OEdème angioneurotique héréditaire et acquis

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Introduction :

Appelé en 1882 angionévrose par Quincke, l’OAN doit sa dénomination actuelle à Strubing (1885).

Ce terme avait été choisi du fait de l’hypothèse physiopathogénique de l’époque faisant intervenir une anomalie du contrôle nerveux des capacités transsudatives des parois vasculaires.

Les formes héréditaires sont connues depuis 1888, la reconnaissance de leur mode de transmission datant de 1917.

OEdème angioneurotique héréditaire et acquisLa relation entre cette maladie et le déficit en C1-INH a été mise en évidence en 1963.

Le gène défectif a été identifié et cloné en 1986.

Les premiers cas de formes acquises associées à une hémopathie ont été rapportés dès 1972.

Actuellement, l’OAN constitue une entité clinicobiologique avec une expression clinique relativement homogène et une expression biologique caractérisée par un déficit fonctionnel de l’activité du C1-INH de causes variées.

Diagnostiquer précocement l’affection est très important pour limiter la mortalité lors des épisodes aigus, mais ce diagnostic est en fait souvent retardé.

Principales caractéristiques de l’inhibiteur de la C1 estérase :

Le C1-INH est une glycoprotéine de 105 kDa, formée d’une chaîne polypeptidique de 478 acides aminés et d’une fraction glucidique riche en acide sialique.

Le gène du C1-INH est localisé sur la région q13 du chromosome 11 ; il comporte approximativement 17 000 paires de bases.

Le C1-INH est synthétisé par les hépatocytes et les monocytes, l’interféron gamma étant un puissant stimulant de la synthèse monocytaire.

Sa demi-vie est d’environ 64 heures. Comme l’antithrombine III, l’alpha-1-antitrypsine et l’angiotensinogène, le C1-INH est un inhibiteur de protéases appartenant à la famille des serpines.

Cette famille de protéines inactive son substrat en formant un complexe stable avec lui.

Ainsi, le C1-INH forme un complexe avec le C1r et le C1s activés [C1r-C1s-(C1-INH)2] (qui sont des sous-unités dont la réunion forme une protéine C1 fonctionnelle), première étape de l’activation du complément par la voie classique.

Ce complexe initialement réversible devient stable après libération d’un peptide de la partie C terminale du C1-INH.

Le déficit fonctionnel en C1-INH conduit à un clivage du C2 et du C4 avec activation de la partie initiale de la voie classique, principalement en amont du clivage du C3.

Celui-ci reste en effet partiellement inhibé par le facteur I et la C4BP (C4 binding protein). L’activité du C1-INH n’est pas limitée au système complémentaire.

Il régule également le système contact et la fibrinolyse par inhibition de la kallikréine, du facteur XII, du facteur XI, et à un moindre degré, de la plasmine et de l’activateur tissulaire du plasminogène.

L’activation du facteur de Hageman (XIIa) provoque donc la consommation de C1-INH et favorise la survenue des crises, ce qui permet de comprendre le rôle déclenchant des traumatismes dans la pathogénie de l’OAN.

Les poussées d’OAN s’accompagnent d’une activation du système kallikréine-kinine, et à un moindre degré, de la partie terminale de la cascade du complément, du système de la coagulation, compensées par l’activation de la fibrinolyse et des polynucléaires neutrophiles.

Ces actions variées expliquent la multiplicité des facteurs intervenant dans la genèse des lésions incluant la bradykinine, la thrombine et probablement de nombreux autres agents vasoactifs.

Classification des oedèmes angioneurotiques :

A – OEDÈME ANGIONEUROTIQUE HÉRÉDITAIRE :

Les formes héréditaires ont une prévalence faible, estimée en Italie à 1/50 000.

Cette relative rareté serait en faveur d’une mutation récente, les familles avec atteinte de plus de deux générations étant rares.

Il existe en effet parfois un contexte familial évocateur, mais parfois également aucun contexte, car la mutation s’est produite de novo. Une enquête familiale est toujours indispensable.

Il s’agit d’une maladie transmise sur un mode autosomique dominant avec une pénétrance variable, les cas sporadiques (20 à 30 %) étant fréquents.

Dans la forme la plus commune, ou OAN héréditaire de type I, les malades ont un déficit de la protéine C1-INH, son taux sérique étant généralement évalué entre 5 et 30 % de la normale.

