Pyoderma gangrenosum (pyodermite phagédénique)

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Introduction :

Le pyoderma gangrenosum (PG) est une maladie grave, qui inquiète d’autant plus qu’elle est mal connue.

Pyoderma gangrenosum (pyodermite phagédénique)Le diagnostic est souvent délicat, faute de signes spécifiques et pathognomoniques.

Sa rareté explique l’absence d’études contrôlées et de consensus, notamment sur l’attitude thérapeutique à adopter.

Pourtant, la morbidité et le retentissement psychologique importants du PG conduisent en général à la mise en place de traitements systémiques lourds et prolongés.

La physiopathologie est inconnue.

Le PG peut être aussi bien considéré comme une pathologie autonome que comme le signe clinique d’une maladie systémique associée.

Il peut encore apparaître comme une variante clinique d’un ensemble de pathologies cutanées et systémiques, qui constituent la maladie neutrophilique.

Ainsi, à l’heure actuelle, l’étude du PG consiste plus en une série d’interrogations qu’elle ne s’apparente à une liste de certitudes.

Toutefois, à partir de nombreuses observations rapportées dans la littérature médicale, la connaissance de cette pathologie s’est considérablement étendue depuis les cas princeps, décrits au début du XXe siècle.

Dans ce chapitre, nous essayons donc de résumer les connaissances acquises au cours du siècle.

Le PG est a priori considéré ici comme une pathologie autonome, bien que ce point de vue puisse être discuté.

Historique :

Le PG a été décrit pour la première fois en 1908 par Brocq sous le nom de « phagédénisme géométrique ».

La lésion ulcéreuse observée chez 14 patients était présentée comme suit : « Tuméfaction des téguments au niveau du bord ; aréole rouge périphérique ; crête culminante linéaire (comme tracée au compas) ; en dedans de laquelle se trouve l’ulcération taillée à pic, en falaise plus ou moins abrupte ; cette falaise porte dans ses parois de petits abcès miliaires formant cavernules. »

Les ulcères évoluaient de manière centrifuge. Les examens bactériologiques étaient non spécifiques et l’histologie montrait un infiltrat à polynucléaires neutrophiles.

Les auteurs émettaient l’hypothèse pathogénique d’un processus spécial dû à une infection microbienne locale, non syphilitique, surajoutée le plus souvent à un autre processus morbide primitif.

Plus tard, en 1930, Brunsting et al ont décrit le même type d’ulcération chez cinq patients, dont quatre atteints d’une rectocolite hémorragique.

Dans ces quatre cas, les poussées de PG étaient rythmées par les poussées digestives.

Le patient restant souffrait d’une pleurésie purulente chronique.

Les auteurs ont dénommé la lésion cutanée « pyoderma gangrenosum », car ils croyaient à une origine infectieuse streptococcique et staphylococcique. D’autres auteurs l’ont encore appelé « pyodermite phagédénique », « phagedena geometrica » ou « dermatitis ulcerosa ».

Épidémiologie :

L’incidence exacte du PG n’est pas connue.

À la Mayo Clinic (États- Unis), plus de 180 cas de PG ont été vus sur une période de 53 ans.

D’autres auteurs ont noté 15 cas de consultation pour PG sur une période de 10 ans dans un centre de dermatologie prenant en charge une population de 0,5 million de personnes.

En 1997, Von den Driesch estime l’incidence du PG a au moins deux cas/an/106 personnes.

Selon notre expérience, l’incidence retrouvée est de 1,4 nouveau cas de PG pour 374 000 consultants par an (1/270 000).

Cela tend à montrer qu’il s’agit d’une maladie rare, mais non exceptionnelle.

Le sex-ratio varie de une à trois femme(s) pour un homme.

C’est une maladie de l’adulte, avec une moyenne d’âge de début du PG autour de 45 ans (l’âge de début s’échelonnant habituellement entre 25 et 54 ans).

Sur les 180 cas recensés à la Mayo Clinic, 4 % des patients ont moins de 15 ans.

Le plus jeune patient rapporté, atteint de PG dans le cadre d’une hypogammaglobulinémie congénitale, était âgé de 6 semaines.

L’origine ethnique des patients est sans incidence.

Physiopathologie :

Celle du PG reste inconnue.

De multiples hypothèses sont évoquées, les unes en rapport avec une anomalie extrinsèque des polynucléaires neutrophiles (PNN), alors que d’autres penchent pour une anomalie intrinsèque des PNN.

A – HYPOTHÈSES ÉVOQUANT DES ANOMALIES EXTRINSÈQUES DES POLYNUCLÉAIRES NEUTROPHILES :

Une des premières hypothèses reposait sur le principe de l’antigénicité croisée.

Des anticorps dirigés contre des agents infectieux, en particulier intestinaux, se fixeraient à des structures physiologiques cutanées et entraîneraient ainsi la destruction tissulaire.

En 1982, chez une patiente atteinte d’un PG récalcitrant et présentant une anergie aux intradermoréactions à sept antigènes différents (streptokinase/streptodornase, Candida albicans, tuberculine, coccidioïdine…), Greenberg et al ont mis en évidence des anomalies de l’immunité cellulaire des cellules mononucléées circulantes du sang médiées par un facteur sérologique circulant thermorésistant.

Le facteur sérologique circulant isolé, capable d’inhiber la fonction lymphocytaire des sujets sains in vitro, serait comparable au facteur immunosuppresseur plasmatique thermorésistant retrouvé chez des patients atteints de sarcoïdose et ayant une anergie aux tests antigéniques intradermiques.

Le dysfonctionnement de l’immunité cellulaire pourrait conduire à une activation non spécifique des cellules inflammatoires ou à un déséquilibre de la suppression physiologique immunitaire (défaut de production du facteur inhibiteur des leucocytes), à l’origine d’une autoagression pouvant provoquer les lésions cutanées de PG.

