Pathologie de la sphère ORL au cours du syndrome d’immunodéficience acquise : apport de l’imagerie

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Introduction :

Les patients infectés par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) ont, dans plus de 50 % des cas, une lésion intéressant la sphère oto-rhino-laryngologique (ORL), les plus fréquentes étant les lésions oropharyngées.

Si certaines lésions ORL sont évocatrices d’une infection par le VIH, le diagnostic peut être difficile quand la lésion ORL est le premier motif de consultation.

Pathologie de la sphère ORL au cours du syndrome d’immunodéficience acquise : apport de l’imagerieCeci souligne l’importance de connaître les manifestations ORL devant conduire au dépistage sérologique d’une infection par le VIH.

La fréquence des manifestations ORL augmente avec l’immunodépression.

Le taux de CD4 informe sur l’état immunitaire du patient et oriente le diagnostic en faisant craindre la survenue d’infections opportunistes et d’affections malignes.

La phase de primo-infection survient 15 jours à 3 mois après la contamination et se manifeste le plus souvent par un syndrome d’infection virale aiguë (adénopathies cervicales et axillaires disséminées, fièvre, myalgies, dysphagie douloureuse, tuméfaction des glandes salivaires), plus rarement par une candidose et des ulcérations buccales.

La sérologie est négative au moment de l’apparition de ces symptômes alors que l’antigénémie p24 est positive.

La phase précoce de l’infection est le plus souvent pauci- ou asymptomatique, correspondant à un taux de lymphocytes CD4+ relativement élevé (³ 500 cellules/mm3).

Le déclin du taux de CD4+ est souvent associé à la survenue de symptômes regroupant des signes généraux (fièvre, amaigrissement, asthénie, diarrhée) et des infections telles que la candidose buccale et la leucoplasie chevelue de la langue.

Le profil de l’infection par le VIH a été modifié depuis les traitements dits HART (Hislly Active Retroviral Therapy) indiqués non seulement devant une baisse des lymphocytes CD4 mais surtout devant l’élévation de la charge virale VIH.

Il existe en effet une corrélation entre la charge virale et l’évolution vers le syndrome d’immunodéficience acquise (sida), permettant maintenant d’introduire plus précocement des traitements plus actifs.

Le sida est défini sur des critères cliniques caractérisés par la survenue d’infections opportunistes et de pathologies malignes (groupe C de la classification du Center for diseases control).

La description des lésions de la sphère ORL des patients VIH positifs est faite suivant leur siège anatomique en différenciant les lésions primaires dues à l’infection par le virus VIH et les lésions secondaires dues aux infections opportunistes et au développement de tumeurs.

Glande parotide :

L’atteinte de la glande parotide existe dans le cadre d’une primoinfection par le VIH.

Ainsi, une imagerie parotidienne peut être demandée avant que le diagnostic d’infection par le VIH soit connu.

L’atteinte parotidienne est caractérisée par une augmentation de taille de la glande parotide et par des lésions kystiques.

L’origine des lésions parotidiennes est discutée : adénopathies intraparotidiennes, néogenèse lymphoïde, hyperplasie autoimmune.

Ceci explique les formes tissulaires, pseudotumorales de l’hyperplasie bénigne lymphoépithéliale dont le diagnostic différentiel avec le lymphome repose sur l’anamnèse et la preuve histologique.

A – HYPERPLASIE LYMPHOÏDE KYSTIQUE :

Il s’agit le plus souvent de formations parotidiennes, kystiques, multiples, cloisonnées, à contours nets, transsoniques en échographie, sans composante tissulaire, se développant préférentiellement dans le lobe superficiel.

En tomodensitométrie (TDM), il s’agit d’une formation de densité homogène, kystique, pouvant présenter un fin rehaussement pariétal.

En imagerie par résonance magnétique (IRM), ces lésions parotidiennes ont le signal d’un kyste : hyposignal T1, hypersignal T2.

Des lésions kystiques de signal différent en T1 et T2 témoignent d’une infection ou d’un saignement intrakystique.

La taille des kystes va de quelques millimètres à quelques centimètres.

L’atteinte est souvent bilatérale et associée à des adénopathies cervicales. L’échographie suffit au diagnostic et au suivi lésionnel.

Un examen par TDM ou par IRM se justifie s’il existe un doute diagnostique en échographie devant une formation parotidienne faiblement hypoéchogène, suggérant à tort une formation tissulaire.

