Asthme aigu grave

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L’asthme est une affection caractérisée par de larges variations des résistances des voies aériennes intrathoraciques sur de courtes périodes de temps, réversibles spontanément ou sous l’effet du traitement. Actuellement, la définition de l’asthme inclut la notion d’inflammation des voies aériennes: « Affection inflammatoire chronique des voies aériennes dans laquelle interviennent de nombreuses cellules, en particulier mastocytes, éosinophiles et lymphocytes T. Chez les individus prédisposés, cette inflammation provoque des épisodes récidivants de sifflements, de dyspnée, d’oppression thoracique et de toux, particulièrement la nuit et au petit matin. Ces symptômes sont habituellement associés a un trouble ventilatoire obstructif variable, réversible au moins partiellement, spontanément ou sous traitement… »

INCIDENCE :

Asthme aigu graveDifficile a établir précisément, l’incidence de l’asthme chez l’adulte varie de 0,4 a 4% selon les pays. elle serait de 3% en France, soit 1,6 million d’asthmatiques. Selon certaines études, elle serait en augmentation.

L’incidence de l’asthme aigu grave (« crise d’asthme avec obstruction bronchique, d’installation aigue ou progressive, qui n’est pas levée par le traitement usuel ») est difficile a chiffrer.

A titre d’exemple:

– 486000 Américains hospitalisés pour asthme grave en 1982.

– environ 60000 hospitalisations pour asthme par an en France.

– sur 12000 admissions en réanimation par an en Ile-de-France, 4% environ sont des cas d’asthme aigu grave.

MORTALITÉ :

La mortalité est variable d’un pays a l’autre, de 1 (Etats-Unis) a 8 (Nouvelle-Zélande) pour 100000 habitants.

– En France, on l’estime a 3 pour 100000 habitants, soit 1500 a 2000 morts par an (dont 30% ont moins de 35 ans).

– A l’hôpital, la mortalité peut atteindre 30% lorsque la ventilation artificielle est nécessaire plus de 48 heures.

La mortalité est en augmentation dans la plupart des pays. La plupart des décès surviennent chez des patients insuffisamment traités.

NOSOLOGIE :

Depuis quelques années, on ne parle plus d’état de mal asthmatique (EMA) mais d’asthme aigu grave (AAG).

En effet:

– il n’existe pas de séparation nette entre crise grave, attaque d’asthme, « syndrome de menace » et EMA.

– d’autre part, la notion d' »état » est trop statique et fataliste. celle d’AAG fait davantage ressentir les risques encourus et la nécessité d’une action thérapeutique immédiate.

Diagnostic :

En général, poser le diagnostic d’asthme n’est pas difficile:

– soit parce que le malade connait bien sa maladie.

– soit parce que la première crise est caractéristique (sibilances, distension, radiographie thoracique dans les limites de la normale, antécédents d’atopie personnels ou familiaux…).

* Il faut éliminer:

– un obstacle laryngotrachéal particulièrement chez l’enfant (corps étranger, épiglottite, tumeur).

– il est souvent plus difficile d’écarter l’hypothèse d’une insuffisance cardiaque gauche aigue qui peut mimer un AAG, d’ou l’appellation « d’asthme cardiaque ».

* Prédire l’évolution d’une crise est plus difficile.

– Il n’existe en effet aucun critère diagnostique, clinique ou biologique, permettant a coup sur de repérer les malades a risque.

– Les différents scores proposés se sont révélés décevants a cet égard.

– Il faut considérer que toute crise d’asthme peut être ou devenir menaçante et rechercher les indices pouvant faire craindre une telle évolution.

INTERROGATOIRE :

Important, l’interrogatoire doit d’autant moins retarder la mise en route du traitement qu’existent des signes de gravité immédiate. Il doit répondre a trois questions.

La maladie de fond est-elle grave?

Il faudra se méfier:

– d’un asthme ancien, instable, avec chute matinale du débit expiratoire de pointe (DEP) (« morning deep ») ou simplement larges variations de cet index.

– d’antécédents d’hospitalisation récente pour crise aigue d’asthme.

– d’antécédents de séjours en réanimation, surtout s’il y a eu acidose respiratoire, ventilation mécanique, complications de la ventilation.

De même, un asthme corticodépendant ou une rupture thérapeutique récente sont des facteurs anamnestiques de gravité.

