Pied plat valgus statique (y compris les synostoses congénitales)

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Introduction :

Par opposition à sa très grande fréquence, le pied plat valgus est rarement responsable de phénomènes d’intolérance justifiant une prise en charge thérapeutique et, partant, chirurgicale.

Les problèmes sont fondamentalement différents chez l’enfant et chez l’adulte.

Pied plat valgus statique (y compris les synostoses congénitales)Chez l’enfant, il faut tenir compte des modifications morphologiques liées à la croissance et à la présence, à un moment donné de l’évolution, d’un planus physiologique ; la difficulté étant ici le dépistage des dysmorphies à risques.

Chez l’adulte, à côté de l’habituelle parfaite tolérance, si ce n’est une lourdeur du pas, se dessine un certain nombre de situations pathologiques dont l’expression, pour l’essentiel, est liée à l’âge.

Le pied plat pathologique peut se définir comme l’association d’un valgus de l’arrière-pied et d’une supination de l’avant-pied, association qui aboutit à l’aplatissement de l’arche interne (planus) par le biais d’un mécanisme de dévrillage.

Il faut insister d’emblée sur le fait que le traitement chirurgical du pied plat, notamment chez l’adulte, est une chirurgie difficile, aux suites souvent lourdes, et que la double arthrodèse n’en représente pas la modalité univoque.

Nous nous limiterons au pied plat primitif et n’étudierons pas les pieds plats secondaires (pied plat acquis) qu’il s’agisse d’une atteinte traumatique (fracture de l’os naviculaire, fracture du calcanéum…), d’une désorganisation d’origine neurologique (arthropathie neurogène ou diabétique du médiopied) ou musculotendineuse (séquellaire d’un syndrome de loge ou d’un déséquilibre neurologique).

Une place à part doit être réservée aux dislocations de la tarsométatarsienne (cunéométatarsienne et intercunéenne) d’origine dégénérative, générant une horizontalisation distale de l’arche interne compensée non pas par un valgus de l’arrière-pied, mais plutôt par un hallux flexus.

Préambule :

L’absence de consensus, pour ce qui concerne les secteurs de mobilités du pied, incite à préciser un certain nombre de définitions qui seront utilisées ici :

– les termes varus-valgus sont réservés aux mobilités de l’arrière-pied dans le plan frontal.

Ils reflètent la souplesse de la subtalienne par le biais de variations de la divergence talocalcanéenne (le varus étant la conséquence d’une diminution de cette dernière, le valgus d’une augmentation avec, pour ultime stade, l’équin du col et de la tête du talus qui glissent en dedans de la face interne du calcanéum) ;

– l’abduction et l’adduction s’effectuent dans la médiotarsienne et caractérisent les déplacements de l’avant-pied sur l’arrière-pied dans le plan horizontal ;

– beaucoup plus importantes sont la pronation et la supination car leurs variations règlent la morphologie de l’arche interne.

La pronation se définit comme la verticalisation du premier métatarsien ; la supination comme son horizontalisation.

La supination résulte de la mise en jeu, à divers degrés dans le secteur de la flexion dorsale, de la médiotarsienne interne, de la naviculocunéenne interne et de la cunéométatarsienne interne.

En principe, tous ces secteurs d’amplitude doivent être examinés de façon analytique, ce qui définit les mobilités intrinsèques par opposition aux mobilités globales qui mettent en jeu une chaîne polyarticulaire.

L’analyse de la pronation et de la supination intrinsèques est particulièrement importante.

Elles se mesurent, l’arrière-pied étant bloqué passivement à 5° de valgus physiologique, par référence à l’arc décrit par la barre d’appui métatarsienne antérieure autour d’un axe antéropostérieur passant par le troisième métatarsien.

Normalement, la pronation et la supination intrinsèques sont équilibrées de part et d’autre du plan horizontal (perpendiculaire à l’axe tibial).

La pronation (ou l’excès de pronation) extériorise un cavus de l’arche interne ; la supination (ou l’excès de supination) un planus de cette dernière.

Mais le découpage des secteurs d’amplitude, indispensable à une bonne compréhension physiopathologique, est artificiel et ne traduit pas la réalité fonctionnelle.

De fait, fonctionnellement, les mouvements globaux (représentés par l’inversion et l’éversion) permettent l’adaptation du pied au sol et sont un moyen de rattrapage de vices architecturaux.

De même, certaines mobilités élémentaires s’effectuent grâce à une chaîne polyarticulaire.

Ainsi la flexion plantaire met en jeu principalement la tibiotalienne, mais aussi la subtalienne, la médiotarsienne et la cunéométatarsienne.

La flexion dorsale s’effectue prioritairement dans la tibiotarsienne ; de la sorte, à tout degré de flexion dorsale du pied correspond un étirement de même amplitude des parties molles postérieures.

Mais on constate que la flexion dorsale forcée s’accompagne physiologiquement d’un valgus marqué de l’arrière-pied.

Ceci traduit une modification de la cinématique de la cheville par épuisement de son secteur d’amplitude et mise en jeu de la subtalienne.

Il se produit ainsi une translation du centre de mouvement vers l’insertion calcanéenne du tendon calcanéen, la flexion dorsale s’effectuant à la façon d’une fermeture en « feuillet de livre », grâce à la diminution de la hauteur du bloc talocalcanéen sur le mode d’un levier du deuxième genre.

Cette diminution de hauteur étant obtenue par augmentation de la divergence talocalcanéenne, il en résulte un valgus du talon.

Le même mécanisme explique le valgus talonnier par tendon calcanéen court qui génère la translation précoce du centre de mouvement vers l’insertion calcanéenne de ce tendon et la mise en jeu de la subtalienne dès les premiers degrés de flexion dorsale.

Ces notions de base ont plusieurs conséquences pratiques : l’évaluation de la flexion dorsale de la cheville doit s’effectuer par référence à l’axe du péroné et à l’arche externe du pied plus stable que l’interne qui, en matière de pied plat, est le siège d’une hypermobilité sagittale (supinatus).

La mesure de la flexion dorsale doit s’effectuer genou étendu, puis genou fléchi pour déterminer le rôle pathogène du tendon calcanéen et sa souplesse à l’étirement.

De la même façon, genou étendu, l’arrière-pied doit être maintenu passivement à 5° de valgus physiologique pour maîtriser toute valgisation parasite du talon susceptible de masquer un tendon calcanéen court.

Pieds plats de l’enfant :

A – De la physiologie à la physiopathologie du pied plat :

1- Le pied n’est pas une articulation :

Cette contre-définition fait partie de tous les manuels d’orthopédie pédiatrique, car le pied a un impératif biomécanique qui ne peut le réduire à un simple interligne articulaire.

Le pied est indissociable de tout un ensemble musculosquelettique pouvant être assimilé à une poutre composite.

La main de l’adulte et la main de l’enfant ne diffèrent guère que par le développement du contrôle neurologique, alors que le pied de l’enfant diffère d’une morphologie à l’autre, au cours des transformations dues à la croissance.

La croissance du pied en longueur est d’abord très rapide.

Dès les premières semaines, l’embryon a déjà des pieds parfaitement constitués, alors qu’il n’a pas encore ses reins définitifs ou son canal anal.

Par la suite, la croissance du pied se fera plus lentement et continuera même à se modeler après la naissance, jusqu’à la marche.

L’arche plantaire, si elle peut apparaître comme un témoin d’une adaptation à la marche, est déjà reconnaissable chez le foetus : il existe en fait une authentique préadaptation, la spécificité de la structure de la sole plantaire étant acquise avant la marche.

