Pelade

0
3015

Introduction :

La pelade ou « alopécie en aires » représenterait 2 % des consultations en dermatologie.

Malgré son caractère bénin, elle perturbe sévèrement la vie sociale et affective des individus.

PeladeLes récurrences, de rythme et de sévérité difficilement prédictibles, laissent au patient un sentiment d’incompréhension et de grande vulnérabilité.

C’est une maladie générale, au même titre que d’autres affections auto-immunes cutanées, où seules quelques zones atteintes apparaissent cliniquement.

La compréhension de ses mécanismes physiopathologiques et son traitement ont beaucoup évolué ces vingt dernières années, du fait de nombreux travaux de recherche.

Une nouvelle classification serait souhaitable, notamment pour homogénéiser l’évaluation des moyens thérapeutiques actuels ou futurs.

Épidémiologie :

La pelade est une affection fréquente.

Le risque, selon la Mayo Clinic, de développer une pelade au cours de sa vie est estimé à 1,7 %.

Nous ne disposons pas d’études comparatives des prévalences selon les groupes de population, mais il semble que les sujets noirs sont moins souvent atteints et les Japonais beaucoup plus.

Il n’existe aucune prédominance de sexe. Une personne atteinte sur deux a moins de 20 ans.

Un début dans les premiers mois de vie reste rare mais possible : 2 % des pelades débuteraient avant 2 ans.

La grossesse est d’effet variable et imprédictible.

L’incidence familiale varie selon les études de 10 à 27 %.

Si l’un des deux parents est atteint d’une pelade grave, le risque pour l’enfant de développer une pelade au cours de sa vie serait de 6 % et celui de développer une pelade grave de 2 %.

Clinique :

A – ATTEINTE DU CUIR CHEVELU :

La plaque de pelade typique se présente comme une surface glabre bien limitée, ronde ou ovalaire.

Elle est asymptomatique, lisse, sans atrophie, sans squame, de la couleur du cuir chevelu.

Les orifices pilaires sont visibles.

Plus rarement elle sera rosée, oedémateuse à son stade initial, précédée de prurit ou de douleur.

Elle s’étend en règle progressivement, puis se stabilise.

Pendant la phase d’extension, les cheveux situés en bordure de la plaque ne résistent pas à une traction douce ; souvent sur cette zone frontalière sont présents les caractéristiques « cheveux peladiques » dits en « point d’exclamation » : ce sont des cheveux de 4 à 5mm de long, renflés à leur extrémité distale qui est sombre.

Ils ont l’allure d’un gourdin et se détachent très facilement à la traction, témoins de l’activité d’une pelade.

Si le processus inflammatoire est stoppé, le cheveu reprendra son adhérence au cuir chevelu et s’allongera, prenant alors l’allure d’une pousse de plantain, signifiant alors le bloquage de la chute.

Plus rarement on observera des cheveux « cadavérisés », c’est-à-dire des orifices pilaires remplis de débris de cheveux détruits.

Cette présence est le signe d’une activité encore plus intense.

La constatation de cheveux blancs est courante à la surface d’une plaque, le processus peladique touchant surtout les cheveux pigmentés et la repousse s’effectuant souvent, au début, sous la forme de duvets, voire de cheveux terminaux blancs.

À la palpation, le cuir chevelu offre une hyperlaxité dans les formes les plus anciennes.

Les plaques de pelade corporelle donnent un aspect clinique identique.

B – ATTEINTE DES ONGLES :

Elle affecte 10 à 20 % des patients peladiques, mais 50 % des enfants.

Différentes formes cliniques sont notées :

– dépressions ponctuées (pits) superficielles de 0,25 à 0,5 mm de diamètre.

Réparties de façon géométrique ou dispersées, elles sont dues à une atteinte plurifocale de la matrice proximale ;

– ongles grésés ou trachyonychie : l’ongle est comme passé au papier de verre ; dans 15 % des cas chez l’enfant et 4 % des cas chez l’adulte, plus souvent l’homme que la femme.

Cet aspect se présente davantage dans les formes sévères, en particulier chez l’adulte ;

– érythème en mottes (spotting) de la lunule qui apparaît irrégulièrement rouge.

Il correspond aussi à des formes sévères de pelades.

Exceptionnellement peut se manifester chez l’adulte un érythème uniforme de la lunule ;

– onychomadèse, onycholyse, stries longitudinales, ongles cassants.

Ces anomalies peuvent toucher de un à tous les ongles, précéder, évoluer parallèlement, ou succéder à la pelade capillaire.

La dénomination twenty nail dystrophy of childhood a fréquemment la pelade pour étiologie.

C – AUTRES ATTEINTES :

Les atteintes oculaires sont très discutées : certains retrouvent des anomalies, principalement du cristallin (cataracte), mais aussi de l’iris (modifications de couleur) ; des modifications asymptomatiques de l’épithélium rétinien ont été mises en évidence par une diminution des réponses à l’électro-oculogramme, en particulier dans les pelades sévères ; elles seraient, pour l’auteur, consécutives à l’atteinte des cellules pigmentaires rétiniennes.

Les atteintes sudorales sont également mises en avant dans quelques publications : diminution des glandes sudorales mise en évidence par le test à la pilocarpine, mais d’autres publications ne retrouvent aucune différence avec les sujets contrôles.

D – FORMES CLINIQUES :

Selon l’aspect et la topographie de l’atteinte peladique, diverses formes cliniques ont été individualisées :

– pelade en plaques (PeP), de nombre et topographie variable ;

– pelade ophiasique (ophiasis=serpent) débutant en zone occipitale et remontant progressivement au-dessus des oreilles, pouvant aller jusqu’à l’unique persistance d’une bande de cheveux au sommet du crâne.

Par opposition et de manière anecdotique, pelade de type « sisaïpho », l’inverse, respectant la périphérie ; ou encore à type d’alopécie androgénétique ;

– pelade décalvante totale (PDT) (alopecia totalis) où aucun cheveu ne persiste ;

– pelade universelle (PU) (alopecia universalis) où aucun poil ni cheveu ne persiste ;

– pelade diffuse, plus rare et de diagnostic plus délicat, elle donne un aspect clairsemé à la chevelure ;

– pelade de la barbe, des cils, des sourcils, d’une zone corporelle localisée ;

– pelade à cheveux blancs, par disparition sur une chevelure « poivre et sel » des cheveux pigmentés, donnant un aspect blanc clairsemé ; ou après une repousse, initialement blanche ;

– pelade périnævoïde

– pelade unguéale, isolée ou associée à d’autres signes de pelade.

E – ÉVOLUTION :

La poussée de pelade peut se limiter à une ou plusieurs plaques qui évolueront sur quelques semaines ou mois, puis régresseront spontanément.

