Méningites de l’enfant

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La méningite est une inflammation des méninges dont l’étiologie infectieuse virale est la plus fréquente. L’étiologie bactérienne, plus rare, est le problème majeur de la méningite par son risque de mortalité et de séquelles neuro-sensorielles. Le diagnostic étiologique n’est possible que par l’étude du liquide céphalo-rachidien. Le premier objectif est donc de poser l’indication de la ponction lombaire et de savoir en interpréter les résultats.

POSER LE PROBLÈME :

La méningite est une inflammation des méninges dont l’étiologie est avant tout infectieuse.

Méningites virales

Méningites de l'enfantLes méningites virales sont les plus fréquentes mais leur incidence réelle n’est pas connue avec certitude.

– Les virus responsables sont nombreux, les plus fréquents étant les Entérovirus.

– L’évolution toujours favorable de ces méningites qui, par ailleurs, ne relèvent pas d’un traitement spécifique conduit habituellement à s’abstenir d’une enquête étiologique.

Méningites bactériennes communautaires

Les méningites bactériennes communautaires sont moins fréquentes.

– Leur incidence chez l’enfant, évaluée à plus de 3000 cas par an en France il y a quelques années, est en nette régression depuis l’introduction de la vaccination contre Haemophilus influenzae.

– Contrairement aux méningites virales, leur pronostic est sévère du fait, d’une part, de complications vitales immédiates et, d’autre part, du risque de séquelles neurologiques.

– Leur diagnostic et leur traitement représentent donc une urgence. Les bactéries les plus fréquemment isolées sont les méningocoques de types B et C, le pneumocoque et Haemophilus influenzae de type b.

– La connaissance de la sensibilité aux antibiotiques de ces différentes bactéries est essentielle pour le choix de l’antibiothérapie initiale.

Sensibilité des méningites aux antibiotiques

* Sensibilités des méningites aux antitiobiques selon le germe:

– le méningocoque est toujours sensible aux bêta-lactamines.

– de nombreuses souches d’Haemophilus influenzae sécrètent une bêta-lactamase.

– l’évolution de la sensibilité du pneumocoque aux antibiotiques est caractérisée par l’apparition de souches de sensibilité diminuée à la pénicilline de plus en plus fréquente.

* ces considérations conduisent à proposer actuellement le choix d’une céphalosporine de troisième génération pour le traitement probabiliste des méningites bactériennes de l’enfant et d’y associer la vancomycine en cas de suspicion de méningite à pneumocoque.

Traitement des complications

* Un traitement antibiotique précoce et adapté ne permet pas toujours d’éviter la survenue de séquelles neurologiques. La cause de celles-ci est attribuée aux phénomènes inflammatoires accompagnant l’infection méningée par le biais d’anomalies circulatoires responsables d’une perte neuronale. Cela conduit à proposer en association aux antibiotiques un traitement corticoïde précoce de courte durée, pour tenter de limiter l’incidence des séquelles.

* Le traitement d’urgence des complications immédiates, en particulier circulatoires et respiratoires, est par ailleurs déterminant pour une amélioration pronostique.

Distinction à établir entre méningites virales et bactériennes

Compte tenu de ces différentes données, la distinction entre méningites virales et bactériennes est de première importance. Cette distinction est parfois délicate, ce qui conduit souvent à des indications larges d’antibiothérapie initiale en attendant le résultat de la culture du liquide céphalo-rachidien, qui seule apporte une certitude diagnostique.

Cette attitude, qui peut paraître excessive, est justifiée par la gravité des méningites bactériennes.

Les signes cliniques parfois et l’analyse du liquide céphalo-rachidien souvent fournissent les éléments principaux d’une orientation étiologique.

* Ainsi, les méningites purulentes qui se définissent par un nombre de leucocytes supérieur à 500 par mm3 dans le liquide céphalo-rachidien avec une prédominance de polynucléaires neutrophiles sont habituellement d’origine bactérienne. Par contre, les méningites à liquide clair ou lymphocytaires dont le nombre de leucocytes dans le liquide céphalo-rachidien est inférieur à 200 par mm3 et à prédominance lymphocytaire sont habituellement d’origine virale.

* Mais ces méningites dites également aseptiques du fait de l’absence de bactéries à la coloration de Gram et à la culture sur milieu standard peuvent relever d’autres causes:

– infectieuses: méningites bactériennes partiellement traitées. agents infectieux inhabituels chez l’enfant (bacille de Koch, Listeria, mycose). infections paraméningées (abcès cérébral, empyème sous-dural).

