Polyarthrite rhumatoïde

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La polyarthrite rhumatoïde (PR) est une maladie inflammatoire de l’ensemble du tissu conjonctif à prédominance synoviale.

Cette affection est très hétérogène :

– il s’agit d’abord d’un rhumatisme inflammatoire chronique évoluant par poussées, susceptible d’entraîner des déformations et des destructions articulaires parfois responsables d’une invalidité grave.

– c’est aussi une maladie systémique faisant partie du groupe des connectivites, capable de déterminer diverses manifestations extra-articulaires dont certaines mettent en jeu le pronostic vital.

Polyarthrite rhumatoïdeLa polyarthrite rhumatoïde pose un véritable problème de santé publique:

– en effet, plus de la moitié des malades sont obligés d’arrêter leur activité professionnelle moins de 5 ans après son début et, dans 10% des cas, la polyarthrite rhumatoïde engendre une invalidité grave en moins de 2 ans.

– la durée de vie des patients est en moyenne réduite de 5 ans.

– les dépenses dues à cette maladie sont élevées, à cause, d’une part, des pertes de salaire liées à l’arrêt de l’activité professionnelle et à la mise en invalidité, d’autre part, des dépenses médicales et pharmaceutiques.

ÉPIDÉMIOLOGIE :

* La polyarthrite rhumatoïde est le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires chroniques:

– les chiffres classiques de 1% de la population sont certainement surestimés. La prévalence est en fait de l’ordre de 0,2 à 0,4% tous sexes confondus selon les pays.

– elle intéresse trois fois plus souvent la femme que l’homme, et peut survenir à n’importe quel âge mais avec une fréquence particulière entre 35 et 55 ans.

* Comme beaucoup de maladies auto-immunes, la polyarthrite rhumatoïde est une affection polyfactorielle relevant de facteurs:

– psychologiques (apparition possible au décours d’un traumatisme psychoaffectif).

– endocriniens (dysrégulation de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, rôle de facteurs neuro-endocriniens).

– d’environnement (intervention d’antigènes infectieux ou non dont la nature est inconnue).

– génétiques (liaison avec les gènes HLA DR4 (DRB1 0401, 0404 ou 0405) et DR1 (DRB1 0101), présents respectivement dans 60 et 38% des cas) et immunologiques.

* Il a été décrit une zone commune de cinq acides aminés siégeant sur la troisième région hypervariable de la chaîne DR?1 de HLA DR4 et DR1 dite zone de « susceptibilité peptidique », qui pourrait jouer un rôle dans le déclenchement de la maladie à cause d’une réaction croisée avec certains peptides microbiens. Cependant, cela n’est pas démontré.

PHYSIOPATHOLOGIE :

Les lésions articulaires sont dues à une synovite immune (secondaire à des processus impliquant l’immunité humorale et surtout l’immunité cellulaire), auto-entretenue, qui est à l’origine d’un « pannus », tissu conjonctivo-vasculaire, qui se comporte comme une véritable tumeur intra-articulaire détruisant le cartilage et les structures voisines.

On distingue plusieurs phases dans le processus de la maladie: phase d’initiation, phase de recrutement et d’inflammation (les cellules sanguines migrent du sang vers la synoviale), phase de prolifération synoviale et de destruction articulaire, phase de réparation.

Immunopathologie de la synovite rhumatoïde

L’immunopathologie de la synovite rhumatoïde est caractérisée par les éléments suivants:

* hyperplasie synoviale très accentuée.

* hyperangiogenèse.

* infiltrat lymphocytaire T périvasculaire (il s’agit en majorité de lymphocytes T CD45 Ro mémoire) associé à des macrophages.

* excès d’expression des antigènes HLA de classe II.

* on note aussi une dysrégulation dans la sécrétion des cytokines:

– augmentation des cytokines à action pro-inflammatoire comme l’interleukine 1.

– le « tumor necrosis factor alpha » (TNF-FaF), l’interleukine 6.

– diminution des cytokines à action anti-inflammatoire comme l’interleukine 4 et l’interleukine 10.

* il existe également, dans la synoviale, une augmentation des molécules d’adhésion, qui jouent un rôle important dans la migration des lymphocytes du sang vers le site synovial.

* les cytokines pro-inflammatoires sécrétées en excès entraînent la libération par les synoviocytes et les fibroblastes de prostaglandines E2 ainsi que de métalloprotéases (collagénases susceptibles de détruire progressivement les structures articulaires).

Pendant longtemps, on a considéré que les destructions articulaires étaient directement liées à l’inflammation et aux lymphocytes T CD4.

– on sait aujourd’hui que, à côté du facteur inflammatoire, intervient également l’activation chronique des synoviocytes et des fibroblastes par des proto-oncogènes.

– de plus, la durée de vie de ces cellules est prolongée à cause d’un défaut d’apoptose (mort cellulaire programmée).

– cela explique que la destruction articulaire puisse continuer chez des patients par ailleurs améliorés par les traitements anti-inflammatoires ou de fond.

Rôle des facteurs immunologiques

Divers facteurs immunologiques jouent un rôle important:

– excès d’expression des antigènes HLA de classe II.

– anomalies de la clairance des complexes immuns qui est diminuée.

– anomalies de la solubilisation des complexes immuns.

– dysrégulation du réseau idiotypique.

Immunopathologie des manifestations extra-articulaires

Comme les aspects cliniques, l’immunopathologie des manifestations extra-articulaires de la polyarthrite rhumatoïde est polymorphe:

– elle relève parfois de l’immunité cellulaire: infiltrat lymphocytaire T CD8 dans certaines lésions viscérales (péricardite rhumatoïde, par exemple), infiltrat macrophagique et lymphocytaire dans les nodules rhumatoïdes.

– ou de l’immunité humorale dans laquelle interviennent des complexes immuns auxquels participent des facteurs rhumatoïdes de type IgM et surtout de type IgG ou IgE, constituant des complexes dits intermédiaires particulièrement agressifs.

Diagnostic :

Il est essentiel de faire le diagnostic aussi précocement que possible afin de mettre en œuvre la prise en charge pluridisciplinaire qui s’impose pour essayer d’arrêter l’évolution de cette redoutable affection:

– à ce stade, le traitement a des chances d’être efficace.

– tardivement, le diagnostic est évident mais l’efficacité du traitement est aléatoire.

Les circonstances du diagnostic sont variables. Il peut s’agir:

– d’une polyarthrite rhumatoïde au début.

– d’une polyarthrite rhumatoïde à la phase d’état.

– ou, éventuellement, d’une complication.

POLYARTHRITE RHUMATOÏDE  AU DÉBUT: DIAGNOSTIC PRÉCOCE :

Le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde doit être aussi précoce que possible car, à ce stade, le traitement a des chances d’être efficace.