Dans le syndrome du streaking leukocyte factor (se caractérisant par des PG récidivants, des arthrites purulentes aseptiques et des abcès stériles), le facteur sérologique, éventuellement à l’origine du syndrome, est une protéine mutante qui, in vitro, augmente la motilité des PNN et des monocytes humains purifiés.

Finalement, l’implication de l’interleukine 8 (IL 8) dans la physiopathologie du PG, par le biais du chimiotactisme des PNN, a été évoquée par Oka et al.

D’abord, la surexpression de IL 8 a été notée dans des ulcères de PG.

Ultérieurement, pour conforter cette hypothèse, un adénovirus recombinant contenant le gène de l’IL 8 humain a été injecté dans des souris immunodéprimées (souris knock-out) porteuses d’un greffon de peau humaine.

Douze heures après l’injection de l’adénovirus recombinant, une accumulation de PNN en dessous de l’épiderme a été observée, induisant une nécrose, puis un ulcère du greffon cutané humain ressemblant cliniquement et histologiquement à un PG.

L’ulcère guérissait spontanément au bout de 2 semaines.

B – HYPOTHÈSES ÉVOQUANT DES ANOMALIES INTRINSÈQUES DES POLYNUCLÉAIRES NEUTROPHILES :

Un dysfonctionnement cellulaire intéressant la motilité et la phagocytose des PNN a été évoqué.

En 1982, Bentley-Phillips et al ont noté une anomalie de la phagocytose (mais non pas de la digestion intracellulaire) des PNN circulants chez un sujet atteint de PG.

Cette anomalie de la phagocytose s’observait seulement envers certains micro-organismes, notamment Escherichia coli.

In vivo comme in vitro, les corticoïdes restauraient la phagocytose des PNN, ce qui a été observé à un moindre degré avec le lévamisole et la clofazimine.

Récemment, plusieurs publications ont mis en évidence un trouble de la dynamique cellulaire.

Ainsi, un cas de PG chez une fillette avec un déficit congénital en b2-intégrine a été rapporté.

La b2- intégrine (CD11a/CD18), molécule d’adhésion impliquée dans le mouvement cellulaire, faisait complètement défaut à la surface des PNN.

L’étude de la dynamique cellulaire des PNN chez deux sujets présentant une forme chronique de PG idiopathique suggère que le PG est une « maladie dynamique », définie par la présence d’anomalies transitoires. Shaya et Adachi (appartenant à la même équipe) suggèrent que les PNN présentent une oscillation métabolique anarchique des récepteurs membranaires, en particulier les b2-intégrines.

L’oscillation métabolique est impliquée dans le mouvement cellulaire.

L’oscillation d’une cellule normale en mouvement est sinusoïdale et évolue par cycles de 20 secondes. Dans le cas de PG décrit par Shaya et al, l’importance du rôle des tyrosines kinases des PNN dans la physiopathologie du PG est soulignée.

Ils notent la présence de PNN présentant une oscillation métabolique des récepteurs en forme de « dents de scie » plus rapide (cycle de 10 secondes).

Cette même anomalie peut être reproduite in vitro sur des PNN de sujets normaux mis en présence d’inhibiteurs des kinases.

Les auteurs évoquent l’hypothèse que l’anomalie d’oscillation pourrait être en rapport avec une activité anormale des kinases associées aux intégrines, celle-ci pouvant être contrebalancée par la diminution de l’activité des phosphatases (enzymes intervenant sur le niveau de phosphorylation des kinases).

Ainsi, à l’exposition des PNN de la patiente atteinte de PG à un inhibiteur des phosphatases, la pervanadate (en traitement local), l’oscillation redevient sinusoïdale avec un cycle de 20 secondes, suggérant un retour à la normale de l’interaction des récepteurs.

Finalement, les auteurs suggèrent qu’une mutation affectant la cinétique des protéines intracellulaires de signalement associées (notamment les kinases) peut être responsable de la lésion cutanée.

Peu de temps après, Adachi et al ont rapporté que les PNN d’un autre patient atteint de PG surexprimaient et agglomèraient les intégrines leucocytaires, ce qui entraînait une interaction inappropriée avec leurs ligands.

Cette agglomération des récepteurs a pu être empêchée par un sucre de grande affinité pour ces récepteurs, le NADG (N-acétyl-D-glucosamine).

Par ailleurs, les auteurs ont constaté un niveau de phosphorylation élevé de la tyrosine.

Ils soulèvent la possibilité d’une mutation thermodépendante des récepteurs leucocytaires ou des protéines intracellulaires, les tyrosines kinases.

Ces protéines sousmembranaires sont associées aux récepteurs leucocytaires et jouent un rôle important dans le cheminement transmembranaire des informations.

Cette anomalie a pu être contrecarrée par une baisse de la température ambiante à 33 °C.

Ainsi, les PNN du patient atteint de PG montrent des altérations dans l’agglomération des récepteurs membranaires (les intégrines), dans l’interaction entre les différents récepteurs et dans le signalement transmembranaire.

Des nouvelles voies thérapeutiques peuvent se dégager de ces observations.

Ces travaux, réalisés dans tous les cas à partir d’observations uniques, doivent être considérés comme des approches préliminaires à confirmer par des études ultérieures contrôlées.

Néanmoins, ils permettent de penser que la physiopathologie du PG est hétérogène et qu’elle peut être différente selon la présence ou l’absence d’une maladie interne associée et selon son type.

Clinique :

A – FORMES CLINIQUES :

Quatre formes cliniques de PG cutané ont été décrites : la forme ulcéreuse classique, la forme pustuleuse, la forme bulleuse et la forme superficielle granulomateuse ou végétante.

