Périartérite noueuse

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La périartérite noueuse (PAN) est une angéite nécrosante, primitive ou secondaire à des agents infectieux, dont l’expression clinique peut être systémique ou localisée. Cette vascularite fait partie d’un groupe plus large ayant en commun une inflammation vasculaire panartérielle. Son évolution est aigue ou subaigue. Son pronostic est le plus souvent favorable grâce au traitement corticoïde, immunosuppresseur ou, dans les formes secondaires, grâce à un traitement adapté à son étiologie.

VASCULARITES :

Périartérite noueuseSous le terme de vascularites systémiques, on désigne un groupe d’affections caractérisées par une atteinte inflammatoire des vaisseaux sanguins artériels et veineux qui aboutit à une altération de la paroi vasculaire, la constitution de sténoses ou l’occlusion des lumières vasculaires par une thrombose ou une prolifération intimale.

Le polymorphisme clinique des vascularites est en partie lié à la taille et à la distribution des vaisseaux atteints.

Les vascularites systémiques engagent souvent le pronostic vital. La morbidité et la mortalité sont le fait de manifestations multiviscérales, de localisations particulières ou de complications liées aux traitements.

CLASSIFICATION :

L’hétérogénéité des vascularites, les nombreux chevauchements cliniques et pathologiques, la méconnaissance de leur étiopathogénie constituent autant d’obstacles à l’établissement d’une classification pertinente et définitive.

La plupart des classifications prennent en compte des critères cliniques et histologiques.

Les critères histologiques concernent:

– le type des vaisseaux atteints (gros vaisseaux: aorte et ses branches de divisions. vaisseaux dits « de petit calibre »: capillaires et vaisseaux précapillaires et postcapillaires. vaisseaux de moyen calibre occupant une position intermédiaire).

– et le type de l’atteinte vasculaire (nature de l’infiltrat inflammatoire, présence d’une nécrose fibrinoïde de la paroi vasculaire ou d’un granulome extra-vasculaire).

En 1990, le Collège américain de rhumatologie (ACR) a énoncé une série de critères de classification pour les principales vascularites systémiques mais ces critères ne peuvent ni ne doivent être utilisés pour le diagnostic.

Périartérite noueuse :

La périartérite noueuse touche les vaisseaux de petit et moyen calibre avec des lésions segmentaires et transmurales, siégeant volontiers aux bifurcations artérielles.

L’architecture normale de la paroi vasculaire est détruite et la lésion peut être le siège d’une dilatation anévrismale ou d’une thrombose.

Les anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA) sont habituellement absents.

Polyangéite microscopique :

Au sein même de la PAN, une forme touchant les vaisseaux de petit calibre (artérioles, capillaires et veinules) a été individualisée: la polyangéite microscopique.

Certains critères permettent de distinguer ces deux affections:

– la présence de microanévrismes et de néphropathie vasculaire en cas de périartérite noueuse que l’on appellera « classique ».

– la glomérulonéphrite nécrosante segmentaire et focale, l’existence d’une atteinte pulmonaire (hémorragie alvéolaire) et une plus forte fréquence des ANCA au cours de la polyangéite microscopique (50% d’ANCA ayant une fluorescence périnucléaire, p-ANCA, correspondant en ELISA à des antimyéloperoxydases (MPO)). Il n’y a pas de granulome.

Les autres signes sont identiques à ceux de la PAN classique.

La classification qui nous paraît aujourd’hui la plus pratique repose sur des données clinicopathologiques.

Syndrome de Churg et Strauss :

L’angéite granulomateuse allergique ou syndrome de Churg et Strauss se caractérise en clinique par l’existence:

– d’un asthme grave.

– d’une hyperéosinophilie sanguine.

– et d’une angéite nécrosante et granulomateuse cliniquement proche de la PAN touchant artères et veinules de petit calibre.

Des infiltrats à éosinophiles et des granulomes gigantocellulaires périvasculaires et surtout extra-vasculaires s’associent aux lésions vasculaires.

Les trois éléments histologiques (nécrose fibrinoïde de la paroi des vaisseaux de petit calibre, infiltrats tissulaires à éosinophiles et granulomes extra-vasculaires) caractéristiques de l’affection ne coexistent pas toujours sur le même site biopsique. Des p-ANCA (anti-MPO) sont présents dans 50% des cas.

Syndrome de Kawasaki :

Le syndrome de Kawasaki intéresse les artères de gros et moyen calibre. Son étiologie est inconnue. Il touche le nourrisson et l’enfant de moins de 5 ans bien que des observations aient été faites chez l’adulte.

Il réalise un syndrome adéno-cutanéo-muqueux fébrile.

La gravité du syndrome de Kawasaki est liée à l’atteinte cardiaque et au développement d’anévrismes coronaires qui peuvent être à l’origine de mort subite.

Les anticorps anticytoplasme (p-ANCA) sont présents dans de nombreux cas de syndrome de Kawasaki.

Angéite d’hypersensibilité :

Le terme d’angéite d’hypersensibilité est synonyme de vascularite des petits vaisseaux, de vascularite allergique et de vascularite leucocytoclasique.

Il correspond à un groupe vaste et hétérogène de maladies qui ont en commun l’atteinte des vaisseaux artériels et veineux de petit calibre.

Contrairement à la PAN, toutes les lésions histologiques ont le même âge.

La plupart des angéites d’hypersensibilité répondent à la suppression de la substance antigénique responsable, le plus souvent un médicament.

