Explorations électrophysiologiques périnéales

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Introduction :

Les explorations électriques périnéales permettent d’explorer les différentes voies neurologiques végétatives et somatiques, motrices et sensitives, proximales et distales, impliquées dans le contrôle des fonctions vésicosphinctériennes, anorectales et génitosexuelles.

Complétant les données cliniques, urodynamiques et morphologiques, elles sont d’un appoint important dans la mise en évidence d’une atteinte neurologique au cours des troubles urinaires, anorectaux et sexuels.

Outre cet intérêt diagnostique, elles permettent parfois de préjuger du pronostic de la lésion causale, d’appréhender les mécanismes physiopathologiques des troubles et de quantifier certains types de fonctionnement normal ou pathologique.

Les différentes techniques :

A – Exploration électromyographique :

Explorations électrophysiologiques périnéalesC’est l’examen le plus ancien et le plus simple.

Il permet, grâce à l’insertion d’une aiguille dans les muscles périnéaux, l’étude des unités motrices.

Prolongement de l’indispensable examen clinique, il permet d’affirmer le caractère neurogène périphérique de l’atteinte et d’en apprécier la répartition (distribution tronculaire, radiculaire, plexique, atteinte multinévritique, polyneuropathie, neuronopathie, polyradiculonévrite).

Cette exploration, conjointement à l’analyse des vitesses de conduction, précise la nature du processus causal (atteinte motrice ou sensitive, atteinte neuronale, axonale ou démyélinisante), son degré de sévérité et son évolutivité lors des bilans successifs.

L’unité motrice représente l’ensemble anatomofonctionnel constitué par le motoneurone situé dans la corne antérieure de la moelle, son prolongement axonal et toutes les fibres musculaires innervées par lui.

Le potentiel d’unité motrice recueilli par l’électromyographie (EMG) représente la sommation des variations de potentiels élémentaires traduisant l’activation synchrone de toutes les fibres musculaires appartenant à la même unité motrice.

L’électrode-aiguille utilisée est généralement de type concentrique monopolaire, les autres types (électrode monopolaire, électrode concentrique bifilaire) explorant un territoire musculaire plus réduit.

L’interprétation du tracé portera, comme toujours, sur les caractéristiques élémentaires (phases, durée, amplitude) et le nombre de potentiels recueillis au repos et en fonction de l’effort accompli.

Au repos, les muscles du périnée, sauf le sphincter urétral, sont silencieux et dépourvus d’activité électrique en dehors d’une activité d’insertion brève (< 300 ms) occasionnée par la stimulation mécanique des fibres musculaires et des potentiels de plaque motrice, potentiels spontanés à faible fréquence (5-50 Hz) peu amples (50 à 300 mV), brefs (3à5ms de durée) provenant de fibres musculaires irritées par l’aiguille.

À l’état pathologique, l’activité d’insertion peut être prolongée, des potentiels de fibrillation brefs (< 5 ms), de faible amplitude (120 à 200 mV), réguliers, peuvent être observés, de même que des potentiels lents de dénervation.

Les salves pseudomyotoniques sont très fréquentes dans le sphincter urétral et les muscles bulbocaverneux au cours des atteintes neurogènes chroniques.

À l’effort, le recrutement spatial correspond à la décharge de nouvelles unités motrices, tandis que celles qui sont déjà activées augmentent leur fréquence de décharge (recrutement temporel).

Le recrutement varie selon le nombre d’unité capables de décharger.

Il est d’environ 15 Hz pour une contraction modérée. Lors de l’augmentation de la contraction volontaire, les potentiels d’unité motrice (PUM) accroissent leur fréquence de décharge et, lorsqu’ils atteignent 8 à 12 Hz, un deuxième PUM est recruté.

Si la contraction augmente, d’autres PUM sont recrutés, déterminant un tracé de pleine interférence.

S’il existe une perte en PUM, leur fréquence de décharge sera plus grande.

On définit ainsi les différents types de tracé comme intermédiaire riche, pauvre ou simple selon la richesse en PUM.

La sommation spatiale (déterminant un tracé trop riche pour l’effort fourni) évoque une lésion myogène et la sommation temporelle (avec augmentation de la fréquence des PUM), une lésion neurogène.

Les tracés myogènes sont cependant exceptionnellement rencontrés enEMGpérinéale.

La morphologie des PUM est aussi étudiée.

Des PUM de courte durée sont notés au cours des réinnervations précoces après lésion nerveuse sévère (par exemple lésions plexiques sacrés post-traumatiques) ou lors des atrophies neurogènes au stade tardif.

Les potentiels de longue durée s’observent au cours des maladies du neurone moteur, dans les axonopathies avec réinnervation, les radiculopathies chroniques, les séquelles de neuropathies et les mononeuropathies chroniques.

Les potentiels polyphasiques se retrouvent avec une grande fréquence au cours des atrophies neurogènes.

D’autres techniques de détection font l’objet d’indications particulières, moyennant un appareillage spécial : enregistrement de fibres uniques ; macro-EMG permettant l’étude du nombre et des caractéristiques morphologiques des unités motrices au sein des sphincters (urétral et anal) et dans les autres muscles périnéaux.

Enfin, différentes techniques automatisées de quantification des PUM et du tracé à l’effort restent encore peu utilisées.

La pénibilité de l’exploration électrophysiologique périnéale n’est pas plus importante que celle des membres, en dehors de l’aspect psychologique de l’abord d’une région anatomique intime.

Le patient doit être prévenu des muscles à examiner, des modalités techniques de l’examen (nécessaire toucher pelvien pour le repérage de certains muscles comme le sphincter strié urétral), du type et de la durée de la douleur ressentie (douleur à type de piqûre de quelques secondes), et des consignes qui lui seront demandées (contraction des muscles du périnée).

Plus que pour tout autre examen EMG, la visualisation sur un schéma peut faire prendre conscience au patient des différentes modalités techniques et des buts de l’examen.

L’allergie au latex doit être dépistée en raison de l’utilisation systématique de gants de protection en cette matière.

La prise d’un traitement anticoagulant n’est pas forcément une contre-indication en fonction de la profondeur des muscles examinés.