Elle peut aussi, plus rarement, s’étendre et devenir décalvante, voire universelle. Dans certains cas, elle reste fixe ou régresse en laissant quelques zones fixes « bastions » (occiput) qui repoussent beaucoup plus tardivement ou ne repoussent jamais.

La pelade-maladie peut ne se manifester qu’en une seule poussée, mais aussi évoluer tout au long de la vie avec des poussées répétées.

Il n’y a pas de signe distinctif initial entre ces formes extrêmes.

F – EXAMEN DU PATIENT PELADIQUE :

L’examen clinique spécifie la topographie des plaques, la surface atteinte, la présence ou non de cheveux peladiques ou cadavérisés en bordure des plaques, l’existence éventuelle d’une traction positive à distance des zones glabres, la laxité du cuir chevelu, les plaques corporelles et l’atteinte unguéale.

La thyroïde est palpée systématiquement.

Associations pathologiques :

A – ATOPIE :

Vingt-cinq pour cent des patients peladiques (5 à 60 % selon les publications) seraient atopiques.

Ikeda en dénombre 10 % et en fait une entité bien individualisée de relatif mauvais pronostic ; la classification pronostique élaborée par cet auteur est, à ce jour, la seule publiée sur la pelade.

B – VITILIGO :

Il s’associe à la pelade dans 4 à 6% des cas.

C – AFFECTIONS THYROÏDIENNES (PRINCIPALEMENT THYROÏDITE DE HASHIMOTO) :

Cette association reste discutée selon les auteurs ; si, dans certaines études, de nombreuses anomalies biologiques sont mises en évidence chez les patients atteints de pelade, celles-ci ne sont jamais comparées à celles d’une population témoin.

La thyroïdite de Hashimoto pourrait être de prévalence élevée chez l’enfant, mais les critères de diagnostic sont mal établis : élévation des anticorps antithyroïdiens sans signe clinique ni modification des hormones dans la majorité des cas.

Lorsque les deux pathologies coexistent chez un même patient, elles ne présentent pas de corrélation évolutive.

Dans l’état actuel des connaissances, il paraît injustifié de réaliser à titre systématique un bilan biologique thyroïdien.

D – AUTRES ASSOCIATIONS :

– Les autres associations sont le plus souvent dysimmunitaires : maladie coeliaque (qui, selon une étude récente, pourrait être présente, symptomatique ou non, dans environ un cas sur 100 de pelade, c’est-à-dire trois fois plus que dans la population générale), lichen plan, anémie de Biermer, thymome, lupus érythémateux, polyarthrite rhumatoïde, myasthénie, rectocolite hémorragique ; le diabète insulinodépendant serait plus fréquent dans les familles des patients, non chez le patient lui-même.

La pelade apparaît plus fréquemment dans deux désordres chromosomiques : la trisomie 21 (1 à 9 % des sujets atteints), où elle est alors de pronostic plutôt péjoratif, et le syndrome de Turner.

– La séropositivité VIH (virus de l’immunodéficience humaine) ne protège pas de la pelade, sauf en cas de taux effondré de lymphocytes CD4+.

– Sur un terrain psychologique prédisposé, la trichotillomanie s’associe secondairement, de manière non exceptionnelle, à la pelade.

– Psoriasis et pelade : le phénomène dit de « renbök » (inverse de Köbner), où la pelade élimine de son territoire psoriasis ou dermite séborrhéique, est parfois constaté.

Diagnostic différentiel :

A – ALOPÉCIES CICATRICIELLES :

Lupus érythémateux chronique, morphée, lichen plan, pseudopelade de Brocq, alopécie en bande frontale fibrosante postménopausique, alopécie postradiothérapie, cicatrices diverses, seront différenciés par l’aspect lisse, blanc nacré, atrophique où les follicules pileux ont disparu.

Une inflammation préalable et des signes à distance seront recherchés. Une biopsie pourra aider le diagnostic. Plus rarement une métastase (cancer gynécologique) sera discutée.

B – ALOPÉCIES NON CICATRICIELLES :

La trichotillomanie prêtera parfois à discussion, d’autant que les cheveux dits en « point d’exclamation » peuvent y être retrouvés et que l’association des deux pathologies n’est pas exceptionnelle.

La topographie (zones d’accès facile, atteinte souvent exclusive de la paupière supérieure pour le secteur ciliaire), l’aspect irrégulier avec des cheveux cassés à des niveaux différents, voire l’histologie, en coupes horizontales, sont des signes plus qu’évocateurs.

L’anamnèse différenciera les alopécies après traction ou compression (postanesthésie). Rarement un effluvium télogène ou anagène peut ressembler à une pelade diffuse ou très extensive.

Il en est de même du syndrome des cheveux anagènes caducs.

C – ATTEINTE UNGUÉALE :

Les dépressions ponctuées sont retrouvées dans l’eczéma et le psoriasis ; la trachyonychie y est également retrouvée, mais aussi dans le lichen plan et dans la trachyonychie dite idiopathique (qui peut se révéler, par la suite, liée à une pelade ou à l’une des trois pathologies précédentes).

Ainsi, les atteintes unguéales posent un problème diagnostique en l’absence d’autres manifestations dermatologiques.

Examens complémentaires :

En pratique, le diagnostic de la pelade est clinique.

Aucun examen complémentaire n’est indispensable.

Les examens ont surtout un intérêt physiopathologique.

A – TRICHOGRAMME :

Il pourrait mettre en évidence, à un stade précoce, un cycle modifié avec diminution des follicules pileux anagènes, nette augmentation des follicules télogènes ou catagènes tardifs et présence de cheveux dystrophiques.

B – HISTOLOGIE :

1- Microscopie optique :

Un infiltrat lymphocytaire comparé à un essaim d’abeilles est retrouvé à tous les stades de la pelade.

Il est situé autour des vaisseaux dilatés, des bulbes pilaires et au sein même des papilles folliculaires.

Il touche des zones en deçà du bulge, où siègent les cellules souches. Tous les follicules sont touchés.

Si la pelade est ancienne, cet infiltrat diminue, les follicules deviennent petits, « miniatures », dystrophiques, ascensionnés dans le derme superficiel. Des traînées de sclérose apparaissent dans le derme réticulaire profond, contenant des mottes de mélanine. Puis le follicule pileux disparaît totalement.

En remplacement ou en association aux classiques coupes verticales des fragments biopsiques, les coupes horizontales peuvent aider au diagnostic, en particulier car elles permettent de voir un plus grand nombre de follicules pileux (20 à 30 pour un cuir chevelu normal, contre quelques-uns dans les sections verticales), mais aussi de quantifier le rapport terminaux/duvets ou de déterminer à quel stade du cycle pilaire sont les follicules.