Granulomatose de Wegener :

La granulomatose de Wegener siège préférentiellement au niveau des voies aériennes supérieures, des poumons et des reins.

La triade histologique classique comporte:

– des granulomes des voies aériennes supérieures et/ou inférieures.

– une vascularite nécrosante ou granulomateuse des artères de petit calibre et des veines.

– et une glomérulonéphrite nécrosante segmentaire et focale.

Les biopsies des lésions ORL doivent être multiples et permettent d’obtenir la confirmation histologique de la granulomatose de Wegener dans 20 à 45% des cas. Les biopsies pulmonaires ont une grande valeur diagnostique.

Une glomérulonéphrite nécrosante segmentaire et focale, associée à une prolifération extra-capillaire, est l’atteinte rénale la plus fréquente et la plus typique.

Les anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles sont présents dans environ 90% des granulomatoses de Wegener actives. Il s’agit typiquement de c-ANCA qui, en ELISA, sont des anti-PR3 (protéinase 3).

Purpura rhumatoïde :

Le purpura rhumatoïde de Schönlein-Henoch intéresse essentiellement la peau, le tube digestif, les articulations et les reins. Il se présente cliniquement comme un purpura vasculaire, infiltré:

– siégeant aux membres inférieurs, parfois aux mains et à la face.

– favorisé par l’orthostatisme.

– associé à des arthralgies et à des douleurs abdominales.

Sur le plan histologique, le purpura rhumatoïde est caractérisé par une vascularite aigue des artérioles et des veinules dans le derme superficiel et l’intestin.

En immunofluorescence il existe des dépôts d’IgA dans la paroi des artérioles et les glomérules rénaux.

Le pronostic, habituellement bon, dépend de la gravité de l’atteinte rénale.

Maladie de Horton :

La maladie de Horton est une vascularite non nécrosante par sa topographie atteignant préférentiellement les artères de gros et moyen calibre, essentiellement le territoire céphalique mais souvent plus diffuse.

Sur le plan histologique, l’atteinte vasculaire comporte:

– une infiltration inflammatoire atteignant les trois tuniques essentiellement mononucléée, avec destruction du tissu élastique et réaction histiocytaire à son contact.

– il existe un épaississement intimal constitué d’une prolifération fibroblastique.

– des cellules géantes peuvent être observées au contact de la limitante élastique interne.

La maladie de Horton survient dans la majorité des cas chez les sujets âgés.

Maladie de Takayasu :

La maladie de Takayasu est la plus fréquente des artériopathies inflammatoires du sujet jeune, se définissant par une aorto-artérite non spécifique touchant l’aorte, les artères qui en naissent et les artères pulmonaires.

L’atteinte de la crosse aortique est responsable:

– de la rétinopathie ischémique.

– des complications neurologiques.

– de l’atteinte axillo-sous-clavière classiquement à l’origine de l’abolition des pouls aux membres supérieurs.

L’atteinte de l’aorte thoraco-abdominale se traduit le plus souvent par une hypertension réno-vasculaire par sténose unilatérale ou bilatérale des artères rénales.

Maladie de Buerger :

La maladie de Buerger ou thromboangéite oblitérante est une vascularite des hommes jeunes, tabagiques, touchant principalement les artères et veines de moyen et petit calibre des quatre membres mais, exceptionnellement, les vaisseaux cérébraux et viscéraux.

A l’artériographie, l’atteinte des artères sous-poplitées est presque constante et les lésions sont strictement sous-poplitées dans plus de 80% des cas.

Cryoglobulines :

Les cryoglobulines sont des immunoglobulines sériques précipitant à des températures inférieures à 37 °C et qui sont associées à une vascularite caractérisée en histologie par une nécrose fibrinoïde de la paroi des petits vaisseaux avec un infiltrat inflammatoire à prédominance de polynucléaires neutrophiles dont certains peuvent être pycnotiques (leucocytoclasie).

Il existe des dépôts hyalins intravasculaires avec en immunofluorescence un dépôt d’immunoglobulines dont la composition est celle du cryoprécipité.

On distingue trois types de cryoglobulines:

– les cryoglobulines de type I sont composées d’immunoglobulines monoclonales, le plus souvent une IgM, plus rarement une IgG. Elles s’observent au cours des hémopathies lymphoïdes.

– dans 75% des cas, les cryoglobulines sont mixtes, composées d’au moins deux variétés d’immunoglobulines, l’un des composants agissant comme un facteur antigammaglobuline contre l’autre.

– les cryoglobulines mixtes avec un composant monoclonal (type II) sont le plus souvent IgM-IgG. Le constituant monoclonal est l’IgM possédant une activité anti-IgG. Les cryoglobulines mixtes de type III ne contiennent aucun constituant monoclonal et sont habituellement composées d’IgM et d’IgG. Elles s’observent au cours des affections auto-immunes (lupus, polymyosites, PAN), de nombreuses maladies infectieuses et notamment au cours de l’hépatite virale C.

Vascularites associées aux néoplasies :

Les vascularites associées aux néoplasies représentent 3 à 8% des vascularites. Bien que le caractère paranéoplasique de ces vascularites ne puisse toujours être affirmé, l’évolution parallèle des deux pathologies suggère un lien de causalité.

La survenue de la vascularite peut précéder la découverte du cancer parfois de plusieurs mois. Plusieurs types de vascularite sont possibles.

