Insuffisance rénale chronique

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Étiologie :

La plupart des néphropathies chroniques et certaines néphropathies aiguës ou subaiguës peuvent évoluer vers l’insuffisance rénale chronique.

La fréquence relative des causes d’insuffisance rénale chronique varie en fonction de l’âge, du sexe, de la race, de la situation géographique des patients et de l’année où a été faite l’étude.

Le registre européen de l’European Dialysis and Transplantation Association (EDTA) montre en 1992 : une baisse progressive de l’incidence relative de l’insuffisance rénale chronique terminale secondaire aux glomérulonéphrites primitives de 35 % en 1977 à 20 % en 1992 parallèle à la baisse de l’incidence de l’insuffisance rénale chronique terminale dans la tranche d’âge 25-64 ans ; une baisse de l’incidence des pyélonéphrites chroniques de 20 % en 1977 à 10 % en 1992 ; une progression de l’incidence de l’insuffisance rénale chronique terminale d’origine vasculaire (7 % en 1977 à 14 % en 1992) et secondaire au diabète (3,8 % en 1977 à 17 % en 1992) parallèle à celle de l’insuffisance rénale chronique terminale dans la tranche d’âge supérieure à 54 ans ; une progression de l’incidence des insuffisance rénales chroniques terminales de cause indéterminée ou inconnue qui passe de 10 à 18 % en 15 ans.

Physiopathologie :

Insuffisance rénale chroniqueChaque rein normal contient en moyenne 1 million d’unités fonctionnelles appelées néphrons.

La néphropathie causale entraîne une destruction progressive de ces néphrons.

Au cours de l’insuffisance rénale chronique, les néphrons non encore détruits s’adaptent remarquablement au surcroît de travail qui leur est demandé en terme d’excrétion de l’eau, des électrolytes et des déchets azotés.

Il faut une destruction de 70 % du capital néphronique pour voir apparaître les premiers signes du syndrome urémique.

La survie devient impossible lorsque 95 % des néphrons sont détruits.

A – Mécanismes d’adaptation fonctionnelle :

1- Excrétion de l’eau :

L’insuffisance rénale chronique est caractérisée par une diminution précoce du pouvoir de concentration maximale des urines qui explique la polyurie iso-osmotique au plasma habituellement modérée de l’insuffisance rénale chronique.

La diminution de la charge aqueuse filtrée est compensée par une réduction de la réabsorption tubulaire dans les néphrons restants induite par la diurèse osmotique et une résistance du canal collecteur à l’hormone antidiurétique.

L’atteinte du pouvoir de dilution des urines avec diminution de la quantité totale d’eau libre formée est plus tardive.

2- Excrétion du sodium :

L’insuffisant rénal chronique est capable de maintenir une excrétion urinaire sodée adaptée aux entrées jusqu’à un débit de filtration glomérulaire de 10 mL/min mais cela n’est valable que pour des charges sodées ne dépassant pas certaines limites.

À l’inverse, il n’est pas capable de conserver le sodium en dessous de 20 à 30 mmol/jour d’apport.

Ceci s’explique par les mécanismes de compensation qui favorisent la réabsorption du sodium dans le tube proximal ou son élimination par le tube collecteur (facteur atrial natriurétique).

3- Excrétion du potassium :

La kaliémie reste normale jusqu’à un stade avancé de l’insuffisance rénale chronique.

Les mécanismes d’adaptation conduisant à une augmentation de la sécrétion tubulaire de potassium sont l’augmentation de l’activité de la Na+/K+ ATPase au niveau de la partie baso-latérale des cellules tubulaires et un hyperaldostéronisme.

La kaliémie ne s’élève qu’en cas d’apports alimentaires importants ou d’erreur thérapeutique (diurétiques épargneurs de potassium, sels de régime).

4- Excrétion des ions H+ :

Une acidose métabolique n’est observée que lorsque le débit de filtration glomérulaire devient inférieur à 25 mL/min.

Les mécanismes du défaut d’élimination des ions H+ sont une réduction de l’excrétion urinaire d’ammoniaque et un défaut de réabsorption des bicarbonates.