Les complications sont exceptionnelles et mineures (petit hématome superficiel, exceptionnellement urétrorragie lors d’une insertion trop médiane d’une électrode-aiguille au cours de l’exploration du sphincter strié urétral chez l’homme).

B – Les différents muscles examinés :

Tous les muscles du plancher périnéal peuvent être examinés.

Le muscle bulbocaverneux est le plus couramment exploré.

Chez l’homme, ce muscle est facilement accessible. L’aiguille est introduite dans le corps musculaire à 3 cm au-dessus de la marge anale, 2 à 3 cmen dehors de la ligne médiane, entre 2 et 5 cm de profondeur.

Chez la femme, le muscle est très fin (5 à 10 mm d’épaisseur) et se situe en dedans des grandes lèvres.

L’aiguille est insérée sur une ligne horizontale située à la jonction du tiers inférieur et des deux tiers supérieurs de la vulve, à 3 cm de la ligne médiane, en dedans des grandes lèvres, dirigée selon un axe de 45° en dehors, à 2 ou 3 cm de profondeur.

La contraction préalable (lorsqu’elle s’avère possible), permet un repérage plus aisé du muscle lors du palper digital.

La contraction périnéale est parfois difficile à obtenir.

Il faut demander au patient de « serrer l’anus, de retenir ses urines ou ses selles, de faire rentrer l’anus dans le ventre », pour analyser le tracé au cours d’une contration volontaire.

Si celle-ci est impossible à obtenir, il faut alors s’aider de synergies musculaires « serrer les fesses, serrer les genoux » ou de manoeuvres réflexes (ne serait-ce que pour vérifier le bon emplacement de l’électrode-aiguille) tels que la toux, l’étirement de la marge anale, le réflexe bulboanal.

Le sphincter strié urétral est étudié par voie périnéale.

Chez l’homme, tandis que le toucher rectal (par la pulpe de l’index) repère l’apex prostatique, l’aiguille, insérée 2 cm à 3 cm au-dessus de l’anus, de 2 à 3 cmen dehors de la ligne médiane, est progressivement introduite pour se rapprocher du doigt qui palpe la prostate.

Après avoir franchi la résistance de l’aponévrose périnéale moyenne, le sphincter strié est atteint entre 5 et 10 cm de profondeur.

Chez la femme, l’examen est réalisé à l’aide d’une électrode-aiguille à usage unique insérée, en règle, par voie transpérinéale périméatique dans le sphincter urétral.

L’insertion de l’aiguille se fait à 10 heures, midi ou 2 heures, à 1 cm périméatique.

Ces repères sont dictés par la situation anatomique du sphincter urétral de la femme qui est plus développé à la face antérieure de l’urètre.

Le corps musculaire est atteint entre 1 et 2 cm de profondeur, l’aiguille étant enfoncée parallèlement à l’axe urétral, soit 30° vers le bas.

Cet examen est peu invasif, bien toléré grace à l’utilisation d’aiguilles très fines, à usage unique, parfaitement acérées.

Il n’existe aucune contre-indication (même un traitement anticoagulant à dose efficace ne contreindique pas cette exploration), ni de complication (en dehors de la possibilité d’un microhématome périurétral).

Une deuxième voie d’abord est constituée par la voie transvaginale : l’aiguille est insérée à la face antérieure du vagin, à l’intérieur des petites lèvres, à 2 à 4 cm à l’intérieur de la cavité vaginale, dirigée à 45° en haut et en arrière.

Cette méthode est moins douloureuse en raison de la faible innervation sensitive du vagin, mais le sphincter strié urétral est plus difficile à atteindre et à repérer, et l’existence de prolapsus peut compliquer (nécessité de refoulement) ou empêcher cette technique.

D’autres types d’électrodes peuvent être utilisés dans le cadre d’une simple étudeEMG globale.

Une électrode de contact annulaire peut être montée sur une sonde urétrale et positionnée en regard de la région du sphincter strié urétral.

Cette techique ne permet pas une étude analytique des unités motrices du sphincter urétral, et reste limitée à l’évaluation grossière fonctionnelle des possibilités contractiles du strié urétral.

L’explorationEMGdu sphincter strié urétral permet d’une part d’en apprécier le degré de dénervation, et d’autre part d’en appréhender la valeur fonctionnelle.

Cette analyse quantitative de l’activité EMG du sphincter urétral permet de chiffrer les efforts de contraction volontaire des muscles périnéaux.

Cette analyse peut être globale et non chiffrée en notant l’importance de l’enrichissement du tracé lors de la contraction volontaire.

Une mesure de l’enveloppe du signal après redressage ébauche l’analyse quantitative.

Mais cette dernière est au mieux réalisée par une étude spectrale (dont le principe est fondé sur les transformées de Fourier), analysant la distribution du spectre de fréquence du signal EMG.

La mise en évidence d’une dénervation dans le sphincter strié urétral évoque avant tout une lésion neurogène périphérique par atteinte des différentes branches distales du nerf pudendal, dans le cadre d’une neuropathie périnéale d’étirement fréquemment observée en post-partum, au décours de grossesses ou d’accouchement difficiles, au cours des périnées descendants ou après chirurgie pelvienne ou constipation prolongée.

Dans ce cas, le processus neurogène est diffus (des altérations électriques étant également mises en évidence dans les muscles bulbocaverneux et dans le sphincter anal), et les latences terminales (motrices et sensitives) obtenues par stimulation endorectale du nerf près de l’épine ischiatique, sont augmentées, tant sur la branche périnéale (à destinée urétrale et des bulbocaverneux) que sur la branche anale.

L’existence d’une asymétrie (droite/gauche) du processus neurogène en détection, sa sélectivité, sa distribution, peuvent témoigner d’une atteinte radiculomédullaire, plexique, monotronculaire, voire multinévritique.

L’interprétation des tracés est alors aidée par la réalisation des différents examens de stimulodétection (mesure des latences du réflexe bulbocaverneux, étude des potentiels évoqués moteurs et sensitifs).

Le sphincter anal est aisément exploré.

Le patient est le plus souvent en décubitus dorsal, jambes fléchies éventuellement soutenues latéralement pour obtenir l’état de relâchement le plus complet.

