Parasitoses cutanées (en dehors des ectoparasitoses) et manifestations cutanées des parasitoses extracutanées

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Introduction :

Dans le règne animal, les parasites sont des organismes uni- ou pluricellulaires qui, de façon temporaire ou permanente, se nourrissent aux dépens de l’hôte sans le détruire.

L’ectoparasite vit sur les téguments de l’hôte et l’endoparasite à l’intérieur de l’hôte (parasite intestinal, etc).

Parasitoses cutanées (en dehors des ectoparasitoses) et manifestations cutanées des parasitoses extracutanéesChez l’hôte, le parasite pénètre, se déplace, se fixe parfois sur des organes cibles, arrive à maturité en rejetant les produits de son catabolisme et se reproduit tout en pondant des larves ou des oeufs.

C’est le cycle parasitaire.

L’ensemble de cette activité parasitaire engendre des réactions locales ou générales dont les manifestations cutanées.

Les lésions cutanées observées au cours des parasitoses peuvent être provoquées par :

– la pénétration transcutanée du parasite ;

– une migration transitoire sous-cutanée du parasite ;

– la réponse immunitaire de l’hôte à la présence du parasite en transit ou en impasse parasitaire ;

– une localisation cutanée habituelle ou ectopique du parasite adulte ou larvaire.

Le traitement des parasitoses a beaucoup bénéficié de la mise à disposition récente de nouveaux antiparasitaires comme l’ivermectine.

Parasitoses cutanées :

A – PARASITOSES CUTANÉES COSMOPOLITES :

En France, les parasitoses cutanées sont dominées par la pédiculose, la phtiriase, la gale, l’oxyurose, la trichomonase vaginale et la leishmaniose cutanée dans le midi.

La gale, la phtiriase, les pédiculoses et les conséquences des piqûres et/ou morsures d’arthropodes ont fait l’objet d’un article récent et ne seront pas détaillées ici.

1- Trichomonase :

La trichomonase est due à un protozoaire : Trichomonas vaginalis.

L’affection est le plus souvent asymptomatique chez l’homme et entraîne chez la femme une vulvovaginite avec prurit et sensation de cuisson, des leucorrhées jaunâtres, spumeuses et fétides.

Le vagin est rouge, parfois érosif.

Le traitement simultané de la patiente et du (des) partenaire(s) par métronidazole 500 mg (Flagylt) (trois comprimés par jour pendant 5 jours) ou tinidazole 500 mg (Fasigynet) (quatre comprimés en une seule prise) ou nimorazole 1 000 mg (Naxogynt) (deux comprimés en une prise) permet la guérison.

Un traitement local par ovules de Flagylt doit être adjoint chez la femme.

2- Dirofilariose :

Une cinquantaine de cas de dirofilariose cutanée ont été rapportés en France.

Dirofilaria repens, agent de la dirofilariose cutanée en France, est largement répandu dans le Bassin méditerranéen.

Cette parasitose est transmise par les moustiques du genre Aedes ou Culex.

C’est une filaire dont l’hôte définitif est le chien (filariose canine) ou le chat.

Chez l’homme, la filaire est en impasse et se manifeste par un nodule sous-cutané, le plus souvent unique, siégeant aux zones découvertes (cuir chevelu, visage, membres…) et non migrateur.

Le diagnostic (et le traitement) est chirurgical, l’examen anatomopathologique montrant la filaire adulte au sein d’une réaction inflammatoire éosinophile.

3- Démodécidose cutanée :

Demodex folliculorum est un ectoparasite saprophyte du follicule pileux se comportant comme un agent infectieux opportuniste chez l’immunodéprimé où il peut être responsable de démodécidose.

Celle-ci se manifeste par une éruption prurigineuse de papules folliculaires rapidement excoriées du fait du grattage.

Elles siègent sur le visage et le tronc.

L’efficacité inconstante des traitements antiparasitaires fait néanmoins discuter le rôle exact de cet arthropode. En revanche, il est à l’origine de blépharite.

Le diagnostic repose sur l’examen parasitologique direct.

4- Hypodermoses :

Les hypodermoses sont une sorte de myiase, maladie liée au parasitisme de l’homme par des larves de mouches ou asticots.

Elles sévissent partout en Europe mais les cas humains sont rares.

L’homme se contamine en milieu rural auprès du bétail (ovidés, bovidés) parasité.

La maladie est plus fréquente chez l’enfant et il existe un caractère régional et saisonnier marqué.

On observe initialement des signes généraux (fièvre, amaigrissement, asthénie) et des signes allergiques (prurit, urticaire, myalgies, arthralgies).

