Complications de la lithiase biliaire

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En Europe, on estime que 10 % des adultes sont porteurs de calculs biliaires ; la répartition est de 3 femmes pour 1 homme. Les calculs sont faits le plus souvent de cholestérol, parfois de bilirubinate de calcium ; ils sont rarement pigmentaires et surviennent alors à l’occasion d’une anémie hémolytique. Trois quarts des lithiases biliaires sont asymptomatiques et ne nécessitent pas de traitement médical ou chirurgical. La lithiase devient symptomatique essentiellement sous la forme de douleurs (coliques hépatiques ou douleurs atypiques) quand les calculs se mobilisent en migrant dans le canal cystique ou la voie biliaire principale. Il faut alors traiter les malades ; le plus souvent une cholécystectomie est nécessaire car des complications peuvent survenir avec une très grande fréquence. Les douleurs peuvent d’ailleurs être le signe d’une complication révélatrice de la maladie. Les complications s’observent au niveau de la vésicule elle-même (cholécystites chronique et aiguë, calculo-cancer) ou au niveau de la voie biliaire principale. Elles sont souvent graves (péritonite, angiocholite, pancréatite, cirrhose biliaire secondaire) et parfois mortelles. Leur traitement se fait le plus souvent en urgence dans le cadre d’une collaboration pluridisciplinaire qui utilise des moyens chirurgicaux ou non.

PHYSIOPATHOLOGIE :

Complications de la lithiase vésiculaire

Complications infectieuses

Complications de la lithiase biliaire– La cholécystite aiguë est définie par l’inflammation de la vésicule biliaire et de son contenu. Accidents aigus de la voie biliaire accessoire, les cholécystites aiguës surviennent dans 80 à 95 % des cas sur une vésicule exclue, par le blocage d’un calcul empêchant la vidange vésiculaire.

– Le blocage d’un calcul au niveau du canal cystique ou dans le jabot vésiculaire entraîne une réaction inflammatoire locale intense et une sécrétion active de la paroi, qui augmente la pression intravésiculaire.

– La vésicule se met en tension, remplie de mucus (bile blanche) : c’est l’hydrocholécyste.

– Le contenu vésiculaire devient purulent.

– Il existe des ulcérations muqueuses et des micro-abcès pariétaux.

– On parle de cholécystite suppurée ou de pyocholécyste, à un stade ultérieur.

– La thrombose des vaisseaux pariétaux définit la cholécystite gangréneuse, dont le risque évolutif est la perforation, qu’elle soit dans le péritoine libre ou dans un organe de voisinage.

Fistules bilio-biliaires et bilio-digestives

Les fistules bilio-biliaires viennent d’une communication entre la vésicule biliaire et la voie biliaire principale.

– Une ulcération progressive du jabot vésiculaire et de la voie biliaire principale se produit, souvent par un volumineux calcul enclavé dans l’infundibulum.

– Le calcul crée initialement une compression de la voie biliaire principale, puis une communication entre vésicule biliaire et voie biliaire principale avec accouchement du calcul dans la voie biliaire principale.

Fistules cholécystoduodénales

Les fistules cholécystoduodénales surviennent lors d’une communication entre la vésicule biliaire et le duodénum.

C’est une évolution souvent torve.

Un gros calcul vésiculaire crée un accolement inflammatoire de la vésicule et du duodénum, puis une ulcération pariétale évoluant à bas bruit avec accouchement du calcul dans le duodénum.

Fistules cholécystocoliques

La communication entre la vésicule et l’angle colique droit forme une fistule cholécystocolique.

Lithiase de la voie biliaire principale :

– La lithiase de la voie biliaire principale est, dans la majorité des cas, secondaire à la migration d’un calcul vésiculaire par le canal cystique.

Elle est exceptionnellement développée au niveau de la voie biliaire principale ou au niveau de la voie biliaire intrahépatique et, dans ce cas, en général sur une anomalie anatomique ou une sténose cicatricielle.

– Cette lithiase de la voie biliaire principale complique la maladie chez 10 % des patients porteurs de lithiases vésiculaires et elle expose le sujet à des complications qui peuvent être très graves, mettant en jeu le pronostic vital (l’angiocholite aiguë et la pancréatite aiguë). La gravité de ces complications explique la nécessité de traiter toute lithiase de la voie biliaire principale, même asymptomatique.