L’aiguille est directement insérée dans les différents quadrants du sphincter anal (quadrants antérieurs droit et gauche, quadrants postérieurs droit et gauche). L’activité électrique est retrouvée à quelques millimètres de profondeur.

Souvent, il est plus facile d’insérer l’aiguille plus profondément (1 cm, par exemple), puis de retirer lentement l’électrode et voir ainsi apparaître les unité motrices à l’écran et leur bruit caractéristique au haut-parleur.

Les releveurs peuvent être aussi étudiés : l’électrode est insérée à la partie postérieure du sphincter anal, et dirigée franchement en haut et en dehors, l’activité musculaire étant obtenue à 3 ou 4 cm de profondeur.

Les électrodes de surface ne permettent pas une bonne analyse du tracé électrique.

Leur seul intérêt est une approche quantitative de la contraction musculaire.

Peuvent être ainsi utilisées des électrodes diabolo, des électrodes-mousse directement positionnées dans le sphincter anal, voire des électrodes de contact (gel colloïde, électrode à dépression) appliquées à la périphérie du sphincter anal.

Plusieurs recueils sont en général nécessaires pour étudier au cours de la contraction la morphologie des PUM et leur recrutement spatial et temporel.

Cette contraction est parfois difficile à faire réaliser par le patient en raison d’un trouble de la commande pas forcément d’origine neurologique.

L’étude de l’activité musculaire au cours d’activités réflexes est alors utile (toux, stimulus nociceptif, réflexe bulboanal déclenché mécaniquement par le pincement de la région clitoridienne).

La mise en oeuvre de synergies musculaires (adduction-flexion des membres inférieurs en décubitus par exemple) permet souvent le réveil d’une contraction musculaire sphinctérienne et partant, l’analyse des PUM.

L’existence de defects sphinctériens peut perturber l’analyse précise du tracé, en raréfiant l’activité EMG. Une véritable cartographie du sphincter anal est ainsi réalisée, permettant de typer la dénervation, son importance et sa répartition.

Les différents quadrants du sphincter anal sont examinés (antérieurs droit et gauche, postérieurs droit et gauche).

L’étude de la contraction volontaire permet de noter l’enrichissement du tracé, et d’apprécier quantitativement et qualitativement la motricité volontaire analytique, son caractère dissocié et son endurance.

La dénervation ou l’insuffisance de commande ne peut siéger que dans un seul des quadrants. D’autres muscles du périnée peuvent être étudiés selon les cas (transverse du périnée, muscle ischiocaverneux).

C – Étude de l’arc réflexe sacré :

L’étude des latences sacrées (latences des réflexes bulbocaverneux, bulboanal, bulbotransverse, bulbostrié), effectuée par stimulation de l’afférent sensitif par électrodes externes (nerf clitoridien, nerf dorsal de la verge) et recueil à l’aiguille ou par électrode de contact dans l’effecteur (un des muscles du plancher périnéal) permet de juger de l’intégrité de l’arc réflexe sensitivomoteur nerf pudendal-métamères S2 S3 S4.

L’intérêt de la latence du réflexe bulbocaverneux est grand dans les troubles urinaires, sexuels et anorectaux des atteintes neurogènes périphériques.

C’est le cas des atteintes du cône terminal (tumorale, traumatique, vasculaire), des syndromes de la queue de cheval, des lésions traumatiques ou tumorales du sacrum, des séquelles d’hystérectomie, des polyneuropathies (diabète, éthylisme, polyradiculonévrites).

Si l’intérêt diagnostique et topographique de la latence sacrée est important, son intérêt pronostique n’est pas négligeable, notamment en cas de problèmes médicolégaux.

C’est ainsi qu’au cours de lésion neurogène périphérique déterminant des troubles urinaires ou anorectaux, la conservation de la réponse sacrée est plutôt de bon pronostic. En revanche, l’absence totale de réponse témoigne d’une destruction complète du cône terminal de pronostic fâcheux.

Techniquement, la latence du réflexe bulbocaverneux est facile à obtenir.

Chez l’homme, la stimulation est réalisée par des électrodes-feutres annulaires à la racine du pénis, la réception par une électrode-aiguille dans chaque muscle bulbocaverneux.

Chez la femme, la stimulation est portée par l’application d’électrodes-feutres paraclitoridienne avec recueil à l’aiguille.

La latence doit être inférieure à 44ms, toute abolition du potentiel moteur ou toute augmentation de latence témoignant d’une lésion à un point quelconque de l’arc réflexe sacré.

Le caractère polysynaptique du réflexe bulbocaverneux induit un comportement spécifique des réponses musculaires à la stimulation.

Ainsi, ce réflexe a une latence variable, avec diminution progressive de celle-ci (jusqu’à une valeur stable) lors de l’augmentation de l’intensité de stimulation.

C’est dire la nécessité de vérifier le choc délivré et de terminer l’examen en cas de valeur anormale par une stimulation d’intensité supramaximale et ne pas se contenter d’une stimulation au seuil.

De même, ce réflexe a une réponse de morphologie variable avec augmentation de l’enveloppe du tracé lors de l’augmentation de l’intensité de stimulation répondant à une sommation d’excitation motoneuronale.

Il est parfois possible d’observer une double réponse, une première dite R1 correspondant à un réflexe oligosynaptique, une deuxième R2, correspondant à une décharge polysynaptique.

Cependant, en pratique, ni la surface de la réponse, ni la composante R2 ne sont actuellement prises en compte dans l’interprétation des résultats.

En raison de la dispersion des valeurs des latences réflexes chez le sujet normal, les renseignements topographique et lésionnel ne sont souvent obtenus en réflexologie clinique que par comparaison des réponses d’un côté par rapport à l’autre.

Cette exploration comparée n’est possible que dans les conditions où le stimulus réflexogène permet d’exciter de façon sélective les afférences ipsi- et controlatérales.

Cette stimulation discriminative n’est pas possible lors de l’étude du réflexe bulbocaverneux.

Cependant, la désafférentation unilatérale du réflexe bulbocaverneux par blocage anesthésique d’un des deux afférents a bien démontré que la distribution du réflexe bulbocaverneux est strictement ipsilatérale (disparition de la réponse motrice après anesthésie sélective homolatérale de l’afférent sensitif).