Modes de début :

Oligoarthrite distale

Il peut s’agir d’une oligoarthrite distale (70% des cas environ), intéressant les poignets, une ou plusieurs articulations métacarpo-phalangiennes (surtout la 2ème ou la 3ème) ou interphalangiennes proximales, parfois les avant-pieds.

* Le diagnostic repose avant tout sur l’interrogatoire.

– Les douleurs sont typiquement inflammatoires, réveillant les malades la nuit, maximales au réveil, entraînant un enraidissement articulaire (raideur matinale). elles cèdent dans la journée après un dérouillage articulaire dont la durée est variable, pour réapparaître en fin de soirée et pendant la nuit suivante.

– L’atteinte articulaire est fixe et relativement symétrique.

– On retrouve parfois la notion d’un traumatisme psychologique ou d’un accouchement dans les mois qui ont précédé.

* A cette phase de la maladie, il n’y a aucune déformation articulaire:

– les signes cliniques objectifs sont discrets, plus nets le matin qu’en fin de soirée où ils peuvent faire défaut.

– les articulations concernées sont douloureuses, partiellement enraidies, parfois légèrement tuméfiées, donnant aux doigts un aspect en « fuseau » ou à l’avant-pied un aspect empâté.

* On note souvent une légère altération de l’état général avec fébricule à 38 °C, amaigrissement et surtout asthénie.

* L’examen doit rechercher attentivement une ténosynovite qui, fréquente au début de la polyarthrite rhumatoïde, a une très grande valeur diagnostique. Elle peut intéresser:

– les extenseurs.

– parfois les fléchisseurs (déterminant alors volontiers un syndrome du canal carpien).

– ou le cubital postérieur (localisation évocatrice), éventuellement les péroniers latéraux.

Polyarthrite aiguë fébrile

Dans 20% des cas, la polyarthrite rhumatoïde commence comme une polyarthrite aiguë fébrile, avec importante altération de l’état général.

Autres modes de début

Le diagnostic peut aussi être évoqué, mais plus rarement:

– devant une atteinte rhizomélique (hanches et épaules), toujours après la soixantaine.

– ou devant une monoarthrite subaiguë ou chronique: dans ce cas il faut impérativement éliminer une arthrite infectieuse.

– parfois, ce sont des manifestations articulaires inflammatoires intermittentes mono- ou oligo-articulaires (rhumatisme palindromique) qui inaugurent la scène clinique.

– très rarement, la polyarthrite rhumatoïde peut se révéler par des manifestations extra-articulaires isolées à type de vascularite, d’atteinte pleuro-pulmonaire ou de nodules rhumatoïdes.

Explorations complémentaires :

A ce stade, les explorations complémentaires n’apportent pas d’éléments spécifiques:

* le bilan radiographique est normal ou montre une discrète ostéoporose en bande métacarpo-phalangienne.

* les examens biologiques objectivent un syndrome inflammatoire non spécifique, avec augmentation de la vitesse de sédimentation globulaire, de la protéine C réactive, et parfois une discrète anémie.

* la recherche du facteur rhumatoïde est en général négative.

* on note parfois la présence d’anticorps anti-stratum corneum (« antikératine ») ou d’anticorps antipérinucléaires qui, bien que très spécifiques, sont inconstants.

* certains examens immunologiques sont nécessaires pour éliminer d’autres maladies articulaires et connectivites (voir paragraphe “Diagnostic différentiel”).

* l’étude du liquide synovial ou éventuellement la biopsie synoviale peuvent apporter des éléments d’orientation sans spécificité (voir paragraphe “Liquide synovial”).

Critères diagnostiques :

Aussi le diagnostic de la polyarthrite rhumatoïde au début est-il avant tout clinique: il repose sur un interrogatoire attentif du malade et un examen clinique soigneux.

Ce diagnostic difficile ne saurait être retenu sans avoir éliminé toute une série de maladies articulaires ou non (voir paragraphe “Diagnostic différentiel”).

L' »American College of Rheumatology » a proposé des critères de classification de la polyarthrite rhumatoïde.

PHASE D’ÉTAT OU PHASE DEFORMANTE :

La phase d’état déformante correspond à l’apparition des déformations caractéristiques de la maladie qui, bien que fréquentes, sont inconstantes.

Selon le stade, le diagnostic peut être évident mais la prise en charge thérapeutique sera difficile.

A cette phase, le diagnostic peut être envisagé devant des manifestations articulaires ou extra-articulaires.

Manifestations articulaires :

Caractères généraux

* Il existe un syndrome inflammatoire articulaire permanent, avec tuméfaction et limitation articulaire:

– des déformations articulaires secondaires à la destruction ligamentaire et cartilagineuse par la synovite rhumatoïde et le pannus s’installent progressivement.

– l’atteinte articulaire évolue parfois par poussées, au cours desquelles on note une aggravation des lésions qui existaient déjà et l’apparition de nouvelles localisations.

* Ainsi, peu à peu, un grand nombre d’articulations peuvent être intéressées, à l’exception du rachis dorsal, du rachis lombaire et des articulations sacro-iliaques.

Atteinte des mains

Les mains sont atteintes dans 90% des cas.

* La déformation la plus caractéristique est la déviation cubitale des doigts.

* On décrit aussi des déformations des doigts en boutonnière, en col de cygne ou en maillet.

* Le pouce, très souvent intéressé, peut être déformé en Z ou en adduction (pouce adductus).

* Ces déformations entraînent une gêne à la préhension:

– la pince pouce-index est rapidement compromise.

– la déformation des doigts en col de cygne peut aboutir à la perte totale de la préhension.

* En fait, la gêne fonctionnelle dépend des déformations mais aussi de l’instabilité qui accompagne ces dernières.

* Il n’y a cependant pas toujours de corrélation entre les déformations et la fonction: certains patients ayant des mains extrêmement déformées gardent parfois une capacité fonctionnelle relativement satisfaisante.

Atteinte des poignets

Les poignets sont intéressés dans 90% des cas.

– L’arthrite radiocubitale inférieure entraîne une gêne à la supination et une luxation dorsale de la tête cubitale en touche de piano, susceptible de faciliter les ruptures tendineuses des extenseurs.

– L’atteinte radiocarpienne peut induire une luxation palmaire du carpe, qu’il est possible de prévenir par un appareillage précoce.

Atteinte des pieds

Les pieds sont touchés dans environ 90% des cas.

– Il s’agit surtout d’une atteinte de l’avant-pied frappant les articulations métatarso-phalangiennes et aboutissant à un avant-pied plat qui s’accompagne d’un hallux valgus (avant-pied plat triangulaire).

– Ce trouble statique entraîne une gêne majeure à la marche et pour le chaussage, car des durillons d’appui très douloureux se développent sous les têtes des métatarsiens.

– L’atteinte de l’arrière-pied est plus rare (arthrite astragalo-scaphoïdienne ou sous-astragalienne).