Les vascularites leucocytoclasiques sont les plus fréquentes. Des vascularites du type de la PAN, granulomateuses, ou proches du purpura rhumatoïde, ont aussi été rapportées. Les manifestations cutanées et la fièvre sont les plus fréquemment rencontrées, les atteintes articulaires ou neurologiques étant plus rares. Les hémopathies associées aux vascularites sont principalement les leucémies à tricholeucocytes et les myélodysplasies mais aussi les lymphomes malins hodgkiniens ou non. Quant aux tumeurs solides, elles sont préférentiellement bronchiques, coliques ou rénales.

L’évolution de la vascularite est marquée le plus souvent par une corticosensibilité et par une autonomie vis-à-vis de la néoplasie sous-jacente. Le mécanisme de ces vascularites est inconnu.

PATHOGÉNIE DES VASCULARITES :

Complexes immuns :

Le dépôt de complexes immuns circulants au niveau de la paroi vasculaire a longtemps été considéré comme le principal mécanisme physiopathologique des vascularites inflammatoires. Après ce dépôt se produirait un afflux de polynucléaires neutrophiles facilité par le pouvoir chimiotactique de certaines fractions du complément.

Les polynucléaires activés libéreraient leurs enzymes lysosomiales et induiraient la nécrose de la paroi.

ANCA :

Les ANCA sont une nouvelle famille d’auto-anticorps dirigés contre des antigènes du cytoplasme des polynucléaires neutrophiles et des monocytes.

Ils ont été décrits dans:

– la maladie de Wegener.

– la PAN (exceptionnellement).

– la polyangéite microscopique.

– le syndrome de Churg et Strauss.

– le purpura rhumatoïde de Schönlein-Henoch.

– les glomérulonéphrites rapidement progressives avec nécrose focale des floculus sans dépôt d’immunoglobuline, dites « pauci-immunes ».

Bien que des ANCA aient été décrits au cours d’autres affections (recto-colite ulcérohémorragique, maladie de Crohn, cholangite sclérosante primitive, cirrhose biliaire primitive), la spécificité des ANCA pour le groupe des vascularites nécrosantes systémiques et/ou des glomérulonéphrites rapidement progressives pauci-immunes est très élevée pour les c-ANCA, moindre pour les p-ANCA.

* La méthode de référence pour la détection des ANCA est l’immunofluorescence indirecte sur des polynucléaires fixés dans l’alcool. Deux types de fluorescence sont observés:

– une fluorescence cytoplasmique des polynucléaires neutrophiles et des monocytes, appelée c-ANCA.

– une fluorescence périnucléaire des polynucléaires, appelée p-ANCA.

– quand l’aspect en immunofluorescence ne correspond ni à celui des c-ANCA ni à celui des p-ANCA, il est par convention atypique.

* Parallèlement à l’identification des antigènes cibles des ANCA, des tests en phase solide par la méthode ELISA ont été développés:

– le plus souvent les ANCA sont des anticorps de classe IgG.

– des IgM-ANCA seraient associés plus fréquemment aux hémorragies alvéolaires sévères.

– des IgA-ANCA ont été identifiés chez des patients atteints de purpura rhumatoïde.

Habituellement les patients ont soit des c-ANCA, soit des p-ANCA. cependant, leur association est possible chez un même sujet.

* Plusieurs enzymes lysosomiales contenues dans les granulations primaires et secondaires des polynucléaires neutrophiles ont été identifiées comme les cibles des ANCA:

– les deux principaux antigènes connus sont la protéinase 3 (PR3) et la myéloperoxydase (MPO), contenues dans les granulations primaires des polynucléaires neutrophiles et des monocytes.

– la PR3 est l’antigène reconnu par la majorité des c-ANCA, la MPO par la majorité des p-ANCA (80 à 90% des cas).

– un faible pourcentage de p-ANCA peut réagir avec d’autres constituants des granules primaires (élastase, cathepsine G) ou des granules secondaires (lactoferrine).

* Les ANCA en clinique:

– il a été montré par certains auteurs que le titre d’ANCA était corrélé à l’activité clinique de la maladie de Wegener et qu’une ascension des taux d’anticorps précédait la rechute clinique. cette donnée est discutée.

– à l’inverse, certains patients en rémission de leur maladie conservent des taux élevés d’ANCA.

– les c-ANCA (anti-PR3) sont présents dans 80% des maladies de Wegener non traitées et dans la moitié des formes localisées.

– les p-ANCA (anti-MPO) sont présents dans 10% des PAN classiques, et dans la moitié des cas de micropolyangéite et de syndrome de Churg et Strauss.

Activation lymphocytaire T :

Une activation lymphocytaire T est observée dans les vascularites avec ANCA.

* L’abondance du nombre des lymphocytes T activés (CD25+) au sein des granulomes et des lésions rénales de granulomatose de Wegener ainsi que l’élévation des concentrations plasmatiques du récepteur soluble à l’interleukine 2 (sIL-2R) et du « tumor necrosis factor » (TNF-alpha) en témoigne.

* Une production in situ de TNF-alpha, d’interleukine 1-bêta (IL-1ß) et de IL-2R, a été démontrée au sein des lésions rénales des glomérulonéphrites rapidement progressives pauci-immunes liées aux ANCA.

