Ostéoporoses

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Définitions :

Depuis la conférence internationale de consensus de Hong Kong en 1993 et celle d’Amsterdam en 1996, l’ostéoporose est définie comme une affection diffuse du squelette, caractérisée par une masse osseuse basse et des altérations microarchitecturales du tissu osseux, conduisant à une augmentation de la fragilité osseuse et à un risque accru de fractures.

OstéoporosesLes fractures de l’avant-bras, des vertèbres, de l’extrémité supérieure du fémur (ESF), caractéristiques de cette maladie, ne sont donc plus considérées comme une manifestation initiale mais comme une complication de cette ostéopathie.

Trois définitions complémentaires demeurent utiles pour le clinicien.

En raison des implications diagnostiques et thérapeutiques, il convient tout d’abord de distinguer les ostéoporoses primitives, plus fréquentes chez la femme en raison d’un capital osseux plus faible, de la ménopause et de la plus grande espérance de vie, et les ostéoporoses secondaires, plus fréquentes chez l’homme, qui répondent à des étiologies endocriniennes (hypercorticisme, hypogonadisme, hyperthyroïdie), métaboliques (maladies digestives et hypercalciurie), toxiques (alcool et tabac), ou génétiques (maladie de Lobstein, syndrome de Marfan).

Parmi les ostéoporoses primitives, Riggs et Melton ont proposé de distinguer l’ostéoporose postménopausique (type I) et l’ostéoporose sénile ou d’involution (type II).

– L’ostéoporose de type I, qui survient entre 50 et 70 ans, est six fois plus fréquente chez la femme que chez l’homme.

Elle résulte essentiellement de la perte osseuse postménopausique et touche avec prédilection l’os trabéculaire.

Elle est responsable de fractures de l’extrémité inférieure du radius et de tassements vertébraux qui siègent avec prédilection à la charnière dorsolombaire.

– L’ostéoporose sénile, qui survient après 70 ans, est deux fois plus fréquente chez la femme que chez l’homme.

Elle touche l’os trabéculaire et l’os cortical, et résulte de l’ostéopénie postménopausique et surtout de la perte osseuse liée au vieillissement.

Elle se manifeste surtout par des fractures de l’ESF, des fractures du pelvis, ainsi que par des tassements vertébraux partiels, progressifs, responsables d’une cyphose dorsale haute.

Les études récentes, portant sur le rôle des oestrogènes et sur l’évolution de la densité osseuse chez la femme âgée, ont montré qu’il existait en fait une continuité physiopathologique et clinique entre ces deux formes d’ostéoporose.

En raison de la forte relation existant entre la densité minérale osseuse (DMO) et le risque fracturaire, un groupe d’experts de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a proposé de définir l’ostéoporose à partir de critères densitométriques.

Le seuil choisi (T-score inférieur à -2,5), qui permet de classer comme ostéoporotiques environ 30 % des femmes ménopausées, paraît adapté, en regard des données épidémiologiques qui montrent que le risque de survenue d’une fracture ostéoporotique chez une femme de 50 ans pour le reste de sa vie est d’environ 40 %.

Cette définition densitométrique permet de reconnaître la maladie à un stade précoce, préfracturaire, et de mettre en oeuvre des mesures thérapeutiques préventives.

Mais elle ne s’applique qu’aux femmes blanches ménopausées, et non aux hommes ni aux femmes jeunes.

De plus, elle dépend étroitement des conditions de détermination du T-score et particulièrement de la population choisie comme référence.

L’harmonisation des procédures de calibration et de contrôle de qualité des appareils et la définition de critères stricts pour le choix d’une population de référence sont donc indispensables.

Enfin, on ne doit pas oublier que l’ostéoporose a longtemps été définie par l’existence de fractures spontanées.

Même si cette ancienne définition ne paraît pas adaptée à la prise en charge précoce de la maladie, on ne peut oublier qu’elle constitue le support de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) de plusieurs médicaments antiostéoporotiques.

Épidémiologie :

En raison du vieillissement progressif des populations européennes et nordaméricaines, l’incidence et la prévalence des fractures ostéoporotiques, indicateurs les plus représentatifs de la maladie, ne cessent de croître.

La distribution démographique des fractures est caractérisée par :

– une augmentation exponentielle avec l’âge ;

– une nette prépondérance féminine, mais environ 20 % des fractures vertébrales et 30 % des fractures de l’ESF surviennent chez l’homme ;

– une inégalité ethnique, la race blanche étant plus exposée que la race jaune et la race noire ;

– une disparité géographique au sein même de l’Europe, les pays du Nord étant plus exposés.

Parmi 100 femmes françaises arrivant à la ménopause, 40 présentent au moins une fracture non traumatique avant la fin de leur vie.

Si les fractures de l’avant-bras, les tassements vertébraux et les fractures de l’ESF sont les complications les plus fréquentes, il paraît également légitime de s’intéresser aux fractures costales, aux fractures du col de l’humérus, et aux fractures bimalléolaires du sujet âgé, favorisées par l’existence d’une ostéopénie.

Les conséquences financières sont majeures : en France, le coût annuel de l’ostéoporose est évalué à 7 milliards de francs ; aux États-Unis, il a été estimé à 10 milliards de dollars en 1988.

A – Fractures de l’extrémité supérieure du fémur :

Les fractures de l’ESF représentent un problème majeur en termes de santé publique : en 1990, on estimait à 1,7 million le nombre mondial de ces fractures.

La projection de ces chiffres en 2025 permet d’estimer à 1,1 million leur nombre chez les hommes et à 2,8 millions chez les femmes.

Cette tendance à l’augmentation des fractures n’est expliquée qu’en partie par le vieillissement de la population.

Dans la plupart des études, elle persiste partiellement après ajustement en fonction de l’âge : ainsi, en Finlande, l’incidence annuelle ajustée pour l’âge s’est accrue, entre 1970 et 1993, de 108 à 214 chez les hommes et de 275 à 420 chez les femmes.

L’incidence des fractures de l’ESF est trois fois plus élevée chez les femmes que chez les hommes en France, mais le sex-ratio (femme/homme), toujours supérieur à 1, varie beaucoup d’un pays à l’autre : 2,9 en Espagne et au Portugal ; 2,3 en Grèce ; 1,4 seulement en Turquie.

Des problèmes d’ordre méthodologique expliquent en partie ces différences géographiques.

Elles n’en demeurent pas moins intrigantes et constituent un axe de recherche susceptible de déboucher sur des progrès physiopathologiques et thérapeutiques.

Le risque de survenue d’une fracture de l’ESF est estimé à 17 % pour une femme de 50 ans (pendant le reste de sa vie) et à 5 % pour les hommes du même âge.

L’évolution des fractures de l’ESF est redoutable : réduction d’autonomie, séjour en institution, décès d’environ 25 %des patients dans les 12 mois suivant la fracture.

En raison des conditions pathologiques associées à la survenue d’une fracture de l’ESF chez l’homme, la morbidité, et surtout la mortalité sont plus élevées dans le sexe masculin : le taux de mortalité du premier mois est estimé dans une étude récente à 14,1 %pour les hommes et 5,4 % pour les femmes.

De même, le taux de décès au cours de l’hospitalisation est de 10,5 %pour les hommes contre 5 %pour les femmes.

En France, on dénombrait en 1990 48 000 fractures de l’ESF.

La projection de ces données en 2050 laisse prévoir la survenue d’environ 150 000 fractures, si l’incidence actuelle perdure.

L’âge moyen de survenue est de 81,3 ans pour les femmes et de 73,3 ans pour les hommes et correspond, dans les deux sexes, à l’espérance de vie moyenne.