L’examen histologique montre une formation kystique intraglandulaire bordée de cellules épithéliales et de lymphocytes avec disparition des acini par atrophie cellulaire.

D’autre part, l’obstruction canalaire par des cellules myoépithéliales entraîne une dilatation canalaire d’amont.

Un kyste parotidien chez un patient sans antécédents lithiasiques ou traumatiques doit faire envisager une atteinte parotidienne liée au VIH et faire pratiquer une sérologie.

Dans près de 40 % des cas, cette infection est ignorée quand la pathologie parotidienne est découverte.

Un deuxième prélèvement doit être pratiqué chez les patients à sérologie négative car les lésions parotidiennes peuvent précéder la positivité de la sérologie.

Penser à une infection par le VIH devant une pathologie kystique de la parotide, c’est permettre un diagnostic et une thérapeutique précoces, ralentissant la progression de la maladie.

L’hyperplasie lymphoïde kystique régresse le plus souvent sous traitement antirétroviral.

Aucun traitement chirurgical des kystes parotidiens n’est à envisager.

Les récidives postchirurgicales sont fréquentes.

Lorsque l’hyperplasie parotidienne persiste sous traitement antiviral, une ponction évacuatrice suffit en cas de kystes à l’origine de douleurs locales ou de problèmes esthétiques.

Elle ramène un liquide riche en amylase. Une parotidectomie superficielle peut être envisagée devant la persistance d’une hyperplasie lymphoïde kystique posant un problème esthétique.

En imagerie, de multiples pathologies sont à l’origine de formations kystiques parotidiennes. Le contenu kystique, l’absence de végétation tumorale pariétale éliminent une tumeur à contingent kystique : tumeur mucoépidermoïde ou cystadénolymphome (tumeur de Warthin).

La forme arrondie, l’absence de prolongement vers le conduit auditif externe (CAE) éliminent un kyste branchial du premier arc.

La présence (dans près d’un tiers des cas) d’une hyperplasie lymphoïde ganglionnaire cervicale et/ou du nasopharynx évoque le diagnostic d’infection par le VIH. Les hyperplasies lymphoïdes kystiques parotidiennes ne s’associent pas aux paralysies faciales.

La découverte d’un kyste parotidien dans le bilan d’une paralysie faciale chez un patient VIH positif ne doit pas arrêter les investigations et faire considérer d’autres diagnostics à l’origine de la paralysie : névrite faciale, méningoencéphalite, lymphome parotidien.

B – HYPERPLASIE PAROTIDIENNE SIMPLE :

Outre les kystes parotidiens, l’atteinte par le VIH de la glande parotide peut entraîner une augmentation de taille des glandes parotidiennes, parfois pseudotumorales.

Il s’agit d’un syndrome lymphoprolifératif diffus caractérisé par une hypertrophie glandulaire, présentant une hyperfixation en « motte » lors de la scintigraphie au gallium.

Ce syndrome est souvent associé à une prolifération oligoclonale des CD8 et des CD4.

Le diagnostic différentiel d’une hypertrophie glandulaire focale est le lymphome parotidien, d’autant que la ponction à l’aiguille fine peut prêter à confusion par l’importance de la réaction lymphocytaire.

S’il existe une lésion solide en imagerie, une cytoponction négative est insuffisante pour infirmer le diagnostic.

La pratique d’une biopsie chirurgicale par parotidectomie est alors nécessaire afin d’éliminer une tumeur maligne.

Atteinte nasosinusienne :

A – ATTEINTE INFLAMMATOIRE ET INFECTIEUSE :

Les atteintes inflammatoires nasosinusiennes affectent 10 à 50 % des patients et la fréquence de l’infection sinusienne augmente avec le stade d’immunodépression.

Ces atteintes sont responsables de fièvre, de céphalées ou d’infections respiratoires à répétition.

La fréquence de l’atteinte sinusienne serait plus due à la baisse de l’immunité humorale qu’à l’atteinte de l’immunité cellulaire des patients VIH positifs.

Les atteintes sinusiennes sont sévères, avec un comblement sinusien généralisé.

La responsabilité de l’infection virale, que ce soit directement ou par le biais de l’immunodépression dans la pathogénie des sinusites dans cette population, est indirectement mise en évidence par la diminution de la fréquence des infections sinusiennes rencontrées chez les patients pour lesquels le traitement induit une diminution de la charge virale.