Atteinte des genoux

Les genoux sont touchés dans 50 à 60% des cas.

– La synovite chronique s’accompagne d’une amyotrophie du quadriceps et d’un risque de flexum qu’il faut impérativement prévenir.

– Dans les formes évoluées, une arthrite fémoro-tibiale externe se développe, entraînant un valgus.

– Parfois existe un kyste du creux poplité (kyste de Baker), qui peut se rompre brutalement dans le mollet, déterminant une violente douleur avec tuméfaction, faisant évoquer à tort une phlébite.

Atteinte des hanches

Les hanches sont intéressées dans 15% des cas environ.

– C’est une localisation particulièrement grave du point de vue fonctionnel, car elle est sournoise : lorsque les premières manifestations douloureuses apparaissent, il y a parfois déjà d’importants dégâts radiographiques.

– Cette coxite conduit souvent à une arthroplastie.

Atteinte des coudes

Les coudes sont touchés dans 40 à 50% des cas. Leur atteinte s’accompagne d’une attitude antalgique en flexion et d’une gêne à la prosupination.

Atteinte des épaules

Les épaules sont concernées dans 40 à 50% des cas environ.

– Cette atteinte est secondaire à une synovite rhumatoïde scapulo-humérale mais aussi et surtout à une bursite sous-deltoïdienne qui entraîne des lésions, non seulement du cartilage articulaire, mais aussi des muscles péri-articulaires et notamment de la coiffe des rotateurs.

– La limitation progressive des épaules en adduction et rotation interne doit être évitée par une rééducation préventive et des postures appropriées.

Atteinte du rachis cervical

En ce qui concerne le rachis cervical, il existe des cervicalgies dans 50 à 60% des cas.

– Parfois, des douleurs de la nuque avec névralgie d’Arnold traduisent une atteinte de la charnière cervico-occipitale à type d’arthrite ou même de luxation atloïdo-axoïdienne (30% des cas).

– Il faut impérativement éviter toute manipulation et tout massage de la région cervicale au cours de la polyarthrite rhumatoïde à cause du risque de lésion bulbo-médullaire.

Manifestations extra-articulaires :

Ténosynovites

Les ténosynovites sont pratiquement constantes à la phase d’état.

* Elles peuvent intéresser les extenseurs des doigts: c’est une tuméfaction un peu molle du dos du poignet, mobile avec les tendons.

* La ténosynovite des fléchisseurs des doigts peut être localisée:

– au canal carpien (déterminant alors un syndrome du canal carpien).

– à l’étage palmaire, où elle se traduit par une crépitation à la mobilisation ou par une ténosynovite nodulaire réalisant une symptomatologie de doigt à ressort.

* La ténosynovite digitale s’exprime par une tuméfaction de la face palmaire de la première phalange avec difficultés pour plisser la peau en regard (signe de Savill).

* Les ténosynovites touchent souvent le cubital postérieur, localisation très caractéristique.

* Elles sont moins fréquentes au pied et intéressent le jambier antérieur, parfois le jambier postérieur ou les péroniers latéraux.

Les ténosynovites sont susceptibles d’entraîner des ruptures tendineuses spontanées des fléchisseurs ou des extenseurs des doigts. Ces ruptures sont liées:

– d’une part, à l’envahissement inflammatoire du tendon.

– d’autre part à des facteurs mécaniques correspondant à des spicules osseux situés sur la tête cubitale érodée et luxée ou, éventuellement, dans le canal carpien.

Une ténosynovite évoluant depuis plus de 6 mois est une indication d’exérèse chirurgicale afin d’éviter une rupture tendineuse.

Autres manifestations extra-articulaires

Les autres manifestations extra-articulaires sont très variées. On les observe classiquement au cours de polyarthrites rhumatoïdes sévères, anciennes, ayant du facteur rhumatoïde à titre élevé, et volontiers nodulaires:

– elles sont plus fréquentes chez l’homme.

– certaines d’entre elles apparaissent volontiers alors que l’état articulaire est quiescent.

Nodules rhumatoïdes

* Les nodules rhumatoïdes sont des nodosités de taille variable (du noyau de cerise à une noisette), siégeant au voisinage du coude (sur la crête d’extension du cubitus), parfois sur le dos des mains, au pied ou le long des tendons d’Achille.

* On les rencontre dans 20% des polyarthrites rhumatoïdes, qui sont en général sévères et ont du facteur rhumatoïde circulant.

Manifestations pleuro-pulmonaires

* Les manifestations pleuro-pulmonaires sont diverses:

– pleurésies, dont la fréquence est variable selon que l’on s’appuie sur des données cliniques ou autopsiques (4 à 40% des cas).

– fibroses interstitielles diffuses.

– nodules rhumatoïdes pulmonaires (0,4%), déterminant une image ronde intraparenchymateuse qu’il faut différencier d’un cancer.

* Parfois, une silicose pulmonaire s’associe à une polyarthrite rhumatoïde, notamment chez des mineurs, réalisant le syndrome de Caplan-Colinet.

* Certaines manifestations respiratoires peuvent être dues au traitement de la polyarthrite rhumatoïde, comme la bronchiolite induite par la D-pénicillamine ou la tiopronine, ou les pneumopathies dues au méthotrexate.

Atteintes cardio-vasculaires

* La péricardite est fréquente (10 à 40% des cas), généralement liquidienne, exceptionnellement constrictive.

* Des lésions valvulaires spécifiques, aortiques ou mitrales, des troubles de la conduction peuvent s’observer. de mauvais pronostic, ces lésions peuvent entraîner le décès.

* La vascularite rhumatoïde (1% des PR) est une complication grave:

– elle entre dans le cadre de ce qu’on appelait autrefois les « polyarthrites malignes ».

– elle peut toucher les artères de moyen calibre, déterminant des infarctus du mésentère ou du myocarde, parfois les vaisseaux encéphaliques.

– en général, elle se traduit par des ulcérations atones hyperalgiques des membres inférieurs qui sont d’origine ischémique.

– parfois une neuropathie par ischémie des vasa nervorum est associée: c’est une multinévrite, touchant plus particulièrement le territoire du sciatique poplité externe, parfois du nerf cubital.

* Le pronostic vital de ces polyarthrites, très défavorable il y a quelques années, s’est amélioré grâce à l’utilisation des immunodépresseurs en perfusion. il reste cependant réservé.

Manifestations neurologiques

* Outre les névrites d’origine ischémique, on décrit des névrites sensitives distales et des neuropathies par compression juxta-articulaire (par exemple, compression du nerf cubital au coude ou du nerf médian au poignet) ou secondaires à une compression médullaire due à une luxation atloïdo-axoïdienne.

* Cette luxation est rencontrée dans 30% des polyarthrites rhumatoïdes:

– elle ne s’accompagne que rarement de complications neurologiques, qui sont dues à la compression des structures médullaires, le plus souvent par l’arc postérieur de l’atlas.