Le coût direct des ces fractures, en incluant les frais d’hospitalisation pour la chirurgie et les frais de rééducation, est actuellement estimé à 4 milliards de francs par an pour les patients des deux sexes de plus de 70 ans.

B – Fractures vertébrales :

L’incidence des fractures vertébrales liées à l’ostéoporose n’est pas facile à établir en raison :

– du caractère indolore de la moitié d’entre elles ;

– de la difficulté à affirmer, devant une déformation vertébrale radiographique, qu’il s’agit bien d’une fracture ;

– du caractère traumatique de certaines fractures, en particulier chez l’homme jeune.

Une enquête radiographique sur l’incidence des ces fractures, effectuée sur l’ensemble de la population blanche de la ville de Rochester (États-Unis) entre 1985 et 1989, a évalué l’incidence annuelle à 145 pour 100 000 femmes et à 73 pour 100 000 hommes.

En utilisant le fichier du Medicare (États- Unis, 1986-1989) réunissant 151 986 patients hospitalisés pour une fracture vertébrale, une autre enquête apporte une incidence de 171 hospitalisations pour 100 000 femmes et 99 pour 100 000 hommes de race blanche.

Ces deux études, non exemptes de limites méthodologiques (représentativité des populations étudiées), montrent que l’incidence des fractures vertébrales est plus élevée chez les femmes et augmente de façon exponentielle avec l’âge.

Ce sex-ratio (femme/homme), proche de 2, n’est pas retrouvé dans les études les plus récentes portant sur la prévalence radiographique de ces fractures.

Ainsi, pour Davies et al, la prévalence des déformations vertébrales dans une cohorte de 529 hommes du Nebraska est chiffrée à 29 %à 50 ans, à 35 % à 60 ans, et à 40 % après 80 ans, contre respectivement 11 %, 17 % et 45 % pour les femmes.

Une étude européenne récente montre que la prévalence de ces fractures est identique dans les deux sexes mais varie considérablement en fonction :

– de la méthode radiographique passant de 12,2 (méthode de Mc Closkey) à 20 % (méthode d’Eastell) ;

– de la région géographique (Scandinavie 24,2 %, Europe de l’Ouest 20,6 %, Europe de l’Est 18 %, Europe du Sud 21,6 %) ;

– de l’âge, passant chez les hommes de 16,5 entre 50 et 54 ans à 29,1 %entre 75 et 79 ans. Enfin, et c’est un fait capital, la prévalence de ces fractures est plus élevée avant 65 ans chez les hommes (18,7 %) que chez les femmes (14,3 %).

On estime, par approximation à partir des données anglo-saxonnes, que 50 000 à 70 000 tassements vertébraux surviennent chaque année en France.

Le risque de survenue d’une fracture vertébrale est actuellement estimé à 16 %pour une femme ménopausée de plus de 50 ans durant le reste de sa vie, et l’âge de survenue du premier tassement vertébral est en moyenne de 67 ans.

C – Autres fractures :

Les fractures de l’extrémité inférieure de l’avant-bras prédominent fortement chez la femme et seulement 10 à 15 % de ces fractures surviennent chez l’homme.

L’incidence annuelle de ces fractures a été estimée à 42/10 000 chez la femme et le risque de survenue de cette fracture est actuellement évalué à 16 %pour une femme ménopausée de plus de 50 ans, durant le reste de sa vie.

Si l’évolution de cette fracture est habituellement favorable (hormis le risque d’algodystrophie), elle représente indiscutablement un facteur de risque important pour la survenue ultérieure d’une fracture de l’ESF (risque multiplié par deux), ou de tassements vertébraux (risque multiplié par trois), et ce dans les deux sexes.

Les travaux les plus récents ont montré que d’autres fractures ostéoporotiques étaient fréquentes, en particulier chez l’homme : fractures de côtes, fractures de l’humérus proximal et fractures de la cheville.

Une étude australienne récente, portant sur une cohorte de 820 hommes de plus de 60 ans, a montré que l’incidence de ces fractures, chiffrée respectivement à 42, 21 et 21 (pour 10 000 personnes-années ou 104 PA), était proche de l’incidence des fractures vertébrales (42/104 PA) et de l’ESF (41/104 PA).

Ostéoporoses primitives de la femme :

A – Physiopathologie :

Les pièces osseuses qui composent le squelette comportent du tissu osseux cortical (80 % de la masse osseuse globale) et du tissu osseux trabéculaire, formé de plaques reliées par des piliers.

La proportion d’os trabéculaire dépend du site anatomique : 100 % au centre du corps vertébral, 95 % au centre du calcanéus, 65 % dans le radius ultradistal, 50 % dans la région intertrochantérienne, 40 %dans la région transcervicale fémorale, 25 %pour une vertèbre entière, et 5 % pour le radius proximal.

La compétence biomécanique, c’est-à-dire la capacité d’une pièce squelettique à résister à des contraintes, dépend de la proportion d’os cortical, de la masse osseuse, de son anatomie (macroarchitecture osseuse), mais aussi de la microarchitecture osseuse trabéculaire, du degré de minéralisation et de la qualité du collagène.

La survenue d’une fracture ostéoporotique résulte de la défaillance de ces facteurs osseux intrinsèques et de l’augmentation du risque de chutes et de traumatismes, en particulier chez le sujet âgé après 70 ans.

1- Masse osseuse :

La définition de la masse osseuse est histologique et correspond à la quantité de tissu osseux par unité de volume, déterminée par analyse histomorphométrique d’une biopsie osseuse transiliaque.

En pratique clinique, la masse osseuse est évaluée en routine en mesurant la densité osseuse surfacique, à l’aide de l’absorptiométrie biphotonique à rayons X.

Des études longitudinales réunissant plus de 10 000 patientes ont montré que le risque de fractures augmentait au fur et à mesure de la diminution de la DMO et on admet actuellement que toute diminution d’un écart type de la DMO multiplie par deux le risque de fracture.

La masse osseuse disponible à un moment donné chez un adulte âgé dépend d’une part du capital osseux acquis au cours de la croissance, et d’autre part de l’intensité de la perte osseuse survenue à partir de 40 ans.

* Capital osseux :

Le capital osseux maximal est atteint, dans les deux sexes, vers la vingtième année.

Une première phase de croissance osseuse rapide s’écoule de la naissance à 4 ans, tandis qu’une seconde phase correspond à la puberté.

Cette accélération de la croissance osseuse au cours de l’adolescence débute et finit 2 ans environ plus tôt chez la fille que chez le garçon.

Chez la fille, 40 %environ du contenu minéral osseux (CMO) lombaire à l’âge adulte sont acquis au cours des 4 années encadrant la ménarche, et 86 %environ duCMO adulte sont déjà acquis 2 ans après la ménarche.

L’acquisition du pic de masse osseuse est conditionnée par le terrain génétique, l’activité physique, et les facteurs nutritionnels.

Ce sont les études comparant la densité osseuse de jumeaux qui apportent les arguments les plus convaincants en faveur du contrôle génétique de la masse osseuse.

Il existe une corrélation entre la DMO des deux jumeaux, plus forte pour les jumeaux monozygotes que pour les jumeaux dizygotes.

Cette « héritabilité » de la masse osseuse, observée sur tous les sites de mesure, plaide en faveur d’un contrôle génétique de l’acquisition du capital osseux lors de la croissance.

En raison du lien observé récemment entre le polymorphisme génique du récepteur à la vitamine D (VDR) et la DMO, on estime actuellement que l’héritabilité de la masse osseuse est contrôlée par un ensemble de gènes qui interagissent avec leVDR.

