Aspects cliniques et thérapeutiques de la maladie de Parkinson (Suite)

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* Imagerie fonctionnelle :

La TEP reste potentiellement un outil majeur de diagnostic par le marquage in vivo, à l’aide de L-dopa marquée au 18-fluor, du fonctionnement du système dopaminergique nigrostriatal :

cette application, qui est utile non seulement au début de la phase symptomatique mais aussi au cours de la progression de la maladie, reste peu accessible et d’un coût prohibitif avec la TEP ; toutefois, la tomoscintigraphie monophotonique (tomographie d’émission monophotonique [TEMP] ou single photon emission computed tomography [SPECT]), utilisant pour marquer les terminaisons dopaminergiques striatales un analogue cannabinoïde, le 2-bêta-carboxyméthoxy-3-bêta (4-iodophényl) tropane (bêta-CIT) marqué à l’iode 123, offre déjà une alternative avec des perspectives de développement très prochaines en raison de son coût plus acceptable et de son accessibilité meilleure.

Aspects cliniques et thérapeutiques de la maladie de Parkinson (Suite)L’imagerie fonctionnelle cérébrale peut aussi être utilisée en dehors de préoccupations diagnostiques, pour identifier des anomalies d’activation métabolique des zones cérébrales, notamment au cours de tâches motrices dans la maladie de Parkinson, qu’il s’agisse d’applications en TEP ou en IRM fonctionnelle.

* Imagerie morphologique et spectroscopie :

Il s’agit ici d’applications de la résonance magnétique orientées sur l’identification du contenu moléculaire dans les régions cérébrales : ainsi, l’IRM a pu contribuer à préciser la redistribution du fer entre striatum et SN dans la MPi, tandis que la spectroscopie de résonance magnétique (SRM) peut approcher le processus de mort neuronale striatale en mettant en évidence une réduction du pic de N-acétylaspartate dans les atrophies multisystématisées.

* Électrophysiologie :

+ Enregistrements du tremblement (accélérométrie avec analyse du spectre de fréquence, couplée éventuellement à l’électromyographie [EMG] de surface) :

Ils peuvent contribuer à en objectiver les caractéristiques cliniques et, en fonction des variantes techniques utilisées, apporter une forme d’évaluation quantitative : de plus, ce type d’analyse peut aider à reconnaître le tremblement « myoclonique » de l’atrophie multisystématisée.

Études de l’excitabilité des régions corticales motrices (par stimulation magnétique transcrânienne) et des voies réflexes du tronc cérébral

Elles participent à une meilleure compréhension des phénomènes d’inhibition latérale et de « focalisation » des messages afférents corticaux, tandis que l’analyse des réflexes du tronc cérébral (réflexe de clignement, réactions de sursaut au bruit) permet de retrouver une altération des réponses dans la paralysie supranucléaire progressive, alors que celles-ci sont relativement préservées dans la MPi.

+ Études de la préparation et de l’exécution du mouvement :

Cette approche neurophysiologique de l’akinésie utilise des procédures diverses : temps de réaction, corrélats électrophysiologiques de la préparation motrice, mesures de la vitesse et de la précision des mouvements.

Les activités motrices les plus complexes (marche, production vocale) nécessitent des analyses multiparamétriques.

Les mesures du temps de réaction (TR) montrent qu’il est en règle allongé dans la MPi et les syndromes parkinsoniens : cependant, le délai central (différence de durée entre TR de choix et TR simple, correspondant au temps supplémentaire nécessaire à la sélection d’une réponse) n’est pas allongé dans la MPi par rapport à la normale.

De plus, la facilitation de la préparation motrice par des informations préalables sur la réponse attendue reste plus ou moins préservée dans la MPi selon que ces informations sont fournies d’une manière explicite ou implicite.

Les corrélats électrophysiologiques de la préparation motrice (indices attentionnels spécifiques comme l’onde P300 après stimulus sonore, potentiels lents et modifications de l’activité EEG au niveau du vertex précédant le déclenchement du mouvement comme la variation contingente négative [VCN], le bereischaftspotential [BP], la désynchronisation EEG liée à l’événement [DLE]) se révèlent anormaux au cours de la maladie de Parkinson.