– en raison du risque de tétraplégie, un geste chirurgical est indispensable.

Manifestations ophtalmologiques

Les manifestations ophtalmologiques s’observent en général dans le cadre d’un syndrome de Gougerot-Sjögren ou syndrome sec: kérato-conjonctivite sèche avec xérostomie, liée à un tarissement des sécrétions lacrymales et salivaires:

– ce syndrome est une véritable maladie auto-immune, parfois primitive, souvent associée à une connectivite et notamment à une polyarthrite rhumatoïde.

– le diagnostic repose avant tout sur la biopsie des glandes salivaires accessoires labiales: infiltrat lymphoïde de ces glandes.

– ce syndrome peut évoluer vers un lymphome malin, ce qui justifie une surveillance rigoureuse.

– dans certains cas existent une épisclérite, une sclérite, exceptionnellement une scléromalacie perforante particulièrement grave.

Atteinte musculaire

L’atteinte musculaire se traduit:

– par une amyotrophie satellite des arthropathies.

– mais parfois aussi par une myosite.

– ou par des lésions musculaires d’origine médicamenteuse comme les rares myopathies des antipaludéens de synthèse, l’exceptionnelle polymyosite liée à la D-pénicillamine (Trolovol*) ou la myasthénie induite par le Trolovol* ou l’Acadione*.

Amylose

On observe une amylose dans 5 à 26% des cas, selon que le diagnostic est clinique ou autopsique:

– sur le plan clinique, elle se traduit par une protéinurie massive avec œdèmes des membres inférieurs secondaires à un syndrome néphrotique.

– le diagnostic peut être confirmé par biopsie rectale avec coloration spéciale dans 70% des cas.

– parfois, une biopsie rénale est indispensable.

– le pronostic est mauvais en l’absence de traitement efficace disponible, et le décès survient souvent dans les années qui suivent.

Signes hématologiques

Parmi les signes hématologiques, on observe:

– des polyadénopathies (30 à 70% des cas).

– ou, parfois, une splénomégalie (6,5% des cas).

Signes généraux

Les signes généraux sont pratiquement constants au cours de la polyarthrite rhumatoïde mais variables dans leur intensité:

– fièvre rarement élevée.

– anorexie.

– asthénie souvent majeure bien corrélée avec l’évolutivité.

– amaigrissement qui peut être très marqué, surtout chez les sujets âgés.

EXAMENS COMPLEMENTAIRES :

Signes radiographiques :

Les signes radiographiques sont retardés de plusieurs mois par rapport aux données cliniques.

Leur sévérité varie d’un malade à l’autre.

* Ce sont des signes d’arthrite:

– pincement de l’interligne articulaire.

– érosions osseuses et géodes.

– ostéoporose localisée, parfois subluxations ou luxations secondaires aux lésions destructrices.

* Au carpe, ces lésions réalisent une carpite allant du stade I (ostéoporose géodique du carpe) au stade IV (carpite fusionnante).

* Au pied, l’érosion de l’extrémité antérieure du 5e métatarsien est précoce et très caractéristique.

* Dans 30% des cas, il existe une arthrite atloïdo-axoïdienne pouvant entraîner une luxation instable qui ne se manifeste qu’en flexion.

Des indices (indice de Sharp, indice de Larsen) permettent de quantifier les lésions radiographiques.

Signes biologiques et immunologiques :

Syndrome biologique inflammatoire

On note un syndrome biologique inflammatoire:

* avec augmentation de la vitesse de sédimentation globulaire (VS) pouvant atteindre 100mm à la première heure dans certains cas.

* la VS reste normale chez 10% des malades.

* la CRP (protéine C réactive) est élevée dans le sérum.

* il existe une hyperalpha-2-globulinémie et parfois une hypergammaglobulinémie à l’électrophorèse.

* l’hémogramme montre une anémie avec sidéropénie.

– c’est le plus souvent une anémie inflammatoire avec taux normal ou élevé de ferritine.

– si le taux de ferritine est bas, il faut chercher une anémie hémorragique surajoutée d’origine digestive, ce qui n’est pas exceptionnel à cause de la prise d’anti-inflammatoires.

– on note souvent une hyperplaquettose corrélée avec l’état inflammatoire du patient.

– parfois il existe une leucopénie. Son association avec une splénomégalie, des surinfections à répétition et parfois des ulcères des membres inférieurs constitue le rare syndrome de Felty (0,5% des polyarthrites rhumatoïdes).

Facteur rhumatoïde

Le facteur rhumatoïde a donné son nom à la maladie.

* C’est un auto-anticorps de type IgM dirigé contre les IgG, mais il existe aussi des facteurs rhumatoïdes de type IgG, IgA ou IgE.

Quelle que soit la classe immunoglobulinique de ces facteurs rhumatoïdes, leur point commun est d’être dirigés contre des immunoglobulines G humaines ou animales.

* On détecte le facteur rhumatoïde par les réactions d’agglutination de Waaler-Rose, par le test au latex ou par néphélométrie laser.

* Toutes ces techniques ne dépistent que les facteurs rhumatoïdes agglutinants de type IgM.

* Ces tests ne sont en général positifs qu’au minimum 6 mois et le plus souvent 1 an après le début de la maladie:

– la réaction de Waaler-Rose est considérée comme positive à partir du 1/64.

– tandis que le test au latex en tube l’est à partir du 1/80.

– en néphélométrie le seuil de positivité est à 10 unités.

– les résultats peuvent être exprimés en unités internationales.

* Dans 20 à 30% des cas, il n’y a jamais de facteur rhumatoïde décelable: on parle alors de polyarthrite « séronégative ».

* La présence de facteur rhumatoïde n’est pas synonyme de polyarthrite rhumatoïde. elle n’est ni indispensable ni suffisante pour confirmer le diagnostic. On trouve du facteur rhumatoïde dans un certain nombre:

– de connectivites, notamment le syndrome de Gougerot-Sjögren.

– de maladies infectieuses aiguës (positivité transitoire ou chronique).

– de parasitoses.

– d’affections pulmonaires ou hépatiques.

– ou dans divers syndromes prolifératifs.

– et chez certains sujets normaux.

Anticorps antikératine

Les anticorps antikératine, actuellement appelés anti-stratum corneum, sont dépistés par immunofluorescence sur coupe d’œsophage de rat (cet œsophage est « kératinisé »):

– inconstants (présents dans 55% des cas), ils sont très spécifiques de la polyarthrite rhumatoïde (sensibilité: 49%, spécificité: 97%). On les trouve dans 34% des polyarthrites rhumatoïdes « séronégatives ».

– leur détection commence à entrer dans le domaine de la pratique courante.

– comme les anticorps antipérinucléaires, ils sont dirigés contre une protéine particulière de l’épiderme, la filaggrine.