Angiocholite aiguë

L’angiocholite est secondaire au blocage d’un calcul dans la voie biliaire principale.

Il existe une rétention biliaire secondairement surinfectée par la stase et une hyperpression dans les canaux biliaires qui favorisent le passage de la bile infectée dans le sang (mécanisme intrahépatique) : c’est la genèse d’une bactériémie à point de départ biliaire.

Pancréatite aiguë biliaire

La pancréatite aiguë biliaire complique un accident de migration d’un calcul vésiculaire.

– C’est le passage d’un calcul, souvent de petite taille, par le canal cystique dans la voie biliaire principale.

– C’est au moment de l’expulsion du calcul dans le duodénum, à travers l’ampoule de Vater, que se déclenche la pancréatite aiguë qui évoluera par la suite pour son propre compte.

Complications de la lithiase vésiculaire :

COMPLICATIONS INFECTIEUSES :

La cholécystite aiguë est définie par l’inflammation de la vésicule biliaire et de son contenu.

Accident aigu de la voie biliaire accessoire, les cholécystites aiguës surviennent dans 80 à 95 % des cas sur une vésicule exclue, par le blocage d’un calcul empêchant la vidange vésiculaire.

Moyens diagnostiques :

Biologie

– Numération formule sanguine.

– Bilan hépatique : bilirubinémie directe et indirecte, transaminase (TGO, TGP), phosphatases alcalines, 5’nucléotidase, gamma GT.

Imagerie

– Radiographie de l’abdomen sans préparation (ASP).

–  L’échographie abdominale, réalisée en première intention, suffit en général pour diagnostiquer des complications de la lithiase vésiculaire.

– Echo-endoscopie, tomodensitométrie, échoendoscopie (CPRE) sont réalisées en seconde intention dans certains cas particuliers.

Forme typique : la cholécystite aiguë lithiasique :

Diagnostic clinique

– Contexte :

– la forme typique de cholécystite aiguë lithiasique survient chez la femme de 60 ans, pléthorique, souvent au lendemain d’un repas riche en graisses.

– quelquefois révélatrice, elle se déclare souvent chez une patiente ayant une lithiase vésiculaire connue.

– Signes fonctionnels : c’est une crise de colique hépatique.

– Signes généraux : il existe un syndrome infectieux associant une hyperthermie (température supérieure à 38,5 °C), une tachycardie, une langue saburrale. Il n’y a pas d’ictère.

– Signes physiques : la palpation de l’hypocondre droit provoque une douleur qui inhibe l’inspiration profonde (signe de Murphy) avec une défense pariétale localisée.

Examens complémentaires

– La NFS montre une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles.

– Il n’y a pas d’anomalie du bilan hépatique.

– L’ASP peut objectiver une calcification se projetant au niveau de l’hypocondre droit.

– L’échographie abdominale montre la lithiase vésiculaire avec un cône d’ombre typique et sa complication, sous forme d’un épaississement pariétal. Il n’y a pas de dilatation de la voie biliaire principale.

Autres formes anatomocliniques :

Hydrocholécyste

– Le tableau clinique de l’hydrocholécyste est celui d’une crise de colique hépatique intense (douleur de l’hypocondre droit, irradiation scapulaire droite et transfixiante, blocage respiratoire, symptomatologie douloureuse accompagnée de vomissements).

– Il n’existe ni hyperthermie ni ictère.

– L’examen clinique permet de palper une grosse vésicule au niveau de l’hypocondre droit.

– Le bilan biologique ne montre aucune anomalie spécifique.

– Le diagnostic est échographique. Il visualise quelquefois le calcul enclavé au niveau du jabot et met en évidence une grosse vésicule sous tension, à paroi fine et au contenu homogène.

Pyocholécyste

– Le tableau clinique du pyocholécyste est celui d’un hydrocholécyste avec :

– des signes infectieux, une température à 40 °C, une altération de l’état général ;

– une grosse vésicule palpable, avec une défense de l’hypocondre droit.

– Sur le plan biologique, apparaissent des signes en faveur d’un syndrome infectieux.

–  L’échographie permet le diagnostic montrant le calcul enclavé, la volumineuse vésicule en rétention, au contenu hétérogène.