On peut ainsi tester de façon indépendante les voies périphériques droite et gauche de l’arc réflexe somatique sacré, par comparaison des latences sacrées obtenues par recueil simultané dans les deux muscles bulbocaverneux : toute augmentation du délai droite-gauche supérieure à 4 ms suggère une atteinte ipsilatérale sur l’hémiarc réflexe NHI-S2 S3 S4.

L’étude du réflexe bulboanal est effectuée par stimulation de l’afférent sensitif par électrodes externes (nerf clitoridien, nerf dorsal) avec recueil par électrode de contact (électrode diabolo) dans le sphincter anal.

Une électrode mousse est aussi efficace, permet de mieux filtrer le bruit de fond et est, de plus, mieux tolérée.

La fréquence de stimulation est faible (1 h) afin de ne pas noyer dans une hyperactivité constante (réflexe nociceptif) le potentiel moteur.

Le moyennage (50 à 100 passages) est indispensable pour extraire la réponse évoquée.

La latence moyenne est de 35 ms.

Il n’y a pas de valeur minimale, bien que l’on puisse retrouver un raccourcissement significatif de la latence réflexe lors de lésions suprasacrées ou en cas de moelle fixée attachée basse.

L’intérêt de cette technique est grand dans le diagnostic des troubles anorectaux secondaires aux atteintes proximales (cône terminal traumatique et vasculaire, racines sacrées, système nerveux périphérique).

D – Potentiels évoqués corticaux du nerf pudendal :

Les potentiels évoqués somesthésiques corticaux du nerf pudendal permettent l’étude de l’ensemble des voies somesthésiques : branche sensitive terminale du nerf pudendal, cordons postérieurs médullaires, voies lemniscales du tronc cérébral, thalamus jusqu’au cortex pariétal.

La stimulation peut se réaliser, soit classiquement par des électrodes feutres, paraclitoridienne chez la femme, ou par électrodes annulaires à la racine du pénis chez l’homme ; soit d’une manière plus spécifique dans l’exploration des troubles anorectaux à l’aide d’une électrode diabolo placée au contact du sphincter anal, ou d’une électrode-mousse endovaginale lors de l’évaluation des troubles sexuels de la femme.

Une stimulation endorectale du tronc nerveux ou de la muqueuse rectale est aussi possible grâce à l’utilisation de l’électrode du St Marks Hospital.

D’autres stimulations encore plus spécifiques peuvent être réalisées par une distension par ballonnet de l’ampoule rectale.

La latence moyenne est toujours de 44 ms, suggérant ainsi l’intervention des voies myélinisées lors de la distension mécanique rectale. Entre 100 et 200 stimulations sont nécessaires pour extraire la réponse évoquée du bruit de fond cortical grâce à un moyenneur.

Les microélectrodes de recueil sont implantées sur le scalp (électrode active négative en Cz-2, électrode positive de référence en Fz).

La courbe obtenue a la forme d’un «W». Seule est prise en compte la latence de la P40, c’est-àdire de la première onde positive.

Malgré un moyennage répété, la courbe peut être totalement désorganisée, déstructurée, d’amplitude réduite avec allongement de la P40, voire mal reproductible ou impossible à obtenir.

Une telle altération témoigne d’une lésion à un point quelconque du trajet des voies lemniscales : lésions neurogènes périphériques, ou centrales (médullaires suprasacrées, tronc cérébral, encéphaliques).

Si ces altérations signent toujours une atteinte neurologique, et permettent donc d’évoquer la responsabilité d’une atteinte neurogène dans le déterminisme des troubles urinaires, anorectaux ou sexuels, le diagnostic topographique de la lésion causale va nécessiter la confrontation du potentiel cortical aux autres investigations électrophysiologiques (potentiels évoqués médullaires étagés, potentiels évoqués moteurs, etc).

E – Potentiels évoqués moteurs :

Une stimulation transcorticale par champ magnétique est appliquée sur le cortex, induisant un champ électrique se transmettant par les voies motrices pyramidales volontaires jusqu’aux muscles du périnée (sphincter anal, sphincter urétral, bulbocaverneux) où est recueillie l’activité EMG par électrode-aiguille ou de contact.

Cette exploration permet ainsi d’apprécier le versant moteur des voies neurologiques impliquées dans le contrôle périnéal.

Suivant le site de stimulation choisi (cortical, médullaire cervical, cône terminal) et en calculant les différences de latence, les temps de conduction centraux, médullaires et périphériques peuvent être déterminés.

Toute augmentation de latence témoigne d’une lésion sur les voies motrices.

Les différents lieux de stimulation (moelle cervicale en C6 et cône terminal en L2) permettent d’affiner le diagnostic topographique : une latence spinale normale associée à une latence corticale perturbée témoigne d’une altération cortico-sous-corticale des voies motrices ; une latence du cône terminal normale associée à une latence cervicale allongée est en faveur d’une atteinte médullaire suprasacrée.

F – Latence distale motrice du nerf pudendal :

Cette technique est d’un grand intérêt dans le bilan des dysfonctions anorectales (dyschésie et constipation neurologiques, défécation impérieuse et incontinence anale), des troubles urinaires (incontinence du postpartum) et dans l’exploration des algies périnéales.

Elle permet l’appréciation objective des branches terminales du nerf pudendal.

Cette étude des latences distales motrices du nerf pudendal (LDNHI) peut être réalisée sur les deux branches terminales (nerf périnéal : LDPNHI, et nerf anal : LDANHI).

L’électrode de stimulation autocollante se trouve en regard de la pulpe de l’index et l’électrode de recueil en regard de la face palmaire de l’articulation métacarpophalangienne.

La stimulation se fait en appliquant l’index recourbé sur la face postérolatérale du rectum (stimulation de la branche distale du nerf pudendal, près de l’épine ischiatique) la base du doigt étant au contact du sphincter anal, recueillant le potentiel évoqué.

Pour obtenir la LDPNHI, après une seule et unique stimulation, le potentiel moteur est recueilli par une aiguille insérée dans le muscle bulbocaverneux.

La LDANHI est obtenue par la même stimulation endorectale du nerf pudendal mais avec recueil dans le sphincter anal grâce à l’électrode de contact apposée à la base du doigt.