Anticorps antinucléaires

Des anticorps antinucléaires sont retrouvés dans 15 à 30% des cas à titre généralement faible.

Les anticorps anti-ADN natif, caractéristiques de la maladie lupique, sont rares et à taux faible au cours de la polyarthrite rhumatoïde.

Gènes HLA DRB1

La recherche des gènes HLA DRB1 01 et 04 n’a pas un intérêt majeur pour le diagnostic.

Elle est surtout utile comme marqueur pronostique, les formes de PR les plus sévères étant volontiers associées au gène 04.

Liquide synovial

* Le liquide synovial est de type inflammatoire: riche en protéines (réaction de Rivalta positive) et en cellules (plus de 3 000 par mm3), ce sont surtout des polynucléaires.

* Le taux de complément synovial est abaissé, alors qu’il reste normal dans

le sang au cours de la polyarthrite rhumatoïde, sauf dans certaines formes de vascularites. un rapport C3-C4 synovial sur C3-C4 sérique bas (inférieur à 0,30)

a été considéré comme évocateur de la polyarthrite rhumatoïde. En fait, cette constatation non spécifique a un intérêt diagnostique limité.

Biopsie synoviale

La biopsie synoviale est un geste simple, au moins au genou. Elle montre, à la phase d’état:

– une hyperplasie synoviale avec hypertrophie des villosités, qui constituent de véritables bourgeons conjonctivo-vasculaires réalisant le pannus.

– une hyperplasie des couches bordantes de la synoviale.

– un infiltrat lymphoplasmocytaire des couches profondes, formant de véritables nodules périvasculaires et une importante néo-angiogenèse ainsi que des dépôts de fibrine.

– cette association de lésions est évocatrice de la polyarthrite rhumatoïde.

– cependant, au début, l’histologie montre volontiers des lésions de synovite subaiguë non spécifique.

Évolution et pronostic :

La polyarthrite rhumatoïde est une maladie hétérogène dont la gravité est très variable d’un malade à l’autre:

– outre la sévérité intrinsèque de la maladie, le pronostic dépend aussi de la précocité du diagnostic et de la qualité de la prise en charge thérapeutique.

– l’évaluation des facteurs de pronostic est importante pour fixer la stratégie thérapeutique, surtout au début.

* La présence de tels facteurs nécessite la mise en train d’emblée de thérapeutiques de fond aussi puissantes que possible.

* Un arrêt spontané de l’évolution se produit dans 90% des cas à la fin du premier trimestre de la grossesse. en général, une poussée évolutive survient après l’accouchement. En dehors de cette circonstance, la fréquence des rémissions spontanées est inférieure à 10%.

* Divers types d’évolutions ont été décrits:

– la polyarthrite rhumatoïde peut provoquer une seule poussée de durée variable.

– elle peut évoluer de manière progressive vers l’aggravation au fil des années.

– d’une manière générale, elle évolue souvent par poussées.

– elle est susceptible de durer toute la vie du patient.

– les formes particulièrement graves dites « réfractaires » représentent environ 10 à 15% des cas.

Diagnostic différentiel :

Le diagnostic différentiel est difficile lorsque la polyarthrite rhumatoïde est au début et il dépend du mode de présentation.

A la phase d’état, le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde est évident.

MONOARTHRITE :

Devant une monoarthrite d’évolution chronique, il faut éliminer une monoarthrite infectieuse, notamment tuberculeuse, par étude du liquide synovial (cytologie et culture) et par biopsie de la synoviale.

OLIGOARTHRITE OU POLYARTHRITE :

De nombreux problèmes diagnostiques se posent devant une oligoarthrite ou une polyarthrite.

Polyarthrites d’origine infectieuse :

* Devant une polyarthrite, il faut toujours chercher une maladie infectieuse, notamment:

– une septicémie à streptocoque, staphylocoque ou autre germe, même en l’absence de porte d’entrée et surtout s’il s’agit d’un terrain immunodéprimé (sujet traité par des immunodépresseurs, toxicomane).

– ou une endocardite qui peut s’accompagner de signes articulaires et de la présence de facteur rhumatoïde.

* Certaines infections virales comme l’hépatite B, l’hépatite C, la rubéole, les parvoviroses B19 ou les infections par le virus HTLV1 peuvent s’accompagner d’arthralgies ou même de véritables polyarthrites.

* L’infection par le VIH peut aussi se manifester de cette façon, de même que la rare roséole syphilitique.

* L’infection par Borrelia burgdorferi, secondaire à une piqûre de tique (maladie de Lyme), réalise une oligoarthrite:

– dans ce cas, les manifestations articulaires sont parfois précédées de signes cutanés (Erythema chronicum migrans) et éventuellement associées à une atteinte neurologique (méningo-encéphalite) ou cardiaque.

– le diagnostic se fait par la sérologie.

* Une polyarthrite peut aussi être liée à une brucellose ou une gonococcie, mais cette éventualité est rare.

Rhumatismes inflammatoires à déclenchement postinfectieux :

Rhumatisme articulaire aigu

Le rhumatisme articulaire aigu est exceptionnel chez l’adulte après 30 ans, sauf chez des sujets ayant présenté une première attaque pendant l’enfance ou l’adolescence.

Rhumatismes inflammatoires subaigus

* Le rhumatisme post-streptococcique ou rhumatisme postangineux de l’adulte est une forme dégradée du rhumatisme articulaire aigu.

– apparaissant au décours d’une angine ou d’une infection ORL, c’est une oligoarthrite touchant les grosses articulations et qui s’accompagne d’une élévation des antistreptolysines.

– le pronostic est favorable mais 5% des cas de polyarthrite rhumatoïde peuvent commencer comme un rhumatisme postangineux.

* Un purpura rhumatoïde de l’adulte peut être évoqué devant des polyarthralgies précédées ou associées à un syndrome douloureux abdominal et à un purpura des membres inférieurs au décours d’une infection streptococcique.

Arthrite réactionnelle

Une arthrite réactionnelle peut être évoquée, surtout chez l’adulte jeune, devant une oligoarthrite ou une polyarthrite aiguë fébrile.

* Ce concept regroupe un ensemble de maladies articulaires se développant volontiers chez un patient porteur de l’antigène HLA B27 (présent dans 78% des cas), et secondaires à une infection à divers germes:

– Chlamydia.

– mycoplasme.

– Yersinia.

– Shigella.

– Salmonella.

* La forme la plus complète en est le syndrome oculo-urétro-synovial ou syndrome de Fiessinger-Leroy-Reiter.

* Les arthrites réactionnelles entrent dans le cadre plus général des spondylarthropathies séronégatives.

La notion d’arthrite « réactionnelle » est actuellement discutée car des travaux récents ont montré par des techniques sensibles comme la PCR la présence du germe dans l’articulation chez certains malades.