Les néphrons restants sont pendant longtemps capables de compenser cette anomalie en augmentant leur capacité à éliminer les ions acides sous forme d’acidité titrable.

Par ailleurs, les ions H+ en excès sont tamponnés par les bases osseuses.

5- Excrétion du phosphore :

L’excrétion fractionnelle du phosphore augmente proportionnellement à la diminution du débit de filtration glomérulaire sous l’effet de l’hormone parathyroïdienne (parathormone) dont la sécrétion est stimulée par l’augmentation de la phosphorémie due à l’insuffisance rénale chronique.

En conséquence, la phosphorémie n’augmente de façon durable qu’à un stade avancé de l’insuffisance rénale chronique.

6- Excrétion des déchets azotés :

L’urée représente 80 % de l’azote urinaire chez le sujet normal et la production quotidienne d’urée est directement proportionnelle aux apports de protéines alimentaires (100 g de protéines produisent 30 g d’urée).

Chez l’urémique, le taux de l’urée sanguine dépend du débit de filtration glomérulaire mais également des apports protéiques, du catabolisme azoté et de la réabsorption tubulaire qui augmente quand le débit urinaire diminue.

La créatinine plasmatique est très peu influencée par les apports protéiques et le catabolisme azoté.

Elle dépend essentiellement de la masse musculaire du sujet et de sa filtration glomérulaire.

Chez l’urémique, l’élimination urinaire quotidienne de la créatinine est identique à celle observée chez le sujet normal jusqu’à 6 mL/min de clairance de la créatinine.

B – Perturbation des fonctions rénales endocrines :

1- Système rénine-angiotensine-aldostérone :

Au cours de l’insuffisance rénale chronique, il existe un hyperaldostéronisme dont le rôle n’est pas bien connu.

2- Vitamine D :

Au cours de l’insuffisance rénale chronique, l’activité de l’enzyme impliquée dans l’hydroxylation en position 1 alpha de la 25 OH D3 (calcidiol) diminue progressivement ce qui conduit à une diminution du taux de calcitriol circulant.

Les mécanismes en cause sont la réduction de la masse néphronique, l’augmentation du phosphore intracellulaire et l’acidose métabolique.

3- Érythropoïétine :

L’érythropoïétine est synthétisée par le parenchyme rénal.

La réduction de la masse néphronique s’accompagne d’une diminution de la synthèse d’érythropoïétine donc d’une diminution de la production érythrocytaire.

Cette diminution est très variable d’un patient à l’autre et dépend du type de la néphropathie.

C – Facteurs de progression :

1- Néphropathie initiale :

Elle joue un rôle primordial dans la vitesse de progression de l’insuffisance rénale chronique.

À titre d’exemple, les glomérulonéphrites extracapillaires rapidement progressives aboutissent à l’insuffisance rénale chronique terminale en quelques semaines ou mois alors que dans la maladie rénale polykystique, l’évolution beaucoup plus lente va se faire sur plusieurs décennies.

2- Glomérulosclérose :

Indépendamment de la néphropathie initiale, une atteinte glomérulaire peut s’observer au cours de l’insuffisance rénale chronique. Elle résulte de plusieurs mécanismes.

  • L’hypertension artérielle est responsable d’une augmentation du débit sanguin glomérulaire et de la pression intraglomérulaire, elle conduit à une hyperfiltration glomérulaire.
  • Les facteurs diététiques sont impliqués : une réduction des apports alimentaires en protéines peut s’accompagner d’un ralentissement de la progression de l’insuffisance rénale chronique ; une restriction des apports alimentaires en lipides ou une modification de leur composition peut ralentir la progression de l’insuffisance rénale chronique ; une régime pauvre en phosphates freine, chez l’animal, la progression de l’insuffisance rénale chronique par deux mécanismes : diminution de l’hyperfiltration et diminution des dépôts interstitiels de phosphate de calcium.

3- Autres facteurs :

  • Hypoperfusion rénale : elle peut être provoquée par une déshydratation extracellulaire secondaire à une restriction sodée excessive et (ou) à l’utilisation de diurétiques ou une insuffisance cardiaque gauche ou globale. Un traitement antihypertenseur efficace peut également induire en début de traitement une aggravation de l’insuffisance rénale.

