Pancréatite chronique alcoolique

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Diagnostic :

A – Diagnostic étiologique :

En Europe, l’alcoolisme chronique est une cause largement dominante.

Par exemple, la fréquence des formes alcooliques de pancréatite est de 70 % en Suisse, de 80 % en Italie et de près de 90 % en France.

Cela explique en grande partie la prédominance masculine de l’affection.

Pancréatite chronique alcooliqueIl existe une relation linéaire entre la consommation d’alcool et le risque de survenue de la pancréatite chronique alcoolique, sans valeur seuil.

On considère que la durée moyenne de la prise d’alcool est de 17 à 18 ans chez les hommes, et de 10 à 13 ans chez les femmes avant que la maladie ne se manifeste cliniquement.

En cas de consommation journalière importante d’alcool, le délai d’apparition de la maladie diminue.

Une prédisposition génétique et un régime riche en lipides et protides pourraient en partie expliquer pourquoi certains alcooliques développent une pancréatite chronique .

B – Diagnostic positif :

Le diagnostic de pancréatite chronique repose sur la clinique et la radiologie.

1- Terrain :

La pancréatite chronique se développe habituellement chez un homme de 35 à 45 ans, ayant une consommation d’alcool importante depuis plus de 10 ans.

Dans la plupart des cas, il n’y a pas de contexte familial. Le rapport est de 8 à 9 hommes pour une femme.

2- Symptômes :

La douleur est un des signes cardinaux de la pancréatite chronique.

Elle peut être due à une poussée aiguë, à des douleurs chroniques sans poussée aiguë (la distinction formelle entre ces 2 entités étant parfois difficile), à une complication comme un pseudokyste, une sténose digestive, ou une compression de la voie biliaire principale.

De ce fait, le profil clinique de la douleur est varié : douleur aiguë durant quelques heures à quelques jours ; douleur post-prandiale survenant par épisodes durant quelques jours à quelques semaines ; douleur fluctuante évoluant sur plusieurs mois ; douleur sourde permanente.

La douleur pancréatique typique est une douleur épigastrique, irradiant dans le dos ou les hypocondres, pouvant être très intense, à début rapidement progressif.

Elle est immédiatement post-prandiale, et peut être déclenchée ou aggravée par la prise alimentaire ou d’alcool.

Elle peut être calmée par la position en chien de fusil.

Elle peut amener à une restriction alimentaire et donc, à un amaigrissement, parfois de plusieurs kilos.

Les formes totalement indolores de pancréatite chronique sont souvent découvertes à l’occasion d’un diabète ou d’une stéatorrhée, ou encore d’un examen radiologique mettant en évidence des calcifications pancréatiques.

3- Examens complémentaires :

Le diagnostic de pancréatite chronique nécessite l’un des trois critères suivants :

– présence de calcifications pancréatiques ;

– présence d’anomalies canalaires à type de sténoses et de dilations des canaux pancréatiques ;

– présence de lésions histologiques : fibrose irrégulière avec destruction irréversible du parenchyme pancréatique exocrine ; anomalies des canaux pancréatiques (sténoses et dilatations) qui sont souvent remplis de concrétions protéiques ou de calcifications.

Au contraire, les îlots de Langerhans sont relativement conservés.

En pratique cependant, une preuve histologique n’est que très rarement disponible.

En effet, les biopsies du pancréas ne sont pas réalisables (contrairement aux biopsies hépatiques).

On ne dispose d’une pièce anatomique que chez les malades pour lesquels une résection pancréatique a été faite.

Le diagnostic repose donc sur les 2 premiers critères radiologiques dans la majorité des cas.

Les calcifications pancréatiques peuvent être mises en évidence par :

– la radiographie d’abdomen sans préparation (ASP), en faisant des clichés centrés sur le pancréas et de trois quarts pour dégager le pancréas du rachis (il ne faut pas confondre les calcifications pancréatiques avec des calcifications vasculaires ou ganglionnaires) ;

– l’échographie (cependant, dans un tiers des cas, le pancréas n’est pas visible en échographie) ;

– le scanner sans injection avec des coupes fines est sans doute l’examen le plus sensible (surtout la dernière génération de scanner hélicoïdal) ;

– l’échoendoscopie qui est aussi très sensible mais peu spécifique (risque de diagnostic à tort ou de faux positifs).

