Lithiase vésiculaire

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La lithiase vésiculaire est très fréquente. La plupart sont asymptomatiques et le resteront, ne nécessitant donc pas de traitement. Les 3 principaux composés organiques de la sécrétion biliaire sont les sels biliaires, le cholestérol et les phospholipides. S’il y a rupture de l’équilibre entre ces différents constituants la bile devient lithogène. L’existence d’une bile lithogène est une condition nécessaire, mais non suffisante à la formation de calculs. D’autres facteurs interviennent parmi lesquels l’hypomobilité de la vésicule biliaire. On parle de lithiase vésiculaire symptomatique lorsque celle-ci s’est manifestée par une crise de colique hépatique. Une augmentation transitoire des enzymes hépatiques et (ou) pancréatiques, au moment de la crise, authentifie l’organicité de celle-ci dans les formes atténuées. On parle de lithiase vésiculaire compliquée en cas de cholécystite aiguë ou de lithiase de la voie biliaire principale. Le traitement de la lithiase vésiculaire symptomatique est la cholécystectomie cœlioscopique. Ses résultats et, en particulier, le risque de complications dépendent beaucoup de l’opérateur…

ÉPIDÉMIOLOGIE :

Lithiase vésiculaireLa lithiase vésiculaire est une affection fréquente dans les pays occidentaux. Elle touche 10 % de la population adulte en France.

Sa fréquence augmente avec l’âge pour atteindre 30 % des sujets de plus de 60 ans.

Elle est deux fois plus fréquente chez la femme que chez l’homme.

PHYSIOPATHOLOGIE :

La bile excrétée par le foie et stockée dans la vésicule contient :

– du cholestérol et des pigments biliaires qui peuvent précipiter.

– des acides biliaires et des phospholipides (lécithines) qui sont des substances solubilisantes.

Il existe deux types de calculs biliaires :

– les calculs cholestéroliques qui sont les plus fréquents dans les pays occidentaux (80 % des cas).

– les calculs pigmentaires très fréquents en Asie et qui ne représentent que 20 % des calculs en Occident.

Lithiase biliaire cholestérolique :

Le cholestérol, insoluble dans l’eau, est solubilisé dans la bile grâce à la formation de micelles avec les acides biliaires et les phospholipides.

– Les calculs se forment quand la concentration biliaire de cholestérol dépasse les capacités de solubilisation de la bile.

– Ainsi, il y a précipitation du cholestérol sous forme de microcristaux lorsqu’il existe une sursaturation en cholestérol par hypersécrétion de cholestérol dans la bile et/ou hyposécrétion de sels biliaires.

– La précipitation de ces cristaux microscopiques est liée en partie à la présence d’un facteur de nucléation synthétisé par la vésicule.

– Les microcristaux vont s’agglutiner pour former des calculs.

Les calculs cholestéroliques sont jaunes, mous, friables, radiotransparents s’ils sont purs. En fait, la concentration en cholestérol varie de 25 % à 100 %. Dans 20 % des cas, ils sont calcifiés.

Durant leur formation, les calculs restent asymptomatiques. Ils ne deviennent symptomatiques que s’ils migrent et entraînent une distension des parois vésiculaires.

La vésicule joue également un rôle dans la lithogenèse :

– elle concentre la bile et favorise donc la précipitation.

– elle sécrète du mucus qui constitue des noyaux de nucléation.

Facteurs favorisants

Les facteurs favorisant la lithiase biliaire cholestérolique sont :

– des facteurs individuels :

– âge élevé.

– sexe féminin.

– multiparité.

– appartenance à une ethnie particulière et/ou génétique.

–  des facteurs liés à l’environnement :

– obésité ou perte pondérale rapide.

– alimentation : régime hypercalorique et/ou riche en acides gras polyinsaturés.

– maladies (maladie de Crohn) et résections iléales (malabsorption des acides biliaires).

– hypertriglycéridémie.

– médicaments : contraceptifs oraux (œstrogènes), hypolipémiants (fibrates) et analogues de la somatostatine.

– défaut de glycuroconjugaison de la bilirubine.

Lithiase biliaire pigmentaire :

– La bilirubine non conjuguée est insoluble dans l’eau.

– Les calculs se forment lorsque l’excrétion biliaire de bilirubine non conjuguée augmente.

– Il y a alors formation de calculs durs, noirs, radio-opaques. Les calculs pigmentaires se calcifient dans 50 % des cas.

– Les facteurs favorisant la lithiase biliaire pigmentaire sont :

– enfants (hémolyse).

– l’existence d’une hémolyse chronique : maladie de Minkowski-Chauffard, thalassémie majeure, drépanocytose.

– l’existence d’une cirrhose, quelle qu’en soit l’étiologie.