– non infectieuses: leucémie, tumeur cérébrale, maladie de Kawasaki.

Méningites bactériennes du nouveau-né

Les méningites bactériennes du nouveau-né représentent une entité à part au sein des méningites de l’enfant du fait:

* de leurs difficultés diagnostiques, les signes cliniques n’y étant ni sensibles ni spécifiques.

* de la gravité extrême de leur pronostic, tant sur le plan vital que sur celui des séquelles.

* de la diffusion fréquente de l’infection à d’autres organes.

* de leur étiologie bactérienne particulière. Les agents infectieux les plus fréquents y sont: le streptocoque du groupe B, les entérobactéries en particulier Escherichia coli, Listeria. Ces données épidémiologiques imposent le choix d’une antibiothérapie probabiliste particulière à cet âge de la vie associant: ampicilline, céphalosporine de troisième génération, aminoside. Le traitement devant être adapté aux résultats des cultures bactériologiques.

Affirmer le diagnostic de méningite :

Le diagnostic de méningite est affirmé par l’existence d’une pléiocytose anormale du liquide céphalo-rachidien.

La ponction lombaire indiquée à partir de données cliniques évocatrices est donc indispensable au diagnostic.

INDICATIONS DE LA PONCTION LOMBAIRE :

Les symptômes et les signes cliniques de méningite sont d’autant moins spécifiques que l’enfant est moins âgé et les indications de la ponction lombaire en sont d’autant plus larges.

Une méningite peut se révéler par des complications sévères qu’il convient de prendre en charge pour stabiliser l’état clinique de l’enfant avant que soit pratiquée une ponction lombaire.

Des infections non méningées peuvent s’accompagner d’un syndrome méningé typique.

Syndrome infectieux :

* La fièvre, quel qu’en soit le degré, est pratiquement constante au début d’une méningite, mais son absence face à un syndrome méningé ne doit pas conduire à écarter le diagnostic. Une hypothermie est possible, elle représente un critère de gravité.

* Des signes de sepsis correspondant à une réponse systémique à l’infection doivent être recherchés et leur traitement doit être entrepris avant la ponction lombaire.

En fonction de l’âge :

* Chez le nouveau-né et jusqu’à l’âge de 3 mois une fièvre isolée peut être le seul signe révélateur d’une méningite.

– La ponction lombaire doit être discutée au même titre que d’autres examens complémentaires pour rechercher de principe un foyer infectieux infraclinique.

– Toute indication d’antibiothérapie ne doit être portée à cet âge qu’après une ponction lombaire.

* Après l’âge de 3 mois l’indication de la ponction lombaire est portée sur l’association d’une fièvre à d’autres signes évocateurs de méningite, principalement sur l’existence d’un syndrome méningé ou d’autres anomalies neurologiques.

Syndrome méningé :

* Les symptômes de méningites sont les suivants:

– nausées.

– vomissements.

– anorexie.

– céphalée.

– dorsalgie.

– irritabilité, confusion.

– photophobie.

* Les signes de méningite sont:

– une hyperesthésie cutanée.

– une raideur de la nuque.

– des signes de Kernig et de Brudzinski.

La raideur de la nuque est un signe majeur d’indication de la ponction lombaire.

* Signes de méningites avant l’âge de 1 an:

* bombement de la fontanelle en position assise et en dehors du cri.

* hypotonie axiale mise en évidence par le passage de la position couchée à assise.

Complications aiguës neurologiques révélatrices :

* Des complications neurologiques, témoignant habituellement d’une souffrance cérébrale peuvent être les premières manifestations cliniques d’une méningite.

– Elles doivent être prises en charge sur le plan thérapeutique avant la ponction lombaire: troubles de la vigilance, convulsions répétées, hypertension intracrânienne, signes neurologiques focalisés.

– Elles doivent en outre rendre prudent dans la réalisation de la ponction lombaire et faire discuter l’indication d’un scanner cérébral préalable sans que cela ne retarde un traitement antibiotique.

* Les convulsions fébriles typiques sont fréquentes chez l’enfant après l’âge de 1 an et ne représentent pas obligatoirement une obligation de ponction lombaire si à leur suite l’examen clinique, en particulier neurologique, est normal et si aucun signe évocateur de méningite n’existe.

Signes associés :

* Un purpura fébrile même isolé est une indication pour une ponction lombaire. Il peut s’agir d’un purpura pétéchial associé à une bactériémie en particulier à méningocoque ou d’un purpura nécrotique ecchymotique et rapidement extensif, prédominant sur les membres, associé à un choc septique et dû habituellement à une méningococcémie.