De plus, cet examen nécessite une anesthésie générale et ne doit donc être fait qu’en cas de doute diagnostique et pour éliminer une autre pathologie (lithiase biliaire en particulier).

Les calcifications pancréatiques sont absentes au début de la maladie.

La proportion de formes avec calcifications pancréatiques augmente avec la durée du suivi.

Par rapport à la date du premier symptôme, la probabilité de survenue des calcifications pancréatiques est de 62 % à 5 ans, de 80 % à 10 ans, et de plus de 90 % à 15 ans.

Une forme non calcifiée correspond en général à un stade précoce de la maladie.

Il est donc parfois nécessaire d’attendre plusieurs années avant d’affirmer le diagnostic définitif de pancréatite chronique.

Les anomalies canalaires sont mises en évidence par une opacification des canaux pancréatiques. Celle-ci est obtenue par un cathétérisme rétrograde du canal de Wirsung par voie endoscopique [pancréatographie rétrograde endoscopique (PRE)].

Les signes canalaires (canal principal ou canaux secondaires) primaires de pancréatite chroniques sont :

– sténose irrégulière ;

– dilatations ;

– présence de lacunes intracanalaires, éventuellement calcifiées.

La réalisation d’une pancréatographie rétrograde endoscopique nécessite cependant une anesthésie générale et peut déclencher une pancréatite aiguë.

Elle n’est donc pas réalisée systématiquement, et n’est réservée qu’au doute diagnostique.

Plus récemment est apparue une nouvelle technique permettant la visualisation des canaux biliaires et pancréatiques sans opacification directe : la pancréatographie-imagerie par résonance magnétique (IRM).

La place et l’intérêt de cette technique seront sans doute importants mais ne sont pas encore clairement déterminés.

De plus, les appareils permettant de les réaliser sont peu nombreux et donc peu accessibles pour l’instant.

La hiérarchie des examens est donc la suivante en cas de suspicion diagnostique de pancréatite chronique :

– abdomen sans préparation et échographie réalisée en première intention ;

– scanner hélicoïdal en l’absence de diagnostic sur les examens précédents ou de suspicion de complication de la pancréatite chronique ;

– échoendoscopie (à ne faire qu’en cas de doute) ;

– pancréatographie rétrograde endoscopique dont les indications ont nettement diminué en raison de l’amélioration des autres techniques.

Évolution :

A – Douleurs abdominales chroniques :

Les douleurs abdominales constituent un des signes les plus importants de la maladie : elles sont présentes chez 60 à 100 % des malades.

L’évolution des douleurs en fonction du temps est difficile à analyser : en effet, les douleurs sont fonction de la prise d’alcool, de la survenue de complications, et de la progression des lésions chroniques du pancréas.

L’arrêt de la prise d’alcool est un des facteurs pouvant expliquer la sédation des douleurs.

En fait, le rôle du sevrage reste discuté.

Il a été montré que les douleurs étaient moins fréquentes chez les malades ayant arrêté de boire, mais que même chez ceux qui continuaient à prendre de l’alcool, une diminution des douleurs était possible. Après 15-20 ans d’évolution, environ 80 % des malades ne souffrent plus de leur maladie.

Au total, l’évolution naturelle des douleurs se fait vers la régression au fur et à mesure que le pancréas se calcifie ; cette évolution survient surtout chez les malades qui arrêtent de boire de l’alcool.

B – Poussées de pancréatite aiguë :

Le diagnostic de pancréatite aiguë repose sur la conjonction d’une douleur pancréatique aiguë nécessitant une hospitalisation et d’une élévation significative des enzymes pancréatiques sériques ou urinaires, le seuil retenu étant de 3 à 5 fois la limite supérieure de la normale.

Les données de l’imagerie, inconstantes, ne sont retenues que si elles sont positives.

