Surveillance d’un malade sous plâtre

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Le but d’un appareil plâtré est d’immobiliser la région traumatisée du corps dans une position stable, fonctionnelle et confortable jusqu’à guérison des lésions.

RÈGLES GÉNÉRALES DE RÉALISATION :

Surveillance d'un malade sous plâtre* Un plâtre ne doit jamais être appliqué à même la peau (risques de brûlures). Habituellement deux ou trois couches de jersey recouvrent la zone plâtrée. Une protection supplémentaire peut être appliquée sur certains reliefs.

* Un appareil plâtré doit être modelé sur les reliefs anatomiques. Ce moulage prévient la mobilité à l’intérieur du plâtre, mais il doit être réalisé sans provoquer de striction (plâtre moulé mais non serré).

* L’immobilisation d’un membre nécessite au minimum la prise de l’articulation sus-jacente et sous-jacente. Les extrémités (doigts et orteils) doivent être libres.

* Sauf cas particuliers, les membres doivent être immobilisés en position de fonction (par exemple: à la main, pouce en opposition. au coude, flexion de 90°. au genou, extension complète ou légère flexion. à la cheville, pied à angle droit).

* Au moment du séchage initial, le membre ne doit pas changer de position, au risque de provoquer une arête compressive sous plâtre ou de modifier la réduction.

* En cas de fracture ou de luxation, une radiographie doit être obtenue immédiatement après la confection du plâtre.

* Lorsque le contexte fait redouter un œdème post-traumatique majeur du membre (par exemple traumatisme du coude ou intervention chirurgicale), le plâtre ne doit pas être circulaire. Il faut soit réaliser une attelle, soit fendre le plâtre circulaire sur toute sa longueur dès sa confection.

QUELQUES CONSEILS PRATIQUES :

* Pour le membre supérieur, ne pas oublier:

– de retirer les bagues (qui auraient dû être ôtées dès l’examen initial) avant de confectionner le plâtre.

– de réaliser une écharpe de soutien du plâtre.

– de rappeler au patient de placer la main en position surélevée lorsqu’il est en position couchée ou assise pour lutter contre l’œdème.

* Pour le membre inférieur: pendant le plâtrage, ne pas soutenir le membre en tirant sur le jersey distal car cela provoque une compression du talon. il faut soulever le membre en saisissant directement les orteils.

* L’allergie au plâtre existe-t-elle? En cas d’allergie pensez aux produits appliqués sur l’éventuelle plaie et aussi aux tissus de recouvrement du membre.

Règles générales de surveillance :

Surveillance par le médecin

Tout plâtre doit être revu par un médecin dans les 24 heures qui suivent sa pose, et le patient doit être systématiquement prévenu de la nécessité de consulter en urgence devant l’apparition de tout symptôme.

* Le médecin doit prendre en considération:

– une douleur d’apparition secondaire sous plâtre.

– un œdème évolutif des extrémités libres.

– une cyanose ou au contraire une décoloration des extrémités.

* Des signes généraux de type nausées et vomissements peuvent témoigner d’une complication digestive après la confection d’un corset plâtré.

Coopération du patient

La pose d’un appareillage plâtré nécessite, en plus de la vigilance du médecin, une coopération du patient. Celui-ci doit respecter certaines précautions et éviter toute altération de son appareil. Il doit:

– respecter le temps de séchage de 24 à 48 heures selon le volume du plâtre.

– ne pas vernir ou recouvrir d’un enduit son plâtre. cela enlève les avantages de la porosité et entraîne des risques de macération.

– ne pas mouiller le plâtre qui perdrait alors ses propriétés mécaniques (protection en sac plastique lors des douches).

– entretenir sa musculature par la pratique pluriquotidienne des contractions isométriques des muscles inclus dans l’appareil.

En ce qui concerne les plâtres du membre inférieur, le patient doit particulièrement veiller à:

– ne pas marcher sur un plâtre. Des talonnettes sont prévues pour les bottes de marche, sinon les déplacements se font avec des béquilles.

– garder le membre surélevé lorsqu’il est assis ou couché.

– suivre son traitement anticoagulant.

Complications :

COMPLICATIONS VASCULAIRES :

Les complications vasculaires sont provoquées par la pression circonférentielle permanente exercée par l’appareillage sur un membre soit par défaut de réalisation, soit par œdème secondaire.

Obstacle au retour veineux :

Les gênes au retour veineux sont fréquentes au membre inférieur:

– elles sont sources d’œdème et de cyanose des extrémités.

– elles sont prévenues par surélévation du membre plâtré et par la rééducation sous plâtre.

Syndrome de loge :

Le mécanisme est détaillé dans les complications des fractures de jambe.

Signes de découverte

Un plâtre trop serré peut soit provoquer à lui seul ce redoutable syndrome, soit majorer un syndrome de loge post-traumatique:

– la douleur est le signe clinique essentiel, d’intensité variable mais permanente, avec sensation de tension du membre et surtout elle est croissante.

– la douleur est exacerbée par la mobilisation passive des doigts ou des orteils.

