteurs.

L’acide rétinoïque, en synergie avec l’interféron, entraîne l’induction d’une apoptose sur certaines cellules néoplasiques.

Il est enfin probable que les propriétés immunomodulatrices complexes que possèdent les rétinoïdes interviennent pour partie dans cette action préventive sur la transformation néoplasique.

Utilisation thérapeutique des rétinoïdes de synthèse :

A – RÉTINOÏDES PAR VOIE GÉNÉRALE :

1- Isotrétinoïne (acide 13-cis-rétinoïque, Roaccutane) :

En 1976, la constatation d’un dessèchement cutané du visage chez des patients traités par isotrétinoïne pour des troubles de la kératinisation a conduit à évaluer l’intérêt de cette molécule dans la prise en charge de l’acné.

Dès 1979, son efficacité spectaculaire dans les formes sévères d’acné est rapportée.

L’isotrétinoïne par voie générale (Roaccutanet, gélules à 5 mg, 10 mg, 20 mg) est aujourd’hui l’antiacnéique majeur, qui a transformé le traitement des formes les plus sévères d’acné.

Son profil de toxicité rend nécessaires les règles de prescriptions rigoureuses et une surveillance stricte.

* Pharmacocinétique :

L’isotrétinoïne circule liée à plus de 99 % à l’albumine et n’est pas stockée au sein du tissu adipeux.

Après administration orale d’une dose unique, l’absorption digestive est rapide, le pic de concentration plasmatique s’observant entre 1 et 4 heures.

Il existe d’importantes variations interindividuelles.

L’absorption au cours d’un repas augmente significativement la biodisponibilité, et réduit la variabilité.

La biodisponibilité est en moyenne de 25 %. Au cours d’une administration quotidienne itérative, la cinétique reste linéaire, confirmant l’absence d’accumulation dans l’organisme.

L’état d’équilibre est atteint en environ 10 jours.

L’isotrétinoïne se métabolise en 4-oxo-isotrétinoïne.

La demi-vie d’élimination est de 13 à 22 heures pour l’isotrétinoïne, et de 29 heures pour la 4-oxoisotrétinoïne. L’élimination se fait principalement par voie biliaire.

* Mécanisme d’action :

Il est plurifactoriel, mais l’effet séboatrophiant et sébosuppresseur est largement au premier plan.

Des récepteurs nucléaires à l’acide rétinoïque ont été identifiés au sein des sébocytes.

L’injection sous-cutanée d’isotrétinoïne à des hamsters femelles entraîne une inhibition de la croissance androgéno-induite de l’organe du flanc (volumineuse glande sébacée), puis une atrophie de celle-ci, réversible à partir de la troisième semaine succédant à l’arrêt du traitement.

L’isotrétinoïne inhibe de façon dose-dépendante la prolifération des sébocytes en culture et réduit leur capacité de synthèse des lipides.

Chez l’acnéique traité par isotrétinoïne par voie générale, on observe une atrophie des glandes sébacées pouvant aller jusqu’à 90 % du volume initial, ainsi qu’une réduction très significative de la sécrétion sébacée, dose-dépendante (80 à 90 % après 12 à 16 semaines de traitement).

Cette action inhibitrice sur la glande sébacée est spécifique à l’isotrétinoïne.

À l’arrêt du traitement, cet effet est réversible mais avec une certaine rémanence.

L’isotrétinoïne diminue l’intensité du portage cutané en Propionibacterium acnes (effet probablement consécutif à l’action sébosuppressive) et en bacilles à Gram négatif.

L’isotrétinoïne réduit la cohésion entre les cornéocytes du canal d’excrétion du follicule pilosébacé (action anticomédogène favorisant l’excrétion sébacée).

L’isotrétinoïne possède une action anti-inflammatoire complexe (inhibition de synthèse des prostaglandines et du leucotriène B4).

L’isotrétinoïne exerce un effet freinateur significatif sur le chimiotactisme des polynucléaires activés, ainsi que sur la libération des radicaux libres oxygénés et d’enzymes lysosomiales.

L’isotrétinoïne ne présente pas d’action antiandrogénique, mais certains travaux récents suggèrent une action freinatrice sur la 5-alpha-réductase.

* Indications :

L’isotrétinoïne par voie générale est réservée au traitement des acnés nodulokystiques ou conglobata et aux acnés ayant résisté à un traitement classique d’au moins 3 mois (traitement antibiotique en association à des traitements locaux).

L’isotrétinoïne est sans effet bénéfique sur les kystes constitués, qui doivent faire l’objet d’une exérèse complémentaire.

L’acne fulminans n’est pas une bonne indication de traitement par isotrétinoïne en monothérapie.

Le traitement recommandé actuellement est la corticothérapie générale (0,5 à 1 mg/kg/j associée à l’isotrétinoïne à faible dose, graduellement augmentée, alors que la corticothérapie est diminuée progressivement dès amélioration significative).

* Posologie :

L’administration de l’isotrétinoïne se fait per os, au cours d’un repas, idéalement en une administration quotidienne.

La posologie doit être comprise entre 0,5 et 1 mg/kg/j en fonction de la sévérité des lésions, de la topographie (1 mg/kg/j en cas d’atteinte du tronc) et de la tolérance.

Cette posologie quotidienne peut être obtenue progressivement, afin de permettre une adaptation progressive à la survenue des effets secondaires cutanéomuqueux inéluctables.

Des posologies plus faibles, de l’ordre de 0,1 à 0,5 mg/kg/j peuvent être efficaces dans des formes d’intensité moyenne, mais exposent à des récidives plus fréquentes.

La dose totale cumulative optimale recommandée par cure (une cure étant la durée pendant laquelle le patient reçoit un traitement continu) est de 120 à 150 mg/kg.

Au-dessous de 100 mg/kg, il existe un risque élevé de récidive.

La chronologie de l’amélioration est la suivante : réduction de l’hyperséborrhée dès la première semaine, exacerbation transitoire des lésions inflammatoires et pustuleuses à la deuxième semaine, régression des lésions inflammatoires du visage à la quatrième semaine, régression des lésions inflammatoires du tronc entre la sixième et la huitième semaine.