Les atteintes sinusiennes ont de multiples présentations cliniques : sinusite aiguë, sinusite chronique, surinfection d’une sinusite chronique.

Les sinusites bactériennes sont les causes les plus fréquentes de sinusites des patients infectés par le VIH.

L’examen endoscopique des fosses nasales a un intérêt majeur permettant d’affirmer, par la présence de pus aux méats, l’existence d’une infection sinusienne.

Le prélèvement au méat moyen est intéressant car il permet d’orienter le traitement antibiotique.

Si les radiographies standards des sinus peuvent contribuer au diagnostic et à la mise en oeuvre du traitement médical, l’atteinte nasosinusienne est à chercher sur toute imagerie cérébrale (TDM et IRM) de patient sidéen fébrile.

De même, un examen radiologique des sinus (TDM) est à pratiquer chez les patients présentant des infections respiratoires à répétition au même titre que les radiographies pulmonaires.

C’est la TDM qui illustre au mieux l’atteinte sinusienne. Les opacités sinusiennes sont le plus souvent diffuses, sans spécificité en faveur de la nature bactérienne de l’infection.

Il est donc particulièrement important, chez ces patients, de confronter la symptomatologie clinique à celle de l’examen endoscopique et TDM.

Des infections fongiques invasives (aspergillose, mucormycose) sont observées.

Elles sont à évoquer devant un comblement sinusien pseudotumoral avec lyse osseuse contiguë, envahissement des parties molles (orbite, système nerveux central) et thrombose vasculaire.

L’envahissement, même limité, de la graisse périsinusienne suggère l’agressivité du processus infectieux.

Le traitement des sinusites mycosiques invasives associe un débridement chirurgical large à un traitement par antifongiques (amphotéricine B ± itraconazole) par voie générale, éventuellement locale.

B – ATTEINTES TUMORALES :

Les tumeurs nasosinusiennes du patient VIH positif sont exceptionnelles de façon similaire à leur distribution dans la population générale, mais sont particulières par leur histologie.

Elles peuvent être inaugurales de la maladie.

Il s’agit le plus souvent de lymphomes non hodgkiniens développés à partir de la muqueuse sinusienne ou du cadre osseux, envahissant secondairement les cavités sinusiennes.

Ils sont responsables de masses expansives, bien limitées, entraînant une lyse osseuse de contiguïté.

Les épithéliomas sinusiens n’ont pas d’autre particularité que leur survenue chez un sujet jeune, non exposé à des irritants de la muqueuse nasale et leur rapidité d’évolution.

Leur diagnostic impose le contrôle biopsique des sinusites présentant une lyse osseuse et des sinusites rebelles aux traitements médicaux, même s’il n’existe qu’un comblement sinusien non spécifique en TDM.

Une érosion des lamelles sinusiennes ethmoïdales ou du cadre orbitaire doit faire considérer le diagnostic de processus expansif sinusien au même titre qu’une sinusite agressive fongique.

L’IRM établit le diagnostic en montrant une formation expansive, cellulaire, en hyposignal T2, se rehaussant après gadolinium.

Les sarcomes de Kaposi cutanés peuvent exceptionnellement envahir les sinus.

L’os envahi présente une réaction périostée de type fibrillaire, due au contingent vasculaire tumoral.

Les sarcomes de Kaposi peuvent exceptionnellement se développer aux dépens des muqueuses nasales et donner un syndrome de masse.

C – IMAGERIE :

L’imagerie TDM des sinus est indiquée chez les patients VIH positifs présentant une sinusite rebelle au traitement médical adapté ou pour le diagnostic positif d’infection sinusienne chez un patient fébrile.

L’IRM est réservée au bilan des sinusites agressives infectieuses et aux tumeurs sinusiennes pour apprécier leur diffusion aux méninges, aux gaines périneurales et aux espaces graisseux de la base du crâne.

L’IRM est plus sensible que la TDM pour identifier les anomalies de signal caractéristiques des lésions fongiques dues aux dépôts de substances paramagnétiques.

L’IRM, ou la TDM, est contributive si elle objective :

– une atteinte sinusienne occulte, en particulier sphénoïdale ;

– une atteinte agressive avec destruction osseuse et/ou une atteinte des espaces graisseux adjacents aux parois sinusiennes (fosse ptérygopalatine, joue, région rétroantrale) illustrée par les fenêtres parties molles, à faire systématiquement.

