Coxarthrose

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La coxarthrose est l’affection la plus fréquente de la hanche. Elle se caractériser par la destruction du cartilage coxo-fémoral à laquelle s’associe une réaction osseuse de voisinage qui comporte en proportion variable une ostéocondensation, des géodes et des ostéophytes.

Il existe une prédominance féminine.

* On distingue deux types de coxarthrose :

– la coxarthrose primitive apparition après 50 ans (age moyen: 60 ans). L’obésité en est le principal facteur favorisant.

– la coxarthrose secondaire débute plus précocement vers 40 ans (age moyen: 50 ans), le pronostic est souvent plus grave.

* En dehors de quelques cas particuliers (formes débutantes et destructrices rapides), le diagnostic est simple: il repose sur les données de l’interrogatoire et de l’examen clinique, et sur la lecture de deux clichés, la radiographie du bassin de face et le faux profil de Lequesne.

* Le traitement de cette affection chronique, douloureuse et invalidante a été transformé par la chirurgie prothétique. Mais toutes les coxarthroses ne relèvent pas de cette chirurgie curative. Les indications thérapeutiques doivent tenir compte de l’age, de la cause de la coxarthrose et de son retentissement fonctionnel.

Étiopathogénie :

La coxarthrose est la résultante d’un déséquilibre entre la résistance du cartilage articulaire et les charges qui lui sont imposées.

Coxarthrose

Cette résistance dépend d’une variété de facteurs biochimiques, immunologiques, génétiques, alors que les charges imposées dépendent essentiellement de facteurs mécaniques et architecturaux.

On peut ainsi schématiquement différencier la coxarthrose secondaire, o un ou plusieurs facteurs prédisposant (vice architectural, altération préexistante du cartilage) peuvent être incriminés, de la coxarthrose primitive ou idiopathique.

Coxarthroses secondaires :

Les coxarthroses secondaires se révèlent précocement, parfois avant 30 ans.

Elles représentent 60% de l’ensemble des coxarthroses.

Les causes sont nombreuses. C’est un vice architectural qui en est le plus souvent à l’origine. Il s’agit le plus souvent de dysplasies subluxantes ou de séquelles d’épiphysiolyse.

Dysplasie luxante

La dysplasie luxante est l’anomalie la plus fréquente, responsable à elle seule de 40% de l’ensemble des coxarthroses. On distingue:

* la luxation congénitale qui est grave et souvent bilatérale:

– elle prédomine dans le sexe féminin. Souvent héréditaire, elle se rencontre classiquement chez les Bretons et les Auvergnats.

– elle est dépistée à la naissance par la recherche du ressaut en complétant l’examen par des radiographies ou une échographie.

– elle doit être traitée par langeage en abduction.

* la subluxation congénitale est souvent la séquelle d’une luxation réduite dans l’enfance. Il existe une rupture du cintre cervico-obturateur.

* la dysplasie subluxante est la forme la plus fréquente. Le plus souvent asymptomatique, elle se révèle autour de 40 ans par des douleurs. Quelques années plus tard apparaîtra la coxarthrose.

Protrusion acétabulaire

La protrusion acétabulaire est plus rare, souvent bien tolérée. Elle se caractérise par une pénétration de la tête dans un cotyle trop profond.

En radiologie, la tête fémorale dépasse la ligne innominée.

La coxarthrose apparaît tardivement. La limitation articulaire prédomine sur la douleur.

Autres causes

Les épiphysiolyses entraînent comme séquelle une coxa retrorsa.

Les ostéochondrites comportent un risque de coxa plana secondaire.

Les coxarthroses d’origine traumatique sont: l’ostéonécrose, la contusion, les cals vicieux.

Les troubles statiques et les activités sportives intensives peuvent être à l’origine de coxarthrose.

Coxarthrose destructrice rapide :

Survenant sur une arthrose banale ou parfois d’emblée, la coxarthrose rapide est remarquable par son évolution vers la destruction complète de l’articulation coxo-fémorale en 6 à 24 mois.

* Elle survient le plus souvent entre 60 et 80 ans, avec une nette prédominance féminine:

– une augmentation de la VS entre 20 et 40mm à la première heure n’est pas rare.

– les douleurs sont initialement bien soulagées par le repos et la flexion est assez longtemps conservée.

– le liquide articulaire est paucicellulaire, de type mécanique.

– L’importance des douleurs et du handicap fonctionnel nécessite presque toujours la mise en place rapide d’une prothèse totale de hanche après avoir éliminé un sepsis et un tableau.

* La cause de cette destruction articulaire est inconnue. Certaines formes sont associées à une chondrocalcinose articulaire. Dans ce cas, la coxarthrose destructrice rapide s’inscrit dans le cadre des arthropathies lytiques de la chondrocalcinose.

Coxarthroses dites « primitives » :

La pathogénie des formes primitives de coxarthrose reste encore obscure.

Il est fort probable que des facteurs génétiques interviennent dans l’initiation du phénomène de dégradation cartilagineuse.

