Adénopathie cervicale

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Le terme adénopathie est un terme vague servant à désigner les augmentations pathologiques de volume des ganglions, qu’elles soient d’origine inflammatoire ou tumorale. on dit encore adénie.

RAPPELS ANATOMIQUES :

Adénopathie cervicaleLes ganglions lymphatiques cervicaux ont une situation assez fixe pour être identifiés et répertoriés.

Ils sont disposés en amas ou en chaînes. Ils vont drainer la lymphe de territoires donnés selon un schéma dont la constance et la précision sont assez remarquables.

On distingue plusieurs groupes :

* la chaîne jugulo-carotidienne comprend :

– une partie supérieure avec le ganglion sous-digastrique (ou de Kuttner) drainant les lymphatiques venant de toute la région cervicale haute .

– une partie moyenne comprenant le ganglion sous-omo-chyoïdien, situé à mi-chemin entre la mandibule et le creux sus-claviculaire.

– une partie inférieure où se jette le courant lymphatique de la chaîne cervicale transverse.

* la chaîne spinale qui suit en arrière le nerf spinal et qui est également divisée en trois parties : supérieure, moyenne et inférieure.

* la chaîne transverse, horizontale, qui suit la face postérieure de la clavicule le long des vaisseaux cervicaux transverses, et qui comprend le ganglion de Troisier à gauche.

* la chaîne sous-maxillaire et sous-mentale qui suit le bord inférieur de la mandibule dans les loges sous-maxillaires et sous-mentales.

Diagnostic :

DIAGNOSTIC POSITIF :

* L’interrogatoire doit rechercher :

– les antécédents de radiothérapie, de tuberculose, d’interventions ayant porté sur la face ou le cuir chevelu (mélanome).

– la date de l’apparition.

– les signes fonctionnels ORL : dysphagie, otalgie.

* L’examen clinique doit être complet :

– il permet de préciser le siège de l’adénopathie, sa taille, sa consistance, sa sensibilité ainsi que sa mobilité par rapport au plan profond et à la peau.

– l’examen ORL est systématique et peut être complété par une nasofibroscopie en consultation ou une panendoscopie au bloc opératoire.

– l’examen général doit rechercher d’autres ganglions au niveau des territoires axillaires et inguinaux, une hépato-splénomégalie…

* Les examens complémentaires :

– le bilan minimal : NFS, IDR, radiographie pulmonaire, radiographie cervicale de face (rayon mou à la recherche de calcifications).

– plus ciblés, si points d’appel : « MNI-test », test de Paul-Bunnell-Davidsohn, toxoplasmose, rubéole, VIH, TPHA, VDRL, myélogramme.

– la ponction ganglionnaire ou la cervicotomie exploratrice avec examen histologique extemporané fera le diagnostic dans certains cas.

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL :

Il faut différencier ce qui n’est pas une adénopathie cervicale.

* Les fausses tuméfactions cervicales, qui correspondent à des particularités anatomiques :

– l’apophyse transverse de l’atlas.

– la saillie du tubercule de Chassaignac (C6).

– la grande corne de l’os hyoïde.

* Les tuméfactions vasculaires :

– anévrisme carotidien.

– bulbe carotidien athéromateux.

– phlébectasie jugulaire.

– tumeur glomique.

* Les kystes congénitaux :

– kyste du tractus thyréoglosse.

– kystes branchiaux (kyste amygdaloïde).

* Les tuméfactions glandulaires :

– sous-maxillaires.

– parotidiennes.

– thyroïdiennes.

Le diagnostic étiologique et la conduite thérapeutique dépendent du contexte.

Adénopathie cervicale aigue :

ÉTIOLOGIE INFECTIEUSE :

Les adénopathies cervicales aiguës sont le plus souvent secondaires à une infection de la bouche, du pharynx, des dents, des gencives ou de la peau :

– il faut rechercher une angine, une gingivite, une dermatite et les traiter.

– il faut éliminer un kyste amygdaloïde surinfecté, une sous-maxillite aiguë lithiasique, une cellulite d’origine dentaire…

On peut distinguer deux stades :

* au stade congestif :

– le ganglion est augmenté de volume, douloureux, chaud avec parfois une péri-adénite. Il est mobile.

– une antibiothérapie s’impose.

– l’évolution peut se faire vers la résolution ou vers le stade suivant.

* au stade suppuré :

– il apparaît une fluctuation. Un drainage chirurgical s’impose et l’antibiothérapie sera adaptée au germe.

– l’évolution peut se faire vers la fistulisation ou vers l’adénophlegmon.

– la complication la plus fréquente est l’adénophlegmon.

ADENOPATHIES METASTATIQUES :

Devant un terrain évocateur, il faut rechercher un cancer.

En effet, certaines adénopathies métastatiques ont une allure évolutive aiguë.

Adénopathie cervicale chronique :

L’adénopathie cervicale chronique évolue depuis plus de 3 semaines, sans infection aiguë ou subaiguë locale ou générale évidente.

Ce type d’adénopathie pose un problème diagnostique parfois difficile.

Deux situations cliniques différentes peuvent être schématiquement envisagées.

CAS DE L’HOMME D’AGE MOYEN, ALCOOLOTABAGIQUE :

Dans le cas d’un homme d’âge moyen (40 à 50 ans), alcoolotabagique chez lequel l’adénopathie est dure, il faut s’orienter vers une adénopathie métastatique d’un épithélioma des voies aérodigestives supérieures.