Toute augmentation de la latence (supérieure à 5 ms) ou le non-recueil du potentiel, témoigne d’une perturbation sur la branche terminale du nerf pudendal (nerf anal ou nerf périnéal, suivant les cas).

Cette étude des latences distales motrices du nerf pudendal permet de mettre en évidence une atteinte terminale de ce nerf (par exemple compressive dans le cadre d’un syndrome du canal d’Alcock) mais aussi secondaire à une neuropathie périnéale d’étirement.

G – Latence distale sensitive du nerf pudendal :

L’étude des latences distales sensitives du nerf pudendal est une technique récente.

La stimulation du tronc nerveux est effectuée par l’intermédiaire d’une électrode de surface à usage unique (électrode du St Marks Hospital) collée sur un gant de latex, et positionnée en regard de la pulpe de l’index.

Le doigt est introduit dans le rectum, et la stimulation du nerf pudendal se fait dans la fossette ischiorectale près de l’épine ischiatique.

Le recueil est assuré par des électrodes-ruban Velcro dans le sillon balanopréputial (active dans le sillon, référence sur le gland).

Cinq réponses sont moyennées après stimulation unilatérale droite puis gauche du nerf pudendal.

Latence et amplitude du potentiel sensitif sont appréciées tant du côté gauche que du côté droit.

La latence sensitive moyenne est de 6 ms.

Mais cette technique a aussi des limites : si elle permet d’appréhender le contingent proximal du nerf pudendal, de comparer les nerfs droit et gauche, de mesurer l’amplitude du potentiel sensitif, elle ne permet pas de mesurer une vitesse, l’appréciation de la distance entre stimulation et réception étant impossible.

H – Potentiels cutanés sympathiques :

Les potentiels évoqués cutanés sympathiques (PECS) sont le fait d’une variation de résistance des tissus cutanés induite par la stimulation des glandes sudoripares, secondaire à l’activation des fibres non myélinisées de type C des nerfs sympathiques efférents qui innervent ces glandes.

S’ils sont, depuis quelques années, utilisés dans l’enquête étiologique des troubles génitosexuels, leur utilisation dans l’expertise diagnostique des autres troubles neuropérinéaux (vésicosphinctériens, anorectaux et névralgies périnéales) est plus récente et encore mal codifiée.

Pour l’exploration des PECS périnéaux, l’électrode active négative est placée sur la face dorsale du pénis ou immédiatement en dehors des grandes lèvres chez la femme ; l’électrode positive de référence est collée sur l’épine iliaque antérosupérieure droite.

Une seule réponse est analysée, sans effectuer de moyennage.

Entre chaque enregistrement du PECS, un délai de 30 secondes est respecté pour éviter le phénomène d’habituation.

On réalise cinq stimuli successifs et on retient la latence la plus courte.

L’amplitude de la réponse n’est pas étudiée, seule la présence ou non d’une réponse est prise en compte.

L’étude doit être réalisée sur des patients confortablement installés, bien détendus, yeux ouverts, dans une atmosphère calme, de niveau sonore très bas et à température douce et constante.

Tout stimulus extérieur brutal (bruit parasite tel que l’ouverture ou la fermeture inopinée d’une porte, la chute d’un objet, une conversation) susceptible de faire apparaître une réponse cutanée végétative parasite, doit être évité.

La réponse cutanée sympathique périnéale est toujours obtenue chez les sujets normaux ; la morphologie du PECS périnéal est le plus souvent identique aux autres PECS, sous la forme d’une réponse biphasique, avec une composante précoce négative puis positive.

La latence est remarquablement constante d’une valeur proche de celle obtenue au membre supérieur (1685 ms ± 220).

L’amplitude de l’ordre de 2 µV n’est pas mesurée compte tenu de variations extrêmement importantes (facteur de 1 à 10).

Les PECS permettent l’étude du système nerveux végétatif sympathique.

Habituellement altérés dans les lésions axonales sévères, les PECS sont conservés au cours des neuropathies périphériques de type démyélinisant.

Ils sont ainsi perturbés (absence de réponse) en cas de neuropathie diabétique, tout particulièrement en cas de dysrégulation végétative, sans que l’on puisse effectuer de corrélations avec un symptôme donné de dysautonomie (impuissance, dysurie).

Il semble que seule l’abolition de la réponse soit un bon élément.

En effet, même si la valeur des différentes latences est similaire selon les auteurs, et parfaitement reproductible, il semble que la décharge des glandes sudoripares répondent à la loi du « tout ou rien ».

En revanche, l’amplitude de la réponse a un intérêt potentiel : si la latence mesure l’ensemble de la boucle réflexe (voie afférente des fibres myélinisées à conduction rapide, voie efférente des fibres non myélinisées à conduction lente), l’amplitude serait le reflet de la densité des glandes sudoripares activables, et donc permettrait une bonne appréciation de l’activité périphérique sympathique.

Cependant, l’extrême variabilité de l’amplitude de la réponse chez les sujets ne permettant pas son utilisation en clinique, seule l’abolition de la réponse peut donc être retenue en faveur d’une atteinte du système nerveux sympathique, tout en sachant que la présence d’une réponse ne préjuge pas de son intégrité.

L’abolition du potentiel cutané végétatif enregistré sur la plante des pieds est bien corrélée à l’existence d’un trouble de l’éjaculation d’origine neurologique.

L’enregistrement de la réponse végétative cutanée pénienne permet de juger, en théorie, de l’intégrité des efférences périnéales sympathiques directement impliquées dans le contrôle des fonctions vésicosphinctériennes, génitosexuelles et anorectales.

Si l’abolition de la réponse cutanée peut alors signer une lésion des voies sympathiques, elle peut aussi être le témoin d’une neuropathie périphérique, par perturbation des voies afférentes de cette réponse (fibres larges myélinisées).

La disparition du potentiel évoqué végétatif n’est donc pas pathognomonique d’une lésion des voies efférentes sympathiques et, pour cette raison, de multiples sites d’enregistrement doivent être effectués, la disparition d’une seule réponse locale prenant alors tout son intérêt, plaidant en faveur d’une lésion de la seule voie efférente sympathique et de l’étiologie neurogène du trouble sexuel.

