Histologie de la peau normale et lésions histopathologiques élémentaires (Suite)

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Première partie

2- Appareils sudoraux :

On distingue les glandes sudorales eccrines, présentes sur tout le revêtement cutané, et les glandes sudorales apocrines, que l’on trouve uniquement dans certains territoires et dont la sécrétion est sous contrôle hormonal.

* Glandes sudorales eccrines :

Leur densité est de 100 à 200 glandes/cm2 et est maximale sur les paumes et les plantes (300/cm2).

Leur partie sécrétrice, ou glomérule sudoripare, se trouve profondément située dans la partie haute de l’hypoderme ou à la jonction dermohypodermique comme le follicule pilaire.

Histologie de la peau normale et lésions histopathologiques élémentaires (Suite)Le glomérule sudoral est un acinus pelotonné : la partie sécrétrice proprement dite est une glande tubuleuse à extrémité borgne, constituée de deux types cellulaires.

Les cellules périphériques sont claires, riches en glycogène et implantées sur une membrane basale épaisse, doublée à l’extérieur de quelques cellules myoépithéliales.

On trouve ensuite des cellules sombres orientées vers la lumière de la glande et riches en mucopolysaccharides acides.

La sueur s’élimine par de petits canalicules intercellulaires vers la lumière.

Le tiers terminal du peloton sudoral fait partie du canal excréteur, connecté à la partie sécrétante par une petite dilatation, l’ampoule sudorale de Loewenthal.

La partie excrétrice est composée d’une double rangée de cellules sombres, bordées à leur partie interne par une cuticule PAS positive.

I1 n’y a pas de membrane basale en périphérie du conduit sudorifère.

La partie sécrétrice exprime les kératines 7, 8, 18 et 19, comme toutes les structures glandulaires, alors que le canal excréteur dermique exprime les kératines 1, 10, 11 et 19, profil intermédiaire entre celui de l’épiderme et le profil glandulaire.

La partie haute de ce conduit traverse le derme verticalement.

Sa structure histologique reste identique jusqu’à l’épiderme.

Lors de sa traversée épidermique, le canal prend le nom d’acrosyringium et forme alors une hélice dont les spires augmentent progressivement de diamètre.

Ceci est bien visible dans l’épaisse couche cornée des zones palmoplantaires.

Ce tube se termine dans les dernières lamelles cornées.

Il garde son individualité au sein de l’épiderme, ainsi qu’en témoigne l’expression des CK 1, 10, 11 et 9.

Le conduit se termine par le pore sudoral, habituellement situé à l’aplomb d’une crête épidermique.

Enfin, tout autour des glomérules sudoraux, on trouve des filets nerveux amyéliniques qui assurent la régulation de la sécrétion.

Les colorations à l’orcéine permettent aussi de distinguer des fibres élastiques en périphérie des glomérules et de la partie initiale du canal excréteur.

* Glandes apocrines :

Elles sont situées dans les zones périnéales et génitales, dans les creux axillaires, sur les aréoles mammaires et autour de l’ombilic.

On en trouve parfois sur la face ou le tronc, mais de façon isolée.

Les glandes cérumineuses et les glandes de Moll sont des formes particulières de glandes apocrines.

Elles ont une partie sécrétrice profonde, le glomérule, constitué de grandes cavités à lumière très bien visible (beaucoup plus importante que celle des glomérules eccrines) et bordées par une seule couche de grandes cellules cylindriques.

Leur sécrétion se fait par décapitation de la partie centrale du cytoplasme, ce qui définit la sécrétion apocrine ; le produit ainsi libéré est visible en coloration standard sous forme d’un matériel éosinophile.

On y observe aussi parfois du pigment ferrique.

La sueur est éliminée par un conduit sudorifère à double couche cellulaire qui va s’aboucher à la partie infundibulaire d’un follicule pilaire axillaire ou génital.

La partie sécrétrice de la glande exprime les kératines de bas poids moléculaire 7, 8, 18 et 19 et la kératine 5.

On y trouve aussi les kératines 4, 13 et 17.