Enfin, les asthmes médicamenteux (aspirine, AINS…) semblent avoir une gravité particulière de par la rapidité de leur évolution (2% des asthmes, 10 a 20% des AAG).

D’autres éléments d’ordre psychosocial peuvent être des facteurs de risque d’AAG (précarité, pathologie psychiatrique, limitation intellectuelle).

L’épisode actuel est-il grave?

Il faut rechercher un ensemble symptomatique (« syndrome de menace d’AAG ») qui consiste en l’apparition sur quelques jours a quelques semaines de:

– crises dyspnéiques de plus en plus sévères, brutales, fréquentes et de moins en moins sensibles au traitement (surconsommation médicamenteuse).

– détérioration progressive de l’état respiratoire de base entre les crises (intervalle libre médiocre).

– baisse progressive du DEP ou larges variations (« morning deep »).

Enfin, il faudra tenir compte de l’auto-évaluation par le malade: se méfier particulièrement des crises inhabituelles et ressenties comme telles par le patient. En sachant que, a l’inverse, la mauvaise perception par certains patients du degré d’obstruction constitue un facteur de risque qu’évoluent trop longtemps des états graves.

Existe-t-il un facteur déclenchant?

* Les facteurs déclenchants le plus couramment en cause sont:

– l’infection, notamment respiratoire et des voies aériennes supérieures, en sachant qu’un foyer ORL ou stomatologique chronique peu parlant peut avoir un rôle « d’épine irritative » important.

– la rupture thérapeutique.

– l’exposition massive a un allergène inhalé ou non (rare mais grave: l’erreur de désensibilisation).

* On recherchera systématiquement certaines prises médicamenteuses (l’asthme a l’aspirine n’est pas allergique mais idiosyncrasique par anomalie d’une voie métabolique (cyclo-oxygénase)).

* Les émotions violentes sont classiques mais rarement en cause.

* Enfin, on recherchera des facteurs aggravants tels que la prise de certains médicaments susceptibles de compromettre la fonction respiratoire (exemple: les barbituriques et les opiacés dépriment les centres respiratoires, suppriment la toux, assèchent les sécrétions bronchiques, accélèrent la clairance des stéroïdes. les beta-bloquants aggravent la composante bronchospastique, etc.).

EXAMEN CLINIQUE :

Dans certains cas, une gravité extreme:

* est d’emblée évidente:

– troubles de la conscience.

– pauses respiratoires.

– silence respiratoire.

– collapsus.

– cyanose intense.

* et impose la mise en oeuvre immédiate de mesures de réanimation.

Plus souvent, la situation n’est pas si dramatique et la gravité pressentie a l’interrogatoire doit être rapidement confirmée par l’examen.

Deux éléments importants:

– ne pas chercher a allonger le patient.

– débuter d’emblée le traitement.

Sur le plan respiratoire :

Capacité a parler

La capacité a parler est largement diminuée:

– le malade répond par phrases courtes et hachées, par mots ou monosyllabes.

– tousser devient difficile, voire impossible.

– au maximum, le patient ne peut plus parler du tout.

Dyspnée

La dyspnée est intense:

– avec tachypnée supérieure a 30/min (et allongement du temps expiratoire) et orthopnée.

– le patient est couvert de sueurs, parfois cyanosé (signe tardif).

Auscultation pulmonaire

L’auscultation trouve des râles sibilants, témoins de l’obstruction et de la limitation du flux expiratoire:

– les râles sont d’autant plus importants que l’obstruction est sévère.

– mais ils diminuent lorsque le flux gazeux est si réduit qu’il n’est plus capable d’induire un sifflement.

– ainsi, la diminution des râles sibilants avec persistance ou aggravation de la dyspnée est un signe d’extreme gravité  (au maximum annonçant silence auscultatoire et arrêt respiratoire).

Mécanismes compensateurs inspiratoires

La limitation de l’expiration met en jeu des mécanismes compensateurs inspiratoires:

* cela se traduit par un tirage intercostal, sus-sternal, sus-claviculaire et épigastrique.

* avec contracture des SCM qui devient permanente (aux deux temps).

* jusqu’a l’épuisement:

– annoncé par la dysfonction musculaire (respiration paradoxale).

