Imagerie thoracique moderne

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Introduction :

Le cliché thoracique (RT) reste le cliché le plus pratiqué de par le monde et représente, à lui seul, plus de la moitié du film photographique médical.

Sa grande diffusion est liée à la période d’endémie tuberculeuse.

Son maintien est dû à la fréquence des infections respiratoires et à celle du cancer bronchique.

Imagerie thoracique moderneIl semble bien que le cliché thoracique ne doive pas dépérir à l’heure de la tomodensitométrie (TDM), à l’opposé de ce qui est advenu de l’abdomen sans préparation (ASP), à l’heure de l’échographie et du scanner abdominal.

Cela est sans doute dû à sa capacité à donner une vue d’ensemble du cou au diaphragme : le thorax.

Il restera le premier examen à faire à partir duquel on réalisera une TDM ou non.

Nous centrerons ce texte sur les rapports dialectiques en « aller-retour » qui existent entre RT et TDM thoracique puis nous situerons les apports, plus limités pour l’heure, de l’échographie thoracique et de l’imagerie par résonance magnétique (IRM).

Nous aborderons ensuite différentes situations concrètes où le clinicien fait appel à l’imagerie thoracique, en proposant des stratégies logiques et économes entre les divers examens.

Démarche :

Depuis 10 ans, l’imagerie thoracique a été « révolutionnée » par la TDM, et notamment par les coupes millimétriques du parenchyme pulmonaire.

Les belles images de la TDM thoracique ont pu faire délaisser quelque peu le cliché standard.

Il est temps de s’y intéresser à nouveau, d’autant que le nombre de ses obscurités, voire de ses erreurs, ont été expliquées par l’aller-retour TDM-RT.

C’est justement quand il est « désacralisé » par un nouveau « juge de paix » plus puissant que lui (la TDM), qu’un « corps de savoir » (la RT), gagne en bases scientifiques.

Le trop grand formalisme scolastique séparant systématiquement « l’alvéolaire » de « l’interstitiel » en RT a été « recadré » grâce à la TDM avec une nouvelle terminologie, une nouvelle sémantique. Cet aller-retour TDM-RT a confirmé parfois, reclassé souvent et simplifié toujours, la sémiologie du cliché simple.

Celle-ci est, en soi, compliquée, du fait de la projection sur un seul plan… projection que la TDM supprime. La démonstration des lignes du médiastin en est l’exemple type.

De plus, il existe de nombreuses pathologies où la sensibilité de la TDM a contraint le monde médical à accepter que la RT puisse rester normale alors que la TDM montre déjà des lésions : emphysème, bronchectasies, fibroses et pneumonies infiltratives chroniques débutantes…

C’est un fait, la TDM est reconnue comme plus sensible et plus spécifique.

Ce n’est pas que la TDM soit plus pénétrante en résolution spatiale alors qu’elle l’est en résolution en densité.

Ce fait est surtout dû à ce qu’elle ne projette pas un volume 3D (« le tonneau thoracique ») sur un plan 2D (la plaque film).

La TDM « désuperpose », alors que le film projette.

C’est la projection qui rend la RT si difficile : il y a trop d’informations sur un seul film et parfois des informations fausses.

Ainsi en va-t-il des faux micronodules miliaires, créés par la projection, sur un seul plan, de septa épaissis, entrecroisés dans l’espace mais non au contact anatomiquement…

Inversement, c’est cette richesse qui fait de la RT une image globale et unique du « cou au diaphragme ».

C’est pour cela qu’il est et restera le viatique indispensable pour le dépistage ou pour le suivi thérapeutique et parfois le viatique exclusif comme en réanimation.

Il faudra donc toujours bien faire et bien lire les RT, même si les appareils TDM se multiplient et s’affinent en devenant spiralés.

Il est probable qu’on ne commencera jamais un bilan thoracique par une TDM d’emblée.

La RT sort donc régénérée de cette épreuve de 10 ans avec la TDM, d’autant plus que sa technologie s’améliore… avec la numérisation.

Son apprentissage va pouvoir être bien plus rapide et « objectif » pour les plus jeunes, grâce à la pratique de l’aller-retour RT-TDM.

La RT et la TDM sont « omnivalentes » car elles « voient » bien tous les compartiments du thorax : poumons mais aussi médiastin, plèvre, paroi, diaphragme…

L’échographie a des limites physiques du fait de l’air pulmonaire.

Son application est surtout destinée aux épanchements pleuraux ou au diaphragme.

Chez le tout petit, grâce au thymus qui sert de fenêtre acoustique, elle peut explorer le médiastin, mais chez l’adulte, elle est plus limitée.

L’IRM donne des images de très bonne qualité du médiastin, du coeur, de la paroi thoracique et du diaphragme.

Elle ne nécessite pas de produit de contraste iodé, et visualise les trois plans de l’espace simultanément.

Par contre, son grand déficit actuel est aux poumons.

En effet, la faible densité en protons et les effets négatifs de susceptibilité magnétique de la membrane d’échanges gazeux, ne permettent qu’une vision grossière des poumons pour l’heure.

L’IRM ne sera le plus souvent qu’appelée en renfort, quand la TDM n’aura pas été suffisante.

Elle a pourtant des points d’excellence : le coeur, le médiastin postérieur (neurologique) ou le diaphragme.

Quant à la tomographie et à la bronchographie, elles ne sont plus à utiliser aujourd’hui, car la TDM s’est totalement et heureusement substituée à elles.

Il n’y a donc que quatre moyens d’imagerie majeurs à l’approche de l’an 2000 : RT, TDM, IRM, échographie, et un couple majeur quasiment incontournable qui est le couple RT-TDM.

Nous allons étudier à présent chacune de ses techniques, en insistant surtout sur les critères de qualité qui permettent au clinicien de reconnaître un bon document.

Clichés thoraciques :

Ce sont la RT face et profil et les incidences ou techniques complémentaires.

A – RT de face :

La qualité photographique de la RT est, pour nous, l’objet d’une « véritable croisade ».

Il faut dire que la RT est certainement l’acte le plus complexe de la radiologie conventionnelle, en raison de l’importance de volume à explorer, de la variété des composants anatomiques et de la vision tridimensionnelle qu’exige sa lecture.

La RT doit être réalisée en haute tension et/ou en numérisation.

Nous allons le démontrer en commençant par une remarque générale, qui semble être sémantique et « décorative », mais qui, en réalité, conditionne toute la démarche : on ne réalise pas une radiographie pulmonaire (RP) mais une radiographie du thorax (RT).

Les côtes, le coeur, le médiastin… ne sont pas dissociables « photographiquement » des poumons.

Pour bien voir le poumon, il faut penser à faire une RT. On se rappellera que plus de 50% de la surface pulmonaire est masquée par la cage thoracique, le coeur, le foie…

On parle donc de RT et non pas RP, comme on parle de pathologie thoracique, chirurgie thoracique etc.

1- Critères de qualité :

L’appréciation de la qualité de la RT est un préalable à sa lecture.

Il ne faut pas lire un film illisible.

Cette appréciation de qualité se fait lors des quelques secondes de prise de contact avec le film.

Il faut alors ne pas regarder en premier les plages pulmonaires pendant cette prise de contact, mais s’intéresser à la « cage ».

La qualité d’une RT peut être appréciée en cinq points.

Le premier point est donné sur le « cadrage » et la position du sujet.

Le cliché de face doit être de face : clarté trachéale médiane se projetant sur les épineuses, manubrium sternal médian, clavicules symétriques… Une rotation entraîne de faux débords médiastinaux, de faux gros hiles, etc.

L’inspiration doit être profonde.

Le cliché ne doit pas couper les culs-de-sac costodiaphragmatiques et l’« étiquette » ne doit pas masquer les sommets.

Cette « étiquette » ou « marquage » doit comporter l’identification, la date, l’heure et les constantes en réanimation.

Les quatre autres points sont donnés sur la pénétration obtenue.

Le cliché ne doit être ni trop mou (pâle) ni trop dur (« grillé ») et présenter les stigmates d’égalisation photographique (nuances de gris), qui permettent une vision totale : médiastin et poumon (tout le poumon).

La haute tension (ou la numérisation) assure l’obtention des quatre critères de bonne pénétration, avec bonne visualisation :

– des bronches souches et de la ligne aortique dans le médiastin ;

– du poumon rétroventriculaire gauche ;

– du poumon rétrohépatique ;

– de la trame vasculaire du poumon périphérique (2 derniers centimètres) qui doit être nette, sans flou.

2- Méthode de lecture :

La lecture commence donc par l’appréciation de la qualité et on commence par ne pas regarder le poumon.

On balaiera l’image d’une façon concentrique du contenant (parois et diaphragme) au contenu (médiastin et poumons).

On se forcera à ne regarder et lire le poumon qu’en dernier, pour être sûr de ne pas avoir négligé la « cage », avant de se précipiter sur l’oiseau.