3- Ongles :

La tablette unguéale est composée de cellules kératinisées originaires de la matrice unguéale.

Celle-ci est en fait un repli épidermique de la peau qui déborde sur la partie proximale de la tablette où elle forme la cuticule.

La matrice a une structure histologique en partie identique à celle de l’épiderme : on y trouve une couche basale, puis l’équivalent du stratum spinosum.

Plus en superficie, il n’y a pas de couche granuleuse, mais de grandes cellules polygonales.

Les mélanocytes y sont moins nombreux que dans l’épiderme et sont situés dans la couche basale, mais aussi au sein du stratum spinosum.

La région matricielle est entourée d’une gaine conjonctive dense qui adhère au périoste des bords de la phalange.

Le lit de l’ongle est aussi dépourvu de couche granuleuse.

On trouve, dans le derme sous-jacent, des papilles dermiques très accentuées et une vascularisation très abondante, avec de nombreux shunts anastomotiques.

Il n’y a quasiment pas d’hypoderme et le derme du lit de l’ongle est rattaché au périoste sous-jacent par des travées conjonctives.

L’épiderme du lit adhère beaucoup plus à la tablette unguéale que celui de la matrice.

Quand on examine la tablette en coupe perpendiculaire, on y distingue trois zones :

– la table externe (ou couche dorsale), faite de cellules polyédriques très aplaties issues du fond de la matrice (partie proximale).

La kératinisation se fait sans formation de grains de kératohyaline.

Cette partie est colorée par le bleu de toluidine et le PAS ;

– la table interne, qui est la couche intermédiaire, constituée de cellules cornées moins denses et plus volumineuses.

Elle naît de la partie distale de la matrice et n’est pas colorée par le PAS et le bleu de toluidine ;

– la kératine hyponychiale, qui est la partie ventrale.

La corne en est de type épidermique et elle naît de l’épithélium du lit unguéal.

Elle est aussi colorée par le bleu de toluidine et le PAS.

La matrice proximale fournit le tiers supérieur ou dorsal de la tablette, alors que les deux tiers inférieurs de celle-ci naissent de la partie distale de la matrice.

Le repli sus-unguéal ne se distingue de la peau normale que par l’absence de poils et de papilles dermiques.

Sa partie postéroinférieure correspond à la matrice (partie proximale).

C – DERME :

Le derme est un tissu conjonctif fait de collagène et de fibres élastiques entourés d’une substance fondamentale dite « amorphe ».

1- Collagène :

Les fibres de collagène représentent près de 98 % de la masse totale du derme.

Elles apparaissent comme de gros faisceaux éosinophiles en coloration HE, mais jaune orangé en HES.

Elles sont nettement biréfringentes en lumière polarisée.

Ces faisceaux sont entrecroisés dans les plans horizontaux à tous les étages du derme. Leur diamètre est variable, de 2 à 15 µm. Dans la partie superficielle du derme ou derme papillaire, les fibres de collagène sont fines.

Cette partie du derme comprend les espaces situés entre les crêtes épidermiques, mais aussi la portion horizontale sous-jacente qui va jusqu’aux plexus vasculaires souspapillaires.

Ce type de fines fibres de collagène est aussi observé autour des annexes pilaires et sudorales.

On parle de derme « adventiciel ».

Dans le derme réticulaire, les fibres de collagène sont groupées en faisceaux épais, qui apparaissent plus ou moins compacts selon les techniques de fixation.

L’épaisseur de cette partie du derme est très variable selon la localisation anatomique (très importante dans le dos, et très faible sur les paupières par exemple).

Le collagène semble un peu ondulé, et on y trouve quelques fibrocytes très allongés et aux limites cytoplasmiques mal définies en microscopie optique.

Les fibres de réticuline ne sont pas visibles en coloration de routine, mais peuvent être visualisées par argentation. Il s’agit d’une variété particulière de collagène, fait de fibres très fines (de 0,2 à 1 µm de diamètre).

Leur argyrophilie les distingue des autres fibres de collagène ; elles sont composées de collagène de type III, alors que le reste du derme contient principalement du collagène de type I.