– et conduisant, après des pauses respiratoires, a l’arrêt respiratoire.

DEP

– Réalisé a l’aide du débitmètre de pointe (peak flow meter), le DEP mesure l’inspiration et l’expiration maximales en intensité et en durée.

– C’est un index utile pour évaluer la gravité d’une crise et en suivre l’évolution.

– Toute valeur inférieure a 150l/min témoigne d’une crise grave (normalement le DEP est supérieur a 500l/min).

– Si le patient ne peut souffler, on évalue le DEP inférieur a 50l/min.

Sur le plan cardio-vasculaire :

* La tachycardie sinusale  est habituelle. au-delà de 120 elle doit être considérée comme un élément de gravité, et non la conséquence d’un éventuel traitement tachycardisant.

* Les troubles du rythme  sont rares, observés presque uniquement en cas d’acidose importante.

* Le pouls paradoxal:

– est un pouls irrégulier dans son amplitude et diminuant a l’inspiration (baisse de plus de 18mmHg de la pression artérielle systolique a l’inspiration par rapport a l’expiration. normalement cette variation est inférieure a 5mmHg).

– on considère qu’une réduction de PAs supérieure ou égale a 30mmHg est un élément de gravité.

* La tension artérielle  (TA):

– est stable en cas de crise simple.

– peut s’élever en cas de crise plus grave.

– et tend a s’effondrer dans les cas extrêmes avec collapsus. La physiopathologie de ces hypotensions est complexe. une pseudo-hypovolémie (gene au retour veineux) est en général en cause (remplissage).

* Des signes d’insuffisance ventriculaire droite aigue peuvent être constatés:

– turgescence des veines jugulaires, hépatalgie.

– reflux hépatojugulaire.

– bruit de galop droit.

– pas d’oedèmes des membres inférieurs.

Sur le plan neurologique :

Tout asthmatique en crise est angoissé, mais l’agitation et le délire, inhabituels dans une crise simple, sont des indices de gravité.

A l’extreme apparaissent des troubles de la conscience jusqu’au coma.

Pour conclure :

On constate en général une aggravation progressive de la crise, avec apparition séquentielle de signes de gravité.

Cependant, un certain nombre de crises sont suraigues, aboutissant au décès en moins de 30 minutes (la plupart des décès actuellement surviennent a domicile, avant toute intervention médicale).

EXAMENS COMPLEMENTAIRES :

Dans l’urgence, seuls les gaz du sang artériels (GDS) et le DEP sont importants.

DEP :

(Voir ci-dessus.)

Gaz du sang :

Rarement réalisés en dehors de l’hôpital, les gaz du sang ont une grande valeur mais ont l’inconvénient de n’être qu’un « instantané » et doivent être répétés.

Ils permettent de stratifier la gravité:

– selon le degré d’hypoxémie, et surtout d’hypercapnie.

– toute crise normo- et, a fortiori, hypercapnique est grave.

Les gaz du sang permettent d’évaluer le retentissement de la crise sur le statut acido-basique:

– l’acidose étant toujours un élément de gravité.

– souvent respiratoire, elle peut comporter une part métabolique.

Radiographie pulmonaire :

Elle est en général réalisée ultérieurement pour rechercher:

– une cause: pneumopathie.

– ou une conséquence de l’AAG: pneumothorax, pneumomédiastin, atélectasie en bandes.

ECG :

* L’ECG montre en général une tachycardie sinusale.

* Des signes de coeur pulmonaire aigu (rotation axiale droite, S1Q3, onde P pulmonaire>2,5mm, bloc de branche droit, troubles de repolarisation précordiale droite) sont inquiétants.

Biologie :

* L’hyperleucocytose est habituelle:

– mais elle peut relever de facteurs variés non infectieux (beta-2-mimétiques, corticoides, stress, déshydratation).

– seule son association avec une fièvre significative évoque une infection.

* Parfois il existe une hyperéosinophilie qui ne prend sa valeur que si elle est très importante et évoque un asthme allergique.

* Un certain degré de cytolyse hépatique est habituel avec ALAT supérieures aux ASAT (hypoxémie associée a une hyperpression veineuse sus-hépatique).

* L’augmentation des créatinines-kinases est fréquente.