Le rôle du praticien sera de reconnaître, dans cette architecture variable, les formes particulières appartenant ou non à une pathologie et pouvant entraîner un préjudice fonctionnel très différent d’un préjudice esthétique.

* L’architecture du pied n’est pas statique :

Lors du cycle de la marche, l’empreinte de l’arche plantaire ne représente qu’une brève image du déroulement du pas et des variations morphologiques du pied.

Paradoxalement, toutes les études morphologiques sont basées sur cette seule situation.

Le pied doit sans cesse modifier sa résistance intrinsèque pour passer d’une résistance statique à une résistance dynamique.

Organe de contact au sol, le pied a deux fonctions principales : la stabilisation et la propulsion.

L’homme est caractérisé par l’élévation de son centre de gravité et par la diminution de son polygone de contrôle déterminant un schéma d’instabilité majeure.

Le pied apparaît ainsi comme un organe de contact antigravitaire présidant à la stabilité de l’orthostatisme et de la locomotion : c’est un organe proprioceptif.

Les variations mécaniques sont réalisées grâce à l’interdépendance de tous les systèmes articulaires et surtout musculoligamentaires.

La meilleure comparaison est celle d’un cardan liant les mouvements de la jambe, de l’arrière-pied et du médiopied par l’intermédiaire de la subtalienne et de la médiotarsienne.

Toute attitude en valgus de l’arrière-pied correspond à une sollicitation articulaire sous- et médiotarsienne, avec augmentation de la divergence talocalcanéenne et étalement du pied ; inversement, l’attitude en varus de l’arrière-pied entraîne une coaptation articulaire médiotarsienne, véritable verrouillage passif du pied, qui devient ainsi résistant.

Ce passage d’une structure élastique à une structure rigide se fait sans aucun adjuvant musculaire intrinsèque ou extrinsèque.

* Le pied a une résistance mécanique intrinsèque :

L’arche interne du pied est dessinée très précocement par la forme des os et des articulations, même si celle-ci n’apparaît pas évidente chez le nouveau-né dont la plante du pied est très potelée.

Cette architecture est maintenue par le système capsuloligamentaire propre, renforcé par un système musculaire intrinsèque et extrinsèque.

Seuls les mouvements du pied et le jeu de l’aponévrose plantaire peuvent modifier la morphologie.

C’est ainsi que la tension de l’aponévrose plantaire, en continuité avec le premier orteil, va raccourcir l’aponévrose plantaire et augmenter la hauteur de l’arche interne (alors que celle-ci est souvent abaissée par la laxité ligamentaire).

L’aponévrose plantaire est l’élément clé du système de poutre composite qui, avec les masses musculaires intrinsèques, détermine, lors de l’appui et du déroulement du pas, un système de contre-pression de la poutre calcanéotarso- métatarsienne sollicitée en compression à sa face dorsale et en tension dans sa face plantaire.

* Le squelette du membre sus-jacent impose une adaptation mécanique :

Les variations du morphotype, durant les étapes de croissance, vont retentir sur la forme du pied, par contraintes axiales, tel le genu varum qui sera suivi du genu valgum, avec correction progressive vers l’âge de 12 ans.

Le genu valgum dispose la tibiotarsienne en valgus et augmente la divergence talocalcanéenne en entraînant un appui préférentiel sur le bord interne.

Il existe aussi des contraintes rotatoires : l’antéversion fémorale exagérée est responsable de la rotation interne de tout le membre inférieur, jusqu’à la tibiotarsienne obligeant ainsi une marche avec faible angle du pas et une compensation de la subtalienne.

L’absence de correction de cette antéversion excessive se traduit par une persistance du strabisme rotulien avec, ou non, dérotation de la jambe compensatrice et adaptation obligatoire du pied sous-jacent.

Toutefois, cette relation architecturale a ses limites et il n’existe pas d’étude linéaire rendant compte de la filiation entre les anomalies de rotation et leur retentissement sur la morphologie et la fonction du pied de l’adulte.

* L’architecture du pied dépend de l’âge :

Aucune maman, aucun clinicien ne recherche le dessin de l’arche interne d’un nouveau-né.

Or, celui-ci existe déjà à la phase embryonnaire de la croissance, mais il est masqué par les masses graisseuses.

Les premiers pas, eux aussi, se font sur toute la plante et les parties molles vont peu à peu se modeler, le bord interne devient concave et l’empreinte plantaire apparaît à l’âge de 7 ans.

Tout ceci se réalise dans une chronologie associant la correction de l’antéversion fémorale, l’angle de la pince tibiotarsienne, l’angle fémorotibial, l’angle du pas.

Des variations intrinsèques sont elles aussi constatées : diminution de l’angle formé par le corps et le col du talus, diminution de l’angle de la divergence talocalcanéenne.

La mobilité du pied diminue du fait de la perte progressive de l’hyperlaxité ligamentaire de l’enfant.

Ceci entraîne la correction progressive du valgus, par tension du ligament en « haie », mais aussi de toutes les capsules articulaires qui subissent ce phénomène et tendent à creuser spontanément le bord interne du pied.

2- Le mécanisme d’effondrement du pied n’est pas univoque :

Le dessin des os du pied est une constitution lente de la croissance in utero, avec séparation du bloc calcanéonaviculaire, qui permet l’efficacité de l’adaptation au sol.

Le dessin de la subtalienne autorise la convergence et la divergence de l’arrière-pied, ainsi le pied s’ouvre et se ferme tel un éventail en se rigidifiant ou en s’assouplissant pour s’adapter au sol.

La tête du talus repose en avant sur une structure complexe, cartilagineuse et fibreuse, véritable cavité formée d’avant en arrière par l’os naviculaire, un plan fibreux profond forme le fond (ligament calcanéonaviculaire), les deux surfaces articulaires calcanéennes antérieures sont disposées en arrière.

Cette structure est variable car elle peut s’agrandir ou se rétrécir en fonction de la résistance du plan capsuloligamentaire le plus profond, mais aussi de la morphologie des surfaces articulaires ; cette unité fonctionnelle peut être comparée au cotyle (coxa pedis de Pisani) par sa morphologie, mais aussi par sa pathologie puisqu’il peut exister des dysplasies, des luxations, des troubles de croissance.

3- Quelles sont les étiologies des pieds plats de l’enfant ?

* Pied plat valgus statique :

Il représente 95 % des étiologies.

Le pied plat valgus est le plus souvent secondaire à une hyperlaxité ligamentaire, d’autres localisations témoignent de cet état passager : hyperextension du coude, du genou, dorsiflexion du pied de plus de 45°, pouce qui peut toucher l’avant-bras, doigts qui peuvent être en hyperextension parallèles à l’avant-bras.

Cette hyperlaxité est physiologique chez l’enfant et libère tout l’appareil ligamentaire et capsulaire, elle se corrige lentement après 5 ans.

Le pied plat valgus statique est caractérisé par la grande mobilité articulaire, la réductibilité en équin ou en varus de l’arrière-pied et le creusement en décharge ou en marche digitigrade.

* Pied creux externe :

Il est le piège le plus commun, discrètement affaissé sur le bord interne, avec un valgus prononcé et surtout un médiopied étroit et creux externe.

Ce pied se rencontre souvent à l’âge de 12 ans, sous-jacent à un squelette jambier en pleine transformation.

* Pied en serpentin :

Il peut parfois en imposer pour un pied plat, il faut savoir reconnaître un pied metatarsus varus, avec une adduction prononcée de l’avant-pied et une abduction des orteils réalisant la forme en lettre Z du pied.