Cholécystite emphysémateuse

– La cholécystite emphysémateuse est une forme rare, se traduisant par la présence de gaz dans la paroi, gaz visualisé sur l’ASP ou à l’échographie.

– Elle est le fait de germes anaérobies.

– Le risque de perforation est important.

Péritonites biliaires

– Le plastron vésiculaire ou péritonite plastique localisée :

– est une importante réaction inflammatoire périvésiculaire liée à l’évolution vieillie d’une cholécystite aiguë. C’est le grand épiploon qui vient s’accoler dans la région vésiculaire ;

– le diagnostic clinique est suspecté, à l’interrogatoire, sur la notion d’un délai d’évolution de plusieurs jours et, à l’examen physique, par la palpation d’une masse mal limitée au niveau de l’hypocondre droit avec une infiltration pariétale.

– cette suspicion clinique sera confirmée par l’échographie et le scanner.

–  Abcès :

– le tableau clinique est proche de celui d’un plastron.

– le diagnostic d’abcès est fait sur l’analyse de l’échographie et du scanner abdominal.

–  Péritonite généralisée :

– la perforation vésiculaire au décours de l’évolution d’une cholécystite aiguë réalise un tableau de péritonite avec contracture généralisée ;

– l’origine biliaire est suspectée sur les antécédents biliaires du patient, la notion d’une douleur de l’hypocondre droit, une histoire clinique évocatrice.

– l’échographie vésiculaire, éventuellement complétée par un scanner abdominal, confirme le diagnostic de péritonite et son origine biliaire.

Moyens thérapeutiques :

Le but du traitement est d’éradiquer l’infection et sa cause ainsi que d’éviter une complication ultérieure.

Traitement médical

– Le patient est hospitalisé dans un service de chirurgie, au repos, à jeun, sous perfusion.

– Le traitement médical associe : antalgiques, glace sur le ventre et antibiothérapie.

– Les germes fréquemment rencontrés sont :

– les entérobactéries (Eschérichia coli et klebsielles).

– les entérocoques.

– les germes anaérobies.

– L ‘antibiothérapie est débutée par voie intraveineuse en bithérapie après un train d’hémoculture :

– elle peut associer en première intention : ceftriaxone (Rocéphine*) à la dose de 2 g/24 h ; ornidazole (Tibéral*) à la dose de 1 g/24 h.

– alternative : pipéracilline (Pipérilline*) à la dose de 4 g en trois fois par voie intraveineuse ;

– en cas d’allergie, on peut associer : péfloxacine (Péflacine*) à la dose de 400 mg en deux fois ; et ornidazole (Tibéral*) à la dose de 1 g/24 h.

Traitement chirurgical

– La cholécystectomie, lorsqu’elle peut être faite d’urgence, traite à la fois la complication infectieuse et la maladie lithiasique, évitant ultérieurement la survenue d’une récidive ou d’une autre complication :

– sauf contre-indication (insuffisance cardiaque sévère, coronaropathie, dérivation ventriculo-péritonéale, myopie sévère, emphysème bulleux, pneumothorax spontané, hypertension intracrânienne et situations apparentées), la voie d’abord cœlioscopique est la voie de référence pour pratiquer la cholécystectomie (voir figure 2) ;

– des difficultés techniques locales peuvent contraindre à pratiquer une laparotomie ;

– l’intervention débute par une ponction de la vésicule avec prélèvement de bile qui permet l’étude bactériologique et la mise en culture.

– la cholangiographie peropératoire est systématique pour étudier la cartographie biliaire à la recherche d’une anomalie anatomique et d’une éventuelle lithiase associée de la voie biliaire principale.

– Le drainage percutané échoguidé :

– réalise une cholécystostomie de décompression, permettant par ailleurs : un prélèvement de bile, l’opacification de la voie biliaire accessoire et quelquefois de la voie biliaire principale.

– c’est une alternative à la chirurgie, dans certains cas particuliers, pour passer un cap chez un sujet à risque.

– c’est un geste simple (anesthésie locale).

– une cholécystectomie secondaire est à prévoir sauf contre-indication formelle et définitive.

Indications thérapeutiques :

Hydrocholécyste

– S’il n’y a pas de contre-indication opératoire devant un hydrocholécyste : cholécystectomie en urgence.