Les facteurs génétiques expliquent 70 à 80 % de la variance de la masse osseuse, et le polymorphisme du VDR serait à lui seul responsable d’environ 20 % de cette variance.

Plaident également en faveur du contrôle génétique de la masse osseuse les différences interethniques, et particulièrement le fait que la densité osseuse est plus élevée d’environ 6 % chez les sujets noirs, ainsi que les études familiales révélant que les enfants de sujets ostéoporotiques ont une masse osseuse plus basse que les sujets contrôles, tant au rachis lombaire qu’au col fémoral.

Interfaces entre le terrain génétique et la nutrition, la taille, le poids et la masse maigre sont des déterminants du capital osseux chez les sujets jeunes.

Le gain rapide de masse osseuse qui survient au moment de la puberté est ainsi bien corrélé au gain de taille et de poids.

Parmi tous les facteurs d’environnement, l’activité physique est celui dont le lien avec la masse osseuse semble le plus fort, en particulier pour les exercices réalisés en charge, à une intensité compatible avec des cycles réguliers chez l’adolescente et la femme jeune sportive.

Enfin, le rôle d’apports calciques suffisants, en particulier d’alimentaires lactés, doit être souligné en raison des résultats positifs (gain de masse osseuse) apportés par plusieurs études réalisées chez des enfants, des adolescents et des adultes jeunes.

Toutefois, l’effet bénéfique, surtout sensible au cours de la phase de croissance rapide prépubertaire, est plus important lorsque la ration calcique spontanée est basse.

* Perte osseuse :

C’est à partir de 40 ans environ que débute dans les deux sexes une perte osseuse lente, linéaire, de l’ordre de 3 % par décade, en secteur trabéculaire.

Chez la femme, immédiatement après la ménopause, la perte osseuse s’accélère et atteint en moyenne 2 % par an pendant une dizaine d’années.

Chez environ 25 % des femmes ménopausées, on observe une perte osseuse plus rapide, qui dépasse 2,5 % par an et peut atteindre le rythme annuel de 5 à 8 %.

Après 60 ans, la perte osseuse se poursuit parallèlement dans les deux sexes, plus lentement, puis s’accélère de nouveau après 75 ans, en particulier sur le site fémoral où elle atteint 0,9 % par an.

Entre 20 et 80 ans, la femme perd environ 40 % de sa masse osseuse spongieuse, alors que l’homme en perd 25 % durant la même période.

Cette perte osseuse répond à deux déterminants physiopathogéniques essentiels.

+ Ménopause :

La perte osseuse postménopausique, franche en secteur trabéculaire, est liée à la carence oestrogénique qui provoque une augmentation du remodelage osseux : le nombre d’unités de remodelage activées (BRU) augmente, de même que l’activité de chacune de ces unités.

La formation osseuse est insuffisante au sein de chaque BRU pour combler l’excès de résorption.

Les travées osseuses, plus minces, sont perforées puis fragmentées.

Une détérioration progressive de l’architecture tridimensionnelle du réseau trabéculaire apparaît, précipitant la survenue des premières fractures ostéoporotiques.

L’hyperactivité des ostéoclastes lors de la carence oestrogénique pourrait être liée à une augmentation de la production locale de certaines cytokines (interleukine [IL]1, IL6, tumor necrosis factor [TNF]) par les ostéoblastes, les cellules stromales et les cellules de la lignée myélomonocytaire.

La carence en oestrogènes provoquerait de plus une diminution de la production du transforming growth factors (TGF)-bêta, potentiellement responsable d’une augmentation de l’activité ou du recrutement des ostéoclastes.

+ Hyperparathyroïdie secondaire :

Le vieillissement du squelette s’accompagne d’une augmentation de la sécrétion d’hormone parathyroïdienne.

Elle est la conséquence de l’hypocalcémie induite chez le sujet âgé par la carence d’apport calcique alimentaire et l’insuffisance vitaminique D (qui résulte d’un défaut d’exposition solaire et de l’insuffisance rénale).

La stimulation de la résorption ostéoclastique par l’hormone parathyroïdienne explique l’accélération de la perte osseuse trabéculaire et corticale chez le sujet âgé, et se traduit par l’élévation des paramètres biochimiques du remodelage osseux.

Il est démontré que la supplémentation en calcium et en vitamine D des sujets âgés et carencés corrige ces anomalies biologiques, freine la perte osseuse et réduit l’incidence des fractures ostéoporotiques.

2- Qualité osseuse :

La masse osseuse n’est pas le seul déterminant du risque fracturaire.

À densité minérale égale, le risque fracturaire augmente avec l’âge, tout particulièrement après 60 ans.

Il existe des chevauchements dans les valeurs de densité osseuse entre les patientes ostéoporotiques fracturées et les patientes indemnes.

Enfin, l’existence d’une fracture préalable augmente le risque fracturaire, indépendamment du niveau de la densité osseuse.

Il est maintenant acquis que les facteurs osseux qualitatifs et notamment la microarchitecture osseuse trabéculaire jouent un rôle important dans la survenue des fractures ostéoporotiques.

Ainsi, in vitro, la résistance d’une vertèbre à la compression dépend de la qualité architecturale du réseau trabéculaire.

Des études histomorphométriques, initiées par Parfitt, montrent que les travées osseuses, certes amincies, sont surtout perforées et fragmentées.

Réduites en nombre, elles perdent progressivement leurs connections.

Les méthodes histologiques modernes, faisant appel aux analyses d’images, sont maintenant capables de quantifier ces désordres de la microarchitecture en mesurant l’augmentation du volume des espaces médullaires et la perte des anastomoses trabéculaires.

3- Anatomie osseuse :

La longueur de l’axe du col fémoral est un facteur prédictif du risque de survenue d’une fracture de l’ESF, et l’on admet actuellement que toute augmentation d’un écart type de la longueur du col fémoral multiplie environ par deux le risque de fracture, après ajustement pour la densité osseuse.

La diminution de l’épaisseur corticale du col fémoral, l’augmentation de la distance intertrochantérienne et l’altération des travées de l’arc ogival supérieur seraient également associées au risque de fractures.

4- Facteurs extraosseux :

Plus de 30 %des patients âgés d’au moins 75 ans chutent chaque année.

Dans 6 % des cas, cette chute provoque une fracture et dans 1 % des cas il s’agit d’une fracture de l’ESF.

Ces chutes intéressent aussi bien les personnes âgées en bonne santé vivant à leur domicile (chutes à l’extérieur le plus souvent) que les patients institutionnalisés.

Plusieurs études prospectives récentes ont démontré qu’après ajustement pour la densité osseuse, les antécédents de chutes, le faible poids, la diminution de la force musculaire quadricipitale, le degré d’instabilité, une faible vitesse de marche et la diminution de l’acuité visuelle multipliaient le risque de fractures.

L’existence d’un déficit musculaire ou d’un trouble de l’équilibre objectif, les maladies neurologiques, les déficits neurosensoriels, les prises médicamenteuses sédatives ou hypotensives, mais aussi l’environnement matériel du patient (responsable à lui seul d’environ 30 % environ des chutes) doivent être pris en compte dans une stratégie de prévention globale chez les patients âgés, audelà de 70 ans.

B – Diagnostic :

1- Circonstances :

Le diagnostic d’ostéoporose doit être précoce, avant la survenue des fractures.

Il faut donc savoir l’évoquer dans de multiples circonstances.

La connaissance d’un facteur de risque majeur d’ostéoporose chez un patient est une circonstance suffisante pour évoquer le diagnostic : ménopause, en particulier précoce ou chirurgicale, corticothérapie prolongée, endocrinopathie, intoxication alcoolique ou tabagique, âge supérieur à 70 ans, densité osseuse basse.