À ce stade, il existe une hyperéosinophilie sanguine et les réactions sérologiques spécifiques sont positives.

Après quelques mois d’évolution, apparaissent des poussées d’oedèmes sous-cutanés fugaces et migratoires (tuméfactions ambulatoires) et une lésion furonculoïde rampante d’où la larve émerge rarement.

5- Ankylostomose :

L’ankylostomose humaine est fréquente en zone tropicale mais est aussi décrite en zone tempérée où la contamination se fait dans des abris naturels (tunnels, mines).

La pénétration cutanée se manifeste au niveau des pieds (espace interorteil) ou des mains par un érythème localisé maculopapuleux plus ou moins prurigineux (« gourme des mineurs ») apparaissant dans les 24 heures après l’infestation.

La durée d’évolution est inférieure à 15 jours. Les infestations répétées peuvent aboutir à des manifestations générales d’hypersensibilité (prurit, urticaire).

Les larves d’ankylostomes animaux, en impasse parasitaire chez l’homme, sont responsables d’une dermatite serpigineuse, la larva migrans cutanée ankylostomienne.

Cette dermatose est réputée comme étant exclusivement tropicale mais trois cas autochtones ont été rapportés en 1907, en 1928 et en 1995.

6- Dermatite cercarienne :

En France, les baignades en eau douce l’été dans les lacs exposent à la trichobilharziose ou dermite à cercaires.

Elle est due à la pénétration de la peau par des larves de schistosomes (Trichobilharzia ocellata), parasites d’oiseaux aquatiques (canards, hérons).

Ces cercaires sont, chez l’homme, en impasse parasitaire et sont responsables d’éruptions maculopapuleuses prurigineuses.

L’éruption touche principalement les zones découvertes.

Elle apparaît quelques minutes après le contact avec l’eau et peut persister une quinzaine de jours.

La répétition des bains s’associe à la réapparition, de plus en plus précoce, de lésions cutanées de plus en plus intenses.

Le traitement est symptomatique par antihistaminiques et dermocorticoïdes.

B – PARASITOSES CUTANÉES TROPICALES :

Les parasitoses cutanées tropicales sont dominées par les leishmanioses, les filarioses, la tungose et les myiases.

1- Leishmanioses tégumentaires :

* Généralités :

La leishmaniose est une infection parasitaire due à un protozoaire du genre Leishmania et transmise par un insecte, le phlébotome.

Les leishmanioses cutanées sont endémiques dans de nombreuses régions géographiques : la répartition géographique distingue les leishmanioses du Nouveau Monde (Amérique) et celles de l’Ancien Monde (Afrique, Europe du Sud, Asie).

En dépit de la possibilité d’observer des cas de leishmanioses cutanées et même muqueuses, en Europe du Sud, nous avons préféré maintenir les leishmanioses parmi les parasitoses tropicales plutôt que de les considérer comme une maladie cosmopolite.

* Formes cliniques :

+ Leishmanioses cutanées localisées :

La période d’incubation de la maladie est difficile à évaluer, habituellement de 15 jours à 3 mois.

La symptomatologie clinique est très polymorphe, peut-être influencée par le type et la virulence de la souche, l’importance de l’inoculum et le statut immunitaire de l’hôte.

La lésion élémentaire est une papule, un nodule, une ulcération, ou une plaque érythémateuse parfois recouverte de squames-croûtes très adhérentes.

Il existe des formes végétantes pouvant simuler une tuberculose verruqueuse, et des formes papuleuses bien limitées d’allure lupoïde, à distinguer de la sarcoïdose.

Son évolution, indolore, est marquée par l’absence de signes inflammatoires, sauf en cas de surinfection.

La guérison spontanée est progressive en plusieurs mois à années, laissant une cicatrice indélébile.

Les lésions sont uniques ou multiples mais rarement supérieures à une dizaine, pouvant résulter de piqûres multiples ou d’une dissémination lymphohématogène (forme sporotrichoïde).

Les lésions siègent sur les zones découvertes et résistent à une antibiothérapie intempestive.

+ Leishmanioses muqueuses :

Elles sont classiquement l’apanage de Leishmania braziliensis et de L. panamensis dans le Nouveau Monde, et L. aethiopica dans l’Ancien Monde.

Elles peuvent aussi s’observer chez les immunodéprimés (transplantés, patients infectés par le virus de l’immunodéficience humaine [VIH]) avec des espèces réputées dermotropes comme L. tropica et des espèces réputées viscérotropes comme L. infantum.