– En cas de contre-indication opératoire immédiate, le drainage percutané peut être une alternative à la cholécystectomie, qui sera réalisée secondairement, 6 semaines à 2 mois après réévaluation anesthésique.

Cholécystite aiguë

– Devant un malade présentant une cholécystite aiguë, vu tôt et sans contre-indication opératoire :

– antibiothérapie dès que le diagnostic est posé.

– cholécystectomie en urgence (dans les 48 heures après l’admission hospitalière).

– arrêt des antibiotiques pendant la période postopératoire.

– Devant un malade vu tardivement ou non opérable :

– antibiothérapie prolongée (5 jours par voie intraveineuse) ou 48 heures au-delà de l’obtention de l’apyrexie, puis relais par voie orale pendant encore une dizaine de jours.

– surveillance hospitalière clinique et biologique.

– en cas d’évolution favorable, on prévoit une cholécystectomie secondaire 2 mois plus tard ainsi qu’une réévaluation anesthésique.

– en cas d’évolution défavorable sur 48 heures, on propose un drainage percutané sous contrôle échoguidé puis une cholécystectomie secondaire décalée de 2 mois et après réévaluation anesthésique.

Pyocholécyste

– Devant un malade présentant une pyocholécyste, vu tôt et sans contre-indication opératoire :

– antibiothérapie.

– chirurgie dans les 48 heures après l’admission à l’hôpital.

– arrêt de l’antibiothérapie après le geste opératoire.

– Devant un malade vu tard ou avec une contre-indication opératoire : antibiothérapie prolongée en première intention, associée à un drainage percutané échoguidé.

Cholécystite emphysémateuse

– Antibiothérapie.

– Urgence chirurgicale.

Plastron

– Traitement médical.

– Chirurgie secondaire.

Abcès

– Traitement médical.

– Drainage percutané de l’abcès.

– Chirurgie vésiculaire secondaire.

Péritonite généralisée

– Antibiothérapie.

– Urgence chirurgicale (cœlioscopie ou laparotomie), cholécystectomie, lavage, drainage de la cavité péritonéale.

FISTULES BILIO-BILIAIRES :

Définition et étiologie des fistules bilio-biliaires : communication entre la vésicule biliaire et la voie biliaire principale.

Diagnostic clinique

– Cette fistule bilio-biliaire, encore appelée syndrome de Mirizzi, réalise le tableau d’un ictère rétentionnel.

– L’examen clinique retrouve un ictère cutanéo-muqueux associé à une décoloration des selles et à l’émission d’urines foncées.

– Il peut retrouver un signe de Murphy positif, une vésicule palpable faisant redouter le diagnostic d’ictère néoplasique, mais il n’y a pas d’altération de l’état général.

Diagnostic biologique

Il existe un syndrome rétentionnel avec augmentation de la bilirubine conjuguée, des phosphatases alcalines, de la 5’nucléotidase, associée à une cytolyse hépatique (augmentation des transaminases).

Diagnostic radiologique

– L’échographie et le scanner permettent le diagnostic en montrant : les remaniements au niveau de la vésicule, le calcul enclavé au niveau du jabot ainsi qu’une dilatation des voies biliaires intrahépatiques et de la voie biliaire principale juste en amont de l’obstacle lithiasique.

– La CPRE et/ou l’écho-endoscopie peuvent être utiles au diagnostic.

Traitement chirurgical

Le traitement chirurgical est une laparotomie.

FISTULES BILIO-DIGESTIVES :

Les fistules bilio-digestives sont le fait de volumineux calculs vésiculaires.

Fistules cholécystoduodénales :

Définition et étiologie des fistules cholécystoduodénales : communication entre la vésicule biliaire et le duodénum.

Clinique

– Le plus souvent, la fistule cholécystoduodénale est asymptomatique.

– Quelquefois, syndrome douloureux de l’hypocondre droit.

– Rarement, accès fébriles.

Diagnostic positif

– Radiographie : l’aérobilie, visible sur l’ASP et centrée sur la région hépatique, est pathognomonique de la fistule bilio-digestive.

– L’échographie montre des signes de cholécystite chronique, éventuellement la disparition de lithiase vésiculaire antérieurement connue. L’aérobilie peut gêner l’examen, mais est parfaitement visualisée au scanner.