* D’autres anomalies cliniques peuvent être observées, qui ne sont pas une indication pour une ponction lombaire, si elles sont isolées: éruptions non purpuriques, arthralgies, myalgies, foyer suppuré en particulier ORL.

TECHNIQUE ET COMPLICATIONS  E LA PONCTION LOMBAIRE :

Complications :

* Lorsque la ponction lombaire est traumatique, le liquide céphalo-rachidien est hémorragique, ce qui complique son analyse. Le liquide prélevé doit malgré tout être mis en culture. On peut trouver une aide dans l’interprétation des anomalies observées en établissant les rapports entre leucocytes et hématies dans le sang et le liquide céphalo-rachidien. La comparaison des deux rapports permet de suspecter une pléiocytose rachidienne.

* En cas d’hypertension intracrânienne, la ponction lombaire peut précipiter un engagement cérébral. Dans l’hypertension intracrânienne compliquant une méningite bactérienne, l’examen du fond d’œil et le scanner cérébral sont habituellement normaux, ce qui n’écarte pas le risque d’engagement. C’est donc sur des signes cliniques que ce risque doit être évalué. De plus, la technique de prélèvement du liquide céphalo-rachidien doit systématiquement permettre de limiter ce risque d’engagement.

* Chez les enfants les plus âgés et dans les jours qui suivent la réalisation d’une ponction lombaire, la persistance de céphalées, de vomissements et de dorsalgies est attribuée à une soustraction trop importante de liquide. Ce syndrome postponction lombaire a une évolution favorable.

* Chez le nouveau-né, la ponction lombaire peut être mal tolérée et entraîner une hypoxémie, qui peut aggraver une situation clinique déjà précaire.

Technique :

Des conditions d’asepsie rigoureuse sont à respecter lors d’une ponction lombaire. Une aiguille de faible calibre (22gauge) munie d’un mandrin doit être préférée. La quantité de liquide soustraite doit être la plus faible possible, mais permettre une analyse complète et la mise en culture.

La surveillance clinique de l’enfant doit être renforcée lors de la réalisation de ce geste.

Liquide céphalo-rachidien normal :

* Le liquide céphalo-rachidien normal est limpide. Il peut être xanthochromique chez le nouveau-né.

* Le nombre de leucocytes du liquide céphalo-rachidien est plus élevé chez le nouveau-né que chez l’enfant plus âgé. La présence de polynucléaires est possible et n’a pas la même signification que chez l’enfant plus âgé.

* La protéinorachie est également plus élevée à la naissance et sa concentration décroît avec l’âge pour se stabiliser vers l’âge de 3 mois.

* La glycorachie moins élevée chez le nouveau-né est à mettre en relation avec une glycémie plus basse.

* Les paramètres de normalité du liquide céphalo-rachidien chez le nouveau-né en fonction de l’âge gestationnel et de l’âge postnatal ne sont pas clairement définis, mais une pléiocytose à plus de 20 leucocytes par mm3 et une protéinorachie supérieure à 100-150mg/100ml méritent attention.

* Après l’âge de 3 mois, le nombre de leucocytes du liquide céphalo-rachidien est inférieur à 6 par mm3 dont 1 ou pas de polynucléaire neutrophile. La protéinorachie normale est inférieure à 30mg/100ml. La glycorachie doit être interprétée en fonction de la glycémie: une glycorachie normale est égale à 66% de la glycémie.

* Quel que soit l’âge de l’enfant, l’examen bactériologique direct du liquide céphalo-rachidien après coloration de Gram est négatif et sa culture est stérile. Le diagnostic de méningite est affirmé sur un nombre anormalement élevé de leucocytes dans le liquide céphalo-rachidien.

Orienter l’étiologie :

Le diagnostic de certitude étiologique d’une méningite repose sur les résultats de la culture du liquide céphalo-rachidien, ce qui ne peut être obtenu qu’après un certain délai.

Tout liquide céphalo-rachidien prélevé doit être mis en culture.

L’orientation étiologique est fondée sur des données cliniques et surtout sur l’analyse des anomalies du liquide céphalo-rachidien. Elle permet de décider du traitement initial.

Parfois, un doute persiste et des examens biologiques complémentaires, qui ne peuvent pas toujours être réalisés d’urgence, peuvent aider à prendre une décision.

En cas de doute persistant, la prudence incite à considérer en premier lieu l’éventualité d’une cause bactérienne et à prescrire une antibiothérapie en attendant les résultats de la culture du liquide céphalo-rachidien.

ARGUMENTS CLINIQUES :

Il n’existe pas de signes cliniques spécifiques qui permettent d’orienter avec certitude vers la cause d’une méningite.