Une amélioration de 50 % est obtenue en moyenne après 2 mois à la face et 3 mois au tronc.

Un blanchiment (à l’exception des lésions kystiques) s’observe dans la grande majorité des cas.

La présence de nombreux comédons fermés est le principal facteur d’échec.

Des aggravations paradoxales sévères peuvent survenir au début du traitement et peuvent être majeures, prenant parfois l’aspect d’acne fulminans, posant des difficultés thérapeutiques.

Les principaux facteurs prédisposants sont le sexe (masculin), le jeune âge et surtout l’aspect très rétentionnel avec nombreux comédons fermés.

Des récidives s’observent dans 10 à 40 % des cas.

Les facteurs de récidive sont les suivants : dose cumulée insuffisante, jeune âge, sévérité de l’acné, hyperandrogénie associée (à rechercher de principe chez la femme).

En cas de récidive, la nécessité de prescrire de nouveau de l’isotrétinoïne s’observe dans environ 25 % des cas.

La sensibilité de l’acné à une nouvelle cure d’isotrétinoïne est comparable à celle de la première cure.

Il ne semble pas y avoir d’échappement thérapeutique.

* Conduite du traitement :

Elle obéit à des règles strictes.

* Autres indications :

Elles ne sont pas incluses dans les indications reconnues par l’autorisation de mise sur le marché (AMM) de l’isotrétinoïne.

L’hidrosadénite ne répond pas ou que très partiellement à l’isotrétinoïne, même à fortes doses.

L’acné tétrade (association d’une suppuration axillaire et inguinale à une acné sévère du visage et du dos) peut être améliorée par l’isotrétinoïne dans certains cas.

Le traitement devra alors être prolongé.

La sébocystomatose est insensible à l’isotrétinoïne.

La cellulite disséquante du cuir chevelu (perifolliculitis capitis abcedens et suffodiens) accompagne souvent une acné conglobata ou une acné tétrade et résiste aux antibiotiques.

Une amélioration significative a été rapportée sous isotrétinoïne de manière anecdotique.

La rosacée, dans sa forme hyperplasique à prédominance masculine, bénéficie d’un traitement par isotrétinoïne.

Une posologie de 0,5 à 1 mg/kg /j pendant 4 à 6 mois permet de réduire le volume du rhinophyma.

L’isotrétinoïne peut également être utile dans le traitement des formes papulopustuleuses de rosacée, après échec de l’antibiothérapie.

La séborrhée fluente et la dermite séborrhéique majeure peuvent bénéficier de l’isotrétinoïne à des doses de l’ordre de 0,5 mg/kg/j.

Les folliculites à Gram négatif (compliquant parfois l’évolution d’acnés traitées par de longues cures d’antibiotiques) sont améliorées par l’isotrétinoïne.

L’isotrétinoïne a pu entraîner des effets bénéfiques dans des affections inflammatoires variées : sarcoïdose cutanée, granulome annulaire, lichen érosif.

2- Acitrétine (Soriatane) :

* Pharmacocinétique :

L’absorption digestive de l’acitrétine après administration orale présente une variabilité intra- et interindividuelle significative.

La prise d’acitrétine avec un bol alimentaire augmente les concentrations plasmatiques maximales de 70 %. La biodisponibilité moyenne de l’acitrétine est d’environ 60 %.

L’acitrétine circule liée à plus de 99 %, principalement à l’albumine.

De ce fait, sa distribution dans l’organisme est large.

L’acitrétine est le métabolite acide et actif de l’étrétinate (anciennement commercialisé sous le nom de Tigason).

Contrairement à l’étrétinate, il n’y a aucun argument qui indique que l’acitrétine s’accumule dans le tissu adipeux (lipophilie environ 50 fois plus faible).

Au cours d’une administration orale itérative, l’état d’équilibre est obtenu en 2 à 3 semaines.

La pharmacocinétique reste stationnaire à posologie constante et linéaire (Cmax proportionnelle à la dernière dose administrée), à doses variables.

Ces données indiquent clairement l’absence d’accumulation au cours du temps de l’acitrétine dans l’organisme. La demi-vie d’élimination de l’acitrétine est en moyenne de 55 à 60 heures, celle de son métabolite, le 13-cis-acitrétine, d’environ 90 heures en moyenne.

Moins de 1 mois après arrêt d’une administration quotidienne d’une durée de 2 à 7 mois, les concentrations plasmatiques d’acitrétine sont au-dessous d’un seuil de détection de 2 ng/mL.

L’acitrétine est éliminée de l’organisme par voie hépatique (glycuronidation) et par voie rénale (bêta-oxydation).

L’acitrétine est contre-indiquée en cas d’insuffisance rénale. Une excrétion dans le lait maternel ayant été démontrée, l’administration d’acitrétine est contre-indiquée chez la femme qui allaite.

Des études chez des volontaires et des patients psoriasiques ont montré que l’absorption concomitante d’acitrétine et d’alcool conduisait à la formation de quantités significatives d’étrétinate, confirmant in vivo des résultats obtenus sur microsomes hépatiques isolés (estérification de l’acitrétine en présence d’alcool).

En conséquence, en raison du profil d’élimination très lent de l’étrétinate (120 jours) et de la tératogénicité des rétinoïdes, la durée du maintien de la contraception après l’arrêt du traitement chez la femme en période d’activité génitale doit être la même que celle antérieurement recommandée pour l’étrétinate : 2 ans au moins.

* Indications. Résultats :

+ Psoriasis :

En monothérapie, le pourcentage de rémission est de l’ordre de 30 % et est principalement le fait des formes pustuleuses. Une amélioration très significative est notée dans environ 50 % des cas.

L’acitrétine est active principalement sur la composante pustuleuse et hyperkératosique, moyennement sur la composante érythémateuse.