Complications rencontrées

Les complications des fistules cholécysto-duodénales sont l’iléus biliaire et le syndrome de Bouveret.

–  L’iléus biliaire est le blocage d’un calcul accouché dans le duodénum au niveau de l’iléon terminal :

– il réalise un tableau d’occlusion intestinale aiguë du grêle.

– plusieurs éléments permettent de rapporter cette occlusion à une origine biliaire : le contexte (femme âgée) ; les antécédents biliaires ; la notion de douleurs de l’hypocondre droit récentes ; l’aérobilie ; la présence d’une opacité calcique (le calcul) dans la fosse iliaque droite ;

– c’est le traitement d’une occlusion du grêle par corps étranger intraluminal. La décision, vis-à-vis de la fistule cholécystoduodénale, sera réévaluée à distance.

– Le syndrome de Bouveret (occlusion haute) est une occlusion duodénale en rapport avec un volumineux calcul vésiculaire accouché et bloqué dans le duodénum.

Traitement

– En cas de fistule cholécystoduodénale asymptomatique : pas de traitement.

– Devant des infections itératives : traitement chirurgical par cholécystectomie, fermeture du duodénum.

– Le syndrome de Bouveret nécessite une laparotomie pour désobstruer le duodénum et, dans le même temps, un traitement de la fistule cholécystoduodénale par cholécystectomie et réparation duodénale.

Fistules cholécystocoliques :

Etiologie

Les fistules cholécystocoliques sont le fait d’une communication entre la vésicule et l’angle colique droit.

Clinique

– La symptomatologie débute souvent par un épisode diarrhéique, associé à un syndrome douloureux et fébrile à répétition de l’hypocondre droit.

– Le diagnostic est confirmé par les examens complémentaires.

Examens complémentaires

– Les examens biologiques sont normaux, en dehors d’une poussée infectieuse récente.

– Radiographie : aérobilie.

– Echographie : signe de cholécystite chronique.

– Un scanner abdominal et un lavement baryté peuvent authentifier la fistule cholécystocolique.

Traitement

Les risques infectieux majeurs nécessitent toujours la réalisation du traitement chirurgical associant une cholécystectomie et la fermeture de la brèche colique.

CANCER VESICULAIRE :

Le cancer vésiculaire primitif survient le plus souvent après 60 ans et touche la femme quatre fois plus que l’homme.

– Il est associé à une lithiase volumineuse (d’une taille souvent supérieure à 3 cm de diamètre), à une vésicule porcelaine ou à une cholécystite chronique. Il s’agit d’un adénocarcinome dans 90 % des cas.

–  L’extension rapide vers le hile et le pédicule hépatique avec ictère révélateur s’observe dans la majorité des cas et explique l’inaccessibilité chirurgicale fréquente (survie inférieure à 12 % à 5 ans).

Le risque d’un cancer vésiculaire ne semble pas justifier la cholécystectomie prophylactique face à une lithiase asymptomatique, sauf dans le cas de la vésicule porcelaine (incrustation calcique de toute la paroi vésiculaire visible à l’ASP).

Lithiase de la voie biliaire principale :

La lithiase de la voie biliaire principale est, dans la majorité des cas, secondaire à la migration d’un calcul vésiculaire par le canal cystique.

Elle complique la maladie chez 10 % des patients porteurs de lithiases vésiculaires et expose le malade à des complications qui peuvent être très graves, mettant en jeu le pronostic vital (l’angiocholite aiguë et la pancréatite aiguë).

La gravité de ces complications explique la nécessité de traiter toute lithiase de la voie biliaire principale, même asymptomatique.

DONNEES DE L’IMAGERIE :

Echographie et écho-endoscopie :

Échographie transpariétale

L’échographie transpariétale reste un examen demandé en première intention dans le bilan des lithiases de la voie biliaire principale.

– Elle montre l’existence d’une lithiase vésiculaire, associée à une dilatation de la voie biliaire principale.

– Les calculs de la voie biliaire principale sont difficilement mis en évidence par cet examen.

Echo-endoscopie

L’écho-endoscopie consiste à amener par voie endoscopique un échographe de haute fréquence au niveau duodénal et donc au contact de la voie biliaire principale.