Cette atteinte, plus précoce que l’atteinte osseuse, doit inciter à l’exploration chirurgicale avec prélèvement et biopsies ;

– un comblement intrasinusien, hyperdense en TDM, et de signal hypo-intense en séquence pondérée T2, évoquant une aspergillose ;

– une diffusion méningoencéphalique de contiguïté.

Atteinte ganglionnaire :

C’est une atteinte précoce et fréquente, affectant près de 40 % des patients séropositifs.

L’association d’une atteinte ganglionnaire à une hyperplasie lymphoïde du nasopharynx ou à un kyste parotidien rend le diagnostic d’infection par le VIH probable.

A – ATTEINTE INFECTIEUSE :

Les atteintes ganglionnaires infectieuses peuvent être dues à une toxoplasmose, une histoplasmose (à discuter en fonction du contexte géographique du patient), une tuberculose ou à une infection à staphylocoques.

L’atteinte ganglionnaire d’origine infectieuse peut être à l’origine de phlegmons latérocervicaux.

Une tuberculose cervicale est à chercher devant des ganglions coalescents et nécrosés, siégeant préférentiellement dans le triangle cervical postérieur.

B – ATTEINTE LYMPHOMATEUSE :

Aucun critère ne différencie les adénopathies inflammatoires réactionnelles des atteintes tumorales lymphomateuses.

L’absence de spécificité en imagerie des adénopathies fait que la présence de ganglions supérieurs à 3 cm, non homogènes ou à contenu kystique, doit faire pratiquer une biopsie-exérèse.

L’intérêt de la ponction à l’aiguille fine des formations ganglionnaires a été souligné depuis plusieurs années.

Elle est souvent positive quand l’adénopathie est supérieure à 3 cm.

La présence d’atteinte ganglionnaire, et d’une infiltration périneurale ou périvasculaire, est suggestive d’un lymphome.

La fréquence des atteintes lymphomateuses du patient VIH positif est élevée puisque près de 30 % des patients VIH positifs présentent une atteinte lymphomateuse au cours de l’évolution de leur maladie.

Ainsi, le développement d’un lymphome est considéré comme un indicateur diagnostique du sida.

Trois facteurs seraient à l’origine du développement des lymphomes : une altération chromosomique avec activation oncogénique ; une prolifération des lymphocytes B infectés par le virus Epstein-Barr ou une stimulation antigénique chronique.

En cas de preuve histologique de lymphome, le bilan d’extension comporte une biopsie médullaire, une scintigraphie osseuse, une TDM thoracoabdominale, une IRM cérébrale et de la base du crâne ainsi qu’une ponction lombaire (20 % des patients présentant une atteinte leptoméningée asymptomatique).

Chez le patient VIH positif, les lymphomes non hodgkiniens sont dans plus de 90 % de haut grade, dû à une prolifération des cellules de type immunoblastique ou de type Burkitt.

Ils atteignent avec prédilection les ganglions cervicaux et l’anneau de Waldeyer et ont une propension à s’étendre à la base du crâne, le long des axes vasculonerveux, l’atteinte du sinus caverneux étant fréquente.

C – SARCOME DE KAPOSI :

Dans près de 20 % des cas d’atteinte ganglionnaire existe un sarcome de Kaposi, affection définissant le sida.

Ce syndrome est responsable d’adénopathies homogènes, se rehaussant intensément après injection de façon uniforme.

L’atteinte ganglionnaire peut précéder l’atteinte muqueuse pharyngolaryngée.

Le rehaussement intense d’un ganglion ou, une adénopathie à composante hémorragique ou kystique doivent faire discuter différentes étiologies dont le sarcome de Kaposi.

Atteinte oeso-pharyngo-laryngée :

Elle atteint les trois étages du pharyngolarynx et l’oesophage.

Les atteintes sont de deux types : primaire avec hypertrophie de l’anneau de Waldeyer ; secondaire avec infection à germes opportunistes et/ou par tumeurs (sarcome de Kaposi, lymphomes non hodgkiniens).

A – ATTEINTE OESO-PHARYNGO-LARYNGÉE INFECTIEUSE :

Les candidoses oropharyngées sont particulièrement fréquentes et récidivantes au cours de l’infection par le VIH, responsables de pseudomembranes, d’hyperplasie muqueuse, de lésions érythémateuses et d’hyposialie.

C’est parfois le signe inaugural de la maladie.

Le traitement repose sur des antifongiques locaux (amphotéricine B ou nystatine).