Autres rhumatismes inflammatoires :

Pseudo-polyarthrite rhizomélique

La pseudo-polyarthrite rhizomélique s’observe après la soixantaine et comporte une importante altération de l’état général avec fièvre, une atteinte articulaire rhizomélique et des myalgies sans altérations radiographiques:

– dans 25% des cas, elle est associée à une maladie de Horton.

– le diagnostic différentiel avec une polyarthrite rhumatoïde à début rhizomélique est pratiquement impossible à faire.

– seule l’évolution tranchera.

Polyarthrite œdémateuse du sujet âgé

La polyarthrite œdémateuse du sujet âgé (ou RS3 PE), liée à l’antigène HLA B7, comporte un important œdème des mains et parfois des pieds.

Le pronostic est favorable sous corticoïdes.

Spondylarthropathies séronégatives

Les spondylarthropathies séronégatives regroupent diverses maladies touchant les articulations périphériques et axiales (notamment sacro-iliaques), sans facteur rhumatoïde, souvent associées à la présence de l’antigène HLA B27.

* Sous ce terme on regroupe les arthrites réactionnelles, la pelvispondylite rhumatismale ou spondylarthrite ankylosante, le rhumatisme psoriasique et les rhumatismes des colo-entéropathies chroniques (maladie de Crohn, rectocolite ulcéro-hémorragique).

* Ce regroupement facilite le diagnostic clinique, car ces maladies ont des points communs: outre l’atteinte articulaire et inflammatoire à type d’oligoarthrite asymétrique, parfois associée à des signes pelviens ou rachidiens, on note volontiers:

– un syndrome inflammatoire des doigts ou des orteils « en saucisse ».

– parfois des talalgies.

– ou des manifestations extra-articulaires à type d’urétrite, d’iritis, de diarrhées, ou des lésions muqueuses génitales ou buccales.

* Ces symptômes, d’une grande importance diagnostique, sont à rechercher systématiquement à l’interrogatoire.

SAPHO :

Le SAPHO (syndrome acné, pustulose, hyperostose, ostéite) peut être rapproché des spondylarthropathies.

Maladie de Still de l’adulte

La maladie de Still de l’adulte se traduit par une atteinte articulaire inflammatoire associée à des poussées fébriles intermittentes et à des lésions cutanées fugaces.

Il existe, du point de vue biologique, une importante hyperleucocytose faisant parfois évoquer une hémopathie.

Rhumatismes paranéoplasiques

Les rhumatismes paranéoplasiques doivent être évoqués:

– certaines polyarthrites évoluent dans le sillage d’une néoplasie.

– l’ostéo-arthropathie hypertrophiante pneumique de Pierre Marie est un rhumatisme inflammatoire touchant surtout les grosses articulations, associé à un hippocratisme digital et à une périostose radiologique.

– ce rhumatisme accompagne un cancer du poumon qui est souvent extirpable: il guérit après exérèse du cancer et récidive en cas de reprise évolutive de la néoplasie.

Connectivites :

Syndrome de Gougerot-Sjögren primitif

Il faut différencier la polyarthrite rhumatoïde du syndrome de Gougerot-Sjögren primitif:

– en effet, celui-ci peut comporter des arthralgies, voire des synovites sans érosion articulaire à la radiographie et un taux très élevé de facteur rhumatoïde.

– un interrogatoire attentif, à la recherche d’une xérostomie ou d’une xérophtalmie, un test de Schirmer et une biopsie des glandes salivaires accessoires permettent de faire le diagnostic.

Maladie lupique

La maladie lupique pose aussi des problèmes de diagnostic:

– en effet, le lupus comporte des signes articulaires révélateurs ressemblant parfois à une polyarthrite rhumatoïde dans près de 90% des cas, généralement sans déformation.

– les manifestations cutanées caractéristiques sont souvent absentes au début.

– il faut donc, devant tout syndrome articulaire inflammatoire, rechercher systématiquement les anticorps antinucléaires et anti-ADN natif caractéristiques du lupus.

Autres connectivites

D’autres connectivites doivent être éliminées: connectivites mixtes, sclérodermie.

Certaines vascularites peuvent s’accompagner de manifestations articulaires et même de facteur rhumatoïde.

C’est le cas, par exemple, de la maladie de Wegener. Cette affection s’accompagne d’anticorps anticytoplasme des granulocytes.

Polyarthrites d’origine microcristalline :

La goutte et surtout la chondrocalcinose peuvent, dans leurs formes chroniques et notamment chez le sujet âgé, donner un tableau clinique ressemblant de très près à une polyarthrite rhumatoïde.

Le diagnostic de la chondrocalcinose est radiologique: le liséré calcique, caractéristique, doit être cherché au genou, intéressé dans 90% des cas.

Il faut rechercher des microcristaux d’urate (goutte) ou de pyrophosphate (chondrocalcinose) dans le liquide synovial.

Arthroses :

Les arthroses, notamment digitales, peuvent s’accompagner de poussées congestives pouvant simuler une polyarthrite rhumatoïde.

Maladies diverses :

D’autres diagnostics doivent parfois être évoqués: polyarthrite de la sarcoïdose, de la maladie de Whipple ainsi que les rhumatismes inflammatoires donnant des manifestations articulaires intermittentes comme le rhumatisme palindromique ou les arthrites à éosinophiles.

Traitement :

Le but est de préserver la fonction articulaire, éviter si possible les déformations, et maintenir l’insertion socioprofessionnelle du patient.

Cinq grands moyens sont associés:

– information du malade.

– approche médico-psychologique.

– traitements médicamenteux généraux et locaux.

– réadaptation fonctionnelle.

– traitement chirurgical.

Il s’agit d’une véritable stratégie thérapeutique, gérée par une équipe soignante pluridisciplinaire (réunissant rhumatologue, médecin de rééducation, chirurgien orthopédiste, neuro-psychiatre, médecin généraliste, infirmières, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, podologues, aides-soignants) dans le cadre d’une prise en charge globale.

INFORMATION DU MALADE :

L’information du malade est essentielle et doit être:

* à la fois technique, expliquant au patient :

– les possibilités thérapeutiques.

– les grandes lignes de la prise en charge.

– les effets secondaires des médicaments.

* et psychologique.

Le soutien psychologique est très utile et aide le malade dans sa lutte contre la polyarthrite rhumatoïde.

Des brochures d’information sont distribuées par les associations de malades.

APPROCHE MEDICO-PSYCHOLOGIQUE :

C’est un temps important de la prise en charge.

Cette approche est intégrée dans une dynamique globale et fait écho au vécu que les malades ont de leur polyarthrite rhumatoïde.

Elle est réalisée par des entretiens médico-psychologiques faits par des psychiatres ou des psychologues. Ces entretiens sont suivis de réunions de synthèse avec l’ensemble de l’équipe soignante, ce qui permet une prise en charge très personnalisée du patient.