L’existence de douleurs vertébrales, d’une déformation rachidienne (cyphose dorsale), ou d’une réduction de la taille chez une patiente à risque (par exemple une femme ménopausée), sont également des circonstances qui doivent faire suspecter une ostéoporose.

La douleur vertébrale est d’autant plus évocatrice d’un tassement vertébral qu’elle est brutale, intense, obligeant à l’alitement immédiat, mais de rythme mécanique, immédiatement réveillée ou exacerbée par les changements de position.

Enfin, toute fracture non traumatique, quel qu’en soit le site, doit conduire à rechercher cette ostéopathie fragilisante.

Rappelons en particulier la valeur prédictive de la fracture de l’avant-bras sur le risque ultérieur de fracture vertébrale et de fracture de l’ESF.

En pratique quotidienne, les deux situations qui déclenchent le plus souvent les investigations biologiques et radiographiques sont d’une part la découverte d’une franche réduction de la densité osseuse (ostéopénie), et d’autre part la survenue d’un tassement vertébral spontané.

2- Moyens :

Les moyens cliniques à mettre en oeuvre dépendent du contexte clinique, c’est-à-dire des circonstances du diagnostic, de l’âge et du sexe.

L’enquête paraclinique sera d’autant plus approfondie que le patient est jeune, qu’il s’agit d’un homme ou d’une femme non ménopausée, que les fractures sont multiples, répétées ou de siège inhabituel.

* Clinique :

L’interrogatoire précise les antécédents personnels et familiaux, recherche l’existence de facteurs de risque pour une ostéoporose primitive ou secondaire, et analyse les conditions de survenue de la fracture, les caractéristiques des douleurs et l’existence de signes généraux ou viscéraux.

L’examen clinique, toujours complet, vérifie l’absence de pathologies tumorales, recherche l’existence de signes en faveur d’une ostéoporose secondaire (endocrinopathie, éthylisme chronique, maladie génétique…), et précise le retentissement fonctionnel de la fracture.

La présence de signes neurologiques (compression médullaire à la charnière dorsolombaire, syndrome de la queue de cheval, radiculalgie déficitaire) oblige à rechercher attentivement un tassement vertébral néoplasique, le plus souvent en cause.

Les tassements vertébraux peuvent toutefois être exceptionnellement responsables de signes neurologiques.

* Bilan biologique :

+ Examens biologiques indispensables :

Ils comportent la vitesse de sédimentation (VS) ou la C reactive protein (CRP), l’hémogramme, l’électrophorèse des protéines sériques, la créatininémie, la calcémie, la phosphorémie, les phosphatases alcalines.

Ces examens biologiques sont habituellement normaux au cours de l’ostéoporose primitive, hormis une habituelle mais transitoire élévation des phosphatases alcalines au décours immédiat d’un tassement vertébral.

L’objectif assigné à ces examens est donc de rechercher les autres ostéopathies fracturaires pouvant mimer au départ une ostéoporose, et en particulier un myélome, une hyperparathyroïdie primitive et une ostéomalacie.

Lorsqu’il existe un contexte clinique (sexe masculin par exemple) ou biologique (franche hypocalcémie par exemple) faisant craindre une ostéoporose secondaire ou une ostéomalacie, le bilan biologique comportera en plus la calciurie et la créatininurie des 24 heures, la parathormone (PTH) intacte, la 25(OH) vitamine D, les enzymes hépatiques et certains dosages hormonaux : testostérone, luteinizing hormone (LH), cortisolurie des 24 heures, T4 libre, thyroid stimulating hormone (TSH).

+ Dosage des marqueurs biochimiques du remodelage osseux :

Il ne fait pas l’objet d’un consensus.

La période qui suit immédiatement la ménopause chez la femme est marquée par une accélération brutale de la résorption dont la conséquence est une perte osseuse rapide, en secteur trabéculaire.

C’est dire l’intérêt potentiel de marqueurs biochimiques évaluant les niveaux respectifs de la formation et de la résorption osseuse.

L’ostéocalcine (protéine non collagénique spécifique de l’os), l’isoenzyme osseuse de la phosphatase alcaline et le propeptide N-terminal du collagène de type I (dont le taux reflète la synthèse du collagène osseux) sont les marqueurs les plus performants pour apprécier la formation osseuse.

La pyridinoline, la déoxypyridinoline et leurs dérivés peptidiques (C-télopeptide du collagène ou CTX, et N-télopeptide du collagène ou NTX), excrétés dans les urines lors de la dégradation de la matrice osseuse, sont des marqueurs très sensibles de la résorption.

Plusieurs études prospectives ont montré qu’une forte élévation de ces marqueurs au moment de la ménopause était associée à une perte osseuse rapide, qu’une élévation anormale des marqueurs de la résorption chez les femmes de plus 75 ans doublait le risque de survenue ultérieure d’une fracture de l’ESF indépendamment de la densité osseuse fémorale, et enfin que la réduction marquée du taux des marqueurs sous traitement par bisphosphonates ou oestrogènes était prédictive du gain de densité osseuse obtenu grâce au traitement.

En revanche, il n’est pas établi que ces résultats concernant des cohortes de patientes s’appliquent bien à l’échelon individuel.

La variabilité du remodelage osseux et de la vitesse de perte osseuse d’une patiente à l’autre d’une part, d’une année à l’autre chez une même patiente d’autre part, rendent indispensable la réalisation d’études complémentaires pour évaluer le risque de se tromper par excès ou par défaut lorsque l’on essaie, à titre individuel, de prédire le taux de la perte osseuse ou la réponse thérapeutique.

* Radiographies :

Elles sont indispensables pour rechercher devant une ostéopénie franche des fractures vertébrales asymptomatiques dont l’existence modifie le pronostic, pour rattacher une douleur osseuse pelvienne, rachidienne ou costale à une fracture, et pour affirmer le caractère bénin d’un tassement vertébral.

Les radiographies les plus utiles sont le cliché de bassin de face, les clichés de la colonne vertébrale lombaire, dorsale et de la charnière dorsolombaire (siège fréquent des tassements), de face et de profil, en position couchée.

La suspicion d’un myélome conduit parfois à pratiquer des clichés du crâne, de face et de profil.

L’analyse de ces radiographies est susceptible de montrer :

– un aspect strié et peigné dans le sens vertical des corps vertébraux, puis l’effacement progressif du tissu trabéculaire (aspect déshabité du corps vertébral) et l’amincissement des corticales ;

– des déformations vertébrales : tassement cunéiforme antérieur, vertèbre biconcave, vertèbre en « galette », siégeant typiquement à la charnière dorsolombaire et au rachis lombaire ;

– des signes témoignant de la bénignité des fractures : siège en dessous de T4, conservation des corticales parfois fracturées mais jamais effacées, intégrité du mur postérieur, normalité de l’os trabéculaire sans ostéolyse ni ostéocondensation, vide intrasomatique.

Lorsqu’il existe un doute sur la nature bénigne ou maligne de la fracture costale, vertébrale ou pelvienne, le clinicien pourra s’aider, en fonction du contexte clinique, de clichés standards répétés, de la scintigraphie osseuse, et exceptionnellement de la tomodensitométrie, de l’imagerie par résonance magnétique (IRM), d’une biopsie radioguidée ou chirurgicale du foyer fracturaire.

* Densitométrie osseuse :

Parmi les techniques utilisées pour mesurer la densité osseuse, l’absorptiométrie biphotonique à rayons X est la plus utilisée. Peu irradiante, reproductible, rapide, elle permet de mesurer la densité osseuse sur les sites habituels des fractures : avant-bras, rachis, ESF.