Le recours aux antifongiques oraux (kétoconazole ou fluconazole) est justifié dans les formes profuses ou associées à des localisations oesophagiennes.

L’examen dentaire et de la cavité buccale est systématique chez tout patient VIH positif pour prévenir des parodontopathies et des gingivites dues aux infections bactériennes.

L’examen de la cavité orale révèle souvent des polycaries liées au terrain (toxicomanie).

Enfin, le mauvais état buccal explique la diffusion des infections de la cavité orale et dentaire à la fosse infratemporale, parfois d’allure pseudotumorale.

Les infections virales de la cavité orale entraînent des manifestations polymorphes : herpès labial et stomatite herpétique (virus Herpès simplex), zona buccofacial (virus de la varicelle et du zona [VZV]), condylomes (papillomavirus) ne demandant aucune imagerie.

Les aphtes buccaux sont fréquents avec aphtes multiples, récidivants, d’évolution plus longue que chez les patients séronégatifs.

Ces aphtes se transforment parfois en une volumineuse ulcération extrêmement douloureuse, sans caractère spécifique à l’examen pathologique.

Ils se localisent le plus souvent au niveau du voile, de la langue ou de la région amygdalienne et s’observent au stade de sida.

Leur étiologie demeure inconnue.

Une biopsie est parfois nécessaire pour éliminer une infection à cytomégalovirus (CMV) ou plus exceptionnellement un lymphome.

Le traitement repose sur les corticoïdes locaux.

Dans les formes très dysphagiantes résistant au traitement local, la thalidomide est souvent efficace.

La leucoplasie chevelue de la langue (stries blanchâtres, verticales du bord libre de la langue ne disparaissant pas au grattage) liée au virus Epstein-Barr est une manifestation indolore décrite chez les patients séropositifs ; elle doit être cherchée lors de tout examen de bouche.

Les épiglottites à germes opportunistes ou à Hæmophilus influenzae ont été rapportées chez les patients VIH positifs.

Le diagnostic est clinique et l’imagerie inutile. Les clichés couchés sont à proscrire du fait de la gêne respiratoire.

Les films standards, patient debout ou assis, suffisent en cas de doute diagnostique.

Ils objectivent le rétrécissement pharyngé et l’épaississement de l’épiglotte.

L’imagerie n’est utile que si une diffusion de l’infection à l’axe viscéral pharyngolaryngé est suspectée et n’est à pratiquer que chez un patient traité, sans troubles dyspnéiques importants.

Le bilan est à faire par TDM, avec injection de produit de contraste en coupes de 3 mm jointives avec fenêtres osseuses et parenchymateuses.

Elle met en évidence le retentissement sur la filière aérodigestive et la diffusion extrapharyngée de l’infection avec parfois constitution d’un phlegmon de l’axe viscéral.

Le diagnostic des infections de l’axe oesophagien est assuré par l’endoscopie.

Les lésions oesophagiennes présentant des ulcérations profondes sont souvent liées à une infection à Candida, à CMV, au virus Herpès simplex mais aussi à une atteinte tissulaire par le VIH lui-même.

Le diagnostic est assuré par l’endoscopie et les biopsies avec techniques spécifiques.

Le transit baryté peut être une alternative pour le suivi lésionnel en cas d’oesophagite douloureuse.

Il peut mettre en évidence de larges ulcérations sous-muqueuses, profondes, suggestives d’infection à Candida.

B – HYPERPLASIE LYMPHOÏDE RÉACTIONNELLE :

L’hyperplasie du tissu lympho×de atteint, de façon décroissante, les végétations adénoïdes, les ganglions, l’amygdale linguale et palatine.

Elle n’est pas spécifique et son origine est controversée.

Il ne semble pas exister de corrélation entre l’importance de la réaction lymphoïde, le taux des CD4 ou les anomalies de la formule sanguine. Dans le tissu lymphatique (ganglions et anneau de Waldeyer), des particules virales ont été mises en évidence, probablement à l’origine de la diffusion de la maladie.

Elle définit le stade clinique A (classification par le CDC d’Atlanta).

Ces tissus lymphoïdes sont le siège d’une infiltration bénigne de lymphocytes CD8 et l’adénectomie n’est pas justifiée.

L’hyperplasie du tissu lymphoïde de l’anneau de Waldeyer existe dans plus de 30 % chez les patients infectés par le VIH et doit être considérée comme pathologique chez un sujet de plus de 30 ans.