Ce taux bas, nettement inférieur à 50 %, est lié non seulement à la présence d’un seul allèle produisant la protéine normale, mais aussi à une augmentation de son catabolisme avec rétention et destruction de la protéine anormale dans le compartiment cellulaire.

Dans la forme héréditaire de type II, le taux de C1-INH est normal ou élevé alors que l’activité fonctionnelle de la protéine est diminuée.

Les deux allèles codent une protéine C1-INH antigéniquement normale, alors qu’une seule d’entre elles est fonctionnelle. L’autre garde une synthèse et une sécrétion normale avec anomalie de la zone réactive avec le substrat.

Les prévalences de ces deux formes héréditaires sont estimées dans la littérature à 85 % pour le type I, et 15 % pour le type II.

D’après le registre national francais, ces prévalences sur le territoire national seraient plutôt respectivement de 98 et 2 %.

En 1986, un troisième type héréditaire a été décrit avec formation d’un complexe C1-INH-albumine, non universellement reconnu. Quel que soit le type, les anomalies moléculaires sont hétérogènes avec des mutations structurales ou non structurales variées incluant de larges délétions, des duplications et des substitutions d’une seule base.

Le gène codant pour le C1-INH est localisé sur le bras long du chromosome 11, et le transcrit protéique, d’une longueur de 478 acides aminés, est ensuite clivé par des protéases sur un acide aminé critique en position 444, une arginine.

La principale mutation rencontrée dans les OAN de type II concerne le codon de l’arginine, celle-ci étant alors remplacée le plus souvent par une histidine, ce qui rend le C1-INH insensible à l’action des protéases.

Une mutation touchant la lysine en position 251 a également été rapportée à plusieurs reprises.

Elle pourrait modifier la conformation tertiaire de la protéine.

Enfin, des recombinaisons homologues des séquences répétées de type Alu (séquences répétées tout au long du génome, de répartition unique chez un individu et servant ainsi de marqueur génétique) des introns du gène peuvent aboutir à des délétions étendues de la partie codante du gène, jusqu’à quatre exons.

Ces délétions sont retrouvées chez 20 % des malades présentant un OAN de type I.

B – OEDÈME ANGIONEUROTIQUE ACQUIS :

Les formes acquises de connaissance plus récente sont encore plus rares ; elles ont été également classées en deux types.

Dans le type I, l’activité fonctionnelle basse du C1-INH résulte d’une consommation excessive liée à une activation de la voie classique du complément.

En témoigne l’augmentation du catabolisme du C1-INH démontrée par Melamed et al.

Ces formes sont le plus souvent associées à un syndrome lymphoprolifératif bénin ou malin de la lignée B (lymphomes non hodgkiniens, leucémies lymphocytaires chroniques, myélome, gammapathies monoclonales bénignes…).

Jusqu’à ce jour, un seul cas a été décrit en association avec un lymphome T.

La consommation peut être induite dans certains cas par des anticorps anti-idiotypes réagissant avec la gammapathie monoclonale exprimée à la surface ou dans le cytoplasme de la prolifération B.

Cette dernière peut être de type immunoglobulines (Ig)G, IgM, IgA ou IgD, avec une chaîne légère kappa ou lambda.

Ailleurs, la consommation est plus rarement provoquée par une cryoglobuline ou des complexes immuns d’origine auto-immune ou infectieuse. Une observation a été rapportée associée à un adénocarcinome rectal.

La forme acquise de type II est théoriquement caractérisée par l’absence de prolifération B ou d’autre maladie associée, la présence d’anticorps anti-C1-INH souvent oligoclonaux et d’une forme circulante inactive du C1-INH de faible poids moléculaire (95 kDa).

Cette dernière résulte de la déstabilisation par les anticorps anti-C1- INH du complexe protéase-C1-INH clivé (le C1-INH étant clivé par la protéase après sa liaison avec elle) et de la libération plasmatique de la forme clivée et inactive de C1-INH, de 95 kDa de poids moléculaire.

En fait, cette distinction est très arbitraire car des observations ont été rapportées d’OAN acquis associés à une gammapathie monoclonale avec activité anti-C1-INH et/ou prolifération B.