Son utilisation chez la femme après la ménopause a été validée par de nombreuses études longitudinales qui montrent que le risque de fractures double pour chaque diminution de la densité osseuse d’une déviation standard, que l’ensemble des fractures est prédit de la même manière, quel que soit le site de mesure, mais qu’il existe cependant une supériorité de la mesure fémorale pour prédire le risque de fractures de l’ESF.

Les résultats peuvent être exprimés en valeur absolue, c’est-à-dire en g/cm2, mais le plus souvent on compare la mesure avec des valeurs de référence issues d’une population normale.

Deux modes de présentation des résultats sont utilisés : le Z-score mesure l’écart exprimé en déviation standard entre la valeur du patient et la valeur moyenne des sujets normaux de même âge et de même sexe, le T-score mesure l’écart exprimé en déviation standard entre la valeur du patient et la valeur moyenne des adultes jeunes du même sexe.

C’est ce dernier indice, indépendant de l’âge, qui a été choisi pour définir l’ostéoporose du point de vue densitométrique chez la femme ménopausée.

+ Indications de la densitométrie :

– Dépistage à la ménopause des femmes à risque, pour inciter à la mise en route d’un traitement hormonal substitutif.

Il convient de rappeler ici que, chez la femme ménopausée, cinq facteurs de risque sont considérés comme majeurs par la National Osteoporosis Foundation : antécédent familial d’ostéoporose, antécédent personnel de fracture non traumatique après 40 ans, poids inférieur à 58 kg, tabagisme avéré, densité osseuse basse.

– Dépistage de l’ostéoporose, dès lors qu’il existe des facteurs de risque majeurs : femme de plus de 65 ans, ménopause non traitée, endocrinopathie (hypercorticisme, hyperparathyroïdie, hyperthyroïdie), alcoolisme.

– Confirmation du caractère ostéoporotique d’une fracture et en particulier à l’occasion d’une fracture de l’avant-bras ou d’un premier tassement vertébral.

– Évaluation de l’efficacité des traitements : elle reste une indication discutée, compte tenu du faible gain de densité osseuse observé avec les thérapeutiques usuelles (bisphosphonates et oestrogènes).

Un intervalle minimal de 2 ans entre les mesures est en tout cas indispensable.

Seule la diminution de la densité osseuse, sous traitement, peut être considérée comme un échec thérapeutique.

+ Recommandations pratiques :

– En raison de l’hétérogénéité de la perte osseuse en fonction des sites, il est raisonnable de coupler la mesure lombaire antéropostérieure et la mesure sur l’ESF pour les évaluations réalisées avant 65 ans.

– Chez le sujet âgé, la mesure sur l’ESF est suffisante, d’autant plus que la mesure lombaire est d’interprétation difficile en raison de tassements vertébraux, d’une arthrose et de calcifications aortiques.

– La mesure de densité osseuse doit être prescrite en fonction du contexte clinique, en s’assurant en particulier que les résultats auront des conséquences en termes de diagnostic et surtout de traitement.

– La mesure de densité osseuse doit être impérativement analysée et interprétée en fonction du contexte clinique, biologique et radiographique.

Si les critères de l’OMS sont utiles pour prendre des décisions de traitement, ils ne s’appliquent que dans le cas d’une femme blanche ménopausée et ne peuvent être totalement assimilés à des seuils thérapeutiques.

– Les valeurs absolues de densité osseuse, exprimées en g/cm2, diffèrent selon les constructeurs.

Les valeurs relatives (T-score) varient en fonction de la population de référence.

La comparaison de la densité osseuse chez un même individu, à des moments différents, n’est donc possible que si la mesure est réalisée sur le même appareil.

– En raison de la reproductibilité de la mesure, les variations de densité osseuse observées chez un même individu ne sont significatives que si elles dépassent 3 % sur le rachis et 5 % sur l’ESF.

* Autres méthodes de densitométrie osseuse :

L’absorptiométrie monophotonique à rayons X est une méthode simple, peu onéreuse, reproductible, mais réservée à l’étude des os superficiels (radius, calcanéus).

La tomodensitométrie quantitative (quantitative computed tomography [QCT]) permet de mesurer une DMO vraie (par unité de volume) et une étude séparée du tissu osseux trabéculaire et cortical de la vertèbre, mais ses performances, en termes de reproductibilité et d’irradiation, sont inférieures à celles de l’absorptiométrie.

De plus, elle ne permet pas actuellement d’étudier le fémur.

L’exploration par les ultrasons, réalisée sur les os superficiels et en particulier au calcanéus, mesure deux paramètres : l’atténuation et la vitesse du faisceau.

S’il n’est pas démontré actuellement que cette technique apprécie réellement la qualité osseuse, plusieurs études prospectives montrent que les valeurs ultrasoniques sont plus basses chez les patientes ostéoporotiques.

La capacité de cette technique à prédire la survenue de fractures de l’ESF semble comparable à celle de la densitométrie.

En revanche, le suivi sous traitement est pour le moment impossible en raison de la faible variation biologique des paramètres et des coefficients de reproductibilité des mesures.

* Histomorphométrie osseuse :

Elle est réalisée à partir d’une biopsie transiliaque après double marquage à la tétracycline.

L’échantillon est fixé dans l’alcool à 80°, puis inclus non décalcifié dans une résine méthylmétacrylique, avant d’être coloré et enfin découpé au microtome.

Couplée à l’analyse d’images, cette technique histologique est utile pour :

– rechercher des lésions tumorales intramédullaires et en particulier des métastases osseuses ou une hémopathie (myélome) ;

– confirmer, dans un contexte clinique ou biologique évocateur, l’existence d’un trouble de la minéralisation focale ou d’une ostéomalacie ;

– préciser les niveaux respectifs de la formation et de la résorption osseuses, information qui toutefois n’a pas pour le moment de conséquences thérapeutiques ;

– évaluer la microarchitecture du tissu osseux trabéculaire en mesurant le volume trabéculaire osseux, l’épaisseur des corticales interne et externe, l’épaisseur, le nombre et l’espacement des travées, mais surtout des indices de connectivité trabéculaire : squelettisation du réseau trabéculaire, index de l’interconnectivité, star volume des espaces médullaires, trabecular bone pattern factor.

+ Indications :

Dans la pratique clinique courante, les indications de l’histomorphométrie se limitent à la recherche d’une ostéopathie tumorale ou d’une ostéomalacie.

Au cours des essais thérapeutiques dans l’ostéoporose, c’est l’examen de référence pour vérifier l’absence de troubles de la minéralisation osseuse et l’amélioration de la qualité osseuse sous traitement.

Les informations microarchitecturales apportées par l’histomorphométrie sont en cours d’évaluation pour préciser leur contribution dans l’évaluation du risque fracturaire, en particulier au cours de l’ostéoporose cortisonique et chez l’homme.

* Autres méthodes :

Les méthodes non invasives d’étude de la qualité osseuse, telles que l’IRM ou l’analyse de texture à partir d’images radiographiques standards ou tomodensitométriques, sont en cours de développement.

3- Stratégie diagnostique :

La démarche diagnostique indispensable devant une fracture spontanée comporte schématiquement quatre étapes importantes.

* Éliminer une ostéopathie maligne :

L’absence d’antécédents de cancer ou d’hémopathie, le caractère mécanique des douleurs rachidiennes, la conservation de l’état général, la normalité de l’examen clinique complet et des paramètres biologiques, l’absence d’image radiographique lytique ou condensante suspecte, de tassement vertébral situé au-dessus de T4, de recul du mur postérieur, sont autant d’arguments qui permettent d’éliminer un cancer osseux métastatique ou un myélome.