C’est une atteinte précoce dans l’infection par le VIH, à l’origine d’une obstruction nasale traînante, parfois révélatrice de la maladie.

Elle entraîne une formation expansive présentant un rehaussement homogène.

La biopsie doit être envisagée quand la lésion est asymétrique, infiltrante ou qu’elle présente une poussée évolutive.

En effet, lymphome et hyperplasie peuvent présenter le même aspect d’hypertrophie sous-muqueuse, limitée, respectant les fascia péripharyngés, avec rehaussement homogène, sans extension osseuse ou périneurale.

C – ATTEINTE OESO-PHARYNGO-LARYNGÉE TUMORALE :

Le bilan des épithéliomas du tractus aérodigestif chez un sujet avant 45 ans doit faire pratiquer une sérologie VIH.

Il s’agit de tumeurs infiltrantes, souvent dépistées à un stade évolué (T3-T4), de mauvais pronostic.

Leur origine chez le patient VIH n’est pas élucidée. L’infection par le VIH serait à l’origine d’un développement précoce d’épithéliomas de la sphère ORL chez les patients ayant des facteurs de risque significatifs.

Ainsi, la présence d’une intoxication alcoolotabagique chez le patient VIH positif doit faire entreprendre un dépistage systématique de pathologie tumorale de la sphère ORL avec endoscopie et biopsies systématiques.

Il existe par ailleurs des localisations pharyngo-oesophagiennes de sarcome de Kaposi pharyngolaryngé.

Cette tumeur représente la tumeur maligne la plus fréquente chez les patients infectés par le VIH et survient chez 15 à 20 % des patients.

Il s’agit de la première manifestation de la maladie chez près de 15 % des patients.

Un virus apparenté au virus de l’herpès, nommé HHV8 (human herpes virus 8) a été identifié comme l’agent probable de la maladie de Kaposi.

La maladie se manifeste par l’apparition de lésions pigmentées maculaires, papulaires ou nodulaires rarement ulcérées, indolores, situées sur la peau, les muqueuses et parfois les viscères.

L’atteinte cutanéomuqueuse cervicofaciale est fréquente, les lésions sont le plus souvent de petite taille, multiples.

Elles ne disparaissent pas à la vitropression, leur coloration est variable, rouge, bleutée ou violacée, presque noire sur les peaux sombres.

Les localisations muqueuses du sarcome de Kaposi sont préférentiellement situées sur le palais dur et les gencives, mais peuvent être observées en tout point sur la muqueuse buccale, oropharyngée et même laryngée, rhinopharyngée et sinusienne.

Les formes profondes sousmuqueuses peuvent être recouvertes par une muqueuse normale.

Les lésions peuvent être asymptomatiques soit de par leur localisation (dysphonie ou dyspnée dans les localisations endolaryngées), soit de par leur taille (dysphagie) ou la survenue de surinfection ou d’hémorragies.

En imagerie, elles réalisent une formation expansive, plane ou lobulée, peu infiltrante présentant un rehaussement important après injection de produit de contraste , faisant discuter d’autres tumeurs vasculaires.

Néanmoins, leur fréquence diminue compte tenu de la thérapie et de la nature différente de l’épidémiologie (plus fréquente en cas de contamination homosexuelle).

Atteinte du rocher :

Les atteintes du rocher dans le cadre du sida sont rares.

L’atteinte du temporal et du système neurosensoriel est complexe, associant des lésions dues à l’infection par le VIH et des lésions infectieuses et virales secondaires à la baisse de l’immunité (infection par CMV, tuberculeuses ou syphilitiques).

Enfin, se greffent des lésions neurosensorielles dues à la toxicité médicamenteuse des traitements utilisés chez le patient VIH tels que zidovudine (AZT) et les thérapies à toxicité neurosensorielle (vincristine, amphotéricine B).

Les atteintes du rocher peuvent être séparées schématiquement en trois entités.

A – ATTEINTE DU CONDUIT AUDITIF EXTERNE ET/OU DE L’OREILLE MOYENNE :

Une infection à Pseudomonas aeruginosa, à Staphylococcus aureus ou à Pneumocystis carinii est à évoquer quand il existe une atteinte inflammatoire nécrosante et destructrice de l’oreille externe et moyenne.

La plus caractéristique est l’atteinte par localisation extrapulmonaire du P. carinii, due à une colonisation rétrograde de l’oreille à partir du nasopharynx.