Il s’agit d’une forme particulière de leishmaniose avec inoculation cutanée initiale et dissémination secondaire au niveau de la muqueuse rhinopharyngée, avec une atteinte cartilagineuse parfois mutilante. Les signes muqueux apparaissent en moyenne une quinzaine d’années après la lésion cutanée.

L’atteinte muqueuse ne coexiste avec l’atteinte cutanée que dans 5 % des cas.

La localisation nasale est la plus fréquente et se manifeste par des lésions granulomateuses ulcérées de la partie antérieure de la cloison nasale.

Elle évolue vers l’obstruction nasale, la perforation de la cloison et l’affaissement du nez.

Les autres muqueuses atteintes sont par ordre de fréquence, le pharynx, le palais, le larynx et la lèvre supérieure.

+ Leishmaniose cutanée diffuse :

Elle est caractérisée par des lésions papulonodulaires et une infiltration en « nappe » touchant le visage, les oreilles, les extrémités, pouvant se généraliser à tout le corps, donnant un aspect pseudolépromateux.

Ces lésions sont très riches en leishmanies et s’accompagnent d’un déficit de l’immunité cellulaire, raison pour laquelle elles peuvent aussi s’observer chez l’immunodéprimé.

+ Atteinte cutanée et leishmaniose viscérale :

Des lésions cutanées à type de macules, papules et nodules disséminés sur le revêtement cutané peuvent s’observer au cours de la leishmaniose viscérale chez l’immunodéprimé et au décours de la maladie en Inde (nodule post-kala-azar).

* Diagnostic :

La réalisation d’un examen direct après frottis réalisé sur le tissu en périphérie de l’ulcération permet, après coloration au May-Grünwald-Giemsa, de mettre en évidence des leishmanies, soit en position intracytoplasmique, soit à l’état libre.

Une biopsie cutanée en bordure de la lésion peut également être pratiquée, montrant un granulome inflammatoire polymorphe et la présence de leishmanies in situ.

La culture sur milieu NNN à partir d’un frottis cutané ou d’une biopsie permet d’augmenter la rentabilité du prélèvement mais le typage des souches indispensable à l’identification de l’espèce n’est possible que dans de rares centres de référence (pour la France, à Montpellier).

* Traitement :

Le but du traitement est double : obtenir la cicatrisation d’une ulcération cutanée afin d’éviter une séquelle cicatricielle, et pour les leishmanioses du Nouveau Monde, réduire le risque supposé de leishmaniose muqueuse secondaire.

La leishmaniose cutanée de l’Ancien Monde peut bénéficier d’un traitement local : les méthodes physiques ne sont plus d’actualité (exérèse chirurgicale, cryothérapie), et le traitement de référence reste les injections intralésionnelles d’antimoine pentavalent (Glucantimet) aux quatre points cardinaux de la lésion : 1 à 2mL par injection, une à deux injections hebdomadaires pendant 3 à 6 semaines en fonction de l’évolution clinique.

Pour les cas ne relevant pas d’un traitement local, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Center for Disease Control (CDC) recommandent un traitement par dérivés pentavalents de l’antimoine par voie parentérale selon les mêmes modalités que dans les leishmanioses du Nouveau Monde.

La leishmaniose cutanée du Nouveau Monde est traitée par voie générale car il existe un risque de leishmaniose muqueuse secondaire : les dérivés pentavalents de l’antimoine sont utilisés à la dose de 20 mg/kg/j d’antimoine pentavalent pendant 21 jours par voie intramusculaire, avec une surveillance électrocardiographique et biologique (hématologique, hépatique et pancréatique).

Les effets indésirables sévères sont rares (arythmie ventriculaire, hépatite fulminante, agranulocytose, pancréatite sévère).

En ce qui concerne le sels de pentamidine, le mésylate de pentamidine (Lomidinet) a été retiré du commerce.

Le sel de pentamidine actuellement commercialisé est l’iséthionate de pentamidine (Pentacarinatt).

Il est considéré comme une alternative thérapeutique de choix dans le traitement des leishmanioses cutanées du Nouveau Monde quand L. braziliensis n’est pas en cause.

L’amphotéricine B (Fungizonet) est le traitement de deuxième intention de la leishmaniose muqueuse en Amérique latine en cas d’échec des dérivés de l’antimoine.

Les antifongiques imidazolés (kétoconazole et itraconazole) et l’allopurinol ne sont pas considérés comme des traitements de référence.

2- Filarioses :

* Loase :

La filariose à Loa loa se contracte dans les zones forestières d’Afrique centrale après piqûre de taon (Chysops).

Elle se traduit cliniquement par des poussées d’oedèmes prurigineux, fugaces, périarticulaires et migrateurs sur les faces d’extension des membres (oedème de Calabar).