* Des études immunohistochimiques réalisées sur des biopsies neuro-musculaires de patients atteints de PAN ont montré que l’infiltrat inflammatoire était constitué essentiellement de macrophages et de lymphocytes T et particulièrement des lymphocytes CD4+. Ces cellules exprimaient des marqueurs d’activation immunologique tels que l’expression du récepteur de l’interleukine 2, du récepteur de la transferrine et des antigènes HLA-DR.

Périartérite noueuse :

ÉPIDÉMIOLOGIE :

La PAN est une affection rare.

Les taux d’incidence annuelle et de prévalence de la PAN sont, respectivement, de 0,7 pour 100 000 habitants et de 6,3 pour 100 000 habitants.

La PAN peut toucher des sujets de tous âges, avec une prédominance entre 40 et 60 ans, et toucher indifféremment les deux sexes.

ÉTIOLOGIE :

Dans la plupart des cas la cause de la PAN est inconnue.

Des virus pourraient contribuer à la pathogénie de la vascularité. L’association de la PAN au virus de l’hépatite B (VHB) est clairement établie. En France, 10% des cas de PAN sont dus à une infection par le VHB. Il est responsable de PAN classique et jamais de micropolyangéite.

Plusieurs types de vascularité, et en particulier de PAN, ont été rapportés chez des patients infectés par le VIH. D’autres virus ont été incriminés de façon exceptionnelle: le Cytomégalovirus, le Parvovirus B19, le virus HTLV1 et le virus de l’hépatite C.

ANATOMOPATHOLOGIE :

La PAN touche les vaisseaux de petit et moyen calibre avec des lésions segmentaires et transmurales siégeant volontiers aux bifurcations artérielles.

Les zones pathologiques alternent avec les zones saines, ce qui explique qu’une biopsie puisse être négative alors que l’organe est atteint.

Phase aigue

* L’inflammation de la paroi artérielle est caractérisée par:

– une nécrose fibrinoïde de la média.

– une infiltration cellulaire pléiomorphe avec une prédominance de polynucléaires neutrophiles associée à un nombre variable de lymphocytes, macrophages, monocytes et polynucléaires éosinophiles.

* L’architecture normale de la paroi vasculaire, y compris la limitante élastique interne, est détruite et la lésion peut être le siège d’une dilatation anévrismale ou d’une thrombose.

* La réaction inflammatoire périvasculaire est modérée et ne se trouve jamais à distance du vaisseau.

Phase de cicatrisation

La phase de cicatrisation est caractérisée par l’apparition d’une fibrose qui conduit à l’oblitération artériolaire. Les dilatations anévrismales régressent.

Évolution par poussées

La PAN évolue par poussées et, fait très caractéristique de cette affection, on observe dans le même organe des lésions à des stades évolutifs différents.

Atteinte des artères

Dans la PAN, les artères sont exclusivement concernées:

– toutes les artères de l’organisme peuvent être touchées, à l’exclusion des artères pulmonaires.

– la riche vascularisation du muscle par des artères de moyen calibre explique la fréquente positivité des biopsies faites à ce niveau.

MANIFESTATIONS CLINIQUES :

Les lésions de vascularite pouvant siéger dans n’importe quel viscère, la PAN est une affection très polymorphe sur le plan clinique.

Symptôme initial :

Le symptôme initial est variable. Les plus fréquents sont la fatigue, les douleurs abdominales, les douleurs des jambes, les signes neurologiques et la fièvre.

Signes généraux :

Les signes généraux sont fréquents.

* On note tout d’abord une altération de l’état général avec un amaigrissement souvent important.

* Les douleurs sont presque constantes. Elles sont:

– soit musculaires (54% des cas), diffuses ou localisées à certains segments de membre.

– soit articulaires (46% des cas).

Manifestations rhumatologiques :

* Les myalgies sont très fréquentes (54% des cas) et peuvent être très intenses. Les muscles sont douloureux à la pression.

* Les arthralgies sont les plus fréquentes des manifestations articulaires (46% des cas). Les arthrites sont souvent asymétriques.

Manifestations neurologiques :

Neuropathies périphériques

Les neuropathies périphériques (70% des cas) sont souvent inaugurales. Elles forment une multinévrite de topographie distale, d’installation rapide:

* touchant les membres inférieurs et en particulier le nerf sciatique poplité externe et, à un moindre degré, le nerf sciatique poplité interne.

* aux membres supérieurs, il peut s’agir d’une paralysie cubitale, radiale ou du médian.

* le déficit est le plus souvent moteur, parfois sensitivo-moteur.

* chez certains patients, le déficit moteur réalise un tableau de paraplégie ou de tétraplégie flasque.

* les manifestations sensitives sont responsables de douleurs et d’hypoesthésie. Des douleurs peuvent également précéder l’apparition des signes objectifs.

* le liquide céphalo-rachidien est, en règle générale, normal.

* traitée, l’évolution de la multinévrite peut se faire:

– soit, et c’est le cas le plus fréquent, vers une guérison complète après quelques mois d’évolution.

– soit vers une guérison avec séquelles définitives.

* l’atteinte des nerfs crâniens est rare (moins de 2% des cas). Il s’agit soit de paralysie oculomotrice, soit d’une paralysie faciale, soit d’atteinte de la huitième paire.

Manifestations neurologiques centrales

Les manifestations neurologiques centrales sont moins fréquentes, et plus difficiles à rattacher à la PAN si elles sont inaugurales.

Aucun tableau n’est caractéristique: hémiplégie, monoplégie, comitialité, plus rarement une hémorragie méningée par rupture de microanévrisme.