Le PG se caractérise par un phénomène de pathergie.

Selon les différentes séries rapportées, ce phénomène est retrouvé dans 10 à 39 % des cas.

Il peut survenir après des traumatismes d’intensité variable qui vont de la piqûre d’insecte à l’intervention chirurgicale.

La survenue du PG sur des lésions inflammatoires préexistantes de la peau n’a pas été démontrée.

1- PG ulcéreux :

Il s’agit de la forme clinique la plus fréquente et la première individualisée.

La lésion initiale peut être un nodule, une grosse pustule ou plusieurs petites pustules entourées d’un halo inflammatoire.

Les lésions élémentaires débutantes sont souvent douloureuses.

Une nécrose se développe secondairement en leur centre pour donner un ou plusieurs ulcères.

L’ulcération, d’abord superficielle, se caractérise par une extension centrifuge, s’accroissant de façon serpigineuse, brutalement limitée par un bourrelet comme tracé au compas de couleur bleu violacé.

Les bords circulaires sont inflammatoires et fermes.

L’ulcère, en général douloureux, est creusé de clapiers pustuleux.

Il est entouré d’un large halo érythémateux (parfois jusqu’à 2 cm).

La guérison spontanée ou sous traitement de la lésion se termine par une cicatrice cribriforme inesthétique et laisse une alopécie cicatricielle sur le cuir chevelu.

Les ulcérations sont uniques ou multiples.

Les localisations préférentielles sont les membres inférieurs (75 à 80 %) et le tronc (2 à 36 %), bien que tout le tégument puisse être atteint : la tête et le cou (3,5 à 24 %), les membres supérieurs (2 à 14 %) dont les mains, la verge, le scrotum et la vulve, les yeux (sclérite, kératite ulcéreuse).

Au sein du PG ulcéreux, on distingue :

– le PG à localisation céphalique encore appelé « pyoderma malin » a été décrit pour la première fois en 1968 par Perry et al.

Il s’agit de lésions ulcérées du visage (préauriculaires) et du cou (nuque).

Cette forme se différencie cliniquement du PG ulcéreux classique par l’âge de son apparition chez des patients plus jeunes, l’absence d’érythème inflammatoire périulcéreux et d’infiltration du bord de l’ulcère, l’absence de maladie associée et le caractère rapidement progressif, agressif et potentiellement létal.

Depuis, de nombreux auteurs se sont accordés pour dire qu’il s’agissait plutôt d’un PG ulcéreux à localisation céphalique malgré certaines atypies.

Le caractère agressif et l’évolution péjorative n’ont pas pu être confirmés par d’autres observations.

Par ailleurs, certaines équipes ont fait un rapprochement entre pyoderma malin et maladie de Wegener, car ces deux pathologies leur semblent être fréquemment associées.

Le pyoderma malin pourrait être ainsi une forme topographique de PG ou une expression clinique de la maladie de Wegener.

– le PG péristomial : cette localisation, souvent méconnue, est rare. Une quarantaine de cas seulement ont été rapportés.

Le PG survient sur le versant cutané de la stomie chez des patients opérés pour une maladie inflammatoire chronique intestinale (MICI) et plus particulièrement chez les patients atteints d’une maladie de Crohn (MC).

2- PG pustuleux :

Forme abortive de PG, la pustule initiale n’évolue pas vers un ulcère.

Le début est caractérisé par une papule érythémateuse évoluant en pustule en 24 à 48 heures.

Les pustules, d’une taille de 0,5 à 2 cm, généralement douloureuses, sont entourées d’un halo inflammatoire et surviennent fréquemment lors d’une poussée sévère de MICI, notamment lors d’une rectocolite hémorragique (RCH).

Elles peuvent siéger sur tout le tégument, avec une préférence pour les faces d’extension des extrémités et le haut du tronc.

Cette forme peut être associée à des ulcères typiques.

Au sein de la forme pustuleuse, on distingue la pyostomatite végétante : elle a été décrite comme associée à des MICI, le plus souvent à une RCH.

À côté des lésions pustuleuses multiples de la muqueuse, surtout buccale, qui peuvent évoluer vers des lésions papillomateuses, elle produit dans plus de 50 % des cas des lésions cutanées.

La question de savoir s’il s’agit d’une authentique lésion de PG, d’une dermatose neutrophilique ou d’une localisation de la MICI au niveau de la muqueuse buccale reste discutée.

3- PG bulleux :

Individualisé en 1972 par Perry et Winkelmann, la lésion initiale est une vésiculopustule.

Elle évolue ensuite vers un ulcère superficiel à base mucopurulente et moins destructif que les PG ulcéreux.

Des bulles flasques se disposent au niveau des bords cyanosés.

La bulle s’étend de manière centrifuge et progresse sur l’érythème inflammatoire périlésionnel qui est plus important que dans le PG classique, pouvant atteindre une largeur de 4 cm.

Les membres supérieurs constituent la localisation préférentielle de cette forme de PG.

L’âge moyen de début est plus tardif que dans la forme classique (52,2 ans).

Cette forme semble être plus souvent associée aux leucémies et autres maladies myéloprolifératives.

4- PG superficiel granulomateux ou végétant :

Cette ulcération, souvent solitaire, est plus superficielle, à base non purulente.

Les bords sont moins violacés, moins infiltrés et l’extension est moins rapide.

Des lésions exophytiques et végétantes se développent ultérieurement.

Elle a été décrite chez l’adulte sur le tronc.

Cette forme, de bon pronostic, n’est le plus souvent associée à aucune maladie et répond rapidement à des thérapies moins agressives que les corticoïdes ou les immunosuppresseurs.