Parfois, la migration de la filaire adulte peut s’observer au niveau de la conjonctive (sillon, photophobie, larmoiement et oedème périorbitaire) et au niveau de la peau (sillon serpigineux migrateur).

La confirmation du diagnostic repose sur la mise en évidence des microfilaires dans le sang périphérique : prélèvement diurne, leucoconcentration.

Quand elle est négative, cette recherche peut être sensibilisée par un test prudent à la diéthylcarbamazine.

L’hyperéosinophilie sanguine est pratiquement constante.

Le traitement par diéthylcarbamazine (Notezinet) est microfilaricide et macrofilarifuge ; il doit être administré à des posologies progressivement croissantes (de 1/16e de comprimé par jour à quatre comprimés par jour) pour éviter les accidents de lyse filarienne qui sont potentiellement dangereux.

On associe systématiquement des antihistaminiques ou pour certains des corticoïdes les premiers jours de traitement.

Le traitement à pleine dose dure 3 semaines et est éventuellement renouvelé deux fois dans l’année.

L’ivermectine a un intérêt majeur dans la loase en diminuant, avec un risque très faible de complications, la microfilarémie.

Mais la description récente d’encéphalopathie, et de réactions sévères dans 0,11 % des cas, nuance le rapport bénéfice/risque du médicament dans les loases avec forte microfilarémie.

* Filariose lymphatique :

Elle se contracte dans les zones intertropicales du globe et est essentiellement due à Wuchereria bancrofti.

Les insectes vecteurs sont des moustiques : Culex, Anopheles, Aedes,…

Le début de la maladie passe souvent inaperçu.

Les vers adultes vivent dans les vaisseaux lymphatiques.

L’obstruction qu’ils provoquent et les réactions immunitaires liées à la libération des microfilaires sont à l’origine de la symptomatologie.

Des poussées aiguës initiales à type d’adénites et de lymphangites aiguës rétrogrades se succèdent, laissant des séquelles importantes à type de lymphoedème, adénolymphocèle, éléphantiasis.

Le diagnostic repose avant tout sur l’anamnèse.

En effet, au stade chronique, les microfilaires sont rarement détectables.

Le sérodiagnostic pose des problèmes d’interprétation.

Les radiographies détectent parfois des filaires adultes calcifiées.

L’ivermectine (Mectizant, Stromectolt) est efficace au début, à la condition de répéter régulièrement le traitement.

Le traitement de l’éléphantiasis filarien est décevant.

* Onchocercose :

Cette filariose est surtout ophtalmologique et affecte plus de 40 millions de personnes dans le monde, principalement en Afrique.

Sa prévalence a néanmoins considérablement diminué consécutivement à la lutte antivectorielle et aux campagnes de traitement par ivermectine.

L’arrêt de l’immigration officielle explique aussi que l’onchocercose soit devenue une pathologie d’importation rare en France.

Elle est transmise par les simulies. Les manifestations dermatologiques sont très variables.

Le prurit est le signe le plus fréquent et les lésions cutanées observées en sont la conséquence.

Il évolue par poussées et provoque d’intenses lésions de grattage.

Il siège avec prédilection dans les zones à forte densité en microfilaires : lombes, fesses, cuisses.

La gale filarienne se traduit par un prurit intense diurne et nocturne.

Elle respecte les plis de flexion, ce qui la différencie de la gale sarcoptique.

Le visage peut également être atteint. Après plusieurs mois d’évolution, des placards de lichénification et des troubles de la pigmentation apparaissent, donnant un aspect pachydermique plus ou moins vitiligoïde.

L’enkystement de certaines filaires adultes est responsable de la survenue d’onchocercomes : nodules kystiques sous-cutanés, de siège variable (gril costal, ceinture, extrémité céphalique). Les manifestations oculaires font toute la gravité de la maladie : kératite, iridocyclite, choriorétinite, atrophie optique.

Le diagnostic repose sur la mise en évidence de microfilaires dans le derme par une biopsie cutanée exangue.

L’hyperéosinophilie est presque constante. Le sérodiagnostic pose le même problème d’interprétation que pour les autres filarioses.

L’ivermectine est le traitement le plus efficace à la dose unique de 200 íg/kg à jeun.

Il permet une disparition prolongée de la microfilarodermie, mais doit être renouvelé régulièrement.

3- Dracunculose :

Également appelée filaire de Médine, bien qu’il ne s’agisse pas zoologiquement d’une filariose, cette helminthiase est due à un nématode, Dracunculus medinensis.