De plus, les épitopes reconnus par les anticorps anti-C1-INH sont en fait hétérogènes, d’où la possibilité de présence d’un C1-INH de taille normale avec autoanticorps anti-C1-INH.

Au cours du lupus, des oedèmes peuvent s’intégrer dans le cadre d’une vasculite urticarienne, alors généralement associés à des lésions urticariennes par vasculite et à la présence d’anticorps anti-C1q.

Le C1-INH peut alors être exceptionnellement abaissé, probablement par consommation, réalisant un tableau clinicobiologique d’OAN acquis de type I.

Dans d’autres cas existent des autoanticorps anti-C1- INH associés à des oedèmes réalisant un tableau d’OAN acquis de type II.

Aspects cliniques :

En dehors de l’âge de début, précoce dans les formes héréditaires (le plus souvent avant l’âge de 20 ans) et tardif dans les formes acquises (généralement après 50 ans), le tableau clinique de l’OAN est similaire quel qu’en soit le type.

L’affection évolue par poussées de 2 à 8 jours, avec des oedèmes récidivants.

Chaque poussée est caractérisée par la présence d’oedèmes segmentaires d’intensité et de fréquence variables, localisés principalement au tissu sous-cutané (91 %), au tube digestif (73 %) et aux voies aériennes supérieures (48 %).

Des circonstances déclenchantes des poussées sont identifiées dans près de la moitié des cas.

Il s’agit essentiellement de traumatismes physiques ou psychiques, notamment soins dentaires ou émergence des dents chez l’enfant, plus rarement d’infections.

Chez la femme, les estrogènes sembleraient pouvoir également avoir un rôle déclenchant des poussées, alors rythmées par le cycle menstruel ou survenant uniquement lors de la prise d’estroprogestatifs à visée anticonceptionnelle ou substitutive.

Quant aux grossesses, elles ont, selon les séries, un rôle favorable, neutre ou aggravant.

L’amélioration des symptômes après la ménopause est très inconstante.

Toute intervention chirurgicale, notamment toute endoscopie ou pose de plâtre, peut être dangereuse.

A – ATTEINTE SOUS-CUTANÉE :

Les principaux sites concernés sont, par ordre de fréquence, les extrémités des membres, le visage, surtout la région péribuccale, les organes génitaux, les seins.

Les oedèmes sont durs, fixes, progressivement croissants en 24-36 heures, régressant en 1 à 3 jours. Entre les crises, la peau reprend un aspect strictement normal.

Habituellement indolores, non prurigineux et non érythémateux, les oedèmes sont parfois douloureux. Ils ne s’accompagnent généralement pas d’urticaire.

Dans près d’un tiers des cas sont présentes cependant des lésions non prurigineuses d’allure urticarienne, souvent figurées pouvant prêter à confusion avec une urticaire ; elles ne sont néanmoins ni prurigineuses, ni douloureuses.

Ces lésions cutanées peuvent également prendre un aspect érythémateux ou simuler un érythème marginé ou un érythème polymorphe.

B – ATTEINTE DIGESTIVE :

Elle se manifeste par un syndrome occlusif avec des douleurs abdominales, volontiers à type de crampes, avec nausées, vomissements souvent abondants, parfois suivis d’une diarrhée hydrique pouvant être responsable d’hypovolémie.

Il n’y a pas de signes entre les crises.

Il peut s’y associer une ascite par extravasation de l’oedème dans la cavité péritonéale, un syndrome obstructif visible sur les radiographies.

L’épaississement pariétal des anses intestinales ainsi qu’un épanchement déclive peuvent être mis en évidence par l’échographie abdominale.

L’aspect scanographique peut simuler une tumeur digestive.

Ces symptômes ont conduit à une laparotomie exploratrice dans 14 à 34 % des cas de deux grandes séries de la littérature.

Entre les crises, les signes digestifs sont absents et l’examen abdominal normal.

C – ATTEINTE LARYNGÉE :

L’oedème laryngé fait toute la gravité de la maladie, responsable des décès observés principalement chez les malades sans prise en charge thérapeutique.

L’obstruction des voies aériennes supérieures débute très progressivement par une dysphonie avec respiration bruyante et dysphagie précédant de plusieurs heures l’apparition de la dyspnée laryngée.