C’est l’examen actuel le plus performant pour porter le diagnostic de lithiase même petite (2 mm) au niveau de la voie biliaire principale.

Cholangio-IRM :

Les progrès de l’IRM permettent actuellement d’obtenir d’excellentes cartographies biliaires et du canal de Wirsung.

Cette technique va encore s’améliorer dans l’avenir pour supplanter l’écho-endoscopie et la CPRE dans le diagnostic positif de lithiase de la voie biliaire principale.

Les avantages de la cholangio-IRM sont : son innocuité est totale, sa cartographie biliaire complète et le fait qu’on retrouve les mêmes performances que pour l’écho-endoscopie.

Inconvénients : des machines peu disponibles et un coût élevé.

Cholangiopancréatographie rétrograde par voie endoscopique :

– La CPRE consiste à opacifier par voie rétrograde la voie biliaire principale et permet le diagnostic d’un calcul du canal cholédoque.

– Son intérêt purement diagnostique vient de passer au second plan par rapport à l’écho-endoscopie, mais cet examen garde une place importante compte tenu de ses possibilités thérapeutiques : la sphinctérotomie endoscopique.

Tomodensitométrie abdominale :

La TDM abdominale a peu de place dans le bilan d’une lithiase de la voie biliaire principale, si ce n’est dans le cadre du diagnostic différentiel des formes ictériques pouvant faire évoquer une origine néoplasique.

FORME TYPIQUE D’ANGIOCHOLITE AIGUE :

L’angiocholite est secondaire au blocage d’un calcul dans la voie biliaire principale à l’origine d’une bactériémie à point de départ biliaire.

Diagnostic clinique :

– Le tableau clinique associe chronologiquement :

– une douleur (colique hépatique).

– une fièvre (température à 40 °C avec frissons).

– puis un ictère qui est de type rétentionnel et en général plutôt fluctuant (triade de Villard).

– L’examen clinique, outre ces trois symptômes, est relativement pauvre.

– Il retrouve un ictère cutanéo-muqueux.

– Le signe de Murphy est rarement retrouvé.

Diagnostic biologique :

Le diagnostic biologique associe :

– un syndrome infectieux (hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles).

– un syndrome rétentionnel.

– augmentation de la bilirubinémie.

– augmentation du taux de phosphatases alcalines.

– augmentation de la 5’nucléotidase et des gamma GT.

– une cytolyse est fréquemment associée et se traduit par une augmentation des transaminases.

– les hémocultures sont positives dans 60 % des cas.

– l’amylasémie est normale.

– le bilan de crase sanguine recherche une diminution du temps de Quick en rapport avec une baisse du taux d’absorption de la vitamine K.

FORMES CLINIQUES :

Forme asymptomatique

– Le plus souvent cette lithiase de la voie biliaire principale asymptomatique est découverte au cours d’une cholécystectomie pour lithiase vésiculaire au moment de la cholangiographie peropératoire.

– Elle doit faire l’objet d’une extraction, assurant la vacuité de la voie biliaire principale.

– La lithiase de la voie biliaire principale méconnue expose au risque de rétention biliaire chronique et à son évolution vers la cirrhose biliaire secondaire.

Forme douloureuse isolée

Forme fébrile isolée

Forme ictérique isolée

– La séquence classique : douleur-fièvre-ictère n’est pas toujours rencontrée. La survenue d’un ictère nu est rare dans le cadre d’une lithiase de la voie biliaire principale ; elle pose le problème du diagnostic différentiel avec les ictères d’origines néoplasiques.

– Sur le plan clinique, l’absence de palpation d’une grosse vésicule est un argument pour une origine lithiasique (loi de Courvoisier-Terrier).

Forme grave : l’angiocholite aiguë ictéro-urémigène

– Heureusement rare, mais toujours crainte, l’angiocholite aiguë ictéro-urémigène réalise un syndrome septique grave qui passe largement au premier plan, associant en un laps de temps très court :

– des signes de choc toxi-infectieux.

– et l’installation rapide d’une insuffisance rénale organique oligurique.

– avec, sur le plan biologique, augmentation de l’urée sanguine et de la créatininémie.

– C’est une urgence thérapeutique (décompression de la voie biliaire principale) et, éventuellement, dialyse.