Lorsque cette aggravation est sévère et prolongée, il faut rechercher une sténose bilatérale des artères rénales ou sur rein unique.

  • Obstacle sur la voie excrétrice.
  • Infection urinaire ascendante.
  • Médicaments néphrotoxiques auxquels on peut assimiler les produits de contraste iodés.

Diagnostic :

La démarche diagnostique comporte dans l’insuffisance rénale chronique plusieurs étapes : affirmer le diagnostic, déterminer la cause, préciser le degré, apprécier le ralentissement viscéral, évaluer l’évolutivité.

A – Diagnostic positif :

1- Affirmer l’insuffisance rénale :

La créatininémie varie chez le sujet normal entre 55 et 100 mmol/L en fonction de la masse musculaire donc de l’âge, du sexe, de la taille et du poids.

Elle ne peut donc pas être utilisée pour affirmer l’existence d’une insuffisance rénale.

Il est indispensable de déterminer la clairance de la créatinine rapportée à la surface corporelle.

Elle peut être mesurée avec toutes les difficultés liées au recueil des urines de 24 heures ou plus simplement et faiblement calculée par des formules validées.

Chez l’adulte, la formule de Cockfroft et Gault est la plus utilisée.

2- Affirmer le caractère chronique de l’insuffisance rénale :

Le caractère chronique de l’insuffisance rénale est facile à établir lorsqu’existent des antécédents de maladie rénale connue et suivie avec des valeurs déjà diminuées de clairance de la créatinine, des reins atrophiques sur l’abdomen sans préparation (taille < 13 cm) ou à l’échographie (taille < 10 cm).

En l’absence de ces critères, l’existence d’une anémie normocytaire, normochrome et d’une hypocalcémie est en faveur de la chronicité de l’insuffisance rénale.

Parfois seule l’évolution ou la ponction biopsie rénale permet d’affirmer ce caractère chronique.

B – Diagnostic étiologique :

Pratiquement toutes les néphropathies chroniques peuvent se compliquer d’insuffisance rénale chronique.

Le diagnostic étiologique est de difficulté variable.

1- Étiologie évidente :

La maladie rénale est connue de longue date et l’insuffisance rénale chronique apparaît au cours du suivi de la néphropathie.

2- L’insuffisance rénale chronique révélatrice de la maladie rénale :

Le diagnostic étiologique est souvent impossible quand l’insuffisance rénale chronique est très évoluée (clairance de la créatinine < 30 mL/min) mais il peut être évoqué en cas d’anomalies cliniques et biologiques.

  • Syndrome glomérulaire associant protéinurie importante (parfois néphrotique), hématurie microscopique, hypertension artérielle, contours des reins réguliers à l’échographie.
  • Atteinte interstitielle avec protéinurie modérée, leucocyturie microscopique, acidose hyperchlorémique non proportionnelle à l’insuffisance rénale, contours des reins irréguliers.
  • Atteinte vasculaire avec protéinurie modérée ou absente, sans anomalie cytologique urinaire avec hypertension artérielle sévère et contours des reins irréguliers.
  • Indications de la ponction biopsie rénale : en dehors des contre-indications, la ponction biopsie rénale est justifiée lorsque l’insuffisance rénale chronique est peu importante ou lorsqu’elle est rapidement progressive.

Elle vise alors à rechercher des lésions réversibles sous traitement spécifique ou à préciser le pronostic.

Lorsque l’insuffisance rénale chronique est très avancée et ancienne la ponction biopsie rénale ne montre que des lésions scléreuses diffuses et peut être dangereuse.

C – Retentissement viscéral :

Il constitue le syndrome urémique.

Il est d’autant plus important que l’insuffisance rénale chronique est évoluée.

1- Retentissement cardiovasculaire :

Il constitue la première cause de mortalité chez l’insuffisant rénal chronique et doit être efficacement prévenu ou traité.

  • L’hypertension artérielle est parfois la cause mais le plus souvent un symptôme de l’insuffisance rénale chronique.

