Cancer de l’oropharynx

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L’oropharynx est le véritable carrefour des voies aéro-digestives supérieures, situé au croisement de la voie respiratoire (fosses nasales, rhinopharynx, oropharynx, larynx, trachée, bronches) et de la voie digestive (cavité buccale, oropharynx, hypopharynx, œsophage).

RAPPEL ANATOMIQUE :

Cancer de l'oropharynxL’oropharynx n’est pas une structure individualisée sur des critères embryologiques ou anatomiques spécifiques.

* Les limites de l’oropharynx sont :

– en avant : « l’isthme du gosier » (V lingual, piliers antérieurs et voile).

– en haut : une horizontale passant par le bord libre du voile.

– en bas : une horizontale passant par le fond des vallécules ou le corps de l’os hyoïde.

* C’est un conduit musculo-aponévrotique grossièrement semi-cylindrique, ouvert vers l’avant et constitué de cinq parois : deux latérales (loges amygdaliennes), une postérieure, une supérieure (voile du palais) et une antérieure (base de langue).

* Parois latérales : les loges amygdaliennes :

– chaque loge est limitée par le pilier antérieur et le pilier postérieur réunis en haut au niveau de l’ogive amygdalienne et dessinant un espace triangulaire occupé par la tonsille (ou amygdale) palatine.

– en bas, le pilier antérieur s’implante sur la jonction entre le bord latéral de la langue mobile et la base de langue, le pilier postérieur descend sur la paroi pharyngée latérale et se continue par le repli pharyngo-épiglottique, tandis que la loge est séparée de la base de langue par un sillon : le sillon amygdalo-glosse.

– en dehors, la loge répond aux espaces parapharyngés et à leur contenu (en particulier l’axe jugulo-carotidien).

* La paroi postérieure est le segment médian de l’ensemble de la paroi pharyngée postérieure, reposant sur le rachis cervical par l’intermédiaire de l’espace rétropharyngé contenant essentiellement les ganglions du même nom.

* La paroi supérieure : seule la face antérieure du voile du palais est réellement oropharyngée. Elle s’étend de la limite postérieure du palais osseux au bord libre du voile avec l’uvule (ou luette) et se continue latéralement par les piliers. Dans l’épaisseur de sa muqueuse se trouvent des îlots glandulaires (glandes salivaires accessoires).

* La paroi antérieure : la base de langue est un mur vertical sur lequel sont implantées les tonsilles basilinguales séparées par un sillon vertical médian (l’ensemble des tonsilles oropharyngées, palatines et basilinguales et rhinopharyngées forment l’anneau lymphoïde de Waldeyer). La base de langue est limitée en haut et en avant par le V lingual. Elle est séparée latéralement des loges amygdaliennes par les sillons amygdalo-glosses et en bas du larynx par les gouttières glosso-épiglottiques ou vallécules.

* Le réseau lymphatique, riche, se draine principalement vers les relais sous-digastriques puis la chaîne jugulo-carotidienne. Les lymphatiques du pilier antérieur peuvent également se drainer vers la région sous-mandibulaire et ceux du pilier postérieur et de la paroi postérieure vers les chaînes spinales et rétropharyngées.

RAPPEL ANATOMOPATHOLOGIQUE :

* 90 à 95% des cancers oropharyngés sont des carcinome épidermoïdes, bien ou moyennement différenciés dans près des deux tiers des cas mais avec une fréquence relativement élevée de formes peu différenciées (environ un tiers) pouvant aller jusqu’aux formes totalement indifférenciées de type nasopharyngé (UCNT (« undifferentiated carcinoma nasopharyngal type ») :

– ces carcinomes épidermoïdes ont une agressivité locale et une lymphophilie marquée.

– les localisations néoplasiques multiples, simultanées ou successives, sont fréquentes (au moins 30% des cas).

* A partir des glandes salivaires accessoires peuvent se développer, rarement (moins de 5%), des tumeurs malignes, les carcinomes adénoïdes kystiques (ou cylindromes) étant les plus fréquents. Ce sont des tumeurs d’évolution lente essentiellement locale et métastatique pulmonaire.