Traitement :

A DOMICILE :

* L’évolution imprévisible et la nécessité d’une surveillance continue imposent l’hospitalisation de toute crise d’asthme présentant des signes de gravité.

* Le patient doit être informé que toute crise anormalement sévère doit motiver un appel d’urgence, au mieux via le numéro « 15 » d’urgence.

* En attendant l’arrivée du médecin, le patient doit multiplier les prises de beta-2 stimulants.

* La prise en charge médicale immédiate comporte:

– la poursuite de l’inhalation des agonistes beta-2 (salbutamol (Ventoline*), terbutaline (Bricanyl*)): 10 a 20 bouffées de spray, voire plus, au mieux avec une chambre d’inhalation, a répéter toutes les 10 a 15 minutes.

– terbutaline (Bricanyl*), 1 ampoule 0,5mg sous-cutanée.

– méthylprednisolone (Solu-Médrol*), 1 ampoule 40mg IM ou IV.

* Parallèlement, il faut toujours appeler une équipe spécialisée (le SAMU ou les pompiers) dans les plus brefs délais. L’envoi systématique d’une ambulance médicalisée au site de tout appel pour asthme a permis a la brigade des sapeurs-pompiers de Paris de faire diminuer la mortalité préhospitalière d’un facteur 6.

* La prise en charge préhospitalière est calquée sur les principes de la prise en charge a l’hôpital: oxygénothérapie, abord veineux, remplissage éventuel, nébulisation continue de beta-2 agonistes, mise en route de la corticothérapie IV, parfois beta-2 stimulants voire adrénaline IV (voir détails infra). Le transport vers le service d’accueil ne se conçoit que médicalisé (monitorage, possibilité de mise en route d’une assistance ventilatoire).

A L’HÔPITAL :

La prise en charge d’un patient atteint d’AAG ne se conçoit que dans un service ou des mesures de réanimation peuvent être entreprises sans délai (unité de soins intensifs ou service de réanimation).

* La ventilation assistée peut rapidement devenir nécessaire et tout AAG expose a un risque de mort subite.

* Cela est d’autant plus important que les fluctuations peuvent être très rapides, dans un sens comme dans l’autre.

Oxygénothérapie :

Une oxygénothérapie suffisante pour obtenir SaO2 supérieure ou égal a 90% (PaO2 > 60mmHg) est fondamentale.

* L’hypoxémie est surtout liée a une inadéquation ventilation-perfusion.

* Sa correction peut nécessiter des débits d’oxygène de l’ordre de 10 I/min (sonde nasale ou masque).

* L’élévation de la PaCO2 n’est pas un facteur limitant de l’oxygénothérapie (a la différence des bronchopathes chroniques en décompensation aigue).

* De plus, l’O2 a une certaine action bronchodilatatrice.

Catécholamines :

Les catécholamines sont la base actuelle de la thérapeutique de l’AAG:

– ce sont les bronchodilatateurs les plus puissants, dont l’action est la plus rapide et la tolérance la meilleure.

– la polémique qui les accusait d’aggraver les crises d’asthme et d’augmenter la mortalité n’est pas fondée.

– la nécessité d’utiliser des doses élevées n’est qu’un signe de la gravité de la crise.

Actions des catécholamines

Les catécholamines induisent:

– la relaxation du muscle lisse bronchique (neurotrope, récepteur beta-2).

– l’inhibition de la libération des médiateurs mastocytaires.

– la réduction de l’augmentation de perméabilité vasculaire.

Voie d’administration

Jusque récemment, la préférence allait, en France, a une administration IV, mais on tend vers une utilisation de plus en plus large de la nébulisation.

* Nébulisation: salbutamol fort (Ventoline*) 5mg pour nébulisation:

– 1ml dans 4cc d’une solution isotonique, pulsé par 6 a 8l/min d’oxygène, au masque facial.

– efficacité en quelques minutes, pic entre 30 et 60 minutes, durée d’action 4 heures, potentialisée par l’association a un anticholinergique.

– cette nébulisation est continue pendant la première heure (ou 3 nébulisations en 1 heure).

– si l’évolution est favorable (diminution des signes de gravité, diminution des sibilances, augmentation du DEP, amélioration des GDS), nébulisation horaire pendant quelques heures, puis toutes les 4 a 6 heures, a mesure que l’obstruction se lève. si l’évolution est défavorable, adjonction d’un anticholinergique dans la nébulisation (0,5mg d’ipratropium) et/ou de salbutamol IV ou terbutalineIV.