Le médiopied est toujours étroit, le calcanéum est en valgus, mais l’os naviculaire n’est jamais saillant et l’image podoscopique objective un appui externe de largeur normale.

* Déformations dues aux anomalies musculaires :

Une grande place était faite, il y a plus de 30 ans, aux étiologies malformatives des pieds plats de l’enfant, tel le troisième muscle fibulaire, dont l’insertion proximale au niveau de la base du cinquième métatarsien serait anormalement déployée en éventail.

La malposition de l’insertion du muscle tibial antérieur est plus fréquente, se portant distalement sur le corps du premier métatarsien.

L’activité du muscle entraîne une véritable dorsiflexion du premier métatarsien et une cassure métatarsocunéenne.

L’étude de l’activité musculaire de ces anomalies d’insertion a permis d’objectiver une contraction de celui-ci avant la phase d’appui.

Palacios ne retrouve, en 1985, que deux patients porteurs d’anomalie musculaire, sur une série de 53 pieds plats opérés à l’âge adulte, dont quatorze avaient été étiquetés dans l’enfance « pied plat banal statique ».

Le tendon calcanéen court, individualisé par Harris dans l’étiologie du pied plat, doit être recherché systématiquement, même s’il s’agit d’une forme étiologique relativement rare.

Le tendon raccourci induit un abaissement du pôle antérieur du calcanéum et de l’avant-pied qui perd, peu à peu, son mécanisme en inversion.

En réalité, la brièveté du tendon calcanéen peut entraîner, soit un valgus, soit un varus de l’arrière-pied.

Seul, le valgus éversion s’accompagne d’un pied plat.

Une pathologie congénitale ou acquise du système nerveux central ou périphérique peut entraîner un déséquilibre musculaire par des rétractions asymétriques, et pérenniser un pied plat de l’enfance.

On saura rechercher une spasticité du tendon calcanéen ou un déficit musculaire distal.

* Malformations intrinsèques osseuses ou cartilagineuses :

Elles représentent les étiologies les plus fréquentes des pieds plats, contracturés, douloureux, de l’adolescent.

Il s’agit, le plus souvent, d’une coalition tarsienne, subtalienne, médiotarsienne ou d’une anomalie morphologique du calcanéum.

La plupart de ces malformations surviennent sur une morphologie de pied plat.

L’enfant se plaint de douleurs de l’articulation subtalienne du médiopied.

Les premières manifestations ont lieu à l’âge de 13 ou 14 ans, car les fusions cartilagineuses et fibreuses sont, jusque-là, relativement incomplètes, encore souples elles permettent le mouvement jusqu’à cet âge.

La lésion devient symptomatique avec des antécédents d’entorse à répétition, de bandage ou d’essai d’immobilisation plâtrée.

Un début aigu et douloureux peut correspondre à une fracture de contrainte qui, en l’absence de consolidation, peut évoluer vers une pseudarthrose avec néoarticulation des bords et du pont fibreux.

Beaucoup de ces synostoses restent asymptomatiques, celles qui sont parlantes ont une expression assez univoque, quel que soit le type de fusion : pied plat contracturé de l’adolescent.

Ainsi, deux grandes variétés de pieds plats de l’enfant peuvent être décrites :

– les pieds plats « résolutifs » par hyperlaxité intrinsèque ou par adaptation à la morphologie passagère (genu valgum) : pieds plats valgus statiques ;

– les pieds plats « invétérés » :

– par hyperlaxité extrinsèque, Marfan, collagénose ;

– par malformation intrinsèque : osseuse (synostose, synchondrose), musculaire (troisième fibulaire) ou par déséquilibre musculaire, affection neuromusculaire, infirmité motrice cérébrale (IMC), spasticité. Les pieds plats résolutifs représentent 95 % des étiologies.

4- Que deviennent les pieds plats à l’âge adulte ?

L’empreinte de type pied plat ne représente que 23 % des 3 619 adultes examinés par Harris, qui a défini trois sortes de pieds plats, d’évolution différente :

– le pied plat flexible et hypermobile qui représente les deux tiers des morphologies des pieds des enfants et n’entraîne aucune gêne à l’âge adulte ;

– le pied plat par tendon calcanéen court qui, lorsqu’il s’accompagne d’une mobilité normale de la subtalienne, est relativement fréquent, 25 %entraînent une gêne à la marche à l’âge adulte ;

– le pied plat rigide par synostose subtalienne ou médiotarsienne, que l’on retrouve dans à peine 10 % des pieds plats de l’adulte, entraîne de manière constante, une douleur et une gêne.

Valenti a prouvé que le pied plat de l’enfant conduisait exceptionnellement à des problèmes morphologiques ultérieurs.

Contrairement aux idées reçues, leur étude montre que le pied, en vieillissant, a plutôt tendance à se creuser qu’à s’effondrer : entre 50 et 60 ans, il y a 5,75 % de pieds plats pour 84,3 % de pieds creux.

Cette modification morphologique est observée chez l’enfant qui passe du morphotype potelé, faussement plat, au pied plat valgus réductible par hyperlaxité intrinsèque, ou par contrainte provisoire du squelette sus-jacent.

Ces pieds sont d’excellent pronostic et s’opposent aux formes invétérées du grand enfant ou de l’adulte que l’on aimerait pouvoir reconnaître précocement.

En réalité, les pieds qui deviendront douloureux ont toujours une réductibilité moindre, ou bien sont des morphotypes familiaux.

Il est facile de les reconnaître chez un adolescent de moins de 14 ans au morphotype particulier : surcharge pondérale, genu valgum, maladresse.

Lors de la pratique du sport ou de la course à pied, les phénomènes douloureux surviennent en médiotarsien ou en plantaire.

Le valgus a souvent fait place à une position neutre du calcanéum et la cassure est surtout marquée dans le médiopied, entre le talus et l’os naviculaire, avec parfois une douleur à la pression de celui-ci.

Ce pied peut rester douloureux à l’âge adulte, lorsque certains métiers imposent la station debout et les piétinements.

On peut retrouver ainsi, après 50 ans, un pied plat du troisième degré.

À cet âge, le calcanéum n’a plus besoin de s’effacer en valgus pour laisser s’effondrer le bord interne et la médiotarsienne est subluxée autour de l’os naviculaire.

Le pourcentage de ces pieds est faible (5 %) et les phénomènes douloureux répondent remarquablement bien au traitement orthopédique.

Les études de Heurly sur les douleurs des pieds des jeunes soldats ont montré une forte proportion de pieds creux douloureux pour un faible pourcentage de pieds plats, dans un rapport de un à neuf.

Pour répondre à l’interrogation des parents sur l’avenir, le meilleur test est la réductibilité dynamique du pied.

L’appréciation du squelette sus-jacent et ses contraintes, passagères ou définitives, permet de comprendre les possibilités de correction spontanée ou non de la déformation du pied.

Enfin, dans le doute, l’examen des pieds des parents ne laisse souvent que peu d’illusions sur l’avenir morphologique, mais rassure quant à l’avenir fonctionnel.

B – Examen clinique du pied plat de l’enfant :

Reconnaître un pied plat est facile, encore faut-il retracer toute l’histoire de la croissance de l’enfant, les problèmes posés par ce pied dès la naissance et lors des premiers pas.

On ne manquera pas de retenir une prématurité, une kinésithérapie particulière pour une déformation bénigne (talus valgus, metatarsus varus), un défaut de l’angle du pas et une anomalie de rotation du squelette jambier à l’âge de la marche.

La doléance habituelle concerne la chaussure qui est déformée, avec un appui préférentiel sur le bord interne et un talon qui chasse en dehors, déformant la coque postérieure.