La mesure de la vitesse d’exécution du mouvement confirme le ralentissement de celui-ci : les enregistrement EMG montrent l’amplitude insuffisante de la bouffée initiale du muscle agoniste avec déficit du réglage de la force musculaire et perte des ajustements posturaux anticipés.

La précision du mouvement est préservée grâce à l’utilisation accrue des réafférences visuelles, la suppression de la vision du mouvement révélant une réduction d’amplitude de celui-ci. L’analyse multiparamétrique de la posture et de la marche révèle que, malgré les changements visibles de la posture debout stabilisée dans la maladie de Parkinson, la position de la projection verticale du centre de gravité (CG) reste peu modifiée par rapport aux sujets normaux : au cours de l’initiation de la marche, il existe une nette réduction des forces propulsives permettant d’accélérer le CG vers l’avant dans la maladie de Parkinson, ce qui va entraîner une diminution marquée de la longueur du pas ; au cours de la locomotion, la réduction de la longueur de l’enjambée et de la vitesse de progression est confirmée avec l’amélioration de ces paramètres par l’utilisation accrue des réafférences visuelles grâce à des lignes horizontales placées sur le sol.

F – DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL DE LA MALADIE DE PARKINSON :

Dans le cadre de la prise en charge clinique de la maladie de Parkinson, la démarche diagnostique reste sous-tendue par la problématique de son diagnostic différentiel, tout au long de son évolution clinique, en raison de l’impact sur la prise en charge thérapeutique.

Parmi les parkinsonismes secondaires, l’étiologie la plus fréquente reste celle des médicaments pouvant être impliqués dans la survenue d’un syndrome parkinsonien.

Aspects thérapeutiques : prise en charge des malades parkinsoniens :

La prise en charge thérapeutique dans la maladie de Parkinson, qui reste encore très largement dominée par les traitements dopaminergiques dont les effets symptomatiques restaient inégalés depuis leur introduction il y a 30 ans, a cependant constamment évolué non seulement dans la stratégie de leur mise en place initiale au début de la maladie, mais aussi dans la gestion des complications apparaissant à la phase évoluée : la prise en compte progressive de l’utilité des échelles d’évaluation clinique et des apports de la rééducation fonctionnelle, et surtout la mise au point de nouvelles procédures chirurgicales, notamment la stimulation du noyau sousthalamique dont les effets symptomatiques spectaculaires ont été confirmés, influencent de plus en plus la pratique neurologique actuelle.

La conférence de consensus sur la maladie de Parkinson a tout récemment permis d’élaborer des recommandations, qui ont été largement diffusées et dont le contenu influence nécessairement le texte de cet article.

A – MÉDICAMENTS ANTIPARKINSONIENS :

Ces médicaments n’ont ou ne se voient reconnaître à l’heure actuelle qu’un effet symptomatique.

L’émergence du concept de « neuroprotection » a fait entrevoir la possibilité de ralentir la progression de la maladie, ce qui a été infirmé par les résultats négatifs initiaux et différés de l’étude DATATOP, recherchant des effets neuroprotecteurs éventuels pour la sélégiline et le tocophérol : d’autres études sur ce point sont en cours avec des médicaments de la classe des agonistes dopaminergiques et des antagonistes glutamatergiques.

La liste des médicaments antiparkinsoniens actuellement disponibles en France, avec leurs formes galéniques et leur mode d’action pharmacologique présumé : à ce jour, la L-dopa reste considérée comme le traitement de référence de la maladie de Parkinson, même si les agonistes dopaminergiques jouent un rôle thérapeutique progressivement croissant.

D’autres médicaments ont un effet symptomatique qui passe soit par le ralentissement de la métabolisation de la dopamine (sélégiline), soit par leur action antagoniste muscarinique (anticholinergiques) ou glutamatergique (amantadine), tandis que l’entacapone n’exerce d’effet symptomatique que par l’intermédiaire de la L-dopa administrée simultanément.