En premier lieu, il faut s’attacher à l’étude de la « cage » thoracique : clavicules, omoplates, rachis et surtout gril costal.

Il faut compter les côtes, et les suivre du doigt, d’arrière en avant (se rappeler que le décalage entre les arcs postérieurs et antérieurs s’accroît progressivement de haut en bas).

Pour la recherche de fractures ou de lyses costales, on aura intérêt à « dépolariser » l’image en renversant le cliché.

Il ne faut pas oublier que le cartilage sternocostal est peu radio-opaque en haute tension, et que le bord inférieur des arcs postérieurs des côtes de 6 à 10 paraît normalement interrompu ou encoché en son milieu, du fait de la gouttière costale inférieure (attention aux fausses fractures).

Il faut s’assurer de la forme et de la position des deux hémidiaphragmes, le droit étant le plus souvent plus haut mais pas toujours (85% des sujets).

On vérifiera la présence de la poche à air gastrique sous l’hémidiaphragme gauche.

En un deuxième temps, on s’intéressera au contenu central (coeur et médiastin) et toujours pas aux poumons.

Le bord droit de la silhouette cardiomédiastinale est constitué de haut en bas par : le tronc brachiocéphalique veineux et la veine cave supérieure, avec le bouton de la veine azygos (loge de Barety), puis par l’oreillette droite et la veine cave inférieure.

Le bord gauche est constitué par : l’artère sous-clavière, le bouton aortique, la fenêtre aortopulmonaire, l’infidibulum pulmonaire et le ventricule gauche.

On déterminera l’index cardiaque : diamètre transversal du coeur sur diamètre transversal du thorax, qui doit être inférieur à 50%.

On appréciera la forme, la taille, la densité et la symétrie des deux hiles pulmonaires.

Ces hiles sont essentiellement de structure vasculaire et répondent aux branches de division de l’artère pulmonaire.

À droite, le hile a la forme d’une aile d’oiseau, avec un angle aigu dont la bissectrice est la petite scissure.

À gauche, la forme est celle d’une crosse faite par l’artère pulmonaire gauche, qui enjambe la bronche principale gauche.

De ce fait, le hile gauche est plus haut situé que le droit.

La différence des deux hiles est due à la division inégale des deux branches de l’artère pulmonaire : la division est intramédiastinale à droite, intrapulmonaire à gauche.

Ce n’est qu’en un troisième temps qu’on analysera les deux plages pulmonaires : apex, bases et régions périhilaires.

Aux bases, on s’assurera que les culs-de-sac pleuraux sont ouverts et pointus.

Aux apex et aux bases, on vérifiera que la vascularisation est harmonieuse de type 0,5/L, c’est-à-dire que les vaisseaux sont plus gros aux bases.

La vascularisation doit être symétrique et visible jusqu’à 15mm de la paroi.

En périhilaire, on notera les images bronchiques et artérielles dites en « jumelles ».

L’« oeil » vasculaire est plein, alors que l’« oeil » bronchique est clair.

Les deux yeux sont normalement de même taille.

On cherchera à localiser les scissures, dont la visibilité est variable : la petite scissure droite est transversale, en position hémithoracique, plus souvent en coupole qu’horizontale ; les grandes scissures sont obliques de haut en bas et de dedans en dehors.

Leur relief est hélicoïdal, ceci expliquant qu’elles ne sont pas visibles sur toute leur hauteur et qu’un nodule latérocardiaque droit puisse être aussi bien en lobaire moyen qu’en lobaire inférieur.

On terminera la lecture du cliché comme on l’a commencé, c’est-à-dire par une vision d’ensemble, avec recul :

– recherche de la présence symétrique des seins chez la femme, de la projection bilatérale et symétrique des mamelons chez l’homme ;

– élimination des éléments extrathoraciques comme les muscles (sternocléïdomastoïdiens au-dessus de la clavicule, pectoraux ou grands dorsaux dans la région axillaire), natte, boutons, chaîne ou médaille, repli cutané ou vestimentaire, anomalies cutanées (tumeur de la peau ou du sein), sans oublier les taches sur les clichés (révélateur, anomalie de la cassette, etc).

Au total : au risque d’insister lourdement, disons à nouveau qu’il s’agit d’une radiographie thoracique (RT) et non pas d’une radiographie pulmonaire (RP), et qu’il faut lire le poumon en dernier, ne serait-ce que pour ne pas succomber au « syndrome du bikini ».

Nous appelons « syndrome du bikini », le syndrome de celui qui ne regarde que les deux plages pulmonaires sur une RT, comme il ne regarderait que le bikini sur une plage…

Cette méthode de lecture globalisante et concentrique, permet d’aborder une RT faite sans orientation clinique (RT systématique).

À ce sujet, disons que même quand on a une orientation clinique, il faut tout regarder et ne pas vouloir voir que ce que l’on attend d’après la clinique.

Cette façon de faire est réductrice… mais malheureusement répandue.

B – RT en incidence latérale ou profil :

Le « profil » reste mal connu.

Il est mal considéré, en pratique quotidienne comme dans les publications.

Il n’est pas toujours réalisé, et s’il l’est, il est lu plus vite que la face d’un oeil distrait et craintif à la fois.

En fait, le profil fait peur… Pourtant, beaucoup a été dit et enseigné à son sujet par Felson, Proto, Heitzman, Coulomb, Rémy (José et Jacques), Coussement, Bernadac, Anthoine, Frija… et d’autres encore, pionniers et auteurs, qui nous ont inspiré une actualisation du profil à l’heure de la TDM. Très souvent, le profil sert à confirmer un diagnostic fait sur la face (atélectasies, masses…) et à préciser une topographie douteuse en projection postéroantérieure.

Il sert à éclairer les zones dites « aveugles » : rétrocoeur, rétrofoie, gouttières costovertébrales et région sous-hilaire.

Ces zones ne sont pourtant pas toutes « aveugles » sur un cliché en haute tension.

Partant de propos prêtés à Felson et des vertus de la haute tension, certains ont prétendu qu’on devait pouvoir se passer du profil, grâce au « signe de la silhouette ».

Armé du « signe de la silhouette », et ayant réalisé une bonne haute tension, ce serait donc une faiblesse d’avoir encore besoin du profil…

En fait, le profil, s’il sert souvent à confirmer la face, peut avoir aussi des exclusivités et ce, même avec une face parfaite.

Dans les cas difficiles, ou bien devant une « face normale », il faut savoir faire et lire le « profil » en soi et pour soi car il y a, en effet, des données exclusives que seul le profil peut apporter.

Le profil reste mal exploité, ce qui est dommage et dommageable dans 10% des cas environ.

Il devrait être mieux exploité, même à l’heure actuelle où la TDM est omniprésente.

1- Philosophie du profil :

Le profil est presque un jeu intellectuel, dans lequel il faut vouloir s’investir.

Le profil est à « apprivoiser ». Il faut l’approcher avec une vision en trois dimensions de l’anatomie, ce que le « bagage » axial transverse de la TDM facilite beaucoup.

Le profil est, avec la face, l’autre deux dimensions (2D) qui veut représenter le trois dimensions (3D) du réel anatomique.

Pour « apprivoiser » le profil, il faut d’abord le standardiser dans sa « facture » : profil toujours gauche (strict ou avec glissement).

Il faut aussi le standardiser dans sa lecture : méthode propre pour le profil, proche de celle du cliché de face car tout aussi « concentrique », « contenant-contenu », en évitant là encore le syndrome du bikini.

Le syndrome du bikini du profil est encore plus répandu.

Il faut pourtant commencer, là encore, par la périphérie.

On repérera quel est le liseré pleural postérieur en cause (lié aux grosses côtes ce sera le droit) puis quelle est la coupole en cause (effacée en avant ce sera la gauche).

Au centre du profil, on enregistrera le fil à plomb du profil qu’est la clarté trachéale (avec en bas les deux clartés lobaires supérieures, la droite étant la plus haute).

Ce n’est qu’alors que le lecteur orienté pourra situer les pyramides basales. Elles ne sont pas totalement superposées quand les « jambes » que sont les bronches principales sont écartées par un glissement.

Notre lecteur, orienté, pourra étudier les espaces clairs rétrosternal en haut et sous-hilaire rétrocardiaque en bas, que la face, même en haute tension, n’étudie pas bien.

S’il est vrai qu’un coup d’oeil panoramique de quelques secondes sur une RT de face décèle une anomalie pulmonaire et que le gain d’information obtenu par une inspection prolongée du cliché de face est souvent peu rentable, il en va tout autrement pour l’incidence latérale, pour des raisons anatomiques et techniques.

L’incidence latérale résulte, en effet, d’un double effet de sommation, entre les deux plages pulmonaires d’une part, entre chaque plage pulmonaire et le médiastin d’autre part.