Ces fibres de réticuline ne sont présentes qu’en faible quantité dans la peau normale, mais sont très nombreuses dans certains processus pathologiques comme les granulomes.

Elles constituent principalement l’armature des membranes basales.

2- Fibres élastiques :

Elles ne sont pratiquement pas visibles en coloration de routine, mais apparaissent en noir après coloration à l’orcéine.

Elles s’intercalent entre les fibres de collagène, mais sont beaucoup plus fines.

On en distingue plusieurs types : les plus épaisses sont les fibres d’élastine situées dans la partie profonde du derme, où elles ont une disposition parallèle à la surface cutanée comme les fibres de collagène.

Plus on monte vers l’épiderme, plus les fibres élastiques deviennent fines.

Elles forment un plexus de fibres de taille intermédiaire, les fibres d’élaunine, sous la jonction dermoépidermique.

De ce plexus naissent de très petites fibres verticales arborisées, qui vont occuper les papilles dermiques : ce sont les fibres oxytalanes.

3- Substance fondamentale amorphe :

Elle est constituée de mucopolysaccharides (MPS) acides, en particulier d’acide hyaluronique (MPS non sulfatés).

Les MPS sulfatés sont principalement représentés par la chondroïtine sulfate.

Ces glycosaminoglycanes du derme sont liés de façon covalente à des protéines et forment ainsi des protéoglycanes.

En coloration de routine, cette substance n’est pas colorée et apparaît comme un vide entre les faisceaux de collagène.

En quadrichromie (HESA) ou avec des colorations des mucines comme le bleu Alcian, on peut visualiser cette substance fondamentale colorée en bleu.

Pour faire la distinction entre les MPS, on peut utiliser le bleu de toluidine ; il existe une métachromasie pour l’acide hyaluronique à pH 3, mais pas à pH 0,5, et à pH 0,5 et 3 pour la chondroïtine sulfate.

La substance fondamentale est plus abondante dans le derme papillaire et dans la papille pilaire ; elle est aussi plus abondante dans les processus de cicatrisation.

4- Cellules dermiques :

On y trouve surtout des fibroblastes.

Ce sont eux qui donnent naissance aux fibres de collagène et d’élastine, ainsi qu’à la substance fondamentale.

Ils sont plus volumineux dans le derme papillaire, souvent polyédriques ou triangulaires avec un noyau dense ; dans le derme réticulaire ils sont plus allongés, mêlés aux faisceaux de collagène, et on voit surtout leur noyau allongé.

Le cytoplasme est très riche en organites, témoignant de leur activité de synthèse importante.

On appelle fibrocyte un fibroblaste ancien situé au sein du tissu conjonctif mature.

Son activité est réduite et il a une forme moins ramifiée que le fibroblaste.

Il est bien séparé de l’interstitium du collagène.

Le fibroclaste est un fibrocyte qui contient des fibres ou des fibrilles de collagène dans une vacuole cytoplasmique ; on ne peut le reconnaître qu’en microscopie électronique.

Il existe aussi des cellules intermédiaires entre les fibrocytes et les cellules musculaires lisses qui sont des myofibroblastes, riches en myofilaments disposés en faisceaux parallèles à l’axe de la cellule. Ils ont un noyau indenté et des desmosomes.

Ces cellules sont trouvées en plus grand nombre dans les cicatrices et certaines proliférations fibreuses.

Le fibroblaste de la papille du poil est particulier par ses larges expansions cytoplasmiques qui peuvent toucher les cellules matricielles.

Il possède de nombreux organites cytoplasmiques, ainsi que des structures d’ancrage ressemblant à des jonctions gap et à des desmosomes.

Son rôle dans l’induction de la trichogenèse est fondamental.

On trouve enfin des macrophages dans le derme.

Il s’agit de cellules volumineuses à cytoplasme abondant et pourvues d’un grand noyau central.

Les macrophages peuvent être identifiés en immunohistochimie par certains marqueurs comme le MAC 387 ou l’anticorps anti-CD68.

Certaines de ces cellules à activité macrophagique sont dendritiques : il s’agit des cellules de Langerhans dermiques.