* Les lymphomes (principalement non hodgkiniens) peuvent se développer au niveau des tonsilles :

– ils représentent un peu plus de 5% des tumeurs malignes oropharyngées.

– ils diffèrent des carcinomes épidermoïdes par l’absence de contexte alcoolotabagique, une évolution locale et ganglionnaire diffuse, volontiers bilatérale et l’absence de douleurs.

Épidémiologie :

Seuls seront étudiés les carcinomes épidermoïdes.

ÉPIDÉMIOLOGIE DESCRIPTIVE :

Les cancers des voies aéro-digestives supérieures sont fréquents dans les pays industrialisés.

L’Europe est le continent globalement le plus touché. La France arrive largement en tête des pays européens en matière de cancers pharyngés.

* La place exacte des localisations oropharyngées est difficile à préciser (selon les registres le pharynx est évalué globalement, dans d’autres registres la base de langue n’est pas comptabilisée dans l’oropharynx, etc.).

– Il semble bien que la proportion de cancers oropharyngés parmi les cancers des voies aéro-digestives supérieures est la plus élevée en France : près de 20% de l’ensemble des voies aéro-digestives supérieures et environ 40% des localisations bucco-pharyngées.

– En Europe, les taux les plus bas sont retrouvés au Danemark et au Royaume-Uni (incidence de moins de 1 pour 100000 habitants) et les plus élevés en France (environ 12 pour 100000 habitants).

– En France, les taux les plus élevés sont trouvés en Normandie, dans le Doubs et surtout dans la région Nord-Pas-de-Calais (18 pour 100000 habitants).

* La proportion d’hommes est écrasante : plus de 90% des cas :

– l’âge moyen de survenue est de 55 ans chez l’homme, un peu plus tard chez la femme (aux environs de 60 ans).

– les formes indifférenciées peuvent apparaître plus précocement, la prédominance masculine étant un peu moins marquée.

ÉPIDÉMIOLOGIE ANALYTIQUE :

Le tabac et l’alcool sont indiscutablement liés à la genèse de ces cancers ; d’autres facteurs de risque sont possibles mais non formellement prouvés.

* Le tabac : dans la plupart des études conduites en France, il apparaît que moins de 2% des patients disent n’avoir jamais fumé. En revanche, pour les autres patients, cette intoxication apparaît majeure avec une quantité de tabac fumé par jour de 25g et un total fumé, avant diagnostic, de 317kg ou 45 paquets par an en moyenne dans l’expérience du centre Oscar-Lambret. Le type de tabac pourrait avoir une incidence, le tabac brun semblant plus nocif.

* L’alcool : plus de 95% des patients avouent abuser des boissons alcoolisées (plus de 40g d’alcool pur par jour). Toujours dans l’expérience du centre Oscar-Lambret, la consommation d’alcool pur avouée est de 150g par jour et 1800kg avant diagnostic. Le type d’alcool (vin, bière ou apéritifs) ne semble pas avoir d’incidence particulière.

* L’association des deux : le risque encouru est fortement potentialisé par l’action synergique du tabac et de l’alcool. Si le risque est de un, en l’absence de consommation de tabac et d’alcool, il est trois à cinq fois plus élevé chez les « gros fumeurs » (supérieur à 40g/j) ou chez les « grands buveurs » (supérieur à 120g/j) et devient 15 à 20 fois plus élevé, selon les études, chez les « gros fumeurs-grands buveurs ».

* Les autres facteurs : certaines expositions professionnelles ont été évoquées (métallurgie, nickel, par exemple) mais elles ne sont pas formellement prouvées. Le rôle de lésions précancéreuses (érythroplasie, leucoplasie) n’est pas évident. Il semble moins probable que pour d’autres localisations (cavité buccale, endolarynx).