Des interfaces nouveaux sont créés sur cette incidence qu’il faut apprendre à reconnaître.

La visibilité d’une structure sur le profil dépend à la fois de sa densité propre, de l’apparition d’interfaces entre ses bords et les structures qui l’entourent, et des effets de tangente ou non du faisceau de rayon X.

Encore et toujours en matière de RT, de profil comme de face, tout est affaire de « silhouettage ».

L’aorte est le meilleur exemple que nous puissions choisir :

– on sait que, de face, seul est silhouetté le bord gauche de l’aorte descendante et non son bord droit que l’on ne voit pas.

De même, du fait de la graisse péricardomédiastinale, on ne voit pas sur le profil, l’aorte ascendante, sauf si elle est calcifiée… ou bien chez l’emphysémateux dont les languettes antérieures pulmonaires distendues viennent la silhouetter ;

– de profil, on ne voit donc de l’aorte que sa crosse le plus souvent ; l’aorte descendante (du sujet jeune) n’étant pas visible, car logée dans la gouttière costovertébrale.

Chez le sujet âgé, le déroulement de l’aorte descendante la fait « glisser » hors de la gouttière, et le poumon gauche entoure alors le fût aortique qui devient visible.

2- Profil : échecs et exclusivités

Les échecs se rencontrent à l’apex, du fait des épaules.

On améliore ceci en haute tension de profil et avec la numérisation.

Les échecs se rencontrent aussi au niveau du médiastin et des plages pulmonaires.

Une opacité médiastinale, se raccordant en pente douce avec les organes du médiastin, peut rester invisible sur l’incidence latérale, alors qu’elle est vue de face.

Au niveau des plages pulmonaires, on peut perdre des images peu denses si elles se projettent sur des structures denses comme le coeur.

Mais les exclusivités du profil sont aussi bien réelles.

En pratique courante, une atélectasie peut n’être définitivement affirmée que sur le profil.

Il en va de même de la topographie d’un nodule.

On sait qu’un faux nodule pariétal disparaît sur le profil, ce qui confirme par la négative sa nature pariétale et donc hors du poumon comme un cal de fracture costale ou une plaque pleurale.

Le profil donne une vue exclusive sur les trois espaces clairs : rétrosternal, rétrocardiaque et rétrotrachéal sus-aortique.

Sans qu’il s’agisse d’une exclusivité absolue, nous savons que le profil permet de considérer (en son centre) la fenêtre aortopulmonaire vue dans l’axe de la crosse aortique.

Il permet de voir la région sous- et rétrocarinaire, entre les « jambes bronchiques ».

3- Quand faut-il faire une RT et… un profil ?

La RT ne devrait pas être systématique, notamment lors d’une admission hospitalière, car le pourcentage d’anomalies détectées est faible (2 à 4 %) et l’impact thérapeutique négligeable (0,6 à 4 %).

La découverte d’une fausse anomalie peut, au contraire, entraîner des examens complémentaires inutiles ou la prescription d’un traitement inadapté.

Les sujets migrants et les patients issus de milieux socioéconomiques défavorisés, sans surveillance récente, échappent cependant à cette première règle.

Il n’y a pas lieu (référence médicale opposable) de faire une RT dans le cadre d’une chirurgie courante, en dehors de l’urgence, chez les patients de plus de 3 ans et de moins de 45 ans et en l’absence d’antécédent pathologique précis ou de facteur de risque. Par contre, la RT est particulièrement indiquée en présence de symptômes thoraciques, d’un traumatisme, d’une altération fébrile ou isolée de l’état général, dans un contexte néoplasique ou encore en présence de facteurs de risque précis…

L’incidence latérale ne devrait pas accompagner systématiquement l’incidence de face en cas de RT systématique.

Il est conseillé de ne pas réaliser d’incidence latérale chez les patients âgés de moins de 45 ans.

Il est par contre démontré que l’incidence latérale clarifie la lecture de la RT systématique après 45 ans dans 16%des cas (Sagel-Proto).

On peut proposer de faire un profil quand on suspecte une des affections à exclusivité latérale ou quand on veut écarter une fausse image (comme un mamelon… à moins de refaire la face avec cerclage).

On peut aussi faire un profil sur une face normale quand le but est d’affirmer la normalité.

C – Incidences complémentaires du thorax :

1- « Thorax osseux » ou « gril costal » :

Quand la pathologie est osseuse, traumatique ou métastatique, le cliché du thorax doit devenir un cliché de la paroi, un « thorax osseux » et/ou un « gril costal ».

Au point de vue technique, il n’est pas nécessaire de réaliser une haute tension ; il vaut mieux, au contraire, réaliser une basse tension (constantes osseuses).

La numérisation donne, elle, à volonté, des pénétrations osseuses ou parenchymateuses, en réglant les algorithmes pour une seule prise de rayon X.

Pour la recherche de fractures de côtes, il faut savoir multiplier les incidences tangentielles et faire un marquage métallique au point douloureux.

Pour les fractures pathologiques, le cliché est « parlant » (lyse ou cal).

Pour les fractures traumatiques, si le cliché est négatif, il faut savoir refaire le cliché une semaine plus tard car la fracture peut alors apparaître sous forme d’un trait avec écart visible ou d’un cal naissant.

Mais rappelons que le traitement sera le même, fracture ou pas.

Rappelons aussi que des fractures costales bilatérales sans « bonne » raison traumatique dans l’anamnèse, peuvent signaler un « alcoolisme de comptoir de bar ».

2- Autres incidences complémentaires :

Habituellement, une RT est faite debout, en inspiration et en incidence postéroantérieure (ventre plaque), de face et en profil gauche (plaque à gauche).

Par nécessité, une RT peut être réalisée en décubitus (dos plaque) ou debout (dos plaque).

Les clichés en expiration servent à apprécier une course diaphragmatique, un piégeage ou trapping expiratoire (global, unilatéral ou localisé), ou à mettre en évidence un pneumothorax de faible abondance.

Les clichés avec manoeuvres ont pour but d’apprécier l’effet de variation de pression transthoracique sur les structures médiastinales, en particulier de nature veineuse, comme par exemple une dilatation de la veine azygos, que l’on peut ainsi différencier d’une adénopathie.

L’incidence antéropostérieure avec lordose sert à explorer les lésions apicales en dégageant les clavicules.

Elle peut être utile pour la mise en évidence d’adénopathies mammaires internes qui se trouvent ainsi agrandies, pour l’appréciation d’une coiffe apicale pleurale, pour des lésions tuberculeuses du sommet…

L’incidence oblique et tangentielle est utile pour dégager des plaques pleurales.

Elle est utile, on l’a vu, dans la pathologie traumatique ou tumorale costale.

Elle peut préciser des angles de raccordement pour des opacités périphériques pleuropariétales.

Les clichés en décubitus (latéral ou dorsal) à rayon horizontal, sont des clichés positionnnels visant à mobiliser les épanchements pleuraux de topographie sous-pulmonaire ou à visualiser un pneumothorax couché qui se situe alors en sous-xiphoïdien.

L’échographie peut aussi être appelée en renfort pour ce type de problème.

Les clichés avec opacification de l’oesophage : l’opacification de l’oesophage est un geste simple et utile, lors de l’exploration des masses médiastinales postérieures (oesophagiennes ou non), lors de la recherche d’anomalie de type arc aortique ou encore lors de la recherche de fistule.

3- Examen sous scopie télévisée ou amplificateur de luminance :

L’examen sous scopie traditionnelle a été abandonné, du fait de son irradiation trop importante.

Mais l’apport des amplificateurs de luminance l’ont remis à l’ordre du jour : la vision scopique sans irradiation excessive.

Ce type d’examen en temps réel peut servir à préciser la mobilité des coupoles diaphragmatiques, à la recherche d’une parésie ou une paralysie.

On mettra en évidence une respiration paradoxale, notamment avec l’épreuve de reniflements ou sniff test.

Cet examen peut aussi rechercher, au sein d’une opacité, une contractilité synchrone avec les pulsations cardiaques, témoignant de la nature vasculaire de cette opacité.

On reconnaîtra la « danse des artères » dans les anomalies valvulaires pulmonaires.

Enfin, cet examen sous amplificateur de luminance peut servir à guider les ponctions-biopsies transpariétales à l’aiguille.

4- Radiophotographie :

Au niveau de la population, les examens systématiques du thorax peuvent être réalisés sur de petits clichés de format 10 x 10.

Il s’agit en fait du recueil de l’image d’un écran de radioscopie conventionnelle, focalisée à l’aide de miroirs et de lentilles.

Ces clichés sont effectués en haute tension avec un exposeur automatique à l’intérieur de cabines blindées.

Les résultats de cette méthode sont bons pour certains dépistages de masse et le coût reste faible.

Mais cette technique présente deux inconvénients : elle est irradiante et elle est insuffisante pour le suivi de certaines populations à risque, par exemple pour dépister des pneumoconioses débutantes.