La dracunculose sévissait dans une vaste zone subtropicale s’étendant de l’Inde à l’Afrique de l’Ouest, mais les campagnes d’éradication menées par l’OMS permettent d’envisager son éradication prochaine.

Elle est contractée lors de l’ingestion d’eau de puits non filtrée contenant le vecteur, un petit crustacé, le cyclops parasité.

Le nématode adulte migre dans le derme, habituellement au niveau des membres inférieurs.

En moyenne 12 mois après, une lésion bulleuse va apparaître, secondairement ulcérée, correspondant à l’orifice de ponte de la femelle, siégeant le plus souvent au niveau des chevilles.

Les complications sont liées à l’infection du trajet vermineux : cellulites infectieuses, lymphangites, adénites, phlégmons.

Le traitement traditionnel par extirpation lente manuelle autour d’un bâtonnet est toujours d’actualité et nécessite en général entre 1 à 8 semaines d’immobilisation.

4- Syndrome de larva migrans cutanée :

* Larva migrans cutanée ankylostomienne :

La symptomatologie est secondaire à la pénétration cutanée de larves d’ankylostomes d’animaux (chien le plus souvent).

Cette parasitose, encore appelée larbish ou creeping disease, est contractée essentiellement dans les régions tropicales humides, touche les enfants jouant dans le sable humide et les touristes marchant pieds nus et s’allongeant sur les plages.

Après pénétration des larves dans l’épiderme, la migration dessine des contours serpigineux, progressant de quelques centimètres par jour.

Le trajet est sinueux, érythématovésiculeux et prurigineux.

La topographie est fonction du point de pénétration : les zones le plus souvent atteintes sont les pieds, les fesses et le tronc.

Il s’agit d’une impasse parasitaire et la guérison spontanée est habituelle en plusieurs semaines. Une forme clinique très rare est la folliculite ankylostomienne.

Le traitement local par le tiabendazole est actuellement le traitement de référence.

Il n’existe pas de préparation commerciale.

Il faut donc réaliser une préparation magistrale.

La préparation doit comporter 10 % de thiabendazole, soit dix comprimés de 500 mg pour 50 g d’excipient gras (vaseline, crotamiton), à raison de trois à quatre applications par jour pendant 1 semaine sur la zone de migration larvaire.

Un traitement général peut être indiqué lorsque les lésions sont multiples : thiabendazole (Mintezolt) six comprimés à 500 mg/j pendant 2 jours ou albendazole (Zentelt) 400 mg/j, 3 jours de suite.

L’ivermectine est très efficace à la posologie de 200 íg/kg en une prise, mais elle n’a pas l’autorisation de mise sur le marché (AMM) dans cette indication.

* Larva currens :

La symptomatologie est due à la migration sous-cutanée de la larve strongyloïde de Strongyloides stercoralis.

C’est une manifestation du cycle d’autoréinfestation de l’anguillulose.

C’est une dermatite linéaire rampante de quelques millimètres de long, serpigineuse, érythémateuse, urticarienne.

Elle est fugace, très labile, progresse de 5 à 15 cm/h, et est préférentiellement localisée au niveau du petit bassin.

Il existe une autre manifestation cutanée de l’anguillulose, pathognomonique de l’anguillulose maligne : le purpura périombilical, semblable à une empreinte digitale.

L’anguillulose peut également être révélée par un prurit isolé, persistant.

Le diagnostic repose sur l’examen parasitologique des selles avec des méthodes spécifiques d’extraction comme la méthode de Baerman.

* Gnathostomose :

C’est une parasitose tropicale répandue dans le Sud-Est asiatique et au Mexique.

Elle se manifeste par l’association d’oedèmes souscutanés, intermittents, migrateurs, prurigineux et parfois d’une dermatite rampante, serpigineuse, fugace. Le diagnostic est difficile.

L’hyperéosinophilie est habituelle mais le sérodiagnostic est pratiqué dans de rares laboratoires.

5- Trypanosomiases :

Les trypanosomiases sont dues à des protozoaires flagellés, les trypanosomes.

* Trypanosomiases africaines :

Elles sont dues à Trypanosoma brucei gambiense (forme ouestafricaine) et T. b. rhodesiense (forme est-africaine), agents de la maladie du sommeil. Les insectes vecteurs sont des glossines (mouches Tsé-Tsé).

Seules 1 % d’entre elles sont infectées en zone d’endémie.

Elles se contaminent au cours d’un repas sanguin (chez l’homme dans la forme ouest-africaine, et chez l’animal dans la forme est-africaine).

Elles transmettent le parasite à l’homme à l’occasion d’un nouveau repas sanguin.