La surcharge pondérale constitue un facteur aggravant.

Diagnostic :

DIAGNOSTIC CLINIQUE :

L’interrogatoire et l’examen clinique permettent de rattacher la douleur à une pathologie de hanche.

Interrogatoire :

* La douleur, de type mécanique, siège:

– le plus souvent à l’aine, avec irradiation à la face antérieure de la cuisse.

– parfois à la fesse.

– plus rarement à la face externe ou interne de la cuisse, ce qui témoigne d’une tendinite associée.

– quelquefois au genou exclusivement. Il faut systématiquement évoquer une pathologie de hanche devant une douleur de genou.

* Horaire: la douleur survient à la marche et aux mouvements, mais cède au repos. Elle est réveillée par la mobilisation de la hanche.

Examen clinique :

L’examen clinique, toujours comparatif, comporte plusieurs étapes.

* L’inspection recherche:

– à la station debout, une attitude vicieuse.

– à la marche, une boiterie.

– un appui monopodal difficile.

– une amyotrophie du quadriceps ou des fessiers.

* La palpation de la fesse et du creux inguinal est normale. Le rachis lombaire est souple et les réflexes des membres inférieurs sont normaux.

Ces éléments permettent d’éliminer une douleur en rapport avec une radiculalgie, une hernie inguinale ou une tumeur de la fesse.

* L’étude des mobilités articulaires recherche une limitation et des douleurs dans les différents mouvements. La perte de l’hyperextension est la plus précoce, suivie de la limitation de la flexion et de la rotation externe.

* Les éléments de gravité sont précisés :

– périmètre de marche.

– boiterie.

– douleur et/ou instabilité à l’appui monopodal.

– amyotrophie quadricipitale, source d’instabilité.

– limitation des amplitudes articulaires.

– attitude vicieuse en flexion-adduction-rotation externe.

* L’évolution se fait vers l’aggravation dans des délais variables, avec possibilité de poussées inflammatoires aigu‘s dites « congestives » :

– les formes axiales ou postérieures, à tendance protrusive, sont enraidissantes mais peu douloureuses et restent en général beaucoup mieux tolérées que les coxarthroses avec pincement supéro-externe.

– il existe souvent une bilatéralisation.

EXAMENS COMPLÉMENTAIRES :

Examens radiologiques :

Une suspicion de coxarthrose nécessite la réalisation d’un cliché du bassin de face en position debout et d’un faux profil de Lequesne.

* Ces clichés permettent:

– d’affirmer la coxarthrose.

– d’évaluer son degré d’évolution.

– de savoir s’il s’agit d’une coxarthrose primitive ou secondaire.

* Ils retrouvent, comme dans toute arthrose, à des degrés variables:

– un pincement localisé de l’interligne articulaire (le plus souvent supéro-externe).

– une condensation osseuse sous-chondrale.

– des géodes.

– une ostéophytose marginale.

* Un doute concernant l’existence d’une dysplasie subluxante nécessite la réalisation d’une coxométrie avec cliché de recentrage en abduction.

Examens biologiques :

Il n’existe pas de syndrome inflammatoire.

Cas particulier :

A titre exceptionnel, on peut avoir recours:

– en cas de coxarthrose destructrice rapide, à une ponction de hanche pour éliminer une coxite infectieuse ou inflammatoire.

– en cas de coxarthrose primitive du sujet jeune, à l’arthroscanner à la recherche d’une ostéochondromatose synoviale (sanction thérapeutique).

– dans les formes précoces, vues à un stade infraradiologique, à une scintigraphie osseuse ou à l’IRM pour éliminer une pathologie osseuse locorégionale (algodystrophie, nécrose, tumeur).

– l’IRM sera, dans les années à venir, intéressante pour le diagnostic des formes précoces, mais son coût en limite actuellement les indications.

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL :

Coxites :

Dans les coxites (polyarthrite rhumatoïde, spondylarthrite ankylosante, infectieuse…):

– la douleur est d’installation plus rapide, sur un mode inflammatoire.

– la radiographie se différencie en montrant une déminéralisation épiphysaire associée à un pincement global de l’interligne articulaire.

Ostéonécrose aseptique de la tête fémorale :

L’ostéonécrose aseptique de la tête fémorale touche plus fréquemment l’homme de la cinquantaine.

– La douleur est de type mécanique, l’examen note une limitation douloureuse, surtout en abduction et rotation.

– La radiographie montre une image en coquille d’oeuf, plus tardivement un affaissement de la tête fémorale.

– La scintigraphie montre une hyperfixation précoce.

– L’examen actuellement le plus performant est l’IRM. Elle permet d’apprécier l’importance de la nécrose et la recherche d’une atteinte controlatérale (presque 50% des cas).

Algodystrophie de hanche :

L’algodystrophie de hanche provoque une douleur mécanique subite, entra”nant une boiterie avec gêne fonctionnelle importante.

– La radiographie montre une hanche déminéralisée, l’os sous-chondral est aminci. Il existe toujours un respect de l’interligne articulaire.