Tomodensitométrie thoracique :

Si la préhistoire des rayons X remonte au XVIe siècle, avec des découvertes sur les phénomènes électrostatiques qui sont dus à l’abbé Nollet, son histoire débute, comme il est bien connu, par la découverte de Wilhem Conrad Rontgen.

Cette découverte date de 1895 et lui valut le prix Nobel de physique en 1901. Quatre-vingts ans plus tard, en 1981, le prix Nobel de médecine sera décerné à Godfrey Newbold Hounsfield, ingénieur électronicien, pour avoir mis au point le premier ordinateur appliqué à l’imagerie médicale, c’est-à-dire le premier scanner, nommé EMIDEC.

Ses travaux sont concomitants de la grande vague musicoartistique des Beatles et, par des pieds-de-nez dont elle est coutumière, l’histoire a ainsi relié musique et découverte scientifique, puisque la société EMI a bien voulu financer ces travaux (qui ne semblaient pas devoir aboutir rapidement) pour la seule raison qu’elle avait un excédent de bénéfice, grâce au groupe de chanteurs bien connus.

Pour en revenir à la découverte de Godfrey Newbold Hounsfield, on peut se demander s’il s’agit uniquement d’une découverte de technicien, permettant une vue axiale transverse (auquel cas, il eût été plus satisfaisant de lui décerner le prix du concours Lépine), ou bien s’il s’agit d’une véritable révolution en profondeur, méritant bien le Nobel ?

La réponse à cette question est, qu’effectivement, le prix Nobel est tout à fait justifié, puisque au-delà de la vue axiale transverse, et d’une belle machine (le tomodensitomètre), Hounsfield a, en fait, inauguré le profond bouleversement que l’informatique et la numérisation de l’image ont apporté à l’imagerie médicale.

La numérisation de l’image déplace la radiologie du terrain photographique pour le terrain informatique.

L’image n’est plus fixée de façon définitive sur le film de nitrate d’argent après la traversée du corps humain par les rayons X.

Faite, dorénavant, d’une série de chiffres, elle est manipulable par divers procédés informatiques, stockable sur disquette et susceptible d’être transmise, quasi instantanément par télématique, à l’autre bout de la terre ou à l’autre bout de la ville.

L’étymologie du mot scanner nous permettra de clôturer ce chapitre historique en précisant qu’il n’est pas seulement d’origine anglaise comme on pourrait le croire (to scan = scruter).

Selon le Littré, le terme skand signifie : se mouvoir, aller, se lever.

Il semble que ce terme remonte aux langues sacrées des Brahmanes et plus précisément au sanskrit.

Passé plus tard au latin, ce terme se transforme en « scendere » pour finalement signifier en terme de musique ou d’éloquence « scander un texte en séparant les syllabes », la « scansion ».

Dans la langue anglaise, d terminale du mot latin se transforme en un deuxième n, et « to scan » signifie : mesurer des vers, scruter l’horizon et en terme de télévision balayer et explorer l’image.

La terminologie déposée par Hounsfield, lui-même, était : « tomographie axiale computérisée (TAC) ».

Les auteurs de langue anglaise utilisent couramment l’abréviation CT pour computed tomography, au Québec on parle de TACO, en langue espagnole de TAC et en langue française, nous préférons l’emploi de l’abréviation TDM pour tomotensitométrie.

A – Scanner spiralé :

La dernière amélioration du scanner X, aujourd’hui généralisée à toutes les installations, est la capacité à acquérir des images pendant que le lit se déplace grâce à une rotation du tube continue.

Il en résulte une acquisition « spiralée » ou « hélicoïdale » sur le corps humain comme une « pelure de peau d’orange ».

Ceci permet des études en continu sans que l’on risque de « sauter » un plan de coupe du fait des mouvements respiratoires.

Ainsi on acquiert tout le volume, sans zone d’ombre, et l’on parle de balayage « volumique » spiralé.

La chose est d’importance en matière de thorax et, par exemple, la recherche de métastases pulmonaires se fait, au mieux, en mode spiralé.

On ne peut affirmer qu’un nodule est unique que s’il l’est en mode spiralé.

C’est le mode spiralé par grande vitesse d’exécution qui a permis la réalisation de véritables angiographies par TDM (« angioscanners »).

Là encore l’application au thorax est décisive pour l’étude de l’aorte et surtout pour l’étude des artères pulmonaires et la recherche d’embolies pulmonaires.

B – Pratique de l’examen en TDM thoracique :

1- Choix des coupes :

Le premier temps de toute TDM thoracique consiste, avec l’analyse du dossier clinique et de la RT, à élaborer une tactique d’examen.

C’est elle qui s’inscrit sur le cliché de départ longitudinal, cliché numérique plan du scanner X.

Le tracé des coupes choisies témoigne d’une réflexion médicale, d’un examen personnalisé.

Par exemple, pour un nodule, les coupes seront jointives sur l’ensemble des champs pulmonaires pour affirmer qu’il est solitaire et quelques coupes millimétriques à son endroit essayeront de découvrir ses composantes et, peut-être, son étiologie.

2- Choix des fenêtres :

Il faut savoir que Hounsfield a gradué les densités de moins 1000 (l’air) à plus 1000 (l’os) en passant par zéro (l’eau).

Il convient de pratiquer toujours une fenêtre parenchymateuse centrée au niveau du parenchyme pulmonaire, c’est-à-dire à moins 600 unités Hounsfield, et une fenêtre médiastinale centrée sur la densité moyenne du médiastin de l’ordre de plus de 50. Sur les coupes en « fenêtre médiastinale », les poumons seront « noirs » et non lisibles alors que le médiastin sera bien analysé.

Il est aussi utile de pratiquer des fenêtres très larges (ouverture à 1800-2000) au niveau du hile et du parenchyme, puisqu’à ce niveau vont se combiner les densités variées : aériques intrabronchiques (moins 1000), vasculaires avec opacification iodée (de l’ordre alors de plus 200) et parfois calciques (plus 1000).

3- Utilisation de l’iode :

L’utilisation des produits de contraste iodés est très fréquente en TDM générale, mais aussi en TDM thoracique.

On n’en a pas besoin cependant, dans l’étude du parenchyme pour fibrose, dilatation des bronches, pneumothorax, pneumoconioses, pneumopathies infectieuses…

Par contre, l’étude d’un (éventuel) cancer bronchique ou l’étude du médiastin requiert l’injection iodée.

Il convient de noter qu’il faut perfuser les patients au bras gauche, de façon à opacifier le tronc veineux brachiocéphalique gauche.

Ceci permet de bien délimiter l’espace prévasculaire rétrosternal du médiastin, ou loge thymique.

Les méthodes d’opacifications sont multiples : bolus, infusion iodée lente, méthode mixte combinant bolus et infusion iodée, injecteur automatique avec débit élevé pour la recherche d’embolie pulmonaire…

4- Étude des hiles :

Il convient d’employer une fenêtre large, des coupes fines, et le plus souvent d’utiliser des bolus fractionnés iodés, de façon à séparer ce qui est artère et veine pulmonaire de ce qui est éventuelle adénopathie ou éventuelle tumeur.

L’étude d’un « gros hile », détecté en RT, doit pouvoir répondre à la question : tumeur ou hile vasculaire paranormal ?

Dans le cancer bronchique, l’étude des artères pulmonaires est décisive pour prévoir la résécabilité chirurgicale, surtout à gauche (raisons anatomiques).

5- Étude d’un nodule pulmonaire :

La détection d’un nodule pulmonaire doit se faire en coupes épaisses (8-10 mm) spiralées. Les coupes de 1 mm ne seront utilisées qu’à bon escient, c’est-à-dire une fois la cible précisée et pour réaliser une densitométrie non polluée.

Le nodule doit toujours être étudié à la console, grâce au jeu de fenêtrage, pour rechercher en son sein l’existence ou non d’un bronchogramme aérique, d’une calcification, d’une zone nécrotique ou encore d’une zone graisseuse.

Enfin, le comportement iodé d’un nodule est indispensable à étudier pour pouvoir affirmer qu’il s’agit bien d’un nodule parenchymateux, présentant un rehaussement, et donc bien de nature tissulaire.

6- Pratique des ponctions biopsies :

La pratique des ponctions biopsies est bien réglée : le repérage doit être le plus méticuleux possible, et le geste de ponction le plus rapide et le plus atraumatique possible en évitant de traverser les scissures, en ne faisant qu’un trajet…

Pendant le repérage, il conviendra de réaliser une opacification iodée, de façon à reconnaître d’éventuels vaisseaux sur le trajet de la ponction.

Cette opacification iodée sert aussi à apprécier les zones de nécrose intratumorale, qu’il conviendra d’éviter pour que la prise biopsique soit de bonne qualité.