2- Microscopie électronique :

La papille apparaît désorganisée, elle contient des cellules lésées et une quantité anormale de pigment.

Trois types de dégénérescence cellulaire, entraînant sa mort, sont observés avec des fréquences variables : nécrose, apoptose, condensation cellulaire (cellules sombres ou dark cells).

L’apoptose peladique est différente de l’apoptose physiologique catagène puisqu’on la retrouve même dans les kératinocytes de la matrice, les mélanocytes, les cellules de Langerhans et les cellules du derme papillaire.

Les kératinocytes précorticaux et les mélanocytes bulbaires semblent les premiers affectés. Les cheveux en « point d’exclamation » pourraient résulter d’une phase passagère de dégénérescence de ces kératinocytes.

L’atteinte mélanocytaire avec mélanogenèse anormale est probablement responsable des anomalies pigmentaires cliniques de la pelade.

Il existe une incontinence pigmentaire à tous les stades.

Ces anomalies histologiques se retrouvent, dans une moindre mesure, à distance des zones cliniquement atteintes.

3- Histologie des lésions unguéales :

Les anomalies histologiques matricielles de la trachyonychie peladique sont de type eczématiforme (infiltrat lymphocytaire modéré, exocytose, spongiose et présence d’une couche granuleuse normalement absente à ce niveau) ; elles ne présentent pas de signe spécifique permettant de la distinguer de la trachyonychie dite idiopathique.

Ces mêmes atteintes sont retrouvées, de façon focale, dans les dépressions ponctuées.

4- Examen histologique à titre pronostique :

Une biopsie standardisée (punch 4 mm), avec sections horizontales, peut permettre localement de quantifier les follicules pileux persistants, d’évaluer leur diamètre et la profondeur de leur implantation.

Pour Whiting, si le nombre de follicules pileux est inférieur à 1/mm², la repousse sera inexistante à médiocre ; si le nombre est supérieur à 1/mm², elle sera de minime à complète.

C – AUTRES EXAMENS :

Aucun examen biologique n’est nécessaire à titre de bilan ou de surveillance d’une pelade.

Tout au plus peut se discuter dans des cas particuliers, en présence de signes cliniques, la réalisation d’un dosage des hormones thyroïdiennes.

Prenant en compte la prévalence de la carence martiale chez la femme, certains auteurs préconisent un dosage de la ferritine ; aucune étude n’a à ce jour été réalisée sur une éventuelle inhibition de la repousse des cheveux dans ces cas.

La théorie impliquant une responsabilité de foyer infectieux dans la pelade étant abandonnée, les radiographies panoramiques dentaires ou des sinus ne sont plus de mise.

Physiopathologie :

Nous avançons progressivement dans la compréhension de mécanismes qui entraînent la chute du cheveu, c’est-à-dire son passage brutal du stade anagène III ou IV aux stades catagène et télogène.

L’atteinte simultanée de follicules pileux voisins fait comparer la chute de cheveux à une vague.

La pelade garde cependant encore de grandes zones d’ombre et le (ou les) facteur(s) déclenchant la poussée reste(nt) inconnu(s) pour un individu donné.

Les hypothèses suivantes ne peuvent être considérées comme responsables isolément ; chacune pourrait cependant jouer un rôle dans la physiopathologie de la pelade.

A – GÉNÉTIQUE :

L’incidence familiale élevée a fait évoquer une transmission autosomique dominante à pénétrance variable.

La concordance entre jumeaux monozygotes est de 55 %, le premier atteint ayant en règle la forme la plus grave.

De multiples recherches ont été réalisées pour tenter d’associer la pelade et un groupe human leukocyte antigen (HLA) particulier.

Certains facteurs génétiques paraissent exposer à la pelade de façon générale et d’autres à des formes particulièrement sévères.

Ainsi l’allèle HLA DQ3 semble statistiquement associé à toute forme de pelade.

Les allèles DR4 ou DR5 semblent statistiquement plus souvent corrélés à des pelades graves d’apparition précoce (PU 62 % contre 30 % dans la population générale).

Les allèles DRB1*1104 (DR11) et DQB1*0301 (DQ7) aussi semblent davantage corrélés aux PDT et PU qu’aux pelades en plaques, mêmes anciennes.

Le gène codant pour le récepteur de l’antagoniste de l’IL1 (IL1ra) serait un facteur de sévérité.

À l’opposé, HLA Drw52a serait un marqueur de résistance vis-à-vis de la pelade.

B – INFECTIEUX :

Un facteur environnemental est suspecté dans le déclenchement de la pelade ; cependant aucune étiologie infectieuse n’a jusqu’à présent pu être mise en évidence.

La notion de foyer infectieux régional, d’« épine peladogène », est abandonnée, malgré quelques publications anecdotiques.

La possibilité d’infection virale a été évoquée, en particulier par le Cytomégalovirus (CMV) qui aurait été mis en évidence par polymerase chain reaction (PCR) dans des biopsies de pelade.

Cette positivité n’a pas été retrouvée par d’autres équipes et il ne semble pas exister de concordance du statut sérologique de jumeaux atteints par la pelade.

Enfin, l’idée d’un déclenchement de la pelade par la vaccination contre le virus de l’hépatite B ne semble plus retenue.

C – VASCULAIRE :

La théorie du spasme vasculaire, d’atteinte circulatoire au sein des plaques de pelade, est abandonnée.

Il reste cependant possible qu’un facteur angiogénique fasse défaut dans le déroulement pathogénique de la pelade.

D – NEUROLOGIQUE :

Des cas cliniques concrets mettent en évidence de possibles facteurs neurologiques dans le mécanisme de la pelade : c’est l’exemple d’un patient présentant une PU, hormis une zone axillaire où une section nerveuse avait été pratiquée au cours d’une lymphadénectomie.

Les éventuelles modifications sudorales iraient également à l’appui de cette théorie.

Des anomalies de sécrétion de certains neuromédiateurs cutanés pourraient jouer un rôle dans le processus physiopathologique peladique.

E – IMMUNITAIRE :

C’est ce mécanisme qui paraît aujourd’hui prédominant et la pelade est considérée comme une pathologie auto-immune :

– d’un point de vue épidémiologique, compte tenu de l’association à d’autres pathologies dysimmunitaires ;

– d’un point de vue biologique, car de nombreux arguments plaident pour une atteinte de l’immunité à médiation humorale et cellulaire :

– si les taux sanguins des lymphocytes B et T ont été trouvés augmentés, abaissés ou stables, des autoanticorps circulants ont été mis en évidence dans 20 à 25 % des cas de pelade : antithyroïdiens (antimicrosome, antithyroglobuline), antipariétal gastrique, antisurrénale, antigliadine, antimuscle lisse, antimitochondrie, antinucléaire…

Tobin a mis en évidence la présence d’anticorps IgG dirigés contre des antigènes situés sur les kératinocytes et les mélanocytes de follicules pileux chez tous les patients peladiques testés contre 44 % chez les sujets témoins.