Diagnostic positif :

EXAMEN CLINIQUE :

Signes d’appel :

* Les signes d’appel peuvent être liés à la tumeur elle-même :

– gêne pharyngée à la déglutition, sensation de corps étranger.

– dysphagie douloureuse (« angine »).

– odynophagie (douleur irradiant à l’oreille lors de la déglutition).

– crachats sanglants.

– les signes tardifs sont le trismus ou la fixité linguale.

* Ils peuvent être liés au ganglion : adénopathie révélatrice, parfois d’installation rapide.

Examen clinique en consultation :

L’examen clinique comporte :

– inspection de la cavité buccale, du pharynx, à l’aide de deux abaisse-langue.

– palpation des loges amygdaliennes, de la base de langue.

– inspection du larynx au miroir de Clar ou au nasofibroscope.

– palpations des aires ganglionnaires cervicales droites et gauches.

– réalisation d’un schéma détaillé et daté.

EXAMENS COMPLEMENTAIRES :

Examen endoscopique sous anesthésie générale :

Les examens cliniques et endoscopiques évaluent l’extension tumorale et recherche une (des) tumeur(s) associée(s), retrouvées dans 10 à 15% des cas :

– examen du pharynx, puis du larynx et de l’œsophage.

– réalisation de biopsies.

– éventuellement, tatouage des limites tumorales.

Examens en imagerie :

Les examens en imagerie comportent :

– l’examen tomodensitométrique permet d’évaluer l’extension tumorale, l’infiltration des espaces parapharyngés, la présence d’adénopathies cervicales ou rétropharyngées.

– si un scanner n’est pas réalisé, l’échographie cervicale peut préciser le statut ganglionnaire en l’absence d’adénopathie palpable.

– la radiographie pulmonaire élimine une diffusion métastatique ou peut faire suspecter un cancer pulmonaire (qui sera confirmé par un scanner thoracique).

– en l’absence de signe d’appel, on ne recherche pas d’autres localisations métastatiques (échographie hépatique, scintigraphie osseuse).

– panoramique dentaire en prévision de la mise en état avant irradiation.

Examens biologiques :

Les examens biologiques comportent :

– évaluation de la fonction hépatique, des facteurs de coagulation.

– évaluation de la fonction rénale.

– éventuellement, bilan nutritionnel.

Autres examens :

* Les autres examens sont :

– ECG.

– épreuves fonctionnelles respiratoires, en cas d’insuffisance respiratoire.

* L’examen anatomopathologique est indispensable avant mise en route de tout traitement.

* Le bilan étant réalisé, la décision thérapeutique est prise de façon pluridisciplinaire pour adapter au mieux la stratégie (chirurgie-radiothérapie-chimiothérapie).

CLASSIFICATION ANATOMOCLINIQUE DE L’UICC 1987

Tumeur :

* T1 : tumeur de grand axe inférieure ou égale à 2cm.

* T2 : tumeur de grand axe entre 2cm et, au maximum, 4cm.

* T3 : tumeur de grand axe supérieure à 4cm.

* T4 : tumeur étendue à l’os, la peau, les muscles, etc.

Ganglion(s) :

* N0 : pas de ganglion palpable.

* N1 : ganglion unique inférieur ou égal à 3cm.

* N2a : ganglion unique homolatéral entre 3cm et, au maximum, 6cm.

* N2b : ganglions multiples homolatéraux, tous inférieurs ou égaux à 6cm.

* N2c : ganglion(s) bilatéral(aux) ou controlatéral(aux), tous inférieurs ou égaux à 6cm.

* N3 : présence d’un ganglion de plus de 6cm.

Métastases :

* M0 : pas de métastase décelable.

* M1 : métastase(s) évidente(s).

Regroupement par stade :

* stade 1 : T1N0M0.

* stade 2 : T2N0M0.

* stade 3 : T1T2N1M0 ; T3N0M0.

* stade 4 : autres cas.

Formes anatomocliniques :

CANCERS DE LA LOGE AMYGDALIENNE :

Diagnostic positif :

* Les cancers de la loge amygdalienne se présentent le plus souvent comme une lésion ulcéro-bourgeonnante douloureuse (évoquant parfois faussement une angine unilatérale) et saignant au contact.