Bien que la L-dopa reste considérée comme « la pierre angulaire de la prise en charge des patients et le plus efficace des antiparkinsoniens », l’apparition des complications motrices (fluctuations et dyskinésies) au cours de la dopathérapie a conduit à remettre en question sa position dominante au profit des agonistes dopaminergiques (notamment au début de la maladie, lorsque la gêne fonctionnelle ne nécessite pas forcément un effet symptomatique puissant) et même à envisager sa toxicité sur les neurones dopaminergiques (en raison de son métabolisme oxydatif par la MAO).

Toutefois, la responsabilité de la L-dopa dans l’apparition de ces complications motrices reste une question encore non résolue, dans la mesure où l’hypothèse de son rôle toxique « in vivo » a été écartée sur la base de nombreux arguments ; parallèlement, la physiopathologie de ces complications a été revisitée avec l’émergence de l’hypothèse postsynaptique d’une sensibilisation (ou priming) au niveau des récepteurs striataux, plus adaptée à l’explication des dyskinésies, et complétant le rôle déjà reconnu de la perte de terminaisons dopaminergiques nigrostriées dans le mécanisme des fluctuations, le caractère « pulsatile » de la dopathérapie devenant un facteur essentiel de cette sensibilisation.

D’un point de vue pratique, on peut aussi s’interroger sur le fait de savoir si ces complications motrices sont liées directement à la date d’introduction de la L-dopa et à sa posologie ou d’abord à la sévérité initiale de la dénervation dopaminergique et à son évolutivité qui détermineraient elles-mêmes une introduction précoce et une posologie élevée de la L-dopa : une étude prospective (ELLDOPA) est actuellement en cours pour tenter de lever cette interrogation.

B – RÉÉDUCATION FONCTIONNELLE :

Elle comporte différentes modalités selon qu’elle concerne l’activité physique globale (motricité des membres, posture, équilibre et marche) qui fait intervenir le kinésithérapeute ou l’activité de la sphère oro-pharyngo-laryngée (parole, déglutition) plus spécifiquement prise en charge par l’orthophoniste.

1- Rééducation motrice :

Les techniques sont empiriques et comportent des programmes d’exercices adaptés au symptôme moteur prédominant et au stade de la maladie, éventuellement complétés par la balnéothérapie et l’ergothérapie :

– exercices visant à accroître la coordination, la précision et la vitesse du mouvement ;

– mouvements destinés à préserver le contrôle postural et les rotations axiales ;

– travail de la marche en utilisant des indices visuels ou sonores.

2- Rééducation vocale :

La méthode Lee Silverman voice therapy (LSVT) est basée sur une rééducation de la prosodie (travail laryngé avec maintien de voyelle tenue et travail sur l’étendue de la gamme tonale) complétée par une rééducation respiratoire (travail sur la prise de souffle et la coordination pneumophonique).

3- Rééducation de la déglutition :

Basée sur une analyse des troubles de la déglutition précisant le mécanisme des fausses routes, elle comporte un temps de conseil alimentaire (fractionnement du repas, saveurs prononcées, textures semi-solides) et elle vise à l’apprentissage de postures de « protection » (position assise et tête en antéflexion au moment de la déglutition).

C – TRAITEMENTS CHIRURGICAUX :

Seule, l’approche stéréotaxique permet de concilier une efficacité significative avec une prise de risque minimale : elle se résume aux applications de neurochirurgie fonctionnelle (lésion, stimulation) sur différentes cibles (VIM, GPi, NST), les transplantations de cellules embryonnaires restant au stade expérimental.

1- Techniques de la neurochirurgie fonctionnelle :

La technique lésionnelle classique par électrocoagulation comporte l’avantage d’un geste opératoire unique sans implantation de matériel, ce qui réduit le coût immédiat de l’intervention ; les inconvénients résident dans son caractère irréversible et nécessairement unilatéral avec la difficulté de définir l’étendue de la lésion utile.

La technique de neurostimulation à haute fréquence, malgré le coût immédiat du matériel implantable, a les avantages de la réversibilité, de l’adaptabilité par le réglage des paramètres de stimulation et de la bonne tolérance d’une action bilatérale.