Les pancréatites aiguës sont fréquentes, en particulier au début de l’évolution de la pancréatite chronique alcoolique.

Environ 1 malade sur 2 fait au moins une poussée aiguë. Une question importante est de savoir si la pancréatite aiguë alcoolique survient sur un pancréas sain ou s’il existe des lésions chroniques préexistantes du pancréas.

Plusieurs arguments plaident en faveur de la 2e hypothèse : la première poussée de pancréatite aiguë survient après plusieurs années d’intoxication alcoolique chronique ; la survenue d’une pancréatite aiguë après une prise occasionnelle d’alcool est exceptionnelle ; la surveillance systématique des malades au décours d’une première poussée de pancréatite aiguë permet de trouver des signes de pancréatite chronique alcoolique dans la très grande majorité des cas.

La pancréatite aiguë alcoolique doit donc être considérée comme une modalité évolutive précoce de la pancréatite chronique alcoolique : chez des malades ayant une pancréatite chronique confirmée, la première poussée de pancréatite aiguë ne risque de survenir que dans les 4 ou 5 premières années d’évolution.

C – Pseudokystes :

Un pseudokyste se définit comme une collection organisée liquidienne intra- ou extrapancréatique contenant du suc pancréatique pur ou de la nécrose liquéfiée, éventuellement associée à du sang ou du pus.

La liquéfaction du liquide permet de distinguer un pseudokyste d’un abcès pancréatique.

À l’inverse des kystes congénitaux ou des tumeurs kystiques, un pseudokyste n’a pas d’épithélium mais est limité par une paroi fibreuse et granuleuse.

Les conditions du diagnostic des pseudokystes se sont considérablement modifiées.

La fréquence de cette complication est très diversement appréciée, puisqu’on trouve dans la littérature des chiffres extrêmes de 9 et 42 %.

De solides arguments permettent de penser qu’il existe 2 types de pseudokystes au cours de la pancréatite chronique alcoolique : les pseudokystes nécrotiques (succédant le plus souvent à une poussée aiguë) et les pseudokystes par rétention (contenant du suc pancréatique pur provenant de la rupture d’un canal pancréatique sous pression).

Cependant, il ne semble pas que les pseudokystes aient des modalités évolutives très différentes en fonction de leur mode de formation.

Au décours d’une poussée de pancréatite aiguë alcoolique, un pseudokyste est noté dans 25 à 35 % des cas.

Au cours de l’histoire naturelle de la pancréatite chronique, environ 40 % des malades auront au moins un pseudokyste de plus de 2 cm de diamètre.

L’histoire naturelle des pseudokystes compliquant une pancréatite chronique alcoolique est difficile à retracer.

Les circonstances de découverte des pseudokystes sont des douleurs, des nausées ou vomissements, une masse palpable.

Parfois, on note aussi une perte de poids, un ictère, un épanchement pleural, une ascite, ou une hémorragie.

Les douleurs en particulier peuvent être dues à un pseudokyste ou à la pancréatite chronique elle-même. Un pseudokyste peut avoir 3 évolutions naturelles : régression spontanée plus ou moins complète, persistance, complications.

Au-delà d’un seuil de 4 à 6 cm, environ les trois quarts des pseudokystes nécessitent un traitement spécifique. Cependant :

– 1 pseudokyste sur 2 ne nécessite pas de traitement ;

– 1 pseudokyste sur 4 régresse totalement dans un délai moyen pouvant atteindre plusieurs mois.

Les complications principales des pseudokystes sont l’infection, l’hémorragie intrakystique, la rupture en péritoine libre, la fistulisation, la compression d’organe de voisinage.

D – Sténose de la voie biliaire principale :

Quand le suivi de la population est long (moyenne 8 à 10 ans), la fréquence de cette complication se situe à environ 25 % des cas.

La sténose du cholédoque donne le plus souvent une cholestase, qui est anictérique environ 2 fois sur 3.

En général, la cholestase est prolongée et dure plus de 4 semaines.

La sténose de la voie biliaire principale est le plus souvent due à la pancréatite chronique elle-même.