À l’examen clinique, l’os naviculaire fait saillie sur le bord interne, le valgus est souvent prononcé, la démarche, la course sont maladroites.

Mais l’enfant de moins de 10 ans n’a généralement aucune doléance.

Il ne faut pas manquer de faire préciser la forme des pieds des parents car l’un d’eux a pu porter, pendant de longues années, des semelles correctrices pour un résultat fort décevant.

1- Examen statique :

Lorsque le pied plat est invétéré, le diagnostic ne fait aucun doute avec la saillie de l’os naviculaire sur le bord interne, l’effondrement de l’arche et l’abductus de l’avant-pied.

La déformation sera moins évidente chez un enfant de 18 mois au pied potelé camouflant le squelette.

L’examen statique doit prendre en compte les déformations imposées au pied par le squelette susjacent.

Un excès d’antéversion fémorale sera suspecté lorsque les bords des pieds étant joints, les rotules ne sont plus dans un plan frontal et donnent l’aspect classique du strabisme convergent.

La déformation tibiale en varus et rotation interne est visible lorsque la malléole externe se projette dans le même plan que la malléole interne.

Le valgus des membres inférieurs peut être chiffré par l’écart intermalléolaire lorsque les deux genoux sont en contact modéré.

Tout l’art de l’orthopédiste pédiatre est de reconnaître le caractère définitif ou passager de ces « anomalies » du morphotype : une antéversion excessive chez un enfant de 5 ans peut s’amender spontanément.

De même, un genu valgum d’une fillette de 7 ans a de grandes chances de disparaître à l’âge de 14 ans.

Dans ces cas, les contraintes imposées au cartilage épiphysaire ou aux os de l’arrière-pied ne seront que passagères.

2- Étude dynamique :

Seuls les tests de réductibilité peuvent rendre compte du caractère, fixé ou non, de la déformation.

Le plus simple est de tester la mobilité subtalienne et médiotarsienne, et d’examiner l’enfant assis en bout de table, les pieds pendants, afin d’assister à la reprise spontanée de la cambrure de l’arche interne.

En position d’appui, le redressement passif du gros orteil exagère l’arche interne.

Cela signe la réductibilité du pied plat valgus statique habituel de l’enfant.

Pour innocenter le pied, lorsqu’une rotation sus-jacente peut être en cause, il suffit d’entraîner le mouvement de cardan de la subtalienne et de la médiotarsienne : on empaume la jambe de l’enfant et on imprime un mouvement de rotation externe à celle-ci, la plante du pied se visse alors sur le sol en appuyant préférentiellement sur le bord externe, objectivant la réductibilité du pied plat.

Le test le plus simple est celui de l’étude visuelle de la marche.

En observant l’angle du pas, le déroulement du pas et la marche sur ses orteils, on peut juger des possibilités de creusement de l’arche interne.

Si les parents ont amené des chaussures qui ont été portées depuis plusieurs semaines, l’usure de la semelle sur le bord interne, et surtout la déformation de la coque postérieure, peuvent objectiver la permanence du valgus.

Il ne faut pas omettre d’apprécier les mouvements de chaque groupe musculaire, en particulier les éverseurs, de mesurer l’amplitude des mouvements de la tibiotarsienne afin d’éliminer une éventuelle synostose, synchondrose, et surtout de tester l’absence de brièveté du triceps en empaumant le calcanéum en varus et en donnant de la flexion dorsale à tout le pied.

Cet examen ne serait être complet s’il n’était accompagné d’un examen neurologique, d’une recherche d’une anomalie de la force musculaire, de la laxité ligamentaire, de la morphologie d’ensemble.

C – Examens complémentaires :

Les examens complémentaires sont peu utiles.

La prise des empreintes plantaires a été longtemps systématique.

Elle permet de chiffrer l’importance du plat, mais il ne s’agit en réalité que d’un examen statique ne tenant pas compte du comportement du pied lors de la marche, c’est-à-dire de sa réelle fonction.

Laissons à l’appareilleur le soin de tels relevés pour objectiver « les résultats » de son traitement et contentons-nous, dans la pratique courante, d’un podoscope à miroir avec lequel peuvent s’examiner le membre inférieur, le pied et son empreinte dans le même coup d’oeil.

Ne regardons jamais le pied comme une articulation isolée et immobile.

Les cotations, premier, deuxième et troisième degrés, en fonction de la largeur de la zone d’appui du bord externe, ont peu d’intérêt chez l’enfant.

La podométrie électronique propose de quantifier les pressions statique et dynamique.

Mais une simple empreinte statique, même électronisée, n’apporte guère plus de renseignements qu’un bon podogramme et l’obtention d’une marche franche et sincère chez un enfant de moins de 8 ans est souvent difficile.

Ces techniques, très sophistiquées, ne seront utilisées que pour des études très spécifiques afin de mettre en évidence un déficit musculaire particulier lors d’une marche pathologique.

Il n’est pas utile non plus de demander des radiographies pour mesurer systématiquement la divergence talocalcanéenne. Seuls les pieds les plus préoccupants, pour lesquels la surveillance risque de conduire à une décision thérapeutique d’orthèse lourde ou de chirurgie, méritent des clichés pris suivant les incidences strictes : en charge, de face et de profil, sur lesquelles sont appréciées la divergence de l’arrière-pied et la cassure de l’axe du premier rayon qui se prolonge normalement avec celui du talus.

Chez les enfants de moins de 5 ans, ces mesures sont rendues difficiles par l’imprécision de repérage de l’axe des os de l’arrière-pied.

On saura alors reconnaître des signes défavorables : une hypertrophie de la tête du talus, une divergence talocalcanéenne de plus de 30°, un calcanéum horizontal.

Lorsque l’enfant a plus de 12 ans, et chez l’adolescent, ces mesures retrouvent une grande précision et permettent de situer la cassure du médiopied en talonaviculaire, naviculocunéen ou cunéométatarsien.

D – Traitement des pieds plats de l’enfant :

1- Principes :

Pour restaurer l’arche interne du pied, si celui-ci est souple, il suffit d’imprimer un mouvement de varus et d’enroulement interne.

Le jeu de la médiotarsienne et de la sous-astragalienne va entraîner une diminution de la divergence talocalcanéenne.

Ces manoeuvres sont d’autant plus efficaces que le pied est victime d’une laxité.

Elles peuvent être reproduites en actif par la contraction du tibial postérieur ou du triceps.

Le but du traitement est d’éviter la pérennisation d’une déformation qui suivrait les lois de Delpech et contribuerait à une morphologie définitive en pied plat.

Mais n’oublions pas que 95 % des pieds plats de l’enfant se corrigent spontanément.

2- Méthodes :

* Kinésithérapie :

Les exercices de redressement actifs et passifs du pied ont occupé une grande part des physiothérapeutes du début de ce siècle.

La tonification du tibial postérieur et du fléchisseur de l’hallux, la décontraction du court fibulaire ainsi que du tendon calcanéen, le renforcement du long fibulaire et la lutte contre l’hypotonie plantaire réalisent un faisceau d’ambitions pratiquement impossibles à atteindre pour un enfant.

Toutes les manoeuvres de kinésithérapie sont difficiles à diriger chez l’enfant et la pratique du sport semble tout aussi efficace.

La kinésithérapie peut soulager des contractions musculaires secondaires à des pieds valgus effondrés chez un adulte jeune ou un adolescent mais, de manière isolée, elle n’a jamais fait la preuve de son efficacité chez un enfant de moins de 10 ans.

* Semelles et orthèses :

Semelles et chaussures pour le pied plat font toujours l’objet de la même polémique.