– La scintigraphie retrouve une hyperfixation précoce non spécifique.

– L’IRM montre des anomalies de signal précoce évocatrices, les différenciant de l’ostéonécrose aseptique.

Périarthrite de hanche :

La périarthrite de hanche est une inflammation aigu‘ de groupes tendineux (pelvi-trochantériens et adducteurs). Il existe des points douloureux précis, associés à une mobilisation de hanche normale et indolore.

La radiographie retrouve parfois une calcification au pôle supérieur du grand trochanter.

Autres affections de la hanche :

D’autres affections de la hanche, moins fréquentes, sont à écarter:

– la coxopathie pagétique.

– les arthropathies nerveuses (tabès).

– les arthropathies microcristallines: chondrocalcinose….

– la synovite villonodulaire.

– l’ostéochondromatose.

– les fractures de fatigue.

– les lésions osseuses: métastases, ostéome ostéoide…

Traitements :

MÉTHODES :

Traitement médical :

Le traitement médical fait appel :

* aux règles d’hygiène de vie visant à réduire les pressions qui s’exercent sur l’articulation coxo-fémorale:

– réduction pondérale en cas d’obésité, limitation des activités physiques et sportives (sauf la bicyclette et la natation).

– port d’une canne du côté opposé à la coxarthrose lorsque la gêne fonctionnelle devient importante.

* aux antalgiques et aux AINS:

– la dégradation progressive de l’état fonctionnel oblige en général à augmenter peu à peu la posologie.

– les infiltrations intra-articulaires de corticoides sont à éviter car elles favoriseraient l’infection pendant la période postopératoire en cas de chirurgie ultérieure.

* à la kinésithérapie, qui peut être pratiquée en milieu thermal ou marin. Elle a pour but de maintenir la trophicité musculaire, de lutter contre les douleurs d’origine tendineuse et de préserver, dans une certaine mesure, la mobilité articulaire. Il s’agit d’un adjuvant thérapeutique dont la valeur ne doit pas être sous-estimée.

* aux produits chondroprotecteurs, qui n’ont pas encore fait la preuve de leur efficacité. Cependant, l’importance des recherches actuelles dans ce domaine permet d’espérer la conception de nouvelles molécules actives dans un proche avenir.

Chirurgie :

Parmi les très nombreuses interventions chirurgicales qui ont été proposées, il n’en persiste plus en pratique que cinq:

* chirurgie conservatrice:

– l’ostéotomie de varisation (Pauwels).

– la butée cotyloidienne.

– l’ostéotomie de McMurray.

– l’ostéotomie de Chiari, translation externe de l’aile iliaque.

* chirurgie prothétique: la prothèse totale de hanche.

La réalisation d’une chirurgie conservatrice impose un appui différé d’au moins 3 mois alors que la chirurgie prothétique autorise un appui immédiat.

INDICATIONS :

Les indications dépendent de la gêne fonctionnelle et des douleurs, et non de l’importance des signes radiologiques.

D’une façon générale, le traitement conservateur doit être mis en oeuvre le plus longtemps possible. Lorsqu’il ne suffit plus à assurer au malade une autonomie suffisante, et l’opinion du malade s’avère ici fondamentale, il convient d’envisager un geste chirurgical.

C’est le plus souvent à une prothèse totale de hanche que l’on a recours. Il n’est plus exceptionnel maintenant de proposer ce type d’intervention à des sujets de moins de 65 ans.

Les résultats en sont excellents, sous réserve d’un pourcentage de complications de 5% environ:

* il faut craindre surtout les descellements:

– ils peuvent être septiques ou aseptiques.

– et sont mis en évidence le plus souvent par la radiographie.

– parfois, il faut avoir recours à la scintigraphie osseuse ou à l’arthrographie.

* les autres complications se résument aux calcifications périprothétiques, aux luxations et aux fractures.

CAS PARTICULIERS :

* Les poussées douloureuses inflammatoires dites « congestives » doivent être traitées selon certains auteurs:

– non seulement par des AINS.

– mais aussi par une mise en décharge de quelques semaines, au moyen de cannes anglaises dans le but d’éviter une chondrolyse rapide.

* Une chirurgie correctrice précoce doit être proposée aux adultes jeunes porteurs d’une dysplasie de hanche qui devient douloureuse.

– Le type d’intervention dépend du type de dysplasie.

– La butée cotyloidienne est proposée en cas de défaut de couverture antérieure et/ou externe de la tête sans pincement articulaire.

– Une varisation du col est réalisée en plus si une coxa valga est découverte. Dans ce dernier cas, il faut avertir les patients du raccourcissement constant du membre inférieur ainsi que, pour les femmes, d’un élargissement inesthétique du périné.

– S’il existe déjà un pincement articulaire important, la butée ne peut plus être réalisée et c’est une ostéotomie de Chiari qui est proposée.

* Une dysplasie asymptomatique nécessite une surveillance régulière mais ne doit pas être opérée.

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