B – SIGNES D’ACCOMPAGNEMENT :

1- Signes cliniques généraux :

Deux extrêmes et leurs intermédiaires peuvent être observés, allant d’un état général parfaitement conservé à une altération de l’état général avec fièvre.

Aucune adénopathie ni lymphangite n’ont été rapportées en l’absence de surinfection.

2- Signes biologiques :

À ce jour, aucune anomalie biologique spécifique au PG n’a pu être démontrée.

Dans certains cas, une hyperleucocytose à PNN a pu être notée.

Il est alors difficile de savoir si elle est liée directement au PG (comme on peut le noter dans le syndrome de Sweet) ou si elle est apparue à la suite d’une surinfection.

L’existence d’un lien entre la présence anormale d’anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA) et le PG n’a pas pu être établie.

C – ÉVOLUTION :

Le PG connaît une évolution chronique par poussées intermittentes.

Au cours d’une vie, le nombre total des poussées est variable d’un individu à l’autre.

Il peut se limiter à une poussée unique ou, au contraire, avoir un caractère agressif et récalcitrant nécessitant un traitement au long cours.

L’évolution naturelle de la poussée cutanée se caractérise par une régression spontanée tardive et très lente.

La vitesse de régression varie en fonction du type de PG (les formes bulleuse et végétante superficielle semblent guérir dans un délai plus court), d’un individu à l’autre et d’une poussée à l’autre.

Bennett a pu observer une rémission complète du PG classique à 11,5 mois (± 11,1 mois) et, pour la forme bulleuse, à 9 mois (± 13,7 mois).

Après 1 an d’évolution, 69 % des PG présentent une rémission complète.

Dans les 6 premiers mois d’évolution, 68 % de ces cas de rémission atteignent la guérison complète des lésions.

Au terme de 3 ans d’évolution, les cas de rémission représentent 95 %.

Une maladie très active, réfractaire, nécessitant plusieurs traitements différents, s’observe chez 5,8 % des patients.

Le décès est rarement lié directement à la pathologie cutanée.

Il survient souvent à la suite de traitements lourds et prolongés, indiqués dans certaines formes très invalidantes et après des septicémies à point de départ cutané, favorisées par l’immunosuppression induite par les médicaments.

Dans un nombre de cas non négligeable, il est dû à la maladie associée.

Dermatoses neutrophiliques et maladie neutrophilique :

Le PG est considéré comme une dermatose neutrophilique caractérisée par un infiltrat épidermique et/ou dermique à PNN en l’absence de cause détectable, notamment infectieuse.

Au nombre des dermatoses neutrophiliques sont comptées : la pustulose souscornée de Sneddon-Wilkinson, le syndrome de Sweet, l’erythema elevatum diutinium, la dermatose neutrophilique à immunoglobuline A (IgA) intraépidermique et l’hidradénite eccrine neutrophilique.

Le concept de dermatoses neutrophiliques est d’autant plus fondé qu’il semble exister des formes de passage entre ces maladies cutanées (PG bulleux et pustuleux, syndrome de Sweet bulleux et ulcéré, erythema elevatum diutinium bulleux et ulcéré…).

L’association de plusieurs de ces pathologies cutanées entre elles a été observée chez un même patient.

Par ailleurs, les dermatoses neutrophiliques sont associées en général aux mêmes maladies systémiques, notamment les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin et certaines hémopathies myéloïdes, bien qu’il existe certaines associations préférentielles.

Diverses localisations neutrophiliques systémiques ont été rapportées, parmi lesquelles les localisations pulmonaires sont les plus fréquentes.

À côté des abcès aseptiques souscutanés récemment observés, des abcès profonds aseptiques, disséminés ou isolés, de la rate, du foie, du pancréas, des ganglions profonds, du cerveau, de la plèvre, de l’aorte et des muscles striés ont été rapportés, en association avec le PG et les autres dermatoses neutrophiliques, à l’origine du concept de maladie neutrophilique.

Maladies associées :

La fréquence des PG associés à une maladie systémique diffère d’une étude à l’autre.

Actuellement, on estime que 50 % à 78 % des patients atteints de PG souffrent d’une maladie interne associée.

Ces disparités s’expliquent en partie parce que les différents auteurs définissent de façon arbitraire les maladies systémiques associées.

L’association de certaines de ces maladies n’est probablement que fortuite, surtout dans le cadre de maladies fréquentes.

Par ailleurs, la différence de prévalence pour chaque type de maladie associée peut être liée à un biais de recrutement des services de spécialités de proximité.

Le PG peut précéder (rarement), suivre ou apparaître en même temps que le début de la maladie associée.

La symptomatologie de la maladie cutanée et celle de la maladie associée évoluent indépendamment l’une de l’autre.

Trois grands groupes de pathologies associées semblent se dégager : les maladies hépato-gastro-intestinales, les maladies rhumatismales et, enfin, les maladies hématologiques.

A – MALADIES HÉPATO-GASTRO-INTESTINALES :

Entre 14 et 36 % de PG sont associés à une MICI (c’est-à-dire de 25 à 44 % des patients atteints de PG associé à une maladie systémique).

Parmi les patients atteints de PG associé à une MICI, 50 à 55 % sont des RCH et 45 à 50 % des MC.

Inversement, 0,5 à 5 % des patients atteints de MICI développent un PG.

Une étude a montré que les patients atteints de RCH développeraient dans 0,48 % des cas un PG, tandis que ceux atteints de MC développeraient un PG seulement dans 0,33 % des cas.

La forme pustuleuse de PG semble être plus fréquemment associée aux MICI, notamment à la RCH.

Les poussées de PG et de la MICI ne sont pas nécessairement concomitantes et l’apparition du PG ne coïncide pas dans tous les cas avec une exacerbation de la MICI.