La phase d’invasion fait suite à la piqûre infestante : elle dure quelques jours à 1 mois et se manifeste par le chancre d’inoculation ou trypanome, siégeant en zones découvertes.

L’aspect de la lésion est variable : nodule érythémateux, placard érysipélatoïde, lésion pseudofuronculeuse, lésion ulcéronécrotique. Une adénopathie est souvent associée.

Au cours de la phase de dissémination lymphaticosanguine, les signes cutanés s’observent dans 10 à 15 % des cas, survenant 1 à 3 semaines après la piqûre infestante.

Ce sont les trypanides : macules érythémateuses, polycycliques, circinées, siégeant sur le tronc et la racine des membres.

La gravité de la maladie est liée à l’encéphalite dont le délai d’apparition est variable.

Elle doit être recherchée systématiquement par ponction lombaire avant toute décision thérapeutique.

Le diagnostic repose sur la mise en évidence des trypanosomes dans le sang (frottis sanguin, goutte épaisse), les ganglions ou la moelle osseuse.

La sérologie est spécifique avec présence d’immunoglobulines M.

La pentamidine, à la posologie de 4 mg/kg/j tous les 2 jours pendant 10 jours, est le traitement de première intention en l’absence d’invasion neuroméningée.

S’il existe le moindre signe d’atteinte méningoencéphalitique, l’éflornithine en perfusion (400 mg/kg/j) pendant 15 jours est préférable aux dérivés de l’arsenic, mais elle n’est disponible qu’auprès de l’OMS.

* Trypanosomiase américaine :

Cette anthropozoonose due à Trypanosoma cruzi est transmise par des punaises hématophages, les réduves.

Après une période d’incubation d’environ 1 semaine, les premiers symptômes sont liés à la porte d’entrée.

Le chagome d’inoculation, lorsqu’il est cutané, se présente à type de lésion pseudotumorale, inflammatoire à centre nécrotique, siégeant sur les zones découvertes avec une adénopathie satellite.

Lorsque la porte d’entrée est conjonctivale, on décrit un complexe ophtalmoganglionnaire associant un oedème palpébral unilatéral violacé indolore, parfois étendu à l’hémiface, et une adénopathie satellite préauriculaire.

Le syndrome évolue pendant 1 à 2 mois et guérit spontanément.

La phase aiguë est liée à la parasitémie et se traduit essentiellement par des signes généraux : fièvre, polyadénopathie, splénomégalie, myocardite.

Des signes cutanés appelés trypanides peuvent être observés : exanthème à type de roséole, éruption urticarienne.

Le diagnostic parasitologique est réalisé à la phase aiguë par la mise en évidence du parasite dans le sang périphérique (goutte épaisse).

On le trouve également en histologie au sein des nodules cutanés.

À la phase chronique, le diagnostic est sérologique. Le traitement repose à la phase aiguë sur le nifurtimox, 8 à 20 mg/kg/j pendant 3 mois avec trois prises quotidiennes.

Le benznidazole à la dose de 5 à 8 mg/kg/j donnerait d’aussi bons résultats.

6- Amibiase cutanée :

Elle est due à Entamoeba histolytica.

La répartition géographique comprend toute la zone intertropicale.

Elle réalise une ulcération cutanée aiguë, inflammatoire, nécrosante et rapidement extensive.

Elle siège le plus souvent au niveau anal et est satellite d’une amibiase intestinale.

Au niveau génital, elle est responsable de l’ulcère mutilant du pénis chez l’homme, urgence médicale.

Elle peut également survenir sur une cicatrice d’intervention abdominale ou de drain (amibiase colique maligne, amibiase prise pour une maladie de Crohn opérée).

Le diagnostic repose plus sur l’examen parasitologique direct d’un frottis de l’ulcère examiné dans le sérum physiologique que sur le sérodiagnostic habituellement négatif.

7- Bilharziose cutanée :

Elle est surtout répandue en Afrique mais existe aussi en Amérique du Sud et en Asie.

Les manifestations cutanées sont diverses, variant selon le stade de l’infestation.

Lors de la pénétration transépidermique du furocercaire, on peut observer une dermatite cercarienne (prurigo des nageurs).

Au cours de la migration dans l’organisme, des manifestations allergiques (prurit, urticaire) peuvent être contemporaines du syndrome toxémique.

À la phase d’état, la bilharziose cutanée tardive est une réaction granulomateuse allergique aux oeufs de bilharzies en situation cutanée ectopique.

Elle se manifeste par un prurigo régional en « éclaboussures » et des tumeurs papillomateuses périnéales.