Les zones atteintes exprimeraient des antigènes particuliers, non retrouvés en zone adjacente ;

– Gilhar a montré que les cheveux de peladiques implantés sur une souris nude athymique repoussaient, donc en absence de lymphocytes T.

En témoigne également l’infiltrat péribulbaire présent à tous les stades de la pelade, sauf lorsqu’elle a repoussé, fait de lymphocytes T, de macrophages et de cellules de Langerhans ; il évoque lui aussi une réaction contre un antigène du follicule pileux.

Le rapport lymphocytes CD4/CD8 augmente (4/1) en phase de chute et diminue pour se normaliser en phase de repousse.

Cet infiltrat serait retrouvé, dans une moindre mesure, à distance des plaques de pelade dans des zones apparemment saines ;

– il existe, au sein des follicules pileux, une expression accrue des antigènes de classe II du système HLA (DQ et DR), qui semble être plutôt une conséquence de l’inflammation induite par les cytokines (interféron gamma [IFNc] notamment).

Est également notée une augmentation de l’expression de l’intracellular adhesion molecule-1 (ICAM-1) sur l’épithélium folliculaire ;

– certaines cytokines semblent jouer un rôle fondamental dans la pelade ; celles-ci pourraient être libérées par les kératinocytes, les lymphocytes, ou au sein même de la papille dermique.

A été détecté, dans les biopsies de pelades actives, un niveau élevé de IFNc, IL2, IL1â (lymphocyte type TH1) ; tandis que l’IL10 augmente quand la pelade repousse sous diphencyprone.

La cytokine pro-inflammatoire IL1 pourrait être un important maillon de la chaîne entraînant le débranchement (swich off) du follicule pileux ;

– Fenton a retrouvé une diminution du taux de thymuline sérique, parallèle à l’évolution de la maladie ;

– enfin, l’effet des traitements à visée immunomodulatrice (ciclosporine, corticothérapie générale, allergénothérapie de contact,…) semble appuyer cette théorie physiopathogénique.

F – MÉLANOCYTAIRE :

L’atteinte élective des cheveux sombres, la repousse souvent initialement blanche, voire l’association non rare à un vitiligo, sont en faveur d’un rôle joué par le mélanocyte dans la pelade.

Les anomalies visibles en microscopie électronique où les mélanocytes bulbaires semblent parmi les premières structures affectées, les anticorps IgG dirigés contre les mélanocytes folliculaires, mis en évidence dans des résultats préliminaires, soutiennent cette hypothèse.

G – PSYCHOLOGIQUE :

Les facteurs psychologiques sont souvent mis d’emblée en avant par le patient, son entourage ou par le médecin, comme la cause de leur alopécie.

Si un stress est parfois clairement noté dans les jours ou semaines qui précèdent le déclenchement ou l’exacerbation d’une pelade, les mécanismes inducteurs restent mal connus.

Plusieurs études ont été réalisées avec des tests psychométriques standardisés.

Elles s’accordent à dire qu’il existe fréquemment, en association à une pelade, des troubles psychologiques variés tant chez l’adulte que chez l’enfant : anxiété, dépression, phobies, troubles du sommeil, signes paranoïaques, énurésie, trichotillomanie, etc, sans que ne se dessine de personnalité peladique caractéristique.

Il n’apparaît pas non plus de parallélisme entre les troubles psychologiques et la gravité de la pelade.

Souvent celle-ci déclenche elle-même, secondairement, anxiété et dépression.

Des événements vitaux (séparation, deuil, angoisse de mort, perte d’objet cher) sont retrouvés avec des proportions et des délais variables (7 à 85 % des cas) mais ne seraient pas plus fréquents que dans les groupes contrôles.

Pour certains, ces patients ayant une défense sociale pauvre ou nulle ne réagiraient pas de façon adéquate en situation de stress, utilisant trop peu leur entourage ; la pelade en serait une conséquence.

Modèles animaux :

Le Dundee experimental bald rat (DEBR) présente une chute de poils évoquant la pelade humaine et histologiquement un infiltrat mononucléé.

La souris C3H/Hej, outre son alopécie réversible associée à un infiltrat périfolliculaire, posséderait des anticorps dirigés spécifiquement contre le follicule pileux.

Ces animaux apportent à la compréhension de la pelade humaine et permettent à présent des essais thérapeutiques.

Traitement :

Le traitement de la pelade a beaucoup évolué depuis une quinzaine d’années ; un remède régulièrement efficace fait cependant défaut, en particulier dans les formes étendues.

L’attitude du médecin doit être la plus scientifique possible, malgré le caractère souvent capricieux de la maladie et le pourcentage connu de repousses spontanées : 60 % des cas présentant une atteinte de moins de 40 % de la surface du cuir chevelu repoussent totalement en 6 mois.

Sous placebo, 35,7 % des pelades présentant une atteinte supérieure à 50 % ont une réponse thérapeutique et 7,1 % une repousse complète en 1 an.

Enfin, on dénombre 15 à 25 % de repousse partielle spontanée ou sous placebo pour des pelades décalvantes de plus de 1 an.

Les résultats des essais thérapeutiques sont souvent très différents d’une équipe à l’autre, les groupes testés n’étant pas comparables et les critères d’efficacité subjectifs.

Donner des pourcentages de résultats est ainsi souvent délicat.

La thérapeutique tente de s’appuyer sur une stratégie organisée, adaptée au patient, au type de poussée et à son évolutivité.

Il n’existe cependant pas de traitement ayant une action sur l’évolution générale de la pathologie, ce qui incite à toujours mettre en balance bénéfice et risque, notamment pour le long terme.

Actuellement, aucun traitement n’a en France d’autorisation de mise sur le marché (AMM) dans cette indication.

A – CORTICOÏDES :

1- Locaux :

Les corticoïdes topiques semblent pouvoir agir sur les poussées de pelade.

Ils n’ont cependant jamais fait l’objet d’études contrôlées permettant de déterminer leur efficacité.

On utilise classiquement le niveau I sur le cuir chevelu, si possible sous occlusion.

Au niveau des sourcils ou de la barbe, où ils répondent moins bien, on utilise des niveaux plus faibles, compte tenu des risques locaux.