* Certains signes sont cependant plus souvent observés dans les méningites bactériennes et doivent être pris en considération dans la décision thérapeutique initiale:

– troubles de la vigilance.

– aspect toxique et signes de sepsis.

– purpura.

– présence d’un foyer infectieux bactérien asssocié, en particulier ORL.

* En l’absence des signes précédents, sont en faveur d’une méningite virale:

– un exanthème.

– une parotidite ourlienne.

– des myalgies.

– une notion épidémique estivo-automnale ou un contage.

* La présence de signes d’atteinte du tronc cérébral, en particulier d’une paralysie des paires crâniennes, est un argument en faveur du diagnostic de méningite à Listeria.

* L’existence d’une atteinte basilaire ou de signes de localisation, l’installation progressive des symptômes de méningite sont évocatrices du diagnostic de tuberculose.

* Chez un enfant porteur d’une dérivation ventriculo-péritonéale pour une hydrocéphalie, une infection à Staphylococcus epidermidis doit être évoquée en premier lieu.

ANOMALIES DU LIQUIDE CEPHALO-RACHIDIEN :

Arguments en faveur d’une méningite bactérienne :

Les arguments en faveur d’une méningite bactérienne sont les suivants:

– liquide trouble, hypertendu.

– pléiocytose supérieure à 1000/mm3.

– proportion de polynucléaires supérieure à 50%.

– hypoglycorachie.

– hyperprotéinorachie habituellement supérieure à 100mg/100ml.

– examen direct positif, après coloration de Gram.

Mais:

– la pléiocytose peut être inférieure à 1000/mm3 au tout début d’une méningite bactérienne.

– l’hyperprotéinorachie peut être inférieure à 100mg/100ml.

– la glycorachie peut être normale.

– l’examen direct, après coloration de Gram, peut être négatif.

– un traitement antibiotique préalable peut modifier les caractéristiques évocatrices de méningite bactérienne.

Arguments en faveur d’une méningite virale :

* Les arguments évoquant une méningite virale sont les suivants:

– un liquide clair normotendu ou hypertendu.

– une pléiocytose située entre 100 et 500/mm3.

– une proportion de polynucléaires inférieure à 50%.

– une protéinorachie élevée inférieure à 100mg pour 100ml ou normale.

– une glycorachie normale.

– un examen direct négatif, après coloration de Gram.

* Mais:

– la pléiocytose peut être supérieure à 1000/mm3:

– la proportion de polynucléaires peut être supérieure à 50% au tout début de l’évolution.

– la glycorachie peut être abaissée dans une méningite ourlienne.

– une listériose, une leptospirose, une maladie de Lyme peuvent donner un tel profil.

– il existe des étiologies non infectieuses à l’origine d’un tel profil.

Méningite lymphocytaire avec hypoglycorachie :

Face à une méningite lymphocytaire avec hypoglycorachie certaines étiologies doivent être discutées en priorité. Outre la méningite ourlienne, sont évoquées:

* une tuberculose et le diagnostic impose le recours à des techniques d’examen spécifiques: examen direct du liquide céphalo-rachidien après coloration de Ziehl, ensemencement sur milieu de Löwenstein.

* une listériose: évoquée sur la présence de bacilles à Gram positif à l’examen direct du liquide céphalo-rachidien.

* une infection à Cryptococcus neoformans chez un sujet infecté par le VIH.

Chez le nouveau-né :

* Les particularités biologiques du liquide céphalo-rachidien normal et la possibilité d’une augmentation peu importante du nombre de leucocytes dans le liquide céphalo-rachidien lors d’une méningite bactérienne compliquent la démarche diagnostique.

* Cela conduit à suspecter systématiquement une étiologie bactérienne devant toute anomalie du liquide céphalo-rachidien chez un nouveau-né et à une indication large d’antibiothérapie.

AUTRES EXAMENS COMPLEMENTAIRES :

* Une hémoculture doit être réalisée dont le résultat, bien que différé, peut fournir de précieuses indications pour la conduite ultérieure du traitement.

* Lorsque les résultats de la numération et formule leucocytaire sanguine montrent une hyperleucocytose supérieure à 15000/mm3 et une prédominance de polynucléaires neutrophiles, cela évoque une cause bactérienne. Il en est de même pour une élévation de la concentration sanguine de la protéine C réactive, mais ces examens ne sont pas spécifiques.

* Le dosage dans le liquide céphalo-rachidien des lactates et de la protéine C réactive peut être élevé en cas d’infection bactérienne et est proposé comme aide au diagnostic étiologique.