* Nébulisation: terbutaline (Bricanyl*) Solution 5mg/2ml, 6 « unidoses » pour nébulisation:

– utiliser directement l’unidose prete a l’emploi, il n’est pas nécessaire de rajouter de sérum physiologique. La solution doit être pulsée a 6 a 8l/min d’O2 avec masque facial.

– efficacité en moins de 2 minutes, durée d’action 5 heures, potentialisée par l’association d’un anticholinergique.

– renouveler les nébulisations toutes les 20 minutes pendant la 1re heure.

– voir « Salbutamol » pour l’évolution.

* Salbutamol IV ou terbutaline IV:

– 0,1gamma/kg/min en continu a la seringue électrique (SE) (ou terbutaline mêmes doses).

– dose a augmenter par paliers toutes les 10 minutes en doublant a chaque fois, selon l’efficacité et la survenue d’effets secondaires.

– la tachycardie initiale n’est pas une contre-indication.

– les doses peuvent aller jusqu’a 1gamma/kg/min, voire plus. on est parfois amené a débuter d’emblée a des doses supérieures (0,2-0,5 gamma).

– cette attitude (nébulisation et injection intraveineuse) n’a une efficacité démontrée par aucune étude, mais semble cependant « raisonnable ».

* En cas d’échec, malgré l’augmentation des doses, la plupart des équipes recourent en réanimation a l’adjonction d’adrénaline IV:

– 0,5mg/h que l’on peut augmenter jusqu’a 1mg/h.

– certains auteurs l’introduisent d’emblée lorsqu’il s’agit d’une crise suraigue avec collapsus.

– si l’évolution est favorable: on diminuera en premier l’adrénaline de façon très progressive puis les beta-2-agonistes.

– en cas d’échec, on est souvent contraint de recourir a la ventilation artificielle (voir infra).

– l’adrénaline aurait l’intéret d’ajouter a l’action beta-mimétique une action alpha+, vasoconstrictrice, donc réduisant l’oedème de la muqueuse et augmentant le calibre bronchique. Certains l’utilisent en aérosols.

Effets secondaires des beta-2

Les effets secondaires des beta-2 sont assez fréquents, rarement genants:

– cardio-vasculaires: tachycardie sinusale, troubles du rythme, hypotension.

– neurologiques: tremblements, vertiges, agitation.

– digestifs, dose-dépendants: nausées, vomissements.

– métaboliques: hypokaliémie, hyperglycémie.

Contre-indications des beta-2

* Contre-indications absolues: infarctus du myocarde au stade aigu, angor instable, insuffisance coronarienne aigue (la nébulisation exclusive peut être proposée, un monitoring de qualité est alors indispensable avec détection des arythmies et des variations du segment ST).

* Contre-indications relatives: thyrotoxicose, affection cardiaque congénitale ou acquise.

Corticoides :

Les corticoides sont toujours indiqués dans l’AAG, d’autant que leurs effets secondaires a court terme sont quasi nuls.

Mode d’action

L’action des corticoides est complexe:

– essentiellement anti-inflammatoire.

– mais aussi augmentation du nombre et de la sensibilité des récepteurs des agonistes beta-2.

– et diminution de la mucosécrétion.

Posologie

On utilise:

– l’hémisuccinate d’hydrocortisone (HSHC): 200mg toutes les 4 heures IV ou IM (doses très variables selon les équipes, de 1 a 3g/j, par exemple 4mg/kg toutes les 4 heures).

– ou la méthylprednisolone (Solu-Médrol*): 40mg toutes les 4 heures IV ou IM.

– l’effet ne débute qu’après 1 a 3 heures, est maximal en 5 a 8 heures, d’ou la nécessité d’une administration précoce.

Contre-indications

– Aucune si menace du pronostic vital.

– Il faut éviter les produits contenant des métabisulfites: dexaméthasone (Soludécadron*), bétaméthasone (Célestène*), responsables d’accidents allergiques chez 8% des asthmatiques.

Relais oral

Les corticoïdes doivent être poursuivis quelle que soit l’évolution.