Dans les premières semaines de traitement, et chez certains patients, une extension en surface peut survenir parallèlement à une amélioration des signes tels que l’érythème, l’épaisseur, la desquamation (flare up initial).

Chez l’adulte, seules les posologies supérieures ou égales à 25 mg/j sont plus efficaces que le placebo.

Des posologies quotidiennes supérieures à 40 mg/j ne semblent apporter aucun bénéfice supplémentaire par rapport à des posologies moyennes et sont responsables d’effets secondaires importants.

Une posologie de 30 mg/j permet d’obtenir une amélioration moyenne de plus de 60 % du psoriasis area and severity index (PASI) après 6 semaines de traitement.

Il est actuellement admis que la posologie moyenne efficace chez l’adulte est de 35 à 40 mg/j, en une prise quotidienne, idéalement à la fin du petit déjeuner.

Un schéma initial adoptant une posologie initialement faible (10 mg/j) progressivement croissante (30 puis 40 mg) par paliers de 2 semaines est celui qui permet la meilleure accoutumance à la survenue des effets secondaires cutanéomuqueux dose-dépendants et est donc recommandé.

Après 6 mois de traitement, l’amélioration moyenne du PASI est de 66 %.

Les meilleures indications de l’acitrétine en monothérapie sont les formes pustuleuses, généralisées ou localisées, les formes érythrodermiques, les formes à type de kératodermie palmoplantaire.

L’acitrétine n’est pas indiquée face à des formes localisées de psoriasis vulgaire, qui répondent en règle générale aux traitements topiques.

Les formes en plaques étendues répondent de manière satisfaisante mais souvent incomplète, principalement l’érythème qui persiste et nécessite des traitements associés.

L’acitrétine peut être associée de manière synergique avec la photothérapie ainsi qu’avec divers topiques (dermocorticoïdes, dérivés de synthèse de la vitamine D).

L’association acitrétine-PUVAthérapie est significativement plus efficace que la PUVA seule et permet de réduire les doses totales d’UV nécessaires au blanchiment (blanchiment dans plus de 90 % des cas).

L’association balnéoPUVA-acitrétine est efficace, de même que l’association acitrétine-PUVA localisée (formes pustuleuses palmoplantaires).

La même synergie a été rapportée avec les UVB (rémission dans près de 90 % des cas), avec le même effet d’épargne de l’acitrétine sur la dose totale d’UVB.

L’association de l’acitrétine aux dermocorticoïdes est efficace, particulièrement sur la composante érythémateuse, dans les formes en plaques ainsi qu’au cuir chevelu.

L’association acitrétine-calcipotriol (dérivé de synthèse de la vitamine D) a également été rapportée comme synergique, l’adjonction de calcipotriol permettant de diminuer la dose totale d’acitrétine.

L’association avec le méthotrexate est contre-indiquée en raison du risque d’hépatotoxicité potentielle ajouté.

L’acitrétine n’a qu’un effet suspensif et les récidives sont fréquentes à l’arrêt du traitement, avec une intensité variable selon les cas.

L’efficacité de l’acitrétine sur le rhumatisme psoriasique est significativement inférieure à celle du méthotrexate et de la ciclosporine.

+ Troubles de la kératinisation :

L’acitrétine a prouvé son efficacité dans la plupart des troubles héréditaires de la kératinisation : ichtyose vulgaire, syndrome de Papillon-Lefèvre, syndrome de Sjögren et Larsson, ichtyose lamellaire, kératodermies palmoplantaires, dysplasie ectodermique hidrotique, erythrokeratodermia variabilis (Mendez Da Costa), hamartome épidermique verruqueux.

Au cours de l’érythrodermie ichtyosiforme congénitale bulleuse, il est recommandé de débuter le traitement par des doses faibles afin d’éviter un phénomène d’exacerbation de la composante bulleuse.

Chez l’adulte, les posologies sont comparables à celles utilisées dans le traitement du psoriasis.

Chez l’enfant, la posologie moyenne efficace est de 0,5 mg/kg/j.

Dans tous les cas, les indications doivent être réservées aux formes sévères, en raison de la nécessité d’un traitement au long cours, source d’effets secondaires potentiels , particulièrement chez l’enfant.

Des traitements intermittents sont préférés dans la mesure du possible.

L’arrêt du traitement s’accompagne dans la plupart des cas de récidives.

Certaines observations ont rapporté la correction partielle des anomalies ultrastructurales caractérisant ces génodermatoses.

Dans la maladie de Darier, l’amélioration n’est pas constante et les anomalies ultrastructurales persistent malgré l’amélioration qui porte surtout sur la composante hyperkératosique.

Il est recommandé de débuter par une posologie faible, sous peine d’observer une exacerbation parfois érosive.

+ Dermatoses inflammatoires :

L’acitrétine a récemment obtenu une extension de l’AMM pour les formes sévères de lichen cutané.

Dans ces formes, une amélioration significative s’observe dans plus de 60 % des cas.

Une efficacité dans le traitement du lichen scléroatrophique vulvaire a été suggérée au terme d’une étude multicentrique randomisée.

Dans le lupus érythémateux discoïde, l’acitrétine présente une certaine efficacité sur l’hyperkératose et sur l’infiltration des lésions, moins nette sur l’érythème (amélioration significative dans un cas sur deux).

L’acitrétine s’est montrée efficace dans des observations anecdotiques de dermatoses diverses rares : pustulose sous-cornée (maladie de Sneddon et Wilkinson), folliculite pustuleuse à éosinophiles, syndrome de Fiessinger-Leroy-Reiter, hyperplasie angiolymphoïde avec éosinophilie, maladie de Cowden, épidermodysplasie verrucciforme, lichen niditus.

L’acitrétine ne bénéficie pas d’AMM dans ces indications.

3- Place des rétinoïdes de synthèse en thérapeutique anticancéreuse :

* Carcinomes cutanés :

L’intérêt des rétinoïdes par voie générale dans la prise en charge des carcinomes cutanés se place surtout en termes de prévention du développement de nouvelles lésions chez des patients présentant des pathologies (xeroderma pigmentosum, nævomatose basocellulaire, arsenicisme chronique, épithéliomatose familiale type Ferguson Smith), ou des terrains (immunodéprimés) favorisant la multiplication de carcinomes cutanés.