Certains les prescrivent systématiquement, même chez le tout petit enfant, afin d’éviter le pied plat « secondaire ».

D’autres refusent systématiquement cette indication dans le pied plat valgus statique de l’enfant, arguant de sa bonne tolérance et du caractère exceptionnel des indications chirurgicales en fin de croissance, et aussi pour ne pas infliger à l’enfant des chaussures spéciales et des semelles à renouveler tous les 6 mois.

La chaussure n’a plus l’intérêt qu’elle avait du temps de Lelièvre qui préconisait un chaussant entièrement en cuir avec solide contrefort.

Les matériaux ont maintenant évolué et il est inutile aujourd’hui de prescrire des tiges montantes rigides, même dès le premier âge.

Il faut seulement éviter bottes et mocassins. Les semelles d’incitation permettraient au pied de s’autocorriger spontanément par la stimulation lors du déroulement du pas, réalisant une véritable rééducation proprioceptive qui tendra à s’automatiser.

Mais ce sont le plus souvent des semelles de stabilisation qui sont prescrites, telle la coque talonnière fabriquée à partir d’un positif, qui remonte au-dessus de l’os naviculaire et corrige l’affaissement de l’arche interne en soulevant le premier métatarsien et s’arrêtant sous la plante du pied, avant les articulations métatarsophalangiennes.

L’orthèse de stabilisation la plus simple est une semelle avec un coin varisant l’arrière-pied et une cale cunéiforme à base médiane soulevant l’arche interne.

Ainsi est réalisé un véritable coin supinateur postérieur et interne.

L’appui antéroexterne qui entraîne une pronation n’est pas utilisé chez l’enfant.

Des mensurations radiologiques de pieds chaussés avec et sans orthèse ont été pratiquées : les orthèses les plus efficaces corrigent le valgus mais n’entraînent que très peu d’amélioration sur la divergence talocalcanéenne de profil et surtout sur la cassure médiotarsienne.

En 1989,Wenger a publié les résultats d’un rapport concernant l’efficacité des orthèses dans le traitement des pieds plats.

Quatre groupes d’enfants ont été contrôlés pendant une période de 3 ans, les uns portant des chaussures ordinaires, d’autres des chaussures correctives, un troisième groupe des coques talonnières et un quatrième groupe une coque thermomoulée type UCBL.

Le résultat final a démontré que l’arche interne du pied augmente dans tous les groupes et que les enfants qui avaient des chaussures spéciales ou des semelles n’avaient pas une meilleure correction que le groupe témoin.

* Traitement chirurgical :

Les méthodes chirurgicales sont très nombreuses et contrastent avec le peu d’indication concernant le pied plat de l’enfant.

Opération visant à la restauration anatomique par voie extra-articulaire.

L’arthrodèse extra-articulaire a été décrite par Grice, en 1959, sur des pieds plats paralytiques.

L’idée est de placer un greffon par voie externe dans le sinus du tarse, ouvrant celui-ci en corrigeant le valgus.

De nombreuses modifications ont été apportées à cette intervention, Voutey propose une tranchée dans la face supérieure du calcanéum, de Doncker prélève un greffon aux dépens de la diaphyse fibulaire et, pour éviter son déplacement, pratique un vissage talocalcanéen, Vidalot propose l’interposition d’un cylindre de Silastict afin d’éviter l’enraidissement par l’effet d’arthrodèse tout en obtenant un relèvement du talus.

Depuis, de nombreux types d’implant ont été proposés, variant en fonction du matériau utilisé et de la forme de l’implant.

Le but est toujours d’interposer en extra-articulaire, dans le sinus du tarse, par voie externe, un implant conique qui relèvera le talus.

Ainsi l’acier, le Silastict, le Téflont ont conduit à l’élaboration d’un implantcylindre à expansion en polyéthylène proposé par Giannini.

L’opération du cavalier a été imaginée et décrite pour la première fois par R Judet, J Judet et Rigault, dans le but de corriger le vice de position des éléments squelettiques de l’arrière-pied.

Cette intervention a été appliquée au pied plat valgus de l’enfant pour corriger et maintenir la divergence talocalcanéenne.

Par une voie antérieure, le col du talus est dégagé et, une fois la libération et la correction obtenues entre le talus et le calcanéum, par manoeuvres de varus, une vis est placée d’avant en arrière et de haut en bas, dans le sinus du tarse, fixant la divergence talocalcanéenne dans sa réduction.

Cette vis est provisoire et doit être enlevée entre le troisième et le sixième mois.

Opération sur les parties molles.

Le raccourcissement de l’aponévrose plantaire, l’allongement du tendon calcanéen, la correction des cordes tendineuses externes ou des anomalies d’insertion du tibial antérieur, sont des opérations adjuvantes qui ont peu d’effet sur la morphologie mais peuvent améliorer la fonction.

L’imagination a été grande : ostéotomie d’allongement externe, de raccourcissement interne, ostéotomie du calcanéum, du premier cunéiforme.

Giannestras a décrit une intervention visant à restaurer l’arche interne du pied par une réduction de la luxation naviculocunéenne et une translocation du tibial antérieur.

L’arthrodèse du bord interne est limitée à un ou deux espaces articulaires et le maintien de la correction.

3- Indications :

Des indications thérapeutiques sont exceptionnelles pour le pied plat de l’enfant.

Mais cela ne doit pas cacher la difficulté qu’il y a à reconnaître, dans un pied plat valgus statique, un risque de déformation définitive ou, pire encore, de méconnaître, lors d’un examen un peu sommaire, une anomalie tendineuse ou osseuse qui fera parler d’elle quelques années plus tard.

* Orthèses et chaussures :

Elles ne doivent pas être condamnées.

Depuis Wenger, la controverse à leur sujet est maintenant terminée et leur prescription doit être faite en toute connaissance de cause : apporter à l’enfant un confort de marche et un confort de chaussage.

Wenger insiste beaucoup sur l’importance de l’examen du pied plat banal et des explications que l’on donne à la famille.

Aucune phrase péremptoire et définitive ne doit être prononcée, le pied plat ne doit pas être nié et la préoccupation familiale doit être prise en compte.

* Indications chirurgicales :

Elles sont exceptionnelles.

À la question posée : « Quel pied peut-on corriger ? », il est classique de répondre, « ceux qui ne se corrigeront pas ».

C’est là le vrai problème puisqu’il ne concerne en réalité que 4 ou 5 % des pieds plats de l’enfant.

En englobant les anomalies osseuses et tendineuses que l’on reconnaîtra par l’examen clinique, la plupart de ces pieds se présentent souvent comme de grands pieds plats, d’apparition précoce chez l’enfant avec un important effondrement interne, une absence de réduction à l’examen dynamique et aucune amélioration lors des phases de correction axiale et rotatoire des membres inférieurs.

Les radiographies peuvent parfois aider, en objectivant l’importance de la divergence talocalcanéenne, l’incongruence de la tête du talus, l’horizontalisation du calcanéum, l’hypotrophie de l’os naviculaire.

+ Avant l’âge de 7 ans :

L’indication chirurgicale sur de tels pieds est exceptionnelle.

On s’accommode de la déformation : coque postérieure, semelle varisante aident à supporter la déformation et à limiter l’usure des chaussures.

C’est la persistance de la déformation qui peut faire poser l’indication chirurgicale avant l’âge où se produit la poussée de croissance maximale de l’enfant et les grandes variations d’orientation jambière.