* Éliminer une ostéodystrophie rénale, une hyperparathyroïdie primitive, une ostéomalacie :

L’ostéodystrophie rénale est rapidement éliminée par le dosage de la créatinine plasmatique, de l’urée, de la calcémie et de la PTH circulante (PTH intacte 1-84).

Le diagnostic d’hyperparathyroïdie primitive repose sur le dosage couplé de la calcémie et de la PTH.

Dans les formes débutantes, l’hypercalcémie est souvent très modérée (calcémie à la limite supérieure de la normale entre 2,55 et 2,70 mmol/L).

L’élévation anormale de la PTH permet de confirmer le diagnostic.

Le diagnostic d’ostéomalacie est parfois plus difficile.

L’installation progressive et insidieuse de douleurs inguinocrurales et fessières, thoraciques et scapulaires, l’apparition d’une faiblesse musculaire proximale, de troubles de la marche (démarche en « canard »), l’aspect flou des contours osseux sur les radiographies standards, la découverte de fissures de Looser-Milkman, la présence d’un syndrome biologique associant hypocalcémie, hypophosphorémie, augmentation des phosphatases alcalines, hypocalciurie, baisse de la 25(OH)D sérique, élévation de la PTH, sont autant d’arguments en faveur du diagnostic.

L’anhélie (défaut d’exposition solaire) est la cause la plus fréquente chez le sujet âgé, mais il ne faut pas méconnaître les autres étiologies, et en particulier les syndromes de malabsorption (maladie coeliaque par exemple).

* Rechercher une ostéoporose secondaire :

L’enquête clinique puis biologique sera d’autant plus poussée que le patient jeune est un homme ou une femme non ménopausée.

Les priorités diagnostiques concernent les endocrinopathies, l’intoxication éthylique, les maladies digestives chroniques, et plus rarement une hémochromatose génétique, une mastocytose, une maladie de Lobstein.

* Réunir les informations utiles pour le choix du traitement :

Les informations utiles sont d’abord cliniques : terrain, âge de la patiente, ancienneté et condition de survenue de la ménopause ; ancienneté, rythme et circonstances de survenue des fractures, importance des douleurs et du handicap fonctionnel actuel ; efficacité, tolérance et observance des traitements déjà mis en oeuvre.

Les radiographies permettent d’évaluer le nombre et l’aspect des tassements rachidiens, l’aspect de l’os cortical et la biologie permet de s’assurer de la normalité des paramètres phosphocalciques et de la fonction rénale (créatininémie).

C – Traitement :

1- Moyens :

* Mesures générales :

+ Éradication des facteurs de risque :

La lutte contre la sédentarité, le tabagisme, l’alcoolisme, s’inscrivent autant dans les mesures de préservation du capital osseux que dans une politique générale de santé.

* Renforcement des apports calciques alimentaires :

Il vise à apporter au moins 1 000 mg/j et passe par une augmentation de la consommation des produits laitiers (ou éventuellement de certaines eaux minérales, riches en calcium assimilable).

Pour diverses raisons (souci de ne pas prendre de poids, crainte d’une aggravation de troubles lipidiques, manque de goût pour ces produits), la modification du régime dans un tel sens est parfois difficile à obtenir.

Elle mérite cependant d’être tentée, en particulier chez l’enfant et l’adolescent, en rappelant que la consommation de produits laitiers « allégés » ne diminue pas leur teneur en calcium.

Une conférence de consensus, réunie en 1994 sous l’égide du National Institute of Health des États-Unis, a établi une liste des apports calciques recommandés en fonction de l’âge.

+ Exercice physique :

Les études scientifiques disponibles n’apportent pas la preuve formelle de l’efficacité de l’activité physique pour prévenir la perte osseuse, mais il existe toutefois des arguments de présomption : une activité régulière et quotidienne de marche, de l’ordre de 1 à 2 km par jour, ralentirait la perte osseuse aux membres inférieurs et permettrait une préservation du capital osseux ; l’effet d’épargne osseuse apporté par le calcium serait optimisé par la pratique d’une activité physique soutenue (4 heures par semaine).

L’entretien musculaire régulier, qui participe de plus à la réduction du risque de chutes, s’inscrit donc dans une logique de prévention générale de l’ostéoporose.

* OEstrogènes :

L’application de cette thérapeutique, dont les bénéfices dépassent largement le cadre de l’ostéoporose, à l’ensemble des femmes ménopausées permettrait de réduire l’incidence des fractures ostéoporotiques de plus de 50 %, mais aussi de diminuer la mortalité des femmes ménopausées, en particulier en raison d’une forte diminution de l’incidence des maladies cardiovasculaires (infarctus du myocarde).

+ Préservation de la masse osseuse :

Le traitement hormonal substitutif préserve le capital osseux.

Bien que son efficacité apparaisse optimale dans l’immédiate postménopause, il est établi que l’action de prévention de la perte osseuse se manifeste au-delà de cette période, indépendamment de l’âge ou de l’ancienneté de la ménopause.

Les oestrogènes peuvent être proposés quelle que soit la valeur de la DMO ; ils ne sont pas moins efficaces chez les femmes à très faible capital osseux, qui sont les plus à risque d’ostéoporose.

Dans l’ostéoporose avérée, l’administration des oestrogènes se traduit également par une réduction du remaniement cellulaire et un gain de masse osseuse, faible mais significatif, en différents sites du squelette.

+ Efficacité antifracturaire :

L’institution, même tardive, de l’hormonothérapie substitutive apparaît susceptible de réduire le risque relatif de fractures ostéoporotiques.

Des études rétrospectives montrent que ce traitement réduit d’environ 80 % l’incidence des nouveaux tassements vertébraux et de 50 % la survenue de fractures de l’ESF.

Une étude contrôlée chez des femmes atteintes d’ostéoporose avérée confirme ce résultat.

Il est toutefois obtenu avec de fortes doses d’oestradiol, susceptibles d’entraîner des phénomènes d’intolérance mal acceptés chez la femme à distance de la ménopause.

+ Tolérance :

La tolérance à long terme du traitement hormonal est encore débattue.

S’il semble acquis que les oestrogènes ont des effets cardiovasculaires bénéfiques (réduction de 50 % du risque d’infarctus du myocarde chez les patientes indemnes de pathologie coronarienne au début du traitement) et pourraient augmenter l’espérance de vie, il existe une augmentation du risque de cancer de l’utérus (en l’absence de traitement progestatif associé) et surtout du risque de cancer du sein au-delà de 7 ans de traitement.

C’est dire l’intérêt apporté actuellement aux modulateurs sélectifs des récepteurs aux oestrogènes ou selective estrogen receptor modulators (SERMs) et en particulier au raloxifène (Evistat) qui protège le squelette de la perte osseuse postménopausique, réduit le risque de fracture vertébrale, diminue le risque de cancer du sein et ne provoque pas d’hypertrophie endométriale.

Toutefois, ce produit ne supprime pas les bouffées de chaleur, provoque parfois l’apparition de crampes dans les membres inférieurs et augmente le risque de pathologies thromboemboliques (de façon comparable aux oestrogènes toutefois).

+ En pratique :

On recourt surtout au 17-bêta-oestradiol, sous ses différentes formes : orale, percutanée, transdermique.

La prescription associée de dérivés progestatifs (indispensable pour prévenir le risque de cancer de l’endomètre lié à la prescription des oestrogènes), ne diminue pas l’action de protection de l’os.

L’inhibition de la résorption osseuse impose une dose minimale d’oestrogènes, une oestradiolémie avoisinant 60 pg/mL traduisant une imprégnation efficace.