Très utilisés également chez l’enfant, niveau I ou niveau II le plus souvent, on surveille tout particulièrement la courbe de croissance, mais ils posent rarement des problèmes de retentissement.

Le nombre de flacons ou tubes appliqués mensuellement est quantifié.

Les effets secondaires sont surtout les folliculites et éruptions acnéiformes nécessitant de diminuer les doses.

2- Injections intralésionnelles :

Cette technique semble très efficace pour certains auteurs mais, si la repousse est parfois précoce, elle est souvent suivie de rechute en monothérapie.

Les indications sont limitées aux plaques isolées, les sourcils, la barbe.

Les risques d’amaurose par emboles rétiniens semblent exceptionnels avec les produits injectés actuellement (acétonide de triamcinolone aux doses de 2,5 à 10 mg/mL).

Les risques essentiels sont localement l’atrophie secondaire et ceux d’une corticothérapie générale si les doses cumulées sont trop importantes.

3- Généraux :

La pelade nécessite des doses élevées pour donner un résultat et expose, dans la plupart des cas, à une rechute après l’arrêt.

Du fait des effets secondaires des traitements au long cours, on réserve ce traitement à des indications particulières : une chute active risquant d’entraîner rapidement une pelade décalvante.

Le schéma alors utilisé est la prise de prednisone à 0,5 à 1mg/kg/j sur une dizaine de jours, diminuée par paliers de 7 à 10 jours pour être arrêtée en 6 à 8 semaines (certains prolongent le schéma sur un total de 3 à 6 mois).

Ce traitement intermédiaire, qui bloque le plus souvent la chute, est associé à un autre traitement de relais, d’effet plus lent (PUVA, traitements locaux). Les bolus ont fait l’objet de plusieurs études récentes sur quelques cas donnant des résultats préliminaires intéressants dans les pelades graves de l’adulte et de l’enfant.

La dose utilisée est 250 mg deux fois par jour, 3 jours consécutifs chez l’adulte, avec repousse supérieure à 80 % chez six patients sur neuf en 6 mois, et de 5mg/kg deux fois par jour pendant 3 jours chez l’enfant, avec repousse complète chez cinq patients sur sept en 12 mois.

Ces protocoles ne donnent peu ou pas d’effets secondaires.

L’effet semble bénéfique si le traitement est débuté tôt : au mieux dans les 8 premières semaines d’évolution quand l’infiltrat lymphocytaire est le plus important.

Pour les pelades anciennes, installées, aux facteurs de gravité habituels, ce traitement s’avère inefficace.

La corticothérapie agirait en diminuant la production et/ou la sécrétion d’IL1 et d’IL2.

Elle diminue aussi les cellules de Langerhans et leur activation lymphocytaire.

Selon de récentes recherches, le dosage au sein d’une biopsie de la thiorédoxine réductase, enzyme activant les récepteurs aux glucocorticoïdes, pourrait permettre de différencier par avance les bons des mauvais répondeurs à une corticothérapie générale ou locale.

B – ANTHRALINE (DIOXYANTHRANOL, CIGNOLINE) :

Alors que les autres irritants (huile de croton, laurylsulfate de sodium, trétinoïne topique) ne donnent aucun résultat positif, l’anthraline a un effet démontré : plusieurs essais sur des pelades de différentes catégories ont été réalisés.

La réponse, en moyenne, se manifeste à 11 semaines dans 67 % des cas, la repousse (avec toutes les réserves que l’on doit avoir vis-à-vis de ce type de résultats) étant cosmétique chez 30 % des sujets ayant moins de 75 % de surface atteinte et chez 20 % si l’atteinte est supérieure à 75 %.

La procédure est la suivante : application chaque soir avec un gant protecteur d’une préparation à 0,5 %, dans un excipient facilement rinçable, laissée 15 à 30 minutes puis lavée, classiquement, avec un shampooing à base de pyrithione zinc ; s’il n’existe aucune réaction, on augmente le pourcentage à 1 puis 2 %.

L’irritation n’est pas nécessaire, mais, modérée, elle est le témoin d’une bonne application.

L’anthraline est utilisée tant chez l’adulte que chez l’enfant chez qui ce traitement est particulièrement intéressant. Les effets secondaires sont modérés mais presque systématiques : hyperpigmentation, irritation locale, adénopathies satellites.

Il a été proposé un mode d’action complexe immunosuppressif, par formation de radicaux libres qui inhibent les lymphocytes T, toxicité vis-à-vis des cellules de Langerhans et inhibition de la production de l’IL2.

C – MINOXIDIL :

Ce puissant vasodilatateur est l’un des traitements qui a été le plus testé dans la pelade.

Il est plus efficace qu’un placebo avec, à 6 mois, 50 % de repousse complète si l’atteinte est inférieure à 75 %, 14 % si l’atteinte est entre 75 et 99 % et 0 % dans les PDT et PU.

Son effet est proportionnel à la dose, à 5 % il est plus efficace qu’à 1 %.

L’application biquotidienne de 1 mL d’une préparation à 5 % est équivalente à la prise orale de 5 mg deux fois par jour (mais l’effet par voie orale est plus rapide).

Il n’a pas d’effet préventif ni d’effet suspensif.

Étant donné sa faible pénétration cutanée, entre 1 et 4 %, il est préférable de l’appliquer de façon biquotidienne, sous occlusion ou en association avec d’autres produits qui augmentent son effet.

Les effets secondaires sont rares : eczéma de contact au minoxidil ou au propylène glycol, irritation (rarement notée dans cette indication), pilosité à distance.

Les effets cardiovasculaires n’apparaissent pas chez le sujet sain, malgré l’augmentation du débit cardiaque, mais justifient un avis spécialisé en cas de cardiopathie sous-jacente.

Le mode d’action est probablement multifactoriel, lié au sulfate de minoxidil, son métabolite actif : effet vasodilatateur local probablement négligeable, action sur le vascular endothelial growth factor (VEGF), action immunomodulatrice probable avec, pour Fiedler, une action sur l’infiltrat inflammatoire, non retrouvée par Khoury.

La prescription conjointe de minoxidil et d’anthraline semble synergique, de même que l’association de minoxidil et de bétaméthasone.

La vitamine A acide augmente de manière variable la pénétration du minoxidil mais n’améliore pas le bénéfice thérapeutique du minoxidil seul.

D – PUVATHÉRAPIE :

Ce traitement reste à ce jour, pour beaucoup, le traitement de première intention des pelades importantes de l’adulte.

Il est cependant de plus en plus décrié dans la littérature.

Il consiste en la prise per os ou l’application locale d’un psoralène et l’irradiation de la peau par des rayons ultraviolets A (UVA) de haute énergie dont le spectre se situe entre 340 et 380 nm.