2- Cibles de la neurochirurgie fonctionnelle :

Le VIM du thalamus reste la cible de choix pour un tremblement isolé et non contrôlé par les médicaments.

Cette cible s’est aussi révélée efficace pour réduire les dyskinésies dopa-induites.

Une étude récente, comparant les effets de la lésion avec ceux de la stimulation, a retrouvé une supériorité en faveur de la stimulation en raison d’une efficacité meilleure et d’effets indésirables moindres.

Le GPi, dans sa partie ventropostérolatérale décrite initialement par Leksell et Svennilson, a été réactualisé récemment et reste encore très utilisé en raison d’effets symptomatiques antiakinétiques modérés, mais surtout d’une réduction très forte des dyskinésies dopa-induites.

La stimulation apporte clairement l’avantage d’une bilatéralisation possible, la pallidotomie (lésionnelle) devant rester strictement unilatérale.

Le NST a été abordé plus récemment et est rapidement devenu la cible de choix pour une stimulation bilatérale avec des effets spectaculaires sur l’ensemble des symptômes (tremblement, rigidité, akinésie) permettant de réduire les médicaments antiparkinsoniens et d’obtenir de ce fait une quasi-disparition des fluctuations et des dyskinésies.

3- Autres techniques :

Seule l’allogreffe striatale des neurones dopaminergiques embryonnaires reste pratiquée dans un cadre expérimental, avec des résultats symptomatiques encore très inférieurs à ceux de la stimulation du noyau sous-thalamique, même si la viabilité et l’efficacité dopaminergique des cellules greffées ont été démontrées.

D – ÉCHELLES D’ÉVALUATION UTILES :

Elles sont nécessaires pour le suivi clinique objectif d’une maladie chronique et évolutive comme la maladie de Parkinson.

1- Échelle unifiée d’évaluation de la maladie de Parkinson (UPDRS) :

Cette échelle composite représente actuellement le standard international d’évaluation clinique pour l’ensemble des symptômes de la maladie de Parkinson et des problèmes liés à son traitement.

Elle comporte six parties :

– la partie I évalue les troubles mentaux à l’aide de quatre items ;

– la partie II représente le handicap dans l’activité quotidienne selon 13 items ;

– la partie III décrit les symptômes moteurs au moment de l’examen sur la base de 27 items ;

– la partie IV établit les complications liées au traitement ;

– les parties V et VI correspondent à l’incorporation du stade évolutif selon Hoehn et Yahr et du score global d’autonomie dans la vie quotidienne de Schwab et England.

Sa fiabilité globale a été confirmée, mais les parties I, II et IV restent l’objet de critiques, ce qui justifie l’utilisation d’échelles complémentaires.

2- Autres échelles :

Pour les troubles cognitifs, l’échelle de Mattis et la batterie rapide d’efficience frontale (BREF) semblent préférables au Minimental state (MMS) de Folstein, alors que pour les troubles thymiques, l’échelle de dépression de Montgomery et Asberg (MADRS) paraît la mieux adaptée.

Pour compléter la partie II de l’unified rating scale in parkinsonism (UPDRS), la qualité de vie peut être mieux appréhendée par la PDQ-8 (version abrégée de la PDQ-39) dont la fiabilité a été validée.

La partie III de l’UPDRS reste la plus appréciée et peut éventuellement être objectivée par un enregistrement vidéo.

Cette partie III se prête particulièrement bien à la pratique de tests pharmacologiques (à la L-dopa ou à l’apomorphine) permettant de quantifier la réponse au traitement par la différence entre les scores obtenus en période off et en période on.

Enfin, la partie IV peut être complétée par une autoévaluation à intervalle horaire des périodes on et off pour les fluctuations d’efficacité, et par la version CAPSIT (Core assessment program for surgical interventional therapies in Parkinsons’s disease) pour les dyskinésies (distribution, intensité, typologie).

E – INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES :

1- Prise en charge au début de la maladie :

* Annonce du diagnostic :

Elle est une étape capitale au plan psychologique, la maladie de Parkinson gardant l’image d’une situation invalidante associée au vieillissement.