Il faut réaliser enfin une coupe après ponction pour savoir s’il s’est produit (ou non) un pneumothorax et en connaître l’importance.

En pratique, ce risque n’est pas nul.

Il est de l’ordre de 15% dont 5% nécessitent une exsufflation.

Après ponction, une nuit d’hospitalisation nous semble le plus souvent nécessaire par prudence.

7- Étude de l’extension médiastinale :

Il est nécessaire d’utiliser toujours l’opacification iodée et de réaliser les coupes adéquates, c’est-à-dire celles passant par les deux artères pulmonaires.

Il est indispensable d’apprécier l’existence d’adénopathies sous-carinaires (N2 dont on sait la valeur frontière) et, surtout, l’existence d’adénopathies controlatérales (N3).

Il faut connaître l’existence d’éventuelles adénopathies sousdiaphragmatiques péri-oesophagiennes dans le cas des néoplasmes lobaires inférieurs.

La TDM « thoracique » doit, de toute façon, « descendre » jusqu’aux surrénales, lieux de métastase possibles dans un cancer bronchique.

8- Étude du parenchyme :

La haute résolution (HR) est obtenue par une épaisseur de coupe millimétrique, et un champ réduit (un seul poumon ou même moins).

La matrice doit être « serrée », (512 au moins).

L’algorithme doit être « sharp » c’est-à-dire de type « passe-haut ».

La TDM-HR optimale peut « descendre » jusqu’à des tailles très petites pour chaque pixel de l’ordre de 0,4 mm, soit 400 microns, c’est-à-dire deux à trois alvéoles !

La zone périphérique corticale est la mieux étudiée.

Il faut savoir étudier le parenchyme pulmonaire en procubitus dans les maladies interstitielles et professionnelles (amiante), pour se dédouaner des phénomènes de gravitodépendance et réaliser des coupes en expiration pour rechercher les trappages des bronchiolites.

Échographie thoracique :

Le « positionnement » de l’échographie thoracique est paradoxal.

En effet, il s’agit d’une technique d’imagerie qui est tout à fait utile, voire indispensable, dans la pratique quotidienne et à la fois relativement annexe et limitée dans le concert de l’imagerie thoracique.

Les limitations de l’échographie sont dues au paramètre physique lui-même : l’air parenchymateux pulmonaire est un ennemi irréductible des ultrasons, alors que l’eau est son amie.

La visualisation parcellaire (en « gros plan ») que cette méthode fournit, est aussi une autre limitation.

Elle ne peut être envisagée qu’en deuxième intention, d’après les déductions réalisées sur la RT et que s’il y a de « l’eau » ou un « équivalent-eau ».

L’application de l’échographie à la pathologie thoracique est récente et ne date que des années 1980, avec l’apparition du temps réel.

Les premières applications ont été tournées vers la pathologie pleurale (épanchements et plaques) et vers les problèmes posés par les hémithorax opaques (notamment postpneumonectomie).

L’échographie peut guider une ponction transthoracique à la condition que la masse pulmonaire ou médiastinale soit au contact de la paroi.

La technique d’exploration échographique du thorax s’est enrichie de l’échographie de haute fréquence, qui permet une étude fine mais peu profonde, c’est-à-dire l’étude des territoires pariétaux ou pleuropulmonaires superficiels.

Une sémiologie nouvelle peut voir le jour comme conséquence de cette innovation technologique, mais elle est d’un intérêt discutable, face aux précisions sémiologiques des autres méthodes d’imagerie (notamment TDM) et face à la difficulté de sa propre reproductibilité entre divers opérateurs.

Enfin, une technique particulière vient d’apparaître, où l’échographe est couplé à un endoscope oesophagien (ETO), ce qui permet une exploration directe de l’oesophage et de son environnement : médiastin moyen, aorte et coeur.

Cette nouvelle technique peut participer au bilan d’extension des cancers bronchiques pour ce qui est du T médiastinal et du N2 ganglionnaire.

D’autres applications peuvent être envisagées : cancer de l’oesophage, kystes bronchogéniques, région sous-carinaire et en urgence, l’étude de l’aorte traumatique ou des dissections aortiques.

IRM thoracique :

L’IRM a encore peu d’indications en pathologie thoracique du fait de son « trou noir » en matière de parenchyme pulmonaire.

Elle est fortement concurrencée par la TDM spiralée, alors que ses performances objectives, en matière de médiastin, de coeur ou de paroi sont supérieures.

L’IRM n’utilise pas les produits de contraste iodés ni les rayons X, ce qui est important chez la femme enceinte, l’enfant, l’insuffisant rénal, etc.

Des progrès décisifs en rapidité permettant l’acquisition en apnée et l’angiographie pulmonaire par IRM sont à nos portes.

On peut rêver de l’utilisation de produits de contraste en aérosol (notamment d’Hélium [3He] activé) et d’une approche de la fonction respiratoire par IRM.

Radiologie vasculaire thoracique :

Le thorax présente deux types de vascularisation.

D’un côté la vascularisation systémique à haute pression (aorte, artères bronchiques) avec le système veineux correspondant (veine cave, veines azygos, veines intercostales, mammaires internes…) se drainant dans l’oreillette droite.

De l’autre, la vascularisation fonctionnelle à basse pression (artères pulmonaires) et le drainage du sang « réoxygéné » par les veines pulmonaires vers l’oreillette gauche.

L’arrivée du scanner spiralé a fait brutalement chuter le nombre d’aortographies ou d’angiographies pulmonaires.

C’est une bonne chose pour le patient que l’angioscanner puisse donner des renseignements équivalents ou presque, alors qu’il ne subit qu’une simple intraveineuse.

Nous y reviendrons par exemple à propos de la stratégie actuelle face à une suspicion d’embolie pulmonaire.

Il reste cependant au radiologue interventionnel quelques activités.

Il peut être amené à placer un cathéter dans les artères pulmonaires pour en mesurer la pression.

Il peut poser des endoprothèses dans une veine cave supérieure dont le blocage par une extension médiastinale de cancer ou un lymphome est responsable d’un syndrome cave.

Il pourra être amené à occlure une fistule artérioveineuse (FAV) dans le cadre d’une maladie de Rendu-Osler-Weber.

Plus rare dans nos régions, est l’éventualité de devoir occlure un anévrisme artériel pulmonaire dans le cadre d’une maladie de Behçet.

En revanche, il reste fréquent d’avoir à intervenir par artériographie bronchique et systémique devant des hémoptysies graves et répétées.

Dans ce cadre, le rôle de l’artériographie bronchique a changé. Elle ne participe plus tellement à l’étape diagnostique.

La fibroscopie bronchique et la TDM préalables donnent le plus souvent l’étiologie des hémoptysies (bronchectasies, séquelles de tuberculose, aspergillomes intracavitaires ou encore tumeur).

L’artériographie bronchique est devenue thérapeutique : localiser l’artère bronchique en cause et l’emboliser pour obtenir un répit temporaire ou dans les meilleurs cas, permanent.

Cet examen n’est pas sans risque, et il convient de bien peser ses indications.

Il n’est requis que si les moyens médicaux sont en échec, que si le malade est inopérable alors que les hémoptysies persistent et menacent (risque mortel).

Il doit être réalisé par une équipe entraînée, comprenant un anesthésiste et un opérateur rompu au cathétérisme sélectif.

Le risque principal est un risque neurologique médullaire.

En effet, les artères intercostales et les artères bronchiques (surtout à droite) peuvent donner des rameaux médullaires de très petite taille (150 microns, soit 0,15 mm) donc difficiles à voir et pourtant, à ne surtout pas emboliser.

Il convient de réaliser cette artériographie avec un matériel très performant et en numérique, de façon à pouvoir réaliser des tests « scopiques » répétés avant, pendant et après les divers temps du cathétérisme et de l’embolisation.

La présence d’un rameau spinal que l’on ne pourrait pas « shunter » par un cathétérisme supersélectif, doit faire renoncer à l’embolisation.

Le patient doit être dûment prévenu des risques encourus si son état de conscience le lui permet.

Malgré ses dangers, l’embolisation bronchique reste souvent le dernier recours.

Elle doit être réalisée de façon à pouvoir être itérative en cas de récidive.

Éléments de sémiologie radiologique thoracique :

La sémiologie du cliché standard est très souvent explicitée grâce à la TDM et « revisitée ».

De cette façon, elle devient plus facile à apprendre, car plus évidente à comprendre.

La TDM authentifie ou, au contraire, récuse l’interprétation du standard.

En TDM, l’appartenance médiastinale, pariétale, pleurale ou même bronchique d’une lésion devient évidente.

A – Signe de la silhouette :

Le signe « de la silhouette » est le signe sémiologique de base générique dans l’interprétation d’un cliché thoracique.

Il a été vulgarisé par Felson.

Ce signe est le « compas » du radiologue.