Les deux produits utilisés sont le 8-méthoxypsoralène (méthoxsalène ou 8- MOP) (Méladininet) et le 5-méthoxypsoralène (5-MOP) (Psoraderm- 5t).

La dose initiale d’UV pour une prise per os est le plus souvent de 1 J/cm², que l’on augmente de ½ à 1 J/cm² toutes les une à deux séances, selon les protocoles (pour un traitement local 0,2 à 0,5 J/cm², augmentation de 0,2 à 0,5 J/cm² toutes les deux séances).

Certains cherchent à maintenir un érythème sans toutefois déclencher de brûlure.

La dose maximale délivrée par séance varie, selon les auteurs, de 8 à 20 J/cm².

Le total par série dans la littérature est de 300 à 700 J/cm².

La balnéoPUVAthérapie serait plus intéressante quant aux doses d’UV délivrées, en moyenne dix fois inférieures en diluant deux flacons de 8-MOP (Méladinine fortet) dans un bain de 100 L à 37 °C où le patient reste 15 minutes avant l’exposition.

Les résultats, très variables selon les équipes, sont contradictoires avec de 20 à 80 % de cas de repousse : les groupes ne sont pas comparables, les doses cumulées différentes.

Des études rétrospectives relativement récentes considèrent la PUVAthérapie inefficace, mais il est encore difficile de conclure devant la sélection des patients (pelades anciennes), les protocoles thérapeutiques (adaptation du protocole en fonction du type de pelade), les critères de jugement (50 % de repousse complète pour les PDT et PU, mais fort taux de rechute après l’arrêt).

Au total, il paraît légitime de conclure que l’efficacité de la PUVAthérapie dans la pelade est réelle, qu’elle est d’effet supérieur pour les petites plutôt que pour les grandes pelades, qu’elle n’est pas acquise et que le taux de rechute est important, en particulier si la pelade est ancienne.

La PUVAthérapie corporelle totale est d’effet supérieur à la PUVAthérapie localisée.

Une absence de repousse à 30 séances, une absence d’homogénéité de la repousse à 40 séances doivent faire cesser le traitement pour la poussée correspondante.

Le risque doit être calculé : ce n’est pas un traitement du sujet jeune ; les phototypes clairs seront particulièrement prévenus et surveillés ; il faut protéger les zones génitales, tenir un cahier de PUVAthérapie indiquant la dose administrée par série et cumulée, ces chiffres étant remis au patient ; la dose totale à ne pas dépasser étant 1 500 J/cm².

La balnéothérapie est ainsi, d’un point de vue théorique, plus intéressante.

L’association khelline et UVA a fait l’objet d’une étude sur dix patients sans résultat remarquable.

Aucun essai de photothérapie UVB n’a été publié depuis celui de Krook en 1961 (sans effet notable sur les pelades graves).

Un essai de photothérapie dynamique par hématoporphyrine avait été réalisé par Monfrecola. Des expérimentations avec l’acide 5-aminolévulinique ne donneraient pas de résultat positif.

La PUVAthérapie agirait peu par son effet irritant primaire trichogène mais plus par lymphotoxicité sur certains lymphocytes CD4+ et surtout par action sur les cellules de Langerhans.

E – ALLERGÉNOTHÉRAPIE DE CONTACT :

Utilisée pour la première fois dans la pelade en 1976 par Rosenberg, cette thérapeutique semble aujourd’hui la plus efficace pour les pelades graves.

Trois allergènes ont été utilisés jusqu’à présent mais aucun n’a été rigoureusement testé pour sa stabilité, sa pureté, son absorption, son métabolisme, son excrétion et ses éventuels effets toxiques et carcinologiques.

Il s’agit du dinitrochlorobenzène (DNCB), qui fut temporairement abandonné pour ses effets mutagènes, probablement liés à des contaminants de la préparation, de la diphénylcyclopropénone ou diphencyprone (DCP), de l’acide squarique dibutylester (SADBE).

La DCP est plus souvent utilisée que le SADBE, du fait de sa plus grande stabilité en solution.

Ce sont de très puissants allergènes, non retrouvés dans l’environnement domestique ou industriel, ne présentant aucune allergie croisée avec d’autres produits connus.

Ce traitement est pratiqué dans certains centres spécialisés, ayant au préalable fait signer par le patient un consentement écrit accompagné d’une notice d’information détaillée.

Le patient est sensibilisé au produit par application d’une solution à 2 % sur le bras ou une zone limitée du crâne.

Puis, au 14e jour, l’allergie au produit étant avérée, les applications hebdomadaires débutent sur une petite surface du cuir chevelu à concentrations progressivement croissantes, allant de 0,0001 à 2 %.

La zone est lavée au bout de 48 heures.

Lorsqu’un eczéma modéré apparaît, le praticien applique le dernier dosage utilisé sur un hémicrâne complet. Si la repousse apparaît par la suite sur cet hémicrâne, il applique le produit sur l’ensemble du crâne.

On évite les solutions à plus de 2 % qui inhibent les cellules de Langerhans nécessaires au maintien de l’allergénothérapie de contact. En cas de perte de sensibilité, dans 10,8 % des cas, est parfois prescrite la cimétidine per os pour supprimer cette tolérance.

L’application sur un hémicrâne permet de ne pas méconnaître les repousses spontanées qui apparaîtraient dans 7 % des cas et les phénomènes de roque (castling phenomenon) par allusion au jeu d’échec, dans 4 % des cas, où la repousse apparaît paradoxalement de l’autre côté.

Une publication a mis en évidence une repousse en appliquant le SABDE à distance, sur une zone du dos, et sans eczéma sur la zone peladique.

Les résultats publiés montrent : réponse au traitement en moyenne à 3 mois avec, pour les PDT, une repousse dans 60 % des cas qui devient cosmétique pour la moitié de ces derniers.

Les résultats sont meilleurs pour les surfaces atteintes moindres : pour une surface de 25 et 90 %, 60 à 75 % de repousse cosmétique, sauf pour les pelades ophiasiques où les résultats sont souvent moins bons.

Après la repousse, le traitement est soit maintenu en espaçant progressivement les applications, soit arrêté ; en ce cas on obtient, 6 mois après l’arrêt : 10 % de rechute complète, 53 % de rechute partielle, 37 % de maintien total.

Certains utilisent ce traitement chez l’enfant avec des résultats sensiblement identiques, mais le taux de rechute sous traitement pourrait être plus important.

L’association à l’allergénothérapie de contact de minoxidil topique n’apporte pas de bénéfice supplémentaire.