Enfin, il existe une population de cellules dendritiques exprimant le facteur XIIIa qui sont les dendrocytes dermiques.

Ces cellules sont d’origine médullaire et peuvent avoir une fonction de présentation d’antigènes.

On les trouve surtout dans le derme papillaire, mais aussi plus en profondeur dans le derme réticulaire et autour des vaisseaux.

Les mastocytes font partie des cellules normales du derme.

Ils sont principalement situés autour des capillaires du derme papillaire.

Ce sont de grandes cellules polyédriques remplies de granulations bien visibles au bleu de toluidine (métachromasie) ou à la coloration de Giemsa, qui leur donne une teinte fuchsia.

5- Vaisseaux du derme :

* Artères :

Elles sont formées de trois couches :

– l’intima, composée de cellules endothéliales et d’une limitante élastique interne ondulée facilement reconnaissable en coloration à l’orcéine ;

– la média, faite d’une ou plusieurs couches musculaires ;

– l’adventice, qui en constitue la partie la plus externe, faite de tissu conjonctif.

Plus on monte dans le derme, moins la couche musculaire est épaisse : dans le derme superficiel, les artérioles n’ont qu’une couche discontinue de cellules musculaires lisses.

* Capillaires :

On les trouve dans tout le derme, mais ils sont particulièrement bien visibles dans les papilles dermiques.

Ils ont une membrane basale visible en coloration au PAS, une couche de cellules endothéliales, et en périphérie, une couche de péricytes.

* Veines :

Les parois veineuses sont en général plus minces que celles des artères qui les accompagnent, mais elles ont une lumière plus aplatie et sont souvent coupées longitudinalement.

La distinction entre artère et veine n’est pas toujours facile à faire : la lumière de l’artère est plus ronde et c’est la limitante élastique interne ondulée qui permet en général de la reconnaître.

Les veinules postcapillaires ressemblent à des capillaires.

Quand elles deviennent plus volumineuses, leur paroi devient musculaire.

Les grosses veines sont pourvues de valves.

* Vaisseaux lymphatiques :

Ils débutent par des sinus borgnes dans le derme papillaire.

On ne les distingue que difficilement en situation normale, mais ils sont bien visibles quand ils sont dilatés : ce sont des cavités optiquement vides, limitées par une simple couche de cellules endothéliales, et ils n’ont ni membrane basale, ni péricytes à leur périphérie.

Les lymphatiques du derme profond sont plus volumineux et leur paroi est faite de tissu conjonctif et de quelques cellules musculaires lisses.

Les cellules endothéliales peuvent être mises en évidence par certains immunomarquages : elles expriment le facteur VIII, ainsi que la lectine Ulex europaeus.

On utilise plus couramment le CD34, bon marqueur, mais qui n’est pas spécifique des cellules endothéliales, et de plus en plus le CD31 qui a une meilleure spécificité.

6- Nerfs cutanés :

On ne les voit habituellement pas sur les colorations de routine jusqu’à leurs terminaisons motrices et sensitives.

On reconnaît toutefois facilement les gros troncs nerveux.

Pour mettre en évidence l’innervation cutanée, il faut user de techniques d’imprégnation argentique.

Les cellules nerveuses apparaissent bien en immunomarquage, avec des anticorps antiprotéine S100 par exemple.

La présence de neurofilaments démontre qu’il s’agit bien de filets nerveux.

L’innervation centrifuge de la peau assure la vasomotricité, le contrôle des sécrétions sudorales et la piloarrection.

L’innervation centripète est sensitive. Les nerfs sensitifs ont des terminaisons libres isolées ou au contact des cellules de Merkel ; elles peuvent aussi être annexées aux poils ou aux corpuscules tactiles de Wagner-Meissner ou de Vater-Pacini.

– Les corpuscules de Wagner-Meissner occupent la hauteur d’une papille.

Ils sont ovalaires, constitués de l’empilement horizontal de cellules de Schwann entre lesquelles un axone passe en spirale.

– Les corpuscules de Vater-Pacini siègent dans l’hypoderme des régions palmoplantaires et génitales.