Un pseudokyste de la tête du pancréas est rarement seul responsable de la compression du cholédoque : souvent, il ne fait qu’aggraver une compression préexistante due à la pancréatite chronique.

Les 2 principaux risques d’une cholestase liée à une sténose de la voie biliaire principale sont les rares accidents infectieux biliaires, et surtout la survenue d’une cirrhose biliaire secondaire.

Les lésions histologiques du foie associées à une compression de la voie biliaire principale sont sévères chez près de la moitié des malades, avec cependant une cirrhose biliaire secondaire chez seulement 6 % d’entre eux.

L’autre cause de cholestase chez les malades ayant une pancréatite chronique est une hépatopathie alcoolique.

E – Sténose duodénale :

Cette complication est peu fréquente, mais elle peut donner une symptomatologie de sténose digestive sévère.

Il n’y a pas de tendance à la régression de la sténose, et le malade doit être opéré.

Une sténose de la voie biliaire principale est associée dans la moitié des cas à la sténose duodénale.

F – Hypertension veineuse portale :

Elle est due à une compression ou à une thrombose de la veine splénique et (ou) de la veine porte.

Ces thromboses veineuses sont le plus souvent secondaires à des poussées de pancréatite aiguë ou à des pseudokystes, en particulier de la queue du pancréas.

La fréquence de l’hypertension veineuse segmentaire est de l’ordre de 15 %.

Elle est cependant rarement responsable d’une hémorragie digestive.

Au moment de sa constitution, une thrombose veineuse portale peut se traduire par une douleur abdominale, des troubles du transit, de la fièvre, voire un syndrome septicémique traduisant une souffrance mésentérique en rapport avec l’infarctus veineux.

Cependant, dans la plupart des cas, elle est découverte à l’occasion d’un bilan d’imagerie systématique ou lors d’une intervention chirurgicale.

G – Hémorragies digestives :

L’hypertension veineuse portale est rarement une cause de saignement digestif.

Une hémorragie au niveau d’un pseudokyste est la principale cause de saignement par une érosion artérielle au contact du pseudokyste.

Parmi les autres causes de saignement, on peut trouver la rupture d’un anévrisme vrai ou d’un pseudo-anévrisme artériel, ou un ulcère duodénal.

H – Épanchement des séreuses :

Les séreuses intéressées sont la plèvre droite ou gauche, le péritoine, et plus rarement le péricarde.

Le diagnostic repose sur la présence d’une concentration élevée d’enzymes pancréatiques dans le liquide de l’épanchement, le seuil de 3 fois le taux sérique étant habituellement retenu.

Le taux d’enzymes sériques est cependant généralement élevé en raison d’une réabsorption et atteint en moyenne 6 fois la limite supérieure de la normale avec des extrêmes à 30 fois la normale.

Le taux de protéine dépasse 30 g/L dans plus de 75 % des cas.

La pathogénie des épanchements chroniques des séreuses est identique quel que soit leur siège.

Ils sont la conséquence d’une rupture d’un canal ou d’un pseudokyste pancréatique dans la grande cavité péritonéale ou dans l’arrière cavité des épiploons.

Lorsque la fistule pancréatique est postérieure, elle peut s’extérioriser dans le médiastin ou la plèvre.

Au plan clinique, 2 modes de présentation sont possibles : soit une installation rapide ou brutale (en quelques heures), soit une installation progressive (en 2 à 3 semaines).

L’épanchement peut être la première manifestation de la maladie pancréatique.

Dans la plupart des cas, il existe une fistule entre le canal pancréatique et la séreuse intéressée (la plèvre en particulier), environ 1 fois sur 2 par l’intermédiaire d’un pseudokyste.

I – Troubles de la glycorégulation :

Le diabète est une des complications majeures de la pancréatite chronique, dont la fréquence est une fonction du temps pratiquement linéaire.

Le diabète peut être une circonstance de découverte de la pancréatite chronique, notamment dans les formes indolores.

Le risque de diabète est d’environ 30 % à 5 ans après le début de la pancréatite chronique, 65 % à 10 ans, et 80 % à 15 ans.