– Le relais oral dépendra de l’évolution mais ne devra pas être trop précoce (lorsqu’il y a diminution des signes de gravité, DEP> 300l/min, PaO2> 70mmHg en air ambiant).

– Par exemple prednisone (Cortancyl*) 1mg/kg en une ou deux prises.

– Diminution ensuite progressive sur 3 a 4 semaines et relais par corticoïdes inhalés.

– L’interruption précoce ou la non-prescription de corticoïdes au cours de l’AAG est responsable de nombreux décès retardés (vers le 10e jour).

Anticholinergiques :

Les anticholinergiques agissent en diminuant le tonus vagal par inhibition compétitive de l’acétylcholine.

* Les dérivés synthétiques de l’atropine, qui en conservent les propriétés anticholinergiques mais n’en présentent plus les effets indésirables, sont a présent disponibles pour une administration par la voie nébulisée.

* Le bromure d’ipratropium (Atrovent*) administré en nébulisation a la posologie de 0,5mg chez l’adulte et de 0,25mg chez l’enfant, présente un effet bronchodilatateur rapide (inférieur ou égal a 15 minutes), maximal après environ 1 heure et d’une durée de l’ordre de 5 a 6 heures.

L’adjonction, dans la même nébulisation de bromure d’ipratropium a une catécholamine, permet d’en potentialiser l’action.

Cette administration peut être renouvelée si l’état clinique le nécessite.

Théophylline :

L’utilisation de la théophylline dans le traitement des AAG est de plus en plus controversée.

– Pour la plupart des auteurs, son intéret est quasiment nul quant a un éventuel effet additif par rapport aux beta-2 sur la bronchodilatation.

– Par contre, les effets secondaires de ces deux classes thérapeutiques se potentialisent.

– Il est fréquent que les patients soient déja imprégnés de bases xanthiques au moment de l’AAG et la théophylline parentérale risque de faire passer le taux sérique en zone toxique.

– Dans l’asthme, son action principale est la bronchodilatation musculotrope (inhibition de la phosphodiestérase).

Posologie

Pour mémoire seulement, les modalités de prescription de la théophylline injectable, ampoule a 240mg (4ml), sont les suivantes.

* Pas de traitement antérieur:

– dose de charge: 6mg/kg/30min en IV stricte a la seringue électrique.

– puis relais 0,6mg/kg/h en IV continue a la seringue électrique.

* Traitement antérieur: 0,6mg/kg/h en IV continue a la seringue électrique.

Cinétique

La mesure de la théophyllinémie est obligatoire 24 heures après: elle doit se situer entre 10 et 20mg/l (idéal: 12mg/l).

* Sa demi-vie est très variable, de 6 heures chez l’adulte jusqu’a 60 heures chez l’insuffisant hépatique ou cardiaque.

* Diminuer les doses:

– de moitié si insuffisance cardiaque, rénale ou hépatique.

– d’un quart si personne agée ou arrêt du tabac récent (élimination augmentée chez le fumeur).

Effets secondaires et associations indésirables

Les effets secondaires (voir supra) sont fréquents, importants et imprévisibles:

– digestifs: nausées, vomissements, douleurs abdominales et diarrhées.

– cardiaques: tachycardie, hypotension, troubles du rythme ventriculaire.

– neurologiques: insomnie, céphalées, agitation, tremblements, désorientation, délires, convulsions.

Certaines associations sont dangereuses. éviter:

– les macrolides (potentialisation, sauf avec josamycine en raison d’une structure chimique particulière).

– la cimétidine (potentialisation).

Autres traitements :

Hydratation

La déshydratation est fréquente, justifiant des apports hydriques importants:

– glucosé 5% 2000ml/24h + 3g de NaCl/l + 1g de KCl/l semble une base de début raisonnable (ne pas pérenniser l’apport sodé sous corticoïdes).

– la restauration volémique (ELOHES 6% 500ml en 20 minutes) est nécessaire en cas de collapsus ou de coeur pulmonaire aigu.

Antibiothérapie

L’antibiothérapie est discutée mais admise, pour certains auteurs de manière systématique, pour d’autres, limitée aux cas ou l’infection est patente.

– On peut proposer: Clamoxyl*, 1g en trois fois par jour, ou Josacine*, 1g en deux fois par jour.

– La question d’une allergie éventuelle doit être systématiquement posée.