* Ils peuvent se présenter sous des formes trompeuses :

– lésion fissuraire, ulcéro-infiltrante du sillon amygdalo-glosse (décelable à la palpation, génératrice de douleurs vives et de saignement).

– aspect érythroplasique d’un pilier antérieur (la palpation retrouve une induration suspecte).

– lésion au fond d’une crypte amygdalienne : aspect tuméfié de l’amygdale, voire aspect encore plus trompeur, adénopathie révélatrice, seule la palpation retrouvant une induration dans l’épaisseur de l’amygdale.

Diagnostic différentiel :

Une angine unilatérale de Vincent ou une ulcération spécifique sont aisément éliminées par le contexte évocateur et la biopsie.

Traitement :

* La radiothérapie est le traitement de choix pour cette localisation quand la tumeur reste limitée à la loge :

– elle est réalisée, après extraction des dents cariées ou incluses dans les champs d’irradiation et réalisation, en cas de dents restantes, de gouttières pour prophylaxie fluorée.

– elle distribue, en irradiation externe, une dose de 70Gy sur la lésion primitive et les ganglions palpables et de 50Gy sur les aires ganglionnaires cliniquement libres.

* La chirurgie est indiquée soit en cas de lésion de très petite taille (exérèse à visée tant diagnostique que thérapeutique) ou, le plus souvent, pour des lésions ayant dépassé la loge (extension au sillon amygdalo-glosse ou à la branche montante de la mandibule) :

– les « petites » exérèses peuvent être réalisées au bistouri électrique par voie transorale. Rappelons le caractère exceptionnel de cette indication.

– en cas de tumeurs restant à distance de l’os, l’exérèse peut être effectuée par voie externe : bucco-pharyngectomie transmandibulaire sans hémimandibulectomie (la mandibule est sectionnée, luxée vers l’extérieur puis repositionnée et fait l’objet d’une ostéosynthèse après exérèse tumorale).

– en cas de proximité ou d’atteinte osseuse, une hémimandibulectomie est réalisée en même temps que l’exérèse tumorale.

– le curage cervical, radical ou fonctionnel, selon la taille des ganglions envahis, est associé aux exérèses par voie externe.

– en cas d’exérèse large, un lambeau musculo-cutané peut reconstruire les tissus réséqués. En cas d’hémimandibulectomie, on peut réaliser une reconstruction mandibulaire par un transfert osseux libre (de péroné, par exemple) avec microanastomoses vasculaires.

– cette chirurgie est complétée d’une irradiation postopératoire apportant une dose de 55Gy au minimum, s’élevant à 65-70Gy en cas d’exérèse limite ou d’envahissement ganglionnaire massif (avec rupture de la capsule ganglionnaire).

– elle peut également s’envisager en terrain déjà irradié ; l’usage des lambeaux est alors plus systématique.

* La chimiothérapie n’a pas fait la preuve réelle de son efficacité en termes d’amélioration du contrôle local ou cervical, de prévention des métastases ou d’amélioration de la survie :

– son utilisation en association avec la radiothérapie ou en début de traitement pour éviter des interventions mutilantes est en cours d’évaluation et ne saurait être considérée comme étant un traitement de routine. Toutefois, les associations de radiothérapie et de chimiothérapie concomitantes semblent améliorer les résultats au moins pour les tumeurs évoluées, mais au prix d’une toxicité aiguë plus importante qui peut en limiter les indications en pratique courante.

– elle reste un recours pour les tumeurs très évoluées ou pour les récidives ne pouvant faire l’objet d’un traitement local (chirurgie ou irradiation).

– l’association sels de platine-5-fluoro-uracile est la plus utilisée actuellement.

Résultats :

La survie est globalement de 35% à 5 ans.