L’effet est négatif pour l’association SADBE et PUVAthérapie.

Shapiro obtient de bons résultats en injectant des corticoïdes dans les zones rebelles.

Cette thérapeutique reste cependant plus ou moins expérimentale, du fait de l’absence de connaissances approfondies sur les molécules concernées et quelques réserves vis-à-vis de la DCP. Bien que celle-ci ne soit retrouvée ni dans le sang ni dans les urines, un intermédiaire de fabrication, l’alpha alpha’didromodibenzylkétone peut persister dans la poudre de DCP commercialisée et a un potentiel mutagène in vitro ; il convient donc de vérifier la pureté du produit par chromatographie sur colonne ou spectre de masse et de le repurifier le cas échéant.

Par ailleurs, la DCP peut présenter une activité photomutagène sur un certain type de salmonelles probablement par la présence d’un intermédiaire de photodégradation à demi-vie courte.

Les patients doivent donc protéger de la lumière les zones traitées jusqu’au lavage.

D’autre part, un certain nombre d’effets secondaires sont à signaler : eczéma excessif localement ou à distance, prurit diffus, adénopathies satellites, hyperpigmentation parfois en confetti, mais aussi vitiligo sur les zones d’application du produit, voire secondairement à distance ; cette dépigmentation est probablement liée à un phénomène de Koebner sur ce terrain prédisposé (4 % de vitiligos tous peladiques confondus, 7 % de déclenchement sous diphencyprone) ; une sélection rigoureuse des patients est nécessaire.

Enfin, un érythème polymorphe peut apparaître de façon non exceptionnelle et régresser à l’arrêt du traitement.

Des précautions doivent être prises par les pharmaciens, le personnel médical et les proches des patients en contact avec les produits.

Pour toutes ces raisons, un certain nombre d’auteurs n’utilisent pas ou plus ce traitement.

Le mécanisme d’action de l’allergénothérapie de contact reste discuté et très intéressant d’un point de vue physiopathogénique : on note une diminution du rapport T4/T8 dans l’infiltrat et une modification du profil des cytokines IL2, IL8, IL10 et tumor necrosis factora (TNFa), sans savoir précisément quel changement dans ce profil est nécessaire à la repousse.

L’allergène attirerait une nouvelle population de lymphocytes T et augmenterait la clairance de l’antigène folliculaire inconnu, ou l’application répétée de l’allergène créerait une compétition antigénique contre cet antigène supposé qui permettrait la repousse.

F – ZINC :

Plusieurs études ont été réalisées avec différents sels de zinc, dont deux en double insu.

L’une, en 1981, met en évidence une absence de bénéfice sur des pelades de mauvais pronostic ; l’autre a récemment montré, sur des pelades touchant moins de 50 % de la surface du crâne, un résultat statistiquement significatif en faveur du gluconate de zinc (60 mg/j de zinc métal) par rapport au placebo.

Les effets secondaires semblent uniquement digestifs.

Le mode d’action pourrait être lié à l’activation des lymphocytes par le zinc, notamment CD8+.

G – ISOPRINOSINE :

Quatre études avec cet immunomodulateur ont été publiées dans cette indication.

Une seule en double insu, en 1987, utilise l’Isoprinosinet à la dose de 50 mg/kg/j sur des pelades décalvantes présentant des désordres biologiques de l’immunité à médiation cellulaire ; la différence clinique est positive par rapport au placebo, mais statistiquement peu significative.

Les patients répondeurs (repousse très modérée) rechutent dans les 12 mois après l’arrêt.

Une autre étude plus récente, ouverte, compare Isoprinosinet seul, diphencyprone seule, ou association des deux, et conclut à l’inefficacité de l’Isoprinosinet.

Les effets secondaires sont nuls, en dehors d’une éventuelle élévation de l’uricémie.

Ce médicament est doué de propriétés immunostimulantes : il augmente la production des cytokines (IL1 et IL2 notamment), la réaction aux tests cutanés et stimule la phagocytose.

H – CICLOSPORINE :

Elle a été expérimentée par voie orale et locale.

Per os, elle donne une repousse aléatoire nécessitant de fortes doses (6 mg/kg/j) et les effets secondaires usuels et importants limitent fortement son intérêt ici.

Une rechute survient à l’arrêt.

À doses plus faibles, elle est inefficace et, en association avec de petites doses de prednisone, les résultats sont contradictoires.

Localement, elle a été de nombreuses fois testée depuis le premier essai, en 1986, par DeProst ; surtout dans des pelades réfractaires, avec des excipients huileux ou des préparations liposomiales, à des concentrations allant de 2 à 10%. Les résultats ont toujours été décevants.

Une seule étude a retrouvé des résultats curieusement positifs sur des pelades universelles, sans confirmation ultérieure.

Un cas témoigne d’un effet indéniable dans un excipient associant propylène glycol, alcool et eau, mais avec des taux sériques non négligeables.

Sous forme topique, il n’existe pas d’effet secondaire en dehors d’irritations ou de folliculites.

Ce macrolide d’origine fongique est doué de puissantes propriétés immunosuppressives.

Sa principale action est la diminution sélective des CD4+, la suppression de leur synthèse de lymphokines et, directement ou indirectement, la diminution de l’expression des recepteurs d’IL2 sur les lymphocytes activés.

Il a, par ailleurs, un effet trichogène propre. Dans la pelade, il semble rapidement pouvoir inverser le rapport CD4+/CD8+.

I – TACROLIMUS (FK506) :

Il s’agit d’un autre macrolide aux propriétés immunosuppressives probablement encore plus importantes que la ciclosporine.

Il supprime également la production des cytokines par les cellules T helper.

Sous forme locale, le produit n’est, à ce jour, pas commercialisé.

Chez le rat DEBR, un modèle animal de pelade, on observe une repousse sur toutes les zones alopéciques où l’on applique la préparation, selon différents dosages et modes d’application (2 ou 5 jours par semaine) ; la prise orale, en revanche, est sans effet.

Les espoirs suscités par ce type de molécule sont considérables ; la plus grande vigilance doit cependant être observée en matière de carcinogénicité, compte tenu de leur fort pouvoir immunosuppresseur.

J – CRYOTHÉRAPIE :

La cryothérapie est, semble-t-il, à considérer comme un rubéfiant, à la différence près que celui-ci est appliqué par le médecin, ce qui augmente son effet placebo.

Une étude chinoise, de méthodologie discutable, présente une efficacité surprenante sur des pelades touchant moins de 25 % de la surface du crâne et demanderait confirmation.

K – TRAITEMENTS DISCUTÉS :

Sont discutés l’imipramine, qui a fait l’objet d’une étude en double insu, les immunoglobulines, l’azathioprine, la pentoxifylline (Torentalt) qui semble inefficace d’après une étude.