L’intérêt potentiel des PECS périnéaux au cours des troubles vésicosphinctériens doit être souligné.

I – Vitesse de conduction sensitive du nerf dorsal :

L’étude de la vitesse de conduction sensitive du nerf dorsal de la verge est très importante dans le bilan des dysérections.

Elle est réalisée sur un sujet en décubitus dorsal, jambes étendues, dans une pièce à température constante.

La stimulation du nerf est effectuée par des électrodes annulaires en tissu velcro à la partie distale de la verge, sur le gland, l’électrode active négative étant la plus proximale et placée dans le sillon balanopréputial.

La réception est effectuée avec le même type d’électrodes à la racine du pénis (électrode active négative la plus distale).

Le signal est moyenné entre cinq et dix fois. Pendant l’enregistrement, la verge est étirée par une traction axiale effectuée entre pouce et index sur le gland, jusqu’à l’étirement maximal. Cet étirement a un double intérêt.

Il permet, d’une part, de respecter un écartement interélectrodes optimal pour l’enregistrement du potentiel sensitif sans risque de contact entre les pôles positifs et négatifs.

D’autre part, et en raison du caractère tortueux du nerf dorsal à l’état de flaccidité, il rend ce dernier rectiligne permettant ainsi la mesure exacte de la distance entre stimulation et réception.

Vitesse de conduction et amplitude du potentiel sensitif sont les deux paramètres étudiés et leur reproductibilité vérifiée à trois reprises.

La vitesse de conduction normale est supérieure à 40 m/s.

La réduction de la vitesse (< 40 ms) ou la diminution de la réponse (< 2 mV) témoignent d’une lésion périphérique du nerf dorsal.

La mesure de la vitesse de conduction sensitive du nerf dorsal de la verge pose des problèmes d’interprétation en raison de ce trajet serpentigineux du nerf dorsal et donc de la difficulté de mesure exacte de la distance entre les points de stimulation et de réception.

Cette distance est, de plus, souvent sous-estimée en raison du trajet anatomique variable du nerf dorsal susceptible de faire des retours sur lui-même et de la nécessité de repousser en proximal l’étui cutané pénien.

Ce manque de précision de distance parcourue par l’influx nerveux et donc de la vitesse de conduction est un argument pour prendre en compte l’amplitude du potentiel sensitif qui n’est pas soumis à ce type de variation.

Par ailleurs, l’étude de la vitesse de conduction du nerf dorsal n’apprécie d’une part que la partie toute distale du nerf pudendal, et d’autre part ne permet pas une analyse discriminative des afférents droit et gauche en raison de l’impossibilité de stimulation strictement homolatérale du nerf dorsal de la verge.

J – Électromyographie des corps caverneux :

L’EMG de la musculature lisse des corps caverneux a un intérêt théorique dans l’exploration des troubles génitosexuels, mais elle est de moins en moins réalisée.

Une électrode-aiguille est implantée dans un des corps caverneux.

À l’état de flaccidité, on observe chez le sujet normal une activité de base accompagnée de bouffées rythmiques qui disparaît au cours d’une érection que l’on peut déclencher soit par stimulation visuelle, soit par injection intracaverneuse de papavérine.

La technique d’enregistrement de surface a pour avantage d’être atraumatique.

Elle se réalise par l’intermédiaire d’électrodes-bagues annulaires en tissu Velcro disposées au pourtour de la verge à sa partie médiane.Au bout de quelques secondes, de nombreux spikes sont enregistrés pendant l’état de flaccidité.

Les potentiels sont similaires à ceux observés dans le détrusor (30 à 100 mV d’amplitude pour 300 ms de durée).

La présence de nombreux spikes pendant l’enregistrement est le reflet du tonus alpha adrénergique permanent.

Indications des explorations électrophysiologiques périnéales :

A – Troubles anorectaux :

Les investigations neurophysiologiques périnéales permettent l’analyse des différents éléments neuromusculaires impliqués dans la régulation et le contrôle anorectal.

Elles complètent les autres méthodes d’évaluation morphologiques (défécographie, endoscopie, échographie) et fonctionnelle (manométrie) de la motricité anorectale.

Elles permettent de mettre en évidence une atteinte neurologique et d’en préciser le niveau.

Si elles restent utiles dans le dépistage des exceptionnelles maladies neurologiques révélées par des troubles anorectaux, elles sont surtout intéressantes dans la mise en évidence de certains mécanismes physiopathologiques de l’incontinence fécale dite idiopathique (telle la neuropathie périnéale d’étirement) et la quantification du fonctionnement normal et pathologique.

Les causes neurologiques des troubles anorectaux sont ainsi nombreuses, qu’il s’agisse de lésions encéphaliques, médullaires ou périphériques.

La multiplicité des centres régulateurs activateurs ou inhibiteurs, l’importance des voies de conduction étagées tout au long du névraxe, expliquent la fréquence de ces troubles dans la plupart des maladies du système nerveux.

Cependant, ces troubles anorectaux (dyschésie, incontinence fécale) sont souvent au second plan par rapport aux troubles vésicosphinctériens, avec lesquels ils partagent pourtant les mêmes systèmes régulateurs et les mêmes mécanismes physiopathologiques.

Ceci est le fait d’une part de l’absence de complications organiques graves des troubles anorectaux qui, contrairement aux troubles urinaires ne grèvent pas le pronostic vital (insuffisance rénale, troubles infectieux divers des vessies neurologiques) ; d’autre part d’une physiologie un peu différente.

Ainsi, alors que la rétention d’urine est une urgence médicale en raison du risque rapide de détrusor claqué, les effets de la dyschésie ou de la constipation sont moins immédiats.

De même, le défaut d’inhibition suprasacrée est immédiatement symptomatique sur le versant vésicosphinctérien avec apparition d’une hyperactivité vésicale responsable de mictions impérieuses avec fuites.

Ce n’est pas le cas le plus fréquent en matière de motricité anorectale, l’incontinence fécale étant plus tardive voire absente en raison des plus grandes capacités de compliance du réservoir rectal, les fuites ne survenant en règle que lors de la défaillance des systèmes sphinctériens strié et lisse.