Les posologies doivent nécessairement être fortes, de l’ordre de 1 mg/kg/j.

L’utilisation de doses plus faibles n’a pas fait la preuve d’une efficacité.

L’arrêt du traitement entraîne la reprise évolutive, nécessitant une administration au long cours.

Les rétinoïdes aromatiques ont pu entraîner, dans certaines observations, une régression des lésions d’épidermodysplasie verrucciforme.

Chez ces patients, l’amélioration clinique a été corrélée à une augmentation de la densité en cellules de Langerhans au sein des lésions ainsi qu’à une amélioration des fonctions immunitaires.

Le portage viral (human papilloma virus 3 et 5) n’est pourtant pas éliminé totalement et les récidives sont rapides à l’arrêt du traitement.

L’ isotrétinoïne a été proposée dans le traitement des leucoplasies orales.

Quelques études récentes ont montré l’intérêt de l’acitrétine à doses moyennes, voire modérées, au long cours dans la réduction du développement de carcinomes cutanés chez des greffés rénaux traités par immunosuppresseurs.

* Lymphomes cutanés :

L’intérêt des rétinoïdes dans le traitement des lymphomes cutanés a été souligné par quelques auteurs, en monothérapie ou en association avec notamment l’IFN, cette association semblant moins efficace que l’association IFN–PUVA.

Les rétinoïdes ont encore une place qui reste à définir dans le traitement des lymphomes, compte tenu du faible nombre d’études publiées.

* Oncologie générale :

L’ARTT ou trétinoïne per os est un traitement efficace de la leucémie promyélocytaire humaine.

L’ARTT, in vitro, induit la différenciation de cellules de leucémie promyélocytaire humaine (M3 dans la classification franco-américano-britannique, associée à une translocation 15/17 et souvent compliquée de coagulation intravasculaire disséminée).

Ces données ont servi de rationnel à l’utilisation de l’ARTT per os dans le traitement de cette leucémie.

Des rémissions complètes ont été rapportées à la posologie de 45 mg/m2/j avec régression des signes de coagulation intravasculaire disséminée et disparition de la translocation 15/17.

Ces travaux ont mis en avant pour la première fois l’intérêt d’une approche « différenciante » en thérapeutique oncologique.

L’ ARTT per os a fait la preuve d’une certaine efficacité dans le traitement de la maladie de Kaposi liée au syndrome de l’immunodéficience humaine mais les données sont encore préliminaires.

Des études de phase I évaluent cette molécule dans le traitement des carcinomes de la tête et du cou.

4- Effets secondaires :

* Tératogénicité :

Les rétinoïdes sont hautement tératogènes.

Cet effet se produirait précocement au cours de l’embryogenèse, ne semble pas dosedépendant et conduit à des avortements spontanés ou à des malformations gravissimes.

Les rétinoïdes entraînent une suppression de la chondrogenèse et de l’épidermogenèse, des anomalies du développement (absence de fermeture du tube neural, fentes palatines), des malformations du système nerveux central (hydrocéphalie, microcéphalie), des malformations cardiaques (transposition des gros vaisseaux, tétralogie de Fallot), des arcs branchiaux, du thymus (ectopie, aplasie), du système craniofacial (anotie, microtie, hypoplasie des os de la face, micrognathie).

En conséquence, les rétinoïdes sont contre-indiqués chez la femme enceinte et il est impératif de s’assurer, chez la femme en période d’activité génitale, d’une contraception efficace 1 mois au moins avant le début du traitement, pendant toute la durée du traitement et, compte tenu des données pharmacocinétiques développées plus haut, 2 ans au moins après l’arrêt du traitement pour l’acitrétine, 1 mois pour l’isotrétinoïne (voir encadrés).

Il est indispensable de s’assurer d’un test de grossesse négatif moins de 3 jours avant le début du traitement, puis tous les mois.

Un contrôle est nécessaire 5 semaines après l’arrêt du traitement pour l’isotrétinoïne (Roaccutane) et régulièrement pendant les 2 ans de période postthérapeutique concernant l’acitrétine (Soriatane).

En raison des risques d’inefficacité de la contraception hormonale par inactivation, « la prise concomitante de contraceptifs hormonaux et d’inducteurs enzymatiques (barbituriques, phénytoïne, primidone, carbamazépine, rifampicine, griséofulvine…) est fortement déconseillée chez la femme en âge de procréer traitée par rétinoïdes » (Dictionnaire Vidal).

Enfin, le don de sang est contre-indiqué chez les patients traités par rétinoïdes.

Les mécanismes responsables de la tératogénicité sont mal connus, les travaux les plus récents impliquant préférentiellement certains récepteurs nucléaires.

* Effets secondaires cliniques :

+ Cutanéomuqueux :

Ils sont dose-dépendants et réversibles à la diminution des doses ou à l’arrêt du traitement.

Il sont inéluctables et traduisent l’imprégnation de l’organisme par la molécule. Leur absence peut faire douter de la prise effective du traitement.

Geiger et Czarnetzki, à propos de 518 observations de patients psoriasiques traités, compilées au cours de 12 études, ont défini leur nature et leur fréquence pour l’acitrétine :

– effets muqueux : cheilite (82 %), sécheresse buccale (30 %), stomatite (6 %), sécheresse nasale (34 %), épistaxis (1,7 %), sécheresse oculaire, conjonctivite (1,7 %) ;

– effets cutanéophanériens : xérose (30 %), desquamation palmoplantaire (26 %), desquamation cutanée (28 %), defluvium (20 %), prurit (16 %), fragilité unguéale (10 %), fragilité cutanée (5 %), peau collante (2,5 %).

Shalita a établi la même étude concernant l’isotrétinoïne : cheilite (50 à 100 %), xérose (20 %), prurit (15 %), irritation oculaire (75 %), épistaxis (50 %), fragilité cutanée (25 %), desquamation des doigts (36 %), defluvium (20 %), desquamation palmoplantaire (18 %).