Sa physiopathologie est multifactorielle associant une hypervolémie, une augmentation du débit cardiaque secondaire à l’anémie, une activation du système rénine-angiotensine- aldostérone et une sécrétion excessive de catécholamines.

Sa fréquence dépend de la néphropathie causale.

Très fréquente dans les glomérulopathies chroniques, elle l’est moins dans les pyélonéphrites chroniques.

La fréquence augmente avec la dégradation de la fonction rénale.

L’hypertension artérielle est un facteur d’aggravation de l’insuffisance rénale chronique et contribue à augmenter le risque cardiovasculaire des insuffisants rénaux chroniques.

La maîtrise des chiffres tensionnels contribue à ralentir la progression de l’insuffisance rénale chronique.

  • L’insuffisance cardiaque gauche peut être latente ou se manifester brutalement sous forme d’un oedème aigu pulmonaire, le plus souvent à l’occasion d’une surcharge hydrosodée ou d’une poussée hypertensive. Elle peut être le mode de révélation.
  • La péricardite est une complication tardive de l’insuffisance rénale chronique.

Souvent latente, détectée par l’échocardiographie, elle peut être révélée par des douleurs thoraciques ou une tamponnade.

Elle nécessite la mise en route immédiate de la dialyse et parfois un drainage chirurgical.

2- Retentissement hématologique :

  • Anémie : quand la clairance de la créatinine devient inférieure à 40 mL/min/1,73 m2 apparaît une anémie normochrome, normocytaire, arégénérative.

Elle est essentiellement la conséquence d’un défaut de production rénale d’érythropoïétine.

En fait d’autres facteurs toxiques interviennent (toxines urémiques) inhibant la production médullaire de globules rouges et entraînant une hémolyse modérée.

Des pertes sanguines chroniques, en particulier digestives sont également fréquentes entraînant alors une carence martiale surajoutée.

Habituellement bien tolérée, elle peut lorsqu’elle est intense entraîner une dyspnée d’effort, des douleurs angineuses ou favoriser une insuffisance cardiaque.

  • Leucocytes : le nombre de polynucléaires est normal mais il existe une diminution du pouvoir phagocytaire et du chimiotactisme.

Une lymphopénie modérée est fréquente et il existe un défaut de l’immunité à médiation cellulaire. Toutes ces anomalies prédisposent les patients aux infections bactériennes et virales.

  • Le nombre des plaquettes est habituellement normal mais il existe des anomalies de la fonction plaquettaire avec diminution de l’adhésivité et de l’agrégabilité responsable de troubles de l’hémostase primaire et d’une tendance hémorragique à un stade avancé de l’insuffisance rénale chronique.

3- Retentissement osseux :

L’ostéodystrophie rénale associe des lésions cliniques, biologiques, radiologiques et histomorphométriques liées à l’insuffisance rénale chronique.

Les facteurs étiologiques de l’ostéodystrophie rénale sont essentiellement les troubles du métabolisme du phosphore avec augmentation du phosphore intracellulaire puis de la phosphorémie et l’hypocalcémie conséquence de l’hyperphosphorémie et d’un défaut en calcitriol.

Les 2 lésions élémentaires de l’ostéodystrophie rénale sont l’ostéite fibreuse due à l’hyperparathyroïdie et l’ostéomalacie.

4- Retentissement neuro-musculaire :

  • Des crampes à prédominance nocturne apparaissent à un stade évolué de l’insuffisance rénale chronique.
  • Une neuropathie périphérique peut compliquer l’évolution de l’insuffisance rénale chronique.

D’apparition tardive, elle est d’abord surtout sensitive (paresthésies, syndrome des jambes sans repos) puis devient motrice.

Elle prédomine au niveau des membres inférieurs.

Elle peut être dépistée au stade infraclinique par la mesure des conductions nerveuses.

L’apparition d’une neuropathie clinique est une indication de mise en dialyse.

  • Les troubles neurologiques centraux se manifestent par une obnubilation, une désorientation temporo-spatiale, des convulsions ou un coma.

Ils doivent faire rechercher une hypertension artérielle sévère responsable d’une encéphalopathie hypertensive, des désordres hydroélectrolytiques et surtout une hyponatrémie mais aussi une hypo- ou une hypercalcémie, une intoxication médicamenteuse.