– les infections chroniques bactériennes ou parasitaires survenant ou non en amont d’une sténose biliaire congénitale ou acquise (anastomoses bilio-digestives). Dans ces derniers cas, la formation des calculs pigmentaires est liée à l’hydrolyse de la bilirubine conjuguée dans la bile sous l’action de bêta-glucuronidases bactériennes.

Diagnostic :

LITHIASE VESICULAIRE ASYMPTOMATIQUE :

Dans 80 % des cas, la lithiase est et demeure asymptomatique.

Elle est souvent découverte de façon fortuite sur :

– une radiographie de l’abdomen sans préparation (si elle est radio-opaque).

– ou une échographie abdominale.

– ces deux examens étant réalisés pour diagnostiquer une autre affection.

LITHIASE VÉSICULAIRE NON COMPLIQUEE SYMPTOMATIQUE : DOULEUR BILIAIRE OU COLIQUE HÉPATIQUE :

Clinique :

La lithiase vésiculaire non compliquée symptomatique survient dans 15 % des cas de lithiase vésiculaire et correspond à la mobilisation des calculs qui vont entraîner un obstacle mécanique passager. La douleur correspond à la distension des voies biliaires et à la contraction de la vésicule.

Caractéristiques de la douleur

Les caractéristiques de cette douleur sont :

– début brutal.

– siège : hypocondre droit ou épigastrique.

– irradiations d’une douleur :

– antéropostérieure, transfixiante vers la base du thorax.

– puis ascendante vers la pointe de l’omoplate (douleur en bretelle).

– intensité : douleur violente, avec renforcement paroxystique.

– type : torsion, broiement.

– parfois déclenchée par la prise de certains aliments : graisses, œufs, chocolat.

– signes d’accompagnement :

– nausées, vomissements.

– inhibition respiratoire à l’inspiration.

– durée : quelques heures (mais moins de 6 heures), spontanément régressive.

– absence de fièvre et d’ictère.

Examen clinique

– Pendant la douleur ou à son décours, l’examen clinique peut être négatif.

– Le plus souvent, il met en évidence une douleur à la palpation de l’hypocondre droit. Le signe de Murphy est recherché sur le malade en décubitus dorsal. L’examinateur réalise une palpation profonde et appuyée de l’hypocondre droit pendant que le malade respire profondément. Si l’inspiration est bloquée par la survenue d’une douleur, le signe est positif.

– Parfois, il est retrouvé une grosse vésicule indolore correspondant à un hydrocholécyste secondaire à l’enclavement d’un calcul dans le collet de la vésicule ou dans le canal cystique.

– Il n’y a ni défense ni contracture.

– Les touchers pelviens sont normaux.

Diagnostics différentiels :

Les diagnostics différentiels sont :

– colique néphrétique droite, lombaire à irradiation descendante.

– douleur ulcéreuse rythmée par les repas.

– hépatalgies : virales, toxiques, congestives.

– pneumopathies de la base droite.

– certaines colopathies.

Imagerie :

Radiographie de l’abdomen sans préparation

La radiographie de l’abdomen sans préparation :

– objective parfois des calculs radio-opaques se projetant dans l’hypocondre droit en regard de la 12e vertèbre dorsale ou de la 1re lombaire.

– elle peut également montrer un iléus réflexe (distension gazeuse du grêle ou du côlon).

Echographie abdominale

L’échographie abdominale

– doit être demandée au moindre doute car c’est un examen très sensible et spécifique dans le diagnostic de lithiase vésiculaire.

– elle doit être réalisée chez un malade à jeun.

– les calculs vésiculaires sont visibles sous forme d’échos :

–  denses intravésiculaires.

–  mobiles avec la position du malade.

– avec un cône d’ombre acoustique postérieur.

– elle met parfois en évidence du “ sludge ”  (boue biliaire) qui correspond à la sédimentation de microlithiases.

– l’échographie renseigne également sur :

– la paroi vésiculaire qui est normale (moins de 2 mm).

– la voie biliaire principale qui est normale (moins de 8 mm).

– l’absence de dilatation des voies biliaires intra-hépatiques.

– elle analysera l’aspect du foie, du pancréas et des reins.

Cholécystographie orale

– La cholécystographie n’a d’intérêt que dans le pré-bilan d’un éventuel traitement dissolvant, pour apprécier la fonctionnalité de la vésicule.

– Technique : absorption orale d’un produit de contraste à élimination biliaire 12 à 15 heures avant l’examen radiologique centré sur l’hypocondre.

– Cet examen peut mettre en évidence :

– l’existence d’images lacunaires correspondant à des calculs.

– la vidange vésiculaire après un repas-test.

– la voie biliaire principale après contraction vésiculaire.

– L’absence d’opacification vésiculaire peut être due à :

– une vésicule non fonctionnelle.