Fluidifiants bronchiques et alcalinisation

* Les fluidifiants bronchiques n’ont pas de place dans le traitement des asthmes aigues graves.

* L’alcalinisation a fait historiquement l’objet de controverses et de modes variables.

– Elle est justifiée en cas d’acidose métabolique franche parfois présente dans les asthmes aigues graves (mécanisme complexe, acidose lactique) car l’acidose diminue l’efficacité des beta-mimétiques.

– Par ailleurs, un déficit de base expose, en cas d’aggravation de l’asthme faisant rapidement augmenter la PaCO2, a des acidoses profondes et rapides avec retentissement neurologique et cardio-vasculaire.

– L’alcalinisation est réputée dangereuse (risque d’hypoventilation alvéolaire) peut-être a tort, donc réservée aux services de réanimation.

Ventilation artificielle :

On cherche toujours a éviter d’avoir recours a la ventilation artificielle car elle est difficile, grevée de complications infectieuses, hémodynamiques ou cardio-vasculaires (mortalité jusqu’a 30% selon les séries).

Indications

* Elle est indiquée en cas:

– de coma.

– de collapsus cardio-vasculaire.

– ou d’arrêt respiratoire.

* Parfois elle ne peut être évitée devant un épuisement progressif et l’échec des thérapeutiques.

Précautions d’emploi

Initialement, le risque de choc de reventilation domine:

– il ne faut ni chercher a normaliser la PaCO2 ni utiliser de sédatifs vasodilatateurs.

– la kétamine est la drogue de choix (Kétalar*) pour l’intubation et la base de sédation.

Ultérieurement, la difficulté est surtout la lutte contre les risques de barotraumatisme consécutifs aux pressions d’insufflation élevées: on utilise de petits volumes courants, une fréquence lente, quitte a tolérer un certain degré d’hypercapnie.

La sédation doit reposer essentiellement sur des drogues hémodynamiquement bien tolérées (kétamine: vasoconstrictrice et augmentant le débit cardiaque). Parfois la curarisation est nécessaire. Très exceptionnellement, on peut être amené a utiliser des gaz de faible densité pour limiter les pressions (hélium-oxygène, anesthésiques halogénés) mais ces techniques ne sont pas validées.

Moyens de surveillance et objectifs :

Efficacité

– Tous les signes cliniques relevés initialement doivent disparaitre.

– Le débit expiratoire de pointe doit rapidement augmenter.

– Il ne doit pas apparaitre d’acidose et d’hypercapnie.

– L’hypoxémie peut être lente a se corriger, elle peut s’aggraver alors que l’état asthmatique semble s’améliorer (cinétique des rapports ventilation-perfusion): ce n’est pas, en général, un élément de gravité évolutif.

Tolérance

(Voir supra les effets secondaires des traitements.)

– On portera une attention particulière aux problèmes cardiaques (FC, rythme, repolarisation), neurologiques, glycémiques.

– Sur le plan biologique, l’hypokaliémie peut poser problème (beta-2-mimétiques et corticoides).

– Sur le plan radiologique: recherche de complications (pneumothorax, pneumomédiastin).

Conditionnement et traitement non spécifique :

Le patient doit être conditionné comme tout malade placé dans un service de réanimation:

– moniteur, ECG, idéalement détection d’arythmie et de variations ST.

– oxymètre de pouls (SpO2), monitorage rapproché de la PA.

– prophylaxie antithrombose: Lovenox*, 0,2mg/j en injection sous-cutanée.

– surveillance serrée de glycémie et glycosurie.

– prophylaxie antiulcère.

– voie veineuse de bon calibre: si l’adrénaline est utilisée, elle doit être perfusée sur une voie isolée pour éviter tout bolus lors de l’injection d’autre substance, source d’accidents.

NOTIONS FONDAMENTALES :

* Au décours d’un épisode d’AAG, un suivi spécialisé doit être mis en place incluant un traitement de fond et des consultations fréquentes, ainsi qu’une éducation du patient, de façon a éviter au mieux les récidives (voir question « Asthme »).

* La recherche d’un facteur étiologique et sa suppression (allergène, infection ORL chronique, reflux gastro-oesophagien…) sont fondamentales a la prévention des récidives.

* L’arrêt du tabac est fondamental également, de même que parfois certaines adaptations du milieu professionnel.

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