L’intérêt en pratique d’un contrôle de l’efficacité et de l’observance sur ce paramètre n’est toutefois pas démontré, en raison notamment des difficultés du dosage en routine et de la grande variabilité des taux selon les modalités du traitement.

La réduction du risque fracturaire apparaît d’autant plus significative que l’administration des oestrogènes a été prolongée.

Une prescription « à vie » étant irréaliste, une durée de traitement de 5 à 10 ans est généralement retenue.

À l’arrêt du traitement, la vitesse de déperdition osseuse est du même ordre qu’en postménopause.

Dix ans après la ménopause, des femmes traitées pendant en moyenne 4 ans gardent cependant un meilleur capital osseux que des femmes non traitées.

* Bisphosphonates :

Administrés par voie orale, les bisphosphonates sont faiblement absorbés dans l’intestin (3,5 % pour l’étidronate, 0,75 % pour l’alendronate), puis stockés dans le tissu osseux en raison de leur très haute affinité pour le cristal d’hydroxyapatite.

Ils y persistent plusieurs années. Leur effet osseux se traduit essentiellement par une réduction de l’activité des ostéoclastes.

Il en résulte une diminution de la natalité des BRU et une moindre profondeur des encoches de résorption.

+ Préservation de la masse osseuse :

L’administration cyclique ou continue des bisphosphonates, par voie orale ou parentérale, entraîne une augmentation de la densité osseuse lombaire de l’ordre de 2,5 à 7 %par an.Après 7 ans de traitement par étidronate, le gain moyen de densité en site lombaire est évalué à 12 %.

L’effet en site fémoral est d’intensité variable selon les composés administrés, le gain allant de 1 à 6%.

L’augmentation de la DMO sous alendronate est progressive sur 3 ans et dépend de la dose quotidienne et non de la dose cumulée, et intéresse tous les sites squelettiques : rachis lombaire, col fémoral, trochanter et corps entier.

+ Efficacité antifracturaire :

La prescription d’étidronate réduit de moitié le taux des nouvelles fractures vertébrales après 2 ans de traitement.

Dans le sous-groupe de patients ayant le plus faible CMO lombaire, la diminution de l’incidence des tassements vertébraux atteint même 68 %.

Toutefois le résultat n’est plus significatif à l’issue de la troisième année de traitement.

Chez des femmes souffrant d’ostéoporose avérée, la prescription de pamidronate durant 2 ans réduit de 46 % l’incidence des tassements vertébraux par rapport au groupe contrôle, mais la différence n’est pas significative.

L’alendronate, prescrit à la dose de 10 mg/j chez des femmes atteintes d’ostéoporose postménopausique (définie par un T-score inférieur à -2,5) entraîne, après 3 ans de traitement, une réduction significative de 48 % de l’incidence des tassements vertébraux.

Chez les patientes qui présentent au moins un tassement vertébral au début du traitement, l’alendronate divise par deux le risque de survenue ultérieure d’une fracture périphérique : fractures distales de l’avant-bras et de l’ESF.

+ Tolérance :

La tolérance à long terme de l’étidronate, dans les conditions recommandées, apparaît satisfaisante : après 7 ans de traitement séquentiel, aucun cas d’ostéomalacie n’est observé.

Les nouveaux bisphosphonates, tel l’alendronate, prescrits à des doses inhibant la résorption osseuse, ne diminuent pas la minéralisation osseuse et n’ont pas d’effet délétère sur le remaniement cellulaire osseux.

Après administration orale, les effets indésirables gastro-intestinaux sont le plus souvent une diarrhée, mais des cas d’oesophagite ont été décrits avec l’alendronate per os.

Les conditions d’administration de l’alendronate doivent être strictement expliquées et respectées.

+ En pratique :

L’étidronate utilisé en traitement séquentiel sur 3 mois (400 mg/j d’étidronate pendant 2 semaines, puis 1 g/j de calcium pendant 2,5 mois), dispose d’une AMM pour le traitement de l’ostéoporose postménopausique avec au moins un tassement vertébral.

Le produit doit être administré en dehors des repas, afin d’optimaliser son absorption digestive.

La bonne tolérance osseuse et générale d’une utilisation prolongée durant 7 ans a conduit récemment à étendre la prescription de ce produit au-delà des 3 années classiques de traitement.

L’alendronate dispose également de l’AMM dans le traitement de l’ostéoporose postménopausique avérée, à la dose de 10 mg/j en une prise, à jeun, le matin, en respectant les contre-indications : insuffisance rénale et maladies de l’oesophage.

* Calcitonines :

D’origine animale ou humaine, naturelles ou synthétiques, les calcitonines sont des inhibiteurs de la résorption ostéoclastique, administrables sous forme injectable ou de spray nasal.

La calcitonine salmine, sous forme de spray nasal, en association avec une supplémentation calcique, induit, à la dose quotidienne de 50 à 100 UI, un effet significatif de réduction de la perte osseuse lombaire et à la posologie de 200 UI, un gain significatif de masse osseuse.

La calcitonine n’a cependant pas d’action préventive sur la perte osseuse corticale.

Des études prospectives complémentaires sont nécessaires pour confirmer l’existence d’un effet antifracturaire.

Pour ces raisons, les calcitonines ne possèdent uneAMMque pour le « traitement du syndrome fracturaire au cours du tassement vertébral ostéoporotique aigu, récent et douloureux », et pour une durée de traitement n’excédant pas 15 jours.

* Sels de fluor :

Ils stimulent la prolifération des ostéoblastes et la formation osseuse.

Ils entraînent une augmentation du volume trabéculaire.

Cette stimulation de la formation osseuse accroît les besoins locaux en calcium et impose une supplémentation calcique.

+ Préservation de la masse osseuse :

À la dose de 50 mg/j, le fluorure de sodium (NaF), associé au calcium, augmente la DMO lombaire de 5 %par an en moyenne, l’effet se maintenant pendant la durée du traitement.Toutefois, 30 %de sujets sont non répondeurs.

Les effets sur la masse osseuse corticale dépendent des doses de fluor utilisées.

+ Efficacité antifracturaire :

La réduction de l’incidence des nouveaux tassements vertébraux sous traitement fluoré (50 mg/j de NaF, 1 g/j de calcium, 800 UI/j de vitamine D2, pendant 2 ans) suggérée dans une étude prospective randomisée ouverte sans groupe placebo est retrouvée par Pak et al.

Ces résultats favorables n’ont pas été observés dans deux études contrôlées randomisées en double aveugle contre placebo ; les résultats récents de l’étude Favos confirment que l’association fluor-calcium (même aux doses de fluor préconisées en France) ne réduit pas l’incidence des nouvelles fractures vertébrales, comparativement au groupe placebo-calcium.

L’institution plus précoce des sels de fluor, devant une ostéopénie « modérée », pourrait être plus efficace en termes de prévention de l’ostéoporose.

Chez ces sujets ostéopéniques, le traitement augmente la DMO lombaire et semble aussi réduire l’incidence des tassements vertébraux.

+ Tolérance :

Le traitement par fluor expose à des effets secondaires indésirables, notamment ostéoarticulaires, à type de syndrome douloureux des membres inférieurs, correspondant chez certains patients à des fissures osseuses guérissant à l’arrêt du traitement.

Les principales études concernant le fluor ne démontrent pas d’augmentation du risque de fracture des os périphériques, en particulier du col fémoral, quand une supplémentation calcique est correctement associée.

* Calcium :

Le squelette renferme 99 %du calcium de l’organisme, incorporé sous forme de cristaux d’hydroxyapatite dans la matrice collagénique du tissu osseux.