Il est donc souhaitable, au cours des consultations initiales, de mettre en valeur les perspectives positives que représentent l’efficacité symptomatique attendue du traitement dopaminergique, l’existence de formes à évolution lente et l’épargne relative des fonctions mentales, ces aspects laissant espérer, au moins pendant les premières années dites de « lune de miel », la préservation de la qualité de vie socioprofessionnelle et familiale.

Il faut ensuite informer le patient et son entourage sur les différents choix thérapeutiques possibles.

* Principes de base pour le choix du traitement :

En l’état actuel des connaissances, il n’existe pas de traitement « neuroprotecteur », c’est-à-dire susceptible de ralentir ou de stopper l’évolution progressive de la dénervation dopaminergique.

S’agissant du traitement dopaminergique proprement dit, il convient de rappeler le caractère purement symptomatique de son action.

Ce traitement n’est donc débuté que lorsque la gêne fonctionnelle le justifie et sa posologie est adaptée progressivement en tenant compte de la tolérance, notamment aux effets indésirables digestifs et tensionnels, l’objectif étant d’obtenir la meilleure efficacité possible sur les symptômes moteurs, avec une posologie minimale ajustée aux besoins.

En effet, ce traitement est de longue durée, d’autant que l’âge du patient est plus jeune, ce qui implique la prise en compte d’une forme de compromis stratégique entre le bénéfice symptomatique à court terme, justifié par la nécessité objective de préserver la qualité de vie professionnelle et familiale, et les complications potentielles du traitement à moyen et long terme plus ou moins prévisibles, ce risque étant lié à l’évolutivité de la dénervation dopaminergique qui reste, à l’échelon individuel, une inconnue au début de la phase symptomatique de la maladie de Parkinson.

* Stratégies thérapeutiques possibles :

La L-dopa en monothérapie (L-dopa associée à un inhibiteur de la décarboxylase) peut être argumentée sur la base de son rapport efficacité/tolérance qui reste actuellement le plus élevé, notamment à la période de début.

Cependant, sa demi-vie biologique brève lui confère le qualificatif de traitement « pulsatile », avec un risque plus élevé, et de survenue plus précoce, de fluctuations d’efficacité et de dyskinésies, comparativement aux autres traitements dopaminergiques.

L’hypothèse de son effet neurotoxique, évoqué à partir d’études in vitro, semble écartée in vivo sur la base de nombreux arguments indirects.

L’intérêt de stratégies annexes (L-dopa à LP, associations avec un inhibiteur de la MAO et/ou de la COMT), destinées à rendre la dopathérapie moins « pulsatile », reste encore à démontrer.

Les agonistes dopaminergiques en monothérapie se sont vus reconnaître récemment un rapport efficacité/tolérance initial, sinon analogue à celui de la L-dopa, tout au moins d’un niveau très proche, avec un risque potentiel à moyen et long terme de complications motrices nettement réduit.

Cependant, la mise en route du traitement doit rester très progressive, ce qui implique une information du patient solide et soutenue en vue de préserver son adhésion aux objectifs du traitement.

De plus, ce rapport efficacité/tolérance favorable semble ne pas se maintenir au-delà de quelques années, ce qui nécessite d’associer la L-dopa en traitement de recours pour maintenir l’effet symptomatique : en effet, l’augmentation de la posologie des agonistes dopaminergiques, qui serait nécessaire pour rester en monothérapie, se révèle fréquemment mal tolérée, notamment au plan psychique et chez les sujets âgés.

La combinaison précoce de L-dopa et d’agonistes dopaminergiques, chaque médicament étant prescrit à posologie minimale, se fonde sur le postulat d’une action pharmacologique synergique : les rares études consacrées à l’évaluation de cette stratégie de compromis pragmatique ne permettent pas de conclure définitivement sur ses avantages éventuels.

