Hypoxémie au cours du sommeil dans les bronchopneumopathies chroniques obstructives

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Introduction :

La polysomnographie a d’abord été pratiquée chez des malades présentant un « syndrome de Pickwick ».

Les premières études polysomnographiques chez des malades atteints de BPCO remontent à 1975-1976 et comportent des mesures intermittentes des gaz du sang artériel au cours du sommeil.

Des oxymètres transcutanés fiables sont disponibles depuis 1976, et Flick et Block ont été les premiers à mesurer de façon continue, chez des patients BPCO, la saturation en oxygène transcutanée (SaO2) à l’aide d’un oxymètre à pince d’oreille.

Hypoxémie au cours du sommeil dans les bronchopneumopathies chroniques obstructivesDepuis leur étude princeps, de nombreux travaux, à la fin des années 1970 et au début des années 1980 ont montré que l’hypoxémie des BPCO s’aggrave au cours du sommeil et tout particulièrement au cours du sommeil paradoxal.

Ces études ont presque toutes concerné des patients avec BPCO sévère, franchement hypoxémiques le jour, le plus souvent hypercapniques.

Ce n’est qu’assez récemment qu’on a disposé de données sur l’hypoxémie nocturne des malades BPCO peu ou pas hypoxémiques le jour (PaO2 > 60 mmHg).

Dans cette courte mise au point nous envisagerons successivement les caractéristiques de l’hypoxémie nocturne des malades BPCO, ses mécanismes et ses conséquences potentielles et nous accorderons une place importante au traitement de l’hypoxémie liée au sommeil.

Caractéristiques de l’hypoxémie nocturne des malades atteints de bronchopneumopathie chronique obstructive :

Ce patient a des perturbations gazométriques diurnes importantes (PaO2 = 50 mmHg, SaO2 = 85 %, PaCO2 = 50 mmHg) et il n’a pas d’apnées obstructives lors du sommeil.

On observe la présence d’épisodes de désaturation en O2 répétitifs et profonds pour certains d’entre eux, la SaO2 chutant en dessous de 60 %.

C’est au cours du sommeil paradoxal que la désaturation est la plus importante.

C’est ce type d’épisodes de désaturation qui a été décrit il y a 15 à 20 ans et qui est caractéristique des malades BPCO très évolués, avec hypoxémie diurne franche (PaO2 < 60 mmHg) et hypercapnie (PaCO2 >= 45 mmHg).

Il existe en fait une relation très étroite entre le niveau de l’hypoxémie diurne et la sévérité de l’hypoxémie au cours du sommeil, relation que l’on explique aisément par l’allure de la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine.

Le groupe de Flenley à Édimbourg a émis l’hypothèse que la chute maximale de la PaO2 au cours du sommeil paradoxal est en gros identique chez les sujets sains et chez les malades BPCO, de l’ordre de 15 à 20 mmHg.

Compte tenu de l’allure de la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine, la désaturation qui en résulte est minime chez les sujets sains et importante chez les malades BPCO hypoxémiques le jour.

On explique également ainsi que les malades BPCO de type « BB » désaturent plus franchement au cours du sommeil que les malades de type « PP ».

La conception du groupe de Flenley est séduisante mais elle est sans doute trop simplificatrice.

Elle ne permet pas d’expliquer par exemple pourquoi certains malades peu hypoxémiques le jour ont une désaturation nocturne significative alors que d’autres, comparables à tous les égards, ne désaturent pas la nuit.

Une étude récente a montré que les désaturations nocturnes les plus prononcées s’observent chez les patients qui ont la chute la plus importante de la PaO2 (estimée à partir de la SaO2), ce qui suggère bien que la position sur la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine n’est pas le seul élément à prendre en compte.

Les épisodes les plus sévères de désaturation nocturne sont observés lors du sommeil paradoxal, notamment lors du sommeil paradoxal phasique.

Leur durée peut atteindre 15 minutes.

En fait, la désaturation n’est pas limitée au sommeil paradoxal et peut être présente lors de la période instable d’endormissement et lors du sommeil lent léger (stades 1-2) mais ces épisodes de désaturation sont moins profonds et plus brefs.

La définition le plus souvent retenue d’un épisode de désaturation est celle qui a été proposée par le groupe de Block, aux États-Unis, à savoir une chute de la SaO2 supérieure à 4 % par rapport à son niveau de base, en respiration calme, immédiatement avant l’épisode d’hypoxémie.