Les troubles anorectaux sont ainsi rarement révélateurs de maladies neurologiques contrairement aux troubles vésicosphinctériens qui les précèdent souvent.

Leur survenue au cours de maladies neurologiques connues (sclérose en plaques, paraplégies traumatique, tumorale, infectieuse ou vasculaire, accidents vasculaires ou tumeurs cérébrales, syndromes extrapyramidaux, neuropathies périphériques) pose en réalité le problème des facteurs étiopathogéniques non neurologiques associés.

La perturbation des explorations électrophysiologiques périnéales (tout particulièrement la latence du réflexe sacré et/ou des potentiels évoqués cérébraux) est un argument important en faveur d’une étiologie neurologique.

En cas de troubles révélateurs, elle invite à poursuivre le bilan (imagerie par résonance magnétique encéphalique et médullaire).

Mais, le plus souvent, l’incontinence fécale est le fait d’une neuropathie périnéale d’étirement. De nombreux travaux ont démontré, ces dernières années, l’existence d’une dénervation périnéale au cours de l’incontinence fécale idiopathique et des périnées descendants.

Le mécanisme incriminé est un étirement répété, traumatisant des nerfs du petit bassin par faiblesse et ptôse du diaphragme pelvien.

Cette hypothèse a pu être vérifiée par Swash et al grâce à l’analyse EMG des muscles pelviens et à l’étude des conductions distales des branches motrices terminales du nerf pudendal.

Le mécanisme de cette élongation nerveuse est le plus souvent un périnée descendant.

Les dyschésies anorectales prolongées par les efforts de poussée qu’elles nécessitent, peuvent induire de telles lésions neurogènes (responsables à terme d’une insuffisance sphinctérienne anale entraînant une incontinence fécale).

Le même mécanisme de traction peut être mis en évidence au cours de diverses anomalies anatomiques telles les prolapsus ou au cours des accouchements.

Les interventions pelviennes, et tout particulièrement les colposuspensions, par la traction indispensable qu’elles nécessitent peuvent être à l’origine de telles lésions.

Ces neuropathies distales du nerf pudendal sont essentiellement motrices.

Rarement, elles déterminent un trouble sensitif exprimé par une sensation diminuée du passage des selles dans le canal anal.

Ce dernier signe est plutôt l’apanage des lésions du cône terminal dépistées par l’augmentation de la latence du réflexe bulboanal.

La dénervation du plancher pelvien détermine une diminution des performances mécaniques du sphincter anal, dont la force, la puissance et l’endurance de la contraction diminuent.

Ceci génère souvent une impériosité fécale par déficit du recrutement volontaire strié d’urgence.

En cas d’atteinte plus importante avec dénervation massive du sphincter anal, l’incontinence fécale apparaît d’abord aux gaz puis aux liquides et enfin aux solides.

Les accouchements sont aussi une cause principale d’atteinte distale du nerf pudendal, et ce d’autant plus qu’ils s’avèrent dystociques (expression manuelle, forceps, nouveau-né de poids élevé) ou répétés (multiparité).

Cette dénervation n’est en fait que rarement isolée et s’accompagne souvent de lésions purement mécaniques du sphincter strié anal ou du sphincter lisse.

Ces defects sphinctériens traumatiques peuvent être certes suggérés par un tracé EMG pauvre dans un des quadrants du sphincter anal lors de la cartographique sphinctérienne, mais sont en fait au mieux explorés et évalués par l’échographie endoanale, aussi performante et moins douloureuse.

Cependant, cette dernière ne peut préjuger d’une dénervation associée, a fortiori la quantifier et apporter des éléments de pronostic, données importantes sur le plan thérapeutique, notamment chirurgical.

Les explorations électrophysiologiques périnéales de l’incontinence fécale du post-partum ne se résument pas à l’analyse EMG des muscles périnéaux et des latences terminales du nerf pudendal.

En effet, la neuropathie d’étirement du nerf honteux n’est pas la seule à pouvoir être incriminée.

Des lésions plus proximales, plexiques notamment, doivent être évoquées lors d’accouchements difficiles.

Des lésions médullaires sont aussi possibles (hématome péridural après anesthésie péridurale, décompensation d’une lésion du cône terminal congénitale ou acquise).

La distribution du déficit EMG, la comparaison des latences sacrées, des latences terminales et des potentiels corticaux permettent d’évoquer, voire d’affirmer, ces diagnostics.

B – Incontinence urinaire :

Différents travaux ont fait état depuis quelques années d’anomalies de type neurogène périphérique dans le plancher périnéal au cours de l’incontinence urinaire d’effort féminine.

Ces anomalies ont été successivement mises en évidence par l’exploration EMG des muscles périnéaux (rafales pseudomyotoniques, activité de dénervation, appauvrissement du tracé, sommation temporelle), puis par la perturbation des latences sacrées et des potentiels évoqués corticaux du nerf pudendal, données confirmées par biopsies neuromusculaires, et d’une manière plus récente par un calcul de la densité en fibres du plancher périnéal.

Le mécanisme est le même que pour l’incontinence fécale idiopathique et les périnées descendants, à savoir l’étirement des nerfs du petit bassin.

Le mode d’expression de l’atteinte neurogène périphérique périnéale sera différent suivant la sélectivité éventuelle de l’atteinte, et son caractère complet ou non. Une lésion associée des voies sensitives distales peut déterminer des troubles génitosexuels (hypo- ou anorgasmie, dyspareunie, hypo- ou dysesthésie de la région vulvovaginale), une discrète modification de la perception du passage urétral des urines ou du passage des selles dans le canal anal.

L’atteinte motrice induit une diminution des résistances du sphincter urétral, responsable d’une incontinence urinaire.

Cette modification de la valeur des résistances constitue une cause d’échec de la rééducation périnéale et de certaines interventions chirurgicales de correction.

Les modifications neurotrophiques locorégionales induites par une telle lésion du nerf pudendal peuvent, de plus, avoir un impact fonctionnel, avec détermination de troubles de la réactivité urétrale, perturbant les mécanismes actifs de la continence urinaire venant en complément de la défaillance des forces passives (transmission des pressions, tonus urétral statique, compliance urétrale).