* Recommandations pour le traitement initial :

Dans le contexte actuel où l’évolution de la relation médecin-patient conduit à prendre en compte de façon plus formelle les notions de risque thérapeutique et de principe de précaution, la publication récente des recommandations établies par les instances professionnelles peut constituer un repère utile : « L’âge de début et l’importance de la gêne fonctionnelle sont les deux facteurs qui guident les choix thérapeutiques :

– en l’absence de ralentissement moteur, les traitements médicamenteux ne sont pas indispensables ; les raisons de l’abstention thérapeutique doivent être données au malade ;

– lorsque la gêne est minime, agonistes dopaminergiques, sélégiline, anticholinergiques peuvent être utilisés en fonction du symptôme prédominant et de l’âge ;

– lorsqu’il existe un retentissement fonctionnel, l’âge du patient conditionne le traitement :

– chez le sujet jeune, il convient de privilégier les agonistes dopaminergiques le plus longtemps possible.

Le recours à la dopathérapie se justifie en cas d’intolérance ou de réponse thérapeutique insuffisante ; la dose de L-dopa doit rester la plus faible possible ;

– chez le sujet âgé, la L-dopa peut être utilisée en première intention ; l’apparition d’un déclin cognitif doit conduire à utiliser les doses minimales efficaces. »

* Place de la rééducation fonctionnelle :

Au début de la maladie, la gêne fonctionnelle reste faible et répond le plus souvent de façon nette au traitement médicamenteux.

Une prise en charge rééducative, essentiellement motrice, peut cependant être proposée au patient de façon pragmatique : elle se situe dans une action de prévention visant à préserver les capacités physiques générales du patient et à atténuer d’éventuels symptômes douloureux.

2- Prise en charge dans la phase évoluée :

* Traitement médicamenteux des complications motrices :

La prise en charge médicamenteuse des fluctuations et des dyskinésies induites par le traitement antiparkinsonien.

+ Fluctuations prévisibles :

Le principe de base est de rendre le traitement antiparkinsonien moins « pulsatile ».

L’attitude la plus simple consiste à augmenter le nombre de prises de L-dopa, si possible en réduisant la quantité à chaque prise pour ne pas augmenter la posologie totale quotidienne, ce qui correspond à un « fractionnement » des prises.

Il peut aussi s’avérer utile d’introduire la L-dopa à LP moyennant, compte tenu de sa biodisponibilité inférieure, une augmentation de posologie quotidienne de l’ordre de 30 % : cependant, le maintien d’une prise de L-dopa standard, voire l’introduction de la forme dispersible de L-dopa, peuvent être nécessaires comme « dose-starter » en cas d’akinésie du petit matin persistante.

L’ajout d’agonistes dopaminergiques, ou l’augmentation de leur posologie s’ils étaient déjà prescrits, peut constituer une alternative ; de la même manière, les inhibiteurs de la COMT peuvent représenter le traitement de choix pour l’akinésie de fin de dose en raison de l’amélioration qu’ils apportent sur la biodisponibilité de la L-dopa.

+ Fluctuations imprévisibles :

Les différentes approches possibles visent toutes à améliorer la biodisponibilité du traitement antiparkinsonien : optimiser la cinétique d’absorption intestinale de la L-dopa (médicaments prokinétiques accélérant la vidange gastrique, prises de L-dopa avant le repas), réduire la quantité des acides aminés alimentaires (transfert des protéines du repas de midi vers celui du soir), « courtcircuiter » la barrière intestinale (par l’utilisation de l’apomorphine sous-cutanée), stimuler plus fortement les récepteurs dopaminergiques (augmentation de la posologie de L-dopa, agonistes dopaminergiques).

En pratique, les mesures portant sur l’horaire des prises par rapport aux repas, sur la vidange gastrique et sur la diète protéinique, sont les premières à être mises en oeuvre ; lorsque les fluctuations persistent, il est justifié d’introduire l’apomorphine en injections sous-cutanées unitaires (posologie entre 3 et 8 mg, établie après test pharmacologique évaluant le rapport efficacité/tolérance) sous couverture initiale de dompéridone à 60 mg/j.

Dans les cas les plus difficiles, il peut s’avérer nécessaire de remplacer tout ou partie de la L-dopa par l’apomorphine en administration continue sous-cutanée à l’aide d’une pompe portable.