Il s’utilise aussi bien en radioanatomie normale qu’en pathologie sur le cliché standard. Il est dû au fait que tout ce qui est visible dans un thorax, l’est grâce à l’air (peu dense) qui le « silhouette ».

À l’inverse, ce qui n’est pas silhouetté n’est pas visible. Une opacité thoracique, de densité eau, en contact avec le bord du coeur ou de l’aorte, efface l’image de ce bord (densité eau + densité eau).

Cette opacité se fond alors avec l’opacité cardiovasculaire. Les deux opacités ne sont plus séparables.

Comme dans une silhouette, il n’existe plus qu’une seule limite périphérique.

Ce signe a une grande valeur pour la détermination topographique d’une opacité intrathoracique et ceci avant même la réalisation du cliché de profil.

En pratique, si deux opacités, de densité égale eau, donnent entre elles naissance à un signe de la silhouette, c’est qu’elles sont dans un même plan.

Ainsi, une opacité pulmonaire de la base qui efface l’un des bords du coeur est toujours de siège antérieur au contact du coeur (lobe moyen à droite et lingula à gauche).

Si deux opacités, de densité égale eau, ne se confondent pas, si elles sont séparables, c’est qu’elles ne sont pas situées dans le même plan et séparées par l’air. Une opacité de la base qui n’efface pas le bord du coeur est postérieure à celui-ci et correspond aux lobes inférieurs dont l’air la silhouette.

Ce signe « générique » explique la formation des lignes et bords du médiastin.

Ainsi, la ligne ou bord aortique se fait de face sur son bord gauche (aorte-air) et non sur son bord droit (aorte-médiastin, soit pas de contraste).

De profil, le « silhouettage » de l’aorte n’est constant que pour la crosse, et le diaphragme gauche est celui qui disparaît en avant du fait d’un contact avec le ventricule gauche qui efface sa silhouette.

1- Signe du recouvrement hilaire :

Aux hiles, les vaisseaux peuvent être dilatés (gros hile) ou être recouverts par une tumeur ou des adénopathies.

D’où les signes de la convergence hilaire ou du recouvrement hilaire.

2- Signe cervicothoracique :

Si on réalise une coupe anatomique sagittale du thorax, on constate que le sommet du poumon ou apex est postérieur.

C’est ainsi qu’une tumeur médiastinale opaque, visible au-dessus des clavicules, est forcément entourée d’air, donc postérieure.

Une opacité tumorale médiastinale supérieure, dont le bord externe disparaît au-dessus de la clavicule, est obligatoirement antérieure, comme un goitre plongeant antérieur, dit cervicothoracique.

3- Signe thoracoabdominal ou signe de « l’iceberg » :

Si une opacité basale a des bords parfaitement dessinés, c’est qu’elle est entourée d’air, donc intrathoracique.

Si le bord inférieur n’est pas silhouetté par l’air, la masse peut avoir un prolongement sous-diaphragmatique.

Il s’agit du même signe que précédemment, mais à l’autre « orifice » du thorax.

Syndrome pleural et pariétal

Le syndrome pariétal témoigne d’une masse pariétale.

La lyse costale signe le plus souvent la malignité du processus.

Le syndrome pleural regroupe l’ensemble des informations qui, sur un cliché thoracique, témoignent de la présence d’un épanchement gazeux ou liquidien, libre ou cloisonné, à l’intérieur de la grande cavité pleurale ou des scissures.

B – Syndrome bronchique :

Ses signes peuvent être directs (bronches trop visibles), ou indirects (conséquences fonctionnelles ventilatoires et circulatoires de l’atteinte bronchique).

1- Signes directs bronchiques :

Les bronches normales ne sont pas radiologiquement visibles, sauf en périhilaire, et ne contribuent pratiquement pas à la formation de l’image radiologique thoracique au-delà des segmentaires. Les bronches peuvent devenir visibles dans trois conditions :

– lorsque les parois sont épaissies : « en rails » ou en « jumelles » ;

– lorsqu’elles sont normalement remplies d’air et entourées de parenchyme pulmonaire anormalement densifié : c’est le signe du « bronchogramme aérique » (pneumopathies) ;

– lorsque leur lumière est occupée par des sécrétions muqueuses ou purulentes et qu’elles sont entourées de parenchyme pulmonaire normalement aéré : il s’agit de bronchomucocèles, souvent impossibles à distinguer des opacités vasculaires, sauf si elles sont dilatées : « en massue », « en doigt de gant », en « V » ou en « Y ».

Dans les bronchectasies, la bronche dilatée prend l’aspect d’une bague et l’artère devient son chaton.

Dans l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP), c’est l’artère qui est plus grosse (image « en sceau » ou « en pain à cacheter »).

En fait, ces signes sont plus faciles à observer en TDM-HR, et la TDM est devenue la référence pour le diagnostic des dilatation des bronches (DDB).

2- Signes indirects du syndrome bronchique :

Ils sont les plus visibles.

Il s’agit des conséquences sur la ventilation (atélectasie rétractile ou à l’inverse piégeage) et sur la perfusion (hyperclartés par hypoperfusion).

3- Syndrome alvéolaire :

Il s’agit de l’ensemble des signes radiologiques consécutifs à la disparition de l’air habituellement contenu dans les alvéoles pulmonaires, qui est remplacé par un liquide exsudé ou transsudé, ou par des cellules bénignes ou malignes.

Il y a « hépatisation pulmonaire », sans réduction de volume du parenchyme, contrairement à l’« apneumatose » de l’atélectasie par obstacle bronchique, qui condense en rétractant (condensation pulmonaire rétractile).

Les opacités « alvéolaires » sont caractérisées par : des bords flous et dégradés, sauf l’arrêt net sur scissure, une densité hydrique, une confluence par les pores de Kohn et les canaux de Lambert, une systématisation possible (triangulaire ou aile de papillon), un bronchogramme ou un lobulogramme aérique.

Leur évolution est le plus souvent rapide (pneumopathies, oedème).

La taille des images est directement fonction de l’unité anatomique intéressée (acinus ou lobule) et de leur nombre.

Elles peuvent être indépendantes, très petites et multiples.

Elles réalisent alors une véritable miliaire alvéolaire, dont le diagnostic radiologique est impossible à faire avec une miliaire interstitielle.

C’est le cas de la miliaire posthémoptoïque, ou de l’exceptionnelle microlithiase alvéolaire, dont la TDM a d’ailleurs montré la composante interstitielle pariétoalvéolaire associée.

Elles peuvent se regrouper pour former des opacités « en rosette », comme dans une bronchopneumonie débutante.

Elles peuvent former des opacités lobulaires ou sous-segmentaires de densité variable avec des clartés aériques interposées (lobules aérés ou bronchogrammes aériques) comme dans les pneumonies.

Quatre étiologies dominent le syndrome de comblement alvéolaire :

– s’il est localisé :

– pneumonie ;

– infarctus pulmonaire ;

– s’il est diffus :

– oedème pulmonaire alvéolaire hémodynamique ou lésionnel ;

– bronchopneumopathies en foyers.

Mais on se rappellera que le comblement alvéolaire n’est pas toujours bénin, et qu’un cancer bronchioloalvéolaire peut se manifester ainsi.

On peut nommer opacités pseudoalvéolaires (en standard et surtout en TDM), les opacités qui miment le comblement alvéolaire mais qui sont dues, en fait, à une inflation interstitielle assez importante pour comprimer de l’extérieur les espaces aériens distaux.

Cet aspect se voit dans les lymphomes, la sarcoïdose etc.

C – Syndrome interstitiel :

L’interstitium pulmonaire ou tissu de soutien bronchoalvéolopleural, est invisible radiologiquement à l’état normal car il est trop fin.

Il ne deviendra visible et ne donnera une « image radiologique » que dans des circonstances pathologiques :

– infiltration liquidienne (oedème pulmonaire interstitiel) ;

– stase veineuse et/ou engorgement lymphatique (coeur gauche, lymphangite) ;

– prolifération cellulaire ou tissulaire anormale (granulomatose, fibrose).

Le syndrome radiologique dit « interstitiel » regroupe l’ensemble des informations qui témoignent de l’atteinte pathologique avec épaississement de l’un ou de plusieurs des compartiments du tissu interstitiel pulmonaire :

– compartiment péribronchovasculaire hilipète dit « de conduction » ;

– compartiment périlobulaire ou interlobulaire (cloisons septales) ;

– compartiment pariétoalvéolaire ou intralobulaire (membrane d’échanges gazeux) ;

– compartiment sous-pleural périphérique.

Ce syndrome radiologique n’apparaîtra bien que s’il est pur.

Il peut être masqué par un syndrome alvéolaire surajouté.

En effet, l’interstitium (densité eau) ne sera visible que si les alvéoles sont aérés (densité air).

Mais le passage de l’un à l’autre est fréquent, ainsi que leur association.