Manifestations cutanées :

Les manifestations cutanées s’observent dans 25 à 60% des cas de PAN systémique. On peut distinguer quatre types de lésions:

* le purpura vasculaire est papulopétéchial, polymorphe, composé d’éléments de taille et d’âge différents:

– l’infiltration est inconstante, mais les éléments infiltrés sont les plus typiques et doivent être le siège de la biopsie.

– le purpura peut être vésiculeux ou bulleux.

– pour certains auteurs, le purpura devrait entraîner le diagnostic de polyangéite microscopique et non plus celui de PAN. Ce point fait l’objet de débats.

* les nodules siègent avec prédilection au niveau des membres sur les trajets vasculaires. De petite taille (de 0,5 à 2cm) et profondément enchâssés dans l’hypoderme, ils sont fugaces.

* un livedo racemosa ou reticularis suspendu est fréquemment constaté.

* les lésions ulcéronécrotiques et gangréneuses sont des lésions ischémiques artérielles qui siègent le plus souvent au niveau des orteils à leur partie distale.

Manifestations rénales :

Néphropathies vasculaires

Les néphropathies vasculaires sont les manifestations rénales les plus caractéristiques de la PAN classique (environ un tiers des cas) et ont un redoutable pronostic.

* Elles se manifestent:

– par une hypertension artérielle sévère ou maligne.

– une protéinurie souvent minime.

– une hématurie de degré variable.

– une insuffisance rénale d’installation rapide et le plus souvent oligo-anurique.

* Les lésions prédominent au niveau des artères de moyen calibre et les lésions glomérulaires sont la conséquence de l’ischémie.

* Ces formes sont souvent associées à des anévrismes intrarénaux objectivés par l’artériographie ainsi que de nombreuses zones d’infarctus rénal.

Néphropathies glomérulaires

Les néphropathies glomérulaires correspondent aux polyangéites microscopiques. Le tableau est celui d’une glomérulonéphrite rapidement progressive.

– Les lésions glomérulaires sont caractérisées par la présence de foyers de nécrose avec, à leur contact, une prolifération extra-capillaire formant des croissants.

– Les lésions sont tantôt segmentaires et focales, tantôt diffuses à tous les glomérules avec une destruction du floculus.

– Ces glomérulonéphrites sont graves et nécessitent un traitement urgent.

Atteintes urétérales et hématomes rénaux et périrénaux

– Des sténoses urétérales, unilatérales ou bilatérales, uniques ou étagées, dues à des lésions fibrosantes d’origine ischémique secondaires à une artériolite urétérale ou péri-urétérale ont été rapportées.

– Des hématomes rénaux ou périrénaux peuvent survenir après la rupture spontanée d’un microanévrisme.

Manifestations cardio-vasculaires :

La PAN lèse essentiellement le myocarde, directement en « occluant » les artérioles coronaires ou indirectement par le biais de l’HTA.

* On peut évaluer de 10 à 20% la fréquence des anomalies cardiaques cliniques, électriques ou radiographiques.

– Il n’y a pas d’atteinte valvulaire.

– L’insuffisance cardiaque est le plus souvent gauche, parfois globale, exceptionnellement droite.

– Les crises d’angor authentiques sont exceptionnelles.

– Une cardiomégalie est présente dans 25% des cas.

– Les troubles de repolarisation sont les plus fréquents des signes cardiaques.

* L’HTA est observée dans 40% des cas de PAN.

– L’HTA maligne est rare. Elle accompagne la néphropathie vasculaire et est plus fréquemment observée au cours des PAN associées au virus de l’hépatite B.

– Le pronostic de l’HTA au cours de la PAN est favorable depuis l’introduction des inhibiteurs de l’enzyme de conversion.

Manifestations digestives :

La périartérite noueuse est constamment associée à des douleurs abdominales présentes chez un tiers des patients. Les lésions prédominent au niveau du grêle et sont responsables de douleurs parfois intenses.

* La survenue d’hémorragies et/ou de perforations intestinales, la persistance de douleurs abdominales intenses malgré le traitement et un amaigrissement lié à l’atteinte digestive supérieur à 20% du poids corporel sont des éléments cliniques de mauvais pronostic.

* Les localisations appendiculaires et vésiculaires sont classiques et peuvent révéler la maladie.

* Des observations de pancréatite aigue hémorragique ont été rapportées.

* La découverte de microanévrismes à l’artériographie mésentérique et coeliaque peut faire défaut.

Manifestations pleuro-pulmonaires :

Les manifestations pleuro-pulmonaires sont absentes au cours de la PAN « classique », mais présentes au cours de la polyangéite microscopique.

* Il peut s’agir de pneumopathies aux aspects radiologiques divers: infiltrats uniques ou multiples, condensation.

* Des hémorragies alvéolaires ont été rapportées. Elles sont de pronostic particulièrement sévère.

Autres manifestations cliniques :

La plupart des organes peuvent être atteints par la maladie, avec parfois des formes apparemment limitées de PAN.

* Une orchite est présente chez 6% des patients, plus volontiers au cours des PAN liées au virus de l’hépatite B.

* L’atteinte oculaire de la PAN peut se traduire par un décollement de la rétine, des nodules dysoriques ou une atteinte du tractus uvéal.

Des localisations mammaires et utérines des vascularites ont été rapportées.

EXAMENS COMPLEMENTAIRES :

Biologie :

* Un syndrome inflammatoire est habituellement présent:

– élévation de la vitesse de sédimentation supérieure à 60mm à la première heure dans trois cas sur quatre.

