Névralgie du trijumeau

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La névralgie du trijumeau est une douleur faciale intense touchant surtout les sujets de plus de 50 ans. Elle survient par paroxysmes très brefs mais très intenses, entrecoupés d’intervalles libres. Sa topographie est unilatérale et correspond au territoire d’innervation d’une ou de plusieurs branches du nerf trijumeau (V).

Elle peut se bilatéraliser dans 5 % des cas.

Elle peut être déclenchée par une stimulation d’une zone cutanée ou par certains mouvements (mastication, bâillement).

Névralgie du trijumeauL’ examen est strictement normal dans la névralgie essentielle, la moindre anomalie devant faire évoquer une névralgie secondaire à une affection et faire rechercher une cause en s’aidant des données cliniques et d’examens complémentaires, au premier rang desquels arrive l’ IRM.

Une névralgie du V symptomatique peut parfois avoir l’ expression clinique d’une névralgie essentielle. Certains éléments cliniques (terrain : sujet jeune. topographie : atteinte du V1) doivent éveiller les soupçons de l’examinateur.

La névralgie essentielle est de loin la plus fréquente, mais il existe des névralgies symptomatiques d’étiologies diverses.

Parmi les causes les plus fréquentes de névralgies symptomatiques, il faut retenir avant tout les tumeurs de l’angle ponto-cérébelleux (méningiome, neurinome du VIII), le cholestéatome et la sclérose en plaques.

Parmi les causes plus rares, il faut retenir les malformations vasculaires (anévrisme, angiome), un syndrome de Wallenberg, une tumeur du tronc cérébral, la syringobulbie, un envahissement tumoral du ganglion de Gasser par une tumeur primitive de voisinage, le zona, la sarcoïdose, un méningiome du sinus caverneux ou un anévrisme de la carotide intracaverneuse.

Diagnostic positif

ASPECT CLINIQUE :

La douleur constitue le signe majeur :

– elle est paroxystique, discontinue, fulgurante et est ressentie comme une décharge électrique.

– les accès douloureux très intenses surviennent par salves de quelques secondes à une voire deux minutes, entrecoupées de périodes indolores de durées variables.

– ces salves peuvent s’accompagner de tressaillements musculaires de l’hémiface expliquant le nom de “ tic douloureux de la face ”.

– la topographie de la douleur est unilatérale, touchant le plus souvent le territoire d’une ou deux branches du V mais elle peut se bilatéraliser dans 5 % des cas.

La douleur peut être déclenchée, mais elle peut également être spontanée :

– le facteur de déclenchement varie d’un individu à l’autre : parole, mastication, effleurement d’une zone cutanée ou muqueuse.

– dans ce dernier cas, cette zone, appelée “ zone gachette ” (“ trigger zone ”), siège dans le territoire d’innervation de la branche du V concernée par la névralgie.

Névralgie essentielle du trijumeau :

Le début tardif (après 65 ans) de la névralgie essentielle du trijumeau est très fréquent.

Le sex ratio est de trois femmes pour deux hommes.

L’examen neurologique est strictement normal. Toute anomalie constatée doit faire rechercher une autre étiologie.

Névralgies symptomatiques du trijumeau :

Les névralgies symptomatiques du trijumeau ont souvent un profil d’expression clinique différent de celui de la névralgie essentielle :

– l’âge de début est lié à l’affection causale.

– les décharges paroxystiques peuvent se greffer sur un fond douloureux plus ou moins permanent.

– une atteinte sensitive déficitaire du V est souvent trouvée, sous la forme d’une hypoesthésie cornéenne, d’un réflexe cornéen aboli ou encore d’une hypoesthésie d’une partie de l’hémiface (voir les territoires d’innervation sensitive de la face).

– rarement, cette atteinte sensitive est associée à une atteinte motrice du V (muscles masticateurs : muscles temporal, ptérygoïdiens interne et externe, masséter).

– des signes neurologiques en rapport avec la lésion responsable peuvent être présents (voir le diagnostic étiologique : par exemple, signes en rapport avec une tumeur de l’angle ponto-cérébelleux. atteinte du VIII, du VII).

Des éléments cliniques tels que le terrain (sujet jeune) et/ou la topographie de la douleur (intéressant le VI) devront, s’ils sont présents, éveiller les soupçons de l’examinateur.

EXAMENS COMPLEMENTAIRES :

Névralgie essentielle du trijumeau :

Devant un tableau caractéristique de névralgie pure et isolée, le diagnostic positif ne nécessite la réalisation d’ aucune exploration particulière.

De même, aucune des explorations à visée étiologique ne sera demandée car l’expérience prouve que, en règle générale, elles ne parviennent à mettre en évidence aucune cause décelable.

Névralgies symptomatiques du trijumeau :

Pour les névralgies symptomatiques du trijumeau, la nature des examens complémentaires dépend en grande partie de l’origine suspectée.

La nature et les résultats des examens complémentaires, permettant la mise en évidence de la lésion causale, seront évoqués pour chacun d’entre eux dans le cadre du diagnostic étiologique, mais, d’ores et déjà, une grande place est réservée à l’IRM.

IRM cérébrale avec injection de gadolinium

L’IRM cérébrale est pratiquée avec injection de gadolinium :

– les clichés hémisphériques et du tronc cérébral permettent éventuellement de visualiser des lésions de démyélinisation sous la forme d’hypersignaux dans la substance blanche en densité proton, parfois actives en cas de prise de contraste sur les clichés pondérés en T1.

