Prématurité et hypotrophie à la naissance

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Définition :

La prématurité est définie comme une naissance vivante avant le dernier jour de la 37e semaine.

Prématurité et hypotrophie à la naissanceL’âge gestationnel est déterminé à partir du premier jour des dernières règles.

On distingue la prématurité spontanée inéluctable de la prématurité provoquée, ou médicalement consentie, l’accouchement étant alors déclenché et réalisé (soit par voie basse, soit par césarienne) lorsque la poursuite de la grossesse est menaçante pour la santé de la mère ou lorsqu’il est estimé que le risque pour l’enfant né avant terme est moins grand que s’il reste in utero.

Le petit poids de naissance est défini par un poids inférieur à 2 500 g, le très petit poids par une valeur inférieure à 1 500 g et le poids extrêmement petit par une valeur inférieure à 1 000 g.

A – Hypotrophie foetale (small for gestational age) :

Elle correspond à une insuffisance de nutrition des tissus et se caractérise par un poids inférieur à une limite donnée pour l’âge gestationnel.

B – Retard de croissance intra-utérin (intra-uterine growth retardation) :

Il correspond à un ralentissement de la croissance et sa définition est, à défaut, la même que celle de l’hypotrophie.

On définit le retard de croissance harmonieux qui atteint de façon identique la taille, le poids, éventuellement le périmètre crânien et le retard dysharmonieux avec atteinte prédominante ou exclusive du poids.

C – Restriction de croissance foetale (fetal growth restriction) :

Elle correspond à une restriction du développement par rapport à un potentiel de croissance et se définit donc par un poids inférieur à une limite, tenant compte du potentiel de croissance.

Ainsi un modèle statistique de régression linéaire multiple réalisé à partir de plus de 100 000 naissances a permis d’isoler 5 variables influençant le poids de naissance : le sexe, l’âge gestationnel, le rang de naissance, la taille et le poids habituel de la mère.

Les « valeurs limites de normalité » sont établies à partir de courbes de croissance de référence.

De telles courbes impliquent une détermination précise de l’âge gestationnel, idéalement obtenue en combinant la date du premier jour des dernières règles et une échographie précoce avant 12 semaines.

Le choix de la population de référence reste débattu.

Faut-il inclure les mort-nés, les nouveau- nés malformés, les grossesses multiples ?

En effet, toute élimination dans la population étudiée conduit à s’abstenir d’utiliser une telle norme à titre diagnostique pour un enfant présentant tel facteur d’exclusion de la population de référence.

Épidémiologie :

A – Prématurité :

Le taux de prématurité varie d’un pays à l’autre et, au sein d’un même pays, d’une région à l’autre.

Ce taux a beaucoup diminué depuis les 20 dernières années et c’est actuellement au Japon qu’il est le plus bas (4 %), alors qu’il est estimé à 4,8 % en France, cette augmentation étant en particulier liée à la prématurité médicalement consentie.

Parallèlement, la grande prématurité (naissance avant 32 semaines) a diminué de 1,6 % en 1971 à moins de 1 % actuellement et ce quelles que soient la politique périnatale et l’organisation des soins périnatals.

B – Hypotrophie :

Son incidence est fonction du percentile de la courbe de référence, c’est-à-dire 3 % si l’on utilise le 3e percentile, 10 % si l’on utilise le 10e percentile.

Si la distribution de la population est gaussienne, alors 95 % des observations se situent dans un intervalle dit de fluctuation autour de la moyenne (± 2 déviations standard).

En 1990 en France, 5,3 % des enfants nés vivants avaient un poids de naissance inférieur à 2 500 g avec des variations allant de 4,32 % à 6,9 %.

L’hypotrophie est plus fréquente en cas de prématurité, pouvant atteindre un taux de 25 % chez les enfants nés avant 32 semaines.

Causes :

A – Prématurité :

Les causes de la prématurité sont multiples et volontiers intriquées.

On distingue des facteurs obstétricaux, maternels, foetaux et socio-économiques.

Depuis le milieu des années 1980, le nombre de grossesses multiples augmente considérablement en raison de l’essor des techniques de procréation médicalement assistée.

Ainsi, entre 1985 et 1990, le taux de grossesses triples est passé de moins de 2 pour 10 000 à un peu plus de 4 pour 10 000.

En outre, l’âge de la procréation s’est avancé et, entre 1981 et 1989, le pourcentage de grossesses chez les femmes de plus de 35 ans est passé de 6 à 14 %.