– des troubles de la sensibilité s’installent ensuite (paresthésies, hypoesthésie, puis en l’absence de traitement, anesthésie).

Conduite à tenir

Conduite à tenir urgente, dès l’installation des douleurs:

– le plâtre et le jersey doivent être fendus sans retard.

– le membre doit être surélevé.

– les pouls périphériques sont présents.

– si la douleur ne cède pas, il faut craindre une compression interne et réaliser une prise de pression des loges musculaires (normalement inférieure à 40mmHg).

– si les pressions sont élevées ou si le tableau clinique est sévère, il faut réaliser une aponévrotomie chirurgicale d’urgence.

Au-delà de 6 heures d’ischémie, les lésions musculaires sont irréversibles, provoquant un déficit moteur définitif. C’est ainsi que se constitue le syndrome de Volkmann, décrit initialement au membre supérieur et qui est une rétraction ischémique définitive des muscles fléchisseurs. Ce type de séquelles majeures n’est aujourd’hui rare qu’en raison de la vigilance des soignants et des soignés.

Complications thrombo-emboliques :

Mécanismes de la thrombose veineuse profonde

La redoutable thrombose veineuse profonde se constitue sous l’effet de trois facteurs:

– la stase veineuse.

– les lésions de l’endothélium vasculaire.

– l’état d’hypercoagulabilité.

Toutes ces conditions sont réunies lors d’un traumatisme du membre inférieur immobilisé par plâtre. La conséquence la plus dramatique d’une thrombose veineuse profonde est l’embolie pulmonaire mortelle.

Diagnostic

Le diagnostic de thrombose veineuse sous plâtre est difficile:

– il faut prêter attention à une accélération du pouls et à un décalage thermique:

– le diagnostic de certitude est fondé sur la phlébographie et l’écho-Doppler veineux.

Prophylaxie

La prophylaxie est systématique en cas d’appareil plâtré du membre inférieur:

– la fréquence des thromboses dans ce contexte et le risque majeur que constitue l’embolie pulmonaire justifient la mise systématique, durant au moins toute la période du plâtre, sous anticoagulants: héparine fractionnée, héparines à bas poids moléculaire ou AVK.

– la rééducation constitue également un moyen prophylactique.

COMPLICATIONS CUTANEES :

Les complications cutanées sont la conséquence d’une compression localisée liée à un défaut de confection du plâtre: striction localisée, relief osseux mal protégé, arêtes internes du plâtre.

* Les escarres se développent au niveau des saillies osseuses (coude, cheville, talon) et sont évoquées en cas de douleur localisée persistante. Cette douleur à type de brûlure est majorée par la mise en pression de la zone comprimée. La douleur peut cependant être discrète et l’escarre n’est alors découverte qu’à l’ablation du plâtre.

* Les plaies et irritations cutanées peuvent compliquer un plâtre mal adapté avec frottement entre la peau et le plâtre.

Ces complications sont prévenues ou traitées soit par la réalisation d’une fenêtre en regard de la zone douloureuse, soit par la réfection de l’appareil plâtré.

COMPLICATIONS NERVEUSES :

Le mécanisme des complications nerveuses peut être le même que pour les escarres.

Les nerfs au trajet superficiel concerné habituellement sont:

– le nerf cubital au niveau de l’épitrochlée.

– le nerf sciatique poplité externe (SPE) au niveau du col du péroné.

Parfois c’est le bord supérieur du plâtre qui est la cause de la compression nerveuse:

– atteinte du nerf radial par le bord supérieur d’un plâtre brachio-palmaire.

– atteinte du SPE au bord supérieur d’une botte plâtrée.

COMPLICATIONS OSTEO-ARTICULAIRES :

Déplacements

– Après réduction d’une luxation ou d’une fracture un contrôle radiographique est indispensable pour prouver la qualité du traitement initial.

– Même si l’appareil plâtré est parfait, la fonte de l’œdème, l’amyotrophie, les mouvements naturels du patient et l’instabilité de la lésion peuvent induire un déplacement sous plâtre. Celui-ci doit être dépisté par des contrôles radiologiques réguliers.

Amyotrophie

L’amyotrophie doit être combattue par des contractions musculaires sous plâtre.

Raideur

La raideur doit être minimisée en évitant:

– les immobilisations prolongées injustifiées.

– d’immobiliser les ligaments dans une position de raccourcissement (par exemple, les articulations métacarpo-phalangiennes doivent être immobilisées en flexion, dans la mesure du possible, et non en extension).

Conclusion :

* La pose d’un appareil plâtré est un traitement qui impose une surveillance médicale.

* Tout plâtre mal supporté ou source de douleurs doit être immédiatement fendu ou largement « fenêtré ». Si le soulagement n’est pas immédiat, l’ablation du plâtre est impérative.

* Méfiez-vous, aux urgences, des appareils en résine. Ils ont l’avantage d’être légers, immédiatement secs et radiotransparents, mais l’inconvénient d’être plus rigides et moins moulants que le plâtre. Leur utilisation sur un traumatisme frais est souvent mal tolérée.

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