TRAITEMENT MEDICAMENTEUX GENERAL :

On distingue les traitements de fond susceptibles d’arrêter ou de freiner l’évolution de la polyarthrite rhumatoïde, et les traitements symptomatiques qui améliorent les douleurs mais n’influencent pas l’évolution.

Traitements symptomatiques :

Les traitements symptomatiques sont nombreux et utiles.

Ce sont:

* des antalgiques purs comme:

– le paracétamol et ses dérivés (Doliprane*, Efferalgan*, Propofan*,

Di-Antalvic*).

– l’aspirine à faible dose.

* ou les anti-inflammatoires non stéroïdiens, par exemple l’Indocid*, le Profénid*, le Voltarène*, le Cébutid*, le Feldène*, le Tilcotil*, la Naprosyne*, l’Apranax*, le Mobic*.

* tous ces médicaments comportent, à des degrés divers, des risques d’ulcère gastrique.

* la corticothérapie peut être employée au cours de la polyarthrite rhumatoïde dans certaines conditions. Il faut proscrire la corticothérapie par voie intramusculaire:

– si elle est nécessaire, il faut utiliser des corticoïdes à durée de vie courte comme le Solupred* ou le Cortancyl*, à raison d’une prise unique matinale à

8 heures pour respecter le cycle nycthéméral du cortisol.

– la posologie initiale est de l’ordre de 10 à 15 mg/j de Cortancyl* ou de Solupred*.

– la dose sera progressivement réduite, si possible au-dessous de 10 mg/j ensuite.

– exceptionnellement, dans des formes particulièrement inflammatoires, on peut proposer des perfusions de fortes doses de cortisone (bolus).

Traitements de fond :

Les traitements de fond doivent être employés très précocement, dès que le diagnostic est posé:

– ils nécessitent une surveillance régulière.

– ils agissent tous avec un retard de l’ordre de 3 à 4 mois environ.

On distingue: les sels d’or, les antipaludéens, la salazopyrine, les dérivés thiolés, le méthotrexate, la ciclosporine, les immunosuppresseurs.

Sels d’or

Les sels d’or se présentent, en France, sous forme d’Allochrysine* injectable. La posologie est de 3 cg/kg (soit pour un adulte de 60 kg une dose totale

de 1,80 g).

* On effectue en général une première cure à raison d’une injection de 0,05 g par semaine (deux au total), puis une injection de 0,10 g chaque semaine, pour atteindre la dose totale prévue.

* Si le résultat est bon et la tolérance satisfaisante, on réalise ensuite un traitement dit d’entretien, à raison d’une injection de 0,10 g tous les 21 jours ou tous les mois.

* Des effets secondaires sont possibles dans au moins 30% des cas:

– intolérance cutanée ou muqueuse, prurit et lésions érythémateuses pouvant aller jusqu’à l’érythrodermie, stomatite.

– protéinurie aboutissant parfois à un syndrome néphrotique d’évolution régressive en quelques mois.

– incidents hématologiques (leucopénie ou plaquettopénie) ou digestifs (diarrhée) beaucoup plus rares.

* Le malade doit être informé des incidents possibles.

* La surveillance biologique comporte:

– un hémogramme complet avec plaquettes tous les mois.

– et la vérification de l’absence de protéinurie avant chaque injection.

* Les sels d’or per os (Ridauran*) n’ont qu’une très faible efficacité.

Antipaludéens de synthèse

Les antipaludéens de synthèse sont représentés par le Plaquenil* (200 à 400 mg/j) ou la Nivaquine* (100 à 300 mg/j).

* Ces traitements nécessitent une surveillance ophtalmologique avec:

– un contrôle du champ visuel aux couleurs tous les 3 à 4 mois.

– et éventuellement un électrorétinogramme une ou deux fois par an. l’intérêt de cette exploration est actuellement discuté.

* Ils peuvent en effet induire de manière exceptionnelle une rétinopathie. plus souvent, ils sont responsables de prurit, de quelques troubles digestifs ou de vertiges.

* En règle générale, leur tolérance est assez bonne.

Salazopyrine

La salazopyrine est utilisée depuis longtemps dans le traitement de la rectocolite hémorragique et de la maladie de Crohn:

– elle est intéressante dans certaines formes de polyarthrite rhumatoïde peu évoluées, à une posologie progressive allant jusqu’à 2 à 3 g par jour.

– elle peut déterminer des troubles digestifs, des éruptions cutanées, parfois de la fièvre ou une éosinophilie.

– il faut surveiller régulièrement l’hémogramme à cause du retentissement possible sur les lignées sanguines (leucopénie).

Dérivés thiolés

Les dérivés thiolés sont la D-pénicillamine (Trolovol*) et la tiopronine (Acadione*).

* La posologie du Trolovol* est de 300 mg/j pendant 1 mois, 600 mg/j ensuite, plus rarement 900 mg.

* L’Acadione* se prescrit à raison de 1g/j, éventuellement 1,50 g/j.

* La surveillance est la même que celle de la chrysothérapie.

* Ces produits peuvent en plus déterminer des maladies auto-immunes:

– apparition d’anticorps antinucléaires.

– très rarement lupus induit.

– pemphigus.

– myasthénie.

– exceptionnellement polymyosite.

Méthotrexate

Le méthotrexate, initialement utilisé en cancérologie et en hématologie, est très employé dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde depuis une dizaine d’années. C’est un antifolique inhibiteur de la dihydrofolate réductase.

* La posologie, chez l’adulte, est de 7,5 à 15 mg en une seule prise par semaine à jour fixe, soit per os soit par voie intramusculaire. seul le Novatrex* a l’autorisation de mise sur le marché pour la polyarthrite rhumatoïde sous forme de comprimés.

* Le méthotrexate agit plus rapidement que les autres traitements de fond, en 1 à 2 mois environ.

* Le méthotrexate est formellement contre-indiqué chez les malades atteints:

– d’hépatopathie chronique.

– d’éthylisme.

– d’affections respiratoires.

– ou d’insuffisance rénale.

* Des effets secondaires bénins à type de nausées ou de vomissements sont fréquents: ils sont en général évités par l’adjonction d’acide folique à faible dose (Spéciafoldine*, 5mg un jour sur deux par exemple).

* Des surinfections virales (zona) ou bactériennes ont été signalées.

* Les accidents hématologiques (leucopénie ou plaquettopénie) ne sont pas fréquents (3%) mais ils sont potentiellement dangereux et nécessitent l’arrêt définitif du produit.

* L’accident le plus grave est une pneumopathie d’hypersensibilité (3% des cas), qui se traduit par de la toux, de la dyspnée et parfois de la fièvre:

– il faut alors arrêter le produit et envisager, de préférence en hospitalisation, une thérapeutique par bolus cortisonique, après avoir éliminé une pneumopathie infectieuse par lavage broncho-alvéolaire.