PANCRÉATITE AIGUË BILIAIRE :

La pancréatite aiguë biliaire complique un accident de migration.

C’est le passage d’un calcul, souvent de petite taille, par le canal cystique dans la voie biliaire principale.

C’est au moment de l’expulsion du calcul dans le duodénum, à travers l’ampoule de Vater, que se déclenche la pancréatite aiguë qui évoluera par la suite pour son propre compte.

Tableau clinique :

La nature biliaire de la pancréatite aiguë ne présage pas de la bénignité ou de la gravité de la pancréatite.

– Tous les tableaux peuvent se voir, de la simple réaction enzymatique biologique jusqu’au tableau très grave de pancréatite nécroticohémorragique mettant en jeu le pronostic vital (voir question “ Pancréatite aiguë ”).

– La gravité de cette pancréatite aiguë peut être appréciée par différents scores ; le plus utilisé est le score de Ranson, qui est établi sur des critères cliniques et biologiques à l’entrée à l’hôpital et à la 48e heure. Un score de Ranson supérieur à 3 témoigne de la gravité du tableau (mortalité supérieure à 50 %).

Examens complémentaires :

Examen biologiques

– Hyperamylasémie, augmentation de l’amylasurie, augmentation de la lipasémie.

– Une cholestase associée fait évoquer la présence d’un calcul enclavé dans l’ampoule de Vater : augmentation de la bilirubine conjuguée, augmentation des phosphatases alcalines.

– Dosage de la protéine C réactive : cette protéine est un élément d’orientation pronostique important car elle caractérise la phase initiale de toxémie pancréatique.

Examens radiologiques

–  L’échographie transpariétale n’a pas d’intérêt dans le diagnostic positif et lésionnel des pancréatites aiguës. Elle trouve sa place pour rattacher la pancréatite aiguë à une origine biliaire si elle montre l’existence de calculs de petite taille au niveau vésiculaire.

– Le scanner abdominal est la technique d’imagerie de référence pour faire l’évaluation des lésions anatomiques au cours d’une pancréatite aiguë.

– Ce scanner permet d’établir le score de Balthazar.

– Les signes scanographiques associés aux signes biocliniques ont une valeur pronostique et permettent de sélectionner les malades à haut risque évolutif.

Origine biliaire :

– L’origine biliaire d’une pancréatite aiguë est facilement reconnue quand il existe une lithiase vésiculaire visible en échographie.

– Dans le cas contraire, après avoir éliminé les autres causes de pancréatites, et en particulier l’alcool et les médicaments, d’autres arguments pourront être recherchés en faveur d’une origine biliaire, c’est la présence :

– d’un “ sludge ” vésiculaire à l’échographie ;

– de microcristaux de cholestérol dans la bile cholédocienne recueillie par endoscopie ;

– et l’aspect d’une papille inflammatoire à l’endoscopie.

– Cette enquête étiologique est importante puisque l’origine biliaire de la pancréatite impose une cholécystectomie secondaire, seul moyen d’éviter une récidive de la pancréatite aiguë.

TRAITEMENT DE LA LITHIASE DE LA VOIE BILIAIRE PRINCIPALE :

But :

Le but du traitement de la lithiase de la voie biliaire principale est d’assurer sa vacuité et d’éviter le risque évolutif des deux complications majeures que sont l’angiocholite aiguë et la pancréatite aiguë biliaire.

Moyen :

Chirurgie

–  L’extraction d’un ou de plusieurs calculs de la voie biliaire principale nécessite une cholécystectomie, une cholangiographie peropératoire et une cholédocotomie.

– L’extraction instrumentale ou par sonde des calculs de la voie biliaire principale est souvent associée à une cholédocoscopie peropératoire attestant la vacuité de la voie biliaire principale.

– La fermeture de la cholédocotomie se fait après drainage externe (drain de Kehr).

– Le drainage externe permet une décompression de la voie biliaire principale le temps de la cicatrisation, évitant le risque de fistule postopératoire.

– Il permet par ailleurs, au 10e jour postopératoire, le contrôle de la vacuité de la voie biliaire principale.

– Cette chirurgie de la voie biliaire principale se fait par laparotomie, mais l’abord cœlioscopique se développe de plus en plus actuellement.