Une hyperhidrose palmoplantaire a été rapportée dans moins de 10 % des cas.

Il existe clairement une notion de susceptibilité individuelle à la survenue de certains effets secondaires, tel le defluvium.

L’acitrétine, comme l’isotrétinoïne, augmentent l’adhésivité de Staphylococcus aureus aux cellules épithéliales et peuvent favoriser un portage microbien.

Certains effets sont propres à l’isotrétinoïne :

– le risque de photosensibilisation doit faire éviter l’utilisation d’isotrétinoïne pendant les périodes ensoleillées ;

– d’autres effets secondaires ont été rapportés de manière assez spécifique à l’isotrétinoïne :

– dermite faciale eczématiforme ;

– aspects à type d’eczéma craquelé des membres ;

– bourgeons charnus survenant en position péri-unguéale ou à l’emplacement d’anciennes lésions acnéiques ;

– des cicatrices chéloïdes ont été rapportées après dermabrasion chez des patients acnéiques antérieurement traités par isotrétinoïne.

+ Ostéoligamentaires :

L’hypervitaminose A entraîne une soudure prématurée des cartilages de conjugaison, des calcifications ligamentaires, une hyperostose périostée, une ostéoporose.

Ces anomalies ont été rapportées avec une fréquence et une intensité variables en fonction de la molécule, des posologies utilisées, de la durée du traitement.

Les calcifications ligamentaires peuvent intéresser le ligament vertébral antérieur, la membrane interosseuse des avant-bras, l’aponévrose plantaire (éperon calcanéen).

Au niveau du rachis, une ostéophytose vertébrale antérieure supérieure et inférieure, sans anomalies discales, peut être observée.

Des tableaux majeurs ont été rapportés avec des posologies très élevées, de l’ordre de 2 mg/kg/j, non utilisées actuellement.

Une progression des anomalies radiologiques (hyperostose squelettique idiopathique diffuse, syndesmophytes) a été observée dans 5 % des cas chez 241 patients psoriasiques traités par acitrétine pendant 1 à 2 ans.

Aucune calcification ligamentaire n’a été observée de manière prospective chez 16 patients traités par acitrétine pour des troubles de la kératinisation à des doses variant de 10 à 50 mg/j pendant une période de 7 à 12 mois.

Les risques d’ostéoporose sont diversement appréciés en fonction des études, peu nombreuses.

Les valeurs moyennes de densité minérale osseuse, comparées à celles des sujets contrôles, étaient significativement plus basses chez 15 patients traités depuis 2 ans ou plus par un rétinoïde aromatique (étrétinate).

Aucune différence n’a été notée dans cette étude avec l’isotrétinoïne.

À l’inverse, une diminution de la densité minérale osseuse a été rapportée sous isotrétinoïne.

Le risque ostéoporotique est probablement plus important sur certains terrains (traitement antérieur par corticoïdes, ménopause) et il existe une possible susceptibilité individuelle.

Le mécanisme d’action est inconnu mais ne passe pas par des troubles du métabolisme phosphocalcique.

Chez l’enfant, il convient de surveiller régulièrement l’évolution de la croissance et du développement osseux.

L’ensemble de ces effets secondaires étant probablement duréedépendant, il faut privilégier, dans des indications où des traitements par rétinoïdes au long cours sont nécessaires (ichtyoses notamment), des traitements séquentiels plutôt que des traitements continus.

+ Musculaires :

Des myalgies avec élévation des enzymes musculaires (créatine phosphokinase principalement) parfois importante, peuvent être observées, principalement avec l’isotrétinoïne, au décours d’un effort musculaire intense, qu’il faut donc déconseiller.

Ces anomalies sont réversibles.

+ Divers :

Ils sont rapportés avec une fréquence variable, relativement rares dans l’ensemble : asthénie, hypersudation, céphalées, dysesthésies, arthralgies, myalgies, nausées, anomalies de la vision crépusculaire, entéropathies inflammatoires.

Des tableaux d’hypertension intracrânienne ont été rapportés, principalement avec l’isotrétinoïne, surtout en cas d’association avec les cyclines (association contre-indiquée), de même que l’association acitrétine-cyclines.

Des syndromes dépressifs ont été rapportés, principalement avec l’isotrétinoïne.

* Effets secondaires biologiques :

+ Anomalies hépatiques :

Chez l’animal, l’administration de très fortes doses de vitamine A entraîne des anomalies du parenchyme hépatique : lésions mitochondriales, altérations lysosomiales, inclusions lipidiques au sein des cellules de Kupffer.

Dans les cas extrêmes (intoxication), une fibrose périsinusoïdale, une surcharge lipidique hépatocytaire et une sclérose veinulaire sont observées.

Une élévation discrète des transaminases s’observe dans 5 à 10% des cas des patients traités par rétinoïdes par voie générale.

Dans la plupart des cas, ces élévations sont modérées et la normalisation du bilan s’observe à l’arrêt du traitement.

Roenigk et al ont analysé les aspects microscopiques de ponctions-biopsies hépatiques effectuées avant traitement, puis après 2 ans de traitement par acitrétine (25 à 75 mg/j) chez 128 patients. Dans 59 % des cas, aucune modification n’a été observée.

Une amélioration des aspects histologiques a été notée dans 24 % des cas et une aggravation dans 17 % des cas.

Les auteurs concluent à une absence d’hépatotoxicité de l’acitrétine et à l’inutilité de pratiquer des biopsies hépatiques systématiques au cours du traitement.

Des hépatites sévères, certaines avec évolution cirrhogène, peuvent cependant s’observer, très rarement, et sont de nature probablement idiosyncrasique.

Il convient donc de s’assurer de la normalité du bilan hépatique avant traitement, puis tous les 15 jours au cours des 2 premiers mois, puis régulièrement pendant toute la durée du traitement (voir encadrés).