Le diagnostic en est histologique, surtout en zone d’endémie de bilharziose où la sérologie manque de spécificité.

8- Cysticercose cutanée :

C’est le parasitisme de l’homme par la larve cysticerque du tænia du porc (Tænia solium).

La répartition géographique est intertropicale et tempérée chaude, à l’exclusion des populations ne mangeant pas de porc.

La cysticercose cutanée se manifeste par de minuscules nodules sous-cutanés sur le tronc ou les membres.

Elle peut être associée à une atteinte cérébrale à rechercher par un scanner cérébral et à une atteinte musculaire asymptomatique dépistée par la radiologie des parties molles des deux cuisses, montrant parfois les calcifications caractéristiques.

Le diagnostic de la cysticercose cutanée est histologique.

Manifestations cutanées associées aux parasitoses extracutanées :

A – TRICHINELLOSE :

L’agent responsable est un nématode : Trichinella spiralis.

L’homme est un hôte accidentel de cette zoonose.

Il se contamine après consommation de viande crue ou mal cuite contenant des larves enkystées (porc, sanglier, cheval).

Cette parasitose est redevenue une maladie d’actualité en France après plusieurs épidémies (à partir de la viande de cheval) ces 15 dernières années.

L’intensité de la symptomatologie est fonction de l’importance de l’infestation larvaire.

Les signes cutanés sont présents dans plus de 75 % des cas et apparaissent à la phase d’invasion musculaire.

L’oedème palpébral, facial et/ou conjonctival est le signe le plus fréquent (75 à 95 % des cas) et le plus caractéristique.

Il est précoce, totalement indolore, parfois violacé, pouvant faire discuter une dermatomyosite.

Une conjonctivite est souvent associée (50 %).

Une éruption cutanée, soit à type d’exanthème morbiliforme, soit à type d’urticaire, est plus rare et s’observe plus tardivement. Un prurit peut être associé.

Des hémorragies sous-unguéales en « flammèche » sont parfois observées.

Les signes extracutanés sont au premier plan, associant une diarrhée parfois sanglante, des myalgies intenses et une fièvre élevée à 39 °C.

L’enquête alimentaire a une bonne valeur d’orientation.

Deux signes biologiques sont fréquents : l’hyperéosinophilie à plus de 1 000 éléments/mm3 et l’augmentation des enzymes musculaires (créatine phosphokinase, lacticodéshydrogénase, aldolase).

Le diagnostic de certitude repose sur la sérologie et la biopsie musculaire, examen de référence, est rarement utile.

Le traitement est essentiellement symptomatique : antipyrétiques, antalgiques.

Le traitement antihelminthique n’est pas très efficace, même en cas de diagnostic précoce : thiabendazole (Mintezolt) 25 mg/kg deux fois par jour pendant 1 semaine, albendazole (Zentelt) 400 mg/j pendant 3 jours.

B – OXYUROSE :

Le symptôme majeur est un prurit anal lié à la fixation des femelles d’Enterobius vermicularis au niveau de la marge anale.

Il est surtout vespéral et peut se compliquer de lésion de grattage de la région anale.

Chez la petite fille, on peut trouver des adultes au niveau de la vulve ou du vagin, à l’origine de vulvite.

L’auto-infestation est régulière, entretenant le cycle parasitaire.

Le diagnostic repose sur la mise en évidence des oeufs après un Scotcht-test anal.

Des vers adultes sont parfois constatés sur la marge anale ou dans les selles des enfants par les parents.

Différents médicaments sont efficaces : le flubendazole (Fluvermalt) 100 mg en une prise, l’albendazole (Zentelt) 400 mg en une prise, quel que soit l’âge, le pyrantel (Combantrint) 10 mg/kg en une prise unique.

Quel que soit le traitement, il sera renouvelé 2 semaines plus tard pour éviter les réinfestations.

Il est nécessaire de prescrire un traitement de l’entourage, une désinfection de la literie et un brossage régulier des ongles.

C – LARVA MIGRANS VISCÉRALE (TOXOCAROSE) :

La pénétration accidentelle et la survie temporaire chez l’homme de larves d’helminthes parasites d’animaux (Toxocara canis pour le chien et T. catis pour le chat) est à l’origine de manifestations allergiques : syndrome de larva migrans viscérale avec manifestations allergiques (prurit, urticaire ou oedème de Quincke), signes généraux (fièvre, asthénie, amaigrissement) et hyperéosinophilie sanguine importante et persistante.

Le diagnostic est sérologique.