Il ne semble pas exister de parallélisme entre la sévérité de l’atteinte intestinale et celle de la maladie cutanée.

La survenue d’un PG chez les patients atteints d’une MICI ne paraît pas prédisposer à long terme à une forme évolutive péjorative de la MICI.

Par ailleurs, en l’absence de signes digestifs évocateurs de MICI, le diagnostic de PG n’implique pas la recherche systématique de ces pathologies digestives.

B – MALADIES RHUMATISMALES :

Les atteintes articulaires observées au cours du PG sont nombreuses et variées.

Il peut s’agir :

– d’arthralgies ou polyarthralgies transitoires ;

– d’une arthrite « spécifique » du PG, notamment la polyarthrite progressive chronique séronégative ;

– d’une maladie articulaire autonome comme la polyarthrite rhumatoïde et la spondylarthrite ankylosante ;

– d’une « colitis arthritis », monoarthrite aseptique initialement décrite dans les colites inflammatoires, notamment lorsqu’elle sont associées à un PG, mais aussi en dehors du contexte d’une MICI ;

– d’un rhumatisme axial et/ou périphérique survenant parfois en association avec une acné sévère (acné conglobata, syndrome synovite-acné-pustulose-hyperostose-ostéite (SAPHO), pyogenic sterile arthritis-pyoderma gangrenosum-acne (PAPA) syndrome) et une hidradénite suppurée.

Entre 11 et 37 % des patients avec un PG (c’est-à-dire de 21 à 48 % des patients atteints de PG associé à une maladie interne) présentent une maladie articulaire.

L’atteinte le plus fréquemment retrouvée est une monoarthrite séronégative d’une des grosses articulations.

Les changements radiologiques sont alors inhabituels.

Le syndrome PAPA a été décrit en 1997 par l’équipe de la Mayo Clinic.

Il se caractérise par la triade clinique arthrite pyogène stérile, PG et acné sévère, et peut atteindre plusieurs membres d’une même famille.

Il semble que ce syndrome soit dû à une anomalie génétique à transmission autosomique dominante.

La nature de cette altération n’est pas connue.

La réalité de cette entité demande à être confirmée.

C – MALADIES HÉMATOLOGIQUES :

Environ 10 % des patients avec un PG (ou 13 % des patients associant un PG et une maladie associée) présentent une gammapathie monoclonale.

La plupart du temps, elle est de type IgA et reste bénigne. La transformation en myélome est très rare.

Des maladies hématologiques malignes sont retrouvées dans 7,2 % des cas de PG.

Il s’agit le plus souvent d’une leucémie myéloïde aiguë ou chronique chez l’adulte et chez l’enfant.

Ici, la forme bulleuse ou des formes de passage avec le syndrome de Sweet semblent être les plus fréquentes (54 % des PG rapportés en association avec une leucémie) et 25 % des patients meurent dans les 12 mois suivant l’apparition des signes cutanés.

Toutes confondues, bénignes et malignes, les hématopathies atteignent plus volontiers les hommes (six hommes/trois femmes) et surviennent à un âge plus avancé (moyenne d’âge de survenue : 65 ans).

D – AUTRES MALADIES ASSOCIÉES :

Il s’agit d’associations plus rares dont le caractère fortuit n’est pas exclu. Néanmoins, la rareté même de ces maladies laisse supposer leur association directe au PG.

Il faut ici citer la maladie de Behçet, certaines vascularites systémiques comme la maladie de Wegener et la maladie de Takayasu (association fréquente au Japon), la polychondrite chronique atrophiante, la sarcoïdose (deux patients sur 86), le lupus érythémateux systémique…

Pyoderma gangrenosum iatrogénique :

Quelques cas de PG consécutifs à l’administration sous-cutanée de granulocyte-colony stimulating factor (G-CSF) (dont un cas en association avec de la cytosine arabinoside et de l’aclarubicine), de granulocyte macrophage-colony stimulating factor (GM-CSF), d’érythropoïétine (EPO) et d’interféron alpha-2b (IFNa-2b) ont été rapportés.

L’origine médicamenteuse du PG dans ces observations est incertaine.

Il semble difficile de trancher entre un PG induit par la molécule pharmacologique, un phénomène de pathergie au lieu des injections sous-cutanées et/ou un PG en rapport avec la maladie associée pour laquelle le médicament a été administré, d’autant plus que des améliorations des lésions cutanées de PG sous GM-CSF ont été rapportées.

La survenue du PG a été rapportée après la prise (per os) d’azathioprine et de méthotrexate associés chacun à la prednisone, d’isotrétinoïne et de propylthiouracile.

Dans tous ces cas, l’évolution du PG par rapport à l’administration de ces drogues a permis d’évoquer une relation de cause à effet.

La causalité de ces médicaments dans la survenue du PG reste toutefois à prouver.

Histopathologie :

L’histologie ainsi que l’immunofluorescence directe (IFD) ne sont pas spécifiques et ils ont surtout pour intérêt d’éliminer des diagnostics différentiels.

Des images différentes peuvent être observées en fonction de la forme clinique, du stade évolutif et du siège du prélèvement.

A – PG ULCÉREUX :

Un prélèvement au centre de la lésion montre un infiltrat neutrophilique massif (parfois formation d’abcès).

De manière centrifuge, l’infiltrat devient mixte, puis à prédominance lymphocytaire.

Au niveau de l’érythème périlésionnel, l’infiltrat lymphocytaire est concentré autour des vaisseaux du derme superficiel et profond et un épaississement de la paroi vasculaire peut être observé.

Dans quelques rares cas, on peut même voir une nécrose endothéliale avec un dépôt fibrinoïde dans la paroi, une thrombose et une extravasation des érythrocytes.