Le risque d’asphyxie peut conduire à pratiquer une trachéotomie en l’absence de traitement spécifique.

D – AUTRES MANIFESTATIONS CLINIQUES :

Elles sont moins fréquentes.

Des céphalées, une épilepsie, une aphasie ou une hémiplégie peuvent témoigner d’un oedème cérébral.

Une rétention d’urines ou des manifestations d’infection urinaire, observées particulièrement chez la femme, sont probablement en rapport avec un oedème des uretères, de l’urètre, de la vessie ou des tissus avoisinants.

Des pancréatites aiguës récidivantes ont été reliées à un oedème pancréatique avec obstruction partielle des canaux excréteurs.

Les oedèmes bronchiques ou pulmonaires sont exceptionnels en raison de l’inactivation de la bradykinine par les enzymes de surface bordant l’endothélium des vaisseaux pulmonaires.

Toutefois, des épanchements pleuraux avec toux ont été rapportés.

Anatomopathologie :

Habituellement, le diagnostic d’OAN est clinique.

Si la biopsie cutanée était réalisée, elle montrerait essentiellement un oedème hypodermique ou sous-cutané sans infiltrat inflammatoire.

L’oedème laryngé est caractérisé par une spongiose dans l’épithélium avec formation de vacuoles cytoplasmiques et par un oedème sousmuqueux.

L’oedème jéjunal prédomine dans la lamina propria, et plus particulièrement dans la partie superficielle des villosités.

L’augmentation de la perméabilité vasculaire est associée à la constitution de fenêtres entre les cellules endothéliales des veinules postcapillaires.

En microscopie électronique, l’aspect plissé et indenté des noyaux témoigne d’une contraction des cellules endothéliales.

Les mastocytes avoisinants apparaissent dégranulés, témoignant probablement d’une décharge d’histamine dont le rôle cependant apparaît mineur comme le suggère l’inefficacité des antihistaminiques.

Maladies associées :

Les déficits héréditaires en C1-INH comme les déficits en fractions du complément sont associés de façon non fortuite à certaines maladies auto-immunes.

Ainsi, la prévalence du lupus serait 200 fois plus élevée en présence d’OAN héréditaire que dans la population témoin.

Dans une autre étude, il a été estimé que 2 % des malades avec OAN héréditaire pourraient avoir un lupus.

Il s’agit de lupus érythémateux aigus disséminés ou de lupus cutanés de type discoïde ou subaigu, ces derniers étant plus souvent associés à l’OAN héréditaire de type II.

Un déficit en protéine S libre avec un taux subnormal de protéine S totale sans événement thrombotique a été rapporté dans un cas.

Dans un autre cas sans lupus ni anticorps antiphospholipides a été observée une nécrose cutanée extensive au cours de la grossesse avec résistance à la protéine C activée.

Des glomérulonéphrites mésangiales ou membranoprolifératives ont également été signalées en l’absence de lupus dans les deux types d’OAN héréditaire et une néphropathie à IgA dans l’OAN de type I.

D’autres associations ont été décrites, notamment avec une polyarthrite rhumatoïde, un syndrome de Gougerot-Sjögren, des thyroïdites, un déficit en IgA, une vasculite coronarienne, des colites inflammatoires, une anémie de Biermer.

Enfin, chez la femme existeraient volontiers des ovaires kystiques (polykystiques ou multifolliculaires) avec des taux sériques élevés de â-endorphines.

Les nombreuses maladies associées aux formes acquises ont déjà été envisagées dans la classification des OAN.

Au cours des syndromes lymphoprolifératifs, la prévalence des déficits en C1-INH serait d’environ 0,5 %.

Ils touchent surtout les proliférations lymphocytaires B, d’apparition souvent tardive chez un sujet âgé.

Examens biologiques :

Au cours des épisodes d’oedèmes, la numération est le plus souvent normale ; il peut exister cependant une hyperleucocytose, une érythrocytose, une hypernatrémie, notamment en cas de lésions abdominales avec déshydratation extracellulaire.

Dans tous les types, il existe un abaissement du C2 ou du C4 avec un C3 normal ou subnormal, ces dosages des protéines complémentaires étant les premiers à demander.

Ces anomalies sont nettes au cours des poussées, pouvant persister en période de rémission.

Le CH50 est normal, parfois diminué.