En pratique, il existe souvent une atteinte combinée que l’on nommera « infiltrative », où la dominante est plus ou moins interstitielle ou plus ou moins alvéolaire.

L’évolution du syndrome interstitiel ou infiltratif est le plus souvent chronique.

Les opacités interstitielles dominantes sont des opacités à bords nets, non confluantes, non systématisées, sans bronchogramme aérien, de topographie ni vasculaire ni bronchique, mais aléatoire avec des intervalles libres à limites franches.

Il peut s’agir de nodules ou de réticulations comme les fameuses lignes de Kerley de l’hypertension veineuse.

Il faut rappeler ici que l’épanchement pleural est de nature interstitielle (pleurésie cardiaque et oedème pulmonaire interstitiel associés, par exemple, dans l’insuffisance cardiaque gauche).

La TDM-HR a beaucoup apporté dans l’étude fine du syndrome interstitiel et de la pathologie infiltrative.

La première chose que la TDM apporte, c’est l’affirmation de l’existence même du syndrome : présence en TDM alors que la RT paraissait normale (30% des cas dans certaines pathologies) et au contraire, absence dans 30% des cas du fait de mauvais clichés en basse tension (mal pénétrés et majorant la « trame ») ou de clichés mal interprétés (syndrome bronchique faisant croire à tort à un syndrome interstitiel).

En TDM, on sépare aujourd’hui les opacités infiltratives en trois groupes :

– les nodules (micro ou macro) ;

– les épaississements linéaires et réticulés (lignes et septa) ;

– les densifications, distorsions et rétractions fibreuses, avec kystes en rayon de miel comme stade terminal de destruction.

Démarche radiologique devant des situations cliniques concrètes (prescription et stratégie) :

A – Devant un tableau clinique fébrile évoquant une pneumopathie infectieuse :

Un patient fébrile, avec toux et expectoration, doit avoir une RT.

Celle-ci pourra asseoir le diagnostic, aider à guider le probabilisme thérapeutique puis à suivre l’évolution.

La pneumonie franche lobaire aiguë (PFLA) est facile à reconnaître avec son opacité alvéolaire segmentaire ou lobaire à bords dégradés, mais avec arrêt net sur scissure et avec, (parfois), bronchogrammes aériques.

On pensera au pneumocoque, mais toutes les PFLA ne sont pas à pneumocoque (légionelles, autres…) et, à l’inverse, tous les pneumocoques ne font pas des PFLA.

Quand on constate plusieurs foyers alvéolaires segmentaires distincts, on évoque une bronchopneumonie dont l’acte de naissance est dans la bronchiole et non pas dans les alvéoles comme pour la pneumonie.

Elle peut être à staphylocoque (ou autres) et peut ultérieurement confluer en un foyer dominant.

Il faut se souvenir que la tuberculose est, au départ, une bronchiolite avec bronchopneumonie intralobulaire périphérique, et que ses « infiltrats » sont habituellement apicodorsaux.

La TDM-HR pourra être utile dans les cas débutants ou douteux actuels de tuberculose (migrants, sida…), en montrant l’aspect « d’arbre en fleurs » et de « verre dépoli » qui précède la caverne.

Une pneumopathie rapidement excavée peut être due à des bacilles à Gram négatif (klebsielles et autres) ou encore aux nocardias sur un terrain légèrement débilité.

Là encore, la TDM peut être utile pour percevoir la nécrose avant la RT.

Les pneumonies atypiques, virales ou à germes apparentés, ont une présentation plus diffuse et interstitielle, sans véritable foyer au début.

Dans les atteintes hématogènes, les foyers sont petits, ronds, périphériques sous-pleuraux et ont tendance à s’excaver vite.

C’est le cas des staphylococcies (venant de foyers périnéphrétiques ou autres), ou des valvulopathies infectieuses emboliques (chez le valvulaire ou le drogué intraveineux par exemple).

Chez le sujet HIV positif, une « bronchite » qui dure doit faire rechercher une pneumocystose pulmonaire avec ses opacités floconneuses diffuses, en « verre dépoli ».

Il faut savoir qu’au début la pneumocystose peut avoir une RT d’apparence normale alors que la TDM peut déjà percevoir un état de « verre dépoli ».

De nombreux germes opportunistes peuvent concerner le poumon du sida, en dehors du Pneumocystis, ainsi que des germes banals non-opportunistes, qui donnent des lésions plutôt en foyers.

Il convient de corréler le cliché radiologique au statut immunitaire (charge virale, CD4).

Signalons, pour terminer, une affection rare mais à connaître, qui crée un état pseudogrippal avec des foyers de bronchopneumonie qui ont la particularité d’être migrateurs et non sensibles aux antibiotiques, alors qu’ils sont très corticosensibles.

Il s’agit de la bronchiolite oblitérante avec organisation pneumonique (BOOP) décrite par Epler en 1985, mieux nommée pneumonie organisée cryptogénique (POC).

Quant au contrôle évolutif sous traitement d’une pneumonie, il faut répéter ici qu’il doit être clinique avant tout et qu’il n’est pas utile de réaliser un cliché de contrôle avant 15 jours.

B – Devant une toux chronique de l’adulte :

La toux est un motif fréquent de consultation de médecine générale.

Elle est dite chronique lorsqu’elle persiste plus de 2 à 3 mois.

Quatre causes sont responsables de la majorité des cas :

– jetage postérieur dû à une rhinite ou une rhinosinusite chronique ;

– bronchite chronique ;

– asthme ;

– reflux gastro-oesophagien.

L’interrogatoire, l’examen physique, le cliché thoracique et un bilan biologique simple permettent, dans la grande majorité des cas, d’identifier une cause, et de proposer un traitement étiologique efficace.

Plus rarement, la toux est isolée et persiste malgré des traitements d’épreuve.

D’autres examens sont nécessaires, dont le choix est guidé par le terrain, les caractères sémiologiques de la toux et la fréquence des étiologies :

– radiographies des sinus ;

– TDM thoracique ;

– exploration fonctionnelle respiratoire ;

– pHmétrie oesophagienne ;

– échocardiographie ;

– fibroscopie bronchique. Plusieurs causes de toux peuvent être associées chez le même sujet.

Quel est l’intérêt du cliché thoracique devant une toux chronique ?

La RT doit être systématique devant une toux persistante car elle peut découvrir des nodules et/ou des infiltrats (parfois excavés) des apex pulmonaires, évocateurs d’une tuberculose.

Un cancer bronchique, des dilatations des bronches, une fibrose pulmonaire peuvent être également révélés.

Plus fréquemment, la radiographie objective une cardiomégalie (index supérieur à 50 %) et des images de poumon cardiaque :

– redistribution vasculaire vers les sommets avec gros hile ;

– comblement des culs-de-sac pleuraux ;

– épaississement des scissures ;

– opacités linéaires sous-pleurales aux bases, de type lignes de Kerley.

Quand la RT est normale, une cause non respiratoire ou non radiovisible doit être recherchée, en se basant sur la sémiologie clinique et la fréquence des étiologies.

C – Chez l’enfant :

Un tableau fébrile saisonnier peut être dû aux bronchopneumonies banales, le plus souvent virales, puis surinfectées.

Devant la répétition des épisodes, il peut être utile de vérifier les sinus, en se rappelant qu’avant 7 ans, il est habituel que les sinus frontaux ne soient pas « creusés ».

Le cliché du cavum, souvent demandé, ne s’avère pas d’une grande rentabilité.

Une pneumopathie récidivante dans le même territoire doit faire suspecter une cause congénitale sous-jacente : atrésie bronchique, séquestration, kyste bronchogénique/bronchoconstrictif…

Si le syndrome de pénétration n’est pas retrouvé à l’interrogatoire (enfant-parents), il peut être difficile d’affirmer l’inhalation d’un corps étranger (fragment de jouet, capuchon de stylo à bille, cacahouète…).

Le cliché en expiration pourra montrer le siège de l’obstacle en désignant une zone de trappage aérique restant hyperclaire car ne se « vidant » pas.

Enfin, chez le tout petit (en crèche ou non) on se méfiera des bronchiolites dont la RT est souvent trompeuse car d’apparence normale.

Il faudra chercher la moindre distension avec hyperclarté.

Les conséquences à court et à long termes, peuvent être catastrophiques : destructions parenchymateuses, petit poumon clair type Mac Leod…

D – Devant un malade porteur d’une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) :

Les BPCO sont de grands consommateurs de RT et de TDM.

Au stade de la bronchite chronique, il existe peu de signes radiologiques sinon le poumon dit « sale » et la distension quand la bronchite devient obstructive.

La recherche de DDB doit s’effectuer par TDM orientée, ceci est acquis aujourd’hui.

Il faut savoir que les asthmatiques anciens deviennent des bronchopathes et présentent des DDB cylindriques de petite importance, visibles en TDM pour 25% d’entre eux.