En raison du rôle vital du calcium intracellulaire, l’organisme ne peut tolérer l’hypocalcémie.Toute carence calcique prolongée déclenche une sécrétion de PTH pour accélérer la résorption osseuse et puiser dans les réserves squelettiques.

Ces données physiologiques expliquent l’intérêt de la supplémentation calcique dans les situations de carence potentielle (l’absorption intestinale calcique diminue lors de la ménopause), de carence relative (l’augmentation de la masse osseuse sous fluor s’accompagne d’une élévation des besoins calciques), ou de déficit avéré (moins de 40 %des sujets âgés atteignent les apports calciques recommandés).

L’apport calcique, en freinant l’élévation de la PTH, réduit le turn over osseux, freine la résorption et préserve partiellement l’architecture osseuse trabéculaire en s’opposant à la survenue de perforations des travées.

+ Préservation de la masse osseuse :

Chez des femmes âgées de 46 à 55 ans, Elders et al ont observé que la perte osseuse vertébrale lombaire était moindre chez les patientes traitées par 1 à 2 g/j de calcium pendant la première année de traitement.

De même, chez 210 femmes ménopausées âgées en moyenne de 57 ans, la perte osseuse est réduite, après 9 mois de supplémentation calcique, d’environ 1 %par rapport à celle des témoins non traités.

Dawson-Hughes et al ont observé que la supplémentation calcique exerçait une action favorable, surtout quand la ménopause datait de plus de 5 ans, et chez les patientes dont la ration calcique alimentaire était basse.

L’impact de la supplémentation calcique semble également intéressant chez les patientes déjà ostéopéniques.

Ainsi, Prince et al ont montré que l’association activité physique-supplémentation calcique permettait, en postménopause, de réduire de façon significative la perte osseuse du secteur trabéculaire, de façon moins efficace cependant que le traitement oestrogénique.

La supplémentation calcique, moins efficace que l’oestrogénothérapie, freine la perte osseuse dans le secteur cortical et le secteur trabéculaire, surtout à distance de la ménopause.

Si l’économie de capital osseux, de l’ordre de 1 % par an, peut paraître minime, elle pourrait être suffisante, cumulée sur 10 ans, pour réduire le risque fracturaire à distance de la ménopause.

+ Efficacité antifracturaire :

En poursuivant une étude randomisée pendant 4 ans, Reid et al ont observé une réduction de la perte osseuse lombaire et fémorale, mais également une diminution du nombre des nouvelles fractures vertébrales.

Chevalley et al ont montré chez 93 patients âgés de 62 à 87 ans que la supplémentation calcique pendant 18 mois diminuait de 25 % l’incidence des nouvelles fractures vertébrales.

Chapuis et al ont démontré que la supplémentation calcique et vitaminique D prévenait la survenue d’une fracture de l’ESF chez les femmes âgées et institutionnalisées.

+ En pratique :

L’enrichissement de la ration alimentaire par des produits laitiers est efficace du point de vue osseux, mais elle se heurte fréquemment aux inquiétudes de la patiente concernant une prise de poids ou une dyslipidémie.

La prescription d’un supplément médicamenteux est alors raisonnable, en tenant compte des besoins calciques minimaux (800 à 1 000 mg/j sous oestrogénothérapie, 1 500 mg/j en l’absence d’hormonothérapie) et de la ration calcique alimentaire spontanée.

Le taux d’absorption du calcium administré en thérapeutique, compris entre 20 et 30 %, est influencé moins par la formulation chimique que par le mode d’administration : l’absorption augmente si le calcium est ingéré au moment du repas et sous forme de prises fragmentées au cours de la journée.

Afin d’obtenir une bonne observance (essentielle pour un traitement prolongé plusieurs années), il est important de choisir un supplément calcique dont la formulation et la galénique s’adaptent au goût et au mode de vie de la patiente.

* Vitamine D :

+ Correction de l’insuffisance vitaminique D :

Les études épidémiologiques réalisées en France montrent que 30 à 50 %des femmes ménopausées ont une insuffisance vitaminique D.

Sa correction apparaît souhaitable pour optimaliser l’absorption calcique, prévenir la survenue d’une hyperparathyroïdie secondaire ou d’un trouble de la minéralisation.

Elle passe par l’apport de faibles doses de vitamine D : par exemple, 800 à 1 200 UI/j de vitamine D2 ou 8 000 UI/semaine.

S’il paraît scientifiquement fondé de doser la 25-hydroxyvitamine D pour vérifier la réalité du déficit, on remarquera de façon pragmatique que le coût de ce dosage (environ 250 F) est très supérieur à celui d’un traitement systématique réalisé pendant 10 ans (environ 150 F).

En tenant compte de l’innocuité de cette thérapeutique, il paraît donc raisonnable de proposer une supplémentation physiologique en vitamine D aux femmes de 65 ans, ostéopéniques ou ostéoporotiques.

+ Prescription des dérivés hydroxylés de la vitamine D :

La place du calcitriol et de l’alfa-calcidol dans le traitement de l’ostéoporose postménopausique ne fait pas l’objet d’un consensus.

À la dose de 0,25 à 1 íg/j, le calcitriol augmente l’absorption calcique et la calcémie, réduit la parathormonémie, diminue le remodelage osseux et inhibe la résorption.

En revanche, les effets sur la masse osseuse sont variables d’une étude à l’autre, oscillant entre un gain franc (de l’ordre de 10 à 20 %) et une élévation transitoire et modeste de la densité, voire l’absence de toute réponse thérapeutique.

L’efficacité antifracturaire n’est pas non plus démontrée, tant en raison de l’hétérogénéité des résultats publiés que des insuffisances méthodologiques présentes dans plusieurs études.

Enfin, la survenue fréquente d’une hypercalciurie et parfois d’une hypercalcémie freine, en pratique, la prescription de ces produits.

* Autres traitements :

D’autres agents revêtent un intérêt potentiel dans la prévention et le traitement de l’ostéoporose.

Les résultats de ces thérapeutiques sont encore préliminaires, leur efficacité antifracturaire n’est pas établie et ils ne disposent pas d’AMM.

Le tamoxifène protège contre la perte osseuse ; les modulateurs sélectifs des récepteurs aux oestrogènes ou SERMs les plus récents (raloxifène, droloxifène…), ralentissent la perte osseuse et sont dénués d’action néfaste sur les seins, l’utérus, mais il convient cependant de mieux évaluer leur efficacité antifracturaire ainsi que leur tolérance cardiovasculaire à long terme.

L’ipriflavone, dérivé flavonoïde synthétique, réduit la résorption osseuse et pourrait avoir un rôle préventif de la perte osseuse.

La tibolone, analogue synthétique des stéroïdes, associe des propriétés oestrogéniques, progestatives et androgéniques.

Son effet sur la réduction des fractures est inconnu ; sa tolérance à long terme doit être mieux évaluée.

Les stéroïdes anabolisants (17-alpha) ont des effets secondaires (virilisation, effets hépatiques) qui limitent leur indication chez les femmes de la soixantaine.

Les diurétiques thiazidiques, largement prescrits dans le traitement de l’hypertension artérielle, positivent la balance calcique en réduisant l’élimination urinaire du calcium et exercent un effet favorable sur le capital osseux.

Ils n’ont cependant pas reçu d’indication spécifique dans le traitement de l’ostéoporose.

Les sels de strontium stimulent la formation osseuse.

Leur action sur la qualité osseuse et la réduction du risque fracturaire reste à démontrer.

L’hormone parathyroïdienne, administrée de façon séquentielle, isolément ou en association avec des agents antiostéoclastiques (oestrogènes, bisphophonates), exerce un effet anabolisant, mais on ne connaît pas son efficacité antifracturaire.

Suite

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