Cas particulier : les lymphomes :

Les lymphomes se présentent comme des hypertrophies amygdaliennes indolores, ne saignant pas au contact, s’accompagnant d’adénopathies multiples. Ils surviennent à tout âge et aussi bien chez l’homme que chez la femme.

* Le bilan est plus lourd, à la recherche d’autres localisations sus-diaphragmatiques ou sous-diaphragmatiques. Le diagnostic anatomopathologique en précise le type.

* En fonction de ce type histopronostique du lymphome et en fonction de sa dissémination, le traitement repose sur la polychimiothérapie, la radiothérapie ou l’association des deux.

* Le pronostic est globalement de 40 à 50% de survie à 5 ans.

CANCERS DU VOILE DU PALAIS :

Diagnostic positif :

Le plus souvent, les cancers du voile du palais se présentent sous forme d’une lésion ulcéro-bourgeonnante, relativement superficielle (en « plat à barbe »), plus rarement et plus tardivement, ils réalisent une véritable amputation du voile.

Parfois, l’aspect est plus trompeur : érythroplasie du voile, fine érosion du bord libre du voile, encoche de la base de la luette. La forme la plus difficile à diagnostiquer est celle des lésions de la face postérieure de la luette donnant un aspect un peu « figé » à celle-ci.

Diagnostic différentiel :

Le diagnostic différentiel élimine les exceptionnels chancres spécifiques.

Traitement :

* La radiothérapie est le principal traitement de cette localisation :

– elle est réalisée, après extraction des dents cariées ou incluses dans les champs d’irradiation et réalisation, et s’il subsiste des de dents, de gouttières pour prophylaxie fluorée.

– elle distribue, en irradiation externe, une dose de 70Gy sur la lésion primitive et les ganglions palpables et de 50Gy sur les aires ganglionnaires cliniquement libres.

– la curiethérapie trouve ici une indication, soit en traitement exclusif pour des lésions limitées, soit en complément de surdosage local après irradiation externe pour des lésions plus étendues.

* La chirurgie n’a que des indications exceptionnelles, du fait des séquelles morphologiques et fonctionnelles qu’elle entraîne et qui sont mal corrigées par les procédés de réparation chirurgicale ou de compensation par des prothèses palatines adaptées :

– il peut s’agir d’une simple exérèse par voie buccale.

– il peut s’agir d’une large résection, le plus souvent en situation de rattrapage pour un échec local après radiothérapie.

– cette chirurgie est complétée, lorsqu’elle est réalisée en première intention, d’une irradiation postopératoire apportant une dose de 55Gy au minimum, s’élevant à 65-70Gy en cas d’exérèse limite ou d’envahissement ganglionnaire massif (avec rupture de la capsule ganglionnaire).

* La chimiothérapie est surtout utilisée en association avec la radiothérapie, pour tenter d’en améliorer l’efficacité locale, ou en situation palliative.

Résultats :

La survie est globalement de 30 à 35% à 5 ans.

Cas particulier du carcinome adénoïde kystique :

Le carcinome adénoïde kystique (cylindrome) est une tumeur d’évolution lente, ayant tendance à s’infiltrer le long des filets nerveux et des travées osseuses.

Elle se présente comme une tuméfaction, parfois ulcérée, de la muqueuse.

Elle peut provoquer, parfois très longtemps après le traitement local, et même en l’absence de récidive locale, une diffusion métastatique pulmonaire.

Le traitement rejoint celui de carcinomes épidermoïdes, cette tumeur étant toutefois moins radiosensible et peu chimiosensible.

CANCERS DE LA BASE DE LANGUE :

Diagnostic positif :

Le plus souvent, les cancers de la base de langue se présentent sous forme d’une lésion ulcéro-bourgeonnante, creusante de la base de langue.

Les formes latéralisées, au niveau du sillon amygdalo-glosse sont plus volontiers infiltrantes.

Diagnostic différentiel :

Il n’y a pas d’autre diagnostic pouvant être évoqué, en dehors d’hypertrophies pseudo-tumorales des amygdales basilinguales.