* La recherche d’antigènes solubles bactériens dans le liquide céphalo-rachidien, le sang et les urines permet non seulement de préciser une étiologie bactérienne, mais encore d’identifier la bactérie en cause. Cette recherche n’a pas une sensibilité absolue.

AUTRES DIAGNOSTICS POSSIBLES :

Il peut s’agir d’un autre diagnostic.

* Une hémorragie méningée est discutée en présence d’un liquide hémorragique, mais la fièvre est absente ou peu élevée et d’apparition secondaire. Le début est particulièrement brutal, avec une céphalée intense, accompagnée de vomissements et, parfois, de troubles de la conscience. Le scanner permet de confirmer le diagnostic.

* Un abcès cérébral peut s’accompagner d’une réaction inflammatoire aseptique du liquide céphalo-rachidien avec hyperprotéinorachie modérée sans hypoglycorachie mais le syndrome méningé est discret ou absent et la fièvre est peu importante. Des signes déficitaires et d’hypertension intracrânienne d’apparition progressive doivent faire évoquer le diagnostic, ce qui contre-indique la ponction lombaire et impose la réalisation d’un scanner cérébral.

* Une encéphalite aiguë virale est évoquée sur l’association d’une fièvre et de signes neurologiques diversement associés: troubles de la vigilance, convulsions, déficit moteur.

– Les anomalies du liquide céphalo-rachidien peuvent se limiter à une réaction lymphocytaire modérée ou présenter un profil typique de méningite virale en cas de méningo-encéphalite.

– L’électroencéphalogramme fournit des données importantes pour le diagnostic.

Évaluer la gravité :

La gravité initiale d’une méningite est liée à son étiologie. Les méningites virales ne présentent habituellement pas de complications graves, à l’opposé des méningites bactériennes, qui peuvent rapidement compromettre le pronostic vital ou l’avenir neurologique, en particulier chez le nouveau-né.

Ces complications indiquent l’admission sans délai dans un service de réanimation.

COMPLICATIONS HEMODYNAMIQUES :

Un syndrome septique est possible, qui peut révéler la méningite. Les différents stades en sont les suivants.

Sepsis :

Cette réponse est caractérisée par deux ou plusieurs des manifestations suivantes:

– température supérieure à 38°C ou inférieure à 36°C.

– tachycardie à interpréter en fonction de l’âge et de la température.

– tachypnée à interpréter en fonction de l’âge et de la température.

– leucocytose sanguine supérieure à 12000/mm3 ou inférieure à 4000/mm3 ou plus de 10% de formes immatures.

Sepsis sévère :

Il s’agit d’un sepsis associé à:

– une vasoconstriction périphérique et/ou une hypotension artérielle.

– une altération de la vigilance.

– une oligurie.

– une acidose lactique.

Choc septique :

Sepsis sévère avec hypotension artérielle persistante malgré une expansion volémique adéquate: un purpura ecchymotique et nécrotique prédominant aux extrémités et rapidement extensif lié à une coagulation intravasculaire disséminée peut être associé au choc septique. Cette complication est essentiellement due au méningocoque (méningococcémie fulminante) et comporte un pronostic redoutable.

COMPLICATIONS NEUROLOGIQUES :

Coma :

L’évaluation initiale et la surveillance régulière du niveau de conscience à l’aide du score de Glasgow adapté à l’âge de l’enfant est systématique. Un score de Glasgow inférieur ou égal à 8 est l’indication d’une ventilation mécanique après intubation trachéale.

Convulsions :

* La survenue de convulsions venant révéler ou compliquer l’évolution d’une méningite bactérienne est une indication d’administration urgente d’un anticonvulsivant: le diazépam à la dose de 0,5mg/kg par voie rectale ou intraveineuse, à renouveler 10 minutes plus tard si les convulsions ne cèdent pas.

* Les convulsions peuvent être liées à la fièvre ou traduire une souffrance cérébrale directement due à la méningite. Elles risquent alors d’évoluer vers un état de mal convulsif, nécessitant le recours à d’autres médicaments anticonvulsivants administrés par voie veineuse sous surveillance respiratoire et circulatoire comme le Gardénal* ou les hydantoïnes et à la ventilation mécanique.

Hypertension intracrânienne :

* Une hypertension intracrânienne due à un œdème cérébral peut être suspectée à l’examen clinique sur:

– une altération du niveau de conscience.

– des pupilles dilatées et peu réactives.

– une anomalie de la motricité oculaire.

– une hyperréflectivité ostéo-tendineuse.

– une bradycardie.