C – Dysuries :

L’existence d’une dysurie, tout particulièrement chez la femme, doit faire évoquer la possibilité d’une atteinte neurogène, notamment périphérique.

Les obstacles intrinsèques (sténose) et extrinsèques (adénome prostatique, masse pelvienne) éliminés, une atteinte neurologique centrale (dyssynergie vésicosphinctérienne), ou périphérique (hypocontractilité vésicale), peut être mise en évidence par les explorations électrophysiologiques périnéales.

L’étude EMG de détection, l’analyse des latences réflexes sacrées permettent de rechercher une lésion radiculaire ou plexique sacrée, voire du système nerveux périphérique.

D – Douleurs périnéales :

À côté des causes coloproctologiques, urologiques, gynécologiques, dermatologiques et psychogènes des douleurs périnéales, les étiologies neurogènes, longtemps méconnues voire niées, peuvent être dépistées par les explorations électrophysiologiques périnéales.

Le syndrome du canal d’Alcock est de connaissance récente.

Il est caractérisé par une atteinte proximale du nerf pudendal dans son canal musculo-ostéo-aponévrotique constitué de l’ischion et de l’obturateur interne (fossette ischiorectale ou canal d’Alcock).

Il a été, dans un premier temps, décrit comme une atteinte aiguë du nerf responsable d’une symptomatologie sensitive périnéale (hypoesthésie, paresthésies) en règle rapidement régressive. Les premiers cas ont été observés chez des cyclotouristes soumis à des efforts prolongés déterminant des microtraumatismes répétés du nerf honteux comprimé sur l’ischion par la selle de vélo.

L’atteinte chronique du nerf pudendal dans son canal est responsable d’une douleur périnéale.

Le mécanisme de cette lésion est une fibrose du canal ostéo-musculo-aponévrotique dans lequel est contenu le nerf pudendal.

La sémiologie du syndrome du canal d’Alcock est caractérisée par des douleurs spontanées permanentes à type de brûlure, ou des paresthésies irradiant volontiers à tout le pelvis, s’exacerbant en position assise et se calmant en position debout et à la marche.

Souvent, le toucher rectal met en évidence, lors de la palpation appuyée du nerf honteux sur l’épine ischiatique, une douleur élective reproduisant la douleur spontanée.

Dans tous les cas, les explorations électrophysiologiques périnéales confirment l’origine neurologique des symptômes.

L’examen de détection retrouve des signes de dénervation souvent bilatéraux.

L’examen de stimulodétection est le plus contributif en mettant en évidence un allongement unilatéral des latences distales du nerf honteux et plus rarement de la latence sacrée.

Souvent, seules ces explorations électriques permettent d’affirmer l’organicité des troubles.

L’infiltration du canal d’Alcock sous repérage scanographique par des dérivés cortisoniques, entraîne dans un tiers des cas une guérison ou une franche amélioration de la symptomatologie douloureuse.

Dans les cas rebelles, la chirurgie de libération du nerf honteux par voie transglutéale doit être discutée après bloc-test à la Xylocaïnet.

Le nerf pudendal peut être aussi comprimé en plusieurs autres points : prolongement falciforme du ligament sacrotubéral (grand ligament sacrosciatique) ; pince entre le ligament sacroépineux (ou l’épine sciatique) et le ligament sacrotubéral.

Cas particuliers des pathologies neurologiques connues :

A – Maladie de Parkinson :

L’EMG de détection des muscles périnéaux (bulbocaverneux, sphincter strié urétral ou anal) peut mettre en évidence des anomalies de type neurogène périphérique.

Ces anomalies sont en règle absentes dans la maladie de Parkinson, mais s’observent à l’inverse dans les atrophies multisystématisées (AMS).

La latence du réflexe sacré est normale dans la maladie de Parkinson et perturbée au cours des AMS. Les potentiels évoqués somesthésiques corticaux du nerf pudendal peuvent être altérés.

B – Sclérose en plaques :

D’une manière très habituelle, les troubles urinaires de la sclérose en plaques s’accompagnent d’une altération des explorations électrophysiologiques périnéales.

La latence sacrée est souvent allongée témoignant d’une plaque du cône terminal.

Les potentiels évoqués cérébraux du nerf pudendal sont souvent abolis, bien corrélés à l’existence d’une vessie neurogène ou à une impuissance érectile.

C – Syndrome de la queue-de-cheval :

Quelle que soit l’étiologie du syndrome de la queue-de-cheval (compression par hernie discale, tumeur, lésion vasculaire), l’étude des latences sacrées est fondamentale, d’une part pour préciser le diagnostic avec lésion de l’arc réflexe sacré (allongement de la latence), d’autre part pour préciser la bilatéralité de l’atteinte (comparaison droite-gauche des latences), et enfin pour préjuger du pronostic (avec présomption de récupération potentielle de la motricité vésicale ou anorectale en cas de préservation des latences réflexes).

D – Neuropathies périphériques :

Qu’il s’agisse de diabète, de neuropathie alcoolique, de pathologies congénitales, de lésions toxiques ou inflammatoire, les neuropathies périphériques s’accompagnent volontiers de troubles urinaires et surtout génitosexuels.

Les explorations périnéales (mesure de la vitesse de conduction du nerf dorsal, étude des réponses cutanées sympathiques, analyse des potentiels cérébraux) permettent d’apporter des arguments en faveur de l’organicité des troubles et du caractère complet ou incomplet de l’atteinte.

E – Paraplégie traumatique et autres lésions médullaires :

Les troubles urinaires sont d’une extrême fréquence au cours des lésions médullaires, notamment traumatiques.

Le comportement vésicosphinctérien (« vessie automatique » des lésions suprasacrées, vessie hypoactive flasque des lésions sacrées), et partant, le pronostic et le traitement de ces troubles urinaires dépendent en grande partie de l’intégrité du cône médullaire sacré où est intégrée l’activité réflexe.

L’étude des latences du réflexe bulbostrié permet d’appréhender l’intégrité des métamères sacrés, justifiant par exemple une surveillance urodynamique soutenue afin de ne pas méconnaître un automatisme vésical non cliniquement symptomatique (hyperactivité vésicale, défaut de compliance) susceptible de dégrader à bas bruit l’appareil vésical, voire rénal.

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