+ Dyskinésies de milieu de dose :

Lorsqu’elles deviennent gênantes, en raison de leur intensité ou d’une composante douloureuse, la première mesure thérapeutique est le « fractionnement » des prises éventuellement associé à une réduction de la posologie quotidienne de L-dopa, ce qui peut être facilité, en cas de besoin, par l’ajout mesuré d’agonistes dopaminergiques.

L’amantadine, avec la mise en évidence de son rôle antagoniste glutamatergique, s’est révélée souvent efficace pour atténuer les dyskinésies.

+ Dyskinésies de début et de fin de dose :

Leur prise en charge reste souvent difficile et décevante.

Une première mesure logique consiste à augmenter la posologie quotidienne de L-dopa tout en augmentant le nombre de prises. L’apomorphine et l’amantadine méritent d’être également utilisées dans cette indication.

+ Dystonies de période « off » :

La toxine botulique est indiquée dans les formes localisées stables. Dans les autres cas, il est justifié d’augmenter la posologie de L-dopa, d’essayer l’ajout d’une forme LP ou encore d’utiliser l’apomorphine.

+ Myoclonies :

Elles nécessitent rarement une prise en charge thérapeutique. L’utilisation, en pratique, d’amitriptyline à doses modérées (25 mg) le soir est une mesure habituelle.

* Traitement médicamenteux des troubles non moteurs :

– L’hypotension orthostatique : souvent iatrogène dans la maladie de Parkinson, elle nécessite, lorsqu’elle est mal tolérée, l’ajout de fludrocortisone, de sympathicomimétiques et notamment de midodrine.

Les mesures complémentaires (bas de contention, contrôle des apports sodés) sont souvent utiles.

– Les troubles urinaires, à type d’urgences mictionnelles et de pollakiurie nocturne, sont souvent atténués par la simple prise en charge des périodes off ou répondent à une pathologie associée.

Dans certains cas, l’utilisation prudente de l’oxybutynine et de l’amitriptyline permet d’atténuer l’hyperactivité du détrusor.

– Les troubles sexuels, à type d’impuissance chez l’homme, peuvent justifier la prescription de sildénafil (Viagrat), après contrôle de la fonction cardiaque et vérification de l’absence d’autre étiologie (iatrogénicité, état dépressif, pathologie endocrinienne),.

En cas d’hypersexualité gênante, il peut s’avérer nécessaire de réduire le traitement dopaminergique.

– Les troubles digestifs, notamment la constipation, justifient toujours des mesures hygiénodiététiques (apport de fibres, boissons suffisantes et activité physique) éventuellement complétées par des laxatifs doux et, le cas échéant, par l’arrêt de médicaments anticholinergiques.

– Les troubles anxiodépressifs, lorsqu’ils ne sont pas améliorés par le traitement dopaminergique, peuvent être traités symptomatiquement par antidépresseurs (tricycliques ou inhibiteurs de la recapture de la sérotonine) et prise en charge psychothérapeutique.

– Les troubles cognitifs justifient d’éviter les anticholinergiques.

Lorsque ces troubles évoluent vers une démence, il peut être légitime d’évaluer prudemment l’effet d’un anticholinestérasique à action centrale (donépézil, rivastigmine).

– La « psychose » dopaminergique, dont la séméiologie peut comporter un continuum entre des hallucinations mineures bien contrôlées et des accès confusodélirants aigus avec troubles sévères du comportement, nécessite toujours un bilan médical complet (à la recherche d’une pathologie associée sous-jacente), une réduction des traitements antiparkinsoniens, en commençant par les anticholinergiques, la sélégiline, l’amantadine et les agonistes dopaminergiques, avant de réduire la L-dopa elle-même.

Bien souvent, l’aggravation motrice nécessite de reprendre la dopathérapie à un niveau suffisant, dont la tolérance est rendue possible grâce à la prescription associée de clozapine à la dose minimale efficace et sous surveillance hématologique.

– Les troubles du sommeil répondent à des mécanismes multiples, dont chacun peut justifier une prise en charge spécifique.

– Les douleurs, en dehors des dystonies douloureuses des périodes off, justifient souvent une évaluation précise à la recherche d’une pathologie associée, notamment rhumatologique, qui peut bénéficier d’un traitement local anti-inflammatoire.