En réalité, le meilleur index de désaturation nocturne n’est sans doute pas le nombre d’épisodes de désaturation ni la saturation minimale observée, mais plutôt la SaO2 moyenne ou le pourcentage de temps d’enregistrement passé au-dessous d’un niveau donné de SaO2 (90 ou 85 % par exemple).

En cas d’hypoxémie diurne modeste ou absente, on a proposé de définir la désaturation nocturne par :

– le fait de passer plus de 5 minutes avec une SaO2 inférieure à 90 % et un pic de désaturation d’au moins 85 % ;

– le fait de passer plus de 30 % du temps d’enregistrement avec une SaO2 inférieure à 90 % ;

– une SaO2 nocturne moyenne inférieure à 90 %. La troisième définition est la plus simple et nous lui donnons volontiers la préférence ; elle est d’ailleurs assez proche de la deuxième, que nous avons utilisée pour certaines études.

La première définition, qui est celle de Fletcher et al, n’est pas suffisamment sévère à nos yeux.

Observe-t-on fréquemment une hypoxémie nocturne significative chez les patients BPCO peu hypoxémiques le jour (PaO2 > 60 mmHg) ?

Fletcher et al, en utilisant leurs critères, ont relevé une hypoxémie liée au sommeil chez 37/135 (27 %) malades BPCO dont la PaO2 diurne était supérieure à 60 mmHg.

Levi-Valensi et al, dont les critères de désaturation étaient plus sévères, ont observé que 18/40 (45 %) de malades BPCO avec PaO2 diurne comprise entre 60 et 70 mmHg, avaient une désaturation nocturne significative.

La désaturation nocturne est donc fréquente chez les malades BPCO peu hypoxémiques le jour, mais elle est généralement modérée : la SaO2 moyenne est de 88,6 ± 2 % chez les désaturateurs de Levi-Valensi et al, de 88 ± 2 % chez ceux de Vos et al et de 88 ± 2 % chez ceux de Chaouat et al.

La similitude des résultats de ces trois groupes est très frappante. Les études comportant la mesure continue de la PaCO2 au cours du sommeil sont rares.

La raison en est que la mesure transcutanée de la PCO2 est peu fiable, du moins chez l’adulte, et que le temps de réponse est long en comparaison de l’oxymétrie.

Certaines études initiales ont comporté des mesures répétées des gaz du sang à l’aide d’un petit cathéter radial. Mais il ne s’agissait pas d’une mesure continue de la PaCO2.

Les auteurs ont observé que la chute de la PaO2 s’accompagnait d’une élévation de la PaCO2, souvent de l’ordre de 10 mmHg. Les mesures transcutanées continues de la PCO2 nocturne ont montré que la PCO2 s’élevait moins en sommeil paradoxal que la PaO2 (estimée à partir de la SaO2) ne chutait.

En fait, les variations de la PaCO2 dépendent du mécanisme des perturbations gazométriques.

Mécanismes et causes de l’hypoxémie liée au sommeil :

L’accentuation de l’hypoxémie au cours du sommeil peut s’expliquer par la survenue ou l’aggravation d’hypoventilation alvéolaire et/ou d’inégalités ventilation-perfusion (VA/Q).

Les deux mécanismes peuvent d’ailleurs être associés. Les apnées obstructives ne sont pas en cause et Flenley et al ont très justement intitulé le titre d’une de leurs études : « l’hypoxémie nocturne des BPCO n’est pas un syndrome d’apnées du sommeil », ce qui n’empêche pas, comme l’avait également souligné Flenley, que les deux affections puissent être associées.

L’hypoventilation alvéolaire est le mécanisme prédominant, en tout cas lors du sommeil paradoxal. Elle est évoquée par une élévation de la PaCO2 (ou de la PCO2 transcutanée) et par une chute de la ventilation-minute.

La mesure précise de la ventilation, par pneumotachographie, est de réalisation difficile chez les malades BPCO et n’a pu être réalisée que dans un nombre limité d’études.

L’hypoventilation alvéolaire est présente chez le sujet sain, lors du sommeil paradoxal phasique (en opposition au sommeil paradoxal tonique) qui est caractérisé par une inhibition des muscles squelettiques (muscles intercostaux notamment), d’où une chute du volume courant avec respiration rapide et irrégulière.

Les conséquences sont importantes dans les BPCO sévères, dont le diaphragme est déjà proche en respiration calme et diurne de ses possibilités de contraction maximale.