– et une hypertension artérielle.

* L’absence d’œdème papillaire n’exclut pas le diagnostic.

* Elle comporte un risque d’engagement cérébral, qui peut être précipité par la ponction lombaire.

* Une ventilation mécanique est indiquée d’urgence avant tout autre geste.

Déficits neurologiques focaux :

Un déficit moteur localisé est le signe d’une complication focale d’une méningite bactérienne et constitue une indication de scanner cérébral.

Décider du traitement :

MÉNINGITE BACTÉRIENNE :

Il s’agit probablement d’une méningite bactérienne.

Après l’âge de 3 mois :

* L’antibiotique choisi pour le traitement initial d’une méningite bactérienne probable est actuellement une céphalosporine de troisième génération:

– céfotaxime à la dose de 50mg/kg par perfusion veineuse de 20 minutes quatre fois par jour. Dose totale quotidienne administrée: 200mg/kg/j.

– ou ceftriaxone à la dose de 100mg/kg par perfusion veineuse de 20 minutes une fois par jour. alternative possible: 50mg/kg par perfusion veineuse de 20 minutes deux fois par jour. dose totale quotidienne administrée: 100mg/kg/j.

* Si une méningite à pneumocoque est suspectée sur: la présence de cocci à Gram positif à l’examen direct du liquide céphalo-rachidien, la présence d’antigènes solubles du pneumocoque dans le liquide céphalo-rachidien, le sang ou l’urine, l’existence de facteurs de risque d’une infection à pneumocoque (antécédent de splénectomie, de drépanocytose, de brèche méningée), l’antibiothérapie initiale associe une céphalosporine de troisième génération à posologie plus élevée et la vancomycine :

– céfotaxime: 75mg/kg par perfusion veineuse de 20 minutes quatre fois par jour. Dose totale quotidienne administrée: 300mg/kg/j.

– vancomycine: 15mg/kg par perfusion veineuse de 60 minutes quatre fois par jour. Dose totale quotidienne administrée: 60mg/kg/j.

En cas d’insuffisance rénale, les posologies et le rythme d’administration doivent être adaptés.

Avant l’âge de 3 mois :

Les particularités épidémiologiques des méningites bactériennes néonatales imposent le choix d’une triple antibiothérapie associant une ampicilline, une céphalosporine de troisième génération et un aminoside:

– ampicilline: 50mg/kg par perfusion veineuse de 20 minutes quatre fois par jour. Dose totale quotidienne administrée: 200mg/kg/j.

– céfotaxime: 50mg/kg par perfusion veineuse de 20 minutes quatre fois par jour. Dose totale quotidienne administrée: 200mg/kg/j.

– amikacine: 10mg/kg par perfusion de 20 minutes. L’intervalle entre les injections est à adapter à l’âge postconceptionnel et à la fonction rénale.

MÉNINGITE VIRALE :

Il s’agit probablement d’une méningite virale et le traitement se limite à la prescription d’antipyrétiques et d’antalgiques.

ÉTIOLOGIE RARE :

S’il existe des arguments pour une étiologie plus rare, un traitement antibiotique adapté peut être associé en attendant une confirmation diagnostique.

TRAITEMENTS ASSOCIES L’ANTIBIOTHERAPIE DES MENINGITES BACTERIENNES :

Corticoïdes :

Le rôle de la corticothérapie dans la prévention des séquelles neurologiques des méningites bactériennes est discuté.

* La corticothérapie semble cependant limiter le risque de surdité après une méningite à Haemophilus influenzae, mais la diminution importante de l’incidence de cette infection grâce à la vaccination en limite l’intérêt potentiel. Ce traitement peut être proposé aux nourrissons non vaccinés contre Haemophilus influenzae, qui présentent des signes évocateurs d’une méningite bactérienne.

* La dexaméthasone est administrée avant la première injection d’antibiotique à la dose de 0,15mg/kg par injection intraveineuse directe quatre fois par jour. Dose totale quotidienne administrée: 0,6mg/kg/j. Durée du traitement de 4 jours.

Restriction hydrique :

Les méningites bactériennes peuvent se compliquer d’une rétention hydrique due à une sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique qui risque d’aggraver un œdème cérébral.

L’apport hydrique des 48 premières heures du traitement doit donc être limité.

Antipyrétiques et antalgiques :

Le paracétamol, éventuellement associé à l’aspirine, est prescrit à titre antalgique et antipyrétique à la dose de 60mg/kg/j en quatre à six prises équidistantes pour le paracétamol.