5- Retentissement digestif :

Les troubles digestifs sont fréquents au cours de l’insuffisance rénale chronique avancée : odeur ammoniacale de l’haleine ; nausées et anorexie favorisent la dénutrition ; l’incidence des gastrites, ulcères gastro-duodénaux et angiodysplasies est augmentée.

La physiopathologie des troubles digestifs n’est pas clairement établie.

Il existe une augmentation de la sécrétion de gastrine et d’acide gastrique et un retard de la vidange gastrique.

6- Anomalies endocriniennes :

De nombreuses hormones ont une sécrétion et un métabolisme modifiés : augmentation du taux sérique d’hormone de croissance mais résistance périphérique à son action expliquant les retards de croissance chez l’enfant urémique ; la sécrétion d’hormone antidiurétique est augmentée mais le canal collecteur est résistant à cette hormone; la sécrétion d’adrénaline est augmentée ; la sécrétion d’oestrogènes chez la femme et de testostérone chez l’homme est diminuée avec une hyperprolactinémie dans les deux sexes expliquant stérilité et impuissance.

7- Anomalies métaboliques :

  • Métabolisme lipidique : une hypertriglycéridémie est fréquente par défaut de catabolisme des VLDL.

Elle s’accompagne d’une diminution du HDL cholestérol.

  • Métabolisme glucidique : intolérance aux hydrates de carbone avec une courbe d’hyperglycémie provoquée anormale, une hyperinsulinémie et une résistance périphérique à l’insuline.

Traitement :

Il comporte trois aspects : étiologique, médical, dit conservateur, à entreprendre avant la phase d’insuffisance rénale chronique terminale et de suppléance.

A – Traitement étiologique :

Il doit être entrepris chaque fois qu’il est possible : contrôle de l’hypertension artérielle dans la néphro-angiosclérose ; arrêt de l’intoxication par exemple dans le cas de l’abus d’analgésiques ; levée d’obstacle urologique ; traitement spécifique d’une maladie générale (lupus, vascularite).

B – Traitement médical conservateur :

Il associe des mesures diététiques et médicamenteuses.

Il a pour but de ralentir la progression de l’insuffisance rénale chronique et de prévenir ou de traiter les complications afin d’amener le patient à la dialyse et (ou) à la transplantation rénale dans le meilleur état cardiovasculaire, osseux et nutritionnel possible.

1- Diététique :

  • Maintien de l’équilibre hydroélectrolytique :

– la ration hydrique doit être adaptée à la diurèse et à la sensation de soif.

Une surveillance de la natrémie s’impose lorsque la clairance de la créatininémie devient inférieure à 15 mL/min/1,73 m2 ;

– la ration sodée est déterminée en fonction du poids, de la pression artérielle et de la natriurèse de 24 heures.

Les apports sodés peuvent habituellement être normaux sauf en cas d’oedèmes, d’hypertension artérielle et d’insuffisance cardiaque.

Dans certains cas (néphropathies avec perte de sel telles que polykystose rénale ou néphropathie interstitielle chronique) les apports en sel doivent être importants ;

– la ration potassique est normale lorsque l’insuffisance rénale chronique n’est pas avancée.

Il existe un risque d’hyperkaliémie quand la clairance de la créatinine devient inférieure à 10 mL/min/1,73 m2.

Le risque est majoré par l’acidose. À ce stade une restriction des apports

– particulièrement élevés dans le chocolat, les fruits secs, certains fruits frais ou légumes

– s’impose, éventuellement associée à une résine échangeuse d’ions telle que Kayexalate ou Calcium-Sorbisterit 15 à 30 grammes/jour per os. ;

– lorsque le taux des bicarbonates devient inférieur à 20 mmol/L, en l’absence de surcharge hydrosodée, un apport en bicarbonate de sodium est justifié.

Il peut se faire grâce à de la poudre de bicarbonate de sodium à la dose de 4 à 6 grammes/jour.

L’utilisation prolongée d’eau de Vichy doit être évitée en raison du risque de surcharge en fluor ;

– la ration protidique doit être suffisante pour éviter amyotrophie et dénutrition.