Alors que le dosage antigénique du C1-INH est parfois normal, voire élevé, le dosage fonctionnel est toujours abaissé.

Il est nettement plus difficile à réaliser, et demandé exceptionnellement, en pratique quand le dosage quantitatif du C1 est normal ou élevé.

Le diagnostic des formes héréditaires peut être réalisé à la naissance par un prélèvement sanguin du cordon ombilical.

Une paraprotéine est habituelle au cours de la forme acquise de type I et des anticorps anti-C1-INH mis en évidence dans la forme acquise de type II.

La concentration antigénique ou fonctionnelle du C1-INH n’est généralement pas corrélée à la gravité de la maladie.

Diagnostic différentiel :

Il se pose essentiellement avec les formes acquises d’OAN, étant donné le caractère non héréditaire de toutes les affections discutées.

A – OEDÈMES DE QUINCKE D’ORIGINE ALLERGIQUE :

Ils ont théoriquement une topographie différente touchant préférentiellement les paupières et la lèvre supérieure alors que l’atteinte des mains est plus évocatrice d’OAN.

Il n’existe habituellement pas d’anomalie complémentaire. Les causes en sont variées.

B – VASCULITES :

Au cours des vasculites, un oedème segmentaire traduit le plus souvent une atteinte musculaire.

La présence d’autres lésions dermatologiques de vasculite permet de redresser aisément le diagnostic.

En leur absence, l’existence d’une atteinte digestive peut augmenter la confusion avec un OAN.

Les autres atteintes viscérales de vasculite sont cependant différentes, notamment l’atteinte rénale.

Dans les vasculites urticariennes, les lésions urticariennes sont constantes et les oedèmes de Quincke fréquents. Les dosages du complément et de ses fractions sont normaux en dehors de la vasculite urticarienne hypocomplémentémique ou maladie de Mac Duffie.

Biologiquement, il existe alors par définition dans cette dernière affection une hypocomplémentémie portant surtout sur le C1q avec des anticorps de type IgG dirigés contre la fraction pseudocollagénique du C1q. Les taux de C3 et de C4 sont volontiers également abaissés.

L’association à un lupus est classique.

En son absence, des facteurs antinucléaires sont présents dans la moitié des cas, théoriquement sans anticorps anti-acide désoxyribonucléique (ADN) double brin, ni anticorps anti-Sm, ni anticorps anti-ENA.

C – OEDÈME DE LA TRICHINOSE :

Il apparaît vers le dixième jour après l’infestation et la phase douloureuse fébrile aiguë.

Il est localisé au visage, diffus ou localisé aux zones périorbitaires, avec une conjonctivite et des céphalées.

Le diagnostic, fortement suggéré par la clinique et l’hyperéosinophilie, impose un traitement rapide avant la confirmation par la sérologie et la biopsie musculaire.

D – SYNDROME DE GLEICH :

Des oedèmes prurigineux récidivants associés à un syndrome hyperéosinophilique sont observés dans l’exceptionnel syndrome de Gleich.

L’hyperéosinophilie est alors constante.

La prise de poids cyclique en est un signe important, et il existe fréquemment une oligurie.

E – SYNDROME DE MELKERSSON-ROSENTHAL :

L’oedème, surtout labial, est d’évolution plus prolongée, d’abord intermittent puis permanent.

Il est associé à une langue plicaturée et à une paralysie faciale périphérique récidivante.

Il s’agit d’une maladie rare, survenant entre la deuxième et la quatrième décennie, sans prédominance de sexe ou de race avec une prédisposition familiale.

Il existe des formes incomplètes.

F – SYNDROME DE FUITE CAPILLAIRE IDIOPATHIQUE :

L’oedème du visage et/ou des membres inférieurs évolue par poussées, souvent associées à des douleurs abdominales avec ou sans diarrhée.

La fuite capillaire entraîne une hypovolémie sévère pouvant aller jusqu’au collapsus.

La biologie montre, outre l’augmentation de l’hématocrite et la baisse de l’albuminémie, une gammapathie monoclonale bénigne ou maligne, presque constante.

Certaines formes sont iatrogènes, secondaires par exemple aux perfusions d’interleukine 2.