Traitement :

* La radiothérapie est le principal traitement de cette localisation :

– elle est réalisée, après extraction des dents cariées ou incluses dans les champs d’irradiation et réalisation et, s’il reste encore des dents, de gouttières pour prophylaxie fluorée.

– elle distribue, en irradiation externe, une dose de 70Gy sur la lésion primitive et les ganglions palpables et de 50Gy sur les aires ganglionnaires cliniquement libres.

– la curiethérapie peut apporter un complément en surdosage local après irradiation externe.

* La chirurgie peut avoir des indications, surtout pour les formes latéralisées :

– il ne peut s’agir que d’une large résection, par voie de bucco-pharyngectomie transmaxillaire (avec ou sans hémimandibulectomie) avec utilisation quasi-systématique d’un lambeau myo-cutané pour reconstituer le volume basilingual.

– les interventions plus larges, à type de glosso-laryngectomies totales, ne sont envisagées qu’exceptionnellement, du fait des séquelles effroyables qu’elles entraînent, le plus souvent en situation de rattrapage et chez des sujets en relativement bon état, demandeurs et motivés.

– cette chirurgie est toujours complétée d’une irradiation postopératoire apportant une dose de 55Gy au minimum, s’élevant à 65-70Gy en cas d’exérèse limite ou d’envahissement ganglionnaire massif (avec rupture de la capsule ganglionnaire).

* La chimiothérapie est surtout utilisée en association avec la radiothérapie, pour tenter d’en améliorer l’efficacité locale ou en situation palliative.

Résultats :

La survie est médiocre : 15% à 5 ans.

CANCERS DES VALLECULES :

Diagnostic positif :

Les cancers des vallécules se présentent sous forme d’une lésion ulcéro-bourgeonnante, du fond des gouttières glosso-épiglottiques.

Diagnostic différentiel :

Il n’y a pas d’autre diagnostic pouvant être évoqué à ce niveau.

Traitement :

* La radiothérapie est plus rarement utilisée dans cette localisation.

* La chirurgie est le traitement habituel :

– il peut s’agir d’une subglosso-laryngectomie supraglottique, en l’absence d’extension importante de la base de langue et d’envahissement de la loge pré-épiglottique.

– il peut s’agir d’une large résection à type de subglosso-laryngectomie totale en cas d’extension importante de la base de langue ou d’envahissement de la loge préépiglottique. Une irradiation postopératoire est systématique.

– un curage cervical bilatéral est systématiquement associé.

– cette chirurgie est le plus souvent complétée par une irradiation postopératoire apportant une dose de 55Gy au minimum, s’élevant à 65-70Gy en cas d’exérèse limite ou d’envahissement ganglionnaire massif (avec rupture de la capsule ganglionnaire).

* La chimiothérapie est surtout utilisée comme traitement palliatif.

Résultats :

La survie est globalement de 30 à 35% à 5 ans.

CANCERS DE LA PAROI OROPHARYNGEE POSTERIEURE :

Diagnostic positif :

Les cancers de la paroi oropharyngée postérieure se présentent souvent sous forme d’une lésion ulcéro-bourgeonnante en « plat à barbe ».

Diagnostic différentiel :

Il n’y a pas d’autre diagnostic pouvant être évoqué à ce niveau.

Traitement :

* La radiothérapie associée ou non à la chimiothérapie est souvent le seul recours possible.

* La chirurgie est envisagée exceptionnellement :

– il peut s’agir d’une résection transorale.

– il peut s’agir d’une large résection avec réparation par un lambeau pédiculé ou un lambeau libre. Dans ce cas, un curage cervical bilatéral est souvent associé. Cette chirurgie est le plus souvent complétée par une irradiation postopératoire apportant une dose de 55Gy au minimum, s’élevant à 65-70Gy en cas d’exérèse limite ou d’envahissement ganglionnaire massif (avec rupture de la capsule ganglionnaire).

* La chimiothérapie est surtout utilisée en situation palliative.

Résultats :

La survie est très mauvaise : 5 à 10% à 5 ans.