L’IFD montre de manière inconstante des dépôts de C3 (prédominant) et d’IgM dans la paroi vasculaire ou plus rarement à la jonction dermoépidermique.

Dans une étude, l’IFD est positive dans 55 % des prélèvements avec des dépôts de la paroi des vaisseaux dermiques.

Des dépôts d’IgG et d’IgA sont plus exceptionnellement retrouvés.

B – PG PUSTULEUX :

Le PG pustuleux se traduit par une atteinte pilaire avec un infiltrat neutrophilique détruisant la paroi folliculaire, comblant l’ostium folliculaire et aboutissant à la formation d’une large pustule sous-cornée.

C – PG BULLEUX :

Les images histologiques sont variées : au niveau de l’épiderme, une bulle sous-cornée ou sous-épidermique, ou encore des vésicules intraépidermiques accompagnées d’un oedème sous-épidermique, d’un infiltrat dense dermique composé de PNN avec formation de microabcès ou d’abcès, peuvent être observées.

Aucun signe de vascularite n’a été rapporté.

L’IFD est négative.

D – PG GRANULOMATEUX SUPERFICIEL OU VÉGÉTANT :

Il se caractérise par la présence d’une ulcération pénétrant le derme superficiel, d’une hyperplasie pseudoépithéliomateuse épidermique, avec des abcès neutrophiliques focaux dans le derme superficiel, d’une configuration des histiocytes en « palissade », en périphérie de la lésion.

Un infiltrat granulomateux mixte de type réaction à corps étrangers avec des cellules géantes, des lymphocytes, des plasmocytes et des polynucléaires neutrophiles et éosinophiles est noté.

Diagnostic et bilan :

Le diagnostic est clinique et repose sur la connaissance des formes de PG citées plus haut.

Pour conforter le diagnostic, surtout dans les cas atypiques, quatre autres critères doivent être pris en considération : l’exclusion des diagnostics différentiels, l’histologie et l’IFD, la présence d’une maladie associée connue pour être associée au PG et la réponse aux traitements (bonne réponse aux immunosuppresseurs et faible réponse au traitement externe).

Tous ces critères à eux seuls ne sont ni spécifiques ni pathognomoniques et le diagnostic ne pourra être porté que par un faisceau d’arguments.

Ceci a conduit Von den Driesch à proposer des critères diagnostiques du PG qui restent toutefois à valider.

Deux critères majeurs et deux mineurs sont nécessaires au diagnostic. Le bilan du PG repose principalement sur la clinique.

Il connaît une étape diagnostique et une étape investigative, visant à répondre à trois questions :

– recherche d’une localisation neutrophilique viscérale qui peut être asymptomatique ;

– recherche d’une maladie systémique associée au PG lors de la poussée initiale et lors d’éventuelles rechutes en fonction des points d’appel cliniques ;

– enfin, évaluation des signes de gravité, appréciation de l’évolutivité et recherche de contre-indications avant l’introduction d’un traitement.

La répétition des bilans ne s’impose qu’en cas de rechutes cutanées et de signes d’appel cliniques faisant suspecter une localisation viscérale ou une maladie associée.

Traitements :

Le traitement du PG est empirique car, à ce jour, aucune des multiples drogues utilisées n’a été validée par des études contrôlées, difficiles à réaliser dans cette maladie rare.

Il n’existe aucun consensus sur l’attitude thérapeutique à adopter selon les différentes formes cliniques de PG, les modalités évolutives et l’association à une maladie systémique.

Les traitements généraux dont on dispose actuellement ne sont pas curatifs et ne peuvent prévenir les poussées cutanées ultérieures.

La première poussée de PG demande, dans la majorité des cas, une prise en charge hospitalière, afin de rechercher une maladie associée, de faire le bilan d’une éventuelle maladie neutrophilique et d’instaurer le traitement.

L’hospitalisation permet, par ailleurs, de s’assurer du repos et du bon état nutritionnel du patient.

Le PG exige le plus souvent un traitement par voie générale.

Parmi les traitements généraux, on distingue les corticoïdes, les immunomodulateurs et les traitements mineurs tels les antibiotiques et diverses drogues possédant une activité anti-inflammatoire.

Le traitement local est rarement efficace à lui seul (9 % des cas chez Bennett), mais il joue un rôle important car, inadapté, il empêche la cicatrisation, voire entraîne l’aggravation de la maladie cutanée (phénomène de pathergie).

Enfin, la prévention des traumatismes et la surveillance prolongée des patients, afin de dépister précocement les récidives, s’avèrent indispensables.

A – TRAITEMENTS GÉNÉRAUX :

1- Corticoïdes :

C’est le traitement de référence et le plus constamment efficace.

La dose initiale habituelle de prednisone administrée per os varie entre 1 et 1,5 mg/kg/j en une prise, parfois deux, journalière(s) (matin et midi).

Des bolus de méthylprednisolone de 1 g/j sur une période de 3 à 5 jours suivis d’un relais per os peuvent être nécessaires et utiles pour réduire les effets secondaires d’une corticothérapie générale et prolongée.

Le plus souvent, la réponse sous corticoïdes est rapide.

La dose initiale est diminuée progressivement (diminution par paliers de 10 %) une fois la maladie contrôlée et en voie de cicatrisation.

Des doses d’entretien moindres sur plusieurs années sont parfois nécessaires.

Tous les autres médicaments utilisés dans le PG peuvent leur être associées, permettant de diminuer les doses de corticoïdes.

2- Immunosuppresseurs et immunomodulateurs :

* Ciclosporine :

Une soixantaine de cas de PG traités par ciclosporine a été rapportée dans la littérature.

Les premiers cas décrits historiquement ont été traités per os à des doses élevées variant de 6 à 10 mg/kg/j.