– augmentation de la fibrine, de la C-réactive protéine, des alpha-2 et des gammaglobulines.

– anémie inflammatoire.

* Une leucocytose supérieure à 10 000 éléments par mm3 s’observe dans la moitié des cas.

* Une hyperéosinophilie supérieure à 500/mm3 est présente dans 30% des cas.

Angiographie :

L’artériographie permet de mettre en évidence les microanévrismes et les sténoses étagées des artères de moyen calibre.

* La fréquence des microanévrismes est estimée à 60% des cas de PAN classique.

* Ces lésions sont spécifiques de la PAN bien que non pathognomoniques.

* Multiples, ils siègent principalement au niveau du mésentère, des reins et du foie et tous les territoires doivent être explorés.

* On peut observer:

– des microanévrismes intraparenchymateux.

– des irrégularités artérielles avec un aspect rigide, étiré, des oblitérations artérielles.

– plus rarement des hématomes.

* Les images anévrismales régressent après traitement.

Il n’y a pas d’anévrismes en cas de micropolyangéite.

DIAGNOSTIC :

Bien que le diagnostic de PAN puisse être porté sur la clinique et des examens biologiques non spécifiques, la démonstration histologique de l’existence d’une vascularite nécrosante des artères de moyen et petit calibre est un élément essentiel de la démarche diagnostique.

Biopsies

– Les biopsies neuro-musculaires, musculaires et cutanées sont les prélèvements les plus rentables pour l’étude anatomopathologique.

– L’idéal est d’effectuer une biopsie des organes cliniquement atteints plutôt qu’un purpura ou les lésions sont moins spécifiques.

– Les biopsies musculaires « à l’aveugle » peuvent présenter des lésions de vascularite dans 30 à 50% des cas.

Angiographie

L’apport de l’angiographie est également un élément important du diagnostic permettant de confirmer l’atteinte vasculaire dans environ 1 cas sur 5. Une angiographie normale n’élimine pas le diagnostic.

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL :

Sur le plan clinique, des observations d’embolies de cholestérol peuvent simuler une PAN.

* Elles surviennent habituellement chez des sujets plus âgés que les patients atteints de PAN et ayant un terrain athéromateux sévère.

* Les manifestations polyviscérales, le syndrome inflammatoire, l’hyperéosinophilie et l’insuffisance rénale peuvent être trompeurs.

* L’existence d’un syndrome des orteils pourpres est évocatrice du diagnostic qui repose sur la mise en évidence:

– de circonstances déclenchantes ou aggravantes (cathétérisme, chirurgie vasculaire, traitements anticoagulants).

– de cristaux de cholestérol soit au fond d’oeil, soit par la biopsie d’un tissu cible.

* Le pronostic des embolies de cholestérol reste très sombre.

Des patients atteints de septicémie, d’endocardite bactérienne, de cancer et de myxome de l’oreillette gauche peuvent présenter un tableau clinique proche de la PAN.

TRAITEMENT :

La PAN est une affection grave dont le pronostic a été considérablement amélioré par l’introduction des corticoïdes et des immunosuppresseurs.

Les corticoïdes :

La corticothérapie, exception faite des PAN liées au virus de l’hépatite B, reste la base de tout traitement.

* Le médicament de choix est la prednisone:

– la posologie est élevée en traitement d’attaque, de l’ordre de 1mg/kg/j.

– et peut être précédée par trois bolus de méthylprednisolone, à la dose de 15mg/kg/j, pendant 3 jours consécutifs, qui ont souvent un effet spectaculaire sur les signes généraux.

* La durée du traitement d’attaque est fonction de la réponse clinique. 4 à 6 semaines de traitement à pleine dose sont habituellement nécessaires.

* La diminution doit être très prudente et progressive dans le but d’amener la dose de corticoïde à 10 mg/j au 12e mois de traitement. Cette décroissance de la posologie doit être interrompue en cas de nouvelle poussée de la maladie.

* La surveillance des effets secondaires et l’adjonction de traitements adjuvants sont indispensables: supplémentation potassique, prévention de l’ostéoporose cortisonique.

Les immunosuppresseurs :

Les immunosuppresseurs et notamment le cyclophosphamide ont été introduits depuis plusieurs années en association avec les corticoïdes.

* Les effets secondaires sont:

– des troubles digestifs, une myélotoxicité, une alopécie transitoire, une azoospermie et une aménorrhée.

– les cystites hémorragiques induites par le cyclophosphamide peuvent être prévenues par une diurèse abondante.

– à plus long terme le risque oncogène est certain avec une augmentation de fréquence des cancers de la vessie, des myélodysplasies et des lymphomes.

* Deux modes d’administration du cyclophosphamide sont possibles:

– per os à la dose de 2 mg/kg/j en continu.

– ou en bolus mensuel de 600 à 750 mg/m2.

* L’association de mesna (Uromitexan*) permet d’en limiter la toxicité vésicale et les doses totales plus faibles de cyclophosphamide reçues par les patients traités avec des bolus permettent de penser que le risque oncogène est diminué.

Les échanges plasmatiques :

Les échanges plasmatiques ont été très largement utilisés dans le traitement de la PAN. Ils ne permettent pas d’améliorer la survie lorsqu’ils sont utilisés en première intention, même dans les formes sévères de la maladie.