Les clichés des sinus, avec surtout l’incidence de Blondeau, peuvent indiquer une zone à traiter pour couper court au cercle vicieux « sinus bronches ».

Durant la crise d’asthme, il n’y a « rien à voir » ou presque.

Devant des douleurs au décours d’une crise, une RT peut parfois percevoir un pneumomédiastin dû à l’hyperpression à glotte fermée déclenchée par la crise.

Chez l’emphysémateux, la RT devient typique seulement à un stade évolué.

Pour mieux démasquer l’emphysème, il faut réaliser des clichés de face et de profil, en inspiration et en expiration.

C’est en expiration en effet que la non-mobilité du diaphragme devenu horizontal du fait de la distension est le mieux démontrée.

En phase préthérapeutique chirurgicale, ou avant un pneumopéritoine thérapeutique, on apprécie au mieux le « jeu du diaphragme » grâce à l’IRM dynamique.

Un des buts de ces thérapeutiques est justement de redonner un jeu plus satisfaisant aux coupoles diaphragmatiques, car il existe une part de la dyspnée liée au diaphragme déficient à côté de celle liée à la destruction de l’« échangeur ».

Le sujet BPCO peut se surinfecter, compliquer une bulle, voire faire une embolie.

Dans toutes ces hypothèses la TDM sera décisive.

E – Devant un « poumon cardiaque » :

Le poumon du rétrécissement mitral ou de l’insuffisance ventriculaire gauche (IVG) a une sémiologie précise, expliquée par l’hypertension veineuse.

La majoration des veines et des septas lobulaires avec oedème interstitiel crée les lignes de Kerley et un petit épanchement basal droit ou scissuraire.

On aura enregistré la cardiomégalie en mesurant visuellement l’index cardiothoracique de face mais aussi de profil.

On sait que chez le cardiaque âgé, c’est souvent une pneumopathie intercurrente qui déclenche la crise d’insuffisance cardiaque gauche.

Les deux types d’opacités alvéolaires (infectieuse et oedémateuse) peuvent s’entremêler alors.

Mais la pneumopathie est plutôt aux sommets et l’hypertension veineuse et l’oedème plutôt aux bases.

Peuvent se surajouter les opacités en « verre dépoli » et les majorations septales des pneumonies médicamenteuses, à la Cordaronet notamment.

La situation peut devenir complexe d’autant qu’il faudra choisir (ou ajouter ?) : diurétique, corticoïde, suppression de la Cordaronet…

Chez les BPCO, c’est l’atteinte du coeur droit qui domine avec l’HTAP, mais il peut s’y ajouter une atteinte gauche par hypoxie myocardiaque à un stade avancé.

F – Devant une suspicion de cancer thoracique :

Devant une toux persistante, des hémoptysies ou une altération de l’état général, la RT vise à écarter un cancer bronchique ou une tumeur médiastinale.

Le cliché découvre malheureusement très souvent (75%des cas) un état pulmonaire et médiastinal très avancé (T et N), au-delà des possibilités chirurgicales.

Parfois même on se trouve devant une métastase (M) osseuse ou cérébrale révélatrice, et c’est la RT qui la rapporte au primitif.

Devant un nodule ou une masse pulmonaire sur la RT, il convient de réaliser d’abord une TDM thoracique avant même la fibroscopie bronchique.

En effet, la TDM (spiralée) permettra de répondre à la question : le nodule est-il pulmonaire et est-il solitaire ou non ?

Elle donnera aussi une topographie précise ce qui améliorera le rendement de la fibroscopie ainsi dirigée.

La découverte de métastases lors du bilan TDM pourra faire choisir une biopsie hépatique ou surrénalienne comme lieu du prélèvement diagnostique.

Pour les nodules pulmonaires périphériques et isolés inférieurs à 4 centimètres, la fibroscopie bronchique a un rendement bien moindre (55 %) que la ponction percutanée sous TDM (85%).

Si le patient est opérable, pourquoi ne pas l’opérer d’emblée ?

En définitive c’est sur l’état général cardiaque et respiratoire d’une part (opérabilité) et sur le bilan TDM (résécabilité) que le chirurgien ou la réunion multidisciplinaire décidera de la chirurgie, puisque reste vrai l’adage qui dit que « tout nodule pulmonaire tissulaire et unique chez un sujet opérable… doit être opéré ».

Dans ces cas, il peut se concevoir que la fibroscopie soit réalisée seulement en préopératoire.

Dans la situation où la masse est plus proximale, la fibroscopie première garde sa valeur.

Dans de nombreux cas, la découverte d’un nodule pulmonaire est une découverte fortuite, le sujet étant asymptomatique et la RT réalisée pour autre chose comme pour une intervention, une embauche… ou à titre systématique.

Que faut-il penser d’un dépistage du cancer bronchique, qui n’existe de façon organisée nulle part dans le monde, et quelle place y aurait la RT ?

Nous ne le savons pas.

Ce qui est sûr, c’est qu’il faudrait y inclure non seulement l’homme de 50 ans fumeur mais aussi la femme (elle fume) et abaisser l’âge à 40 ans, voire 35 ans.

Cela fait beaucoup de monde et beaucoup de clichés !

Qui en seraient les lecteurs ? Est-il si simple de lire en routine des RT pour y déceler de petits nodules de 1 centimètre ?

Et quelle périodicité ?

Connaissons-nous le temps de doublement de ce(s) cancers(s) ?

G – RT systématiques :

Les RT de médecine du Travail sont (parfois) ciblées sur une population à risque (pneumoconioses, amiante…).

Elles peuvent aider à la « réparation » et/ou détecter des masses fortuites.

Dans l’exposition à l’amiante, on recherchera des épaississements pleuraux plus ou moins mamelonnés et des nodules parenchymateux.

Le clinicien est souvent amené à prescrire des RT systématiques, « institutionnelles ».

Pour les activités sociales, (gardes d’enfants, colonies de vacances…) on y recherchera un état infectieux contagieux. Cette pratique vient de l’époque de l’endémie tuberculeuse, où l’on voulait détecter le sujet bacillifère.

Comme la tuberculose « revient » de nos jours, nous rappellerons la topographie préférentielle apicodorsale en « postprimaire » et la préférence pour les adénomégalies médiastinales en « primo » (enfants, « migrants »).

Pour les activités sportives, on vérifiera sur la RT l’absence de cardiomégalie, d’anévrisme aortique (Marfan, etc), de plages d’hyperclartés emphysémateuses, ou d’éventuels pneumothorax idiopathiques. Quant au cliché préopératoire…il n’est plus obligatoire !

On peut concevoir son utilité pour une chirurgie thoracique (mais on interroge la maladie en cause) ou pour une chirurgie à risque thoracique postopératoire (chirurgie digestive lourde et parésie du diaphragme, chirurgie osseuse et risque embolique pulmonaire…).

On peut concevoir aussi son utilité pour un sujet «migrant » dont on ne sait rien des antécédents médicaux.

On retombe là dans le cas de figure de recherche d’une pathologie contagieuse.

Mais dans tous les autres cas et notamment chez l’enfant, la rentabilité est faible.

Cependant qui fixe le taux de rentabilité ?

Par ailleurs, on n’oubliera pas qu’une pathologie thoracique peut être bien réelle, alors que la RT est normale (asthme, hémoptysie…).

H – Devant une suspicion d’embolie pulmonaire :

Il nous paraît utile de faire une mise au point à ce sujet, pour terminer ce tour d’horizon.

L’arrivée du scanner spiralé a, en effet, changé la démarche d’imagerie.

Ceci surtout chez les BPCO où la scintigraphie est très peu fiable, alors que le balayage spiralé et son angioscanner (équivalent ou presque d’une angiographie pulmonaire) est très performant.

Les fenêtres parenchymateuses du scanner étudient aussi le parenchyme et peuvent démasquer des hypoperfusions (pseudoembolies) liées à une évolution de la BPCO.

Il faut cependant ne pas se précipiter sur le scanner spiralé devant tout point de côté suspect.

L’échodoppler des veines des membres inférieurs et les D-dimères (endehors du postopératoire) doivent être réalisés d’abord.

Fait dans cet algorithme-là et non pas en premier, le scanner spiralé prendra et gardera toute sa place dans le diagnostic moderne de l’embolie pulmonaire.

Conclusion :

L’imagerie thoracique a fait de vastes progrès depuis 10 ans. Elle reste centrée sur la RT et sa lecture.

Le couple dominant est celui que forment RT et TDM.

La TDM permet en effet des coupes anatomiques fines de tous les compartiments du thorax et ceci avec une grande fiabilité grâce au balayage spiralé.

Les portes d’une bonne prescription sont ouvertes aux cliniciens qui se poseront et qui poseront aux imagiers les bonnes questions… et sauront tout ce qu’on peut attendre d’elle.

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