Puis des doses plus faibles, entre 3 et 6 mg/kg/j, ont été utilisées.

Dans la plupart des cas, le choix entre ces deux fourchettes de dosage semble sans conséquences notables sur le délai de guérison des lésions cutanées et la rémission à long terme du PG.

Le délai de la réponse est de 1 à 3 semaines.

L’utilisation de la ciclosporine par voie intraveineuse a été rapportée à des doses de 4 mg/kg/j sur une période de 10 jours avec un relais per os à 7 mg/kg/j.

* Azathioprine :

Dose : 100 à 150 mg/j.

Les premiers signes de régression des lésions sous azathioprine ne peuvent pas être attendus avant 6 à 8 semaines et il faut poursuivre le traitement au moins 12 semaines avant de pouvoir juger de l’efficacité.

Par ailleurs, le métabolisme de l’azathioprine est très variable d’un sujet à l’autre, à cause du polymorphisme génétique de l’enzyme thiopurine méthyltransférase (TPMT).

Afin d’éviter un dosage inapproprié, il est recommandé de doser l’activité TPMT avant traitement et d’y adapter les doses.

* Alkylants :

Trois agents alkylants sont utilisés.

– Cyclophosphamide : dose per os, 100 à 150 mg/m2/j ; en bolus : 500 mg/m² une fois par mois pendant un temps maximal de 6 mois.

Une dose cumulative de 50 g ne doit pas être dépassée.

– Melphalan : une régression des lésions cutanées a été constatée à l’occasion de son utilisation pour le traitement d’un myélome associé.

– Chlorambucil : dose journalière, 4 à 10mg en traitement d’attaque et 2 à 4mg en traitement d’entretien.

Il est moins toxique que le cyclophosphamide et le melphalan, mais a un délai d’action plus long (entre 6 et 8 semaines).

* Méthotrexate :

Un seul cas de rémission partielle sous méthotrexate (15 mg/semaine) a été décrit dans la littérature chez un patient souffrant d’un PG idiopathique corticodépendant.

* Tacrolimus :

Dose : 0,30 mg/kg/j en deux prises journalières.

La dose est ajustée aux taux plasmatiques, maintenus entre 0,5 et 1,5 ng/mL.

* Mycophénolate mofétil :

Dose : 1 à 2 g/j.

Il a été prescrit dans deux cas de PG récalcitrant chez deux femmes atteintes d’un lupus érythémateux systémique et dans un cas de PG idiopathique.

La guérison des lésions de PG s’est faite sous mycophénolate mofétil associé à la ciclosporine et/ou prednisone.

* Échanges plasmatiques :

Les protocoles thérapeutiques sont très différents d’une équipe à l’autre et varient de une à trois séances/semaine avec un total de quatre, à plus de 30 échanges par patient.

L’amélioration des lésions peut être observée à partir de la première cure ou, plus tardivement, après la sixième cure.

Dans la majorité des cas, un traitement par corticoïdes était associé.

* Immunoglobulines intraveineuses :

Sous immunoglobulines, quelques cas de régression de lésions de PG idiopathique ou associé à une hypogammaglobulinémie ou une gammapathie monoclonale ont été rapportés.

Dans ces cas, le traitement initial (ciclosporine, prednisone), qui s’avérait insuffisant, a été poursuivi. Les schémas thérapeutiques et les doses utilisées varient d’une équipe à l’autre (par exemple : doses de 0,4 g/kg/j pendant 5 jours puis 1 g/kg/j pendant 2 jours, 14 jours plus tard).

* GM-CSF :

Bulvik et Jakobs ont décrit une guérison de lésions de PG chez un patient mis sous GM-CSF en injections sous-cutanées en vue d’une transplantation médullaire.

3- Antibiotiques et antilépreux :

* Sulfamides :

– Sulfasalazine : dose initiale, 1 à 4 g/j ; dose d’entretien, 0,5 à 1 g/j (la sulfapyridine est utilisée dans les pays anglo-saxons).

– Dapsone : dose, 100 à 400 mg/j.

* Clofazimine :

Dose : 300 à 400 mg/j.

Une rémission complète a été observée 1 à 4 mois plus tard.

* Minocycline :

Dose : 200 à 300 mg/j.

L’arrêt de l’antibiothérapie provoque la rechute rapide du PG et un traitement prolongé est souvent nécessaire.

4- Autres thérapies générales :

* Oxygénothérapie hyperbare :

Seule ou en association avec les corticoïdes, elle diminue la douleur et accélère la cicatrisation.

Par ailleurs, elle améliore la prise de greffe de peau en limitant le risque de rejet.

La pression doit être inférieure à 3 atmosphères sur une période de moins de 2 heures pour un total de séances allant de 27 à 82 par patient.

* Thalidomide :

Dose : 150 à 400 mg/j.

La durée totale du traitement est de 6 mois environ.

Les doses de thalidomide ont été progressivement diminuées.

* Colchicine :

Des rémissions après introduction du médicament à 1 mg/j ont été observées.

* Nicotine :

L’utilisation de chewing-gum à 6 mg/j a été décrite en association avec la prednisone.

La guérison de la lésion cutanée a été obtenue après 4 semaines de traitement.

B – TRAITEMENTS LOCAUX :

Ils doivent être considérés comme un adjuvant nécessaire mais insuffisant pour entraîner la cicatrisation.

Par ailleurs, l’aggravation de la maladie cutanée par des soins locaux inadaptés est à redouter.

Tout décapage agressif chirurgical doit être évité à cause du phénomène de pathergie. Une détersion douce de l’ulcère peut être entreprise avec des compresses imbibées de sérum physiologique.