Ils sont facilement reconnaissables grâce à leur structure en lamelles concentriques en « bulbe d’oignon ».

– Les corpuscules génitaux ou organes terminaux cutanéomuqueux sont observés dans les zones de transition cutanéomuqueuses (lèvres, gland, petites lèvres, clitoris, région périanale).

On les trouve dans le derme papillaire.

Contrairement aux corpuscules de Meissner, on les voit mal en coloration de routine.

Avec une imprégnation argentique, on observe quelques fibres nerveuses qui forment des boucles enchevêtrées.

– Les nerfs cutanés sont constitués d’un axone entouré de cellules de Schwann, avec ou sans gaine de myéline.

On a longtemps douté de l’existence de terminaisons nerveuses dans l’épiderme.

Elles existent bien, ainsi qu’en témoignent les marquages avec des anticorps monoclonaux.

Les nerfs intraépidermiques sont particulièrement nombreux dans la peau foetale.

Les nerfs sont visibles dans le derme au voisinage des artères et des veines, sous forme de petits amas de cellules ondulées colorées en jaune en HES, ce qui les distingue des fibres de collagène.

D – HYPODERME :

On y distingue trois composants : le tissu graisseux formé d’adipocytes groupés en lobules, les septums interlobulaires qui sont des tractus conjonctifs qui séparent les lobules graisseux, et enfin, les vaisseaux et les nerfs.

Les auteurs français tendent à associer l’hypoderme ou tissu graisseux à la peau, qui est de ce fait un tissu à trois couches.

1- Lobules graisseux :

Ils sont composés par les adipocytes.

Ce sont de volumineuses cellules dont le cytoplasme est optiquement vide, puisque leur contenu lipidique a disparu.

On voit bien leur contour cellulaire : ce sont des cellules arrondies, possédant un noyau vacuolaire allongé refoulé contre la membrane.

Entre les adipocytes, on trouve de petits capillaires.

Les adipocytes sont groupés en lobules primaires dont la vascularisation artérielle est de type terminal.

Ces lobules primaires sont à leur tour organisés en superstructures qui sont les lobules secondaires, visibles à l’oeil nu, et d’une taille d’environ 1 cm.

Ces lobules sont séparés les uns des autres par les septums.

La distribution architecturale de ces éléments est différente chez l’homme et chez la femme : les lobules graisseux sont plus allongés dans le sexe féminin, séparés par des septums très verticaux, alors que la graisse masculine est organisée en lobules plus arrondis, avec des septums plus irréguliers.

2- Septums interlobulaires :

Ils sont constitués de lames plus ou moins larges faites de tissu conjonctif avec quelques fibrocytes.

On y trouve des artères, des veines et des nerfs dont la structure a été développée plus haut.

Ils servent en fait de lieu de passage aux vaisseaux qui vont assurer la vascularisation de la peau.

Lésions élémentaires histologiques :

La terminologie histopathologique est indispensable à connaître pour une confrontation anatomoclinique efficace.

Les principaux signes sont illustrés par des exemples photographiques démonstratifs.

A – LÉSIONS ÉPIDERMIQUES :

1- Modifications de l’épaisseur de l’épiderme :

– L’acanthose se définit par une augmentation de l’épaisseur globale de l’épiderme, qu’il s’agisse d’une hypertrophie (augmentation de la taille des cellules) ou d’une hyperplasie (augmentation du nombre des cellules), ce qui est le cas le plus fréquent.

L’acanthose peut être diffuse ou concerner sélectivement les crêtes épidermiques.

Dans ce cas, l’acanthose est dite psoriasiforme, surtout quand cette augmentation d’épaisseur des crêtes est régulière, et s’accompagne d’un amincissement relatif des zones suprapapillaires.

En cas d’augmentation sélective d’épaisseur de la couche granuleuse, on parle d’hypergranulose ; le lichen plan en constitue un exemple caractéristique.

– L’atrophie épidermique correspond à une diminution du nombre des couches cellulaires.

Dans les cas extrêmes, il ne persiste que deux ou trois couches cellulaires et l’assise basale disparaît, comme les cellules granuleuses.