– avant de commencer le traitement, il est prudent de faire un cliché du poumon et éventuellement une exploration fonctionnelle respiratoire.

* D’exceptionnels cas de lymphome (certains spontanément résolutifs à l’arrêt du traitement) ont été rapportés chez des malades traités par le méthotrexate.

* Le méthotrexate ne doit pas être associé à certains médicaments, notamment au Bactrim*, à cause du risque d’agranulocytose ou d’aplasie médullaire. Les fortes doses d’acide folique ou folinique peuvent inhiber son activité.

* Il est fortement tératogène. aussi toute grossesse est-elle formellement contre-indiquée:

– une contraception efficace pendant le traitement est indispensable.

– une grossesse peut être envisagée 3 mois après l’arrêt du méthotrexate.

* La surveillance du méthotrexate est clinique et biologique: vérification tous les mois de l’hémogramme avec plaquettes, de la créatininémie et des transaminases, car le produit peut être hépato-toxique.

* Le méthotrexate bénéficie d’une maintenance thérapeutique de 50% à 5 ans, contre 20% pour les autres traitements de fond. Cela traduit une bonne efficacité et une tolérance relativement satisfaisante.

Ciclosporine

La ciclosporine (Sandimmum*, Néoral*) est réservée aux cas de polyarthrite rhumatoïde particulièrement sévères. Elle nécessite une surveillance rigoureuse de la pression artérielle et de la créatininémie.

Autres immunodépresseurs

Les autres immunodépresseurs (Endoxan*, Imurel*, Chloraminophène*) ne sont utilisés qu’à titre exceptionnel:

– on les réserve aux formes particulièrement graves de polyarthrite rhumatoïde faisant courir un risque vital et, notamment, aux vascularites.

– dans ce cas, les perfusions d’Endoxan* donnent souvent d’excellents résultats.

– les alkylants (Endoxan*, Chloraminophène*), utilisés per os et pendant plusieurs années, augmentent considérablement le risque de survenue d’hémopathies malignes.

TRAITEMENT LOCAL :

Le traitement local est d’une grande importance. Il faut:

– évacuer les épanchements articulaires.

– faire une infiltration intra-articulaire de corticoïdes qu’il ne faut pas renouveler trop souvent.

* Si le résultat d’une ou deux infiltrations locales de corticoïdes est insuffisant, il faut avoir recours sans tarder à des synoviorthèses isotopiques ou chimiques, dont les résultats sont excellents si elles sont faites précocement.

En cas d’échec, une synovectomie sous contrôle arthroscopique peut être envisagée.

RÉADAPTATION FONCTIONNELLE :

La réadaptation fonctionnelle fait partie intégrante du traitement. Elle est exceptionnellement contre-indiquée.

Appareillages de repos

* Les appareillages de repos sont nécessaires pour éviter le flexum du genou et les déformations des mains.

– Ils sont utilisés durant la nuit.

– Il existe des cannes spéciales avec appui antébrachial pour les sujets âgés atteints de polyarthrite rhumatoïde, qui tiennent compte des déformations de la main rhumatoïde.

* La rééducation est un élément majeur de la prise en charge thérapeutique de la polyarthrite rhumatoïde:

– elle fait appel à des équipes de kinésithérapeutes et d’ergothérapeutes spécialisés.

– elle permet l’éducation gestuelle du malade et la mobilisation visant à éviter l’enraidissement articulaire.

– en raison de la fréquence des problèmes podologiques posés au cours de la polyarthrite rhumatoïde, des consultations de chaussage spécialisé sont nécessaires: elles permettent éventuellement la confection d’orthèses plantaires ou de chaussures sur mesure.

TRAITEMENT CHIRURGICAL :

Les indications chirurgicales sont discutées au cours de consultations médico-chirurgicales réunissant rhumatologue, chirurgien orthopédiste et malade.

Chirurgie précoce

La chirurgie peut être précoce:

– ténosynovectomie des extenseurs ou des fléchisseurs des doigts pour prévenir les ruptures tendineuses.

– synovectomie du poignet associée à une résection de la tête cubitale.

Chirurgie tardive

La chirurgie est tardive pour:

– les arthroplasties de la hanche ou du genou.

– le réalignement des avant-pieds.

– l’arthrodèse métacarpo-phalangienne du pouce ou du poignet.

– l’arthrodèse occipito-C1 C2 en cas de luxation atloïdo-axoïdienne menaçante pour la moelle épinière.

Cette chirurgie nécessite une équipe spécialisée et une réadaptation fonctionnelle adaptée.

INDICATIONS DU TRAITEMENT :

* Polyarthrite rhumatoïde au début à type d’oligoarthrite d’intensité moyenne:

– le traitement comporte l’association d’antalgiques, d’anti-inflammatoires non stéroïdiens et d’un traitement de fond sous forme de Plaquenil*, à raison de deux comprimés par jour ou d’une chrysothérapie (Allochrysine*) ou de salazopyrine.

– il est associé à la confection d’appareillages de repos, à des infiltrations de corticoïdes ou des synoviorthèses, ainsi qu’à une réadaptation fonctionnelle.

* Dans le cas d’une polyarthrite rhumatoïde au début très inflammatoire, il faut envisager un traitement par le méthotrexate, per os ou par voie intramusculaire, parfois associé à une corticothérapie générale.

* Pour une polyarthrite rhumatoïde ayant réalisé une intolérance aux sels d’or ou à la Salazopyrine* ou ayant échappé à l’un de ces traitements, on peut discuter l’indication de Trolovol*, d’Acadione* ou éventuellement de méthotrexate, toujours en association avec la réadaptation fonctionnelle, les appareillages de repos et les synoviorthèses.

* La polyarthrite rhumatoïde sévère ayant échappé aux traitements de fond habituels (en dehors du méthotrexate):

– est une bonne indication pour un traitement par le méthotrexate ou éventuellement par l’Imurel*.

– en cas d’échec, on peut, dans ces formes réfractaires, discuter l’indication de la ciclosporine (Sandimmum*, Néoral*) avec une surveillance tensionnelle et surtout rénale très rigoureuse.

– une corticothérapie générale est le plus souvent nécessaire.

* La polyarthrite rhumatoïde du sujet âgé avec important amaigrissement est une très bonne indication pour une corticothérapie générale per os, à une posologie d’attaque de 0,25 à 0,50mg/j, cette dose étant progressivement réduite en fonction du résultat clinique.

* Polyarthrite rhumatoïde avec vascularite et neuropathie:

– corticothérapie générale sous forme de bolus, associée à des perfusions mensuelles d’Endoxan*.

– des plasmaphérèses peuvent être envisagées.

Conclusion :

En attendant le traitement préventif ou radicalement curatif de la polyarthrite rhumatoïde, c’est sans aucun doute la prise en charge globale par une équipe pluridisciplinaire qui constitue actuellement la meilleure approche thérapeutique de cette maladie.

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