Cette atteinte se caractérise par une nécrose limitée, ne diffusant pas en profondeur.

Une infection du conduit auditif externe à P. aeruginosa est parfois la manifestation inaugurale de la maladie. Elle serait favorisée non seulement par les traitements prophylactiques contre les infections bactériennes pulmonaires par cotrimoxazole, mais aussi par les irrigations auriculaires altérant le revêtement cutané.

L’atteinte du CAE n’est pas spécifique si ce n’est qu’elle survient chez un patient non diabétique.

Le tableau clinique est celui d’une otite externe douloureuse d’évolution non favorable sous traitement locorégional classique.

Elle s’associe à une paralysie secondaire des paires crâniennes (V à XII) : soit une ostéomyélite de la base du crâne, soit une atteinte des axes vasculaires.

Le prélèvement du conduit est systématique dès que ce diagnostic est suspecté, pour mettre en oeuvre un traitement médical efficace.

Le bilan lésionnel assuré par une TDM avec injection de contraste et/ou une IRM analyse la diffusion de l’atteinte mastoïdienne à l’articulation temporomandibulaire, à la base du crâne, aux espaces épiduraux et graisseux et aux axes vasculaires.

Celle-ci cherche une résorption osseuse en regard des reliefs vasculaires (sinus latéral, carotide interne), du tegmen et du conduit auditif externe.

Le bilan en imagerie d’une otite nécrosante doit inclure les espaces graisseux de la base, le nasopharynx et les axes vasculaires, car c’est la diffusion à distance qui fait la gravité de la maladie.

L’évolution, défavorable sous traitement antibiotique adapté, nécessite parfois un abord chirurgical du rocher pour débridement.

B – OTITE SÉREUSE :

L’épanchement de l’oreille moyenne existe, avec prédilection chez l’enfant où sa fréquence est appréciée à près de 80 %.

Elle alerte sur une pathologie nasopharyngée et l’étude du nasopharynx est systématique devant toute inflammation de l’oreille moyenne persistante.

L’inflammation mastoïdienne chez l’adulte est souvent méconnue cliniquement et découverte lors des bilans de TDM ou d’IRM encéphaliques faits pour d’autres motifs.

Sa gravité réside en une infection par des germes agressifs (Aspergillus) ayant une propension à lyser les osselets, l’os de voisinage et à disséminer dans les espaces jouxtants avec développement de complications telles les abcès cervicaux (mastoïdite de Bezold), abcès épiduraux, thrombose du sinus latéral et atteintes des paires crâniennes (VI).

C – PÉTROSITES :

Des pétrosites graves à germes divers entraînent une atteinte osseuse associée à des degrés divers à des zones d’inflammation de la médullaire osseuse, de la fibrose et des zones de sclérose osseuse.

Une atteinte destructrice multiloculaire de l’apex pétreux et de l’os périlabyrinthique doit faire chercher une tuberculose ou une atteinte syphilitique.

D – ATTEINTE NEUROSENSORIELLE :

Elle est à suspecter devant :

– un vertige ou des acouphènes pouvant être secondaires à une labyrinthite fongique (cryptoccoque), toxique (vincristine, amphotéricine B), bactérienne (trépomène pâle) ou à une labyrinthite et/ou névrite virale (VIH, CMV, VZV) du VIII vestibulaire ;

– une surdité de perception. Leur mode d’installation est souvent progressif mais des cas de surdité brusque ont été rapportés.

Les causes labyrinthiques peuvent être multiples, identiques aux causes des vertiges ;

– une paralysie faciale périphérique isolée.

L’atteinte du nerf facial due à une infection par le VIH peut survenir à n’importe quel stade de la maladie, être bilatérale et révélatrice.

Une atteinte méningoencéphalique lors d’une infection opportuniste (cryptococcose, toxoplasmose, leucoencéphalite multifocale progressive, infection à CMV) ou un lymphome peuvent être à l’origine d’une surdité de perception, d’un vertige ou d’une paralysie faciale.

Les atteintes du paquet acousticofacial entraînent en IRM, de façon inconstante, un rehaussement anormal après injection de gadolinium, du labyrinthe ou du paquet acousticofacial, isolément ou simultanément, pouvant s’associer à un rehaussement méningé.

Dans tous les cas, une anomalie nucléaire ou du parenchyme sus-tentoriel doit être cherchée de façon systématique.