Enfin la prématurité médicalement consentie (maladie maternelle, hypotrophie évolutive) représente au moins 30 % des hospitalisations en néonatologie pour prématurité.

B – Hypotrophie :

On distingue des causes intrinsèques et des causes extrinsèques.

Dans environ 20 % des cas, la cause reste méconnue.

On estime que la contribution génétique du poids de naissance est d’environ 40 % alors que les facteurs d’environnement y participent pour 60 %. La croissance foetale est bien plus influencée par le poids maternel que par le poids paternel.

Alors que le chromosome Y influence positivement la croissance foetale (le poids de naissance moyen des petits garçons est supérieur de 200 grammes à celui des petites filles) un chromosome 13, 18 ou 21 en excès ralentit significativement la croissance foetale.

Dans le syndrome de Turner, le poids de naissance est estimé à 85 % de la valeur attendue. Le retentissement d’autres anomalies chromosomiques (délétion, translocation) dépend de la paire de chromosomes affectés et du caractère équilibré ou non.

Le retard de croissance observé dans la plupart des infections virales ou parasitaires résulte d’une lyse cellulaire.

Par contre, les affections bactériennes, à l’exception de la syphilis, n’altèrent pas la croissance foetale.

Toute pathologie maternelle sévère peut induire une hypotrophie, soit par réduction de la perfusion utéroplacentaire (hypertension artérielle chronique, toxémie gravidique, insuffisance rénale chronique…), soit par réduction de la disponibilité de substrats indispensables à la croissance comme l’oxygène (anémie sévère, cardiopathie cyanogène) ou calories et protéines (malnutrition).

La croissance foetale est d’autant plus ralentie que le nombre de foetus présents est important.

On estime ainsi à 25 % le pourcentage de jumeaux nés avec une hypotrophie. Toutes les anomalies placentaires et funiculaires affectent la croissance foetale : décollement chronique, infarctus, hémangiomes placentaires, insertion vélamenteuse du cordon et mosaïque placentaire (caractérisée par une discordance entre le caryotype placentaire et le caryotype foetal).

Prévention :

La prévention de la prématurité et de l’hypotrophie ne se conçoit que dans le cadre d’une politique nationale de santé publique voulue, organisée, appliquée et évaluée. Une telle prévention implique une régionalisation des soins prénatals conformément aux recommandations du Haut comité de la santé publique (1994), une information du corps médical et du public, et l’organisation des consultations prénatales.

Si la prématurité médicalement consentie reste difficilement compressible, la prévention peut agir efficacement sur d’autres facteurs.

Grâce à l’instauration d’une politique périnatale en France au début des années 1970, le taux de prématurité est passé en 4 ans de 8,2 % à 6,8 % ; dans le même temps, le nombre de consultations prénatales avait augmenté significativement alors que la grande multiparité avait diminué significativement.

Différents avantages avaient été offerts aux femmes salariées (aménagement d’horaires, changement de poste).

Enfin la surveillance à domicile par des sages-femmes a permis de réduire nettement la prématurité quand la composante essentielle du risque était sociale.

Il est clairement et scientifiquement établi que la corticothérapie anténatale (injection intramusculaire de bétaméthasone ou dexaméthasone lorsqu’une menace d’accouchement prématuré est diagnostiquée entre 24 et 32 semaines d’aménorrhée révolues) diminue significativement la mortalité néonatale, réduit l’incidence et la sévérité de la maladie des membranes hyalines, l’incidence du canal artériel persistant, des hémorragies intracérébrales, des entérocolites nécrosantes, et améliore l’adaptation hémodynamique néonatale.

Le dépistage des grossesses à haut risque, leurs surveillance et prise en charge dans des centres périnatals spécialisés, le recours large à la corticothérapie anténatale ont contribué à réduire la mortalité néonatale associée à la grande prématurité, sans pour autant augmenter le nombre de séquelles neurologiques graves (leur diminution semble même envisageable).

L’hypotrophie explique en elle-même certaines anomalies neuro-développementales spécifiques, et ce d’autant plus qu’elle est associée à une asphyxie périnatale.

C’est dire la nécessité de surveiller soigneusement les grossesses caractérisées par une croissance foetale anormale et de prévoir, dans le cadre d’une collaboration obstétricopédiatrique, une décision d’extraction de principe avant que ne survienne une souffrance foetale aiguë.

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