Le dessin papillaire diminue, donnant un aspect rectiligne à la jonction dermoépidermique de l’épiderme atrophique.

Ces modifications peuvent s’accompagner d’un épaississement de la couche cornée ou hyperkératose.

Quand l’atrophie épidermique et papillaire s’associe à une vacuolisation de la membrane basale et à une disparition des cellules germinatives, on parle d’atrophie poïkilodermique.

– L’hyperkératose est un épaississement de la couche cornée.

Elle peut être seulement relative quand il existe une diminution de l’épaisseur des stratum spinosum et granulosum sous-jacents.

L’hyperkératose a un aspect parfois très compact, comme sur les paumes et les plantes (durillon), ou elle peut être très aérée en réseau (verrues planes).

L’hyperkératose peut prendre des proportions considérables dans les cornes cutanées.

Si les kératinocytes gardent leur aspect habituel dépourvu de noyau, il s’agit d’une hyperkératose orthokératosique.

La parakératose se définit comme une persistance des noyaux au sein des cornéocytes.

Elle s’accompagne d’une disparition de la couche granuleuse et d’un épaississement de la couche cornée.

Elle s’observe principalement dans les maladies où le renouvellement épidermique est accéléré.

Lorsque la parakératose s’associe à une exsudation plasmatique qui apparaît comme un matériel éosinophile souvent accompagné de cellules sanguines, on parle de squame-croûte parakératosique.

2- Autres modifications épidermiques :

– La dyskératose est une maturation cornée précoce de cellules épidermiques isolées.

Elle se traduit par une homogénéisation du cytoplasme qui devient fortement éosinophile, et par la disparition du noyau au sein d’une cellule très ronde : les corps ronds de la maladie de Darier en sont un bon exemple.

Quand ces cellules sont groupées, elles forment des globes cornés.

– L’acantholyse se caractérise par une perte de la connexion intercellulaire des kératinocytes.

Les cellules apparaissent isolées les unes des autres, et ceci conduit à la formation de bulles intraépidermiques, comme dans le pemphigus.

Cette acantholyse peut s’observer à tous les étages de l’épiderme.

– La spongiose se traduit par un écartement des kératinocytes les uns des autres en raison d’un oedème intercellulaire.

Les espaces intercellulaires sont clairs et élargis, ce qui donne des images en « mailles ».

La spongiose peut aboutir à une désunion des kératinocytes et à la création d’espaces clairs intraépidermiques : les vésicules.

On parle de pustule spongiforme quand il existe une accumulation de polynucléaires neutrophiles au sein de vésicules intraépidermiques, ainsi qu’entre les kératinocytes voisins euxmêmes disjoints par la spongiose.

Cette lésion caractérise le psoriasis pustuleux.

On l’oppose à la pustule uniloculaire, caractérisée par un espace clair intraépidermique bien limité, rempli de polynucléaires neutrophiles.

C’est ce que l’on observe dans l’acrovésiculopustulose.

La spongiose à éosinophiles est caractérisée par l’exocytose de polynucléaires éosinophiles qui accompagne la spongiose.

– L’oedème intracellulaire ou la ballonnisation sont définis par une augmentation de taille des kératinocytes et par une pâleur du cytoplasme. Un oedème majeur peut entraîner une rupture de la membrane cytoplasmique (infection herpétique).

On peut aussi voir de grandes cellules pâles lors d’une surcharge en glycogène (acanthome à cellules claires).

– La vacuolisation de la couche basale se caractérise par l’apparition de petits espaces de clivage immédiatement sous et au-dessus de la membrane basale.

Les cellules du stratum basal peuvent en être affectées et montrer des signes de souffrance cellulaire, voire de nécrose.

Ceci entraîne aussi une incontinence pigmentaire, c’est-àdire une fuite du pigment vers le derme superficiel.

– La nécrose kératinocytaire se traduit par des altérations morphologiques du noyau : il devient hyperchromatique ou fragmenté, ou peut persister sous forme d’une silhouette nucléaire.