Anticonvulsivants :

La fréquence des convulsions dans l’évolution des méningites bactériennes du petit enfant conduit à prescrire un traitement barbiturique préventif avant l’âge de 2 ans au cours de la première semaine du traitement:

– Gardénal*, dose de charge de 15mg/kg en 1 injection intraveineuse stricte de 30 minutes.

– puis, dose d’entretien de 4mg/kg/j en une prise quotidienne, 24 heures plus tard.

La posologie est à adapter en cas d’insuffisance rénale.

SUIVI DU TRAITEMENT :

Adapter le traitement initial si besoin est :

Le traitement antibiotique doit être adapté en fonction de l’évolution clinique des résultats de la culture initiale du liquide céphalo-rachidien, de l’hémoculture et de l’antibiogramme.

Diagnostic de ménigite bactérienne confirmé par une culture positive

Le diagnostic de méningite bactérienne est confirmé par une culture positive.

* Une seconde ponction lombaire pratiquée 24 à 36 heures après le début du traitement antibiotique permet de vérifier son efficacité en cas de persistance du syndrome infectieux pour le méningocoque et systématiquement pour les méningites à Haemophilus et à pneumocoque et chez le nouveau-né. Le critère d’efficacité est représenté par la stérilisation du liquide céphalo-rachidien.

* Pour les méningites à méningocoque et à Haemophilus influenzae une monothérapie par une céphalosporine de troisième génération est poursuivie. La durée totale du traitement antibiotique par voie intraveineuse est de 5 à 7 jours pour le méningocoque et de 7 à 10 jours pour Haemophilus influenzae.

* Pour les méningites à pneumocoque, si l’évolution est favorable la décision thérapeutique est fonction de la concentration minimale inhibitrice de la céphalosporine de troisième génération utilisée:

– concentration minimale inhibitrice inférieure à 0,5mg/l: arrêt de la vancomycine et, éventuellement, réduction de la posologie de la céphalosporine.

– concentration minimale inhibitrice supérieure à 0,5mg/l: poursuite du traitement initial.

* La poursuite du traitement par vancomycine requiert un contrôle de la fonction rénale et une détermination des concentrations sériques maximales (au pic) et minimales (à la vallée) au 5e jour de traitement. La durée totale du traitement antibiotique intraveineux est au minimum de 10 jours.

* Pour les méningites à pneumocoque, si l’évolution est défavorable avec persistance d’une culture positive du liquide céphalo-rachidien prélevé lors de la seconde ponction lombaire, le traitement antibiotique ne peut pas être codifié actuellement. Les choix possibles sont: imipénène, rifampicine, fosfomycine.

* Pour les méningites néonatales, une des deux bêta-lactamines est arrêtée en fonction de la bactérie isolée et de l’étude de sa sensibilité aux antibiotiques:

– l’administration de l’aminoside est poursuivie 10 jours.

– la durée totale du traitement est de 15 jours pour le streptocoque B et de 21 jours pour les autres bactéries après stérilisation du liquide céphalo-rachidien.

Résultats négatifs des la culture du liquide céphalo-rachidien et de l’hémoculture

La culture du liquide céphalo-rachidien et l’hémoculture sont négatives:

* ce résultat peut venir confirmer une méningite présumée virale pour laquelle aucun traitement antibiotique n’avait été prescrit. Il peut conduire à l’arrêt d’un traitement antibiotique initialement prescrit en fonction du degré de suspicion clinique et biologique.

* la décision est ici particulièrement difficile à prendre dans le cas d’un traitement antibiotique prescrit à l’aveugle avant la ponction lombaire, car il peut s’agir d’une méningite bactérienne partiellement traitée .

* cela conduit souvent à poursuivre le traitement antibiotique et vraisemblablement à traiter par excès une méningite virale.

Surveiller l’évolution :

Une surveillance clinique à l’hôpital, voire dans un service de réanimation, est systématique au cours des premiers jours de traitement d’une méningite présumée bactérienne.

* Cette surveillance porte essentiellement sur la température, l’état circulatoire et respiratoire ainsi que l’état neurologique.

* Elle a pour but de vérifier l’efficacité du traitement et de dépister l’apparition de complications secondaires.

Prévention des cas secondaires dans l’entourage et déclaration de la méningite :

Méningite à méningocoque

La définition des sujets contacts devant bénéficier d’une chimioprophylaxie est indiquée dans le schéma.

* Pour les sujets contacts, une chimioprophylaxie est proposée selon le schéma suivant: rifampicine durant 2 jours à la posologie suivante:

– adulte: 500mg deux fois par jour.

– enfant de 1 mois à 12 ans: 10mg/kg deux fois par jour.