Stratégies thérapeutiques dans le traitement de la PAN :

Périartérite noueuse isolée

Le traitement initial de la PAN non liée au virus de l’hépatite B et du syndrome de Churg et Strauss dépend de la gravité initiale de la vascularite.

* Cinq facteurs de mauvais pronostic ont été identifiés. Il s’agit de la présence:

– d’une protéinurie.

– d’une insuffisance rénale.

– d’une atteinte digestive.

– d’une atteinte cardiaque.

– ou encore d’une atteinte du système nerveux central.

* Dans les formes sévères, le traitement doit comporter l’association de prednisone et de cyclophosphamide.

* Dans les formes de moindre gravité, en l’absence de critères de mauvais pronostic, l’indication des immunosuppresseurs est habituelle mais mérite d’être démontrée par des études prospectives.

Périartérite noueuse et hépatite B

Le traitement de la PAN liée au virus de l’hépatite B doit être considéré à part, étant donné le risque de la pérennisation de l’infection virale par les immunosuppresseurs et le développement d’une hépatopathie chronique (33%).

Un traitement spécifique associant une courte corticothérapie, des échanges plasmatiques et un antiviral permet d’obtenir la guérison en 3 mois de 75% des malades et une séroconversion Ag HBe/Ac anti-HBe dans la moitié des cas. Actuellement l’antiviral que nous utilisons est l’interféron alpha-2b avec un succès tout à fait comparable.

PRONOSTIC :

La survie à 10 ans atteint globalement 80%. La mortalité est due pour 41% à l’évolutivité de la vascularite.

* Les décès liés à la vascularite surviennent précocement au cours de l’évolution et leurs causes sont principalement des perforations intestinales et l’atteinte cardiaque.

* Les autres décès sont imputables:

– aux effets indésirables (infectieux) du traitement dans 14% des cas.

– au VHB dans 7% des cas.

– à d’autres causes variées sans rapport avec la maladie dans 38% des cas.

FORMES LOCALISEES DE PERIARTERITE NOUEUSE :

Périartérite noueuse limitée à un organe :

Rarement, la PAN semble limitée à un organe sans que n’apparaisse de manifestation systémique.

Il s’agit par ordre de fréquence de l’appendice, de la vésicule biliaire, de l’intestin, de l’utérus, du testicule.

Une atteinte isolée du système nerveux périphérique sans signe systémique n’est pas exceptionnelle.

Périartérite noueuse cutanée :

L’existence de PAN limitée à une atteinte cutanée et de bon pronostic spontané est connue depuis de nombreuses années. Ces formes cutanées de PAN représenteraient environ 10% des PAN.

* Les lésions cutanées prédominent aux membres inférieurs et se caractérisent par des nodules douloureux volontiers entourés d’un livedo et des ulcérations d’origine artérielle. La biopsie des nodules montre une histologie en tout point similaire à celle des PAN systémiques.

* D’autres manifestations peuvent s’associer aux signes cutanés: arthralgies (environ 50%), myalgies, multinévrites.

* L’évolution est le plus souvent favorable:

– une rémission peut survenir soit spontanément, soit après un traitement par corticoïdes.

– les rechutes sont fréquentes.

– rarement (environ 10% des cas) une PAN systémique peut se développer.

Le syndrome de Churg et Strauss :

L’angéite granulomateuse allergique est une vascularite systémique et pulmonaire qui se caractérise par l’existence d’un asthme grave, d’une hyperéosinophilie sanguine et tissulaire associés à des atteintes viscérales proches de celles de la PAN.

Sur le plan histologique, la vascularite nécrosante touche préférentiellement les artères et les veines de petit calibre avec un infiltrat intrapariétal et périvasculaire riche en polynucléaires éosinophiles.

Les lésions extra-vasculaires typiques du syndrome de Churg et Strauss sont:

– une infiltration tissulaire par des polynucléaires éosinophiles.

– des granulomes à cellules épithélioïdes et à cellules géantes.

– leur présence est en fait inconstante.

Le syndrome de Churg et Strauss est fréquemment associé aux ANCA présents dans environ 50 à 60% des cas et sont habituellement de type p-ANCA anti-MPO.

La physiopathogénie du syndrome de Churg et Strauss est encore inconnue bien que la responsabilité d’antigènes inhalés et de certaines stimulations antigéniques (désensibilisation, vaccinations) ait été suggérée par plusieurs observations.

Le pronostic spontanément fatal du syndrome de Churg et Strauss a été transformé par la corticothérapie et les immunosuppresseurs.

ÉPIDÉMIOLOGIE :

Le syndrome de Churg et Strauss est une affection rare correspondant à environ 20% des cas de vascularites du groupe de la PAN.

Il peut toucher des sujets de tous âges, avec une prédominance entre 30 et 45 ans, sans prédominance sexuelle.

CIRCONSTANCES DECLENCHANTES :

Il est parfois possible de mettre en évidence une circonstance ayant apparemment favorisé la survenue du syndrome de Churg et Strauss: désensibilisation spécifique, sevrage de corticothérapie pour asthme sévère ou vaccination. La majorité de ces observations ont pour dénominateur commun une stimulation antigénique répétée.

Il n’y a pas d’association du syndrome de Churg et Strauss à l’infection par le VHB.

MANIFESTATIONS CLINIQUES :

Histoire naturelle :

Le syndrome de Churg et Strauss évolue classiquement en trois phases.