Sphinctérotomie endoscopique

– La sphinctérotomie endoscopique consiste à sectionner le sphincter d’Oddi après opacification rétrograde, permettant l’extraction de calculs soit spontanée, soit par l’intermédiaire d’une sonde et assurant ainsi la vacuité de la voie biliaire principale et son drainage.

– Son taux de réussite et de l’ordre de 90 %, mais la technique comporte ses propres risques (perforation duodénale, risque hémorragique, pancréatite aiguë).

Indications :

Il n’y a pas à l’heure actuelle de consensus quant aux indications thérapeutiques ; elles sont fonction du plateau technique local, du contexte et du terrain.

Lithiase de la voie biliaire principale non compliquée

– Soit sphinctérotomie endoscopique première, puis cholécystectomie sous cœlioscopie secondaire.

– Soit chirurgie complète (par laparotomie ou cœlioscopie).

– Certaines équipes réservent la sphinctérotomie endoscopique au sujet âgé, refusant ce geste chez les sujets plus jeunes, compte tenu du devenir incertain et mal connu d’une sphinctérotomie, à long terme.

Angiocholite aiguë lithiasique

– Le premier temps du traitement de l’angiocholite aiguë lithiasique est la correction des éventuels troubles de la crase sanguine par injection intraveineuse de vitamine K.

– Après quoi, la décompression de la voie biliaire principale par sphinctérotomie endoscopique est faite d’urgence sous couvert d’une antibiothérapie intraveineuse (même protocole que pour les cholécystites aiguës).

– La cholécystectomie est réalisée secondairement.

– En cas de forme grave d’angiocholite ictéro-urémigène, la prise en charge du patient nécessite qu’il soit dans un service de réanimation chirurgicale lourde.

– La décompression de la voie biliaire principale est une urgence, la sphinctérotomie endoscopique est le geste thérapeutique le plus important.

– Il est associé au traitement de la défaillance multiviscérale (choc septique).

Lithiase de la voie biliaire principale associée à une pancréatite aiguë

– C’est la pancréatite aiguë qui prime dans la prise en charge thérapeutique du patient également atteint de lithiase de la voie biliaire principale.

– L’origine biliaire impose à distance une cholécystectomie, qui pourra se faire par voie cœlioscopique pour éviter la récidive.

– L’existence d’un calcul enclavé dans l’ampoule de Vater (syndrome rétentionnel associé) impose la réalisation d’une sphinctérotomie endoscopique pour assurer la vacuité de la voie biliaire principale, permettant de décaler le geste opératoire concernant le problème biliaire après guérison de la pancréatite aiguë.

CAS PARTICULIERS :

Lithiase résiduelle :

La lithiase résiduelle est la découverte d’une lithiase de la voie biliaire principale chez un patient ayant déjà subi une cholécystectomie.

Son traitement fait appel à la sphinctérotomie endoscopique.

Empierrement cholédocien :

– L’empierrement cholédocien se rencontre plus volontiers chez les personnes âgées et se définit par la présence de plus de dix calculs au niveau de la voie biliaire principale.

– Il n’a pas de symptomatologie spécifique, mais il est souvent responsable d’une importante dilatation de la voie biliaire principale d’amont.

– Son traitement ne diffère pas de celui d’une lithiase de la voie biliaire principale. Cependant, en cas d’abord chirurgical, on peut être amené à réaliser, de façon exceptionnelle, des dérivations bilio-digestives, cholédocho-duodénales ou cholédocho-jéjunales sur anse en Y (dérivation interne).

Lithiase intrahépatique :

La lithiase intrahépatique complique en général des malformations anatomiques (maladie de Caroli ou dilatation polykystique congénitale des voies biliaires intrahépatiques) ou se développe en amont d’une sténose, qu’elle soit tumorale ou iatrogène (stase biliaire).

– Elle se manifeste essentiellement sous forme d’accidents infectieux à répétition.

– Le diagnostic de lithiase intra-hépatique se fait actuellement par échographie, scanner ou opacification qu’elle soit rétrograde ou percutanée.

– La cholangio-IRM trouvera ici certainement une place importante.

– Cette lithiase intra-hépatique pose un problème thérapeutique important, nécessitant quelquefois des gestes d’hépatectomie.

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