En cas d’anomalie, l’arrêt du traitement s’impose. Des anomalies du bilan hépatique sont une contreindication au traitement par rétinoïdes et il convient d’être prudent sur certains terrains (énolisme, obésité, polymédication).

+ Hyperlipidémies :

Des valeurs supérieures aux taux normaux de cholestérol et/ou de triglycérides sont observées dans 10 à 20 % des cas.

Ces augmentations sont en règle modérées et régressent après diminution de la posologie et avec régime alimentaire adapté.

Dans certains cas, un hypolipémiant est nécessaire.

Des élévations majeures, exposant au risque de pancréatite, ont été observés cependant.

On note chez certains une élévation significative du low density lipoprotein-cholesterol (athérogène) et une diminution du highdensity lipoprotein-cholesterol.

Les rétinoïdes modifient le métabolisme des lipoprotéines : augmentation significative de la synthèse des very low density proteins (véhiculant les triglycérides), diminution de leur élimination de la cirulation, diminution de l’activité de la lipoprotéine lipase musculaire, impliquée dans leur dégradation.

Il convient donc de s’assurer de la normalité du bilan lipidique avant traitement, puis 1 à 2 semaines après l’initiation du traitement, ensuite régulièrement pendant toute la durée du traitement (voir encadrés).

Une hyperlipidémie est une contreindication au traitement par rétinoïdes.

La question d’un risque athéromateux majoré par l’utilisation des rétinoïdes au long cours n’est pas résolue et il faut insister sur la nécessité de surveiller régulièrement les constantes du bilan lipidique en cas d’administration au long cours.

La surveillance doit être d’autant plus rapprochée que des facteurs de risque existent (obésité, énolisme, diabète, contraceptifs oestroprogestatifs, tabagisme).

+ Anomalies pancréatiques :

Un cas de pancréatite aiguë sévère révélée par un coma acidocétosique a été rapporté chez un patient traité par acitrétine.

5- Interactions médicamenteuses :

L’association des rétinoïdes est contre-indiquée avec toute molécule potentiellement hépatotoxique (en particulier le méthotrexate et les rétinoïdes naturels), avec les cyclines (risque d’hypertension intracrânienne).

Un cas d’interaction avec une pilule contraceptive progestative ayant été rapporté, ce type de contraception est contre-indiqué avec l’acitrétine.

L’acitrétine diminue la liaison de la phénytoïne aux protéines plasmatiques.

Il convient donc d’adapter les posologies de phénytoïne et de surveiller étroitement les patients.

L’acitrétine augmente la vitesse de décroissance de la glycémie chez les volontaires sains recevant du glibenclamide (Dictionnaire Vidal).

B – RÉTINOÏDES TOPIQUES :

Ils sont tous contre-indiqués chez la femme enceinte.

1- Acide rétinoïque (synonymes : vitamine A acide, trétinoïne) :

L’acide rétinoïque topique (ART) est disponible sous forme de gels, crèmes, ou tampons ou solutions, à la concentration de 0,025 %, 0,05 %, 0,1 %, 0,2 %, 0,3 % (ces trois dernières concentrations étant uniquement disponibles sous forme solution).

* Acné :

L’ART est utilisé avec succès depuis plusieurs années dans le traitement des acnés d’intensité modérée, principalement dans leur forme comédonienne.

L’action pharmacodynamique porte principalement sur un effet desquamatif au niveau de l’infrainfundibulum du follicule pilosébacé (effet desquamatif au niveau du bouchon corné, accélération du turnover cellulaire), mais un effet anti-inflammatoire local est également probable.

La concentration le plus couramment utilisée est 0,05 %.

L’ART doit être appliqué le soir sur les lésions.

Un effet irritatif initial est habituel, nécessitant l’association à des topiques émollients, et parfois l’espacement des applications ou l’utilisation d’une plus faible concentration.

Le bénéfice thérapeutique est obtenu en 4 mois en moyenne.

Des résultats satisfaisants ont été observés dans 70 à 80 % des cas.

L’association à d’autres topiques antiacnéiques est possible, notamment à l’érythromycine.

* Vieillissement cutané. Héliodermie :

+ Rationnel pharmacologique :

– Effets sur l’épiderme.

L’application d’ART élève l’index mitotique kératinocytaire et entraîne un épaississement de l’épiderme, aminci par le processus de vieillissement.

On note une stimulation des marqueurs de différenciation : activité de la transglutaminase, expression de l’involucrine.

La synthèse kératinocytaire de transforming growth factor (TGF) bêta stimulant la synthèse de collagène et de fibronectine par le fibroblaste est accrue.

Les rétinoïdes topiques stimulent donc la prolifération et la différenciation de l’épiderme vieillissant, de même que la synthèse par celui-ci de cytokines stimulant l’activité fibroblastique dermique sous-jacente.

– Effets sur le derme.

Collagène : l’ART stimule, in vivo, la synthèse du collagène dermique chez les souris hairless irradiées par les UVB.

Une augmentation significative des taux d’ARNm des collagènes I et III est observée dès la huitième semaine de traitement.

L’arrêt des applications s’accompagne d’une diminution progressive de cette néosynthèse de collagène.

Le mécanisme d’action repose probablement en grande partie sur la stimulation de la synthèse de TGF-bêta par le kératinocyte.

L’ART inhibe la stimulation UV-induite des métalloprotéinases dermoépidermiques (collagénase, gélatinase, stromelysine I) responsables de la dégradation du collagène dermique caractérisant l’héliodermie.

Élastine : l’accumulation d’un matériel élastosique dermique est l’un des éléments qui caractérisent la peau héliodermique.

L’ART inhibe la surexpression UV-induite du gène de l’élastine.

+ Utilisation thérapeutique : traitement de l’héliodermie

– Études chez l’animal.

L’application d’ART (0,05 %) chez la souris hairless irradiée par des UVB (modèle de Kligman reproduisant expérimentalement des modifications comparables à celles observées dans la peau humaine héliodermique) entraîne une réparation de ces altérations UVinduites : épaississement épidermique, apparition d’une couche granuleuse bien structurée, compaction du stratum corneum, réduction des nappes d’élastose dermique, constitution d’une zone sous-épidermique de collagène néoformé (accumulation de collagène III et de collagène VII).