* Place de la rééducation fonctionnelle :

La rééducation motrice doit s’adapter à l’état moteur du patient avec un travail actif nécessairement limité aux périodes on, les périodes off permettant d’aborder les aides aux transferts, les manoeuvres de retournement au lit, le contrôle des chutes et la prévention des déformations articulaires avec la prise en charge des douleurs musculaires.

En pratique, après un temps de mise en condition physique générale, la séance de rééducation active travaille la motricité des membres puis le contrôle de l’équilibre et de la marche, en insistant spécifiquement sur les rotations axiales dont il faut maintenir les amplitudes.

La rééducation de la parole et de la déglutition doit également s’adapter à ces contraintes mais reste encore très largement sousutilisée si l’on considère les besoins des patients.

D’une manière générale, la rééducation fonctionnelle représente dans la maladie de Parkinson un élément important de la prise en charge dont le coût économique se révèle presque équivalent à celui des médicaments.

En raison de l’approche pragmatique qui a prévalu dans la mise en place de ces techniques, les pratiques de rééducation n’ont encore été que rarement évaluées dans leur efficacité.

Prenant en compte cette situation de fait, il apparaît souhaitable de prévoir pour l’avenir une méthodologie d’évaluation de chaque domaine spécifique de la motricité (marche, voix, déglutition) avec des objectifs précis et quantifiables dans un cadre multidisciplinaire.

* Place des traitements chirurgicaux :

La stimulation du noyau sous-thalamique : en l’état actuel des connaissances, la neurostimulation à haute fréquence apparaît comme la technique présentant le rapport bénéfices/risques le plus favorable.

Sous réserve d’une grande rigueur dans son repérage guidé par l’imagerie et les enregistrements électrophysiologiques, le noyau sous-thalamique semble bien être la cible qui donne les meilleurs résultats avec une implantation bilatérale d’emblée.

La technique qui a été mise au point par Benabid en 1993, et dont l’efficacité symptomatique remarquable a été confirmée, s’est répandue progressivement en France et en Europe, bien avant d’atteindre les États-Unis où elle reste encore peu pratiquée, loin derrière la pallidotomie.

Le principal facteur limitant de son utilisation reste le coût élevé du matériel implantable de stimulation et de la prise en charge hospitalière au cours de la période périopératoire : mais, au-delà des coûts économiques directs, il faut souligner aussi l’importance des moyens médicaux humains dans la prise en charge et le suivi, nécessairement pluridisciplinaire, des nombreux patients parkinsoniens candidats à ce traitement.

La prise en compte de l’ensemble de ces facteurs a justifié la mise en place d’un certain nombre de recommandations concernant l’indication d’un tel traitement neurochirurgical : « Il doit s’agir d’une MPi évoluant depuis plus de 5 ans, avec absence de déficit cognitif et/ou de troubles psychiatriques.

La persistance d’une bonne sensibilité à la L-dopa est un critère essentiel dans la sélection, tremblement excepté.

L’âge en soi n’est pas un critère discriminant, contrairement à l’existence de pathologies associées dont la fréquence et le retentissement augmentent avec l’âge : référence est ainsi faite à tout état pathologique contre-indiquant un acte chirurgical à visée fonctionnelle.

La qualité du contexte sociofamilial est un facteur de réussite car la prise en charge du patient, quel que soit le bénéfice de l’opération, reste lourde.

Enfin, la décision de proposer l’opération au patient appartient à l’équipe médicochirurgicale spécialisée qu’il a choisie, laquelle lui doit une information complète. » Les autres techniques chirurgicales qui restent actuellement utilisées sont essentiellement la stimulation thalamique au niveau du VIM et la pallidotomie.

La stimulation du VIM peut être unilatérale ou bilatérale (selon l’expression du tremblement) : elle garde des indications dans les tremblements atypiques et prévalents de la MPi lorsque ceux-ci sont résistants au traitement médical et invalidants, le plus souvent en raison de leur intensité avec une composante de repos associée à des composantes posturale et d’action.

La pallidotomie unilatérale demeure encore largement pratiquée aux États-Unis, avec des résultats symptomatiques qui restent limités.

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