Sur un tel squelette, on peut seulement proposer une amélioration de la divergence talocalcanéenne par le procédé le plus simple, Judet, Rigault ou implant subtalien de Giannini, en ayant pris soin de prévenir la famille de la nécessité d’une immobilisation, du risque d’une hypercorrection, d’une récidive, d’un discret enraidissement résiduel et de l’obligation d’enlever le matériel après le sixième mois.

+ Après 13 ans :

Lorsque la croissance du pied commence à se terminer, le squelette du pied apparaît sous sa morphologie définitive, les anomalies morphologiques se démasquent (bec calcanéen, synostose, synchondrose) par une symptomatologie douloureuse.

Et, parfois, un pied plat bien toléré jusqu’alors devient une gêne à la marche ou une maladresse lors de la pratique du sport, qui seront traitées spécifiquement.

S’il s’agit d’un pied plat valgus statique sans anomalie tendineuse ou osseuse et entraînant des phénomènes douloureux internes et inférieurs, le traitement orthopédique doit être proposé de première intention et ce n’est que devant son inefficacité que l’on peut proposer une ostéotomie de soustraction du premier cunéiforme et une arthrodèse limitée à une ou deux articulations du médiopied, avec translocations tendineuses du tibial antérieur et du tibial postérieur.

Cette intervention simple a fait preuve de son efficacité et peut être proposée sur un squelette mature.

On ne saurait regretter, à ce stade, l’abstention chez le jeune enfant, quelques années auparavant.

Pied plat valgus de l’adulte :

Le pied plat valgus se définit comme l’association pathologique d’un valgus de l’arrière-pied et d’une supination de l’avant-pied.

Le valgus de l’arrièrepied se recherche sur le patient debout sur le podoscope ; la supination comme précédemment définie.

L’examen au podoscope permet l’évaluation du degré du pied plat (1er, 2e, 3e degré) sur l’aspect de la bande d’appui externe et surtout la recherche de zones d’appui pathologiques (partie moyenne de l’arche interne, barre d’appui métatarsienne antérieure).

L’analyse de l’orientation de l’avant-pied sur l’arrière-pied dans le plan horizontal et l’étude du clavier métatarsien et des orteils complètent cet examen.

En position couchée, il faut étudier la souplesse articulaire, rechercher d’éventuelles rétractions tendineuses ou tendinopathies, effectuer un testing musculaire et analyser l’état de la plante.

A – Étude radiographique :

Elle est essentielle ; il faut impérativement disposer de clichés en charge :

– les deux chevilles de face avec cerclage (Meary), avec deux objectifs : évaluation du valgus de l’arrière-pied, étude de l’état de la tibiotalienne (congruence articulaire, signes de surcharge sous-chondrale) ;

– les deux pieds de profil, avec analyse précise de l’arche interne, en portant toute son attention sur la position du calcanéum et du talus (à la recherche d’un équin de l’arrière-pied) et sur l’alignement des différentes pièces osseuses : les grands axes verticaux des différentes articulations (médiotarsienne interne, naviculocunéenne interne, cunéométatarsienne interne) devant être perpendiculaires à la ligne continue qui unit l’axe longitudinal du col et de la tête talienne à l’axe du premier métatarsien.

On identifiera et mesurera avec précision la ou les cassures (à sinus dorsal) qui affectent cette ligne chez le patient porteur d’un pied plat valgus ;

– les deux pieds de face dorsoplantaire.

Cette incidence étudie tout particulièrement la position de l’avant-pied par rapport à l’arrière-pied (abductus de l’avant-pied) ainsi que la longueur respective des segments postérieurs de l’arche interne et de l’arche externe (l’allongement de la première étant un facteur d’abductus de l’avant-pied).

On mesurera également la divergence talocalcanéenne ; on identifiera d’éventuels ossicules accessoires et on évaluera l’alignement des têtes métatarsiennes.

B – Tableaux cliniques :

Il est extrêmement difficile d’établir un lien évolutif logique entre le pied plat de l’enfant et les formes de l’adulte, ce qui rend malaisée l’élaboration d’éléments prévisionnels de tolérance ou de décompensation à long terme.

C’est la raison pour laquelle nous nous limiterons à la description des différents motifs de consultation.

Ceux-ci sont en grande partie liés à l’âge.

Nous en décrirons successivement quatre.

1- Pied plat contracturé de l’adolescent :

C’est à Jones que revient, en 1905, la description du lien pathologique entre pied plat valgus et contracture des muscles fibulaires.

De nombreuses hypothèses étiopathogéniques ont été avancées ; on peut penser qu’une souffrance de la subtalienne peut entraîner, dans un effort de stabilisation, la contraction des muscles périarticulaires ; cette dernière pouvant générer une contracture réflexe et un cercle vicieux pathologique.

* Tableau clinique :

Il est caractéristique.

Il s’agit typiquement d’un grand adolescent qui, à la suite d’une surcharge physique (stage d’apprentissage, effort sportif, marche prolongée), est affecté brutalement d’un syndrome hyperalgique du cou-depied dont l’intensité peut être incompatible avec la marche.

L’examen est très difficile ; il existe certes un pied plat valgus marqué, mais toute tentative de mobilisation de la subtalienne et du couple de torsion est impossible, eu égard au caractère hyperalgique de l’arrière-pied qui est bloqué en valgus.

Les tendons du tibial antérieur et de l’extenseur commun des orteils saillent sous la peau et sont très douloureux à la palpation.

Un signe clinique doit d’emblée orienter : l’avant-pied est non pas en supination mais est bloqué en pronation, ce qui traduit la contracture du muscle long fibulaire (toute tentative de réduction aggravant la contracture et les phénomènes douloureux).

Dès lors, le diagnostic est fait ; il faut rechercher une synostose incomplète de l’arrièrepied sur les signes radiographiques suivants :

– ostéophytose dorsale de la tête talienne ou dorsale bifocale de la médiotarsienne interne ;

– hypertrophie et sclérose de l’apophyse antérieure du calcanéum (beaking calcanéen) ;

– perte de la définition du pôle inférieur de la tête talienne.

Ces petits signes appellent confirmation non pas sur le classique cliché de trois quarts déroulé et l’incidence rétrotibiale, mais par un scanner à la recherche d’une synostose incomplète calcanéonaviculaire ou talocalcanéenne.

Il est indispensable de demander au radiologue d’explorer par des coupes fines la jonction calcanéonaviculaire, la région rétrosustentaculaire et le secteur talocalcanéen postérieur (pérituberculaire postérieur) à la recherche d’une coalition interosseuse pathologique sous la forme d’une synchondrose (interposition de tissus fibrocartilagineux) ou d’une syndesmose (contact osseux direct).

* Traitement :

L’intensité du syndrome douloureux impose le plus souvent un traitement d’urgence.

Il est toujours de règle, dans un premier temps, d’effectuer un examen sous anesthésie générale (qui vérifiera la liberté retrouvée de la subtalienne et recherchera des craquements très évocateurs de synostose incomplète) suivi d’une botte en résine en équin et léger varus.

Celle-ci soulage immédiatement le patient et permet une reprise de ses activités.

La récidive, en cas de synostose, est la règle à l’ablation de la contention ; mais cette attitude permet d’adapter la tactique chirurgicale ultérieure :

– soit résection simple d’une synostose calcanéonaviculaire (intervention légère réalisée par voie externe) chez les plus jeunes ;

– soit double arthrodèse (subtalienne, médiotarsienne interne et médiotarsienne externe) en cas de synostose talocalcanéenne (dont la résection simple se solde constamment, chez l’adulte, par une récidive) ou en cas de déformations majeures.

Les résultats sont alors excellents et durables avec récupération de l’indolence, et le plus souvent, possibilité de reprise de la course.