Il existe une excellente corrélation entre l’apparition des calcifications pancréatiques, de l’insuffisance pancréatique exocrine, et du diabète.

Il n’y a aucune raison de suspecter que le diabète secondaire à la pancréatite chronique soit dépendant de l’immunité humorale ou cellulaire ou de facteur génétique comme le diabète de type I.

Le mécanisme du diabète au cours de la pancréatite chronique est une diminution des capacités de sécrétions de l’insuline.

Il existe une corrélation entre la baisse de la sécrétion d’insuline et celle des enzymes pancréatiques.

Beaucoup de facteurs peuvent influencer la glycorégulation chez des malades ayant une pancréatite chronique : réduction de l’apport calorique due à la maldigestion ou aux douleurs post-prandiales, maintien d’une consommation d’alcool, hépatopathie associée modifiant le métabolisme des hormones gastro-intestinales.

Il est communément admis que le diabète secondaire à la pancréatite chronique se complique exceptionnellement d’une acidocétose et que les accidents d’hypoglycémie sont fréquents.

La rareté des accidents d’acidocétose pourrait être due à une diminution parallèle de la sécrétion de glucagon qui joue un rôle aggravant dans l’acidocétose du diabète de type I.

Il a été longtemps rapporté que le diabète secondaire à la pancréatite chronique n’entraînait pas de complications à long terme liées à une microangiopathie.

Cependant, aucune différence de fréquence de rétinopathie n’était observée entre des malades ayant un diabète secondaire à une pancréatite chronique et de type I, appariés pour la durée du diabète.

Le pourcentage de rétinopathies atteint 50 % après une durée moyenne du diabète de 8 ans.

K – Insuffisance pancréatique exocrine :

Au cours de la pancréatite chronique alcoolique, une insuffisance pancréatique exocrine survient après une moyenne de 15 années.

Environ 80 % des malades en ont une 25 ans après le début clinique de la pancréatite.

L’insuffisance pancréatique exocrine est rarement un des signes cliniques révélant la pancréatite chronique alcoolique.

La survenue de l’insuffisance pancréatique exocrine, du diabète et des calcifications pancréatiques est une fonction du temps et est parallèle.

Au cours de la pancréatite chronique alcoolique, la sécrétion de lipase décroît plus rapidement que celle de trypsine et la stéatorrhée est un problème clinique plus important que la créatorrhée.

Une stéatorrhée et une créatorrhée ne surviennent que lorsque les débits de lipase et de trypsine sont en dessous d’un seuil de 10 % par rapport à la sécrétion normale.

Les malades ayant une stéatorrhée sont susceptibles de développer une carence en vitamines liposolubles (A, E, D, K).

L – Adénocarcinome pancréatique :

Le problème de la relation entre pancréatite chronique et adénocarcinome pancréatique est extrêmement complexe pour plusieurs raisons :

– le diagnostic de cancer sur pancréatite chronique est très difficile, notamment dans les formes de pancréatite chronique calcifiées ;

– un adénocarcinome pancréatique peut se révéler par l’intermédiaire d’une pancréatite aiguë avec une fréquence pouvant atteindre 13 % ;

– certains facteurs de risque pourraient être communs à la pancréatite chronique et à l’adénocarcinome pancréatique, notamment le tabac.

On peut cependant penser que la pancréatite chronique est un facteur de risque de cancer pancréatique mais que :

– elle explique peu de cancers pancréatiques ;

– le diagnostic de cancer pancréatique sur pancréatite chronique est tellement difficile et l’événement si rare qu’aucune consigne de surveillance particulière ne doit être donnée dans ce domaine.

M – Maladie alcoolique du foie :

La prévalence de la cirrhose alcoolique est très diversement appréciée.

En fait, quand elles sont systématiquement recherchées, les lésions histologiques du foie sont fréquentes chez les malades ayant une pancréatite chronique alcoolique (une cirrhose a été trouvée dans 25 % des cas dans une étude systématique).

Ces lésions du foie sont souvent latentes chez les malades ayant une pancréatite chronique, mais leur éventuelle progression ultérieure est une cause importante de décès.