La chlorméthine (Caryolysinet) apportait, selon une étude en 1985, des résultats peu convaincants.

L – TRAITEMENTS SANS EFFETS :

Les calcipotriol, interféron alpha, Disulonet et hypnose ont été démontrés inefficaces.

La thymopentine (TP5), pentapeptide synthétique correspondant au site actif de la thymopoïétine, avait été utilisée par deux équipes italiennes.

Les résultats positifs avancés après injections intraveineuses ont, par la suite, été infirmés par les mêmes auteurs (Tosti, communication personnelle).

M – TRAITEMENTS ASSOCIÉS :

De nombreuses associations, citées dans les précédents paragraphes, ont été expérimentées dans la pelade.

Certaines sont positives, d’autres sans effets, d’autres enfin négatives.

N – PSYCHOTHÉRAPIE :

Sans être au premier plan, elle entre dans l’arsenal thérapeutique de la pelade.

Des signes d’anxiété ou de dépression, antérieurs et/ou réactionnels, peuvent être présents et diminuer la qualité de vie du patient.

Ce dernier doit être rassuré : la pelade n’est pas un cancer (il est important de le dire aux enfants), ni une maladie psychologique, le lui faire croire ne ferait qu’ajouter à son sentiment de vulnérabilité, un sentiment de culpabilité.

Toutefois, le psychisme peut avoir des retentissements sur la maladie et inversement.

Le médecin engagera le patient à extérioriser ses sentiments auprès de proches ou de médecins et, dans certains cas, une psychothérapie pratiquée par une personne compétente sera profitable au patient, adulte ou enfant.

O – ABSTENTION THÉRAPEUTIQUE :

Cette option thérapeutique n’est pas exceptionnelle : pelade sans évolution pour laquelle des biopsies standardisées montrent un cuir chevelu déshabité ; pelade ayant résisté à une allergénothérapie de contact ; pelade de la femme enceinte ; pelade des cils et des narines (absence de traitement malgré la gêne), de la barbe ou des ongles (fréquente absence de demande) ; pelade majeure chez l’enfant, souvent ; enfin, lorsque les plaques retombent et repoussent indifféremment, avec ou sans traitement (pelade en « ébullition »)…

Elle n’est pas à considérer par le médecin ou le patient comme un renoncement, mais comme un passage, voire une étape de traitement à part entière : il n’est en effet pas exceptionnel d’observer une repousse spontanée, après des périodes ressemblant à des impasses thérapeutiques.

Une date de rendez-vous sera prise et l’évaluation sera faite comme à chaque consultation.

P – PROTHÈSE CAPILLAIRE :

Le médecin en parlera en cas d’atteinte importante ou lorsque la chute extensive annonce une PDT.

L’achat d’une prothèse capillaire est un moment important pour un patient peladique et l’on se doit de savoir où le patient doit aller et ce qu’il obtiendra.

Le médecin réalise une ordonnance et une entente préalable.

Le remboursement se fait sur la base de 500 francs (76,23 euros).

Deux prothèses annuelles peuvent être prises en compte par la Sécurité sociale.

Une prothèse capillaire en cheveux synthétiques de bonne qualité coûte environ 1 500 francs (228,69 euros), 4 500 francs (686,08 euros) au minimum si elle est en cheveux naturels.

Le plus souvent, elles sont tenues par des adhésifs double face, certains modèles peuvent rester en place jusqu’à 6 semaines avec une colle spéciale mais ne permettent pas de traitement topique.

Des faux-cils peuvent également être collés.

Q – TATOUAGES :

Ils sont parfois réalisés au niveau des sourcils ou du bord ciliaire.

R – STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE :

De nombreux facteurs entrent en ligne de compte dans le traitement d’un patient : l’âge, la surface atteinte et le caractère extensif, l’aspect des plaques, les traitements précédents, la demande, le coût.

Il est nécessaire d’établir un « état des lieux » à chaque consultation.

Tout traitement se juge sur une longue période, de 3 à 6 mois, pendant laquelle on ne le remettra pas en cause, sauf en cas d’extension importante.

Il convient de toujours expliquer au patient de façon simple sa pathologie et son traitement.

1- Pelades mineures et moyennes (affectant moins de 50 % du cuir chevelu) :

Le traitement est axé autour de trois produits : minoxidil, anthraline, corticoïdes topiques, voire injectables in situ, ou souvent l’association de deux de ces trois traitements.

On pourrait s’y associer le zinc oral.

En cas de résistance, le schéma thérapeutique est modifié mais reste autour de ces produits.

Si la résistance se prolonge, on envisage un traitement de pelade majeure.

2- Pelades majeures (affectant plus de 50 % du cuir chevelu, ophiasiques importantes, PDT, PU, diffuses) :

Selon les auteurs, le choix varie entre allergénothérapie de contact, PUVAthérapie, ou les traitements précédents dans certains cas (contre-indication, présence nette de duvets, enfant…).

3- Enfant :

Chez l’enfant, l’allergénothérapie de contact est pratiquée par quelques centres à l’étranger ; de nombreux auteurs se refusent à l’utiliser avant 15 ans.

La PUVAthérapie n’est pas utilisée.

Les autres traitements seront pratiqués, mais avec plus de prudence.

4- Femme enceinte :

Chez la femme enceinte, seuls les corticoïdes topiques de niveau II sont utilisables.

5- Barbe, sourcils :

Pour la barbe, les sourcils, les corticoïdes topiques, ou injectables avec précaution, minoxidil sont utilisables. Pour les cils : abstention thérapeutique.

Pour les ongles : le plus souvent abstention, parfois corticoïdes sous occlusion.

6- Recommandations générales :

La corticothérapie générale est en règle réservée aux pelades très extensives.

Une psychothérapie est discutée selon les cas.

L’abstention thérapeutique s’imposera parfois, sur demande du médecin ou du patient.

Exceptionnellement, dans les pelades anciennes ou fixes à peau affinée, une biopsie standardisée avec coupes horizontales pourra être effectuée ; il n’existe pas de laps de temps déterminé au-delà duquel il n’existe plus de repousse cosmétique possible, parfois, à 1 an d’évolution, les follicules sont raréfiés, à l’opposé une repousse peut être complète après 15 ans sans repousse.

S – ASSOCIATION :

Il existe dans plusieurs pays des associations où adhèrent les patients, leurs proches, des médecins.

L’association française, qui diffuse un bulletin et accorde des subventions de recherche est l’Association Alopecia Areata (AAA), complexe médical du lycée, 36, route d’Eaunes, 31600 Muret.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.