– ils peuvent également mettre en évidence une tumeur du tronc cérébral, une lésion ischémique dans la fossette rétro-olivaire du bulbe à l’origine d’un syndrome de Wallenberg, une syringobulbie.

– une tumeur de l’angle ponto-cérébelleux peut être découverte et des clichés centrés sur les rochers permettent de préciser ses rapports.

Angio-IRM

L’angio-IRM, après l’IRM, peut donner des informations sur une malformation vasculaire située dans le tronc cérébral ou l’angle ponto-cérébelleux.

Diagnostic différentiel

La douleur apparaît tellement caractéristique dans sa plainte et dans son évolution qu’elle prête peu à confusion.

Cependant, il faut savoir écarter :

– une algie vasculaire de la face : la périodicité de la douleur est totalement différente.

– une algie en rapport avec une affection de voisinage : une affection faciale, ORL (sinusite), ou dentaire dans laquelle une douleur paroxystique apparaît souvent sur un fond douloureux.

– une névralgie du glosso-pharyngien : la topographie de la douleur est différente (localisée à l’arrière-gorge), de même que celle de la zone gâchette.

– une algie psychogène qui n’a aucune régularité et entraîne fréquemment une douleur ressentie comme permanente.

Diagnostic étiologique

NÉVRALGIE ESSENTIELLE DU TRIJUMEAU :

La névralgie essentielle du trijumeau (“ maladie de Trouseau ” ou “ tic douloureux de la face ”) est la variété la plus fréquente.

Elle apparaît comme une affection indépendante de toute étiologie.

NEVRALGIES SYMPTOMATIQUES DU TRIJUMEAU :

Causes les plus fréquentes :

Tumeurs de l’angle ponto-cérébelleux

Dans le cas des tumeurs de l’angle ponto-cérébelleux, un méningiome ou un neurinome du VIII et surtout, la lésion expansive compriment une racine sensitive du V.

Intérêt de l’ IRM avec injection de gadolinium (bien plus que la TDM) et clichés centrés sur l’angle ponto-cérébelleux pour mettre en évidence une lésion à développement local de faible volume.

Des explorations comme l’audiométrie, les potentiels évoqués auditifs permettront d’apporter des arguments en faveur d’une des hypothèses.

Cholestéatome

L’expansion d’un cholestéatome ou d’un kyste épidermoïde est visualisée au mieux par l’ IRM du rocher.

Dans la sclérose en plaques

Dans la sclérose en plaques, la lésion siège dans le tronc et touche les fibres efférentes du noyau supérieur du V.

L’ IRM cérébrale visualise les lésions sus-tentorielles et sous-tentorielles en rapport avec l’affection.

Causes plus rares :

Malformations vasculaires

Il s’agit avant tout d’ anévrisme, d’ angiome.

L’IRM est l’examen de première intention et sera complétée par une angio-IRM et/ou une artériographie vertébrale.

Syndrome de Wallenberg, tumeur du tronc cérébral, syringobulbie

Dans le cas d’un syndrome de Wallenberg, d’une tumeur du tronc cérébral, d’une syringobulbie, la lésion touche le noyau supérieur du V ou les fibres efférentes du noyau.

L’IRM permet le diagnostic dans les trois cas.

Envahissement tumoral du ganglion de Gasser

Il peut s’agir aussi d’un envahissement tumoral du ganglion de Gasser ou des branches de division du nerf dans leur trajet par une tumeur primitive de voisinage ou une lésion secondaire visualisée par l’IRM.

Zona

En ce qui concerne le zona, on recherchera une éruption zostérienne dans le territoire du V correspondant.

Sarcoïdose

La sarcoïdose peut être à l’origine d’une atteinte des branches de division du nerf dans leur trajet à la base du crâne :

– recherche de granulomes par l’IRM, en cas de sarcoïdose déjà connue.

– ce type de manifestations peut être une forme d’entrée clinique dans la maladie. Il convient, dans ce cas, de rechercher d’autres signes cliniques et paracliniques de la maladie.

Méningiome du sinus caverneux

La TDM ou l’IRM avec injection mettent en évidence un méningiome du sinus caverneux développé à partir de sa paroi externe.

Anévrisme de la carotide intracaverneuse

L’anévrisme de la carotide intracaverneuse peut entraîner une compression du VI.

Une IRM sera demandée en premier lieu et pourra être complétée par une angio-IRM, voire une artériographie carotidienne, qui précédera la prise en charge thérapeutique.

Causes très rares et causes exceptionnelles :

Tumeurs sus-tentorielles

Dans le cas des tumeurs sus-tentorielles, le volume de la tumeur peut être tel que celle-ci exerce une compression à l’étage sous-tentoriel.

Il existe, dans ce cas, des signes en rapport avec la tumeur elle-même et sa localisation, de même que des signes d’hypertension intracrânienne.

La TDM cérébrale avec injection permet le diagnostic.

Connectivites

Dans le cas des connectivites, en particulier le syndrome de Sharp : présence d’autres signes cliniques en rapport, association à un syndrome de Gougerot-Sjögren, signes biologiques et notamment présence d’anticorps anti-RNP.

Impression basilaire

L’impression basilaire est primitive ou secondaire à une maladie de Paget connue. Le diagnostic repose sur l’IRM qui a surtout un intérêt négatif, ne mettant en évidence aucune autre cause locale et visualisant sur les coupes sagittales cette impression basilaire éventuellement associée à une malformation d’Arnold-Chiari.

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