* La première phase ou phase prodromique consiste en l’apparition d’un asthme de survenue tardive chez un sujet présentant des antécédents allergiques cutanés ou respiratoires (rhinite allergique, polypose nasale, rhume des foins, sensibilité aux médicaments) alors qu’il n’y a pas de terrain atopique familial.

* La deuxième phase est caractérisée par l’hyperéosinophilie sanguine et tissulaire, réalisant des tableaux proches du syndrome de Löffler ou de la pneumonie chronique à éosinophiles. Cette deuxième phase peut durer plusieurs années puis s’installe la vascularite systémique qui définit le syndrome de Churg et Strauss.

* L’angéite systémique apparaît en moyenne 3 ans après le début de la maladie asthmatique (2 mois à 30 ans), touchant l’adulte de 30 à 50 ans. Les signes généraux (fièvre, amaigrissement, altération de l’état général) ne sont pas constants mais habituellement très marqués. Leur présence inhabituelle au cours de la maladie asthmatique doit faire évoquer le diagnostic de syndrome de Churg et Strauss.

Asthme :

L’asthme est au premier plan. Presque constant, l’asthme précède dans 95% des cas les signes de l’angéite systémique.

* La maladie asthmatique:

– débute relativement tardivement, vers l’âge de 30 ans.

– est souvent sévère, corticodépendante, à dyspnée continue et/ou avec des crises paroxystiques graves.

– volontiers associé à une rhinite spasmodique, il est habituel que l’asthme s’aggrave lors de l’apparition des premières manifestations systémiques puis passe au second plan lorsque l’angéite systémique est floride.

* Des anomalies radiologiques pulmonaires s’associent à l’asthme dans 70% des cas.

– Il s’agit le plus souvent d’infiltrats non systématisés, disséminés, labiles, évoquant un syndrome de Löffler.

– Plus rarement, l’aspect est celui d’opacités nodulaires ou d’un aspect interstitiel.

– Des épanchements pleuraux volontiers minimes et bilatéraux sont observés dans 25 à 65% des cas.

– Il n’y a pas d’adénopathies médiastinales.

Autres manifestations cliniques :

Les autres manifestations cliniques sont globalement comparables à celles observées au cours de la PAN.

* Parmi les particularités cliniques on note l’atteinte pleurale.

– Elle est le plus souvent asymptomatique, unilatérale ou bilatérale et, en règle générale, de faible abondance.

– Classiquement, il s’agit d’un exsudat riche en polynucléaires éosinophiles (85 à 100% des cellules).

– La glycopleurie peut être basse.

– On retrouve au niveau de la plèvre deux des principales caractéristiques histologiques du syndrome de Churg et Strauss: l’éosinophilie tissulaire et la vascularite.

* L’atteinte oculaire peut se traduire par un décollement de la rétine, des nodules dysoriques ou une atteinte du tractus uvéal.

* Une rhinite allergique est fréquente à la phase initiale de la maladie à l’origine d’obstruction nasale, de sinusite et de polypose nasale. Une atteinte destructrice proche de celle observée au cours de la granulomatose de Wegener est rarement observée, la biopsie mettant en évidence des lésions granulomateuses riches en éosinophiles.

EXAMENS PARACLINIQUES :

L’hyperéosinophilie sanguine, l’élévation des IgE sériques et la présence d’ANCA constituent les trois principales anomalies biologiques.

* Un syndrome inflammatoire marqué est présent dans la majorité des cas.

* L’hyperéosinophilie sanguine est un des arguments diagnostiques de cette angéite.

– Fluctuante mais constante, supérieure à 1 000/mm3 (97% des cas), elle peut atteindre des valeurs très élevées, allant jusqu’à 50 000/mm3.

– L’hyperéosinophilie sanguine, estimée en moyenne à 15000/mm3, peut parfois régresser spontanément et s’efface rapidement avec la corticothérapie et réapparaît lors des rechutes.

L’association d’un asthme et d’une hyperéosinophilie supérieure à 1 000/mm3 doit faire évoquer le diagnostic de syndrome de Churg et Strauss et en faire rechercher les signes cliniques.

* Une élévation des immunoglobulines E (IgE) sériques totales est observée chez 75% des patients.

* Les ANCA, recherchés en immunofluorescence indirecte, sont présents chez environ deux tiers des patients.

– Il s’agit principalement d’anti-MPO bien que des anti-PR3 puissent être observés.

– Le taux des ANCA au cours du syndrome de Churg et Strauss ne paraît pas très bien corréler avec l’évolutivité de la maladie.

* L’étude cytologique du liquide de lavage broncho-alvéolaire montre une éosinophilie pouvant représenter plus de 50% de la cellularité, reflétant l’hyperéosinophilie tissulaire diffuse.

DIAGNOSTIC :

Trois critères ont été proposés pour porter le diagnostic clinique de syndrome de Churg et Strauss:

– un asthme.

– une hyperéosinophilie supérieure à 1 500/mm3.

– une vascularite systémique comportant au minimum deux atteintes viscérales extra-pulmonaires.

Des critères de classification clinicobiologiques ont été proposés par le Collège américain de rhumatologie.

TRAITEMENT :

Le traitement du syndrome de Churg et Strauss se calque sur celui de la PAN. Bien que souvent sévère au début de la maladie, l’asthme n’est pas une cause importante de mortalité au cours de cette affection. Cependant, sa persistance après la guérison de la vascularite nécessite dans la plupart des cas le maintien d’une corticothérapie aux alentours de 10 mg/j.

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