L’hypoventilation alvéolaire s’explique également par une augmentation des résistances des voies aériennes supérieures pendant le sommeil et par une diminution de la chémosensibilité à l’hypoxie et à l’hypercapnie, laquelle a été documentée chez le sujet sain et chez le malade BPCO.

Les inégalités VA/Q représentent l’autre mécanisme de la désaturation nocturne.

Leur accentuation au cours du sommeil, chez les malades BPCO, s’explique par une diminution de l’épuration mucociliaire qui entraîne une accumulation de sécrétions bronchiques, et, surtout, par la chute de la capacité résiduelle fonctionnelle majorée pendant le sommeil paradoxal qui induit une fermeture des petites voies aériennes des bases et un effet shunt.

Les inégalités VA/Q sont suggérées par une évolution dissociée de la SaO2 et de la PaCO2, la première chutant alors que la seconde est stable ou diminue même.

Elles ont pu être documentées de façon plus précise par des études des échanges gazeux, lesquelles se heurtent, au cours du sommeil, à des difficultés majeures de réalisation pratique mais aussi d’interprétation théorique.

En résumé, l’hypoxémie du sommeil des malades BPCO est liée à une combinaison variable d’hypoventilation alvéolaire et d’inégalités VA/Q, l’hypoventilation alvéolaire représentant le mécanisme prépondérant lors du sommeil paradoxal.

Effets délétères de l’hypoxémie liée au sommeil :

A – RÉPERCUSSIONS SUR LE SOMMEIL :

Le sommeil des malades BPCO est classiquement de mauvaise qualité mais il n’est pas démontré qu’à âge égal les BPCO ont un sommeil moins bon que les sujets sains.

Les causes des perturbations du sommeil sont le plus souvent multifactorielles et incluent, en dehors de l’âge, la toux, les épisodes de dyspnée nocturne, les effets de certains médicaments (théophylline, bêtamimétiques).

L’hypoxémie n’est pas par elle-même une cause du sommeil perturbé et elle ne constitue pas un facteur de réveil, à la différence de ce qui est observé dans les apnées obstructives.

D’ailleurs, la correction de l’hypoxémie par oxygénothérapie n’améliore pas la qualité du sommeil.

B – RÉPERCUSSIONS CARDIOVASCULAIRES (EN DEHORS DE L’HYPERTENSION PULMONAIRE) :

La tachycardie est une conséquence classique de l’hypoxie aiguë. Il n’est donc pas étonnant de l’observer lors des épisodes d’hypoxémie nocturne. Elle est bien corrigée par l’administration d’oxygène.

Des troubles du rythme cardiaque plus sévères, à type d’extrasystoles supraventriculaires ont été décrits, en particulier chez des malades présentant des désaturations sévères (SaO2 < 80 %) mais leur fréquence réelle et leurs conséquences (risque accru de décès subit au cours du sommeil) n’ont pas été bien établies.

De façon similaire, Shepard et al, aux États-Unis, ont porté l’accent au début des années 1980 sur les répercussions des épisodes de désaturation du sommeil paradoxal sur la demande en O2 du myocarde et le débit sanguin coronaire qui seraient fortement augmentés tous deux, d’où un risque accru de mortalité nocturne chez les malades BPCO désaturateurs au cours du sommeil.

En fait, l’hypothèse de Shepard et al, reposant sur des déductions faites à partir de mesures non invasives, n’a pas reçu de confirmation.

Une étude européenne récente a indiqué que les malades BPCO ne décédaient pas plus souvent au cours du sommeil qu’au cours de la journée.

C – RÉPERCUSSIONS SUR LA CIRCULATION PULMONAIRE :

L’hypoxie alvéolaire aiguë, fréquente au cours du sommeil et notamment du sommeil paradoxal, peut entraîner une élévation des résistances vasculaires pulmonaires et de la pression artérielle pulmonaire (PAP) par la mise en jeu de la vasoconstriction pulmonaire hypoxique.

Les épisodes d’hypoxémie nocturne, surtout lorsqu’ils sont importants et prolongés, peuvent donc entraîner des à-coups hypertensifs pulmonaires.

Les études hémodynamiques pulmonaires au cours du sommeil ont effectivement montré que les épisodes d’hypoxémie s’accompagnent d’élévations parfois importantes de la PAP.

Dans l’étude princeps, celle de Coccagna et Lugaresi, qui ont étudié 12 malades BPCO, l’élévation de la PAP est souvent considérable, de l’ordre de 15 à 20 mmHg, mais les patients ont déjà une hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) franche (PAP moyenne = 37 mmHg) à l’état d’éveil.