Le cytoplasme est éosinophile et homogène. Dans la nécrose par coagulation, les contours cellulaires restent visibles, alors que dans la nécrose caséeuse, les cellules sont remplacées par un matériel éosinophile granulaire.

B – ALTÉRATIONS DERMOÉPIDERMIQUES :

1- Anomalies du dessin papillaire :

La papillomatose se traduit par une exagération du dessin des papilles et des crêtes interpapillaires.

Elle s’accompagne donc fréquemment d’une acanthose.

Quand la surface épidermique reste lisse, il s’agit d’une papillomatose adélomorphe.

Mais très souvent, la surface devient irrégulière, avec une alternance de crêtes et de dépressions : c’est la papillomatose la plus courante, appelée papillomatose délomorphe.

2- Inflammation dermoépidermique :

La jonction dermoépidermique est le siège de très nombreux processus pathologiques, et constitue une zone-clé pour la physiopathologie de nombreuses dermatoses.

On peut diviser les aspects de la pathologie inflammatoire de la jonction dermoépidermique en différents modèles ou patrons qui correspondent à des maladies distinctes ou à des groupes de maladies.

La définition de ces patterns a été introduite par Pinkus, puis reprise par Ackerman, qui propose un algorithme fondé sur l’analyse des patterns inflammatoires. Nous en distinguons six principaux.

– Modèle psoriasiforme.

Les modifications épidermiques sont caractérisées par une acanthose prédominant sur les crêtes épidermiques, avec un amincissement relatif des zones suprapapillaires.

L’inflammation est nette dans les papilles et se complète d’une exocytose prédominant dans les zones suprapapillaires.

Le psoriasis bien sûr, mais aussi la dermite séborrhéique et l’eczéma nummulaire chronique peuvent réaliser ce modèle.

– Modèle eczématiforme ou spongiotigue.

L’acanthose épidermique est diffuse et il n’y a pas d’amincissement des zones suprapapillaires.

L’inflammation concerne l’ensemble du derme superficiel, et est responsable d’une exocytose prédominant dans les crêtes épidermiques.

L’eczéma, les érythrodermies de toutes natures et les lymphocytes T-épidermotropes peuvent réaliser de telles images.

– Modèle lichénien.

Le dessin papillaire est inversé et prend un aspect arciforme plus ou moins accentué.

L’inflammation est dense et borde l’épiderme comme une bande bien limitée.

Les cellules empiètent sur la jonction dermoépidermique et sont responsables de nécroses kératinocytaires.

L’exocytose est limitée aux couches inférieures de l’épiderme.

Le modèle de cette inflammation est réalisé par le lichen, mais on l’observe aussi dans les toxidermies ou les réactions de rejet lichénoïdes (réaction du greffon contre l’hôte).

– Modèle poïkilodermique.

L’épiderme est atrophique et a partiellement ou totalement perdu son relief papillaire.

L’inflammation est plus ou moins importante et s’accompagne d’une vacuolisation de la membrane basale.

L’infiltrat dermique superficiel est continu mais moins dense que dans le modèle lichénien.

On l’observe dans le lupus érythémateux et la dermatomyosite, dans le parapsoriasis en grandes plaques, et dans les radiodermites.

– Modèle bulleux.

Il se caractérise par un décollement jonctionnel, accompagné d’un infiltrat inflammatoire sous le plancher de la bulle et latéralement, à la limite de la zone clivée, par une exocytose plus ou moins importante.

C’est dans ces zones latérales que l’on peut observer le début du décollement.

Cette image est réalisée par la pemphigoïde et toutes les dermatoses bulleuses jonctionnelles autoimmunes, mais aussi par l’érythème polymorphe.

– Inflammation purement papillaire.

Ce modèle d’inflammation n’est pas décrit dans les traités d’histopathologie cutanée.

Il est pourtant assez caractéristique : les papilles dermiques y sont élargies, avec pour conséquence un amincissement des crêtes épidermiques.

L’inflammation prédomine nettement dans les papilles, ou y est même strictement confinée dans certains cas, et est associée à un oedème marqué, prédominant à la partie haute de la papille.