– Essais chez l’homme.

L’étude princeps de Kligman (ART 0,05 % une fois par jour pendant 3 mois) a confirmé la réversibilité microscopique des altérations héliodermiques : épaississement épidermique, restauration d’un stratum granulosum et d’un stratum corneum compacts et homogènes, réversibilité des atypies kératinocytaires et des troubles de l’architecture épidermique, diminution de l’importance des masses élastosiques dermiques, augmentation du taux de collagène dermique superficiel.

Plusieurs études contrôlées ont confirmé le bénéfice clinique de l’ART.

Résultats d’ensemble (ART 0,05 % ou 0,1 % une application par jour pendant 6 mois) : l’ART apparaît dans toutes les études significativement supérieur à l’excipient ; amélioration significative chez 76 % des patients traités par ART versus 44 % seulement chez ceux ayant appliqué l’excipient.

– Chronologie de l’amélioration.

Les premiers bénéfices s’observent dès la fin de la première semaine de traitement : aspect plus rosé, plus lisse, plus brillant de la peau.

À 6 mois, les ridules sont moins profondes et l’épiderme est moins terne, moins rugueux. Aucun effet objectif n’est noté sur les rides profondes et la perte d’élasticité.

L’éclaircissement des macules hyperpigmentées n’est noté qu’avec la concentration de 0,1 % (traitement prolongé de 40 semaines, concentration non disponible sous forme de crème en France).

– Utilisation pratique.

La concentration à 0,05 %, possède le meilleur rapport efficacitétolérance.

Son utilisation est donc recommandée en traitement d’attaque, une fois par jour.

La concentration 0,025 % est indiquée en première intention pour les phototypes clairs (sensibles à l’effet irritant initial de l’ART ou en relais dans le cadre du traitement d’entretien).

L’effet bénéfique maximal est obtenu après 6 mois à 1 an d’application quotidienne.

Un plateau est ensuite noté, bien que dans certains cas, une amélioration puisse encore se poursuivre.

Dans de rares cas, l’amélioration objective peut ne débuter qu’après plusieurs mois.

Aucun phénomène d’échappement n’a été rapporté, même après plusieurs années de traitement.

Un traitement d’entretien adoptant trois applications par semaine est nécessaire, la réapparition progressive des signes d’héliodermie étant constante, sans phénomène de rebond, après arrêt du traitement.

– Évaluation microscopique.

Les modifications précoces (< 6 mois) s’observent au sein de l’épiderme : épaississement, compaction du stratum corneum, restauration d’une couche granuleuse, apparition d’un matériel mucineux caractéristique.

La densité en granules de mélanine est diminuée.

Les atypies kératinocytaires régressent. À ce stade, le derme n’apparaît pas modifié.

Les modifications plus tardives (1 à 4 ans) s’observent principalement au niveau du derme : apparition d’une zone sousépidermique riche en collagène néoformé (collagène I principalement) ; diminution des masses élastosiques.

En microscopie électronique, les fibroblastes présentent des signes d’activité métabolique.

Les fibres collagènes sont plus nombreuses et les faisceaux mieux agencés.

Les modifications épidermiques sont plus modérées par rapport à la phase précoce.

Les signes d’atypie et de dysplasie épidermique ont totalement régressé, avec restauration d’une polarité des kératinocytes.

La concentration en mélanine apparaît significativement réduite.

– Évaluation objective.

Les analyses profilométriques ont montré la réduction significative de la profondeur des ridules, ainsi qu’un aspect plus régulier de la surface épidermique.

Le flux cutané sanguin (études en laser-doppler vélocimétrie) est accru (densification du réseau microvasculaire dermique).

– Effets secondaires.

Ils sont dose-dépendants et ont tendance à s’atténuer avec le temps.

Leur intensité est en règle modérée, l’arrêt du traitement n’étant nécessaire que dans 5 % des cas.

Les phototypes clairs sont plus sensibles à la survenue de ces phénomènes.

Ces effets secondaires sont à type d’érythème, de desquamation, de sensation de brûlures superficielles, parfois de prurit.

L’espacement du rythme des applications et l’utilisation d’une concentration plus faible d’ART sont en règle bénéfiques, de même que l’association à des crèmes émollientes.

La tolérance au long cours est comparable à celle observée à court terme.

Compte tenu du caractère tératogène des rétinoïdes, l’ART est formellement contre-indiqué au cours de la grossesse.

On évite enfin d’appliquer l’ART en période ensoleillée (risque de photosensibilisation).

En pratique, le schéma initial du traitement dépend principalement du phototype et de l’intensité de l’héliodermie.

À titre indicatif, on peut proposer une concentration de 0,025 % (une application le soir pendant 1 mois) puis une concentration de 0,05 % (un soir sur deux pendant 1 mois puis tous les soirs jusqu’à 1 an de traitement) ; à l’issue de la première année, un espacement progressif avec maintien d’un traitement d’entretien à raison de une à trois applications par semaine de la concentration à 0,05 %.

On doit éviter les applications au niveau des lèvres, des commissures, des paupières (risque d’irritation majeure).

L’association à des écrans solaires le matin, renouvelés dans la journée en période ensoleillée, ainsi qu’à des crèmes hydratantes est recommandée.

Les topiques irritants sont évités, de même que les traitements photosensibilisants.

+ Vieillissement cutané intrinsèque :

Les travaux consacrés à la sénescence cutanée chronologique ou intrinsèque sont peu nombreux, mais montrent que l’ART entraîne des améliorations microscopiques significatives : épaississement épidermique, amélioration du réseau vasculaire dermique superficiel, augmentation du nombre des fibroblastes et de leur activité.

* Dermatoses diverses :

L’ART ou l’isotrétinoïne topique ont été proposés, de manière plus ou moins empirique, dans le traitement de dermatoses variées. Le petit nombre de publications, ainsi que leur caractère anecdotique, n’autorisent à aucune recommandation dans l’attente d’études plus structurées.