2- Douleurs du bord interne du pied :

Ce motif de consultation n’est pas exceptionnel.

Il s’observe chez l’adulte jeune, typiquement entre 20 et 35 ans.

Il regroupe plusieurs entités pathologiques, isolées ou associées à divers degrés.

Le dénominateur commun est un pied hyperlaxe avec tendon calcanéen court.

Il peut s’agir d’un conflit sur le bord interne de l’os naviculaire, d’une distension capsuloligamentaire interne et d’une tendinopathie du tibial postérieur ou d’une souffrance articulaire localisée.

* Conflits sur le bord interne de l’os naviculaire :

C’est habituellement le tableau de l’os tibial externe (os naviculaire bipartite ou os naviculaire accessoire) à l’origine d’une zone d’appui anormale avec le bord interne de la chaussure.

Les conséquences en sont majorées par l’hypertrophie et l’incurvation habituelle du pôle interne de l’os naviculaire et le valgus équin de l’arrière-pied (aggravation du conflit et majoration des contraintes mécaniques sur le fibrocartilage jonctionnel).

* Phénomènes de distension capsuloligamentaire :

Ils intéressent en premier chef le ligament calcanéonaviculaire (spring ligament), qui est surchargé par l’équin talien, et le ligament talonaviculaire, distendu par l’abductus secondaire de l’avant-pied.

Le tableau clinique comporte très fréquemment une tendinopathie du tibial postérieur qui est responsable de douleurs mécaniques pré- et sous-malléolaires internes, à irradiation ascendante vers le bord interne de la jambe. Cette dernière peut s’accompagner d’une synovite plus ou moins marquée (quelquefois par le biais d’une communication directe entre la gaine synoviale et le foyer de pseudarthrose).

Le diagnostic est clinique (douleurs à la palpation et à l’inversion active contrariée) ; il est confirmé par l’imagerie (ténotomodensitométrie ou imagerie par résonance magnétique).

Cette tendinopathie peut aboutir à une rupture pathologique du tibial postérieur, nous y reviendrons.

* Souffrance articulaire :

Il peut s’agir enfin d’une souffrance articulaire dépistée par la radiographie en charge, sous la forme d’une sclérose sous-chondrale localisée et d’une perte de l’alignement des articulations moyennes de l’arche interne réalisant une cassure à sinus dorsal.

Il est capital de localiser avec précision le siège de cette cassure : médiotarsien interne, naviculocunéen ou mixte périnaviculaire.

De même, il faut identifier un trouble de croissance osseuse, notamment sur l’os naviculaire qui prend alors une morphologie trapézoïdale à base plantaire.

Enfin, il faut évaluer, sur l’incidence dorsoplantaire, l’abductus de l’avant-pied sur l’arrière-pied et dépister l’allongement relatif du talus par rapport au cuboïde.

* Traitement :

Le traitement orthopédique doit toujours être prescrit de première intention sous la forme de règles de chaussage (chaussures enveloppantes, comportant un talon bien marqué, une semelle extérieure suffisamment rigide, un bord interne résistant et une semelle intérieure avec un recueil de voûte bien dessiné).

Ces petits moyens sont habituellement efficaces et suffisants.

En cas de persistance de la gêne, on discutera le traitement chirurgical en n’omettant pas de préciser au patient le caractère souvent prolongé des suites. Les différents temps chirurgicaux pourront, selon le cas, être réalisés isolément ou en combinaison.

+ En matière d’os tibial externe :

Il ne faut pas, à notre avis, chercher à obtenir la consolidation de la pseudarthrose naviculaire (comme l’a proposé Meary), car cette technique laisse persister le conflit alors que le matériel d’ostéosynthèse implanté peut être la cause de tendinopathie résiduelle.

Les digitations terminales du tibial postérieur, qui s’insèrent non seulement sur l’os naviculaire mais aussi, par l’intermédiaire d’une épaisse lame fibreuse, sur la face plantaire du premier cunéiforme et la base des métatarsiens internes, autorisent l’excision de l’ossicule sans interruption de la continuité tendineuse (Kidner).

Il faut donc aborder le plan osseux par voie sous-périostée dorsomédiale, réséquer l’ossicule dans sa gaine fibreuse, mettre au plan des os voisins le bord interne hypertrophié de l’os naviculaire et transposer à la face plantaire de l’os naviculaire, grâce à des points transosseux, le tendon du tibial postérieur en terminant l’intervention par une suture en paletot des ligaments calcanéonaviculaire et talocalcanéens.

+ En matière de dysmorphie des arches longitudinales :

Un temps osseux est le plus souvent nécessaire :

– en cas de cassure sagittale sans souffrance articulaire, lorsqu’il existe une dysmorphie naviculaire, il est possible d’effectuer une ostéotomie cunéiforme, à base plantaire de l’os naviculaire, en association à une stabilisation ligamentaire ;

– en cas de cassure sagittale avec souffrance articulaire, on effectuera une arthrodèse limitée et centrée sur la zone d’instabilité, avec greffe osseuse dorsale, isolément sur la cunéonaviculaire interne et moyenne, ou la médiotarsienne interne, ou sur les deux interlignes (avec de préférence, dans ce cas, deux greffons séparés et non une greffe unique en pont) ;

– en cas d’abductus prédominant, il est logique de rééquilibrer la longueur respective des arches antéropostérieures par ostéotomie d’allongement du cuboïde, ou arthrodèse calcanéocuboïdienne avec interposition d’un greffon, en association ou non à une ostéotomie de fermeture de l’os naviculaire.

Il est important d’insister sur les points suivants :

– en cas de rupture du tendon du tibial postérieur, on effectuera un temps de réanimation en utilisant le tendon du fléchisseur commun des orteils (intervention de Johnson) auquel il est préférable d’associer une stabilisation des arches ;

– la nécessité d’allongement du tendon calcanéen se jugera en peropératoire après reconstitution des arches antéropostérieures.

Ce geste ne sera réalisé qu’en cas d’équin résiduel vrai.

Il faut se souvenir en effet qu’un allongement de 1 cmentraîne un affaiblissement de 50 %de la force musculaire du triceps sural.

On s’adressera de préférence à un procédé type Green ou incisions scalariformes plutôt qu’à un allongement par dédoublement en raison du risque d’affaiblissement musculaire ;

– dans tous les cas, on vérifiera en préopératoire l’intégrité de la tibiotalienne et, en peropératoire, la bonne position de l’arrière-pied (arrière-pied cerclé type Meary), la restauration des arches de profil strict et en incidence dorsoplantaire, ainsi que l’équilibre clinique de la pronosupination (l’arrièrepied étant bloqué passivement).

3- Formes révélées par un hallux valgus :

L’association serait, sur le plan théorique au moins, fréquente, si l’on se souvient que l’hallux valgus est habituellement secondaire à une supination de l’avant-pied (pes supinatus) dans un contexte d’hypermobilité sagittale du premier rayon qui peut toucher la cunéométatarsienne et la cunéonaviculaire interne.

Cette notion justifie la réalisation de radiographies des pieds en charge avant traitement chirurgical de l’hallux valgus, à la recherche d’une cassure plus ou moins marquée de l’arche interne.

Le plus souvent, les interventions restaurant la stabilité du premier métatarsien (telle l’intervention de Mac Bride dont on peut renforcer l’efficacité par un point de syndesmopexie, entre la première et la deuxième tête métatarsienne) ont une efficacité suffisante pour stabiliser l’arche interne et éviter une récidive.

Lorsque la cassure cunéonaviculaire apparaît importante, il est préférable d’y associer un geste de stabilisation de l’arche interne par une arthrodèse limitée.