L’exocytose prédomine dans les zones suprapapillaires qui ne sont pas amincies, contrairement à ce que l’on observe dans le modèle psoriasiforme.

Ceci est rencontré particulièrement dans le pityriasis rosé de Gibert, mais aussi dans les dermatoses virales comme le syndrome de Gianotti et Crosti.

Certaines histocytoses langerhansiennes, ainsi que des mycosis fongoïdes débutants, peuvent réaliser de tels aspects.

Il n’y a bien entendu jamais de spécificité absolue pour ces modèles, mais leur reconnaissance permet d’éclairer le diagnostic en définissant des cadres.

C – ANOMALIES DERMIQUES ET LYPODERMIQUES :

1- Lésions dermiques :

– L’atrophie dermique est caractérisée par une diminution de son épaisseur globale, une raréfaction du collagène et une hypotrophie des annexes.

Le muscle piloarrecteur est la structure qui reste le plus longtemps conservée.

– La sclérose se définit au contraire par un épaississement du collagène, qui devient très horizontal.

Dans une première phase d’hyperplasie, on voit augmenter la substance fondamentale et une apposition de néocollagène à la jonction dermohypodermique.

Au stade de scléroatrophie, les fibres de collagène deviennent hyalines et se rétractent en comprimant les vaisseaux et les annexes.

– On parle de fibrose pour désigner une augmentation des fibres de collagène et des fibroblastes dermiques.

Le terme de nécrobiose est impropre, et il vaut mieux parler de dégénérescence du collagène.

Elle se caractérise par une altération de la forme des fibres et de leur affinité tinctoriale.

Le collagène devient éosinophile et amorphe et perd son caractère fasciculé.

On parle aussi parfois de hyalinisation du collagène.

– L’élastose sénile est une modification physiologique du collagène qui apparaît sous l’influence de l’exposition aux ultraviolets (UV) : le collagène du derme superficiel forme des amas amorphes éosinophiles dans le derme superficiel, fortement colorables à l’orcéine (ce qui explique le nom d’élastose, puisque ce tissu prend alors les colorations du tissu élastique).

Ces modifications sont observées surtout en zone découverte.

– Il existe de multiples autres altérations du tissu élastique :

– l’élastolyse correspond à une disparition totale des fibres élastiques ;

– l’élastorrhexie se caractérise par une fragmentation des fibres élastiques ;

– l’hyperélastose se caractérise par une augmentation de la taille et de la densité des fibres élastiques.

– Le derme peut être le siège de surcharges métaboliques ou de substances étrangères.

La mucinose et l’amylose résultent de processus dégénératifs du tissu conjonctif dermique.

La calcinose résulte de dépôts d’hydroxyapatite, soit en raison de troubles métaboliques, soit simplement par calcification secondaire sur une lésion cutanée inflammatoire, cicatricielle ou tumorale.

L’identification de ces diverses substances nécessite le plus souvent des colorations spéciales.

– Les infiltrats inflammatoires du derme peuvent être utilement séparés en différents groupes selon leur topographie et leur disposition propre.

On parle d’infiltrat périvasculaire quand les cellules inflammatoires prédominent nettement autour des vaisseaux, et d’infiltrat interstitiel quand elles sont réparties entre les fibres de collagène.

On distingue ensuite les infiltrats superficiels des infiltrats profonds, selon leur localisation dermique.

On oppose enfin les infiltrats diffus aux infiltrats nodulaires, qui sont circonscrits en amas relativement bien limités.

2- Lésions hypodermiques :

– La nécrose de la graisse ou cytostéatonécrose se traduit par la présence d’adipocytes éclatés qui aboutissent à des flaques de graisse fondue légèrement basophile.

Les membranes des adipocytes flottent, donnant une image d’adipocytes fantômes caractéristique.

Ces lésions s’accompagnent de calcifications précoces.

– La résorption graisseuse ou lipophagie se fait par des macrophages et des cellules géantes qui se chargent en gouttelettes lipidiques, ce qui donne un aspect spumeux à leur cytoplasme.

– L’atrophie graisseuse se traduit par une réduction d’épaisseur de l’hypoderme.

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