Citons pour mémoire le lichen buccal, les chéloïdes et cicatrices hypertrophiques, les hyperpigmentations mélaniques, les troubles de la kératinisation (maladie de Darier dans des formes très localisées), les verrues planes profuses, la kératose pilaire.

2- Autres rétinoïdes topiques :

* Isotrétinoïne (Isotrext, Roaccutane gel) :

L’isotrétinoïne (acide 13-cis-rétinoïque) topique possède une efficacité comparable à celle de l’ART dans le traitement de l’héliodermie (0,05 % et 0,1 %).

* Adapalène (Différine) :

L’adapalène est un nouveau rétinoïde appartenant à la classe des différines, agonistes des RAR-bêta et -gamma.

L’adapalène agit sur la prolifération et la différenciation kératinocytaire.

L’adapalène (gel à 0,1 %, une application quotidienne) est aussi efficace et mieux toléré que l’acide rétinoïque 0,025 % dans le traitement de l’acné d’intensité modérée.

L’acide rétinoïque à 0,05 % est moins bien toléré mais plus efficace que l’adapalène à 0,1 %, notamment sur la composante comédonienne.

* Rétinaldéhyde (Ysthéal) :

Le RAL est le métabolite intermédiaire entre le ROL et l’acide rétinoïque.

Comme l’ART, l’application de rétinaldéhyde sur la peau humaine entraîne une augmentation de l’épaisseur de l’épiderme et une stimulation de la différenciation du kératinocyte.

Le RAL topique a été évalué dans le traitement de l’héliodermie.

Le RAL (crème à 0,05 %) améliore la profondeur des ridules, les rougeurs et les télangiectasies, l’éclat cutané. Comme l’ART, son efficacité est significativement supérieure à l’excipient.

* Tazarotène (Zorac) :

Le tazarotène est un rétinoïde acétylénique agoniste des RAR.

Il s’agit d’une prodrogue transformée en acide tazaroténique au sein de la peau.

Utilisé par voie topique (Zoract gel, concentration à 0,05 % et à 0,1 %), il est indiqué dans les psoriasis n’excédant pas 10 % de la surface corporelle.

Le tazarotène appliqué sur un épiderme psoriasique réduit significativement l’hyperkératose, restaure une couche granuleuse et réduit l’hyperprolifération kératinocytaire par une inhibition de l’activité de l’ornithine décarboxylase qui régule la synthèse des polyamines, et par une réduction de l’expression des récepteurs kératinocytaires à l’epidermal growth factor.

Son mécanisme d’action est original puisque la liaison du tazarotène aux RAR active l’expression de trois gènes (tazarotene induced genes) intervenant dans la synthèse d’une molécule d’adhésion, d’un ligand soluble pour les récepteurs de surface et pour un suppresseur tumoral. Le tazarotène s’applique une fois par jour sur les lésions psoriasiques.

Son efficacité est significativement supérieure à celle de l’excipient sur la composante squameuse et infiltrée, mais est inférieure à celle des dermocorticoïdes sur la composante érythémateuse.

La rémanence de l’effet thérapeutique à l’arrêt du traitement semble supérieure à celle des dermocorticoïdes.

Des sensations de prurit et d’irritation s’observent dans 10 à 20 % des cas.

L’application sur le visage, le cuir chevelu et les organes génitaux est contre-indiquée (risque d’irritation importante).

Perspectives. Nouveaux rétinoïdes :

La découverte puis la caractérisation des récepteurs nucléaires aux rétinoïdes ont permis la mise en évidence de plusieurs agonistes sélectifs.

Le profil de liaison au(x) récepteur(s) et/ou aux hétérodimères permet une nouvelle définition des rétinoïdes.

Les relations structure-affinité sont de mieux en mieux étudiées et permettent de définir de façon plus précise les rôles physiologiques respectifs des récepteurs nucléaires.

Ainsi, les agonistes sélectifs RAR-bêta n’entraînent pas d’effet irritant.

Les agonistes RAR-alpha inhibent la croissance des cellules néoplasiques.

Les RAR-gamma seraient responsables des effets secondaires cutanés des rétinoïdes.

On conçoit ainsi qu’une optimisation des traitements rétinoïdes sera la conséquence du développement de ces nouvelles molécules sélectives, notamment en thérapeutique anticancéreuse.

Le bexarotène (LGD 1069, Targretin) est un agoniste sélectif des RXR-gamma.

Cette molécule est en cours d’évaluation dans le traitement des lymphomes cutanés.

Des études préliminaires ont également été conduites chez des patients atteints de néoplasies pulmonaires ou mammaires, en thérapeutique adjuvante.

L’acide 9-cis-rétinoïque (alitrétinoïne, Panretin) est un panagoniste RAR et RXR.

Une étude contrôlée a montré la supériorité du Panretint gel (0,1 %) par rapport à l’excipient dans le traitement topique des lésions cutanées de maladie de Kaposi de patients séropositifs pour le virus de l’immunodéficience humaine.

L’acide 9-cis-rétinoïque per os est en cours d’évaluation (phase I) en oncologie.

La fenrétidine est un rétinamide, puissant agent d’apoptose des cellules HL60 (lignées de leucémie) et possède également des propriétés antioxydantes.

Cette molécule possède également des propriétés apoptotiques sur des lignées de cellules lymphoïdes néoplasiques et des cellules carcinomateuses.

Le mécanisme d’action est encore imparfaitement connu avec une régulation de gènes probablement différents de ceux régulés par l’acide rétinoïque.

La fenrétidine induirait enfin moins d’effets secondaires que l’acide rétinoïque per os.

Les thiazolinediones sont des agonistes des RAR et du peroxisome proliferator activated receptor gamma.

Ces molécules possèdent in vitro un effet différenciant sur les lignées HL60.

Une étude ouverte a montré l’intérêt potentiel du troglitazone per os dans le traitement du psoriasis.

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