Traitement :

Le but du traitement est de prévenir l’apparition des poussées comportant un risque vital, qu’un facteur déclenchant des poussées soit ou non prévisible, et de faire disparaître les poussées quand elles ont lieu.

Ainsi est-il nécessaire d’envisager trois modalités différentes de traitement : le traitement prophylactique à long terme, le traitement prophylactique à court terme et le traitement de la crise.

Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine sont dans tous les cas contre-indiqués car ils induisent une élévation des taux de bradykinine secondaire à l’inhibition de sa dégradation, favorisant l’apparition des oedèmes.

Les traitements hormonaux contenant des estrogènes sont déconseillés chez la femme.

A – TRAITEMENT PROPHYLACTIQUE À LONG TERME :

Dans les formes héréditaires, ce traitement repose sur les stéroïdes dits anabolisants et, à un moindre degré, sur les antifibrinolytiques.

1- Androgènes :

Parmi les androgènes, seuls ceux alkylés en 17-á augmentent la synthèse du C1-INH par les hépatocytes.

Leur efficacité dans la prévention à long terme est largement admise bien qu’il n’existe aucune étude en double aveugle.

Ils sont d’intérêt beaucoup plus limité dans le traitement de la crise du fait de leur long délai d’action.

Leur toxicité potentielle, généralement dose dépendante, rend indispensable l’évaluation pour chaque malade du rapport bénéfice-risque iatrogène.

Ils ont en effet de nombreux effets secondaires : discrète virilisation, aménorrhée ou troubles des règles chez la femme, diminution de la libido chez l’homme, prise de poids (30 % des cas), élévation tensionnelle, crampes, myalgies, fatigue, céphalées, hépatopathie (péliose, élévation des enzymes de cholestase essentiellement) avec risque théorique de cancer du foie.

Les complications rénales sont rares mais possibles (protéinurie, glomérulopathie mésangiale sans dépôts).

Ces inconvénients incitent à n’entreprendre un traitement prophylactique qu’en cas d’épisode antérieur avec oedème laryngé ou de poussées fréquentes (une ou plusieurs par mois) entravant la vie sociale.

Il faut rechercher, pour chaque malade, la dose minimale efficace clinique sans chercher à corriger les anomalies biologiques nécessitant des doses plus élevées.

Habituellement, C1-INH et lC4 restent abaissés alors que C2 remonte volontiers à 50 % de sa valeur normale.

En France, le produit le plus utilisé est le danazol, le stanozolol n’étant plus commercialisé.

La dose moyenne est de 50 à 200 mg/j de danazol avec possibilité de thérapeutique alternée 1 jour sur 2 ou 3.

Ces faibles posologies, même si elles ne corrigent pas toujours les anomalies biologiques, préviennent néanmoins efficacement les crises et permettent en règle une bonne tolérance au long cours.

Ces androgènes sont toutefois contre-indiqués chez l’enfant, la femme enceinte et les malades atteints d’hépatopathie.

La norgestriénone pourrait être une alternative thérapeutique chez la femme ; ses résultats sont en fait inconstants.

Il faut suivre régulièrement les chiffres de tension artérielle.

Le traitement est mieux supporté chez la femme ménopausée (moins de tension mammaire et de signes de virilisation, notamment moins de raucité de la voix).

2- Antifibrinolytiques :

Parmi les antifibrinolytiques, l’acide e-aminocaproïque a été le premier testé avec des résultats indiscutables à la dose de 8 à 10 g/j et de nombreux effets secondaires (hypotension orthostatique, nausées, céphalées, diarrhée, myosite, myonécrose, tendance thrombotique…).

Aussi, un dérivé cyclique de l’acide eaminocaproïque, l’acide tranéxamique, plus facile d’utilisation et d’activité antifibrinolytique comparable, a également été testé.

Dans l’expérience d’Agostini et Cicardi, il a eu un effet bénéfique à la dose de 1 à 4 g/j dans 70 % des cas, avec cependant un effet cliniquement satisfaisant chez seulement 28 % des cas. Pour ces raisons, ce traitement n’est plus utilisé qu’en deuxième intention, réservé pour certains aux enfants ayant une contre-indication majeure aux androgènes.

Leur potentiel oncogène à long terme et leur toxicité rétinienne démontrée chez l’animal doivent inciter à une grande prudence quant à leur utilisation à long terme.