Elle doit cependant être limitée pour réduire les apports en phosphate et chez certains patients ralentir la progression de l’insuffisance rénale chronique.

La restriction protidique dépend du niveau de filtration glomérulaire : 0,8 g/kg/j à partir de 55 mL/min de clairance de la créatinine, 0,6 g/kg/j à partir de 25 mL/min ;

– l’apport glucidique doit être réduit au bénéfice d’un apport lipidique riche en graisse polyinsaturées pour corriger l’hypertriglycéridémie ;

– quelles que soient les consignes diététiques prescrites, il faut toujours veiller à maintenir un apport calorique d’environ 35 Cal/kg/j.

Le statut nutritionnel doit être soigneusement surveillé en particulier à la phase avancée de l’insuffisance rénale chronique.

e dosage de l’albuminémie est particulièrement intéressant car l’hypoalbuminémie constitue un facteur prédictif de mortalité chez l’hémodialysé.

2- Traitement médicamenteux :

  • L’hypertension artérielle doit être impérativement traitée.

Tous les traitements antihypertenseurs peuvent être utilisés. Toutefois parmi les diurétiques seuls les diurétiques de l’anse : furosémide et bumétanide peuvent être employés.

Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion prescrits avec les précautions indispensables peuvent avoir un effet bénéfique indépendant de leur action antihypertensive et cela en raison de leurs effets sur l’hémodynamique glomérulaire.

  • Le traitement de l’ostéodystrophie rénale, préventif ou curatif, comporte du carbonate de calcium à la dose de 4 à 8 grammes/jour qui permet de normaliser la calcémie et de corriger l’hyperphosphorémie ; les dérivés, un hydroxylé de la vitamine D (Un-Alfa et Rocaltrol) ne doivent être utilisés qu’en cas d’hyperparathyroïdie secondaire avérée en raison de leur effet inhibiteur sur la sécrétion de PTH.

Par ailleurs compte tenu de leur action hyperphosphorémiante un préalable à leur utilisation est le bon contrôle de la phosphorémie ; la parathyroïdectomie, traitement de l’hyperparathyroïdie très sévère est d’indication exceptionnelle avant dialyse.

  • Le traitement de l’anémie consiste en premier lieu à rechercher et à supprimer d’éventuels facteurs d’aggravation tels que hémorragies occultes, carence en fer ou en acide folique.

Il a été révolutionné par l’arrivée sur le marché de l’érythropoïétine recombinante humaine (Eprex ou Recormon).

Ce traitement doit être envisagé dès que le taux d’hémoglobine devient inférieur à 10 g/dL et doit viser à maintenir ce taux entre 11 et 12 g/dL.

Avant dialyse, il utilise la voie sous cutanée à la dose de 2 à 3 injections de 1 000 unités par semaine.

Il nécessite le plus souvent la coprescription de fer per os. Les transfusions sanguines ne sont indiquées qu’en cas de déglobulisation aiguë.

3- Traitement de suppléance :

Il doit être envisagé dès que la clairance de la créatinine devient inférieur à 10 mL/min/1,73 m2 ou plus tôt en cas de complication telles que l’hypertension artérielle non contrôlée, l’hyperhydratation rebelle au traitement diurétique, l’oedème aigu du poumon, la polynévrite des membres inférieurs ou la dénutrition.

Le choix existe entre plusieurs techniques et modalités.

  • L’hémodialyse est basée sur les échanges diffusifs et convectifs qui s’effectuent entre le sang du patient et un liquide de dialyse dont la composition est proche de celle du milieu extracellulaire à travers une membrane semi perméable de nature cellulosique ou synthétique.

Elle nécessite la mise en place, idéalement plusieurs mois à l’avance d’une fistule artérioveineuse qui va pouvoir délivrer un débit sanguin de 250 à 400 mL/min.

Elle est mise en oeuvre grâce à un hémodialyseur à plaques ou à fibres creuses de membrane et de surface variables, des lignes connectant le dialyseur au circuit sanguin et au circuit du dialysat et un générateur dont le rôle principal est de contrôler la fabrication du dialysat à partir d’un concentré et de surveiller les débits, les pressions, les températures et le taux d’ultrafiltration.