En cas de pied plat invétéré, il faut bien entendu traiter séparément les deux déformations, en commençant par la correction première du trouble morphostatique de l’arrière-pied et des arches antéropostérieures.

4- Décompensations tardives :

Elles réalisent le tableau le plus intéressant car elles cumulent le maximum de difficultés.

Il s’agit typiquement d’une femme de la soixantaine, se sachant porteuse d’un pied plat valgus jusqu’ici parfaitement toléré et qui, brutalement, à la suite fréquemment d’un traumatisme (pris à tort pour une entorse) voit apparaître un syndrome douloureux mécanique pré- et sousmalléolaire interne, des difficultés de marche et surtout une majoration de la déformation avec véritable dévers en dehors du pied sous le cou-de-pied.

Ce tableau ne traduit pas une décompensation dégénérative du couple de torsion mais correspond à deux entités qui représentent peut-être deux stades évolutifs : la rupture du tendon du tibial postérieur, la décompensation dans la tibiotalienne.

* Rupture du tibial postérieur :

Le diagnostic en est clinique.

Il repose sur la perte des possibilités d’inversion active du pied, et surtout au testing musculaire, par la non-perception à la palpation de la corde du tendon du tibial postérieur entre le pôle interne de l’os naviculaire et la malléole interne.

Deux manoeuvres dynamiques permettent de confirmer le diagnostic :

– la perte du varus talonnier physiologique lors de l’appui monopode sur la pointe, ce dernier s’effectuant en fort valgus de l’arrière-pied du côté pathologique ; le patient étant au mieux examiné de dos (too many toes de Johnson) ;

– test de relèvement de la première tête métatarsienne (Hintermann) ; sur un patient en station debout en appui bipodal, la rotation interne passive du squelette jambier entraîne, du côté pathologique, le relèvement de la première tête métatarsienne.

Les déformations radiologiques sont alors majeures : le valgus de l’arrièrepied est de l’ordre de 15 à 20°, le talus est presque vertical, le calcanéum horizontal ; la cassure des arches antéropostérieures est évidente.

Il faut en préciser la localisation.

De même, il faut analyser l’état de la tibiotalienne, sur des clichés en charge.

Le problème thérapeutique est ici majeur car les possibilités du traitement conservateur sont limitées.

En effet, l’importance de la désaxation explique l’inefficacité des semelles orthopédiques dont le recueil de voûte est repoussé en dedans du pied avec le bord interne de la chaussure.

Il ne reste que la possibilité d’une chaussure orthopédique à tige montante et à bord interne rigide, de façon à parfaitement stabiliser une semelle intérieure comportant une surélévation talonnière et un recueil de voûte bien dessiné et bien marqué.

Sur le plan chirurgical, la double arthrodèse du couple de torsion trouve ici ses limites. Dans un travail précédent réalisé pour la Société d’Orthopédie de l’Ouest, nous avions revu à long terme dix grands pieds plats invétérés de l’adulte, traités par double arthrodèse.

Avec un recul de plusieurs années, nous avons pu mettre en évidence cinq décompensations dans la tibiotalienne : deux cliniquement asymptomatiques avec pincement articulaire externe, trois très bruyantes avec reproduction de la déformation initiale, bascule talienne majeure en valgus ayant abouti dans un cas à une fracture de fatigue du péroné.

Ces détériorations ont pu être rattachées à la persistance d’un supinatus résiduel de l’avant-pied, l’arthrodèse ayant porté sur le couple de torsion et ayant laissé persister une cassure résiduelle dans la cunéonaviculaire ; cette dernière étant à l’origine de sollicitations en valgus et d’un transfert de la surcharge asymétrique vers la tibiotalienne par le biais de l’arthrodèse subtalienne.

Nous proposons, face à ces grandes déformations qui restent souples et se corrigent le plus souvent sous anesthésie générale, la restauration des arches antéropostérieures sans arthrodèse de principe de la subtalienne.

L’intervention commence par la correction et la stabilisation de la divergence talocalcanéenne grâce à une vis de diamètre 5 introduite de dedans en dehors du col du talus à la corticale plantaire externe du calcanéum (au besoin un greffon spongieux peut être tassé dans le sinus du tarse). Puis, à la demande, en fonction du siège et de l’importance des cassures, est réalisée une série d’arthrodèses :

– sur la talonaviculaire avec reposition du scaphoïde dans l’axe du col talien et montage par une vis introduite de bas en haut et de dedans en dehors ;

– sur la cunéonaviculaire interne et moyenne avec greffon dorsal ;

– sur la calcanéocuboïdienne avec greffon latéral ; ces deux dernières étant montées par agrafage direct. Bien entendu, on aura, avant l’intervention, vérifié avec soin l’intégrité de la tibiotalienne sur l’incidence de Meary en charge et en peropératoire, contrôlé le bon positionnement des arthrodèses par double cerclage (talonnier et métatarsien antérieur).

L’attitude vis-à-vis du tendon calcanéen est déterminée à la demande, en veillant à ne traiter que les équins résiduels importants.

Nous avons réalisé dix interventions de ce type avec des résultats encourageants, mais au prix de suites longues ; le résultat final étant acquis en 10 à 12 mois, au prix d’une immobilisation par botte en résine de 3 mois (dont 45 jours en décharge).

* Dislocation dans la tibiotalienne :

C’est probablement le stade ultime de l’évolution d’un pied plat gravissime et enraidi.

Nous avons observé cette évolution chez des sujets âgés (70 ans et plus) sous la forme d’une dislocation majeure de la tibiotalienne qui peut être révélée par une fracture de fatigue du péroné.

La conservation de la tibiotalienne et du couple de torsion est ici impossible.

Plutôt que de réaliser une panarthrodèse (de réglage délicat), nous préférons effectuer :

– soit une arthrodèse tibiotalienne et subtalienne postérieure, solution que nous avons effectuée dans deux cas avec un bon résultat à distance ; le supinatus résiduel n’ayant pas eu de conséquences à long terme ;

– soit une talectomie avec arthrodèse tibiocalcanéenne, qui a l’avantage de régler le double problème tibiotalien et subtalien au prix d’un raccourcissement de l’ordre de 2 à 3 cm.

En cas de détérioration majeure de la médiotarsienne interne, il est préférable d’effectuer une talectomie totale avec arthrodèse tibionaviculaire.

Lorsque la médiotarsienne interne n’est pas trop altérée, il est possible de réaliser une talectomie corporéale avec arthrodèse tibio-céphalo-talienne après incorporation d’un greffon entre la tranche de section talienne et la face antérieure du pilon tibial pour restaurer le cavus interne.

Les différents tableaux cliniques dont sont affectés l’enfant et l’adulte porteurs de pieds plats valgus sont extrêmement variés, aussi bien dans leur aspect morphologique que leur expression fonctionnelle.

Ils justifient une analyse clinique précise et sa confirmation grâce à une imagerie simple mais dont on saura exiger qualité et rigueur technique.

C’est en effet le seul moyen d’élaborer un enchaînement physiopathologique clair et précis servant de base à la discussion thérapeutique à la lumière de l’appréciation objective de l’intolérance fonctionnelle d’une part, et de la juste évaluation de la relation avantage-risque d’autre part.

Ce cheminement diagnostique et thérapeutique, habituel en matière de pathologie du pied, trouve ici toute sa justification compte tenu de la complexité de la pathologie prise en compte ; notion qui, dans notre travail, a pu être exposée dans un souci de clarté de façon un peu trop schématique et quelque peu simplificatrice.

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