Ainsi le protocole IRM de l’exploration d’un vertige, d’une surdité ou d’une paralysie faciale, demande l’examen simultané du parenchyme et des gaines nerveuses : soit une séquence T2 et des séquences T1, avant et après injection de gadolinium, encéphaliques couplées à des coupes fines T1 postgadolinium centrées sur le conduit auditif interne.

Ainsi, une névrite vestibulaire ou faciale peut être révélatrice de l’infection par le VIH et un rehaussement de plusieurs gaines nerveuses en IRM doit faire chercher une méningoradiculite virale due au virus VIH, au même titre qu’une neuroborréliose ou une neurosyphilis.

Autres atteintes :

Certaines atteintes peuvent être particulières chez le patient VIH positif, soit par leur siège, soit par leur imagerie.

A – ATTEINTES DE LA BASE DU CRÂNE :

Elles sont de deux types : soit dues à l’infiltration osseuse par une tumeur de voisinage ou à distance (lymphome), soit secondaires au remaniement de la moelle osseuse par déplétion lymphocytaire.

Les atteintes dues aux déplétions lymphocytaires (T4 < 400) sont caractérisées par une anomalie du signal de la moelle osseuse avec hyposignal T1, de signal variable en T2, ne se rehaussant pas.

Il n’y a pas d’anomalie du cadre osseux, ni de symptomatologie clinique, ni d’hyperfixation à la scintigraphie.

Les atteintes lymphomateuses de la base du crâne sont reconnaissables par leur cellularité, leur rehaussement après gadolinium, l’anomalie de la densité osseuse et des contours osseux, l’hyperfixation en scintigraphie et l’infiltration périneurale associée.

B – ATTEINTES DES NERFS CRÂNIENS :

Les infiltrations périneurales peuvent être asymptomatiques, isolées et être découvertes lors du bilan encéphalique d’un lymphome de l’étage abdominal.

Elles grèvent le pronostic du lymphome initial.

Elles entraînent un élargissement d’un segment nerveux avec rehaussement anormal en séquences pondérées T1 après gadolinium et saturation de graisse.

C – LYMPHOME NON HODGKINIEN DU CONDUIT AUDITIF EXTERNE :

À suspecter devant une masse des parties molles du CAE sans signe infectieux.

De rares cas ont été rapportés.

D – ANGIOMATOSE BACILLAIRE :

Atteinte infectieuse secondaire à une infection par Bartonella henselae, elle est susceptible d’entraîner une atteinte cutanée, des atteintes multiviscérales et peut être localisée à la sphère ORL (sinus, oropharynx, ganglion).

Le contingent vasculaire intralésionnel est responsable de masses hypervasculaires, avec rehaussement important en TDM.

C’est le diagnostic différentiel des sarcomes de Kaposi. Son diagnostic permet un traitement spécifique . B. henselae est mis en évidence par la coloration de Whartin-Starry.

E – TUBERCULOSE :

L’infection par la tuberculose présente une recrudescence du fait de l’épidémiologie du sida avec apparition de formes graves, parfois résistantes aux traitements antituberculeux.

La tuberculose est la manifestation inaugurale de la maladie sida chez 12 % des patients, avec une fréquence équivalente de formes pulmonaires et extrapulmonaires.

Pour la sphère ORL, les tuberculoses ganglionnaires les plus communes sont à l’origine d’adénopathies évocatrices quand elles sont nécrotiques, coalescentes et siègent dans le triangle cervical postérieur.

Le diagnostic est bactériologique, assuré dans 70 à 90 % des cas par la ponction à l’aiguille fine, celle-ci évitant une éventuelle fistulisation, fréquente après biopsie ganglionnaire.

Conclusion :

Les patients infectés par le VIH présentent fréquemment une pathologie ORL, le plus souvent banale. Une atteinte simultanée de différents territoires existe dans 20 % des cas.

Certaines situations clinicoradiologiques évoquent une infection par le VIH et font demander une sérologie, qu’il s’agisse d’une tuméfaction kystique de la région parotidienne, d’une hypertrophie du nasopharynx et des amygdales pharyngées associée à une atteinte ganglionnaire cervicale, d’une atteinte des nerfs crâniens (surdité brusque ou vertige) ou d’un épithélioma de la sphère ORL du sujet avant 40 ans.

Les atteintes par germes opportunistes n’ont rien de spécifique, si ce n’est leur fréquence et leur propension à être agressives avec lyse osseuse et atteinte des espaces graisseux de contiguïté.

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