L’hémodialyse à raison de 3 séances par semaine peut s’effectuer selon des modalités différentes : dans un centre ambulatoire implanté dans un établissement hospitalier privé ou public ; dans un centre lourd comportant un service de réanimation continue et de soins lourds ; en dehors d’une structure de soins.

Le lieu de traitement est alors le domicile du patient ou une unité d’autodialyse (considérée comme substitut du domicile).

Le patient doit dans les 2 cas préalablement avoir bénéficié d’un apprentissage et exécuter lui-même son traitement, aidé par une personne elle-même formée à la technique.

  • La dialyse péritonéale repose sur des échanges de solutés par gradient de concentration (diffusion passive) et de solvant (pression osmotique) caractérisant l’ultrafiltration à travers une membrane semi perméable naturelle qui est le péritoine.

Elle nécessite la mise en place chirurgicale d’un cathéter permanent.

Elle peut être réalisée selon 2 grandes modalités : la dialyse péritonéale continue ambulatoire (DPCA) avec 4 échanges quotidiens 7 jours/7 ; la dialyse péritonéale automatisée en régime intermittent ou continu.

Dans tous les cas, le traitement s’effectue au domicile par le patient lui-même ou par un tiers membre de la famille ou infirmier libéral. Une caractéristique importante de la dialyse péritonéale est que contrairement à l’hémodialyse, elle est un traitement à moyen terme qui peut difficilement être poursuivi après la perte de la fonction rénale résiduelle (en moyenne 5 ans).

Il s’agit donc d’un traitement de choix pour les sujets jeunes en attente de greffe désirant leur autonomie ou chez les sujets âgés vivant à domicile ou en institution.

La dialyse péritonéale est également utile chez le petit enfant en attente de greffe et chez les sujets ayant un état cardiovasculaire précaire ou de grandes difficultés dans la réalisation d’un abord vasculaire de qualité.

Dans certains cas, le choix entre hémodialyse et dialyse péritonéale va dépendre de facteurs extramédicaux liés au mode de vie du patient (activité socio-professionnelle, éloignement d’un centre) ou à son contexte culturel.

Quelle que soit la technique ou la modalité choisie, une vaccination contre l’hépatite B doit être réalisée le plus tôt possible pour obtenir un taux de réponse vaccinale optimal.

  • La transplantation rénale peut se faire à partir d’un donneur vivant apparenté (père ou mère, frère ou soeur) bien informé et volontaire et dans ce cas la greffe pourra être réalisée avant que la dialyse ne soit nécessaire.

La majorité des transplantations rénales sont en France effectuées à partir d’un donneur en état de mort encéphalique n’ayant pas fait connaître de refus du prélèvement d’organes avant son décès.

Les greffons sont attribués aux patients inscrits sur une liste nationale d’attente selon des critères de compatibilité ABO et HLA et liés aux conditions du donneur et du receveur (âge, durée d’attente, immunisation anti- HLA).

L’inscription sur la liste d’attente n’est effectuée qu’après réalisation d’une évaluation visant à apprécier l’état cardiovasculaire et des voies urinaires, l’absence de foyer infectieux patent ou latent, de tumeur évolutive ou susceptible de réévoluer sous traitement immunosuppresseur.

Un bilan immunologique est également réalisé visant à déterminer le groupe HLA, à rechercher la présence d’anticorps anti-HLA et à connaître le nombre de grossesses et de transfusions sanguines.

En l’absence de contre-indication, la greffe rénale est possible jusqu’à 65 voire 70 ans.

Le traitement immunosuppresseur est actuellement très varié.

Il comporte des anticorps antilymphocytaires polyclonaux (sérums antilymphocytaires) ou monoclonaux (OKT3) utilisés de façon transitoire en prévention ou en traitement curatif du rejet aigu ; la cyclosporine en association avec la prednisone et parfois avec l’azathioprine ou le mycophénolate Mofétil ; le Tacrolimus en association avec la prednisone.

Tous ces traitements de suppléance donnent des résultats remarquables avec des survies pouvant être prolongées audelà de 20 ans.

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