– enfant de moins de 1 mois: 5mg/kg deux fois par jour.

* En cas de contre-indications (grossesse, maladie hépatique sévère, alcoolisme, porphyrie, hypersensibilité à la rifampicine): spiramycine durant 5 jours à la dose suivante:

– adulte: 3 millions d’UI deux fois par jour.

– enfant: 75000UI/kg deux fois par jour.

* A la suite de l’antibiothérapie à but curatif, le malade doit bénéficier d’un traitement antibiotique prophylactique selon les mêmes modalités que celles des sujets contacts.       * Il pourra réintégrer un établissement scolaire dès la fin de ce traitement.

* Le cas doit être déclaré par téléphone au médecin de la DDASS dès l’isolement du méningocoque et un questionnaire de déclaration doit lui parvenir juste avant la fin de l’hospitalisation.

Méningite à Haemophilus influenzae

Une chimioprophylaxie est proposée si dans l’entourage familial du malade se trouve un enfant non ou incomplètement vacciné contre Haemophilus et âgé de moins de 4 ans.

Tous les membres de la famille peuvent alors bénéficier d’une chimioprophylaxie par rifampicine durant 4 jours.

Pronostic :

Après la guérison de l’infection, l’objectif est d’évaluer l’éventualité de séquelles neurologiques et de planifier leur prise en charge.

Méningites virales

Le pronostic des méningites virales apparaît toujours favorable.

Méningite bactérienne

Le pronostic des méningites bactériennes de l’enfant est dominé par une mortalité non négligeable et surtout par la persistance de séquelles neurologiques.

* Une appréciation de leur pronostic global est indiquée par les chiffres suivants concernant l’enfant en dehors de la période néonatale:

– mortalité, 4 à 5%.

– retard mental, 4%.

– déficit moteur, 2%.

– épilepsie, 4%.

– surdité, 10%.

– absence de séquelles, 85%.

* La fréquence des séquelles neurologiques est liée à différents facteurs dont l’âge de survenue de la méningite, la précocité du diagnostic, la rapidité de stérilisation du liquide céphalo-rachidien, l’existence de complications circulatoires et neurologiques au stade initial de l’infection et l’étiologie bactérienne.

* Les méningites à pneumocoque ont le pronostic le plus sévère, celles à méningocoque ont le pronostic le moins sévère en dehors de la survenue d’une méningococcémie fulminante.

* La surdité est la séquelle neurologique la plus fréquente.

– Il s’agit d’une surdité de transmission due à une labyrinthite infectieuse qui peut s’accompagner d’ataxie. Sa gravité dépend de sa profondeur et de son unilatéralité ou bilatéralité. Son apparition est contemporaine de la période aiguë de la méningite.

– Elle peut s’améliorer voire disparaître au cours de la première année d’évolution.

– La corticothérapie associée au traitement antibiotique initial pourrait en réduire l’incidence, en particulier dans les méningites à Haemophilus. La réalisation de potentiels évoqués auditifs est nécessaire pour en faire le diagnostic chez les enfants les plus petits.

* Ces différentes séquelles considérées comme majeures sont susceptibles d’amélioration au cours de la première année suivant la méningite. Par contre, des séquelles moins graves peuvent se révéler au cours du développement de l’enfant. Elles concernent, en particulier, ses fonctions cognitives.

Méningites néonatales

Le pronostic des méningites néonatales est encore plus grave et leur évaluation intiale est difficile.

* Le développement d’une hydrocéphalie est à surveiller en particulier.

* Ce n’est qu’après un suivi prolongé que des anomalies comportementales ou motrices peuvent devenir perceptibles.

* Une appréciation du pronostic global des méningites bactériennes néonatales est indiquée par les chiffres suivants:

– mortalité, 15 à 30%.

– développement normal, 50 à 65%.

– séquelles modérées, 20 à 30%.

– séquelles graves, 5 à 20%.

Importance de la prévention primaire :

La prévention des méningites bactériennes est un objectif de santé publique.

* La prévention des méningites bactériennes comprend la chimioprophylaxie de l’entourage d’un cas index, la vaccination contre Haemophilus influenzae type b. La vaccination contre les oreillons prévient une partie des méningites virales (voir schéma).

* La vaccination contre Haemophilus influenzae type b n’est pas obligatoire. Elle comporte quatre injections à 2, 3, 4 et 16-18 mois. Elle est associée aux autres vaccins pratiqués aux mêmes âges dans une injection unique. La couverture vaccinale actuelle a permis une réduction considérable du nombre de cas de méningite à Haemophilus du nourrisson.

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