Les hydrocolloïdes maintiennent la plaie propre, protègent contre les chocs, diminuent la douleur et favorisent la réépithélialisation. Les agents antimicrobiens locaux peuvent être utilisés dans les formes infectées, mais leur utilisation au long cours doit être évitée à cause du risque de sélection de souches résistantes.

Les corticoïdes en injection intralésionnelle, pour les lésions débutantes et isolées, peuvent être proposés comme adjuvant d’un traitement systémique.

Ils semblent être plus efficaces en début d’évolution.

Les corticoïdes en topiques sont le plus souvent inefficaces.

Néanmoins, quelques rares succès des corticoïdes sous occlusion ont été rapportés.

Les greffes cutanées dans les PG évolutifs non contrôlés par un traitement général sont condamnées à l’échec.

Elles peuvent être tentées pour accélérer l’épithélisation des lésions de PG stabilisées par un traitement général.

Plus récemment, des cas de guérison des lésions de PG sous tacrolimus en topique (solution à 0,5 %) dont la cicatrisation stagnait sous prednisone, ont été rapportés.

Les corticoïdes ont pu être arrêtés et la cicatrisation complète observée à 12 semaines de traitement.

Nous citons ici les thérapeutiques les plus anecdotiques : patchs à la nicotine (10 mg appliqués directement sur l’ulcère et laissés en place pendant 24 heures), GM-CSF en injection périlésionnelle (400 mg, chaque semaine pendant 4 semaines), ciclosporine intralésionnelle, cromoglycate de sodium, moutarde azotée et acide 5-aminosalicylique en topique…

C – PRÉVENTION :

L’attitude prophylactique est fondée sur le phénomène de pathergie.

En pratique, il consiste à contre-indiquer les piqûres non indispensables (par exemple : mésothérapie, acupuncture…) et les actes chirurgicaux inutiles.

Pour l’administration des médicaments (y compris les traitements du PG), il faut préférer la voie orale à la voie parentérale.

Finalement, le patient doit être informé et éduqué sur le rôle des traumatismes dans le PG.

D – CONDUITE À TENIR :

Comme déjà mentionné, la conduite thérapeutique face au PG est empirique et les consignes qui suivent n’ont qu’une valeur indicative.

Elles sont issues d’une réflexion qui repose sur les cas rapportés dans la littérature et notre expérience.

La corticothérapie générale est le traitement de référence dans le PG.

Par ailleurs, c’est le traitement de première intention, a fortiori en cas de PG invalidant et/ou rapidement évolutif.

Si des rechutes sont observées malgré une décroissance prudente des doses de corticoïdes (corticodépendance), il est alors légitime d’associer un autre traitement aux corticoïdes (traitements mineurs ; immunomodulateurs).

Ces traitements adjuvants permettent souvent de réduire les doses, voire d’arrêter les corticoïdes, tout en évitant les récidives.

Certaines de ces drogues, moins toxiques que les corticoïdes, sont le plus souvent appropriées pour une utilisation au long cours.

Le choix du traitement à associer dépend de l’expérience du thérapeute, de la toxicité propre de chaque médicament, de la forme clinique du PG, de l’âge du patient et des maladies associées.

Cependant une corticothérapie générale au long cours (durant plusieurs années ?), à dose minimale efficace (associée ou non à un autre médicament), est parfois nécessaire afin d’éviter des rechutes trop nombreuses, psychologiquement et physiquement invalidantes.

La durée de ces traitements au long cours reste à déterminer.

Elle varie d’une poussée à l’autre et d’un individu à l’autre.

En cas de résistance aux corticoïdes per os ou de tableau clinique sévère, des bolus de méthylprednisolone de 1 g/j pendant 3 à 5 jours peuvent être efficaces.

Par ailleurs, dans ces mêmes indications, en cas de corticorésistance absolue ou de contre-indication des corticoïdes, les immunomodulateurs, notamment la ciclosporine, peuvent être une alternative au traitement par corticoïdes.

Toutefois, la corticorésistance n’est pas toujours définitive et un traitement par corticoïdes lors d’une poussée ultérieure de PG peut être tenté.

Les traitements mineurs peuvent être donnés en association avec les corticoïdes en cas de corticodépendance, permettant ainsi de diminuer les doses de ces derniers.

Par ailleurs, en cas de PG débutants ou peu évolutifs et/ou de contre-indication des corticoïdes, des traitements relativement peu agressifs, comme certains antibiotiques (dapsone, clofazimine, minocycline, sulfasalazine…) et le thalidomide, peuvent être essayés en première intention.

Le PG superficiel granulomateux végétant semble bien répondre aux antibiotiques.

Le choix d’un traitement médical est aussi dicté par l’existence d’une maladie associée.

On peut notamment citer la sulfasalazine (en cas de PG associé à une MICI), le thalidomide (en cas d’association à une maladie de Behçet), ou encore les Ig intraveineuses (dans le cadre d’une hypogammaglobulinémie) en tenant compte de leurs effets secondaires respectifs.

La chirurgie digestive sur des PG associés à une MICI ne doit plus être envisagée.

Elle n’empêche pas des poussées cutanées ultérieures et son indication ne doit être posée que pour la pathologie digestive.

Conclusion :

Le PG est une maladie cutanée « systémique » requérant la collaboration multidisciplinaire des gastroentérologues, des rhumatologues, des hématologues et des internistes.

Le PG semble relier entre elles les dermatoses neutrophiliques.

C’est en effet avec lui qu’est observé le plus grand nombre de formes de passages ou d’associations (PG et pustulose sous-cornée ; PG et syndrome de Sweet ; PG et erythema elevatum diutinium).

La prise en charge thérapeutique est difficile.

L’absence d’études contrôlées ne doit cependant pas retarder l’instauration d’une thérapie bloquant l’évolution du PG.

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