– une mauvaise absorption intestinale.

– une mauvaise excrétion du produit de contraste par l’hépatocyte.

– ou une vidange vésiculaire avant l’examen.

– La fiabilité de cet examen est faible.

Cholécystographie intraveineuse

– La cholécystographie intraveineuse consiste en l’injection IV d’un produit iodé sécrété par le foie.

– Sa faible fiabilité et le risque d’accident allergique ont limité considérablement son utilisation.

Bilan biologique

La NFS et le bilan hépatique sont normaux.

Complications :

Les complications de la lithiase vésiculaire sont :

– la cholécystite aiguë.

– l’hydrocholécyste.

– l’iléus biliaire.

– le calculo-cancer de la vésicule biliaire.

– la migration calculeuse dans la voie biliaire principale :

– ictère.

– angiocholite.

– pancréatite aiguë.

Traitement :

Traitement de la crise de colique hépatique :

Le traitement de la crise de colique hépatique consiste en :

–  diète.

–  repos au lit.

–  antispasmodiques per os et surtout IV :

– seuls, Spasfon*, Viscéralgine simple*.

– ou associés à un antalgique noraminopyrine (Avafortan*, Baralgine*, Viscéralgine forte*).

–  antiémétique : Primpéran*.

–  vessie de glace.

La prévention de la récidive sera assurée par la cholécystectomie.

Lithiase vésiculaire asymptomatique : abstention :

– Il est actuellement admis qu’une lithiase vésiculaire asymptomatique ne doit être ni traitée ni surveillée. Le risque de complications est très faible et le bénéfice d’une intervention préventive non établi.

– Les seules indications qui pourraient justifier une cholécystectomie prophylactique sont :

– le cas des enfants (les calculs deviennent presque toujours symptomatiques).

– la drépanocytose.

Traitement médical :

– Le traitement médical est fondé sur l’utilisation d’acide biliaire pour dissoudre des calculs cholestéroliques. L’acide chénodésoxycholique (Chénodex*) est abandonné au profit de l’acide ursodésoxycholique (Delursan*, Ursolvan*) à la dose de 8 à 10 mg/j.

– Seuls 20 à 30 % des malades peuvent bénéficier de ce traitement car les contre-indications sont nombreuses :

– lithiase radio-opaque.

– vésicule exclue.

– calculs de plus de 2 cm.

– crises de coliques hépatiques fréquentes et rapprochées.

– Il faut au minimum 1 an de traitement pour obtenir la disparition d’un calcul.

– Les échecs à 1 an sont nombreux (entre 50 et 80 %).

– Il faut surveiller annuellement les malades guéris pour dépister les rechutes (30 %).

– Les causes d’échec sont :

– certains calculs cholestéroliques, bien que radiotransparents, sont riches en calcium.

– 15 à 20 % des calculs pigmentaires sont radio-transparents, ces traitements ne sont efficaces que sur les calculs cholestéroliques.

– Les indications de ce traitement sont actuellement très limitées. Il peut être proposé en cas de contre-indication à la chirurgie.

Lithotritie extra-corporelle :

Le traitement par lithotritie extra-corporelle est pratiquement abandonné car l’élimination des calculs est difficile.

Il repose sur la fragmentation des calculs par choc ou ultrasons.

Il faut associer un traitement dissolvant.

Traitement chirurgical :

La chirurgie est le traitement de choix des vésicules symptomatiques.

Cholécystectomie par laparotomie :

– La cholécystectomie par laparotomie est le plus souvent réalisée par voie sous-costale droite et, plus rarement, par voie sus-ombilicale.

– Elle doit être complétée par une cholangiographie peropératoire par canulation du canal cystique. Cela doit permettre d’éliminer l’existence de calculs dans la voie biliaire intrahépatique.

– La mortalité à froid est inférieure à 1 %.

– L’analyse de la pièce de cholécystectomie est obligatoire.

Cholécystectomie par laparoscopie :

La cholécystectomie par laparoscopie est actuellement le traitement de référence.

– Les règles de la chirurgie biliaire sont les mêmes qu’à ventre ouvert. La réalisation d’une cholangiographie peropératoire est possible.

– Avant l’intervention, le malade doit être prévenu de la possibilité d’une nécessité de conversion (laparotomie nécessaire dans 5 % des cas).

– Les contre-indications sont :

– l’insuffisance respiratoire sévère (pneumopéritoine).

– des antécédents chirurgicaux de même site.

– Les avantages sont nombreux :

– absence de cicatrice.

– pas de douleurs ni de complications pariétales.

– reprise alimentaire précoce, hospitalisation brève et reprise d’activité rapide.

– 95 % des cholécystectomies pour lithiase vésiculaire sont réalisées par laparoscopie.

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