Pronostic :

À 10 ans, la survie actuarielle est de 70 à 80 % chez les malades ayant une pancréatite chronique alcoolique.

Après 15 ans d’évolution, la surmortalité est de 20 % par rapport à une population appariée.

La pancréatite chronique alcoolique est directement responsable du décès dans moins d’un quart des cas.

Les principales causes de décès qui y sont liés sont les complications postopératoires et les complications du diabète.

Les principales causes de décès non liés à la pancréatite chronique sont dues au terrain : hépatopathies alcooliques, cancers épidémiologiquement liés à l’alcoolotabagisme (ORL, oesophage, poumon, etc.) et maladies cardiovasculaires.

La continuation de l’alcoolisme est un facteur pronostique important puisque la survie actuarielle à 20 ans est supérieure à 80 % dans le groupe des malades devenus abstinents et de 35 % chez les malades continuant de boire.

Ces données montrent bien que la pancréatite chronique alcoolique n’est pas une maladie grave en elle-même, mais par le terrain sur lequel elle survient.

Place des principaux signes et complications dans l’histoire naturelle de la pancréatite chronique alcoolique :

Les premiers signes de la maladie débutent en général après 10 à 20 ans d’intoxication alcoolique chronique : cela explique qu’après un début de l’alcoolisme vers l’âge de 20-25 ans, la maladie se manifeste cliniquement vers 35-40 ans.

Dans environ 80 % des cas, les douleurs constituent le premier signe de la maladie : dans un tiers des cas, la première manifestation est une poussée de pancréatite aiguë.

Dans les 4 ou 5 premières années d’évolution, les poussées aiguës peuvent soit survenir pour la première fois, soit récidiver chez des malades qui en ont déjà eu.

Dans cette première période de la maladie, peuvent survenir des pseudokystes (le plus souvent nécrotiques) ou une cholestase par compression de la voie biliaire principale.

Entre 5 et 10 ans après le premier symptôme, les poussées aiguës deviennent rares, mais le risque de survenue d’un pseudokyste (le plus souvent de type chronique, à liquide clair) ou d’une cholestase extrahépatique reste élevé.

Le risque d’être amené à une intervention chirurgicale reste donc réel.

En revanche, le nombre de formes non douloureuses augmente.

Au-delà de 10 ans d’évolution, le risque de survenue d’un pseudokyste et d’une cholestase extrahépatique diminue fortement en même temps que les douleurs continuent à s’estomper.

Parallèlement à cette évolution vers une affection de moins en moins douloureuse et de moins en moins compliquée, on assiste à la survenue régulière de calcifications pancréatiques et surtout, de signes d’insuffisance pancréatique endocrine (diabète) et exocrine (stéatorrhée).

C’est surtout dans cette période que se manifestent les complications hépatiques de l’alcoolisme et en particulier la cirrhose, au moins chez les malades qui continuent de boire de l’alcool.

Surveillance :

La connaissance de l’histoire naturelle de la pancréatite chronique alcoolique permet de suggérer un mode de surveillance de ces malades.

Les manifestations aiguës amènent naturellement celui-ci à consulter et à réaliser un bilan d’imagerie reposant sur un scanner qui, le plus souvent, permet un diagnostic précis.

En l’absence de signes aigus, la réalisation annuelle ou semestrielle d’une échographie, d’un dosage sanguin de la gamma GT (gammaglutamyl-transpeptidase) et des phosphatases alcalines, et une hyperglycémie provoquée per os permettent de dépister la formation d’un pseudokyste rétentionnel, la survenue d’une compression de la voie biliaire principale dont la gravité n’est pas liée aux symptômes et d’un diabète.

La survenue d’un amaigrissement chez un malade doit faire rechercher :

– une restriction alimentaire liée aux douleurs chroniques ;

– une sténose duodénale ;

– une hépatopathie alcoolique ;

– un cancer lié à l’alcoolotabagisme ;

– un diabète décompensé ;

– une stéatorrhée plus rarement seule responsable d’un amaigrissement.

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