Les études ultérieures ont confirmé les résultats de Coccagna et Lugaresi mais ont rapporté des élévations moins sévères de la PAP.

Chez la plupart des patients, il existe une corrélation négative très significative entre les valeurs de SaO2 et de PAP recueillies au cours du sommeil.

Les rares travaux sur l’hémodynamique pulmonaire nocturne ont généralement concerné des malades BPCO sévères avec hypoxémie diurne franche, présentant le plus souvent une HTAP permanente.

Nous ignorons si ces résultats peuvent être transposés à des patients BPCO moins évolués, avec hypoxémie diurne discrète et sans HTAP.

Block et al et Flenley ont émis, il y a 20 ans déjà, l’hypothèse que l’hypoxémie nocturne isolée pourrait entraîner à la longue une HTAP permanente (diurne).

Les résultats de Fletcher et al et de Levi-Valensi et al sont en faveur de cette hypothèse, puisque parmi les malades BPCO peu hypoxémiques le jour (PaO2 >= 60 mmHg), ceux qui sont désaturateurs nocturnes ont une PAP plus élevée que les autres, mais la différence entre les groupes est en fait minime, à la limite de la signification statistique.

Une étude plus récente portant sur des effectifs de malades plus importants a montré que la PAP était identique chez les désaturateurs et les non-désaturateurs.

Il n’est donc pas établi que l’hypoxémie nocturne isolée soit un facteur déterminant d’HTAP permanente.

Cette dernière suppose la présence d’une hypoxémie diurne significative.

D – POLYGLOBULIE :

L’hypoxémie nocturne isolée ne paraît pas en mesure d’entraîner une polyglobulie.

Les études mentionnées ont indiqué que le niveau de l’hémoglobine était identique chez les BPCO désaturateurs et non désaturateurs nocturnes.

Il a été montré récemment que la présence d’une hypoxémie diurne était nécessaire pour susciter une augmentation de la production d’érythropoïétine chez les BPCO.

E – ESPÉRANCE DE VIE :

La présence d’une hypoxémie liée au sommeil a-t-elle une signification pronostique péjorative ?

Les groupes d’Édimbourg et d’Oxford ont montré que chez des malades BPCO franchement hypoxémiques le jour, un excès d’hypoxémie nocturne par rapport à la SaO2 nocturne prédite d’après les paramètres diurnes n’entraînait pas une mortalité accrue.

Qu’en est-il des BPCO peu hypoxémiques le jour ?

Les désaturateurs nocturnes ont-ils une espérance de vie plus limitée que les non-désaturateurs ?

C’est ce que semble indiquer l’étude rétrospective de Fletcher et al mais elle comporte des insuffisances méthodologiques.

Par ailleurs, un travail prospectif très récent, mais portant sur un nombre plus limité de patients, n’a pas confirmé les données de Fletcher.

À l’heure actuelle, il n’est pas démontré que l’hypoxémie nocturne isolée augmente le risque de mortalité chez les patients BPCO peu (ou pas) hypoxémiques le jour.

Traitement de l’hypoxémie liée au sommeil des malades atteints de bronchopneumopathie chronique obstructive :

L’un des objectifs majeurs du traitement des BPCO évoluées avec insuffisance respiratoire est la correction de l’hypoxémie diurne et nocturne par oxygénothérapie de longue durée (OLD), supérieure ou égale à 16 h/j.

La justification d’une oxygénothérapie purement nocturne n’est en revanche pas bien établie.

A – TRAITEMENT MÉDICAMENTEUX :

Il n’y a pas de traitement spécifique de l’hypoxémie liée au sommeil des malades BPCO, mais les médicaments capables d’améliorer l’hypoxémie diurne ont également des effets positifs sur l’hypoxémie nocturne en raison de la position plus favorable de la PaO2 sur la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine.

Ainsi, le bismésilate d’almitrine (Vectariont), agoniste des chémorécepteurs, augmente de façon significative la PaO2 des malades BPCO en état stable (en tout cas chez les « répondeurs » qui représentent 80 % des cas).

Les effets de l’almitrine persistent au long cours.

L’almitrine a des effets favorables sur les épisodes de désaturation nocturne comme l’ont montré Connaughton et al qui ont bien souligné le fait que l’amélioration de la SaO2 nocturne, après 15 jours de traitement, était fortement liée à celle de la PaO2 diurne qui passait de 52 ± 2 à 60 ± 2 mmHg (p < 0,001).