3- Concentrés de C1-INH :

En cas de crises fréquentes chez des malades avec contre-indication ou résistance aux androgènes et aux antifibrinolytiques, des perfusions tous les 3 jours de concentrés de C1-INH (25 unités de plasma/kg) ont un effet préventif des crises démontré dans un essai en double aveugle.

Le produit, d’origine humaine, est disponible dans les centres de transfusion sanguine.

Les modes de préparation actuelle du C1-INH, chauffé à la vapeur, éliminent théoriquement toute contamination par les virus des hépatites et le virus de l’immunodéficience humaine.

Il doit être préféré aux perfusions de plasma frais congelé.

4- Norgestriénone :

Progestatif utilisé pour la contraception à la dose de 0,350 mg/j (un comprimé), il a été rapporté comme efficace dans certaines observations.

Il faut savoir que cet effet est très inconstant et, en pratique, ce progestatif est réservé aux femmes résistantes ou intolérantes au danazol.

5- Traitement des formes acquises :

Le traitement curatif de la maladie associée permet souvent de faire disparaître l’OAN, qu’il s’agisse d’une hémopathie ou d’un lupus.

Lorsque celle-ci ne justifie pas d’un traitement agressif, ou en cas de persistance de l’OAN malgré son traitement, les androgènes peuvent être proposés avec des résultats inconstants.

Dans les formes acquises de type II auto-immunes, l’acide tranéxamique est souvent prescrit de première intention du fait du caractère très aléatoire de l’effet des androgènes.

Ailleurs, les immunosuppresseurs éventuellement associés à des plasmaphérèses ont donné des résultats satisfaisants dans des observations isolées.

B – PROPHYLAXIE À COURT TERME DES CRISES :

Elle doit être envisagée avant toute intervention, soins dentaires ou examen invasif (endoscopie).

Dans les formes héréditaires, le traitement de référence est le danazol prescrit 6 jours avant et 3 jours après, à la dose de 600 mg/j.

Ces traitements courts sont parfaitement tolérés. L’acide tranéxamique ou des concentrés de C1-INH sont des alternatives thérapeutiques. Les infections bactériennes justifieront d’une antibiothérapie précoce.

C – TRAITEMENT DE LA CRISE :

Il n’est envisagé qu’en cas d’inconfort majeur ou de risque vital (ce qui ne correspond pas, loin s’en faut, à tous les malades).

Théoriquement, les oedèmes ne répondent pas à l’épinéphrine ni aux antihistaminiques.

L’acide tranéxamique à fortes doses (1g toutes les 3 à 4 heures per os pendant 12 à 15 heures) n’est efficace que s’il est prescrit au tout début de la crise, avant l’apparition des oedèmes, ce qui réduit considérablement son intérêt dans cette indication.

L’efficacité des perfusions de C1-INH purifié a été démontrée dans une étude en double aveugle.

Dans cette étude, la perfusion de concentrés de C1-INH purifié à la dose de 25 unités de plasma/kg s’est accompagnée d’une diminution de l’oedème muqueux en ½ heure alors que les oedèmes cutanés se résorbaient plus lentement.

En pratique, trois ampoules de 10 mL (500 UI/ampoule) de C1-INH sont injectées très lentement (5 minutes) dans la tubulure de la perfusion, avec 2 minutes d’intervalle entre chaque ampoule.

Dans les formes acquises, des doses beaucoup plus importantes sont souvent nécessaires du fait de l’inactivation du C1-INH perfusé par les anticorps.

Le métoclopramide, les antispasmodiques et la réhydratation sont des traitements symptomatiques parfois utiles, notamment dans les formes abdominales.

Les glucocorticoïdes ont un effet très discuté. Ils peuvent être actifs à condition d’utiliser de fortes posologies (500 à 1 000 mg intraveineux de méthylprednisolone).

Conclusion :

En conclusion, l’OAN par déficit en C1-INH exige un diagnostic précoce, car il s’agit d’une affection grave pour laquelle existe actuellement un traitement préventif et curatif efficace.

La diversité des formes cliniques, génétiques ou acquises, explique les difficultés du diagnostic et le retard pris parfois pour l’établir.

Toute manifestation d’oedèmes atypiques doit conduire, dans un premier temps, à doser les différentes fractions du complément.

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