* L’interrogatoire recherche :

– une dysphagie.

– une dysphonie, une dyspnée…

– une otalgie, une odynophagie…

* L’examen clinique comprend :

– l’inspection et la palpation de la cavité buccale, l’oropharynx.

– l’examen des fosses nasales par rhinoscopie antérieure et postérieure.

– l’examen du pharynx et du larynx à l’aide du miroir ou du nasofibroscope.

– la palpation de la thyroïde.

– l’inspection de la peau à la recherche de lésion cutanée (grain de beauté…).

Deux situations peuvent alors être envisagées :

* un carcinome épidermoïde ORL est découvert :

– une panendoscopie sous anesthésie générale est programmée pour un bilan d’extension, des biopsies et la recherche d’une seconde localisation.

– l’indication thérapeutique serait fonction de la lésion primitive, du bilan d’extension et de l’état général du patient.

* aucune lésion n’est retrouvée, une panendoscopie sous anesthésie générale est effectuée : soit une lésion est retrouvée et un bilan complet sera entrepris, soit aucune lésion n’est découverte. Alors, dans le même temps opératoire (patient prévenu d’avance de cette éventualité), une cervicotomie exploratrice avec examen anapathologique est effectuée :

– si l’examen anapathologique est en faveur d’une tumeur bénigne : exérèse et surveillance.

– s’il est en faveur d’une métastase d’un carcinome épidermoïde : curage complet puis radiothérapie cervicale et surveillance.

– s’il est en faveur d’un autre type de tumeur maligne : typage et traitement.

CAS DE L’ADULTE PLUS JEUNE, EN BON ÉTAT GENERAL :

Dans le cas de l’adulte plus jeune, en bon état général, l’adénopathie est ferme, le plus souvent multiple.

Il faut s’orienter vers une adénopathie infectieuse, inflammatoire ou une hémopathie.

Adénopathies infectieuses :

* La tuberculose :

– terrain : contage, sujet transplanté, absence de vaccination, VIH :

– adénopathie le plus souvent ramollie, pouvant adhérer à la peau.

– IDR, radiographie du thorax, analyse bactériologique du liquide de ponction ; parfois seule l’exérèse chirurgicale avec analyse bactériologique et histologique permettra d’établir le diagnostic.

– évolution possible vers la calcification, la fistulisation.

– traitement médical par trithérapie ou quadrithérapie.

– l’indication chirurgicale se pose essentiellement devant les ganglions volumineux ou collectés.

* La mononucléose infectieuse :

– notion de contage (incubation de 1 à 2 mois).

– angine érythématopultacée ou pseudo-membraneuse, asthénie.

– splénomégalie, hépatomégalie.

– hyperleucocytose modérée avec hyperlymphocytose.

– « MNI-test » et test de Paul-Bunnell-Davidsohn positifs.

– le traitement associe repos et corticothérapie dans les formes invalidantes.

* La toxoplasmose :

– notion de contage : ingestion de viandes peu cuites, contact avec des chats.

– le plus souvent latente, elle se manifeste par une polyadénopathie ferme, sous-occipitale et/ou sous-maxillaire.

– syndrome mononucléosique à l’hémogramme.

– sérologie positive avec augmentation des taux d’anticorps à deux prélèvements successifs.

– le traitement repose sur l’antibiothérapie par la spiramycine.

* La maladie des griffes de chat :

– transmise par voie cutanée, elle succède à des griffures de chat.

– adénopathies satellites d’une lésion cutanée.

– elles sont souvent ramollies, la fistulisation est possible.

– l’IDR à l’antigène spécifique est positive.

– le traitement repose sur des tétracyclines.

* La tularémie :

– notion de contage : chasseur…

– conjonctivite ou angine unilatérale.

– l’IDR à la tularine positive, sérologie.

– le traitement repose sur des tétracyclines.

* La syphilis :

– notion de contage.

– chancre buccal ou pharyngé indolore, non induré, non inflammatoire.

– polyadénopathie ferme, indolore, mobile.

– TPHA, VDRL.

– prélèvement du chancre avec examen au microscope à fond noir.

– le traitement repose sur l’antibiothérapie.

* L’infection par le VIH.

Adénopathies inflammatoires :

* La sarcoïdose :

– adulte, le plus souvent jeune.

– association à d’autres adénopathies, une splénomégalie, une hépatomégalie.

– augmentation de VS, augmentation du taux sérique de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, une anergie tuberculinique.

– radiographie de thorax à la recherche d’adénopathies médiastinales.

– granulome épithélioïde gigantocellulaire à l’examen histologique.

* L’adénopathie dysimmunitaire et allergique :

– lupus érythémateux disséminé.

– polyarthrite rhumatoïde.

– syndrome de Gougerot-Sjögren.

– maladie de Still.

Hémopathies :

* La maladie de Hodgkin :

– adulte jeune, adénopathie de volume modéré, ferme, indolore et ayant grossi rapidement.

– signes d’accompagnement inconstant : sueurs nocturnes, prurit, hépato-splénomégalie…

– présence de cellules de Sternberg à la ponction ganglionnaire.

– examen histologique pour typage.

* Les lymphomes malins non hodgkiniens.

* Les autres maladies hématologiques.

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