B – OXYGÉNOTHÉRAPIE DE LONGUE DURÉE :

L’OLD est requise chez les malades BPCO avec hypoxémie franche (PaO2 diurne < 55-60 mmHg) et persistante.

Nous avons vu que ce sont ces malades qui développent l’hypoxémie nocturne la plus importante. L’OLD, qui doit être d’au moins 16 à18 h/j, doit inclure obligatoirement toute la période de sommeil.

Est-il nécessaire d’adapter le débit d’oxygène nocturne, compte tenu de la sévérité de certains épisodes de désaturation ?

Plusieurs études ont montré que les débits d’oxygène usuels, de 1,5 à 3 L/min, sont suffisants pour corriger la désaturation nocturne, même lorsqu’elle est très sévère, et qu’il n’est donc pas nécessaire d’adopter un débit spécifique pour l’oxygénothérapie nocturne.

Il est en revanche utile de vérifier, par oxymétrie nocturne, l’efficacité de l’oxygénothérapie : la SaO2 doit être supérieure ou égale à 90 % pendant toute la durée du sommeil.

Si ce n’est pas le cas, on augmente le débit par paliers de 0,5/min.

Sous oxygénothérapie, on peut craindre une élévation de la PaCO2 du fait de la suppression du stimulus hypoxique et ce risque est a priori accru lors du sommeil, en raison de la diminution de la réponse ventilatoire au CO2.

En fait, l’étude classique de Goldstein et al a montré que chez les BPCO, l’augmentation de la PCO2 transcutanée sous O2 (2 L/min) n’était pas plus importante au cours du sommeil qu’à l’état de veille, qu’elle était généralement modérée (<= à 6 mmHg) et qu’elle se stabilisait assez rapidement.

Il peut en aller différemment chez les malades avec syndrome d’apnées obstructives associé, d’où la nécessité de dépister l’association d’apnées obstructives à une BPCO.

Cette association est d’ailleurs relativement fréquente.

L’oxygénothérapie nocturne fait disparaître les à-coups hypertensifs pulmonaires liés à l’hypoxémie (parfois profonde) du sommeil paradoxal, mais ceux-ci réapparaissent dès l’arrêt de l’oxygénothérapie.

C – OXYGÉNOTHÉRAPIE LIÉE AU SOMMEIL :

Est-il nécessaire de traiter par oxygénothérapie nocturne les malades BPCO peu hypoxémiques le jour (PaO2 >= 60 mmHg) mais désaturateurs nocturnes ?

Il n’y a pas actuellement de consensus à ce sujet et les recommandations des sociétés scientifiques sont plutôt floues.

Nous avons vu que les effets délétères d’une hypoxémie liée au sommeil (diminution de l’espérance de vie, HTAP) n’ont pas été documentés de façon convaincante.

Concernant les effets d’une oxygénothérapie limitée au sommeil, on ne dispose que de deux études : celle de Fletcher et al publiée en 1992, a comparé 19 désaturateurs nocturnes et 19 nondésaturateurs, suivis pendant 3 ans.

En fait, 16 patients seulement ont terminé l’étude.

La PAP augmente chez les neuf contrôles, de 3,9 mmHg en moyenne, alors qu’elle chute de 3,7 mmHg chez les sept sujets traités (p < 0,02) ; mais curieusement, ces différences s’expliquent par une évolution divergente de la pression capillaire pulmonaire et non par une chute des résistances vasculaires pulmonaires chez les patients traités.

Pour ce qui est de l’espérance de vie, Fletcher et al n’ont pu conclure, compte tenu de l’effectif limité et de l’exclusion, pour différentes raisons, de 11 patients sur 38 en cours d’étude.

Une étude multicentrique européenne, déjà évoquée, a porté sur l’évolution de 76 BPCO désaturateurs nocturnes.

Quarante et un ont reçu une oxygénothérapie nocturne et 35 ont servi de contrôles.

L’espérance de vie est la même dans les deux groupes mais le nombre des patients inclus et des décès limitent la portée de l’analyse statistique.

Quarante six patients (24 dans le groupe traité et 22 dans le groupe contrôle) ont fait l’objet d’un cathétérisme cardiaque droit de contrôle après 2 ans : l’évolution de la PAP est identique dans les deux groupes.

Il n’y a donc pas actuellement d’arguments pour justifier la mise en route d’une oxygénothérapie purement nocturne chez des malades BPCO peu hypoxémiques le jour et désaturateurs nocturnes.

Ce traitement peut se discuter toutefois dans des cas particuliers (association de BPCO et de syndrome d’apnées obstructives du sommeil).

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