D – PHASE DE MIGRATION LARVAIRE DES HELMINTHIASES :

On peut également observer des manifestations allergiques (prurit, urticaire) à la phase invasive de certaines helminthiases : ascaridiose, ankylostomose, anguillulose, bilharziose, distomatose hépatique.

On en rapproche les manifestations cutanées urticariennes observées en cas de fissuration d’un kyste hydatique et au cours de l’anisakiase.

Ces manifestations font évoquer une origine parasitaire par la présence constante d’une hyperéosinophilie sanguine.

Le diagnostic peut être orienté par la positivité des sérodiagnostics parasitaires quand ils existent (bilharzioses, distomatoses, anisakiase, hydatidoses) ou par l’apparition retardée, par rapport aux manifestations de la phase invasive, des parasites dans les selles (ankylostomes, ascaris, bilharzioses, anguillule) ou dans les urines (bilharziose).

E – ÉCHINOCOCCOSE HYDATIQUE (HYDATIDOSE) :

Elle est due à la larve d’un tænia des canidés (Echinococcus granulosus) dont l’hôte habituel est un herbivore (ovins, bovins…).

En France, cette parasitose ne subsiste plus que dans de rares foyers d’élevage.

Les principaux sont en Corse, en Provence et dans les départements du Gard, des Landes et des Pyrénées-Atlantiques.

La maladie est répandue dans les régions d’élevage des pays tropicaux.

La profession de berger est particulièrement exposée. Les manifestations cutanées sont d’ordre allergique (prurit, dermographisme, urticaire aiguë, oedème de Quincke) et liées à la fissuration ou à la rupture d’un kyste hydatique le plus souvent hépatique.

Le contexte est en général évocateur : douleurs brutales de l’hypocondre droit, hyperéosinophilie, échotomographie hépatique évocatrice et positivité, constante à ce stade, du sérodiagnostic d’hydatidose.

C’est une urgence chirurgicale.

La localisation cutanée de l’hydatidose est exceptionnelle.

Elle se manifeste par des nodules ou des tuméfactions sous-cutanées non inflammatoires.

Le diagnostic est histologique.

Le traitement peut aussi bénéficier de l’albendazole pendant plusieurs semaines.

F – ÉCHINOCOCCOSE ALVÉOLAIRE :

Elle est due à la larve du tænia du renard, Echinococcus multilocularis.

En France, elle existe en Auvergne, dans le Jura et les autres régions de l’Est (Franche-Comté, Doubs, Lorraine, Ardennes, Alpes du Nord).

Les agriculteurs sont une profession exposée.

L’homme se contamine en ingérant des baies sauvages ou au contact du renard.

Les manifestations cutanées sont exceptionnelles et la conséquence de tumeurs hépatiques : ictère prurigineux de la cholestase, tuméfaction sous-cutanée de l’hypocondre droit réalisée par l’hépatomégalie dure, irrégulière et bosselée, parfois impressionnante. Les localisations cutanées, métastatiques, n’ont, à notre connaissance, pas été décrites.

G – DISTOMATOSE HÉPATIQUE :

Elle est due à Fasciola hepatica, la grande douve du foie. En France, la maladie est répandue dans les régions d’élevage : Normandie, Sud-Ouest, Centre, Vendée, Bourgogne, Ardennes et Lorraine.

L’homme se contamine en consommant crus les végétaux poussant à l’état sauvage (pissenlits, cresson) ou cultivés sans contrôle d’hygiène (mâches, salades…) dans des zones d’élevage d’ovins et bovins. Les signes dermatologiques varient selon le stade de l’infection.

Lors de la phase d’invasion, survenant 1 à 3 semaines après l’infestation, les signes sont d’ordre allergique : prurit, dermographisme, urticaire aiguë, oedème de Quincke.

À ce stade, le diagnostic est orienté par l’hyperéosinophilie et confirmé par le sérodiagnostic.

Lors de la phase d’état, survenant plus de 3 mois après l’infestation, les signes sont liés à la présence de la douve dans les voies biliaires : prurit, ictère cholestatique.

À ce stade, le diagnostic repose sur la mise en évidence des oeufs caractéristiques dans le liquide de tubage duodénal ou dans l’examen parasitologique des selles.

H – TOXOPLASMOSE :

Un exanthème maculopapuleux transitoire, évoluant en une seule poussée, est observé (dans 1 à 10% des cas) à la phase aiguë de la primo-infection par Toxoplasma gondii.

Les signes cutanés sont néanmoins rares et la toxoplasmose est en règle infraclinique ou se manifeste par des adénopathies occipitales et trapéziennes indolores, mobiles et froides, persistant parfois de façon prolongée. Le diagnostic s’appuie sur la sérologie positive.

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