Surveillance après traitement :

La surveillance après traitement recherche, le plus tôt possible, les échecs carcinologiques, dépiste les nouvelles localisations tumorales et évalue les séquelles et complications post-thérapeutiques.

Dans la mesure où tous ces événements peuvent entraîner la même symptomatologie, il convient d’assurer une surveillance active et rapprochée.

ECHECS CARCINOLOGIQUES :

* Les échecs locaux sont les plus fréquentes des évolutions après traitement. Il s’agit même, assez souvent, pour les tumeurs étendues de la paroi postérieure ou de la base de langue, de persistances évolutives.

– Les progrès de la chirurgie réparatrice (avec les lambeaux myo-cutanés) ont permis d’élargir les indications de la chirurgie de rattrapage.

– Dans certains cas, il est possible d’envisager des réirradiations avec des champs limités.

– La chimiothérapie n’a qu’un effet de stabilisation, parfois de contrôle provisoire.

– Les traitements symptomatiques ne doivent pas être négligés, notamment la prise en charge antalgique et le maintien d’un statut nutritionnel soit par sonde naso-gastrique, soit, ce qui est préférable, par mise en place d’une sonde de gastrostomie par voie endoscopique.

* Les échecs ganglionnaires, s’ils sont diagnostiqués précocement, peuvent faire parfois l’objet d’une exérèse chirurgicale ou d’une reprise d’irradiation. La chimiothérapie est rarement efficace, même à court terme, sur ces récidives survenant en terrain irradié.

* Les diffusions métastatiques pulmonaires ou hépatiques peuvent, dans certains cas sélectionnés, être traitées par voie chirurgicale, sinon elles le sont par chimiothérapie. Les métastases osseuses sont traitées cas par cas par irradiation.

NOUVELLES LOCALISATIONS :

L’apparition de nouvelles localisation est une éventualité fréquente et qui l’est d’autant plus que le pronostic de la tumeur oropharyngée est bon.

Globalement, près d’un tiers des patients développent des « seconds » cancers.

Si ces derniers sont dépistés précocement (examen minutieux des voies aéro-digestives supérieures, fibroscopie œsophagienne), ils peuvent faire l’objet de traitements adaptés à visée curative.

COMPLICATIONS DU TRAITEMENT :

* Après chirurgie, les principales séquelles sont :

– les séquelles masticatoires après hémimandibulectomie (liées à la désaxation de la mandibule restante).

– les troubles de déglutition par amputation basilinguale (fausses routes alimentaires vers le larynx) ou vélique (reflux alimentaire nasal).

– les troubles de l’élocution par amputation, fixité linguale ou par rhinolalie ouverte après résection vélique.

– les curages radicaux entraînent parfois des séquelles douloureuses cervico-scapulaires.

* Après radiothérapie, les principales complications sont :

– l’asialie postradique quasi-constante (tarissements des glandes salivaires irradiées).

– l’odontonécrose si la prophylaxie fluorée n’est pas suivie par le patient.

– l’ostéoradionécrose mandibulaire pouvant aller jusqu’à la fracture mandibulaire.

– le trismus par sclérose de la musculature masticatrice.

– la sclérose cervicale.

– ces complications sont rares.

* Après chimiothérapie peuvent s’installer des complications :

– auditives (sels de platine).

– rénales (sels de platine).

– cardiaques (fluoro-uracile).

– pour ne citer que les médicaments les plus utilisés.

Conclusion :

Les cancers oropharyngés sont fréquents.

Ils touchent surtout l’homme, vers 50 ans, dans un contexte alcoolotabagique majeur.

Ils ont une agressivité locale et ganglionnaire.

La radiothérapie seule ou postopératoire est le traitement le plus fréquent ; la chirurgie a des indications pour certaines extensions ou localisations tumorales.

La survie est mauvaise : 30% à 5 ans, toutes localisations confondues.

Après traitement, les échecs locaux et/ou ganglionnaires et les nouvelles localisations sont les événements le plus souvent rencontrés.

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